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AccueilNumérosTome XII n°2L’embryologie: d’un vertige l’autre

L’embryologie: d’un vertige l’autre1

Embryology: Embryology, from Vertigo to vertigo
Jean-François Nicolas

Résumés

Dans les années 1970, le problème du développement d’un embryon était perçu comme peut-être inaccessible. Quarante ans plus tard, la génétique moléculaire en a élucidé les principes explicatifs et la nouvelle embryologie réclame une refondation de la théorie de l’évolution. C’est un bref historique de ce qui s’est passé entre ces deux moments, tel que je l’ai vécu, que je présente ici. Les questions qui m’ont retenues sont : 1) quels furent les moteurs de cette histoire ; 2) une nouvelle théorie du développement s’ensuit- elle et où se place-t-elle par rapport à celles d’avant cette révolution.

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Texte intégral

  • 1 Du vertige à contempler le déroulement d’un développement au vertige devant les stupéfiants résulta (...)
  • 2 Boris Ephrussi (1901-1979) a occupé en 1946 la première chaire d’Université en Génétique en France. (...)
  • 3 Michel Morange, Directeur du Centre Cavailles d’histoire et de philosophie des sciences de l’ENS, e (...)
  • 4 Jacques Monod (1910-1976) et François Jacob (1920-2013), chercheurs à l’Institut Pasteur, pères fon (...)

1Au siècle dernier la biologie a été révolutionnée par l’émergence de la biologie moléculaire, alliance de la biochimie, la science des molécules, et de la génétique, la science de la transmission et de la variabilité des « caractères mendéliens ». L’origine de ce domaine remonte aux premières tentatives de relier le génotype au phénotype avec George Wells Beadle, Boris Ephrussi2 et Edward L. Tatum et l’hypothèse « un gène, une enzyme » (Beadle and Ephrussi, 1936 ; Beadle and Tatum, 1941). Leur méthode consistait à déduire les bases du phénotype de mutants. Les performances de la biologie moléculaire furent exceptionnelles (Hayes, 1970 ; Morange, 2020)3. Avec ces méthodes dans les années 1970, François Jacob et Jacques Monod4 montraient que le produit de certains gènes, les gènes régulateurs, (Jacob and Monod, 1961 ; Monod and Jacob, 1961) et de certaines protéines, dites allostériques (Monod et al., 1965), exécutent des opérations logiques, propres à expliquer les phénomènes biologiques complexes. Deux découvertes fondamentales (Morange, 1987).

2Les biologistes moléculaires se sont alors attaqués aux problèmes du développement. Sydney Brenner a créé son modèle génétique, C. Elegans, un ver, F. Jacob a choisi un mammifère, la souris (Morange, 2000 ; Morange and Peyrieras, 2002), George Streisinger le poisson zèbre, d’autres, favorisant l’approche biochimique, ont rejoint les modèles amphibiens (J. Gerhart, D. Melton, R. De Robertis) ou l’oursin (E. Davidson) avec lesquels cependant l’approche génétique est impossible.

3Avant ce tournant, des généticiens « drosophilistes » s’intéressaient au développement en étudiant de curieux mutants (Morgan, 1926) dont certains dits homéotiques. Si la drosophile ne fut pas le choix des nouveaux venus c’est parce qu’ils pensaient que son étude n’aiderait pas à la compréhension du développement des vertébrés.

  • 5 Nicole Le Douarin, directrice de l'Institut d'Embryologie après Étienne Wolff. Ses travaux sur la c (...)

4Enfin, les embryologistes en place, après les extraordinaires succès de l’embryologie expérimentale, limités par l’échec de la caractérisation de « l’inducteur » (voir 2), cherchaient d’autres voies. Elles furent un échec, à l’exception de celle de Nicole Le Douarin qui à partir de 1969 allait écrire une des plus brillante page de cette discipline (Le Douarin and Kalcheim, 2009 ; Le Douarin, 1969)5. Conrad H. Waddington, de son côté, concevait, après James M. Baldwin et Ivan I. Schmalhausen, les concepts de canalisation et d’assimilation génétique (cf. glossaire) (Waddington, 1962) voir aussi (Gilbert, 1991b ; Morange, 2009c), encore en discutions dans les théories et controverses sur les liens entre écologie, développement et évolution (Gerhart and Kirschner, 1997 ; Gilbert, 2021 ; Wagner, 2005 ; West-Eberhard, 2003).

À quelles questions exactement ces gens voulaient-ils répondre ?

5Au seuil de la révolution moléculaire, parurent trois articles qui marquèrent les esprits. Un article de R. Britten et E. Davidson (Britten and Davidson, 1969) sur une théorie de la régulation génique, après celle de Jacob et Monod, dont le but était clair: ''Perhaps in this we are offered an insight into the elegance and the complexity of the regulation system, the understanding of which is now a major objective in the experimental study of gene action in development'' (Davidson, 1968), voir aussi (Morange, 2009b). Un article de Lewis Wolpert dans lequel il proposait que les cellules d’un système en développement aient leur position spécifiée, cette information non génétique, déterminant leur différenciation moléculaire (Wolpert, 1969). Le but était clair, proposer une solution au problème suivant : comment une cellule est instruite à faire ce qu’elle doit faire en fonction de là où elle se trouve ? Enfin, des articles de Stuart. A. Kauffman (Kauffman, 1969a ; Kauffman, 1969b) dont le but était de construire des modèles formels de réseaux génétiques de régulations. En 1975, on retrouve Wolpert Kauffman à une réunion avec Brenner à laquelle participe aussi Antonio Garcia-Bellido. Il y présente une théorie basée sur les notions de compartiment clonal et de gènes sélecteurs. Notons sa conclusion: ''Discussion has been focused on the problem of how morphogenetic genes can operate to control developmental pathways… A hierarchy of genes may be involved in this process, and the operational characteristics of ‘activator’, ‘selector’ and ‘realisator’genes have been described… It is hoped that analysis of cell interaction mechanisms, such as diffusion or cell contact mediated induction, will help to close the gap between the developmental and genetic approaches and lead to an understanding of morphogenesis'' (Garcia-Bellido, 1975). Cela suffit à illustrer les buts des uns et des autres à l’époque, voir aussi (Love, 2015).

6Dans les années 1990, la biologie du développement a prétendu avoir élucidé les principes explicatifs du développement et a revendiqué une place majeure dans la théorie de l’Évolution (Carroll et al., 2001 ; Gerhart and Kirschner, 1997 ; Kirschner and Gerhart, 2005 ; Newman and Mûller, 2003 ; Raff, 1996 ; West-Eberhard, 2003) etc., dans la suite de (Jacob, 1977 ; Raff and Kaufman, 1983), avec, il est vrai, des interprétations contrastées (Morange, 2011).

7C’est un historique personnel de ce qui s’est passé entre ces deux moments, tel que je l’ai vécu (non comme historien ou philosophe des sciences ; pour cela je vous renvoie à Michel Morange), que je présente. Les questions sont : 1) Quels furent les moteurs de cette histoire, comment les différents systèmes s’articulèrent-ils ? C’est la section : « Qu’a trouvé la biologie du développement ? » 2) Quelle nouvelle théorie du développement en découle, où se place-t-elle par rapport à celles d’avant cette révolution moléculaire. Ce sont les sections : « Cette nouvelle embryologie a-t-elle répondu à l’embryologie expérimentale ? » et « Les éléments d’une théorie du développement ? ». Je conclus avec une métaphore, « Les trois langages de l’embryon ».

