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Le drame des Yuan « Pluie sur la Xiao et la Xiang »

Présentation et traduction du IIIe acte de Xiao Xiang yu 瀟湘雨 de Yang Xianzhi 楊顯之 (deuxième moitié du XIIIe siècle)
Isabella Falaschi

Texte intégral

And it’s a hard
And it’s a hard
It’s a hard rain’s a-gonna fall.

(Bob Dylan)

Présentation

  • 1 Connue aussi sous le titre Xiao Xiang ye yu 瀟湘夜雨 (Pluie nocturne sur la Xiao et la Xiang), la pièce (...)

1Lors d’une de nos entrevues, Jacques Pimpaneau m’avait fait part de son désir de traduire ou de voir traduite en française la pièce zaju 雜劇 d’époque Yuan, Xiao Xiang yu 瀟湘雨1 (Pluie sur les rivières Xiao et Xiang), composée par Yang Xianzhi 楊顯之 (deuxième moitié du XIIIe siècle). Ce souhait n’ayant pu être réalisé, j’ai saisi cette précieuse occasion qui m’a été si généreusement offerte de rendre hommage à sa mémoire pour reprendre le flambeau, en proposant la traduction du IIIe acte. La pièce plonge toutefois le lecteur au sein d’un récit sinistre, destiné inévitablement à heurter une sensibilité moderne : y est représenté, en effet, le calvaire d’une femme qui, après avoir été reniée et condamnée à mort par son époux, finira par consentir à l’épouser à nouveau. Ce remariage, sombre dénouement, est justifié par des raisons tellement pragmatiques ou cyniques, qu’il nous force à prendre en compte l’idée qu’à l’époque où la pièce fut créée, il ait peut-être moins choqué les consciences.

  • 2 Ces poèmes ne doivent pas être confondus avec les quatrains habituels d’entrée et de sortie de scèn (...)
  • 3 J.I. Crump, Chinese Theater in the Days of Kublai Khan. Tucson : The University of Arizona Press, 1 (...)

2Mais au-delà de son intrigue, comme J. I. Crump, dans son Chinese Theater in the Days of Kublai Khan, l’a mis en lumière, Xiao Xiang yu représente un cas assez unique dans le répertoire dramatique des Yuan : en laissant ses dix personnages déclamer (chanter ?) vingt-trois longs poèmes ci  詞 tout au long des quatre actes2 — jusqu’à un IVe acte qui se présente comme une suite de dix poèmes déclamés par cinq acteurs —, le dramaturge se démarque de la règle sans doute trop contraignante des zaju de n’accorder les parties chantées et versifiées qu’au seul protagoniste masculin (zhengmo 正末) ou féminin (zhengdan 正旦)3. Avec cette prise de liberté par rapport aux normes établies, cette pièce pionnière se rapproche sensiblement de la pratique du théâtre du Sud, nanxi 南戲, qui permettait à tous les acteurs de pouvoir développer leurs sentiments, leurs états d’âme (et leurs talents) dans les airs chantés.

  • 4 Zhong Sicheng 鍾嗣成, Lugui bu 錄鬼簿 (Registre des fantômes, 1330), in Zhongguo gudian xiqu lunzhu jiche (...)
  • 5 Voir Fu Lijun, Derivation in Chinese Literature: The Archetypal Story of the Unfaithul Scholar-Husb (...)

3L’auteur, Yang Xianzhi, était un contemporain du dramaturge Guan Hanqing 關漢卿 avec qui, d’après le Luguibu 錄鬼簿, il aurait discuté d’art dramatique4. Des huit pièces qui lui sont attribuées, seul deux nous sont parvenues : Xiao Xiang yu et Kuhan ting 酷寒亭 (Le pavillon du froid cruel). Comme Guan Hanqing, il aurait passé sa jeunesse à Dadu (Pékin), centre de la vie théâtrale de l’époque mongole, pour vraisemblablement déménager plus tard à Hangzhou, après la conquête des Song du Sud en 1279. Pluie sur la Xiao et la Xiang semblerait avoir été créée à Hangzhou, car l’on y ressent l’influence de drames nanxi de style méridional traitant de l’histoire du lettré infidèle. Plus particulièrement, Yang Xianzhi semble s’être inspiré de la pièce Zhang Xie zhuangyuan 張協狀元 (Zhang Xie Premier Lauréat), dont la date de composition se situe entre 1235 et 12795.

L’intrigue

  • 6 C’est ce que l’on peut déduire de la figure de Zhang Tianjue, le père de la protagoniste, qui est u (...)

4Venons à présenter l’intrigue de la pièce, qui met en scène une dizaine de personnages. L’action se déroule sous la dynastie des Song du Nord6. Dans le prologue, le veuf Zhang Tianjue 張天覺, censeur de la cour impériale, après avoir été rétrogradé par la cour, est exilé à Jiangzhou 江州. Dans son périple vers sa nouvelle destination, alors qu’il traverse la Huai 淮 avec sa fille Cuiluan 翠鸞, âgée de dix-huit ans, une tempête survient et renverse le bateau. Le père est vite porté disparu, tandis que Cuiluan, désormais seule au monde et sans appui, est sauvée par un pêcheur de passage, Cui Wenyuan 崔文遠, qui décide d’en faire sa fille adoptive. Avec cette adoption, elle change de statut social, un fait qui ne sera pas anodin dans la suite des événements. Après quelque temps (acte I), l’arrivée dans leur foyer de Cui Tong 崔通, un neveu du pêcheur en route pour la capitale afin d’y passer les examens de fonctionnaire, provoque l’émoi chez les deux jeunes gens. Encouragés par l’oncle, ils s’unissent au cours d’une cérémonie de mariage à l’issue de laquelle Cui Tong part pour la capitale. Devant les appréhensions de Cuiluan qui craint d’être abandonnée, il jure sur le Ciel et la Terre qu’il reviendra la chercher.

