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Dossier

De la révocation à la déportation : Édouard Herriot, un parcours de privation de libertés (1940-1945)

From dismissal to deportation: Édouard Herriot, a path of deprivation (1940-1945)
Yann Sambuis

Résumés

Le 10 juillet 1940, Édouard Herriot, qui avait pesé de tout son poids politique pour tenter d’empêcher le recours à Pétain, fait le choix de l’abstention. Désormais président d’une Chambre fantôme, il est révoqué de son mandat de maire de Lyon le 20 septembre 1940 et condamné à une quasi-impuissance politique. Sa volonté affirmée de défendre malgré tout l’institution parlementaire et les principes républicains est à l’origine d’un processus de privation progressive de libertés qui aboutit à sa déportation en Allemagne. D’abord retiré volontairement dans sa résidence iséroise de Brotel jusqu’en 1942, il mène avec Jules Jeanneney, le président du Sénat une « résistance légale » et manifeste publiquement son opposition au régime, conduisant les autorités de Vichy à l’assigner officiellement à résidence, avant de le faire arrêter et incarcérer à Évaux-les-Bains (Creuse), puis de le remettre aux autorités allemandes. Détenu par la Gestapo en Lorraine, il est déporté en 1944 dans un sanatorium proche de Potsdam. Cette itinérance carcérale typique des parlementaires républicains emprisonnés par Vichy se double d’un processus de privation graduelle des libertés politiques et civiques. Cet itinéraire original est analysé en suivant deux axes. Le lien de causalité entre l’activité politique maintenue par Herriot et la privation progressive de ses libertés est interrogé afin de déterminer dans quelle mesure la « résistance passive » d’Édouard Herriot est à l’origine de son arrestation puis de sa déportation. La correspondance entre itinérance carcérale et parcours de privation des libertés permet de mettre en lumière l’utilisation de l’incertitude géographique et de sa mise en scène par le système répressif vichyste.

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Texte intégral

1Le 18 mai 1945, dix jours après la capitulation allemande, Édouard Herriot est de retour à Lyon où il vient d’être réélu maire en son absence. Libéré par les troupes soviétiques le 25 avril près de Potsdam, et au terme d’un voyage de retour qui l’a emmené jusqu’à Moscou, il achève un parcours qui l’a progressivement conduit de la résidence surveillée dans le manoir isérois de son épouse à la détention en Allemagne sous le contrôle de la Gestapo.

  • 1 Le sujet des destinées des opposants à Vichy, et en particulier de leur détention, a été largement (...)
  • 2 Édouard Daladier, Journal de captivité : 1940-1945, Paris, Calmann-Lévy, 1991 ; Pierre Mendès Franc (...)
  • 3 Édouard Herriot, Épisodes. 1940-1944, Paris, Flammarion, 1950.

2Lorsque l’on aborde la question de la détention des hommes politiques de la Troisième République sous Vichy1, le nom d’Herriot n’a pourtant rien d’une évidence, éclipsé par les parcours des députés socialistes et communistes. Au sein du parti radical, les cas les mieux documentés sont ceux d’Édouard Daladier, l’un des accusés du procès de Riom en 1942 (avec Georges Mandel, Paul Reynaud et Léon Blum), ou des ministres victimes des lois antisémites Pierre Mendès France et Jean Zay, ce dernier ayant été assassiné par la Milice en 1944. La publicité donnée à leurs procès par la propagande vichyste et les écrits qu’ils ont consacrés à leur détention2 contrastent avec la situation d’un Herriot arrêté et déporté plus tardivement et sans procès, dans l’indifférence générale, et qui n’a consacré à la période qu’un opuscule destiné à répondre aux attaques de ses adversaires politiques après le conflit3.

  • 4 Fred Kupferman, Laval, Paris, Tallandier, coll. « Biographie », 2006, p. 566.
  • 5 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres, Jules Jeanneney et Édouard Herr (...)
  • 6 Jules Jeanneney, Journal politique : septembre 1939 – juillet 1942, Paris, Armand Colin, 1972.