1. Qu’a trouvé la biologie du développement ?

8Des acteurs des années 1970, ce sont les généticiens drosophilistes, rejoints dans les années 1980 par les biologistes moléculaires et dans les années 2000 par les mathématiciens modélisateurs, qui ont triomphé. La mouche qui fut essentielle pour établir la génétique moderne au début du 20e siècle (Sturtevant, 1965), a encore triomphé à la fin du 20e siècle. Le développement de la drosophile est, de loin, celui qui est le mieux compris, et en en découvrant l’universalité, elle a fourni aux autres modèles les moyens d’y transposer ses résultats.

Présentons donc l’essentiel du développement de la drosophile tel que compris à la fin de la décennie 1990.

1a. Le développement de la drosophile vu par la génétique moléculaire

9Trois choses à savoir. Premièrement, le début du développement des insectes débute dans une structure syncytiale : les noyaux se divisent dans l’œuf en l’absence de membranes cellulaires. Cela simplifie considérablement les échanges de molécules entre noyaux. Deuxièmement, les facteurs de transcription (les FTs, les produits des gènes régulateurs de Jacob et Monod), se fixent sur des séquences spécifiques de l’ADN (appelées cis-regulatory elements, CRE) au voisinage des gènes dont ils activent ou répriment l’expression. Troisièmement, les insectes ont un corps segmenté. On distingue, d’avant en arrière, la tête, trois segments cervicaux, trois thoraciques, qui portent les pattes et les ailes et huit abdominaux.

1aa. Le découpage de l’embryon en compartiments

10Après la fécondation, deux FTs, qui ont été déposés (sous forme d’ARN) durant l’ovogenèse au pôle antérieur (Bicoid) et postérieur (Oskar) de l’œuf oblong de la drosophile, diffusent et activent ou répriment d’autres FTs qui activent ou répriment d’autres FTs. Il en résulte des secteurs transverses dans l’œuf, dans lesquels des FTs différents s’expriment. Ces secteurs sont constitués de noyaux puis de cellules. Après seulement quatre ou cinq étapes ces FTs activent des gènes dits sélecteurs, des FTs, qui donnent une identité à leur secteur : ils y contrôleront les activités des cellules, jusque chez la mouche adulte. Ces secteurs sont appelés compartiments. On est trois heures après la fécondation, la gastrulation n’a pas eu lieu, l’embryon comporte environ une trentaine de compartiments transverses (antéro-postérieurs, AP) et 10 000 cellules. Dans le même temps, à partir de molécules, là encore présentes dans l’œuf, des compartiments longitudinaux dorso-ventraux (DV) sont définis par d’autres cascades d’activations/répressions.

1ab. Que sont ces compartiments ?

11Les compartiments sont délimités par des frontières cellulaires qui interdisent à toutes cellules de rentrer ou de sortir : les cellules des compartiments sont les cellules fondatrices des structures qu’ils donneront. Elles ont toutes la même identité conférée par l’expression des gènes sélecteurs. Les compartiments sont des unités cellulaires (les cellules fondatrices) et génétiques (les gènes sélecteurs) de développement.

12Ces compartiments ne se superposent pas aux quatorze segments du corps de la drosophile. Ils définissent ce qui a été appelé les parasegments de la larve de la drosophile. Leur limite tombe au milieu des segments, au milieu des ailes, au milieu des haltères, des pattes et d’autres organes encore de la drosophile. Les gènes sélecteurs donnent donc leur identité à des moitié d’ailes, d’haltères ou d’autres organes. La mutation du gène sélecteur Bithorax, change l’identité du parasegment T3a, pour celle de T2a et la mouche se retrouve avec une structure à moitié aile à moitié haltère (Fig. 1). Les gènes sélecteurs ne contrôlent pas un organe ou un segment de la drosophile mais un territoire.

Figure 1 : Les compartiments

Figure 1 : Les compartiments

Les compartiments découpent bizarrement la mouche, les gènes sélecteurs leur confèrent une identité. A) Le gène Bithorax, donne son identité au compartiment antérieur T3 qui construit la partie antérieure de l’haltère. Sa mutation change cette identité pour celle du compartiment antérieur T2 qui construit la partie antérieure de l’aile. B) La mouche mutante présente une structure baroque composite mi- aile mi-haltère.

1ac. Le découpage des compartiments par les voies de signalisation

13Les cellules d’un compartiment ont toutes l’identité de leur gène sélecteur. Leur allocation à l’une ou l’autre des structures que formera le compartiment se fait en le subdivisant en nouveaux territoires caractérisés par de nouveaux FTs. Le mécanisme qui rend différentes les cellules des compartiments est le suivant. Les cellules des frontières des compartiments sécrètent des substances qui sont reçues par des protéines de surface des cellules voisines qui y activent un FT spécifique, qui lui-même active de nouveaux gènes. Dans cette phrase, les substances sécrétées sont des ligands de récepteurs transmembranaires qui modifient des protéines internes des cellules qui les portent et au final un FT spécifique. Ce dernier active alors de nouveaux gènes. Ces éléments constituent une voie de signalisation (VDS, Fig. 2) qui transforme un message reçu en réponse génétique. La spécificité de la réponse vient de combinaison du FT de la VDS et de FTs des cellules réceptrices. Les VDS sont le moyen de créer de l’hétérogénéité dans un groupe de cellules identiques. Ainsi est résolu le plus gros problème (à mon sens) des développements.

Figure 2 : Les voies de signalisation transforment un message reçu en réponse génétique

Figure 2 : Les voies de signalisation transforment un message reçu en réponse génétique
  • 6 Etienne Wolff (1904-1996), embryologiste, professeur au Collège de France jusqu’en 1974, spécialist (...)

Les substances sécrétées, par la cellule inductrice, sont des ligands (en vert en B et B’) de récepteurs transmembranaires (en jaune) qui modifient des protéines internes (en rouge) des cellules compétentes qui les portent et au final un FT spécifique (aussi en rouge) active de nouveaux gènes X.
A) Dès 1967, Etienne Wolff6 avait imaginé que l’induction était un mécanisme de ce genre (Wolff, 1967).

1ad. Un exemple

14Les cellules du territoire qui formera l’aile appartiennent à deux compartiments, antérieur (A) et postérieur (P), délimités par une frontière clonale. Les cellules de la frontière clonale du compartiment postérieur expriment un FT, Engrailed, qui y active l’expression d’un signal, Hh. Hh est sécrété et active dans les cellules du compartiment antérieur la VDS Hh, qui active l’expression du signal Dpp. Dpp est sécrété et diffuse dans les deux compartiments A et P. A forte concentration, autour de la frontière, Dpp active l’expression du FT Spalt et à basse concentration Dpp active l’expression du FT Omb. Il crée ainsi trois régions, une centrale (à cheval sur les deux compartiments) et deux périphériques. Mais, le territoire de l’aile est aussi divisé en compartiments, dorsal et ventral. Le gène sélecteur Apterous (un FT) donne l’identité dorsale. Il contrôle la VDS Notch/Delta qui contrôle l’expression de la VDS Wingless à la frontière dorso- ventrale. Wingless agit, comme Dpp, en subdivisant les compartiments D et V. 5 interventions de VDS rien que dans cette première phase !

Ce schéma d’activation de nouveaux FTs dans de nouveaux territoires créés par des cascades de VDS est général. Il se reproduit dans tous les autres compartiments de la drosophile.