5Néanmoins, au IIe acte, lorsqu’il sera classé au premier rang et que l’examinateur impérial en chef Zhao Qian 趙錢 lui proposera la main de sa fille (Mlle Zhao, ici dans le rôle de la chadan 搽旦, la mégère), il n’aura ni le courage, ni le désir d’avouer avoir déjà contracté un premier mariage. Le statut social de cette seconde femme étant bien supérieur à celui de Cuiluan, il célèbre les noces sans états d’âme et part avec sa nouvelle épouse s’installer en tant que magistrat dans le district de Qinchuan 秦川. Trois ans après ces faits, Cuiluan, qui attend toujours son retour, ayant eu vent de sa nomination à Qinchuan, est encouragée par Cui Wenyuan à le rejoindre. Une fois arrivée à destination, après un long périple sous la pluie, ses espoirs d’heureuses retrouvailles seront vite déçus. Ainsi, lorsque la nouvelle épouse, se sentant trahie, commence à injurier Cui Tong avec insolence, ce dernier, ne voulant pas perdre la face devant elle, proclame que Cuiluan n’était autre qu’une ancienne servante de sa famille qui s’était enfuie après lui avoir volé une aiguière en argent. Pris de panique, il profite de son rôle de magistrat pour ordonner à ses serviteurs non seulement de la fouetter sévèrement, mais de lui inscrire sur le front les caractères de « servante en fuite » (taonu 逃奴) et de la conduire à l’île Shamen 沙門島, destinée aux prisonniers. Au gardien destiné à l’escorter, il intime de lui rendre le voyage tellement éprouvant, à force de coups, qu’elle ne parvienne pas à destination. Mlle Zhao, à la fois étonné et sceptique quant à cette version des faits, lui propose de la faire demeurer auprès d’eux comme domestique ; mais l’homme, inquiet d’être démasqué, demeure inflexible.

  • 7 Le nom du fleuve n’étant pas précisé, nous pouvons présupposer, comme l’exigerait le titre, qu’il s (...)

6À l’acte III, dont on présente ici la traduction, Zhang Tianjue, le véritable père de Cui Luan qui avait en fait survécu à la tempête du Ier acte et était devenu grand inspecteur du tribunal pénal, est en route pour une mission officielle afin de juger des fonctionnaires corrompus. Surpris par une tempête d’une rare violence, il choisit de passer la nuit dans une station de relais au bord du fleuve7. Au même moment, Cuiluan, mise à la cangue, marche sous les coups du gardien qui l’escorte sous la même pluie torrentielle. Lorsque le garde aperçoit, à l’acte IV, cette même station où le père de Cui Luan avait trouvé un abri, il décide d’y faire une halte. Le hasard veut que dans cette même auberge finisse par y trouver refuge aussi Cui Wenyuan, le père adoptif qui, étant resté sans nouvelles de sa fille, était parti à sa recherche. Le garde et Cuiluan doivent coucher dehors sous un avent pour ne pas déranger le « grand magistrat » qui loge sous le même toit. La nuit, elle éclate en sanglots. Ses pleurs désespérés parviennent à l’oreille de son père biologique qui ne peut que s’émouvoir en pensant à sa fille perdue. À l’aube, alors qu’il demande à voir la femme qui l’avait tant bouleversé, nous assistons aux retrouvailles du père et de la fille. Après avoir été mis au courant des tristes évènements, l’homme ordonne sur-le-champ de lui enlever les fers et la cangue et de faire arrêter les coupables. Cuiluan, qui retrouve ainsi son statut et son identité de fille d’un grand officier, se charge fièrement de l’expédition : elle ramènera ainsi Cui Tong et sa femme devant le père resté au relais. Pourtant, lorsque ce dernier s’apprête à mettre à exécution leur condamnation à mort, survient Cui Wenyuan qui supplie sa fille adoptive d’accorder le pardon à son neveu. Celle-ci est soudain tiraillée entre deux sentiments contraires, où l’extrême réticence à l’idée de renouer avec celui qui avait juré sa mort se mêle à la compassion et à l’attachement qu’elle sent renaître pour lui. Guidée par un sentiment de dette envers celui qui lui avait sauvé la vie, elle finit néanmoins vite par céder, en avouant que « le mariage est la grande affaire de toute une vie » (zhongshen zhi shi 終身之事) et que le destin ne lui aurait peut-être plus offert d’occasion de trouver un mari. Ainsi, le lettré réintègre son poste, Cuiluan redevient son épouse et, par un curieux jeu de renversement, Mlle Zhao est dégradée au rôle de femme de chambre (meixiang 梅香). Cela n’empêchera pas cette dernière d’avertir sa rivale qu’elle ne « pourra pas s’attendre à garder son mari exclusivement pour elle » (yao du zhan laogong, zhe ge bu xu ni de 要獨佔老公,這個不許你的). La morale de l’histoire, au fond, c’est elle qui la prononce : étant Cuiluan, la fille d’un magistrat socialement bien plus puissant que son propre père, c’est la position sociale de ce dernier qui détermine le destin d’une femme. Ce soi-disant heureux dénouement, avec cette « grande réunion finale » (da tuanyuan 大團圓), laisse tout de même au lecteur l’amère sensation que justice n’a pas été rendue et que les seules à avoir payé le prix des méfaits du mari sont ses deux épouses innocentes.