3Maire de Lyon depuis 1905, président de la Chambre des députés depuis 1936, Édouard Herriot conserve en effet jusqu’à nos jours l’image d’un homme déjà âgé en 1940 qui choisit l’abstention le 10 juillet plutôt que de s’opposer frontalement à Pétain ; un homme qui n’a rien d’un résistant. Son arrestation et son départ pour l’Allemagne, rarement évoqués, sont la plupart du temps réduits à une « déportation d’honneur4 » dans des conditions confortables. Loin d’être anecdotique, la « résistance légale5 » entreprise aux côtés du président du Sénat Jules Jeanneney – et en grande partie connue grâce à l’édition du Journal politique6 de ce dernier – témoigne pourtant d’une réelle opposition au régime mis en place par le maréchal Pétain et Pierre Laval, même si elle s’est avérée peu efficace. À la différence de Jeanneney, et sans doute en partie en raison de sa sympathie non dissimulée pour Roosevelt, cette résistance provoque l’arrestation d’Édouard Herriot en septembre 1942. Déjà progressivement privé de la plupart de ses libertés politiques, il entame alors un parcours de détention marqué par des conditions de plus en plus strictes, qui s’achève avec sa déportation par la Gestapo en 1944 dans un sanatorium proche de Potsdam.

4Le traitement que le régime de Vichy puis les autorités occupantes réservent à Édouard Herriot semble cependant se différencier à la fois de celui des autres hommes politiques de gauche ou résistants incarcérés, et de celui du président du Sénat. D’une part, il est arrêté assez tard, en septembre 1942, et conserve jusqu’à cette date une liberté politique qui constitue une exception pour un opposant, privilège qu’il partage avec Jules Jeanneney. D’autre part, même si son action de résistance est limitée et marquée par le légalisme, il finit par être assigné à résidence puis arrêté, ce qui n’arrive pas à Jeanneney, quand bien même ce dernier aime à se présenter comme le plus vindicatif des deux.

  • 7 Serge Berstein, Édouard Herriot ou la République en personne, Paris, Presses de la Fondation nation (...)
  • 8 Marc André, « L’itinérance carcérale durant la guerre d’indépendance algérienne : entre logique de (...)

5Ainsi, dans le cas d’Herriot, les lieux de privation de liberté ne sont pas seulement des lieux de détention et il convient donc d’en adopter une définition large. Si la détention intervient assez tard, elle parachève un processus de réduction progressive de ses libertés civiques qui rejoint en partie le sort de l’ensemble des Français sous Vichy mais qui prend un sens tout particulier pour ce personnage central de la Troisième République. Certaines de ces mesures semblent en outre répondre à une logique de rétorsion ou de punition appliquée à un opposant qui, s’il refuse l’illégalité7, n’en marque pas moins publiquement son opposition au régime. Dès avant son arrestation et « l’itinérance carcérale8 » typique des prisonniers politiques de Vichy, les lieux fréquentés par Herriot sont autant de symboles de la privation progressive de libertés.

6Nous interrogerons cette tension entre la conservation tardive de libertés politiques utilisées pour lutter contre l’État français et la privation progressive qui en découle. Nous nous demanderons comment et pourquoi s’opère le glissement d’un compromis conservant à Herriot sa liberté de déplacement et une marge de manœuvre politique à une privation de libertés de plus en plus stricte, processus qui s’inscrit doublement dans l’espace par l’ancrage dans des lieux symboliques de la perte des libertés et par des déplacements successifs consubstantiels de la répression des opposants au régime vichyste.

  • 9 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., pp. 267-281.
  • 10 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit. ; Jérôme Henning, (...)
  • 11 Son témoignage provient en effet pour l’essentiel des notes rédigées en prévision du procès lors de (...)
  • 12 « J’extrais des Mémoires que je prépare quelques épisodes relatifs à des faits qui ont éveillé l’at (...)

7Si le maintien puis la restriction progressive des libertés politiques d’Herriot sont bien documentés, puisqu’ils résultent de décrets du maréchal Pétain conservés et commentés par de nombreux témoins, peu de sources nous renseignent sur les conditions de détention, à l’exception du témoignage d’Herriot lui-même qui est toutefois cohérent avec ceux des autres dirigeants politiques arrêtés. C’est en fait la question du lien entre l’action d’Herriot et la perte progressive de ses libertés qui pose avec le plus d’acuité la question des sources : les décrets n’en disent rien et les témoignages sont marqués par un fort parti pris nous invitant à la prudence dans la formulation de nos hypothèses. Les sources principales de Serge Berstein9 et de Jérôme Henning10 sont en effet celles laissées par Jules Jeanneney, pour la période 1940-1942, puis par Pierre Laval pour les événements de 1944. Or, Jeanneney passe au gaullisme en 1942 et Laval est un adversaire de longue date du leader radical, qui met en outre son récit au service de sa défense lors de son procès11. À l’opposé, le volume publié par Herriot en 1950, Épisodes. 1940-1944, est explicitement destiné à se défendre d’attaques politiques, ce qu’il annonce dès sa courte préface12.