1ae. Formation d’une aile supplémentaire par l’action des VDS

15Pour apprécier l’importance de ces signaux, activons (grâce aux techniques génétiques), Hh dans des cellules du compartiment antérieur. Une aile supplémentaire se forme (Fig. 3 D) : Hh a activé Dpp qui a joué son rôle de morphogène (Zecca et al., 1995).

Figure 3 : Formation d’une aile supplémentaire par l’action de voies de signalisation

Figure 3 : Formation d’une aile supplémentaire par l’action de voies de signalisation

L’expression forcée du ligand de la VDS Hh dans le compartiment postérieur de l’aile active dans celui-ci le développement d’une aile supplémentaire (A, B). Hh active l’expression de Dpp qui agit comme il le fait au niveau de la frontière clonale AP. L’activation respecte l’identité génétique « postérieure » des cellules, l’aile présente une symétrie en miroir « PP ». L’activation normale qui se fait à la frontière des compartiments A et P et se propage dans les deux compartiments, fait une aile AP. (C, D) la même histoire avec les gènes activateurs homologues pour l’aile du poulet.

1af. La fin de l’histoire ?

16Y-a-t-il là tous les principes du développement de la drosophile ? Si, comme il est admis, les compartiments sont des unités indépendantes les unes des autres, effectivement, il n’y a rien à rajouter. De plus, l’un des mécanismes majeurs découvert par l’embryologie expérimentale, l’induction, (voir 2a et b) a trouvé sa traduction moléculaire chez la drosophile.

Le développement de la drosophile se résume donc ainsi : l’œuf contient des déterminants (FTs ou éléments de VDS) qui activent de courtes cascades de FTs qui finissent par activer des FTs dit sélecteurs dans des territoires appelés compartiments qui découpent l’embryon en unités indépendantes cellulaires et génétiques de développement. Ces unités sont ensuite subdivisées, autant de fois que nécessaire, jusqu’à l’apparition des structures de l’organisme, par des interactions entre cellules (VDS et autres) qui donnent à ces subdivisions leur propre identité (des combinaisons uniques de FTs).

1ag. Un bref historique de cette histoire

  • De 1915 à 1980 : Les compartiments associés aux gènes sélecteurs
    Cet épisode est terminé dans les années 1970 (Garcia-Bellido, 1975 ; Garcia-Bellido et al., 1973 ; Lawrence and Morata, 1976). L’interprétation des parasegments date de 1984 (Martinez-Arias and Lawrence, 1985 ; Struhl, 1984). Les bases furent TH Morgan, Bridges, E. Lewis avec le complexe Bithorax, C. Stern et C. Tokunaga, P. Bryant. Leurs méthodes, analyse clonale, recombinaison mitotique, gynandromorphes, montrent la force de la génétique, qui fonda une nouvelle embryologie expérimentale parfaitement décrite dans (Lawrence, 1992).

    • 7 Le laboratoire de Pierre Chambon à Strasbourg a joué un rôle important dans ces découvertes et plus (...)

    La décennie 1980‑1990 : Les bases génétique et moléculaire du développement de la drosophile
    La base génétique : les héros furent Nüsslein-Volhard et Wieschaus pour les mutagenèses à saturation des gènes de la formation des segments de la larve. Ces gènes sont : 1) ceux (dits maternels, de type gap et pair rule) qui activent les gènes sélecteurs dans les compartiments et 2) ceux (dits de polarité de segment) qui structurent ces compartiments (Nüsslein-Volhard and Wieschaus, 1980). Les premiers sont des FTs, les seconds sont des gènes de natures diverses organisés en VDS. Avec quatre mutagenèses à saturation, les gènes majeurs du développement furent identifiés. La très grande surprise fut leur petit nombre. Il faudra deux décennies pour comprendre leur rôle et en tirer les conséquences pour la théorie de l’Evolution.
    La base moléculaire fut résolue par la biologie moléculaire : clonage et séquençage des gènes, librairies génomiques et de cDNA, l’hybridation etc. Fin 1982, grâce au « chromosome walk » de Hogness, plusieurs laboratoires avaient obtenu des cDNA de Antp (Garber et al., 1983) et de Bithorax (Bender et al., 1983). Le clonage des gènes sélecteurs a révélé une séquence conservée l’homéoboite (McGinnis et al., 1984b ; Scott et al., 1983) qui suggérait que les gènes Hox se fixent sur l’ADN et contrôlent l’expression d’autres gènes. Elle fut aussi un outil pour cloner d’autres gènes chez la drosophile : Engrailed et les gènes qui contrôlent l’activation des gènes sélecteurs dès 1985 puis Bicoid en 1989 etc. Ces gènes constituent des réseaux génétiques non linéaires de FTs. Les premières synthèses apparaissent à partir de 1988 (Ingham, 1988).
    Sur la nature des FTs et sur les CRE : Dans les années 1980 les biologistes moléculaires découvrent des CRE chez les virus et chez les cellules eucaryotes et montrent que ces éléments fonctionnent à distance (Banerji et al., 1983 ; Banerji et al., 1981 ; Gillies et al., 1983 ; Moreau et al., 1981)7.

  • La décennie 1990‑2000 : les VDS
    Restait à comprendre, selon moi, l’essentiel, les gènes de polarité de segment (Hh, Wingless, Gooseberry, Armadillo, Dishevelled, Porcupine, Fused, Patched, Naked, Dpp etc.). Ce fut une tâche embrouillée qui a mobilisé des laboratoires de divers horizons. Mais elle a permis d’élucider le processus de division des compartiments en sous compartiments. Ces gènes ont fini par être agencés en VDS comme Hh, Wingless, Notch. Ce problème n’aurait pas pu être résolu sans les cribles génétiques suivi du clonage des gènes. Pour Wnt voir (Bejsovec, 2018), pour Hh et Dpp voir (Tabata and Kornberg, 1994 ; Zecca et al., 1995). La comparaison de ces deux articles montre ce qui différencie l’approche génétique et biochimique. Pour apprécier les difficultés qu’il y eut à agencer ces gènes noter que, par exemple, la place de Patched dans la VDS Hh ne fut reconnue qu’en 1996 (Marigo et al., 1996) !

Les mutagenèses à saturation de Nüsslein-Volhard et Wieschaus de 1980 à 1984 et la découverte de l’homéodomaine en 1983 chez la drosophile furent, à mon sens, des moments clés de toute la biologie. Ce qui s’ensuivit révéla les mécanismes moléculaires et cellulaires des développements et leur universalité et révolutionna notre façon de penser les gènes, les génomes et l’Evolution.

1b. Le développement des vertébrés vu par celui de la drosophile

17Dès 1984, l’homéodomaine est, à la surprise de tous, retrouvé chez les vertébrés (Carrasco et al., 1984 ; McGinnis et al., 1984a) ! Une course effrénée commença. Dés 1985, l’avalanche déboulait avec le clonage de beaucoup des gènes Hox chez la souris. En quelques années les modèles vertébrés, qui étaient dans un profond marasme depuis les années 40, furent submergés par les gènes exportés de la drosophile… et par ses interprétations.

  • 8 Philippe Brûlet (1949-2013), Chef de l’unité d’embryologie moléculaire à l’Institut Pasteur, a part (...)
  • 9 Le laboratoire de Margaret Buckingham, à l’Institut Pasteur, a eu un rôle leader, surtout pour les (...)

