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Les remèdes animaux chez Pline l’Ancien (Rome, ier siècle) : organiser une « plus grande médecine »

Animal Remedies in Pliny the Elder (Rome, 1st century): Organizing a "greater medicine"
Remedios animales en Plinio el viejo (Roma, siglo I): organizar una "medicina más grande"
Thomas Galoppin
p. 205-225

Résumés

L’Histoire naturelle de Pline l’Ancien, encyclopédie romaine du ier siècle de notre ère, consacre plusieurs volumes à la matière médicale tirée des animaux. Cette pharmacopée organique est toutefois interrogée par l’auteur, qui ne se contente pas d’inventorier des remèdes, mais déploie divers modes de validation ou d’invalidation du savoir qu’il sélectionne et organise selon des enjeux qui lui sont propres. L’argument d’autorité et la puissance divine de la Nature vont de pair avec un respect pour la tradition dans un effet de valorisation. À l’inverse, l’attribution du savoir aux « mages » sert à disqualifier certains remèdes animaux, jugés inefficaces, voire merveilleux. La structure des « fiches » que consacre Pline à certaines espèces animales permet également d’observer que les listes de remèdes construisent une gradation dans la sensibilité à l’égard des modes de consommation du corps animal.

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Texte intégral

  • 1 Claude Lévi-Strauss, La pensée sauvage, Paris, Plon, 1962, p. 21.

La vraie question n’est pas de savoir si le contact d’un bec de pic guérit les maux de dents, mais s’il est possible, d’un certain point de vue, de faire « aller ensemble » le bec de pic et la dent de l’homme […] et, par le moyen de ces groupements de choses et d’êtres, d’introduire un début d’ordre dans l’univers1.

  • 2 Brièvement mentionné par Ingvild Saelid Gilhus, Animals, Gods and Humans: Changing Attitudes to An (...)
  • 3 Par commodité, la référence à l’Histoire naturelle est ici abrégée HN. L’édition et la traduction (...)
  • 4 Le terme « encyclopédie » utilisé communément renvoie à la tradition d’enkuklios paideia à laquell (...)
  • 5 Pline le Jeune, Lettres, 6, 16. J. Beaujeu, La vie scientifique à Rome au premier siècle de l’Empi (...)
  • 6 Sandra Citroni Marchetti, Plinio il Vecchio e la tradizione del moralismo romano, Pise, Giardini, (...)
  • 7 HN, préface, 1-3 ; Valérie Naas, Le projet encyclopédique de Pline l’Ancien, Rome, École française (...)
  • 8 Pline le Jeune, Lettres, 3, 5.7-17. Le mode de travail en question, impliquant lecture orale des s (...)

1L’usage de composants animaux dans des méthodes de guérison engage différents registres de savoir dans l’Antiquité et peut mettre en lumière des enjeux culturels et sociaux. Le corps animal faisait partie de la pharmacopée du monde gréco-romain2. L’Histoire naturelle de Pline l’Ancien, publiée en 77, est une vaste encyclopédie de trente-sept livres, dont pas moins de quatre (28 à 30 et 32) sont consacrés à l’inventaire des usages médicaux de substances tirées des animaux, dont l’homme, avec une importante postérité3. Cet inventaire constitue pour nous un échantillon de l’ensemble des savoirs accessibles à Rome au ier siècle de notre ère et, plutôt qu’un tableau général des remèdes existant sur le marché à l’époque, il convient d’y voir une sélection arrangée par Pline4. Chevalier romain disparu au cours de l’éruption du Vésuve en 795, Pline met en avant une double préoccupation : rendre service à l’humanité et connaître la nature, selon des conceptions moralistes et naturalistes qui ont alors cours à Rome6. En outre, l’encyclopédie dédiée à l’empereur Titus prend part à une perspective impérialiste, car c’est dans ce cadre que sont pensées connaissances et techniques comme facteurs d’une amélioration des conditions de vie humaine7. Pour y participer, Pline a lu et dépouillé avec ses secrétaires des quantités d’ouvrages, puis classé l’ensemble des données prélevées selon ses propres choix épistémologiques, probablement au moyen d’un système de « fiches »8. Chaque donnée, puisée dans des livres en grec ou en latin, est insérée dans une trame utilitaire selon une grille de lecture idéologique globale. Lorsqu’il traite des animaux, Pline, qui n’est pas lui-même médecin, met tout particulièrement en avant la nécessité de trier les informations et de dénoncer les faux remèdes. Il s’agit ici de voir quelles sont les stratégies d’énonciation employées pour discriminer les mauvais usages du corps animal en médecine et, dès lors, quels sont les critères de validation ou d’invalidation d’une médecine tirée des animaux.

Argument d’autorité et puissance divine de la Nature

  • 9 HN, 7, 196 ; Jerry Stannard, « Herbal Medicine and Herbal Magic in Pliny’s Time », dans Jackie Pig (...)
  • 10 J’emprunte l’expression « pluralisme médico-religieux » à Nicolas Vornarx, « Vodou et pluralisme m (...)
  • 11 Trevor M. Murphy, Pliny the Elder’s “Natural History”: The Empire in the Encyclopedia, op. cit., p (...)

2Jerry Stannard reconnaît derrière l’expression ars herbaria de Pline la médecine traditionnelle romaine et définit celle-ci comme l’usage de simplicia (« simples ») dont les propriétés médicales sont soumises à des traitements rituels variés9. Il classe également les substances employées dans cette médecine traditionnelle en plusieurs groupes : les simples de nature végétale, animale, ou minérale ; ceux qui ont subi une transformation, comme le vinaigre ou la farine ; les préparations composées de plusieurs ingrédients ; et enfin les substances « magiques », « fabuleuses » ou « imaginaires ». On ne voit pas comment cette médecine traditionnelle romaine bien ordonnée s’inscrit dans le pluralisme médico-religieux du monde gréco-romain, où se croisent aisément les techniques d’une médecine professionnelle de type hippocratique, des médecines locales ou « populaires », des pratiques rituelles et guérisons divines, parfois dans les mêmes espaces ou chez les mêmes acteurs10. En outre, l’Histoire naturelle est un vaste dispositif énonciatif qui cumule plusieurs stratégies en vue de la réception d’un savoir cumulatif plus difficile à structurer11. Les choix d’organisation globale de l’inventaire et les modalités ponctuelles de validation du savoir permettent d’appréhender ces stratégies de transmission.

  • 12 HN, 28, 149 : digeremus enim in mala singula usus (« Nous les répartirons donc suivant leur emploi (...)
  • 13 Carmélia Opsomer, Robert Halleux, « Marcellus ou le mythe empirique », dans Philippe Mudry, Jackie (...)

3Deux systèmes de classement – non exclusifs – s’offrent à qui veut traiter de pharmacologie : par matières médicales (un bestiaire s’il s’agit d’animaux) ou par maladies (in morbos). Pline préfère classer la matière en fonction des maux qu’elle permet de combattre et c’est dès lors la trame principale de son inventaire pharmacologique12. C’est cette approche qui dirige les parabilia (gr. euporista), des recueils de remèdes faciles à l’usage d’une familia13. Pline adopte une organisation anthropocentrique qui part des remèdes tirés de l’homme et des mammifères les plus proches dans l’espace (livre 28), pour finir par les animaux aquatiques (livre 32), en passant par les autres animaux regroupés dans les livres 29 et 30. Chacun de ces trois ensembles est structuré par types de problèmes, en commençant par les venins et empoisonnements (toxicologie), puis le détail des maladies de la tête aux pieds (a capite ad calcem), suivies de celles qui peuvent affecter l’ensemble du corps – comme le « mal comitial » (épilepsie), le « mal royal » (jaunisse), le « feu sacré » (érysipèle) –, avant de finir par des données de gynécologie et d’obstétrique, des traitements pédiatriques, et enfin, très rapidement, par quelques données touchant au sommeil, à la sexualité, à l’ivresse et à la médecine vétérinaire.

4Lorsqu’il ouvre l’inventaire des remèdes animaux, « trouvant là une plus grande médecine (maiore medicina) », Pline parle de méthodologie :

  • 14 HN, 28, 1-2 : omnemque insumemus operam, licet fastidii periculum urgeat, quando ita decretum est (...)

[…] nous mettrons en ceci tout notre soin, au risque de provoquer l’ennui, ayant décidé de considérer moins l’agrément que l’utilité pour notre vie. Bien plus, nous dépisterons aussi les usages étrangers et même les méthodes des Barbares. Nous ne les rapporterons que sur la foi des auteurs, bien que nous nous soyons appliqués à ne choisir que les faits établis par la concordance des témoignages, préférant l’exactitude à l’abondance14.

  • 15 Guy Serbat, « La référence comme indice de distance dans l’énoncé de Pline l’Ancien », Revue de ph (...)
  • 16 Patrick Sinclair, « Rhetoric of Writing and Reading in the Preface to Pliny’s Naturalis Historia » (...)

5Les modes de valorisation des données dans l’encyclopédie ont été analysés par Guy Serbat15. Pline reste souvent imprécis sur ses opinions et consigne sans prendre de distance ni fournir de critère de validation ou d’invalidation. L’un des arguments majeurs pour estimer la valeur d’un animal comme remède est toutefois l’argument d’autorité, renvoyant le lecteur moins à l’observation des animaux ou de leurs propriétés qu’à ce qu’en disent les auteurs – souvent pluriels16. Le savoir reste fondé sur des sources :

  • 17 HN, 28, 260 : Somnos fieri lepore sumpto in cibis Cato arbitrabatur, uolgus et gratiam corpori in (...)

Caton pensait (arbitrabatur) que le lièvre pris comme aliment provoque le sommeil et les gens en général (uulgus) qu’il confère au corps de la beauté pour neuf jours, et cela sans doute par simple jeu de mots, mais cette croyance est si répandue qu’elle doit avoir quelque fondement (causa). Les mages prétendent (dicunt) que le fiel de chèvre, mais seulement d’une chèvre sacrifiée, en onction sur les yeux ou placé sous l’oreiller, provoque le sommeil17.