8À la lumière de ces différents documents et témoignages, nous analyserons donc le processus de privation progressif de libertés qui vise Édouard Herriot. Alors qu’il conserve dans un premier temps une certaine liberté physique et politique, il est en effet placé dès 1940 sous une surveillance qui se renforce peu à peu. Dans un second temps, à partir de l’été 1941, l’utilisation qu’il fait de cette marge de manœuvre, perçue comme abusive par les autorités vichyssoises et allemandes, entraîne une réaction qui se manifeste sous la forme d’une privation progressive de ses libertés.

Une liberté surveillée

9Le processus de privation de libertés d’Herriot s’amorce dès juillet 1940. Dans un premier temps, sa liberté de déplacement n’est pas affectée et il peut circuler entre trois lieux : Brotel, la propriété de son épouse située à Sainte-Baudille-de-la Tour (Isère), dans laquelle Herriot choisit de s’établir ; Lyon, où la suspension du mandat municipal exercé depuis 1905 est une mutilation symbolique de son statut politique ; Vichy, où les bureaux des Chambres demeurent actifs malgré l’ajournement sine die de ces dernières, symbolisant pour Herriot le maintien d’une capacité d’action politique. Au fil du temps, la pression sur le président de la Chambre s’accentue, le repoussant à la marge d’une vie politique au sein de laquelle il était jusque-là un personnage central, avec une mise sous surveillance de ses domiciles lyonnais et isérois qui s’accompagne de difficultés de déplacement grandissantes.

La révocation des mandats : une première restriction des libertés politiques

10Dès l’été 1940, Édouard Herriot est visé par une première mesure : la révocation ou la suspension de ses mandats électifs, ce qui le prive de moyens d’action et d’expression en le renvoyant à une position de simple citoyen qu’il n’avait pas occupée depuis 1904 et sa première élection au conseil municipal de Lyon.

  • 13 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 148.

11Le processus débute par l’ajournement de la Chambre le 11 juillet 1940, vécu comme une trahison inattendue malgré le vote des pouvoirs constitutionnels la veille. Si Édouard Herriot défend encore dans Épisodes 1940-1944, cinq ans après le conflit, son choix de l’abstention le 10 juillet présenté, grâce au processus de déclaration volontaire et nominative des abstentionnistes proposé par Jules Jeanneney, comme le meilleur moyen de « concilier sa réserve de président de la Chambre et son opinion non dissimulée », il n’a pas de mots trop durs pour dénoncer « l’abus de confiance » et le « coup d’État […] manifeste, brutal, cynique13 » de Pétain et de Laval. Il conserve toutefois, comme son homologue du Sénat, un bureau à Vichy et du personnel pour faire fonctionner le secrétariat de la Chambre, qui n’est pas supprimé puisque cette dernière, prorogée en 1939 jusqu’en 1942, n’est que suspendue en attendant la mise en place des institutions prévues par les actes constitutionnels.

  • 14 Journal officiel de la République française du 20 septembre 1940.
  • 15 Justinien Raymond, « DORMOY Marx », dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, mouveme (...)
  • 16 Le Nouvelliste, 21 septembre 1940, p. 1
  • 17 Gilles Vergnon, « Édouard Herriot et le Front Populaire : rendez-vous manqué, déplacement d’intérêt (...)