18Entre 1988 et 1992 il était établi que, comme chez la drosophile, les gènes Hox des vertébrés sont organisés en groupes, qu’ils s’expriment en domaines distincts le long de l’axe AP de l’embryon, dès un stade précoce et que leur inactivation cause des respécifications8. En parallèle la découverte chez la souris de MyoD, le maitre-gène de la différenciation du muscle (Davis et al., 1987 ; Sassoon et al., 1989) marquait le début de la compréhension du réseau génétique associé (Buckingham and Rigby, 2014)9. En 1993, deuxième gros choc, des homologues vertébrés de Emx et Otx, les gènes sélecteurs des compartiments antérieurs de la drosophile étaient trouvés chez les vertébrés (Boncinelli et al., 1995). En 1994, le troisième choc, le maitre-gène de l’œil, Ey, de la drosophile est retrouvé chez les vertébrés, c’est Pax6 (Quiring et al., 1994). La même logique de découpage de l’embryon en territoires génétiques indépendants de développement, utilisant les mêmes gènes sélecteurs, semblait être à l’œuvre chez tous les animaux bilatéraux depuis leur origine !

19Mais il y eut plus. Chez la drosophile, les cellules des compartiments sont rendues différentes par les VDS activées à leurs frontières. Dans l’aile, Hh active Dpp qui active de nouveaux FTs dans les compartiments A et P et Notch/Delta et Wingless agissent de même dans les compartiments D (spécifié par Apterous) et V (voir 1ac). En 1993, les homologues vertébrés de Hh furent clonés, (références dans (Ingham, 1994), et il fut montré que dans le bourgeon du membre, Shh active l’homologue de Dpp (BMP2) postérieurement, que dorsalement ce sont les homologues d’Apterous et de Wingless (Lmx1 et Wnt7a) qui agissent. Les homologies concernent aussi l’axe proximo-distal avec Notch/Delta (Fringe) et le FT Distalless. La structuration des membres chez les vertébrés et des ailes chez les insectes utilise non seulement des gènes conservés mais des mécanismes conservés et donc homologues. Ces mécanismes sont constitués de la même combinaison de gènes sélecteurs et de plusieurs VDS, les VSD étant eux-mêmes des combinaisons multigéniques. La notion d’homologie profonde (deep homology) en découle (Held, 2017 ; Shubin et al., 1997).

20Enfin, toujours en 1993 il fut montré que l’activation de Shh dans la partie antérieure du bourgeon le duplique en miroir (Fig. 3 C, D) (Riddle et al., 1993) !

21Comme à la fin du paragraphe 1ae : est-ce la fin de l’histoire ? L’induction ayant, de nouveau, trouvé sa traduction moléculaire qu’y aurait-il à ajouter ? Et ce d’autant que l’exemple choisi n’est pas unique. Les séquences VDS-FTs impliquées dans le découpage en territoires DV de la drosophile et des vertébrés sont aussi conservées (Holley et al., 1995) (voir1be). La spécification des organes de détection de la lumière chez les mollusques, insectes ou vertébrés par le même FT, Pax6, est tout aussi impressionnante (Halder et al., 1995 ; Quiring et al., 1994).

22Depuis 1985, Scott F. Gilbert dans ses rééditions de « Developmental biology » rapporte la révolution qu’il avait pressentie. Dans la 3ème édition en 1991, les FTs avaient fait leur apparition et dans la 5è en 1997 commencent à se dessiner les VDS. Il note alors: « This newly empowered science (Developmental biology) identified molecular mechanisms for the two most central processes of developmental biology: differentiation and induction ». En 1998, parait « Principles of Developpement » de Wolpert. La première phrase est: « Developmental biology… deals with the process by which the genes in the fertilized egg control cell behavior in the embryo and so determine its pattern, its form, and much of its behavior ».

2. La nouvelle embryologie a-t-elle répondu à l’embryologie expérimentale ?

  • 10 Louis Gallien (1908-1976) a occupé la chaire d’embryologie de la Sorbonne à partir de 1954. Son liv (...)

23L’embryologie fut d’abord surtout descriptive, l’affirmation de Haeckel, « l’ontogenèse récapitule la phylogenèse », servant d’aiguillon aux zoologistes (Morgan, 1936). Elle devint expérimentale, à partir de 1881, tentant d’en comprendre les mécanismes chez l’oursin et les amphibiens (Gilbert, 1991a ; Sander, 1997). Ses spectaculaires résultats (Driesch, 1891 ; Harrison, 1918 ; Hörstadius, 1939b ; Spemann, 1901 ; Spemann and Mangold, 1924) ont rajouté au vertige des embryologistes et ont mené à élaborer une panoplie de concepts. Mais l’embryologie chimique qui devait faire la synthèse entre les niveaux tissulaire et chimique fut un échec (Bautzmann et al., 1932 ; Holtfreter, 1934 ; Waddington et al., 1936). L’impossibilité de trancher entre des concepts opposés (comme l’organisateur de Spemann opposé aux gradients métaboliques de Child) a brouillé les interprétations. L’ensemble des résultats et des concepts de l’embryologie expérimentale (Gallien, 1958 ; Sander, 1997)10 reste exceptionnel.

24Ici je plaide pour une analyse approfondie de l’histoire de ces concepts, remarquablement présentés par Spemann en 1938 (qui incluent ceux du Driesch du Fundamentalsatz, 1892 et de l’Analytische Theorie der organischen Entwicklung, 1894). Outre ceux abandonnés, certains ont été directement assimilés par la nouvelle embryologie, d’autres restent en discussion.

25Parmi ceux assimilés : préformation/développement mosaïque, épigenèse, potentialité, détermination, émancipation, induction (système d’action et de réaction de Spemann), régulation topographique, et régulation essentielle.

26Parmi ceux en discussion : champs morphogénétiques, champs morphogénétiques locaux, centre organisateur, organisateur, gradients, gradients physiologiques, gradients d’activité métaboliques, doubles champs gradients (végétatif et animal). Les champs morphogénétiques locaux ne coïncident pas avec les rudiments présomptifs ou déterminés des organes, ils en dépassent les limites. Chez Spemann, l’induction dans les champs morphogénétiques devient une « action de champ » qui implique tous les éléments physiques et chimiques qui peuvent jouer un rôle dans le développement. Les gradients s’opposent aux champs morphogénétiques. Ils recouvrent l’idée comme quoi les embryons ont un ou plusieurs axes, liés à des gradients de « quelque chose » et qu’ils déterminent les organes (Child, 1936 ; Hörstadius, 1952 ; Runnström, 1929). Parfois champs et gradients se combinent ! Champs et gradients sont des entités supérieures àcelles liées aux concepts de la première catégorie. Des analyses plus poussées permettraient de cerner à quels problèmes elles répondent. Chez Spemann et Driesch le problème du tout (wholeness) en fait partie. C’est le système harmonique-équipotentiel (« the whole is contained in each single part ») dont la régulation fait partie (voir 2c).

27L’analyse de ces concepts devrait inclure l’étrange usage qui en fut fait durant la période qui nous intéresse. Après avoir proclamé que « des mots comme induction, champs morphogénétiques, et toute la terminologie classique ne sont que bla-bla », Ed Lewis voir (Ghysen, 2009) et (Galperin, 2000), que “Spemann's organizer set developmental biology back by 50 years.” (dans Eddy De Robertis – [Niehrs, 2021]) et que « 'Gradient was a dirty word in the 1960s and 1970s » (Lawrence, 1992), ces mêmes concepts, et d’autres dérivés (l’information de position, pour les champs, la formation des axes, pour les gradients) furent utilisés, même par les drosophilistes, parfois sans justification, souvent en en changeant le sens et de façon inconsidérée, parfois jusqu’au délire. Plus étonnant encore le fait qu’ils restent encore présents dans les manuels et ailleurs !