  • 18 Selon Françoise Gaide, la référence à un auteur, notamment la référence indéfinie, exprime « d’une (...)
  • 19 John Scarborough, « Roman Medicine to Galen », ANRW, II, 37.1, 1993, p. 3-48 (p. 20).
  • 20 Laurence Totelin, « A Little Old Lady Told Me: Appropriation of Weak Actor’s Knowledge in Graeco-R (...)
  • 21 HN, 25, 16; G. E. R. Lloyd, Science, Folklore and Ideology: Studies in the Life Sciences in Ancien (...)
  • 22 HN, 29, 30 : Lanis auctoritatem ueteres Romani etiam religiosam habuere, postes a nubentibus attin (...)
  • 23 HN., 28, 142 : Masurius palmam lupino adipi dedisse antiquos tradidit, ideo nouas nuptas illo peru (...)
  • 24 Masurius (ou Massurius) Sabinus était chevalier et jurisconsulte sous Auguste et Tibère. Artur Ste (...)
  • 25 Quelques lignes auparavant, Pline renvoie aux medici antiqui (« les anciens guérisseurs/médecins » (...)

6Pline donne successivement l’avis d’un auteur précis, ici Caton, une opinion généralisée, et les prétentions d’un type d’auteurs, les mages. Caton est en général valorisé et Pline conserve quelques-unes de ses médications d’ordre alimentaire. L’opinion partagée par la multitude, le uulgus, manque d’une telle autorité, et sa raison d’être (causa), si elle n’est pas niée, est inconnue18. Il s’agit là d’énoncer une « médecine populaire19 », qui chez d’autres auteurs implique une attitude ambiguë de réappropriation du savoir tout en marquant l’altérité des sources rurales, féminines ou étrangères20. Mais à propos des plantes, Pline signalait l’expérience directe des gens de terrain, « paysans et ignorants les lettres » (agrestes, letterarumque ignari), comme un gage de qualité21. Si l’opinion collective est romaine, le remède est validé : ainsi la puissance efficace de la laine est-elle attestée au livre 29 par le fait que « les anciens Romains attachaient à la laine un pouvoir même religieux, enjoignant aux nouvelles mariées d’en toucher les portes de leurs maisons22 ». Au livre précédent, c’était de la graisse de loup que les jeunes mariées devaient apposer aux portes pour prévenir les mala medicamenta – c’est-à-dire des maléfices23. Pline cite là une source écrite, Masurius24, tout en ancrant l’information dans la longue durée, puisque la pratique aurait été en usage chez les antiqui, les Anciens25. La graisse de loup et la laine de mouton ont des propriétés rituelles (religiosa) : si elles ne peuvent être expliquées par des propriétés physiologiques, les deux substances doivent l’être alors par la tradition.

  • 26 HN, 28, 134.
  • 27 HN, 28, 137 ; 142.
  • 28 HN, 28, 145.
  • 29 HN, 28, 146.
  • 30 HN, 30, 75.
  • 31 HN, 29, 34.
  • 32 Valérie Bonet, « Les animaux occidentaux dans la pharmacopée de Pline », dans Homme et animal dans (...)
  • 33 HN, 28, 147 : Quin et sanguis eorum septicam uim habet, item equarum, praeterquam uirginum ; erodi (...)
  • 34 HN, 28, 123 et 29, 29.
  • 35 HN, 30, 30 : Haec cum hircino sebo inlita lichenas ex facie tollit sceptica ui, ut supra dictum es (...)
  • 36 HN, 28, 242 : Sanguis equi adrodit carnes sceptica ui, item fimi equini inueterati fauilla (« Le s (...)
  • 37 Patricia Gaillard-Seux, « Une thérapeutique magique : l’action mimétique », dans Charles-Marie Ter (...)
  • 38 HN, 28, 197.

7Il apparaît souvent dans l’inventaire qu’un type de substance se voit attribuer des propriétés physiologiques : le lait est apaisant26 ; les graisses, cicatrisantes et réparatrices27, de même que les moelles28 ; la bile a des qualités pénétrantes29 ; les excréments et urines sont cicatrisants ou antiseptiques30 ; la laine nettoie31 ; les œufs ont des propriétés rafraîchissantes et adoucissantes32 ; le sang possède des propriétés physiologiques diverses33. Ces types de substances sont exposés par Pline dans des rubriques distinctes de l’organisation par animaux ou par maladies : d’abord, les « remèdes animaux communs et excellents » (communia animalium remedia atque eximia) que sont le lait et les laitages, les graisses, les moelles, la bile et le sang ; et plus loin, ces choses principales (rebus praecipuis) que sont la laine et les œufs34. Une propriété physiologique peut appartenir à un animal dans son entier35 ou à plusieurs de ses matières36. Le raisonnement analogique ne semble pas exclu d’une telle physiologie et un organe animal paraît propre à soigner son équivalent humain37 : un foie d’âne écrasé avec du persil, des noix et du miel est un mets favorable au foie de son consommateur38.

  • 39 Mirko D. Grmek, « Le concept de maladie », dans Mirko D. Grmek (dir.), Histoire de la pensée médic (...)
  • 40 Sabine Vogt, « Drugs and pharmacology », dans Robert J. Hankinson (dir.), The Cambridge Companion (...)
  • 41 Marie-Paule Duminil, « Les emplois de dynamis dans le Corpus hippocratique », dans Michel Crudelli (...)
  • 42 Avec la notion de phusis, ce qui s’apparente le plus à une « loi scientifique » selon Allan Gotthe (...)
  • 43 Alain Touwaide, « Galien et la toxicologie », ANRW, II, 37.2, 1994, p. 1887-1986 (plus précisément (...)
  • 44 Alain Touwaide, « Stratégies thérapeutiques : les médicaments », dans Mirko D. Grmek (dir.), Histo (...)
  • 45 Thomas Galoppin, « Les petits chiens guérisseurs : le soin par contact ? », Mètis, 15, 2017, p. 15 (...)

8Une grande partie de la médecine ancienne est fondée sur la conception des pathologies comme troubles physiologiques dus à un déséquilibre des humeurs et au rapport entre les qualités fondamentales que sont le chaud, le froid, le sec et l’humide39. La pharmacologie grecque s’est dotée d’une assise théorique assez stable au iiie siècle avant notre ère en usant du concept aristotélicien de dunamis, « puissance »40. Le terme est certes présent dans la littérature médicale dès les textes d’Hippocrate, où il désigne par exemple la capacité d’un aliment à produire certains effets41. Le principe aristotélicien de puissance et son corollaire energeia, l’« activité »42, ont pénétré le système hippocratique des humeurs par l’intermédiaire de la théorie des poisons qui fut élaborée par Dioclès de Caryste (ive siècle avant notre ère) et qui a fait encore autorité pour Galien au iisiècle de notre ère43. La dunamis ou potentialité des venins de petits animaux montre sa pleine actualisation à travers les effets qu’ils produisent chez leurs grandes victimes44. Pline transmet cette conception de la puissance pharmacologique lorsqu’il parle du uis d’une substance animale. Pour pouvoir s’exercer, cette puissance pharmacologique doit bien sûr entrer en contact avec le corps humain, et c’est là tout l’enjeu des modalités pratiques d’application des remèdes45.

  • 46 HN, 28, 123 : unde fortassis fabulae Iouem ita nutritum dixere. Il fait allusion à la légende d’Am (...)
  • 47 HN, 28, 124 : Stomacho adcommodatissimum caprinum, quoniam fronde magis quam herba uescuntur (« Ce (...)
  • 48 HN, 28, 146.
  • 49 Jean-Marie André, « Nature et culture chez Pline l’Ancien », dans Recherches sur les artes à Rome, (...)
  • 50 HN, 2, 18.
  • 51 HN, 2, 27 (trad. personnelle).
  • 52 HN., 2, 208 (trad. personnelle). Mary Beagon, Roman Nature: The Thought of Pliny the Elder, op. ci (...)
  • 53 HN, 32, 1 (trad. personnelle).
  • 54 Mary Beagon, Roman Nature: The Thought of Pliny the Elder, op. cit., p. 92.

9Les arguments naturalistes et les traditions religieuses peuvent se conforter mutuellement. Lorsque Pline évoque les propriétés générales des différents laits, il note que celui de la chèvre est le plus nourrissant après celui de l’homme, et que « de là peut-être est née la fable que Jupiter en fut nourri46 », alors qu’un peu après il propose une explication physiologique au fait qu’il soit le plus digeste47. La bile de cheval, quant à elle, compte parmi les poisons, ce que Pline rattache au fait qu’il est interdit à un prêtre, le flamen sacrorum, de toucher cet animal, bien qu’« un cheval soit immolé dans les rituels publics de Rome48 ». Sans nécessairement chercher à légitimer le rite ou à justifier le mythe, Pline ne peut en revanche pas dissocier la conception de la nature de considérations religieuses, car c’est ainsi qu’est pensée la phusis depuis les « présocratiques ». Pline défend des connaissances et un progrès technique au service de l’humanité dans les limites de la dignité humaine et du respect dû à la nature49. Selon lui, la divinité est à la fois une qualité de la nature (diuina natura) et celle qui consiste, pour les mortels, à améliorer la vie d’autres mortels (deus est mortali iuuare mortalem50). C’est aussi, et en étroite relation avec cette finalité, une puissance d’action de la nature : « la puissance de la nature est ce que nous appelons “dieu” (naturae potentia… est quod deum uocamus)51 » ; « une puissance divine diffuse dans toute la nature (diffusae… per omne naturae… numen)52 ». La nature rassemble des puissances d’action qui doivent être qualifiées de divines, parce qu’elles sont bénéfiques à la vie humaine, ou bien parce qu’elles se manifestent sous des formes singulières et merveilleuses, comme la capacité dont fait preuve le poisson rémora d’immobiliser les navires – une puissance secrète, potentia occulta53. Dès lors, les rites religieux possèdent un ancrage dans cette ratio naturae54.

10Pour comprendre comment Pline aborde les remèdes animaux, il faut donc tenir compte de cette conception d’une action divine de la nature, qui est rendue intelligible par le discours physiologique aussi bien que par les traditions mythiques ou rituelles qui en gardent la trace.

Un doigt de hibou : les erreurs des mages

11C’est par rapport à la puissance de la nature, mise en discours par les physiologues et les traditions religieuses, qu’est construit une sorte de contre-argument d’autorité, celui des « mages » :

  • 55 HN, 28, 228 : Febres arcet ceruorum caro, ut diximus ; eas quidem quae certo dierum numero redeunt (...)