  • 8 Voir Ching-Hsi Perng, « ‘With This Door Between us’: Visualizing Pathos on The Rain on Xiaoxiang », (...)

7Ching-Hsi Perng a mis en relief comment la pièce, en raison des nombreux contrastes et parallélismes qu’elle offre, semblerait construite sur le principe du « point-contrepoint » qui contribue à rendre la construction particulièrement équilibrée8. Au niveau de l’agencement des personnages, le couple formé par les deux personnages féminins de Cuiluan et de la chadan, la nouvelle épouse, dont les rôles s’interchangent, trouve un écho dans une autre paire du même genre, composée par l’examinateur impérial Zhao Qian et Cui Tong (mais l’on peut trouver des correspondances également entre les trois figures de pères, chacun avec un statut social différent). Même en termes d’action, l’on assiste à des scènes qui semblent avoir été mises volontairement en contraste : Cuiluan se rend à deux reprises à Qinchuan, là où son mari Cui Tong avait assumé ses fonctions. Lors de sa première visite, elle sera encerclée d’une cangue autour du cou et emmenée comme une criminelle vers l’île des prisonniers ; mais à l’occasion de son retour, les rôles seront inversés et ce sera au tour de son mari et de son épouse d’être arrêtés. D’autres situations et personnages jouent des actions ou des rôles parallèles : Cui Wenyuan, par exemple, qui avait sauvé Cuiluan de la noyade et arrangé le mariage entre elle et son neveu, contribuera à sauver in extremis ce dernier de la peine de mort, prononcée à son encontre par le père magistrat.

  • 9 J.I. Crump, Chinese Theater..., op. cit., p. 194.

8Néanmoins, à côté de la grande « théâtralité de la pièce », il faut saluer la simple intensité lyrique de l’acte III qui, selon les mots de Crump, « consiste presque entièrement dans la description des misères du voyage de la délicate Cuiluan vers une colonie pénitentiaire sous les fortes pluies d’automne et où les interjections brusques, mais souvent sympathiques de son gardien, fournissent un excellent contraste »9.

Commentaire du IIIe acte

9Cet acte III que nous avons choisi de traduire ici est assurément l’un des plus tristes et poignants du corpus dramatique des Yuan. Il reprend le topos d’une figure martyrisée que les zaju des Yuan exploitent souvent : si la première figure qui nous vient à l’esprit est Dou E dans Dou E yuan 竇娥冤 (L’injustice subie par Dou E) de Guan Hanqing, c’est surtout le personnage de Haitang 海棠 dans Huilan ji 灰闌記 (Le cercle de craie) de Li Xingdao 李行道 qui frappe pour sa similitude avec Cui Luan. Victimes de l’arbitraire et de la méchanceté d’autrui, les deux héroïnes non seulement se voient niées dans leur identité respective (l’une de mère, l’autre d’épouse), mais se retrouvent au IIIe acte dans un décor en tout point semblable. Comme Cuiluan, Haitang aussi marche couverte de blessures vers le lieu de son supplice, sous une tempête de neige, chancelante sous le poids de la cangue et escortée par deux gardes qui la frappent. Il est indéniable que les deux dramaturges ont voulu offrir une image extrême du mal radical et du non-sens auxquels la vie d’un individu peut être confrontée. Lorsque Cui Luan déplore que, dans ces « landes sauvages et désolées », il n’y ait personne qui puisse témoigner en sa faveur de l’injustice dont elle est victime, les sentiments de solitude, de nihilisme ou d’horreur sont poussés à leur comble.

10Une donnée majeure de l’acte est représentée par la tempête de pluie et de vent qui se déchaine violemment sur les protagonistes : car, si elle nous permet de mieux saisir le sens du titre conféré à ce drame, elle se prête à deux lectures contradictoires qui trouvent pourtant chacune leur légitimité dans les airs chantés par l’héroïne. La première interprétation qui vient à l’esprit est celle d’une nature qui, au mieux, est radicalement indifférente au destin d’une innocente et, au pire, est cruelle (marâtre nature), car elle semble conspirer avec les bourreaux, en s’acharnant sur une victime innocente. Sous cette perspective, toute lumière, toute harmonie, tout lien entre l’homme et le Ciel sont rompus :

  • 10 Voir l’air « Ivre, à l’ombre des fleurs ».

J’entends soudain vrombir un vent sinistre qui s’abat sur le bois,
Et de surcroît cette pluie battante, comme déferlant de jarres et chaudrons.
Ployée sous la douleur, souffrant les affres de ce périple,
Je suis oppressée à la fois par le vent et par la pluie :
Quand ces gouttes me laisseront-t-elles un répit ?
Il est flagrant que l’on veut blesser à mort une jeune fille délicate,
Mais dans ces landes désolées et sauvages, qui pourrait en être le témoin ?10

  • 11 Voir l’air « L’oriole joyeuse dans son envol ».