12Plus encore que l’ajournement des Chambres, c’est la perte de sa mairie qui frappe Herriot. Lyon, bastion du pouvoir herriotiste, devient le lieu qui symbolise sa nouvelle impuissance politique. Par décret du maréchal Pétain, le conseil municipal de Lyon est suspendu le 20 septembre 1940 et remplacé par une délégation spéciale nommée, présidée dans un premier temps par un conseiller municipal radical, Georges Cohendy14. Cette suspension coïncide avec celles d’autres maires, dont celui de Montluçon, le socialiste Marx Dormoy, assassiné en 1941 dans l’hôtel où Vichy l’avait placé en résidence surveillée15. Le Nouvelliste, organe de la droite lyonnaise, se félicite de la suspension dans son numéro du lendemain16, y voyant une revanche sur l’action des gauches et d’Herriot depuis 1924 : on lui reproche pêle-mêle la politique anticléricale du Cartel des gauches, les ruptures des majorités d’Union républicaine, et même le Front populaire dont il ne fut pourtant pas l’artisan le plus zélé17.

Le choix du retrait à la campagne : Brotel, lieu de l’impuissance

13Malgré cette restriction précoce des libertés civiques, commune à l’ensemble de la population française, et de la capacité d’action politique qui lui est propre, Herriot conserve dans les deux premières années du régime de Vichy certaines libertés, en particulier lorsque l’on compare sa situation à celle des autres parlementaires radicaux et socialistes très tôt visés par le régime.

  • 18 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 153.
  • 19 Ibid., p. 177.

14Cela se traduit en premier lieu par une liberté de mouvement importante, à commencer par le choix de résidence. Herriot explique s’être « retiré à la campagne, dans [son] petit domaine dauphinois de Brotel18 ». Ce domaine, situé à une quarantaine de kilomètres de Lyon, est une maison forte surplombant les gorges encaissées du Val d’Amby, surnommée le nid d’aigle, appartenant à l’épouse d’Herriot, Blanche Rebatel19, issue de la bourgeoisie lyonnaise.

  • 20 Henri Besseige, Herriot parmi nous, Paris, Magnard, 1960, p. 336.
  • 21 Archives départementales du Rhône (ADR), 10J32, Lettre d’Édouard Herriot à Laurent Bonnevay, 24 jui (...)

15Le couple y est surveillé, sous prétexte d’assurer sa sécurité, par la gendarmerie de l’Isère qui ne laisse toutefois pas d’hommes sur place en permanence. Deux policiers assurent également la surveillance de leur appartement à Lyon. Le président de la Chambre peut recevoir quelques visites d’amis proches20 et se déplacer, mais en raison de la difficulté des transports21, il limite pour l’essentiel ses déplacements à un aller-retour mensuel à Vichy, puis plus tard à Châtelguyon où se situent les secrétariats des Chambres. Il profite de l’occasion pour passer par son appartement lyonnais où il reçoit amis et personnalités politiques lyonnaises, à l’image de Laurent Bonnevay ou de Justin Godart.

  • 22 Lettre d’Édouard Herriot à Joseph Abel, 9 mars 1941.
  • 23 Lettre d’Édouard Herriot à Joseph Abel, 10 juillet 1942.
  • 24 Notons que les travaux de l’historien local et résistant Maurice Rullière soulignent que la plupart (...)

16Outre ces déplacements professionnels, on trouve quelques traces de déplacements récréatifs en Isère. Herriot rend notamment visite, au moins à deux reprises, en novembre 194022 et juillet 194223, à son ami Joseph Abel, conseiller général et maire – lui aussi suspendu – de Saint-Savin, chez deux notables de la commune voisine de Saint-Chef24.

Vichy, lieu de liberté limitée et de résistance légale

  • 25 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit., p. 5.

17Le maintien d’un bureau de la présidence de la Chambre et de son secrétariat, déjà évoqué, permet à Édouard Herriot d’obtenir des entretiens avec les dirigeants du régime de Vichy et de s’adresser au gouvernement. En effet, comme l’explique Jérôme Henning, « l’acte constitutionnel n° 3 dispose que "I. le Sénat et la Chambre des députés subsisteront jusqu’à ce que soient formées les assemblées prévues par la loi constitutionnelle du 10 juillet 1940", mais que "II. le Sénat et la Chambre des députés sont ajournés jusqu’à nouvel ordre". Cet ajournement sine die implique nécessairement la prorogation des bureaux des Chambres et de leur présidence. […] Les actes constitutionnels du 11 juillet ne prévoyant pas en détail les nouveaux rapports entre les pouvoirs publics, certaines dispositions issues des lois constitutionnelles ou de la pratique, telle que la permanence des bureaux et des présidences, persistent25. »

  • 26 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 156.
  • 27 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 267.
  • 28 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 148.