La chair de cerf, comme nous l’avons dit, chasse les fièvres ; pour celles qui reviennent à jour fixe, on les guérit, si l’on en croit les Mages, en portant sur soi l’œil d’un loup conservé dans le sel. Il est un genre de fièvre appelé amphemerinos ; on s’en délivre, dit-on, en buvant dans deux hémines d’eau, trois gouttes de sang prises dans une veine de l’oreille d’un âne. Pour la fièvre quarte, les Mages ordonnent de porter en amulette de la fiente de chat avec un doigt de hibou (excrementa felis cum digito bubonis adalligari) et de ne les enlever, pour éviter les rechutes, qu’après la fin du septième accès. Qui a bien pu, je le demande, inventer cela ? Qu’est-ce que ce mélange ? Pourquoi a-t-on choisi de préférence un doigt de hibou (Cur digitus potissimum bubonis electus est) ? De plus modestes ont dit qu’il faut prendre dans du vin, avant les accès de fièvre quarte, le foie, conservé dans le sel, d’un chat tué pendant le décours de la lune. Ces mêmes Mages enduisent les doigts des pieds et des mains avec de la cendre de bouse de bœuf arrosée d’urine d’enfant. Ils font porter en amulette un cœur de lièvre et boire la présure [de l’animal] avant les accès. On donne aussi (datur et), avec du miel, du fromage de chèvre frais dont on a soigneusement exprimé le petit-lait55.

  • 56 Peut-être le paludisme et la pneumonie : Mirko D. Grmek, Les maladies à l’aube de la civilisation (...)
  • 57 HN, 8, 119 : Quasdam modo principes feminas scimus omnibus diebus matutinis carnem eam degustare s (...)

12Les fièvres sont des entités nosologiques très répandues dans la littérature médicale de l’Antiquité gréco-romaine, même si elles restent difficiles à situer dans une terminologie moderne56. Pline accorde probablement du crédit à la viande du cerf, animal au sujet duquel il écrivait au livre 8 qu’il « n’est pas sensible aux fièvres, et même [qu’]il les guérit (febrium morbos non sentit ... quin et medetur huic timori) », avant d’ajouter : « Nous savons que certaines dames de rang princier avaient coutume naguère de manger un peu de viande de cerf chaque matin, et que durant leur longue vie elles échappèrent aux fièvres. Mais on estime que ce remède ne vaut que si l’animal est mort d’une seule blessure57. » En suivant les principes énoncés par Guy Serbat, on peut accorder à la référence réitérée aux magi une valeur globale pour tout le paragraphe. J’en distingue toutefois la dernière médication au fromage de chèvre, isolée : comme la chair de cerf, elle peut n’être qu’une donnée diététique. Aux « mages » sont donc attribués clairement six traitements différents. L’un d’eux suscite une critique sous forme de questions rhétoriques : « Pourquoi a-t-on choisi de préférence un doigt de hibou ? » Pline ironise en mettant l’accent non sur le fait de porter une amulette ou même sur la posologie – dans laquelle le chiffre sept a probablement une valeur symbolique –, mais sur le choix des animaux et leur combinaison.

  • 58 HN, 28, 123.
  • 59 Propriétés plus actives de l’onagre par rapport à l’âne (28, 158), du cheval sauvage (equifer) par (...)
  • 60 Selon une manière binaire d’envisager le monde animal à Rome : Liliane Bodson, « Points de vue rom (...)
  • 61 François Poplin, « Matière, animal, homme, esprit : introduction à l’animal dans les pratiques rel (...)
  • 62 Le latin felis pourrait désigner plus largement tout petit mammifère carnivore sauvage, dont le ch (...)

13Les animaux concernés par le livre 28 sont essentiellement des animaux « de notre monde » (nostrum orbem)58. Ce sont des quadrupèdes terrestres (bovidés, équidés, caprinés, suidés) domestiques avec leurs équivalents sauvages, censés être plus forts59, auxquels s’ajoutent des animaux sauvages emblématiques (cervidés, ours, loup, renard, lièvre, chat, blaireau)60. Ces animaux possèdent des graisses, des os, du sang et de la bile, on en tire des produits laitiers ; ce sont là des « animaux vrais » qui, morphologiquement, occupent le cercle le plus proche de l’homme dans une conception anthropocentrique de l’animalité61. Du point de vue de l’homme romain propriétaire terrien, ce sont aussi les mammifères avec lesquels on fait société, qu’on les élève comme les animaux de pacage, qu’on s’en prémunisse (prédateurs) ou qu’on les chasse. C’est donc le chat (felis) qui a son entrée ici62, mais c’est sur le hibou que Pline attire l’attention.

  • 63 HN, 29, 81 ; 29, 82 ; 30, 52 ; 30, 95 ; 30, 110 ; 30, 118 ; 30, 121.
  • 64 HN, 29, 127 et 82.
  • 65 HN, 29, 81.
  • 66 HN, 10, 157 ; 29, 92 ; 29, 113 ; 29, 143 ; 30, 145 ; 30, 33.

14Les livres suivants de l’Histoire naturelle citent le hibou (bubo) comme remède contre le venin de serpent, pour le soin des cheveux, le bien de la rate, pour guérir la phrénitis, des douleurs des nerfs, des plaies ou la gale63. Ses yeux éclaircissent la vue et son sang fait friser les cheveux64. Son cœur porté en amulette donne du courage dans les combats et, posé sur le sein d’une femme endormie, lui fait révéler ses secrets65. Outre ses excréments et ses serres, on emploie donc son cœur, ses œufs, son sang, ses yeux, sa tête et sa cervelle. La chouette (noctua) guérit la pépie des volailles, protège des abeilles, guêpes, frelons et sangsues, soigne les maux de tête, réduit les oreillons, dégoûte de la boisson et remédie aux angines66. On emploie selon les cas sa cervelle, sa bile, son foie ou ses œufs. Pline transmet de cet animal une éthologie symbolique :

  • 67 HN, 10, 34 : Bubo, funebris et maxime abominatus publicis praecipue auspiciis, deserta incolit nec (...)

Le grand-duc, oiseau funèbre et plus que tous abhorré surtout dans les auspices publics, habite les lieux déserts et les solitudes, et même les endroits sinistres et inaccessibles, monstre de la nuit, qui n’émet aucun chant mais un gémissement. Aussi, qu’il se montre dans les villes ou en plein jour, c’est un funeste présage67.

  • 68 Pour avoir révélé que Proserpine a consommé aux Enfers des grains de grenade, Ascalaphus (éponyme (...)
  • 69 Hélène Normand, « Rapaces et prédation dans la littérature latine », dans Jean-Philip Brugal, Arme (...)
  • 70 HN, 29, 117.
  • 71 D’Arcy Wentworth Thompson, A Glossary of Greek Birds, Londres, Milford, 1936, p. 207-209 ; William (...)
  • 72 Antoninus Liberalis, 15 ; Horapollon, 2, 25 ; Artémidore, La clé des songes, 3, 65.
  • 73 Élien, Personnalité des animaux, 10, 37.
  • 74 Apulée, Les métamorphoses, 3, 21 ; Laura Cherubini, « Stregoneria », dans Maurizio Bettini, Willia (...)

15Les récits de métamorphose attribuent le sens funeste de ces présages à la malédiction divine68. Dans la littérature latine, comme dans la littérature grecque, hiboux et chouettes ajoutent aux traits négatifs du rapace, oiseau tueur, le soupçon de malfaisance qui pèse sur l’oiseau de nuit69. L’inventaire distingue l’axion (asio), traduction du grec skôps, du hibou, bubo, lequel traduit peut-être alors le grec nuktikorax, tandis que noctua, la chouette, correspond au grec glaux70. Le nuktikorax, ou « corbeau de nuit », est un animal difficile à identifier dans les textes grecs, où il peut à la fois être un rapace nocturne et le bihoreau gris (Nycticorax nycticorax L.), de la famille du héron (ardéidés)71. Le nuktikorax est un « messager de malheur » (kakaggelon) : Horapollon soutient que son cri signifie la mort et selon Artémidore d’Éphèse, tous les oiseaux de nuit sont de mauvais présages – en dehors de la chauve-souris pour les femmes enceintes72. Élien confirme par une anecdote le caractère funeste de la chouette : l’oiseau se tenait sur la lance de Pyrrhos d’Épire, avant sa mort à Argos73. La question rhétorique que pose Pline – Pourquoi le hibou ? – s’éclaire par la portée symbolique de l’oiseau dans un système de valeurs religieux. Par la suite, le rapace nocturne est emblématique de la pratique magique : lorsqu’une ensorceleuse du roman d’Apulée doit se métamorphoser pour aller « chasser » un nouvel amant, elle choisit le hibou, préfigurant le bestiaire médiéval des sorcières74.

  • 75 L’ars magica est qualifiée de fraudulentissima, intestabilis, inrita, inanis, portentosa, uana fal (...)

16Si Pline attire l’attention sur le hibou pour souligner l’inanité des remèdes qu’il attribue aux « mages », c’est en vertu de la dévalorisation culturelle de l’animal dans le champ du religieux. Plus exactement, Pline participe à la fabrique de la notion de magie en tant que registre de savoir à travers ces « mages » savants, pour mieux en dénoncer les uanitates, tromperies, illusions75. Or, l’usage d’animaux ou de matières animales parmi les remèdes est problématique, dans la mesure où cela ouvre la possibilité de transgressions qui relèvent de cette notion.

La répulsion naturelle des punaises

  • 76 Richard L. Gordon, « The Coherence of Magical-Herbal and Analogous Recipes », MHNH. Revista intern (...)

17Richard Gordon a proposé de distinguer deux ordres de principes directeurs de la pharmacopée des mages selon l’Histoire naturelle : des raisons implicites comme des prélèvements rituels, des infractions aux normes alimentaires et hygiéniques et des raisons explicites qui relèvent de théories savantes comme l’astrologie ou les lois de sympathie et d’antipathie76. La transgression passerait par des facteurs psychologiques (« plus le remède est répugnant, meilleur il est »), structurels (une infraction sociale délibérée serait efficace contre l’infraction aux lois de la nature que constituerait une maladie), conceptuel (le client s’attend précisément à ce que la « magie » ressemble à cela). Or, Pline interroge le facteur psychologique, la répugnance :

  • 77 HN, 29, 61 : Quaedam pudenda dictu tanta auctorum adseueratione commendantur ut praeterire fas non (...)