Je ne trouve aucune voie de secours, tant elle est forte !
Qui sait, sur l’île Shamen, où des Enfers se trouve la porte ?
Hélas ! L’air s’est condensé en un brouillard nuageux…
En marchant, ma jambe a glissé dans une ornière,
Et peu s’en faut que je ne me luxe l’os de ma hanche…
Comment braver cette pluie ruisselante, frappant droit sur ma tête,
Ainsi que cette boue fétide, glissante sous mes pieds ?11

11À la fin de l’acte, pourtant, une simple phrase prononcée par Cuiluan (tian yu ren xin jin xiangzhu 天與人心緊相助) semblerait offrir une lecture diamétralement opposée de la tempête qui, loin d’incarner une nature hostile, serait, au contraire, la manifestation d’un Ciel compatissant :

Le ciel et l’homme sont intimement entreliés ;
Seul les traces de mes larmes se rassemblent tout au long de mon visage…
Oh Ciel ! Oh Ciel !
Il est bien vrai que mes larmes se répandent plus abondantes que cette pluie d’une nuit d’automne !

12Tout en renvoyant à la pluie qui tambourine sans trêve au IVe acte d’une autre pièce célèbre — Wutong yu 梧桐雨 (Pluie sur le sterculier) de Bai Pu 白樸 —, le Ciel ici, selon l’idée de la résonnance intime entre tian 天 et ren 人, manifesterait au contraire toute sa commisération, voire sa rage, contre une telle iniquité : en grondant et en pleurant, il ne ferait que traduire extérieurement l’immense souffrance de Cuiluan. Si l’on poursuit cette lecture, nous pouvons même considérer la tempête come propice au revirement de la situation, puisqu’en contraignant les différents protagonistes à trouver un refuge dans le même relais, elle permet les retrouvailles père-fille du IVe acte.

  • 12 Perng, « ‘With This Door Between us’… », op. cit., p. 74. 

13Dans ce paysage inondé par les eaux, s’insèrent en contrepoint les échanges plus ou moins grotesques entre Cui Luan et son gardien, qui confèrent un certain dynamisme dramatique à une scène par ailleurs plus lyrique et statique12. Au début du périple, l’attitude de cet homme brutal à son égard est particulièrement hostile et menaçante :

CUILUAN : « Frère, tu ne fais que poser ton bâton sur moi pour me battre sans répit ! Serait-il possible que ton cœur soit devenu si dur qu’il ne te reste la moindre étincelle de compassion ? (Elle fait une grimace de douleur). Oh Ciel ! Ciel ! Je suis vraiment victime d’une terrible injustice ! »

14Mais c’est justement cette mention d’un manque de compassion (cibei 慈悲) qui ouvre peut-être une brèche dans le cœur sec du gardien. D’ici peu, en effet, une indication scénique précise que Cuiluan doit mimer l’acte de « glisser en tombant » (zou diedao 走跌倒). Cette chute déclenche un court sketch comique entre eux — un genre de pantomime devenue presqu’un poncif dans les pièces des Yuan —, destiné sans doute à alléger la tension du moment, en suscitant l’hilarité du public :

GARDE : Comment es-tu tombée ?
CUILUAN : Frère, ça glisse ici !
GARDE : Des centaines de milliers d’hommes marcheraient ici sans tomber… alors que toi, bien sûr, tu dois tomber ! À présent, je vais passer par là… Si je glisse, nous serons quittes… Mais si je ne glisse pas, je te réduirais les jambes en quatre à force de coups ! (Il marche et tombe en glissant). Viens vite me relever ! Euh, mademoiselle… Marche plutôt de ce côté… ici c’est un peu glissant...

15Cet échange, paradoxalement, produit l’effet de rapprocher un tant soit peu le gardien de la jeune fille, puisqu’en glissant comme elle dans la vase, il partage pour un instant les affres de sa condition. Le geste qui s’enchaîne, où il cherche et ramasse le peigne de Cuiluan dans la boue, en le lavant pour elle avant de le lui tendre, semble prouver que la graine de compassion a pris racine. Ce sont tous des gestes infimes, des bribes de mots, mais c’est comme si une petite lueur d’humanité et de civilité s’était levée. Un lien entre eux s’est établi. Et alors que sa cruauté semble reprendre le dessus, grâce à cette étincelle de pitié retrouvée en lui, il parvient à lui offrir deux occasions pour pouvoir s’épancher : tout d’abord, il souhaite connaître les « trois choses » qui accroissent son désespoir (et qu’elle affirmera être les nuages noirs, les rafales du vent et la pluie torrentielle) ; peu après, lorsqu’il accepte, non sans rechigner, de lui offrir le bras pour l’aider à traverser la rivière, il se montre soudain intrigué par elle et veut enquêter sur son sort :

GARDE : Alors là, tu m’embêtes à mort ! Allez, je vais t’aider à traverser. Mais dis-moi une chose : comment tu t’es retrouvée à être servante dans cette famille ? Et l’argent que tu leur as volé, où est-ce qu’il est passé ? Car il se trouve qu’à présent il m’a demandé de t’expédier dans l’autre monde… Allez, parle-moi franchement.