18Cette capacité est utilisée pour mener une « résistance légale » : Herriot, qui voulait démissionner pour montrer son désaccord, selon Jeanneney, se rallie à ce dernier avec l’idée de « porter au gouvernement les observations qu’[il] jugera utiles au bien commun26 ». Selon les mots de Serge Berstein, les deux présidents « tenteront d’affirmer face à Vichy la pérennité de l’esprit républicain27 », tandis qu’Herriot résume leur action par ces termes : « faire au régime qui vient de confisquer le pouvoir l’opposition la plus résolue28 ».

  • 29 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit, p. 10.
  • 30 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 152.
  • 31 Jean-Noël Jeanneney, « Le journal politique de Jules Jeanneney (septembre 1939 – juillet 1942) : éd (...)
  • 32 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., pp. 152-154.
  • 33 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 271.

19Cela se traduit par une « opposition systématique dès qu’une nouvelle mesure entre dans leur champ d’action et leur permet de rappeler le respect nécessaire du droit29 ». Cette position de principe les conduit à protester contre la non-réunion des commissions, les conditions d’internement des députés du Massilia, ou encore de freiner l’envoi des procès-verbaux des comités secrets de la Chambre à Riom, en octobre 194030, et le recensement des parlementaires israélites, en décembre de la même année31. De la même manière, Herriot adresse à Pétain, le 19 juin 1941, une lettre protestant contre l’obligation faite par les autorités du Reich aux parlementaires alsaciens de démissionner du Parlement français32 et il signe avec Jeanneney une lettre mettant en garde le chef de l’État français contre toute idée de collaboration militaire, le 17 mai 194133.

  • 34 Ibid.
  • 35 Id.

20En 1940 et 1941, Édouard Herriot semble donc conserver une liberté relative, qu’il s’agisse de liberté de mouvement ou de liberté d’action politique. Cette dernière n’en est pas moins illusoire lorsque l’on considère son efficacité : tandis que la liberté de déplacement, fortement contrainte par les difficultés logistiques, permet tout juste le maintien d’une activité minimale du secrétariat de la Chambre et quelques rencontres amicales et politiques, la liberté politique se heurte à un contexte autoritaire qui la rend totalement inefficace. Comme le souligne Serge Berstein, l’action des deux présidents n’entraîne « aucun inconvénient réel pour le gouvernement34 » qui peut à chaque fois passer outre les protestations et contourner les oppositions de principe. À bien des égards, Brotel, où Herriot vit la plupart du temps, Lyon, où il est dépossédé de ses mandats, et Vichy, où il est réduit à une résistance impuissante, sont les lieux d’une première privation de liberté, celle de la liberté politique qui, depuis deux décennies, permettait à l’un des hommes forts du parti radical de peser sur la vie politique française, faisant et défaisant les majorités. Pourtant, malgré son efficacité très réduite, c’est bien la résistance légale « irritante35 » d’Herriot qui conduit, dès 1941 et surtout à partir de 1942, les autorités de Vichy, puis l’occupant allemand, à le punir en réduisant progressivement ses libertés d’action et de mouvement, jusqu’à l’arrestation et la détention entre novembre 1942 et avril 1945.

De la privation progressive des libertés à l’itinérance carcérale

21Pour s’être opposé trop frontalement à Pétain, Herriot subit un processus de privation progressive de ses libertés qui aboutit à un parcours d’itinérance carcérale. Au premier abord, l’interprétation communément admise de l’arrestation d’Herriot comme une conséquence de la « résistance légale » menée avec Jeanneney peut surprendre : ce dernier n’est en effet pas arrêté et se retire à Grenoble. D’autres paramètres peuvent contribuer à l’expliquer, tels que l’inimitié ancienne entre Herriot et Laval ou le contexte du mois de novembre 1942. L’invasion de la zone Sud par les troupes allemandes impose en effet une pression renouvelée sur les autorités de Vichy, ce qui a pu les conduire à prendre en otage l’une des dernières grandes figures de la République parlementaire encore libres en France, au moment même ou le leader radical rend publique la proposition de refuge aux États-Unis que lui a faite Roosevelt.