Il est certains remèdes répugnants à décrire (pudenda dictu), mais recommandés par les auteurs avec une telle insistance qu’il n’est pas permis de les passer sous silence ; les remèdes ne sont-ils pas faits de la concorde ou de la répulsion entre les choses (siquidem illa concordia rerum aut repugnantia medicinae gignuntur) ? Ainsi, les punaises (cimicum), animaux des plus infects et qu’il répugne même de nommer (foedissimi et dictu quoque fastidiendi), sont bonnes (natura contra), dit-on, pour les morsures de serpents, principalement pour celles de l’aspic77.

18Cette fiche sur les punaises, comprenant une série de prescriptions, fait partie d’un développement sur les anti-venins. Le problème de la répulsion que peut provoquer un animal est d’emblée écarté, de façon argumentée. Pline avait déjà averti ses lecteurs qu’il leur faudrait se départir de leurs préjugés :

  • 78 HN, 29, 28 : Neque enim dubitauerim aliquis fastidio futura quae dicentur animalia, at non Vergili (...)

Je ne doute pas en effet du mépris que montreront quelques-uns pour ce que je dirai bientôt des animaux ; pourtant Virgile n’a pas dédaigné de nommer sans nécessité les fourmis, les charançons et « les blattes, ennemies de la lumière, qui font leurs nids dans les ruches », ni Homère de décrire, au milieu des combats des dieux, l’acharnement d’une mouche ; ni la nature d’engendrer ces animaux, elle qui a engendré l’homme. Ainsi, sont-ce les causes et les effets (causas quisque et effectus) qu’il faut considérer, non les choses elles-mêmes78.

  • 79 Aristote, Parties des animaux, 1, 5 [645 a].

19Pline répète l’argument aristotélicien selon lequel même le plus répugnant des animaux témoigne de l’œuvre de la nature et a droit, à ce titre, à l’attention du savant79. Dans le cas des punaises, le dégoût est dépassé dès lors qu’intervient un argument d’autorité : ces insectes sont fréquemment évoqués par les auteurs. En outre, Pline peut faire appel à un principe d’ordre naturaliste : l’action binaire de la nature, qui procède précisément par associations et répulsions.

20L’argument d’autorité peut vaincre la répugnance du remède :

  • 80 Comme dans le cas de Caton l’Ancien (mort à 85 ans, HN, 29, 15), la longévité d’un Romain du passé (...)
  • 81 HN, 29, 65.

J’hésiterais à rapporter le remède que je vais dire, si M. Varron, à l’âge de quatre-vingt-trois ans80, n’avait publié que le traitement le plus efficace des morsures d’aspics est que les blessés boivent leur propre urine81.

  • 82 Robert Schilling citait ce même exemple dans son article « La place de Pline l’Ancien dans la litt (...)

21Pline peut être critique, il choisit néanmoins de se fier à un auteur romain qu’il estime beaucoup82. Pour les punaises, l’autorité est collective et non individualisée : c’est celle des auctores dans leur ensemble. Pline ne parle pas des magi, mais bien d’un savoir partagé dont la preuve (argumentum) est apportée par l’expérience :

  • 83 HN, 29, 61 : [...] argumento quod dicant gallinas quo die ederint non interfici ab aspide, carnesq (...)

[…] on invoque comme preuve que les poules ne succombent pas aux morsures de l’aspic le jour où elles ont mangé des punaises, et que leur chair est bonne pour ceux qui ont été piqués par un aspic83.

  • 84 Mirko D. Grmek, Le chaudron de Médée : l’expérimentation sur le vivant dans l’Antiquité, Le Plessi (...)

22Pline maintient peut-être une distance (dicitur, « dit-on »), mais l’expérience du remède, en quelque sorte testé sur des animaux, constitue un argument de poids84. Le facteur psychologique est donc, semble-t-il, bien moins discriminant que le serait l’argument d’autorité.

  • 85 HN, 29, 64 : Adeo nihil parens illa rerum omnium sine ingentibus causis genuit. Ingentibus traduit (...)
  • 86 Patricia Gaillard-Seux, « Sympathie et antipathie dans l’Histoire Naturelle de Pline l’Ancien », d (...)
  • 87 HN, 37, 59.
  • 88 HN, 24, 1-3.

23Une seconde clé de validation est la nature, « tant il est vrai [qu’elle], cette mère de toutes choses, n’a rien engendré sans de puissantes raisons ! »85. Ce que Pline nomme ici l’accord (concordia) ou la répulsion (repugnantia) correspond à un principe qu’il a érigé en loi fondamentale de la nature en l’identifiant aux termes grecs de sumpathia et antipathia86. Il l’invoque pour justifier que le diamant puisse être attaqué par le sang de bouc : « À présent, ce que nous avons tenté d’enseigner d’un bout à l’autre de ces livres sur les discordances et les concordances entre les éléments (de discordia rerum concordiaque), que les Grecs ont nommées antipathie et sympathie, ne peut être ailleurs plus manifeste87. » La discorde et la concorde sont au cœur de la pharmacologie selon Pline qui, à propos des plantes, disait : « On rencontre à chaque pas de merveilleux exemples de cette discorde et de cette affinité bien connues […]. De là est née la médecine88. » C’est en vertu de cette loi binaire que les punaises ont une nature contre les venins (natura contra). Il est intéressant qu’au terme de discordia Pline ait préféré celui de repugnantia : la répulsion prend alors une valeur positive, celle d’une efficacité naturelle.

  • 89 Suzanne Amigues, « Remèdes et poisons végétaux transmis à l’homme par l’animal », dans Isabelle Bo (...)
  • 90 HN, 29, 62.
  • 91 Ibid.
  • 92 Pierre Vesperini, « Le sens d’humanitas à Rome », Mélanges de l’École française de Rome (MEFRA), 1 (...)

24Ce n’est donc pas le caractère dégoûtant d’un animal qui est discriminant. En revanche, c’est dans les manières d’appliquer le remède que Pline opère un tri. On peut manger les poules qui auront becqueté des punaises, un moyen tout à fait reconnu de transmettre les vertus de certains remèdes89. Mais « de tous les procédés que l’on préconise, le plus tolérable est d’appliquer les punaises sur la morsure avec du sang de tortue, ou encore de les employer en fumigation pour détacher les sangsues et de les donner dans une boisson pour tuer celles qu’ont avalées les animaux90 ». On accepte donc des applications externes, et internes pour soigner des animaux. Quelques auteurs les prescrivent bien en onction sur les yeux ou instillés dans les oreilles (mélangés à de l’huile de rose), mais quand il s’agit d’ingérer les punaises dans un œuf, de la cire ou une fève contre les vomissements, fièvres quartes et autres maladies, Pline s’implique personnellement : « Je les regarde comme mensongères et indignes d’être rapportées (falsa nec referenda arbitror)91. » Ce que Pline a jugé le plus acceptable était plus précisément « le plus humain » (humanissimum) : le critère pour distinguer les modes d’application d’un remède animal répugnant est un degré d’éducation, de respect des règles sociales qui fondent un mode de vie élevé92. Le jugement porte donc moins sur des questions d’efficacité que sur des questions sociales.

Alouette rôtie et sacrifice au fourneau : graduer les pratiques guérisseuses

25Plutôt que des catégories bien nettes, c’est une approche graduée des pratiques que l’on peut trouver chez Pline :

  • 93 HN, 30, 62-63 : Coli uitium efficacissimue sanatur aue galerita assa in cibo sumpta. Quidam in uas (...)

La maladie du colon se guérit parfaitement en mangeant une alouette rôtie. Certains prescrivent de la brûler avec ses plumes dans un récipient neuf, de la réduire en poudre et de boire cette cendre dans de l’eau, à la dose de trois cuillérées pendant quatre jours ; certains autres, qu’on s’attache à la cuisse le cœur d’une alouette, et d’autres encore qu’on l’avale frais et encore chaud. Il existe une maison consulaire du nom d’Asprenas dans laquelle l’un des frères a été libéré du colon en prenant cet oiseau en aliment et son cœur enfermé dans un bracelet d’or, un autre par un certain sacrifice dans un sacellum de briques crues construit en forme de cheminée et obstrué lorsque le rite fut achevé93.

  • 94 Voir Romain Loriol, « La liste comme forme-savoir. Ou comment lire une liste antique ? », dans Mar (...)

26Cette courte série de remèdes possède les caractéristiques et les potentialités d’une liste : c’est une séquence de données qui ont en commun une espèce animale exploitée pour un but thérapeutique spécifique, mais qui sont différenciées par les modalités d’application qui entraînent une discontinuité au sein du savoir relatif à ce remède. Une telle série se prête au jeu de l’analyse structurale de la liste pour en comprendre les effets sur la valorisation des pratiques dans la démarche de transmission du savoir94.

1. L’aliment efficacissimus

  • 95 Celse, De la médecine, préface, 9.
  • 96 Harold W. Miller, « Dynamis and Physis in On Ancient Medicine », Transactions and Proceedings of t (...)
  • 97 HN, 29, 23-24.
  • 98 Dioscoride, 2, 54. Voir J. Pollard, Birds in Greek Life and Myth, Londres, Thames and Hudson, 1977 (...)

27De nombreuses prescriptions de l’inventaire de Pline appartiennent plus à la cuisine qu’au cabinet médical. L’un des domaines de l’art médical est le « régime » ou la « diète » (diaita), c’est-à-dire l’entretien du corps par les exercices, les bains et tout particulièrement par l’alimentation95. Le souci de maîtriser les effets de l’alimentation sur la santé du corps a donné lieu à l’élaboration de théories portant sur les dunameis des aliments96. Pline est en outre favorable à une médication qui viendrait de la cuisine de la ferme italienne contre une médecine grecque caractérisée à ses yeux par des médicaments ou aliments raffinés, chers ou exotiques97. Le premier mode de consommation de l’alouette, alimentaire, est donc à ses yeux le plus actif (efficacissimus). Il n’exprime aucune distanciation et c’est une modalité retenue également dans la pharmacopée de Dioscoride98.

2. Potion et amulette : « quidam iubent »

  • 99 HN, 30, 29 ; 32, 24 ; 98.
  • 100 Alexandre de Tralles, 8, 2 [Puschmann, II, p. 377].
  • 101 Alexandre de Tralles, 8, 2 [Puschmann, II, 375] : οἱ δὲ Θρᾷκες ἔτι ζῶντος τοῦ κορυδαλοῦ ἐξαιροῦντα (...)