16En lui accordant la parole, le garde permet à Cuiluan de saisir son cas sans hésitation :

CUILUAN : Mais je n’ai jamais été servante dans leur famille et je n’ai pas volé de l’argent !

17Après qu’elle ait enchaîné un air d’accusation contre Cui Tong, elle semble parvenir à le convaincre in extremis :

GARDE : À l’entendre ainsi, c’est bien le magistrat qui a eu tort… Mais je ne peux rien faire à présent pour te pardonner… Allez, avance !

  • 13 Ibidem, p. 77.

18Perng a souligné à juste titre comment il évitera de mettre à exécution l’ordre meurtrier, en trouvant pour eux un « logement pour la nuit ». Et de conclure que, même s’il est loin d’être devenu son avocat dans ces landes désolées, il aura « parcouru un long chemin vers la compréhension et la sympathie à son égard »13. Cuiluan, d’ailleurs, dans son extrême solitude et désespoir, finira même par le désigner comme son « protecteur » :

[…] Lésée, lésée, lésée comme je suis, à qui pourrais-je dénoncer un tel méfait ?
Frère !
Allez, allez, allez… C’est toi mon protecteur !

19Le témoin de l’injustice, tant évoqué au cours de l’acte, s’avère être lui. N’oublions pas à cet égard l’ultime geste de pitié que l’homme manifestera au IVe acte, lorsqu’il partagera avec elle sa galette (à moins qu’il ne la lui laisse entièrement).

20De la sorte, l’un des éléments qui constituent l’originalité de cette pièce me semble résider dans le fait d’avoir tenté d’extraire ses différents protagonistes du carcan du système des rôles, en leur conférant des traits moins stéréotypés et plus ambigus. Mlle Zhao, par exemple, malgré son rôle de chadan, est loin d’être un personnage dénué de sympathie ou d’humanité et le traitement que Cui Luan, éprise de jalousie, lui réserve à la fin est particulièrement sévère. Cuitong aura beau être pardonné et retrouver l’estime de son épouse et de son beau-père, il n’incarnera pas moins la figure d’un homme lâche, capable de se métamorphoser en un assassin sans pitié.

21Pour avoir ainsi défié les conventions du genre, complexifié les rôles et proposé un dénouement avec une da tuanyuan qui prête le flanc à deux interprétation opposées, Yang Xianzhi a créé un drame, dont le thème — le féminicide — hante encore les consciences, touchant ainsi, tristement, les cordes de la modernité.

Traduction de l’acte III

22(Zhang Tianjue entre en scène suivi de son serviteur Xing’er) :

23ZHANG TIANJUE (récité) :

  • 14 Jiangzhou 江州, actuelle ville de Jiujiang 九江, dans le Shanxi.

Dans mon voyage vers Jiangzhou14, trois printemps j’ai contemplé :
Si, le cœur brisé, je retourne ma tête, les larmes imprègnent mon mouchoir.
Dans cette morne solitude, il n’y a que la lune entourée de nuages,
Jadis, elle brillait, lorsque nous fûmes dispersés.

  • 15 Sous les Yuan, le titre de Lianfangshi 廉訪使correspondait à celui de « Commissaire chargé de la Surve (...)

24Le vieux qui vous parle s’appelle Zhang Tianjue. Trois ans déjà se sont écoulés depuis que moi et ma fille Cuiluan avons été renversés dans la Huai. Par la grâce de Sa Majesté, il a été décrété que j’étais quelqu’un de capable, intègre, doté de force d’âme et tenace… quelqu’un qui a toujours eu à cœur de servir sa patrie, sans jamais nourrir des pensées pour les siens. J’ai ainsi été appointé au poste de Commissaire Judiciaire15 et ai reçu en don l’épée de l’autorité et la tablette en or qui confèrent le droit de pouvoir exécuter quelqu’un avant même d’en faire la déposition au trône. C’est donc par la grâce impériale que je me dois tant d’enquêter sur des officiers en abus de pouvoir et sur leurs subalternes corrompus que de faire lumière sur des procès au jugement opaque. Et quand bien même mes forces déclinent, comment oserais-je craindre la fatigue liée à mon service ? Pourtant, le fait d’avoir trop songé à ma fille Cui Luan m’a affligé à un tel point que ma barbe et mes temples ont blanchi et ma vue s’est offusquée. Je ne suis point du tout comme autrefois. Depuis quelques années déjà j’ai envoyé des gens partout mener des enquêtes, mais je n’ai jamais reçu de nouvelles. Et voici que l’automne est revenu… Ah, comment affronter ce vent et cette pluie glacials, avec ces oies sauvages qui traversent le ciel et ces insectes qui gémissent ! Face à ce paysage qui se déroule devant mes yeux, la moindre chose est pour moi source de tristesse et d’angoisse ! Xing’er, le ciel s’est assombri et la pluie commence à déferler… Accélérons un peu le pas ! (Il récite un poème) :

  • 16 Ququ 區區 acquiert ici le sens de « trivial, insignifiant ».