De Vichy à Châtelguyon

  • 36 Olivier Wieviorka, Les Orphelins de la République…, op. cit., pp. 260-263.

22Comme le souligne Olivier Wieviorka36, les présidents des deux Chambres restent jusqu’au bout opposés à tout basculement dans l’illégalité. Leur opposition de plus en plus frontale au durcissement du régime entraîne cependant dès 1941 la restriction de leurs droits.

  • 37 Jean-Pierre Azéma, « Vichy face au modèle républicain », dans Serge Berstein et Odile Rudelle, Le m (...)
  • 38 Journal officiel de l’État français, 29 août 1941.
  • 39 Tacoma Times, 28 août 1941.

23À l’été 1941, le transfert de leurs bureaux à Châtelguyon montre la volonté de les éloigner de Vichy, centre du pouvoir. Dans un premier temps, la lettre adressée par Darlan le 18 août prévoit la séparation des bureaux entre Châtelguyon pour le Sénat et La Bourboule pour la Chambre. La volonté de limiter l’action des deux présidents est manifeste ; Darlan indique dans une note de février 1941 son objectif « d’arriver le plus rapidement possible à la suppression définitive des Assemblées qui, dans le passé, se sont avérées opposées au rapprochement franco-allemand et qui d’ailleurs ne représentent plus le pays37 ». Finalement, le décret n° 3700 du 28 août 1941 transfère les bureaux des deux Chambres à Châtelguyon, en précisant bien que « l’exercice par les membres de ces bureaux de fonctions individuelles et les réunions officieuses de membres du Parlement ne pourront avoir lieu dans le département de l’Allier », interdisant toute action directe à Vichy38. Cette décision provoque dès avant la publication du décret, le 27 août, une protestation formelle d’Herriot et de Jeanneney, dont la presse américaine se fait l’écho39.

  • 40 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit., p. 12.
  • 41 Journal officiel de l’État français, 26 août 1942.

24Face à ce qu’ils perçoivent comme une mesure de rétorsion, les deux présidents n’hésitent plus à envisager ouvertement la fin du régime de Vichy, évoquant par exemple au début 1942 le projet d’une réunion des Chambres en cas de décès de Pétain40 : la loi du 10 juillet 1940 citant nommément le maréchal ne permet pas le transfert du pouvoir à Darlan désormais prévu par les autorités de l’État français. Cette opposition réaffirmée conduit finalement à la fermeture des bureaux des Chambres : le décret du 25 août 194241 prend pour argument l’impossibilité de réélire les bureaux en l’absence de réunion des Chambres pour les supprimer, privant Herriot et Jeanneney de leurs derniers moyens d’action. Cette suppression suscite une dernière vague de protestations plus frontales critiquant ouvertement le régime. Ainsi, la lettre commune du 31 août 1942 adressée au maréchal Pétain accuse ouvertement ce dernier de tyrannie :

  • 42 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 162.

« Non seulement le mot République a disparu du Journal officiel et du fronton des bâtiments nationaux ; mais vous abolissez partout le principe de la représentation élective ; vous enfreignez des règles fondamentales de notre droit civique et de notre droit pénal. Vous avez substitué un arbitraire sans limites aux garanties que toutes les nations civilisées accordent aux accusés. Vous avez rétabli les lettres de cachet. De tels actes constituent beaucoup plus que des détournements de pouvoir42. »

  • 43 Ibid., pp. 164-165.
  • 44 Id., pp. 165-168.
  • 45 Michel Soulié, La vie politique d’Édouard Herriot, Paris, Armand Colin, 1962, p. 510.

25La veille, le 30 août 1942, les deux présidents avaient écrit au grand rabbin de France une lettre de soutien dénonçant les « iniquités et les spoliations » et « la barbarie du traitement que subissent les enfants » juifs, « en zone libre comme en zone occupée43 ». Enfin, Herriot lui-même écrit deux lettres marquant une rupture nette : le 30 août, il renvoie sa légion d’honneur en protestation à la suite de l’attribution de cette distinction à des officiers français tués en Russie sous commandement allemand ; le 31, il écrit au président Roosevelt, refusant son offre de rejoindre les États-Unis mais rendant hommage à leur « peuple libre », à leurs « alliés qui sont aussi les [siens] » et l’assurant de sa fidélité et de son dévouement44. Cette lettre contribue sans doute au traitement subi par Herriot, plus sévère que celui de Jeanneney, d’autant que selon Michel Soulié, elle est reproduite dans la presse américaine et fait suite à une série d’articles condamnant le régime pétainiste déjà publiée aux États-Unis par le président de la Chambre45.