28La potion prescrite à partir des cendres de l’animal fait en revanche l’objet d’une telle distance à travers la référence à « certains » auteurs (quidam), de même que l’amulette fabriquée à partir du cœur de l’oiseau, sans que cette distance invalide le savoir. La réduction de certaines matières animales en cendres, très courante, permet de les administrer sans perdre leurs propriétés naturelles99. Alexandre de Tralles donne au vie siècle une recette de potion à l’alouette similaire100. Il conserve également plus de détails quant à l’amulette : « Les Thraces arrachent le cœur de l’alouette encore vivante et font une amulette en l’attachant autour de la cuisse gauche101. » La pratique se voit donc attribuer une origine « barbare », élément qui pourrait appuyer la distanciation.

3. Avaler le cœur

  • 102 HN, 28, 90 (cœur de lion) ; 97 et 102 (de hyène) ; 225 (âne noir mâle).
  • 103 HN, 30, 102 : deuorari autem iubent cor mergi marini sine ferro exemptum, inueteratumque conteri e (...)
  • 104 HN, 30, 91. Sur l’usage du cœur d’hirondelle, voir Patricia Gaillard Seux, « De l’Orient à l’Occid (...)

29Ce sont d’autres (alii), plus distants encore, qui prescrivent d’avaler le cœur. Quelques fois, dans l’Histoire naturelle, le cœur est ingéré in cibo ou in potu, particulièrement s’il est de grande taille102. De manière générale, le cœur sert d’amulette, et quelques cas témoignent de son ingestion en une gorgée pour de petits gabarits : « On prescrit d’avaler (deuorari) le cœur d’un plongeon de mer extrait sans instrument de fer, séché, pilé, puis absorbé (bibi) dans de l’eau chaude ; des cœurs d’hirondelles avec du miel103. » Le cœur de l’hirondelle est aussi avalé à peine extrait de l’animal (recens deuoratum), dans le cadre d’un traitement contre l’épilepsie, à la suite de ce qu’ont préconisé « les mages »104. Le seul autre cas concerne le cœur de la taupe qui est avalé pour conférer des pouvoirs divinatoires aux « mages ». Le cœur d’un petit animal est généralement avalé cru, parfois à peine extrait de l’animal abattu (recens palpitansque), avec peut-être des excipients comme de l’eau chaude ou du miel pour en faciliter l’ingestion ; le verbe d’action usuel est deuorare. Le contexte, toutefois, implique souvent les « mages », des animaux exotiques ou des précisions à caractère symbolique – couleur noire de l’animal, instrument de fer. On comprend mieux, dès lors, que la pratique reçoive une place plus distante dans la fiche sur l’alouette.

4. L’anecdote des frères Asprenas

30Pline finit sur une anecdote. Deux frères d’une famille de rang consulaire ont lutté contre une maladie du colon en exploitant les propriétés de l’alouette de façon élaborée : le premier a mangé l’oiseau et porté son cœur en amulette, laquelle est dispendieuse – c’est un bracelet d’or ; le second frère a procédé à un véritable rituel sacrificiel suivant une procédure particulière. Cette dernière pratique est dans le même temps un récit de guérison individuelle, hors du savoir partagé. Il mérite de s’y arrêter car l’anecdote met en jeu des acteurs identifiés et, outre l’oiseau, un dispositif rituel avec un espace et des matériaux particuliers.

  • 105 Voir le commentaire dans Pline l’Ancien, Histoire naturelle, livre XXX, éd. et trad. par Alfred Er (...)
  • 106 Suétone, Auguste, 43.
  • 107 Suétone, Auguste, 56 (Henri Aillout a traduit « empoisonnement », mais je préfère donner un sens p (...)
  • 108 Voir James B. Rives, « Magic in Roman Law: The Reconstruction of a Crime », Classical Antiquity, 2 (...)

31Comme l’a noté l’éditeur, Alfred Ernout, deux Asprenas nous sont connus105 : Lucius Asprenas, qui a combattu les Germains avec Verus ; et, sous Auguste, Nonius Asprenas, dont Suétone rapporte qu’il a combattu lors des jeux troyens et, handicapé par une chute, a reçu de l’empereur un collier d’or et le surnom héréditaire de Torquatus106. Mais plus loin, Suétone nous apprend aussi que cet amicus de l’empereur dut se défendre d’une accusation de sorcellerie ou empoisonnement (ueneficium)107, sans doute selon la loi De sicariis et ueneficis108. Une mauvaise réputation a donc pu s’attacher à la mémoire de la famille.

  • 109 Annie Dubourdieu, John Scheid, « Lieux de culte, lieux sacrés : les usages de la langue. L’Italie (...)
  • 110 Marie-Odile Charles-Laforge, La religion privée à Pompéi, Naples, Centre Jean Bérard, 2009, p. 19- (...)
  • 111 Jonathan Z. Smith, « Trading Places », dans Marvin Meyer, Paul Mirecki (dir.), Ancient Magic and R (...)
  • 112 PGM, I, 283 ; PGM, IV, 900, 2941 et 3255 ; PGM, XII, 29 ; PGM, XXXVI, 189 ; XLVI, 5.
  • 113 Apulée, Apologie, 57-60.
  • 114 Fritz Graf, La magie dans l’Antiquité gréco-romaine, Paris, Les Belles Lettres, 1994, p. 96 ; John (...)
  • 115 Hans G. Kippenberg, « Magic in Roman Civil Discourse. Why Rituals Could Be Illegal », dans Peter S (...)

32Le sacrifice exécuté (sacrificium) implique la relation avec des puissances divines (qui ne sont pas nommées ici). Pline ne relève que des caractères anodins du rituel. Il a lieu dans un sacellum – terme assez vague désignant un petit espace de culte privé ou public, souvent privé à l’époque républicaine109. Il peut désigner ne serait-ce qu’une niche dans un mur de brique, comme certains laraires pompéiens110. Le sacellum des frères Asprenas doit être définitivement refermé : le rite relève donc de ce que Jonathan Z. Smith a appelé la religion du anywhere, pratiquée dans un espace éphémère créé pour les seuls besoins ponctuels du rite111. Le sacellum a également une forme particulière, celle d’un âtre ou d’un four, et un matériau particulier, également éphémère, la brique crue. Ce matériau est attesté dans les rituels des papyrus dits « magiques » d’Égypte gréco-romaine (PGM)112. L’âtre ou le four, espace où l’on cuit les aliments, évoque une cuisine rituelle domestique qui échappe au cadre du laraire familial, comme les rites nocturnes (nocturna sacra) qu’Apulée est accusé d’avoir opérés chez un certain Junius Crassus au iie siècle113. De la scène du crime que Junius Crassus a exposée dans un témoignage écrit (scripsit) ne restent que des quantités de plumes d’oiseaux (multas auium pinnas) dans un vestibule et des murs maculés de suie (parietes fuligine deformatos) : on en a retenu que des oiseaux ont été abattus pour des raisons magiques (magiae causa interemisset) lors de rites nocturnes (nocturnis sacris). Relever l’emplacement, la temporalité et le matériel exceptionnels de certains sacrifices de volatiles forge un soupçon de transgression rituelle114. L’espèce animale n’est pas en soi le signe d’une activité magique, bien moins que l’aspect clandestin des rituels115.

33Quand il ne les rejette pas explicitement, Pline hiérarchise donc les pratiques : de cette façon, il ne procède pas tant à une catégorisation entre tradition, médecine ou magie, mais adapte sa grille de lecture à l’inventivité des modes d’action guérisseuse. La liste hiérarchique des modes d’application de l’alouette est croissante ou pyramidale : au sommet, les modes les plus tolérables sont aussi les plus simples, conformément à une médecine de parabilia qui valorise les remèdes faciles ; plus on descend vers des applications complexes et considérées comme fallacieuses, plus on rencontre d’informations contextuelles (acteurs, espaces, temporalité, objets, combinaison d’ingrédients multiples). Dans le même temps, le remède complexe employé par un individu donné, par des collectifs marginalisés ou par des étrangers s’inscrit dans une dimension anecdotique, avec des formulations plus proches de la narration. L’effet est double : par contraste, les remèdes valorisés, plus aisément mis en acte, peuvent être aussi partagés, diffusés, globalisés ; le remède dévalorisé, quant à lui, devient un récit, une singularité que l’on raconte, que l’on donne à penser plutôt qu’à mettre en œuvre. Rejetés à la limite d’un savoir médical pratique, de tels remèdes anecdotiques n’ont-ils plus pour efficacité que celle de l’exemplum (ou plutôt contre-exemplum), voire du divertissement ?

*

34Dans un passage de la Tragédie de la goutte écrit au iie siècle de notre ère, Lucien de Samosate se moque de remèdes faits avec des substances tirées du corps animal :

  • 116 Lucien, La tragédie de la goutte, 167-170.

De tous les animaux, les os, les nerfs, les peaux,
la graisse, le sang, la moelle, l’urine, les déjections, le lait.
Certains boivent la cure pendant quatre jours,
certains pendant huit, mais la plupart pendant sept jours116.

  • 117 Daniel Ogden, « Animal Magic », dans Gordon L. Campbell (dir.), The Oxford Handbook of Animals in (...)

35La consommation médicale du corps animal ne met pas seulement en jeu les substances, elle implique aussi les modalités de leur consommation. Ces deux aspects doivent être traités ensemble pour comprendre le point de vue d’un auteur ancien sur cette exploitation particulière du corps animal117. On voit dès lors, chez Pline l’Ancien, que ce n’est pas tant la nature même de la matière animale qu’une certaine manière de la consommer qui peut valider ou invalider son statut de remède. Les substances tirées du corps des animaux, même si certaines paraissent répugnantes, peuvent avoir des propriétés guérisseuses validées par le savoir pharmacologique ou les traditions religieuses. L’auteur d’un recueil comme l’Histoire naturelle peut néanmoins classer les modes d’application du remède selon des critères d’efficacité ou de bienséance qui lui appartiennent. Cela ne met pas en cause fondamentalement une médecine tirée des animaux, mais introduit des degrés, des limites, des nuances dans le traitement du corps animal, dont l’étude doit prendre en compte de nombreux paramètres pour en saisir les implications culturelles.

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Notes

1 Claude Lévi-Strauss, La pensée sauvage, Paris, Plon, 1962, p. 21.

2 Brièvement mentionné par Ingvild Saelid Gilhus, Animals, Gods and Humans: Changing Attitudes to Animals in Greek, Roman and Early Christian Ideas, Londres, Routledge, 2006, p. 20-21.