Depuis que je suis devenu un grand dignitaire,
J’ai supporté les tracas liés à la moindre des affaires16.
Ma campagne, mon jardin… sont comme un songe lointain,
Pour près de dix ans, mon cheval sellé a soulevé la poussière.
De ma fille chérie, je fus séparé
Et tout mon héritage fut englouti et dispersé.
C’est vraiment au crépuscule d’un jour d’automne,
Que les pensées du voyageur se font plus sombres.

  • 17 Citation d’un distique tiré du lüshi « Ju » 句 (Vers) de Jia Dao 賈島 (779-843).

25Regarde-moi cette pluie qui ruisselle, mêlée à ces couches de nuages filantes ! Les jaunes chrysanthèmes rappellent les yeux d’animaux dorés et les feuilles rouges sont comme des écailles de dragons de feu. Entre les montagnes escarpées, on entend gronder majestueuses les eaux d’une rivière. Mon jeune serviteur semble exténué par le chemin devant nous : on dirait une âme hagarde. Xing’er, où nous mène la route ?
XING’ER : Maître, le Relais du Fleuve est juste un peu plus loin devant nous.
ZHANG TIANJUE : Si on atteint ce relais, je me poserai pour un bon moment. Il est bien vrai : « Le vent pousse le voyageur sur l’immense rivière, mais la pluie le retient dans l’auberge solitaire »17 !
(Ils sortent. Cuiluan rentre en scène, avec une cangue au cou, escortée par un garde).
CUILUAN : Quelle sacrée pluie !
(Récité)

La jeune fille du gynécée que j’étais naguère,
Hélas ! a perdu tous ses appuis.
Condamnée à devoir abandonner ses lieux si chers
La voilà qu’elle affronte un torrent de pluie !

26Frère, tu ne fais que poser ton bâton sur moi pour me battre sans répit ! Serait-il possible que ton cœur soit devenu si dur qu’il ne te reste plus la moindre étincelle de compassion ? (Elle fait une grimace de douleur). Oh Ciel ! Ciel ! Je suis vraiment victime d’une terrible injustice !
(sous l’air Ivre, à l’ombre des fleurs, mode Huangzhong)

J’entends soudain vrombir un vent sinistre qui s’abat sur le bois,
Et de surcroît cette pluie battante, qui semble déferler de jarres et chaudrons.
Ployée sous la douleur, souffrant les affres de ce périple,
Je suis oppressée à la fois par le vent et par la pluie :
Quand ces gouttes me laisseront-t-elles un répit ?
Il est flagrant que l’on veut blesser à mort une jeune fille délicate,
Mais dans ces landes désolées et sauvages, qui pourrait en être le témoin ?

27GARDE : Dépêche-toi un peu, là ! La pluie est de plus en plus forte !
CUILUAN : (sous l’air L’oriole joyeuse dans son envol)

  • 18 Fendu 酆都 est le nom d’une ville du Sichuan (auj. Fendu 丰都). Mais d’après les croyances religieuses, (...)

Je ne trouve aucune voie de secours, tant elle est forte !
Qui sait, sur l’île Shamen, où des Enfers18 se trouve la porte ?
Hélas ! L’air s’est condensé en un brouillard nuageux…
En marchant, ma jambe a glissé dans une ornière,
Et peu s’en faut que je ne me luxe l’os de ma hanche…
Comment braver cette pluie ruisselante, frappant droit sur ma tête,
Ainsi que cette boue fétide, glissante sous mes pieds ?

28(Elle commet le geste de tomber).
GARDE : Comment es-tu tombée ?
CUILUAN : Frère, ça glisse ici !
GARDE : Des centaines de milliers d’hommes marcheraient ici sans tomber… alors que toi, bien sûr, tu dois tomber ! À présent je vais passer par là… Si je glisse, nous serons quittes… Mais si je ne glisse pas, je te réduirais les jambes en quatre à force de coups ! (Il marche et glisse). Viens vite me relever ! Euh, mademoiselle… Marche plutôt de ce côté… ici c’est un peu glissant...
CUILUAN : (sous l’air Sortie de l’armée)

Eh bien, il m’est très difficile d’avancer d’un pas
Tout est si trempé qu’il n’y a pas un seul endroit où poser le pied.
Si j’ai pu sécher mes vieux habits au cours du repas,
En reprenant le chemin, même mon écharpe autour du ventre s’est imbibée.
Et lorsque j’ai trébuché, j’ai perdu mon peigne en bois de jujubier.

29GARDE : Qu’il y a-t-il encore ?
CUILUAN : J’ai perdu mon peigne en bois !
GARDE : Laisse tomber ! Avance vers là-bas et je t’en achèterai un autre !
CUILUAN : Frère, cherche bien. Arrivé là-bas, toi aussi tu pourrais avoir besoin de te coiffer !
GARDE : Elle m’embête à mort celle-là ! (Il piétine quelque-chose) Je crois que l’ai trouvé ! Je vais lui enlever la boue dans cette flaque…Voilà ton peigne et, maintenant, tu avances !
CUILUAN :
(sous l’air Deuxième avant la coda)

Trois sont les choses que mon cœur appréhende qui peuvent m’ôter la vie.

30GARDE : Et quelles seraient ces trois choses ? Dis-moi.

31CUILUAN :

  • 19 L’expression exacte pour désigner la pluie battante est ici jian gan xuan ma 箭簳懸麻, litt. « flèches (...)