28Centrale à l’embryologie expérimentale, l’induction et la régulation, « the most striking phenomena of life », (Spemann, 1938). Comment la nouvelle embryologie les interprète- t-elle ?

2a. L’induction

29Comme indiqué en 1ad l’expression forcée de Hh active le développement d’une aile supplémentaire chez la drosophile et l’activation de Shh duplique l’aile chez le poulet (Fig. 3 B, D). Les VDS sont les agents de l’induction. Les ligands sécrétés représentent le système action et les FTs des VDS, combinés à des FTs des cellules réceptrices, puis le nouvel état d’activité de la cellule qui s’ensuit, représentent le système réaction de Spemann. Une dizaine de VDS interviennent encore et encore au cours du développement. Le concept d’induction convient bien mal à ce mécanisme d’activation permissif.

2b. L’organisateur de Spemann-Mangold

30Le résultat le plus spectaculaire de l’embryologie expérimentale est la formation d’un embryon secondaire par greffe de la lèvre dorsale du blastopore (Spemann and Mangold, 1924), interprété par le concept d’organisateur (Spemann, 1938). Le but, jamais atteint, de l’embryologie chimique fut ensuite d’élucider ce phénomène.

31L’explication de la biologie du développement est la suivante : l’organisation d’un second embryon est due à la sécrétion, par l’organisateur, dans l’espace extracellulaire, d’antagonistes des VDS Bmp et Wnt. Les antagonistes en se fixant aux Bmp et aux Wnt, produits par toutes les cellules de l’embryon, les neutralisent. Des gradients de distribution de Bmp et Wnt sont ainsi établis (bas à côté de l’organisateur, haut plus loin). Les cellules qui ne reçoivent plus les signaux Bmp ou Wnt, répondent à cette absence selon leur circuiterie génétique, déjà programmée. Pour ce qui concerne Bmp les choix sont binaires : pour l’ectoderme -Bmp, neural/+Bmp, épiderme ; pour le mésoderme -Bmp, somites/+Bmp mésoderme latéral. Ces choix structurent l’embryon dorso-ventralement. Pour ce qui concerne Wnt, le résultat est une structuration antéro- postérieure de la plaque neurale par le mésoderme sous-jacent : -Wnt, cerveau antérieur et moyen antérieur, +Wnt, cerveau moyen et postérieur antérieur et ++Wnt cerveau postérieur et moelle épinière.

32Ces éléments rentrent dans le cadre proposé en 1ae. L’organisateur crée de nouveaux territoires dans des territoires homogènes. La réponse des cellules passe par la modification de FTs, Smad1 pour Bmp, ß -catenin/TCF pour Wnt, produisant des changements du phénotypique des cellules. L’action de l’organisateur est simple, mais les réponses, déjà programmées, des cellules sont très élaborées. Ces programmations sont : la spécification de l’endoderme et de l’ectoderme par des facteurs maternels (VegT et le FT Foxl1e), l’induction du mésoderme à partir de l’ectoderme par l’endoderme et le positionnement de « l’organisateur » de Spemann par la superposition de VegT, Xnr (nodal), et ß  -catenin.

33L’organisateur, et le centre organisateur, sont des molécules sécrétées antagonistes de VDS. Ils ne sont ni organisateurs, ni même inducteurs ! Dans la nouvelle embryologie ils sont un exemple de double régulation négative : Bmp inhibe, via le FT Smad1p, les voies de développement neurale et somitique et les antagonistes sécrétés par l’organisateur inhibent Bmp, libérant ces voies (Gerhart, 2015).

34On est loin des suppositions de Spemann (Spemann, 1938): « It (son utilisation de métaphores venant de la psychologie) was meant to express my conviction that the suitable reaction of a germ fragment… in an embryonic "field"… is not a common chemical reaction, but that these processes of development… are comparable, to those vital process of which we have the most intimate knowledge, viz., the psychical ones. » p. 372. On est proche de ce qu’il écrivait p. 369: « 'If the most diverse kinds of tissues may be inductive, if formations of complicated morphological structure may be called forth by simple chemical substances, then almost the whole complication must lie on the part of the system of reaction; but in consequence the conception of the organizer no longer applies to these cases. A dead organizer is a contracdiction in itself ». On doit en déduire qu’il était près d’abandonner ce concept (son livre "Embryonic development and Induction" fait référence non au centre organisateur mais à l’induction dont il dit : « their analysis affords a deep insight into the nature of animal development »). Ni les manuels d’embryologie, ni même certains des acteurs actuels, par exemple (Anderson and Stern, 2016), n’ont encore vraiment intégré les conséquences de ces résultats.

35Pourtant cette relative simplicité de « l’organisateur » est, je crois, remarquable. Elle rend l’embryon, à ce stade, plus flexible. La modification du lieu ou du temps d’action du signal peut survenir assez simplement et changer l’organisation de l’embryon sans toucher à sa réactivité qui est indépendante du signal. Plaque neurale et somites trouvent naturellement leur nouvelle place dans la nouvelle structure. Et de fait, le "shield" du poisson zèbre, l’AVE et le « nœud » de la souris, le nœud de Hensen chez le poulet, qui partagent les propriétés, plusieurs des antagonistes et sans doute le mode d’action de « l’organisateur de Spemann », s’accommodent de conditions très différentes, voir par exemple (Bachiller et al., 2000). C’est peut-être pour cette raison, que l’exploitation de la double régulation négative est fréquente dans les développements. C’est un bel exemple du "weak regulatory linkage" qui facilite la variation, de Gerhart et Kirschner.

2c. La régulation, ''the most striking phenomena of life" (Spemann, 1938)

36La régulation, c’est le processus par lequel un système soumis à une perturbation réagit pour tendre à réaliser l’ensemble des prestations morphogénétiques normales (Gallien, 1958). C’est la régulation topographique chez les œufs : chacune des moitiés méridiennes donnent un embryon normal (Driesch, 1891 ; Morgan, 1895 ; Wilson, 1893), ou deux embryons, quand fusionnés, donnent un seul embryon géant (Driesch, 1910, voir (Sander, 1997), (Mangold and Seidel, 1927). Driesch interprète ces faits en postulant un système-harmonique équipotentiel (Driesch, 1891). C’est aussi la régulation essentielle chez l’oursin, une moitié méridienne plus une moitié animale de l’œuf donne par régulation avec transfert de potentialité pour les cellules, un pluteus normal (Hörstadius, 1939a). Hörstadius l’interprète en postulant deux champs gradients animal et végétatif, qui s’influencent mutuellement. Les exemples de régulation sont multiples, des cœlentérés aux mammifères. Ce processus, n’a pas retenu l’attention des nouveaux embryologistes à l’exception de De Robertis chez le xénope, dans la suite de ses travaux sur « l’organisateur » de Spemann (De Robertis and Moriyama, 2016 ; Reversade and De Robertis, 2005).