3 Par commodité, la référence à l’Histoire naturelle est ici abrégée HN. L’édition et la traduction utilisées sont celles d’Alfred Ernout aux Belles Lettres dans la Collection des universités de France, en signalant d’éventuelles modifications. L’inventaire pharmacologique a fait l’objet d’une refonte (peut-être au ive siècle) dans l’anonyme Medicina Plinii, utilisée par Marcellus de Bordeaux pour écrire De Medicamentis (Sur les médicaments), à son tour refondu dans la Physica Plinii (Klaus-Dietrich Fischer, « Quelques réflexions sur la structure et deux nouveaux témoins de la Physica Plinii », dans Jackie Pigeaud, José Oroz Reta (dir.), Pline l’Ancien, témoin de son temps, Salamanque, Universidad Pontificia de Salamanca, 1987, p. 53-66 ; Yvette Hunt, The Medicina Plinii: Latin Text, Translation and Commentary, Londres/New York, Routledge, 2020). Sur cette postérité, voir Guy Serbat, « Pline l’Ancien : état présent des études sur sa vie, son œuvre et son influence », dans Hildegard Temporini, Wolfgang Haase (dir.), Aufstieg und Niedergang der römischen Welt (ANRW), II, 32.4, 1986, p. 2069-2200 (et plus précisément p. 2172-2173).

4 Le terme « encyclopédie » utilisé communément renvoie à la tradition d’enkuklios paideia à laquelle Pline se rattache (HN, préface, 14) : voir Sergio Sconocchia, « La structure de la NH dans la tradition scientifique et encyclopédique romaine », dans Jackie Pigeaud, José Oroz Reta (éd.), Pline l’Ancien, témoin de son temps, op. cit., p. 623-632.

5 Pline le Jeune, Lettres, 6, 16. J. Beaujeu, La vie scientifique à Rome au premier siècle de l’Empire, Paris, Palais de la découverte, 1957, p. 17.

6 Sandra Citroni Marchetti, Plinio il Vecchio e la tradizione del moralismo romano, Pise, Giardini, 1991 ; Mary Beagon, Roman Nature: The Thought of Pliny the Elder, Oxford, Clarendon Press, 1992.

7 HN, préface, 1-3 ; Valérie Naas, Le projet encyclopédique de Pline l’Ancien, Rome, École française de Rome, 2002 ; Trevor M. Murphy, Pliny the Elder’s “Natural History”: The Empire in the Encyclopedia, Oxford, Oxford University Press, 2004 ; John F. Healy, Pliny the Elder on Science and Technology, Oxford, Oxford University Press, 1999.

8 Pline le Jeune, Lettres, 3, 5.7-17. Le mode de travail en question, impliquant lecture orale des sources par un premier secrétaire et prise de notes par un notarius sur injonction de Pline – parfois à table ou au bain –, puis copie de ces extraits tachygraphes dans un répertoire probablement alphabétique avant la rédaction finale, est en partie responsable des erreurs identifiables dans le texte de l’Histoire naturelle : voir Jacques André, « Pline l’Ancien botaniste », Revue des études latines, 33, 1956, p. 297-318 ; et Valérie Naas, Le projet encyclopédique de Pline l’Ancien, op. cit., p. 107-136.

9 HN, 7, 196 ; Jerry Stannard, « Herbal Medicine and Herbal Magic in Pliny’s Time », dans Jackie Pigeaud, José Oroz Reta (dir.), Pline l’Ancien, témoin de son temps, op. cit., p. 95-106.

10 J’emprunte l’expression « pluralisme médico-religieux » à Nicolas Vornarx, « Vodou et pluralisme médico-religieux en Haïti : du vodou dans tous les espaces de soin », Anthropologie et Sociétés, 32 (3), 2008, p. 213-231.

11 Trevor M. Murphy, Pliny the Elder’s “Natural History”: The Empire in the Encyclopedia, op. cit., p. 6-11 : « Any reading that isolates a single passage from the Natural History and says of it “that is what Pliny thought in his heart” risks limiting what is really a many-voiced text. »

12 HN, 28, 149 : digeremus enim in mala singula usus (« Nous les répartirons donc suivant leur emploi par maladies... »).

13 Carmélia Opsomer, Robert Halleux, « Marcellus ou le mythe empirique », dans Philippe Mudry, Jackie Pigeaud (dir.), Les écoles médicales à Rome, Genève, Droz, 1991, p. 159-178. Le plus ancien exemplaire du genre devait être les Euporista d’Apollonios Mus, à la fin du ier siècle avant notre ère.

14 HN, 28, 1-2 : omnemque insumemus operam, licet fastidii periculum urgeat, quando ita decretum est minorem gratiae quam utilitatium uitae respectum habere. Quin immo externa quoque et barbaros etiam ritus indagabimus. Fides tantum auctores appellet, quamquam et ipsi consensu propre iudicii ista eligere laborauimus potiusque curae rerum quam copiae institimus (trad. modifiée).

15 Guy Serbat, « La référence comme indice de distance dans l’énoncé de Pline l’Ancien », Revue de philologie, 47 (1), 1973, p. 38-49.

16 Patrick Sinclair, « Rhetoric of Writing and Reading in the Preface to Pliny’s Naturalis Historia », dans Anthony J. Boyle, William J. Dominik (dir.), Flavian Rome: Culture, Image, Text, Leyde/Boston, Brill, 2003, p. 278-299 ; Sandra Citroni Marchetti, « L’auteur en tant que personnage : Pline l’Ancien dans la Naturalis Historia », dans Danielle van Mal-Maeder, Alexandre Burnier, Loreto Núñez (dir.), Jeux de voix : énonciation, intertextualité et intentionnalité dans la littérature antique, Berne/Berlin/Bruxelles, P. Lang, 2009, p. 175-199 ; Pietro Li Causi, « Portrait du philosophe en Pline l’Ancien. Les fonctions du nom d’Aristote chez Plin. HN 8-11 », dans Yves Lehmann (dir.), Aristoteles Romanus : la réception de la science aristotélicienne dans l’Empire gréco-romain, Turnhout, Brepols, 2013, p. 107-120 ; Françoise Gaide a montré au moins une exception, si ce n’est une contradiction, à ces règles : « Le cerf contre les serpents (Plin. nat. 28, 149-151) : deux lectures », dans Armelle Debru, Nicoletta Palmieri (dir.), « Docente natura » : mélanges de médecine ancienne et médiévale offerts à Guy Sabbah, Saint-Étienne, Publications de l’université de Saint-Étienne, 2001, p. 105-111.

17 HN, 28, 260 : Somnos fieri lepore sumpto in cibis Cato arbitrabatur, uolgus et gratiam corpori in VIIII dies, friuolo quidem ioco, cui tamen aliqua debeat subesse causa in tanta persuasione. Magi felle caprae, sacrificatae dumtaxat, inlito oculis uel sub puluino posito somnum allici dicunt (trad. d’Alfred Ernout modifiée). Le jeu de mots opère entre lepus, leporis, « le lièvre », et lepos, leporis, « grâce, charme, agrément, beauté esthétique » (ce qui supposerait une pratique typiquement latine) : Eugene S. McCartney, « Verbal Homeopathy and the Etymological Story », The American Journal of Philology, 48 (4), 1927, p. 326-343.

18 Selon Françoise Gaide, la référence à un auteur, notamment la référence indéfinie, exprime « d’une manière syntaxiquement extra-prédicative ou intra-prédicative » son incertitude, tandis que si Pline ne dit rien, c’est parce qu’il adhère implicitement. Françoise Gaide « Quelques réflexions à propos des modalités épistémiques, appréciatives et injonctives dans les textes médicaux latins », dans Michèle Fruyt, Claude Moussy (dir.), Les modalités en latin, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2002, p. 67-75.

19 John Scarborough, « Roman Medicine to Galen », ANRW, II, 37.1, 1993, p. 3-48 (p. 20).

20 Laurence Totelin, « A Little Old Lady Told Me: Appropriation of Weak Actor’s Knowledge in Graeco-Roman Pharmacology », dans Moritz Epple, Annette Imhausen, Falk Müller (dir.), Weak Knowledge: Forms, Functions, and Dynamics, Francfort/New York, Campus Verlag, 2020, p. 109-124.

21 HN, 25, 16; G. E. R. Lloyd, Science, Folklore and Ideology: Studies in the Life Sciences in Ancient Greece, Cambridge/New York, Cambridge University Press, 1983, p. 147-148.

22 HN, 29, 30 : Lanis auctoritatem ueteres Romani etiam religiosam habuere, postes a nubentibus attingi iubentes.

23 HN., 28, 142 : Masurius palmam lupino adipi dedisse antiquos tradidit, ideo nouas nuptas illo perunguere postes solitas, ne quid mali medicamenti inferretur (« Masurius rapporte que les anciens donnaient la palme à la graisse du loup ; aussi les nouvelles mariées avaient-elles coutume d’en graisser les jambages des portes pour empêcher d’y introduire tout maléfice »).

24 Masurius (ou Massurius) Sabinus était chevalier et jurisconsulte sous Auguste et Tibère. Artur Steinwenter, « Sabinus (29) », dans August F. Pauly (dir.), Paulys Realencyclopädie der classischen Altertumswissenschaft (RE), I, A, 2, 1970, col. 1600-1601.

25 Quelques lignes auparavant, Pline renvoie aux medici antiqui (« les anciens guérisseurs/médecins »).

26 HN, 28, 134.

27 HN, 28, 137 ; 142.

28 HN, 28, 145.

29 HN, 28, 146.

30 HN, 30, 75.

31 HN, 29, 34.

32 Valérie Bonet, « Les animaux occidentaux dans la pharmacopée de Pline », dans Homme et animal dans l’Antiquité romaine, actes du colloque de Nantes, 29 mai-1er juin 1991, Tours, Centre de recherches André Piganiol, 1995, p. 163-172.

33 HN, 28, 147 : Quin et sanguis eorum septicam uim habet, item equarum, praeterquam uirginum ; erodit, emarginat ulcera (« Le sang de cheval a, lui aussi, un pouvoir septique, de même que celui de la jument, sauf si elle est vierge ; il ronge et détruit les bords des ulcères »). Le sang de taureau compte au nombre des toxiques (inter uenena, 28, 148).