Ces nuages…
Qui en masquant le ciel et le soleil, ont occulté ces landes sauvages.
Ce vent…
Juste assez violent pour faire rouler les pierres, s’envoler le sable et arracher les arbres.
Cette pluie…
Qui, telle des flèches tombant du ciel19, accroit ma peine immense.

32GARDE : Si tu veux avancer, alors marche ! Autrement tu vas en goûter !
CUILUAN : Frère !
(sous l’air La chèvre sur le flanc de la montagne)

J’aimerais que tu calmes ta colère
Et que tu examines les choses d’autres manières.
Pourquoi, avec ce ton hargneux,
Vomir jusqu’à trente injures ?
Ce chemin est raboteux,
L’eau nous entoure.
Pressé par toi, je tremble et n’ose avancer.
Si, en outre, tu ouvres mes plaies, comment puis-je le supporter ?
C’est à peine si je pourrais accomplir un demi pas.

33Frère, t’auras beau me frapper à mort…

Tu n’en obtiendras pas un grand bénéfice !

34GARDE : Arrête un peu de bavarder, là… Ces jours-ci les pluies d’automnes sont abondantes… marcher chaque jour est plus dur que la veille. Alors, dépêche-toi et suis-moi !
(sous l’air Le vent qui souffle sur la terre)

Regarde-le comme il hurle, avec ses yeux colériques et les pupilles serrées !
Sa rage soudaine a enflé toute sa poitrine.
Moi, trempée jusqu’à la moelle, je ne peux qu’avancer,
Mais hélas !
Ce corps si meurtri, je ne puis le bouger.

35GARDE (en buvant) : T’avances toujours pas ?!
CUILUAN :

Je traîne un pas, puis encore un autre pas…
M’arrêterai-je jamais ?
Que j’aille d’ici ou delà,
Il n’y a que des lacs et des rivières.
Regarde comme ces rafales d’un mauvais vent
Me retiennent violemment :
Toute trace de voyageur s’est évanouie.
Les eaux, tumultueuses et blanchâtres, se joignent à la tombée de la nuit.

36Frère !

Comment comptes-tu me faire passer ?

37GARDE : Il y a quoi encore ?
CUILUAN : Frère ! L’eau est si profonde, la boue si glissante… comment suis-je censée le traverser ? Par pitié, frère, aide-moi à passer !
GARDE : Alors là, tu m’embêtes à mort, c’est sûr ! Allez, je vais t’aider à traverser. Mais dis-moi une chose : comment t’es devenue servante dans cette famille ? Et l’argent que tu leur as volé, où est-ce qu’il est passé ? Car il se trouve qu’à présent il m’a demandé de t’expédier dans l’autre monde… Allez, parle-moi franchement.
CUILUAN : Mais jamais de la vie je n’ai été servante dans leur famille ou je n’ai volé de l’argent !
(sous l’air Disciple des quatre portes)

Je te raconterai mon frère les faits fidèlement :
Ce magistrat est bien mon époux
Et tout ce que j’ai dit est vrai... et je n’ai rien inventé !
Je l’ai cherché dans l’espoir de réunir notre foyer,
Mais ayant épousé une autre femme,
Il a affirmé que j’étais sa servante.
Je suis vraiment victime d’une injustice infâme.

38GARDE : À t’entendre ainsi, c’est bien le magistrat qui a eu tort… Mais je ne peux rien faire à présent pour te pardonner. Allez, avance !
CUILUAN :
(sous l’air L’immortel des eaux d’antan)

  • 20 Dans l’édition Yuanqu xuan 元曲選, à la place de « te hen du » 忒很毒 paraît « te lang du » 忒狼毒, litt. «  (...)
  • 21 Dans l’édition Yuanqu xuan, au lieu de « kekeke » 可可可 paraît à nouveau 他他他, « lui, lui, lui ».
  • 22 L’expression « qianzhi ci » 乾支刺, dont la traduction première est « desséché », acquiert ici le sens (...)

Lui, lui, lui… est un véritable poison20
Qui a osé, osé, osé… aveugler sa conscience pour me mener à ma perte ;
Toi, toi, toi… tu n’es qu’un féroce surveillant de prison,
Quant à moi, moi, moi… si douce et frêle, j’endure toutes les affres d’une condamnée !
Je souffre, souffre, souffre… de tous ces coups de bâton sur ma tendre peau,
Et de cette froide, froide, froide… chaîne nouée autour de mon cou.
Serait-ce possible, possible, possible21… que bien qu’innocent22, on envoie aux enfers un être vivant ?
Lésée, lésée, lésée comme je suis, à qui pourrais-je dénoncer un tel méfait ?

39Frère !

  • 23 Hushenfu 護身符, litt. « amulette, talisman ».

Allez, allez, allez… C’est toi mon protecteur23 !

40GARDE : Le soir est tombé. Avance un peu plus vite pour qu’on puisse trouver une auberge.
CUILUAN :
(sous l’air Suite et coda)

Le ciel et l’homme sont intimement entremêlés ;
Seules mes traces de larmes se rassemblent tout au long de mon visage…

41Oh Ciel ! Oh Ciel !

Il est bien vrai que mes larmes tombent plus abondantes que cette pluie d’une nuit d’automne !

42(Ils sortent).