37Mais, la drosophile a de nouveau été pionnière, cette fois-ci, rejointe par des modélisateurs et les simulations informatiques. Ces approches ont été appliquées au réseau, établi par la génétique, des protéines extracellulaires, Dpp, Sog et Tld, qui structure la région dorsale de l’embryon de la drosophile. Elles ont permis de comprendre que la logique de ce réseau lui confère une robustesse (maintient sa fonction) aux fluctuations. Cette robustesse requiert la diffusion de complexes Dpp-Sog, l’action d’une protéase qui clive Sog, (Tld), et l’absence de diffusion des ligands non complexés. Ce mécanisme dit de « transport (de Dpp)-navette (par Sog) », le shuttling, concentre un excès de Dpp dans une petite région de l’embryon où Sog est absent. Prédit par les modélisations, il est vérifié expérimentalement (Eldar et al., 2002).

38Les gènes Dpp, Sog, et Tld sont conservés chez le xénope, ce sont Bmp, Chordin et Xlr, où ils structurent la région dorsale de l’embryon (c’est « l’organisateur » de Spemann, voir 1be et 2b) avec le même mécanisme de « transport-navette ». Mais de plus, en introduisant dans le modèle le ligand Bmp-like Admp, présent chez le xénope comme chez la plupart des bilatériens, on rend compte d’une nouvelle propriété du réseau, la remise à l’échelle (scaling) du gradient Bmp. Ce rétablissement automatique du gradient rend compte de la régulation topographique (Ben-Zvi et al., 2008).

39Plusieurs remarques : 1) les régulations topographiques chez le xénope, peut-être chez tous les chordés, s’expliquent par la robustesse du réseau d’interactions de protéines qui sert à structurer la région dorsale de l’embryon. Les éléments de cette propriété, molécules, -mises en évidence par la génétique-, et interactions, transport-navette et remise à l’échelle, -mises en évidences par les modélisations et simulations-, sont connus. Il est intéressant de constater que le scaling est dû à une molécule particulière (Adpm). 2) les autres expériences d’embryologie qui montrent une régulation testent donc la robustesse d’un mécanisme dont souvent les éléments sont inconnus. 3) mais si ces réseaux mettent en jeu des éléments d’actions contradictoires, seul le pouvoir explicatif et prédictif des modèles mathématiques permettra de le comprendre, l’intuition sera inopérante. 4) la robustesse, concept fondamental pour les systèmes biologiques qui se maintiennent en dépit des variations naturelles, génétiques ou environnementales, s’applique aux processus du développement.

40L’analyse des cas de régulation chez l’oursin (Davidson, 1989 ; Davidson et al., 1998), et des « champs morphogénétiques secondaires » est, à ma connaissance, peu avancée. Comme on s’attend à autant de mécanismes que de VDS ou combinaisons de VDS impliquées nul doute que les modélisateurs vont s’y intéresser.

À partir des années 2000 le recours des embryologistes aux modélisateurs devint la règle. Biologie des systèmes (Alon, 2006‑2020) et biologie synthétique (Barkai and Shilo, 2020) lui sont indispensables (Morange, 2009a). Les embryologistes sont pris d’un nouveau vertige : ce sont des machines qui résolvent les problèmes en testant un nombre incalculable de possibilités ! Dernier point que je veux noter. La régulation de Driesch et Spemann en trouvant sa solution a disparu au profit d’un mécanisme, la remise à l’échelle. Le concept associé, la robustesse, recouvre des ensembles de données bien plus larges qui n’appartiennent pas à la seule embryologie. Ainsi meurent les concepts.

2d. Quelques dates relatives à l’élucidation de la nature de l’organisateur et de la régulation

41Cela a nécessité plus de dix ans et c’est fait en l’absence des approches génétiques et loin de la rigueur de ses raisonnements, dans les conditions défavorables qui caractérisent le xénope. L’histoire a impliqué plusieurs laboratoires travaillant avec le xénope, mêlant des techniques moléculaires, des essais sur cellules, des injections dans les embryons etc. (Bouwmeester et al., 1996 ; Cho et al., 1991 ; Hemmati-Brivanlou et al., 1994 ; Leyns et al., 1997 ; Piccolo et al., 1996 ; Reversade and De Robertis, 2005 ; Sasai et al., 1994 ; Wilson and Hemmati-Brivanlou, 1995 ; Zimmerman et al., 1996). L’apport de la drosophile (Eldar et al., 2002 ; Ferguson and Anderson, 1992) puis des modélisations et simulations informatiques (Ben-Zvi et al., 2008) furent cruciales.

2e. Les concepts de la nouvelle embryologie ?

42La génétique moléculaire propose des mécanismes pour beaucoup des concepts de l’embryologie expérimentale. La nouvelle embryologie n’en voit plus l’utilité. En décomposant l’embryon en éléments plus simples (voir 3 et 4), elle a déplacé les problèmes vers d’autres cadres, comme ceux des réseaux qui ont leurs propres concepts. D’autre part, la réunion de la nouvelle embryologie avec la science de l’évolution a provoqué plus de remous conceptuels chez cette dernière que chez elle (Morange, 2011). Cela explique-t-il en partie la quasi-absence de concepts affichés de la nouvelle embryologie ? Ceux qui restent : pattern en tant que distinct de forme, auto- organisation, gradient ; pour le niveau réseau : robustesse, bruit, flexibilité, évolutivité ; pour des concepts qui se sont vidés de leur sens : information de position, information, programme génétique, gènes du développement, voir aussi (Keller, 2004 ; Morange, 2020). L’embryologie nouvelle utilise beaucoup les métaphores comme, formation des axes, plan de formation, programme, l’affreuse « caisse à outils » dans la suite du bricolage, pour évoquer, si mal, la modularité et le “weak linkage”, des caractéristiques des réseaux. A mon sens, elle aurait tout bénéfice à abandonner ces métaphores et à redéfinir ses concepts, qui inévitablement, existent, peut-être revenir sur celui, crucial, de compartiment, unité cellulaire et génétique des développements.

3. Les éléments d’une théorie du développement ?

43Les trois manuels « bibles » de la biologie du développement, Developmental Biology (S.F. Gilbert), Principles of Development (L. Wolpert), Essential Developmental Biology (J. M. W. Slack) donnent une idée de l’immense somme des connaissances accumulées. Mais curieusement, dans aucune n’y est présentée une théorie du développement, même partielle. Que la biologie du développement n’ait pas produit de théorie est suggéré dans (Minelli and Pradeu, 2014 ; Pradeu et al., 2016), voir cependant (Morange, 2014). Quelle étrange situation que celle d’une science sans concepts et qui se revendique sans théorie ! Mais est-il même pensable que l’expérimentation en biologie du développement ne teste pas des théories, ne soit pas la conséquence des théories ? Alors, qu’en est-il vraiment ?

  • 11 Dans la belle traduction de1936 de Jean Rostand (1894-1977), membre de l’Académie française, vulgar (...)

44Quand Spemann publie ses conférences Silliman de 1933, le titre en est : « Experimentelle Beitrage zu einer Theorie der Entwicklung ». En 1936 il deviendra dans la traduction anglaise ''Embryonic development and induction ». L’induction est donc ce qu’il reconnait apporter à une théorie du développement. Quand Morgan en 1934 écrit, dans « Embryologie et génétique » : « Le terrain commun de l’embryologie et de la génétique se trouve dans la relation entre… les gènes et le protoplasme de la cellule, où s’exprime visiblement l’influence de ces gènes… On sait que le protoplasme de l’œuf est quelque peu différant en ses différentes parties… Rien n’interdit d’imaginer que les différences initiales des régions protoplasmiques affectent l’activité des gènes, et que ceux-ci, à leur tour affectent le protoplasme, d’où une nouvelle suite de réactions réciproques. Ainsi pourrait-on se représenter la formation et la différenciation graduelles des diverses régions embryonnaires11 » tout le monde y verra une des premières théories du développement. Quand en 1975 Garcia-Bellido discute ses résultats (voir l’introduction) n’est-ce pas là encore avancer une théorie du développement ?