34 HN, 28, 123 et 29, 29.

35 HN, 30, 30 : Haec cum hircino sebo inlita lichenas ex facie tollit sceptica ui, ut supra dictum est (« Appliqué avec du suif de bouc, le bupreste guérit le lichen de la face, grâce, comme on vient de le dire, à son pouvoir sceptique ») ; 32, 87 : Uis eorum ut exulcerent, purgent (« Ces espèces [d’alcyoneum] ont la propriété d’excorier et de déterger »).

36 HN, 28, 242 : Sanguis equi adrodit carnes sceptica ui, item fimi equini inueterati fauilla (« Le sang de cheval, par son pouvoir sceptique, corrode les chairs, ce que fait aussi la braise du crottin de cheval desséché »).

37 Patricia Gaillard-Seux, « Une thérapeutique magique : l’action mimétique », dans Charles-Marie Ternes (dir.), « La thérapeutique dans l’Antiquité » : pourquoi ? jusqu’où ?, actes des 8e Rencontres scientifiques de Luxembourg, Luxembourg, Centre Alexandre-Wiltheim, 1999, p. 22-39 ; Thomas Galoppin, « Une “cuisine” guérisseuse avec des animaux dans le monde gréco-romain : éliminer, découper, transférer », I Quaderni del Ramo d’Oro, 9, 2017, p. 61-82, en ligne : http://www.qro.unisi.it/frontend/node/205 (consulté le 28 juin 2022).

38 HN, 28, 197.

39 Mirko D. Grmek, « Le concept de maladie », dans Mirko D. Grmek (dir.), Histoire de la pensée médicale en Occident, t. 1, Antiquité et Moyen Âge, Paris, Éditions du Seuil, 1995, p. 211-226.

40 Sabine Vogt, « Drugs and pharmacology », dans Robert J. Hankinson (dir.), The Cambridge Companion to Galen, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, p. 304-322.

41 Marie-Paule Duminil, « Les emplois de dynamis dans le Corpus hippocratique », dans Michel Crudellier, Annick Jaulin, David Lefevre, (dir.), « Dunamis » : autour de la puissance chez Aristote, Louvain-la-Neuve/Paris/Dudley, Éditions Peeters, 2008, p. 15-25 ; Danielle Gourevitch, « L’alimentation animale de la femme enceinte, de la nourrice et du petit enfant sevré (à propos des livres I et II des Gynaika de Soranos d’Éphèse) », dans Homme et animal dans l’Antiquité romaine, op. cit., p. 283-293.

42 Avec la notion de phusis, ce qui s’apparente le plus à une « loi scientifique » selon Allan Gotthelf, Teleology, First Principles, and Scientific Method in Aristotle’s Biology, Oxford, Oxford University Press, 2012, p. 8-10.

43 Alain Touwaide, « Galien et la toxicologie », ANRW, II, 37.2, 1994, p. 1887-1986 (plus précisément p. 1963-1979).

44 Alain Touwaide, « Stratégies thérapeutiques : les médicaments », dans Mirko D. Grmek (dir.), Histoire de la pensée médicale en Occident, t. I, Antiquité et Moyen Âge, op. cit., p. 227-237.

45 Thomas Galoppin, « Les petits chiens guérisseurs : le soin par contact ? », Mètis, 15, 2017, p. 157-179 ; Id., « Une “cuisine” guérisseuse avec des animaux dans le monde gréco-romain : éliminer, découper, transférer », art. cit..

46 HN, 28, 123 : unde fortassis fabulae Iouem ita nutritum dixere. Il fait allusion à la légende d’Amalthée.

47 HN, 28, 124 : Stomacho adcommodatissimum caprinum, quoniam fronde magis quam herba uescuntur (« Celui qui convient le mieux à l’estomac est le lait de la chèvre, parce qu’elle se nourrit davantage de feuilles que d’herbe »).

48 HN, 28, 146.

49 Jean-Marie André, « Nature et culture chez Pline l’Ancien », dans Recherches sur les artes à Rome, Paris, Les Belles Lettres, 1978, p. 7-17 ; Klaus Sallmann, « La responsabilité de l’homme face à la nature », dans Jackie Pigeaud, José Oroz Reta (dir.), Pline l’Ancien, témoin de son temps, op. cit., p. 251-266.

50 HN, 2, 18.

51 HN, 2, 27 (trad. personnelle).

52 HN., 2, 208 (trad. personnelle). Mary Beagon, Roman Nature: The Thought of Pliny the Elder, op. cit., p. 100-101.

53 HN, 32, 1 (trad. personnelle).

54 Mary Beagon, Roman Nature: The Thought of Pliny the Elder, op. cit., p. 92.

55 HN, 28, 228 : Febres arcet ceruorum caro, ut diximus ; eas quidem quae certo dierum numero redeunt, oculis lupi dexter salsus adalligantusque, si credimus Magis. Est genus febrium quod amphemerinon uocant ; hoc liberari tradunt, si quis e uena auris asini tres guttas sanguinis in duabus heminis aquae hauserit. Quartanis Magi excrementa felis cum digito bubonis adalligari iubent et, ne recidant, non remoueri septeno circumitu. Quis hoc, quaeso, inuenire potuit ? Quae est ista mixtura ? Cur digitus potissimum bubonis electus est ? Modestiores iocur felis decrescente luna occisae inueteratum ale ex uino bibendum ante accessiones quartanae dixere. Idem Magi fimi bubuli cinere consperso puerorum urina inlinunt digitos pedum manuumque. Leporis cor adalligant, coagulum ante accessiones propinant. Datur et caseus caprinus recens cum melle diligenter sero expresso.

56 Peut-être le paludisme et la pneumonie : Mirko D. Grmek, Les maladies à l’aube de la civilisation occidentale : recherches sur la réalité pathologique dans le monde grec préhistorique, archaïque et classique, Paris, Payot, 1983, p. 399.

57 HN, 8, 119 : Quasdam modo principes feminas scimus omnibus diebus matutinis carnem eam degustare solitas et longo aeuo caruisse febribus, quod ita demum existimant ratum, si uulnere uno interierit. Voir Hippocrate, Du régime, 2, 46.4.

58 HN, 28, 123.

59 Propriétés plus actives de l’onagre par rapport à l’âne (28, 158), du cheval sauvage (equifer) par rapport au cheval, sur simple déduction de la part de Pline, de même que pour l’auroch et le bison par rapport aux autres bovins (28, 159).

60 Selon une manière binaire d’envisager le monde animal à Rome : Liliane Bodson, « Points de vue romains sur l’animal domestique et la domestication », dans Homme et animal dans l’Antiquité romaine, op. cit., p. 7-49.

61 François Poplin, « Matière, animal, homme, esprit : introduction à l’animal dans les pratiques religieuses », dans Patrice Méniel (dir.), Animal et pratiques religieuses : les manifestations matérielles, actes du colloque international de Compiègne, 11-13 novembre 1988, Paris, Laboratoire d’anatomie comparée, 1989, p. 13-21.

62 Le latin felis pourrait désigner plus largement tout petit mammifère carnivore sauvage, dont le chat sauvage : Laurence Bobis, Une histoire du chat, de l’Antiquité à nos jours, Paris, Éditions du Seuil, 2006, p. 30-31. Il traduit peut-être ici le grec ailouros, « chat », lequel peut également avoir désigné un mustélidé (Kenneth F. Kitchell Jr., Animals in the Ancient World from A to Z, Londres/New York, Routledge, 2014, « Ailouros », p. 2, et « Cat », p. 24-25).

63 HN, 29, 81 ; 29, 82 ; 30, 52 ; 30, 95 ; 30, 110 ; 30, 118 ; 30, 121.

64 HN, 29, 127 et 82.

65 HN, 29, 81.

66 HN, 10, 157 ; 29, 92 ; 29, 113 ; 29, 143 ; 30, 145 ; 30, 33.

67 HN, 10, 34 : Bubo, funebris et maxime abominatus publicis praecipue auspiciis, deserta incolit nec tantum desolata, sed dira etiam et inaccessa, noctis monstrum, nec cantu aliquo uocalis, sed gemitu. Itaque in urbibus aut omnino in luce uisus dirum ostentum est.

68 Pour avoir révélé que Proserpine a consommé aux Enfers des grains de grenade, Ascalaphus (éponyme en grec) devient « un lourd hibou, présage funeste pour les mortels (Ignauus bubo, dirum mortalibus omen) » : Ovide, Les métamorphoses, 5, 533-550.

69 Hélène Normand, « Rapaces et prédation dans la littérature latine », dans Jean-Philip Brugal, Armelle Gardeisen, Arnaud Zucker (dir.), Prédateurs dans tous leurs états : évolution, biodiversité, interactions, mythes, symboles, Antibes, Éditions APDCA, 2011, p. 421-431. Voir aussi Hélène Normand, Les rapaces dans les mondes grec et romain : catégorisation, représentations culturelles et pratiques, Bordeaux, Ausonius Éditions, 2015.

70 HN, 29, 117.

71 D’Arcy Wentworth Thompson, A Glossary of Greek Birds, Londres, Milford, 1936, p. 207-209 ; William G. Arnott, Birds in the Ancient World from A to Z, Londres/New York, Routledge, 2007, p. 152-153.

72 Antoninus Liberalis, 15 ; Horapollon, 2, 25 ; Artémidore, La clé des songes, 3, 65.

73 Élien, Personnalité des animaux, 10, 37.

74 Apulée, Les métamorphoses, 3, 21 ; Laura Cherubini, « Stregoneria », dans Maurizio Bettini, William M. Short (dir.), Con i Romani. Un’ antropologia della cultura antica, Bologne, Il Mulino, 2014, p. 127-142 ; Colette Méchin, « Hiboux et chouettes dans la pensée traditionnelle des provinces françaises », dans Liliane Bodson (dir.), Regards croisés de l’histoire et des sciences naturelles sur le loup, la chouette, le crapaud dans la tradition occidentale, Liège, Université de Liège, 2003, p. 43-61.