26Dès septembre 1942, Édouard Herriot avait en effet réussi à faire publier dans la revue littéraire The American Mercury un long article qui, sous couvert de revenir sur un demi-siècle d’échanges entre édiles français, britanniques et américains, rappelle sa suspension hautement symbolique, au lendemain du soixante-dixième anniversaire de la Troisième République. L’article se termine par une vibrante déclaration d’amitié aux États-Unis et à la liberté qu’ils incarnent et qui tranche avec la France de Vichy :

  • 46 Édouard Herriot, « The Real France Speaks », The American Mercury, n° 213, Vol. III, septembre 1941 (...)

« Je ne refermerai pas cet article sans adresser [à Franklin D. Roosevelt] l’expression de ma chaleureuse admiration, et sans envoyer des profondeurs de ma solitude mes salutations au grand peuple des États-Unis, où les opinions divergentes peuvent être exprimées librement et où chacun, quel que soit son camp politique, est attaché au respect de l’être humain et de la loi morale46. »

  • 47 Voir par exemple « Patriots Issue Stern Warning To Laval », Imperial Valley Press, 9 septembre 1942 (...)
  • 48 L’événement est mentionné par le Detroit Evening Star le 13 septembre 1942, et de longs extraits de (...)

27C’est sans doute à cet article que fait allusion Michel Soulié sous le titre « Une voix de France ». Si nous n’avons pas trouvé la trace d’une publication de la lettre au président Roosevelt, celle qu’Herriot et Jeanneney adressent au maréchal Pétain le 31 août 1942 est en revanche largement reprise dans la presse américaine, d’autant qu’elle est évoquée par le Secrétaire d’État Cordell Hull lors d’une conférence de presse en septembre 194247. Le renvoi de sa légion d’honneur par le président de la Chambre est aussi évoqué, avec un détail qui laisse penser que la lettre rédigée à cette occasion a été diffusée48.

28À bien des égards, les lettres de la fin août 1942 sont assimilables à un baroud d’honneur pour des présidents de Chambres forcés de reconnaître leur défaite. Pour Herriot, en particulier, le renvoi de sa légion d’honneur et la lettre adressée à Roosevelt marquent un point de non-retour. En franchissant le Rubicon et en rendant public son soutien aux États-Unis désormais en position de force dans le Pacifique après la bataille de Midway, il donne aux autorités de Vichy les arguments justifiant son arrestation.

La multiplication des lieux de privation de liberté comme outil de la répression : une « itinérance carcérale »

  • 49 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 179.

29La lettre au président américain est en effet le prétexte de la première alerte. Le 20 septembre, Laval charge le préfet régional Alexandre Angéli d’obtenir d’Herriot l’engagement de ne pas quitter la France et de refuser définitivement la proposition faite par Roosevelt de rejoindre les États-Unis. Des agents du ministère de l’Intérieur de Vichy viennent enquêter autour du domaine de Brotel les 24 et 26 septembre. Le 30 septembre, la surveillance de l’appartement lyonnais est doublée et Herriot remarque que deux voitures stationnent devant chez lui. Le même jour, à neuf heures, le préfet Angéli lui rend visite dans son appartement lyonnais pour lui faire part des exigences de Laval. Herriot refuse de s’engager à ne pas quitter le territoire. Il reçoit alors vers 17 heures une nouvelle visite du préfet l’informant que le gouvernement de Vichy a décidé de le placer dès le lendemain en résidence surveillée à Brotel. Le 1er octobre à 8 heures, le commissaire Buffet délivre l’arrêté préfectoral signifiant l’assignation à résidence d’Édouard Herriot. Ce dernier accepte de le signer après avoir émis des réserves. Il est alors conduit à ce qui est désormais son lieu de détention dans la voiture du commissaire, accompagné par un convoi composé de deux voitures de police et d’un fourgon cellulaire – vide puisqu’Herriot est dans la voiture du commissaire. Rapidement, le cortège est rejoint par un car transportant une cinquantaine de membres du Service d’ordre légionnaire49.