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Notes

1 Connue aussi sous le titre Xiao Xiang ye yu 瀟湘夜雨 (Pluie nocturne sur la Xiao et la Xiang), la pièce a pour titre complet Linjiang yi Xiao Xiang yeyu 臨江驛瀟湘秋夜雨 (Le relais au bord du fleuve ou Pluie nocturne d’automne sur la Xiao et la Xiang). Nous retrouvons ce livret dans trois anthologies des Ming de livrets des Yuan. L’édition de référence est celle présente dans Gu ming jia zaju 古名家雜劇 (1588), éd. par Chen Yujiao 陳與郊, in Guben xiqu congkan 古本戲曲叢刊, réimpr. Beijing : Zhonghua shuju, 1958. La deuxième édition, qui présente des variantes par rapport à la première, est contenue dans la célèbre collection de 100 pièces des Yuan Yuanqu xuan 元曲選 (1616), éd. par Zang Maoxun 臧懋循, réimpr. Beijing : Zhonghua shuju, 1979.

2 Ces poèmes ne doivent pas être confondus avec les quatrains habituels d’entrée et de sortie de scène, déclamés par chaque acteur.

3 J.I. Crump, Chinese Theater in the Days of Kublai Khan. Tucson : The University of Arizona Press, 1980, pp. 194-95. Dans la deuxième partie livre, l’auteur a présenté la seule traduction disponible en langue occidentale de Xiao Xiang yu.

4 Zhong Sicheng 鍾嗣成, Lugui bu 錄鬼簿 (Registre des fantômes, 1330), in Zhongguo gudian xiqu lunzhu jicheng 中國古典戲曲論著集成. Beijing : Zhongguo xiju, 1959, vol. II, p. 111.

5 Voir Fu Lijun, Derivation in Chinese Literature: The Archetypal Story of the Unfaithul Scholar-Husband, Ph.D., University of Toronto, 1988, pp. 136-37.

6 C’est ce que l’on peut déduire de la figure de Zhang Tianjue, le père de la protagoniste, qui est un personnage historique des Song du Nord. Voir Songshi 宋史, 351, 16 :11095-098.

7 Le nom du fleuve n’étant pas précisé, nous pouvons présupposer, comme l’exigerait le titre, qu’il s’agisse de la rivière Xiang, là où elle rencontre la Xiao, dans la province du Hunan. La ville de Qinchuan se trouvant pourtant dans le Shanxi, il semblerait difficile qu’il s’agisse véritablement de l’un de ces deux fleuves.

8 Voir Ching-Hsi Perng, « ‘With This Door Between us’: Visualizing Pathos on The Rain on Xiaoxiang », Chinoperl Papers, n. 26 (2005-2006), p. 72.

9 J.I. Crump, Chinese Theater..., op. cit., p. 194.

10 Voir l’air « Ivre, à l’ombre des fleurs ».

11 Voir l’air « L’oriole joyeuse dans son envol ».

12 Perng, « ‘With This Door Between us’… », op. cit., p. 74. 

13 Ibidem, p. 77.

14 Jiangzhou 江州, actuelle ville de Jiujiang 九江, dans le Shanxi.

15 Sous les Yuan, le titre de Lianfangshi 廉訪使correspondait à celui de « Commissaire chargé de la Surveillance ».

16 Ququ 區區 acquiert ici le sens de « trivial, insignifiant ».

17 Citation d’un distique tiré du lüshi « Ju » 句 (Vers) de Jia Dao 賈島 (779-843).

18 Fendu 酆都 est le nom d’une ville du Sichuan (auj. Fendu 丰都). Mais d’après les croyances religieuses, c’était aussi la capitale du royaume des Enfers où résidaient principalement les morts qui n’avaient pas pu quitter le monde d’ici-bas. Ce lieu était décrit tout d’abord comme une île située parfois au Nord-Est de la Chine, près de la Corée ; à partir du VIIe siècle, ce lieu fut placé à l’Est de la province du Sichuan, près des Trois Gorges.

19 L’expression exacte pour désigner la pluie battante est ici jian gan xuan ma 箭簳懸麻, litt. « flèches en bambou et chanvre suspendu ».

20 Dans l’édition Yuanqu xuan 元曲選, à la place de « te hen du » 忒很毒 paraît « te lang du » 忒狼毒, litt. « vrai poison d’un loup », soit « bête venimeuse ».

21 Dans l’édition Yuanqu xuan, au lieu de « kekeke » 可可可 paraît à nouveau 他他他, « lui, lui, lui ».

22 L’expression « qianzhi ci » 乾支刺, dont la traduction première est « desséché », acquiert ici le sens d’« innocent ».

23 Hushenfu 護身符, litt. « amulette, talisman ».

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Pour citer cet article

Référence électronique

Isabella Falaschi, « Le drame des Yuan « Pluie sur la Xiao et la Xiang » »Impressions d’Extrême-Orient [En ligne], 16 | 2024, mis en ligne le 30 juin 2024, consulté le 24 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ideo/3614 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11z7y

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Auteur

Isabella Falaschi

Isabella Falaschi est Maîtresse de Conférences en « Langue et Littérature de la Chine classique » à l'Université de Lille. Ses travaux de recherche portent principalement sur le théâtre chinois du XIII-XVIIe siècle. Elle prépare actuellement deux traductions annotées précédées d'une étude critique de deux pièces du corpus théâtral des Yuan.

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