45L’induction, ces « déterminants » dans l’œuf, ces hiérarchies génétiques et les mécanismes des interactions cellulaires ont été décryptés. J’en ai rapporté ici « mon » historique.

46Je soutiens que les développements ne nécessitent que trois conditions : une condition première, des processus pour créer de la diversité dans un agglomérat de cellules, et deux conditions annexes (parce que déjà réalisées chez l’ancêtre unicellulaire), des gènes régulateurs et la prolifération des cellules et qu’ensemble, ils sont la base d’une théorie explicative de tous les développements qu’ils aient pour point de départ un œuf fécondé ou un groupe de cellules asexuées, comme dans la blastogenèse ou les développements régénératifs ou même les cellules de la crête neurale. Cette théorie identifie les interactions cellulaires comme l’innovation à l’origine de l’émergence des développements puis leur moteur. Elles sont condition première car à la base de la structuration de l’embryon et de la morphogenèse, les processus de contrôle génomique et les gènes étant les exécutants.

47Les processus pour créer de la diversité entre les cellules, ce sont les signaux entre cellules transduits en signaux génétiques (chez les animaux les VSD en font partie). Les signaux génétiques régulent d’autres régulateurs (les FTs et leurs CRE en font partie). Les interactions de ce type entre groupes de cellules différentes génèrent progressivement un nombre croissant de territoires (chez les insectes les compartiments) qui structurent (pattern) l’embryon. A chaque type de signal correspond un type de structuration et les signaux peuvent se combiner. La VDS Notch ne produit pas les mêmes types de structuration que les VDS Bmp, Wnt ou FGF qui eux-mêmes ne font pas ce que l’association Notch-FGF réalise. Ainsi est réglé le seul problème réel des développements, créer de la diversité entre les cellules d’un groupe.

48Dans chaque territoire ainsi créé les régulateurs fixent l’état d’activité des cellules, qui correspond à un état d’activité particulier du réseau génétique. L’organisation globale de ce réseau génétique est produite par l’ensemble des régulateurs (les FTs et les CRE en font partie). Elle détermine tous les états d’activité possibles.

49À la fin du processus, les cellules spécialisées de différents types (muscles, neurones, kératinocytes etc.) expriment différentes combinaisons de régulateurs qui contrôlent les gènes qui caractérisent leur fonction (myosines, neurotransmetteurs, kératines). Leur positionnement dans l’organisme et leur morphogenèse résulte à la fois de tous les signaux qu’elles ont reçus (de l’historique de leurs interactions cellulaires) et de leurs comportements successifs (de l’historique de leurs états d’activité génétique). La morphogenèse « émerge » progressivement de ces deux historiques.

50Enfin, un organisme étant un agglomérat de cellules, la prolifération des cellules accompagne son développement.

Cette théorie du développement, création de diversité entre les cellules d’un agglomérat, par des interactions cellules-cellules transduits en signaux génétiques qui régulent d’autres régulateurs, qui fixent leur état d’activité, rejoint celles, toutes aussi simples de la vie : reproduction inexacte de structures moléculaires effectuant des réactions chimiques en empruntant au milieu extérieur énergie et molécules (Morange, 2010) et de l’évolution : variation phénotypique, adaptation différentielle et adaptation héritable (Lewontin, 1970), si l’on se restreint « aux piliers qui pris ensemble sont responsables de l’apparition de toutes les autres caractéristiques » (Morange, 2010).

51Avoir une théorie explicite du développement a de multiples avantages. Elle permet d’ordonner et même de classifier (voir 4.2), d’une manière logique la multitude d’informations sur les innombrables sujets qui ont été traités ces quarante dernières années. Elle donne un point d’appui solide pour aborder le problème de l’émergence des développements, il y a 600 millions d’années, et leur évolution. Enfin, elle est pour le néophyte le fil d’Ariane pour s’orienter dans les invraisemblables labyrinthes que sont devenus les manuels sur le développement.

Cette théorie a des conséquences spécifiques, non discutées ici, pour la biologie de l’évolution.

4. Conclusion, la métaphore des trois langages

4a. Au 20e siècle la drosophile fut le paradis des développementalistes généticiens, les vertébrés leur enfer

52La drosophile fut un miracle. Outre qu’elle se prête idéalement à la réalisation des cribles par mutagenèse, elle présente d’autres caractéristiques, qu’aucun des autres modèles n’a, qui se révélèrent incroyablement avantageuses : 1) un génome simple sans les deux duplications massives qui ont eu lieu chez les vertébrés. La redondance génétique est faible, les mutants ont un phénotype franc. 2) son blastoderme syncytial : en l’absence de membrane les molécules ont un accès plus direct aux noyaux. Enorme simplification qui a permis de déchiffrer d’un coup les cascades non linéaires des FTs qui mènent aux gènes sélecteurs. Les autres développements utilisent des interactions cellulaires ou des lignages invariants. 3) sa bande germinale longue, le processus d’activation des gènes sélecteurs en est fort simplifié car il se fait sans temporalité. De nouveau extraordinaire simplification. Songez qu’au moment de la rédaction de cet article, on ne sait toujours pas comment, ni précisément dans quelles cellules les gènes Hox sont mis en place chez la souris (Deschamps and Duboule, 2017 ; Wymeersch et al., 2021). 4) des chromosomes géants ce qui a permis avec les méthodes d’Hogness le clonage des gènes, Bithorax, Antenapedia, Engrailed. 5) les disques imaginaux des unités de développement naturelles parfaitement isolées. 6) la mutation minute (Bridges, 1919) sans laquelle les compartiments auraient été très difficiles à délimiter (Morata and Ripoll, 1975). 7) les ailes, les yeux : deux organes facilement observables. Les premiers mutants découverts (Morgan, 1926) concernent pour 22 sur 85, l’aile dont Notch (VDS), Apterous (gène sélecteur), Fringed (VDS Notch), Vestigial (gène sélecteur) et pour 15 l’œil dont Eyeless (gène sélecteur), Furowed, Deformed et White. Dès 1915 plusieurs des gènes impliqués dans le développement étaient déjà isolés, les drosophilistes avaient une sacrée avance !

4b. Les trois langages de l’embryon

53Des cellules entre elles. Ce voyage rétrospectif montre qu’avant la grande révolution moléculaire les problèmes avaient été posés. Garcia-Bellido en 1975 proposait les interactions cellulaires comme la solution de la morphogenèse. On sait maintenant que les interactions cellules-cellules locales et à distance structurent l’embryon en y définissant un nombre toujours croissant de territoires. La douzaine de VDS utilisés et réutilisés dans les développements animaux constitue les mots d’une première langue, celle des cellules entre elles. Dans les métaphores habituelles on dit qu’avec ce langage l’embryon génère un plan de formation, se géométrise, etc., c’est à dire, il définit des territoires.