75 L’ars magica est qualifiée de fraudulentissima, intestabilis, inrita, inanis, portentosa, uana falsaque, la uanitas des mages étant régulièrement épinglée : HN, 22, 20 ; 26, 18 ; 27, 57 ; 28, 37, 81, 89, 94, 100 (?), 118 ; 30, 1 ; 37, 54 et 124. Richard L. Gordon, « Quaedam Veritatis Umbrae: Hellenistic Magic and Astrology », dans Per Bilde et al. (dir.), Conventional Values of the Hellenistic Greeks, Aarhus, Aarhus University Press, 1997, p. 128-158 ; Matthew W. Dickie, « The Learned Magician and the Collection and Transmission of Magical Lore », dans David R Jordan, Hugo Montgomery, Einar Thomassen (dir.), The World of Ancient Magic, Bergen, Norwegian Institute at Athens, 1999, p. 163-193 ; Matthew W. Dickie, Magic and Magicians in the Greco-Roman World, Londres/New York, Routledge, 2001.

76 Richard L. Gordon, « The Coherence of Magical-Herbal and Analogous Recipes », MHNH. Revista internacional de investigación sobre magia y astrología antiguas, 7, 2007, p. 115-146 ; id. « Magian Lessons in Natural History: Unique Animals in Graeco-Roman Natural Magic », dans Jitse Dijkstra, Justin Kroesen, Yme Kuiper (dir.), Myths, Martyrs and Modernity: Studies in the History of Religions in Honour of Jan N. Bremmer, Leyde/Boston, Brill, 2010, p. 250-269.

77 HN, 29, 61 : Quaedam pudenda dictu tanta auctorum adseueratione commendantur ut praeterire fas non sit, siquidem illa concordia rerum aut repugnantia medicinae gignuntur: ueluti cimicum, animalis foedissimi et dictu quoque fastidiendi, natura contra serpentium morsus et praecipue aspidum ualere dicitur (trad. modifiée).

78 HN, 29, 28 : Neque enim dubitauerim aliquis fastidio futura quae dicentur animalia, at non Vergilio fuit nominare formicas nulla necessitate et curculiones ac lucifugis congesta cubilia blattis, non Homero inter proelia deorum inprobitatem muscae describere, non naturae gignere ista, cum gignat hominem. Proinde causas quisque et effectus, non res aestimet (tr. modifiée) ; Virgile, Géorgiques, I, 186, IV, 243 ; Homère, Iliade, XVIII, 570-572.

79 Aristote, Parties des animaux, 1, 5 [645 a].

80 Comme dans le cas de Caton l’Ancien (mort à 85 ans, HN, 29, 15), la longévité d’un Romain du passé est signe de l’efficacité de sa médecine.

81 HN, 29, 65.

82 Robert Schilling citait ce même exemple dans son article « La place de Pline l’Ancien dans la littérature technique », Revue de philologie, 52, 1978, p. 272-283, ici p. 279.

83 HN, 29, 61 : [...] argumento quod dicant gallinas quo die ederint non interfici ab aspide, carnesque earum percussis plurimum prodesse.

84 Mirko D. Grmek, Le chaudron de Médée : l’expérimentation sur le vivant dans l’Antiquité, Le Plessis-Robinson, Institut Synthélabo pour le progrès de la connaissance, 1997, p. 101-102.

85 HN, 29, 64 : Adeo nihil parens illa rerum omnium sine ingentibus causis genuit. Ingentibus traduit ici par « puissantes » peut avoir le sens de « remarquables, étonnantes ».

86 Patricia Gaillard-Seux, « Sympathie et antipathie dans l’Histoire Naturelle de Pline l’Ancien », dans N. Palmieri (éd.), Rationnel et irrationnel dans la médecine antique et médiévale : aspects historiques, scientifiques et culturels, actes du colloque de Saint-Etienne, 14-15 novembre 2002, Saint-Étienne, Publications de l’université de Saint-Étienne, 2003, p. 113-128 ; Arnaud Zucker, « Sympathies et antipathies naturelles : au-delà du principe », dans Anne Balansard, Gilles Dorival, Mireille Loubet (dir.), Prolongements et renouvellements de la tradition classique, études réunies en hommage à Didier Pralon, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 2011, p. 93-108.

87 HN, 37, 59.

88 HN, 24, 1-3.

89 Suzanne Amigues, « Remèdes et poisons végétaux transmis à l’homme par l’animal », dans Isabelle Boehm, Pascal Luccioni (dir.), Le médecin initié par l’animal : animaux et médecine dans l’Antiquité grecque et latine, Lyon, Maison de l’Orient et de la Méditerranée, 2008, p. 97-107.

90 HN, 29, 62.

91 Ibid.

92 Pierre Vesperini, « Le sens d’humanitas à Rome », Mélanges de l’École française de Rome (MEFRA), 127 (1), 2015, p. 131-144.

93 HN, 30, 62-63 : Coli uitium efficacissimue sanatur aue galerita assa in cibo sumpta. Quidam in uase nouo cum plumis exuri iubent conterique in cinerem, bibi ex aqua coclearibus ternis per quadriduom, quidam cor eius adalligari femini ; alii recens tepensque adhuc deuorari. Consularis Asprenatum domus est in qua alter e fratribus colo liberatus est aue hac in cibo sumpta et corde eius armilla aurea incluso, alter sacrificio quodam facto crudis laterculis ad formam camini atque, ut sacrum peractum est, obstructo sacellum (trad. Alfred Ernout modifiée).

94 Voir Romain Loriol, « La liste comme forme-savoir. Ou comment lire une liste antique ? », dans Marie Ledentu, Romain Loriol (dir.), Penser en listes dans les mondes grec et romain, Bordeaux, Ausonius Éditions, 2020, p. 15-48 (je remercie Romain Loriol de m’avoir généreusement envoyé son article avant sa publication).

95 Celse, De la médecine, préface, 9.

96 Harold W. Miller, « Dynamis and Physis in On Ancient Medicine », Transactions and Proceedings of the American Philological Association (TAPA), 83, 1952, p. 184-197.

97 HN, 29, 23-24.

98 Dioscoride, 2, 54. Voir J. Pollard, Birds in Greek Life and Myth, Londres, Thames and Hudson, 1977, p. 133.

99 HN, 30, 29 ; 32, 24 ; 98.

100 Alexandre de Tralles, 8, 2 [Puschmann, II, p. 377].

101 Alexandre de Tralles, 8, 2 [Puschmann, II, 375] : οἱ δὲ Θρᾷκες ἔτι ζῶντος τοῦ κορυδαλοῦ ἐξαιροῦνται τὴν καρδίαν, περίαπτον ποιοῦσιν ἐν τῷ μηρῷ τᾷ ἀριστέρῳ περιθέντες αὐτό (trad. personnelle).

102 HN, 28, 90 (cœur de lion) ; 97 et 102 (de hyène) ; 225 (âne noir mâle).

103 HN, 30, 102 : deuorari autem iubent cor mergi marini sine ferro exemptum, inueteratumque conteri et in calida aqua bibi, corda hirundinum cum melle.

104 HN, 30, 91. Sur l’usage du cœur d’hirondelle, voir Patricia Gaillard Seux, « De l’Orient à l’Occident : les recettes médico-magiques tirées de l’hirondelle », dans Véronique Dasen et Jean-Michel Spieser (dir.), Les savoirs magiques et leur transmission de l’Antiquité à la Renaissance, Florence, Sismel/Edizioni del Galluzzo, 2014, p. 169-194, notamment p. 175.

105 Voir le commentaire dans Pline l’Ancien, Histoire naturelle, livre XXX, éd. et trad. par Alfred Ernout, Paris, Les Belles Lettres, 1963, no 1 du § 63, p. 91.

106 Suétone, Auguste, 43.

107 Suétone, Auguste, 56 (Henri Aillout a traduit « empoisonnement », mais je préfère donner un sens plus général à ueneficii).

108 Voir James B. Rives, « Magic in Roman Law: The Reconstruction of a Crime », Classical Antiquity, 22 (2), 2003, p. 313-339.

109 Annie Dubourdieu, John Scheid, « Lieux de culte, lieux sacrés : les usages de la langue. L’Italie romaine », dans André Vauchez (dir.), Lieux sacrés, lieux de culte, sanctuaires : approches terminologiques, méthodologiques, historiques et monographiques, Rome, École française de Rome, 2000, p. 59-80.

110 Marie-Odile Charles-Laforge, La religion privée à Pompéi, Naples, Centre Jean Bérard, 2009, p. 19-47.

111 Jonathan Z. Smith, « Trading Places », dans Marvin Meyer, Paul Mirecki (dir.), Ancient Magic and Ritual Power, Boston/Leyde, Brill, 1995, p. 13-27 (repris dans Jonathan Z. Smith, Relating Religion: Essays on the Study of Religion, Chicago, The University of Chicago Press, 2004, p. 215-229).

112 PGM, I, 283 ; PGM, IV, 900, 2941 et 3255 ; PGM, XII, 29 ; PGM, XXXVI, 189 ; XLVI, 5.

113 Apulée, Apologie, 57-60.

114 Fritz Graf, La magie dans l’Antiquité gréco-romaine, Paris, Les Belles Lettres, 1994, p. 96 ; John Scheid, « Sacrifices for Gods and Ancestors », dans Jörg Rüpke (dir.), A Companion to Roman Religion, Malden, Massachussets, Blackwell, 2011, p. 263-271.

115 Hans G. Kippenberg, « Magic in Roman Civil Discourse. Why Rituals Could Be Illegal », dans Peter Schäfer, Hans G. Kippenberg (dir.), Envisioning Magic: A Princeton Seminar and Symposium, Leyde, Brill, 1997, p. 137-163.

116 Lucien, La tragédie de la goutte, 167-170.

117 Daniel Ogden, « Animal Magic », dans Gordon L. Campbell (dir.), The Oxford Handbook of Animals in Classical Thought and Life, Oxford, Oxford University Press, 2014, p. 294-309.

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Pour citer cet article

Référence papier

Thomas Galoppin, « Les remèdes animaux chez Pline l’Ancien (Rome, ier siècle) : organiser une « plus grande médecine » »Histoire, médecine et santé, 22 | 2022, 205-225.

Référence électronique

Thomas Galoppin, « Les remèdes animaux chez Pline l’Ancien (Rome, ier siècle) : organiser une « plus grande médecine » »Histoire, médecine et santé [En ligne], 22 | hiver 2022, mis en ligne le 15 décembre 2022, consulté le 17 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hms/6324 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/hms.6324

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Auteur

Thomas Galoppin

Patrimoine Littérature Histoire – Équipe de recherche sur la réception de l’Antiquité : sources, mémoires, enjeux (PLH-ERASME, EA 4601), projet ERC MAP (Mapping Ancient Polytheisms), Université Toulouse – Jean Jaurès

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