54Des régulateurs entre eux. Que les gènes puissent interagir entre eux était reconnue par quelques-uns. Par exemple, en 1961, avant Monod et Jacob, Waddington écrit, après avoir discuté le rétrocontrole : « I am mentioning these excessively simple models only to show that the interaction of gene activities to form organized systems does not involve any very surprising or unknown properties, but is something which we have a perfect right to expect » (Waddington, 1961), de même Garcia-Bellido avait vu que les gènes sélecteurs étaient des éléments d’une hiérarchie et plus encore Kauffman et ses premiers réseaux de régulation génique globaux (Kauffman, 1971). On reconnait maintenant le rôle des hiérarchies génétiques et des motifs de réseau, dans l’immense réseau que forment les FTs (au moins 1 700 chez l’homme) et autres régulateurs (ARN). De ces arrangements émergent des fonctions (mémoire, horloge, oscillateurs (Alon, 2006‑2020 ; Peter, 2020) qui dotent les territoires de propriétés particulières. Deuxième langage, dont l’alphabet est les régulateurs (FTs et CRE), les mots les motifs de réseau, le texte le réseau de régulation génétique qui détermine les innombrables états d’activité des cellules des territoires.

55Des molécules entre elles. Dans les cellules à chaque moment des dizaines de gènes sont activés, d’autres réprimés. Leurs produits qui, individuellement ou en interactions, constituent leurs comportements (migration, adhésion, forme, division, apoptose etc.) font qu’elles changent de forme, que les tissus se meuvent, se réarrangent (Jamie, 2013). La gastrulation, la neurulation etc. en dépendent (Solnica-Krezel, 2020). Ces molécules, dont beaucoup de protéines de structures, tubulines, cadhérines, actines, myosines, etc. sont et constituent des modules qui sont autant de mots de cette troisième langue.

  • 12 Pour ceux qui souhaiteraient avoir une description abordable et globale des principes des développe (...)

56L’embryon mêle simultanément ces trois langues, imbriquées les unes dans les autres, qui déterminent les dynamiques tissulaires, cellulaires et moléculaires qui fabriquent les organismes dans une apparente cacophonie dont tellement reste à déchiffrer !

D’un vertige l’autre12.

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Notes

1 Du vertige à contempler le déroulement d’un développement au vertige devant les stupéfiants résultats de l’embryologie expérimentale, à celui devant le défi à l’expliquer, perçu, dans les années 1970, comme peut-être impossible à relever, et enfin à celui devant les trois réponses, obtenues quarante ans après, dont deux, sûrement impossibles à comprendre autrement que par les machines.

2 Boris Ephrussi (1901-1979) a occupé en 1946 la première chaire d’Université en Génétique en France. Ses contributions pionnières en biologie sont nombreuses.

3 Michel Morange, Directeur du Centre Cavailles d’histoire et de philosophie des sciences de l’ENS, est l’un des plus brillant philosophe de l’histoire de la biologie en général et de la biologie moléculaire en particulier.

4 Jacques Monod (1910-1976) et François Jacob (1920-2013), chercheurs à l’Institut Pasteur, pères fondateurs de la biologie moléculaire.

5 Nicole Le Douarin, directrice de l'Institut d'Embryologie après Étienne Wolff. Ses travaux sur la crête neurale font autorité.

6 Etienne Wolff (1904-1996), embryologiste, professeur au Collège de France jusqu’en 1974, spécialiste en tératologie, “patron” de N. Le Douarin (Le Douarin, N., 2017. Dictionnaire amoureux de la vie. Plon, Paris.)

7 Le laboratoire de Pierre Chambon à Strasbourg a joué un rôle important dans ces découvertes et plus largement en biologie moléculaire.

8 Philippe Brûlet (1949-2013), Chef de l’unité d’embryologie moléculaire à l’Institut Pasteur, a participé à ces découvertes.

9 Le laboratoire de Margaret Buckingham, à l’Institut Pasteur, a eu un rôle leader, surtout pour les difficiles aspects “embryons” chez la souris.

10 Louis Gallien (1908-1976) a occupé la chaire d’embryologie de la Sorbonne à partir de 1954. Son livre sur l’embryologie expérimentale résume clairement et complétement le sujet.

11 Dans la belle traduction de1936 de Jean Rostand (1894-1977), membre de l’Académie française, vulgarisateur hors pair au style pur, des années 1930 à 1960, de la génétique, de la biologie et de leurs conséquences sociétales.

12 Pour ceux qui souhaiteraient avoir une description abordable et globale des principes des développements vus par la nouvelle embryologie je renvoie à mon ouvrage, « La Fabrique des Organismes », PDF téléchargeable à l’adresse suivante : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02890738v2/document (version 3 sous peu) ; pour une vue approfondie voir Principles of Development de L. Wolpert, 2019 ; pour une vue très approfondie voir Developmental Biology de S.F. Gilbert, 2020. Enfin, le Molecular Biology of The Cell par Bruce Alberts et al., 6e édition, 2014 ou 7e édition 2022, est l’insurpassable monument qui répondra à toutes les questions sur les composants moléculaires, les niveaux d’organisation, la structure, le fonctionnement et les propriétés des cellules isolées et dans le contexte des organismes. Le chapitre sur le développement est tout comme les autres, remarquable de clarté.

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : Les compartiments
Légende Les compartiments découpent bizarrement la mouche, les gènes sélecteurs leur confèrent une identité. A) Le gène Bithorax, donne son identité au compartiment antérieur T3 qui construit la partie antérieure de l’haltère. Sa mutation change cette identité pour celle du compartiment antérieur T2 qui construit la partie antérieure de l’aile. B) La mouche mutante présente une structure baroque composite mi- aile mi-haltère.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hrc/docannexe/image/10514/img-1.jpg
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Titre Figure 2 : Les voies de signalisation transforment un message reçu en réponse génétique
Légende Les substances sécrétées, par la cellule inductrice, sont des ligands (en vert en B et B’) de récepteurs transmembranaires (en jaune) qui modifient des protéines internes (en rouge) des cellules compétentes qui les portent et au final un FT spécifique (aussi en rouge) active de nouveaux gènes X.A) Dès 1967, Etienne Wolff6 avait imaginé que l’induction était un mécanisme de ce genre (Wolff, 1967).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hrc/docannexe/image/10514/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 101k
Titre Figure 3 : Formation d’une aile supplémentaire par l’action de voies de signalisation
Légende L’expression forcée du ligand de la VDS Hh dans le compartiment postérieur de l’aile active dans celui-ci le développement d’une aile supplémentaire (A, B). Hh active l’expression de Dpp qui agit comme il le fait au niveau de la frontière clonale AP. L’activation respecte l’identité génétique « postérieure » des cellules, l’aile présente une symétrie en miroir « PP ». L’activation normale qui se fait à la frontière des compartiments A et P et se propage dans les deux compartiments, fait une aile AP. (C, D) la même histoire avec les gènes activateurs homologues pour l’aile du poulet.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hrc/docannexe/image/10514/img-3.jpg
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Pour citer cet article

Référence électronique

Jean-François Nicolas, « L’embryologie: d’un vertige l’autre »Histoire de la recherche contemporaine [En ligne], Tome XII n°2 | 2023, mis en ligne le 23 septembre 2024, consulté le 11 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hrc/10514 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12e6a

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Auteur

Jean-François Nicolas

Chercheur invité à l’Institut Pasteur de Paris (jfnicolas@Yahoo.fr), il est ancien Professeur à l’IP et Directeur de Recherche CE à l’INSERM, spécialiste en analyse clonale et des comportements cellulaires dans la construction des structures des organismes. Il a dirigé l’Unité de Biologie moléculaire du développement (URA 2578 du CNRS) à l’IP de 1988 à 2013

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