  • 50 Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, op. cit., p. 188.
  • 51 Une fois assigné à résidence, Herriot explique toutefois être surveillé par « un ambigu de policier (...)
  • 52 Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, op. cit., p. 194.
  • 53 Ibid., p. 187.

30On retrouve dans cette première arrestation l’organisation décrite par Christophe Lastécouères à propos des multiples déplacements des prisonniers d’État de Vichy, et notamment des accusés de Riom : le moment du transfert, en particulier, fait selon lui l’objet d’une « démonstration de force50 » sans cesse renouvelée. Notons qu’à la différence des accusés de Riom, Herriot ne semble pas être accompagné par les militaires de la garde mobile mais seulement par des policiers51, même si la disproportion des forces par rapport au risque d’évasion – une voiture pilote et une voiture d’escorte, la présence d’un commissaire – marque là aussi une volonté ostentatoire et, peut-être, en reproduisant l’escorte des déplacements ministériels, un souci de faire prendre conscience de sa déchéance au détenu en déployant contre lui les moyens qui servaient jusqu’alors à le protéger52. À l’opposé de la discrétion que pourraient imposer le risque sécuritaire et la volonté de ne pas rendre trop visible une justice arbitraire, chaque transfert est « l’occasion d’une mise en scène qui rejoue le transfert initial – celui qui fait passer de l’état de liberté à celui d’interné administratif – comme une scène fondatrice [et] qui repose sur une dialectique entre l’extrême invisibilité du déplacement lui-même – qui relève du secret d’État – et l’extrême visibilité du déploiement des forces policières chargées de l’encadrer53 ».

  • 54 Id., p. 188.
  • 55 Herriot l’orthographie par erreur Ditkowski dans ses souvenirs. Édouard Herriot, Épisodes..., op. c (...)
  • 56 Pour Évaux-les-Bains, il se contente de mentionner l’appartenance du policier qui l’accompagne à la (...)
  • 57 Entre Paris et Potsdam, Herriot est brièvement détenu dans un hôtel de Nancy par la Gestapo.

31La délivrance par le commissaire ou le préfet de l’arrêté notifiant l’assignation à résidence ou le transfert, accompagnée de la signature d’un reçu, marque l’autre temps fort de la mise en scène. Ces « pratiques humiliantes54 » symbolisent la disgrâce et la privation de liberté des anciens dirigeants de la République et se manifestent aussi pour Herriot. Si le préfet régional, Alexandre Angéli, semble opérer avec tact en septembre 1942 en lui rendant visite et en l’informant la veille de la décision prise, son homologue isérois, Raoul Didkowsky55, procède de manière plus brutale le 26 novembre 1942 en réveillant Édouard Herriot à 5 heures du matin pour lui notifier son transfert à l’établissement d’Évaux-les-Bains. Le détenu ne donne le détail ni du cortège qui l’accompagne vers la Creuse56 ni des suivants, mais il évoque une succession rapide des lieux de détention, qui rend précaire et incertaine sa situation géographique. À Brotel, en septembre 1942, succèdent Évaux-les-Bains en novembre 1942, avec un changement de lieu en février 1943, puis Vittel et Maréville, à l’été 1943, avant l’aller-retour à Paris et le transfert final vers Potsdam en août 1944, soit huit lieux de détention différents57 en moins de deux ans.

  • 58 Marc André, « L’itinérance carcérale durant la guerre d’indépendance algérienne », art. cit., p. 41 (...)
  • 59 Ibid., p. 409.
  • 60 Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, op. cit., p. 188.

32Dans ses travaux sur les conditions de détention des membres du Front de libération nationale (FLN) incarcérés pendant la guerre d’Algérie, Marc André a montré que les transferts successifs du détenu d’une prison à une autre constituaient un outil de répression dans un contexte d’internement administratif, l’incertitude géographique s’ajoutant à celle de la durée d’une détention administrative sans procès. « L’itinérance carcérale [place] les détenus […] face à un véritable labyrinthe » et, dès lors, « ce n’est plus seulement le temps mais l’espace qui [devient] l’opérateur de la peine58 ». Au-delà de la diversité des lieux de privation de liberté fréquentés – maisons à Brotel, Évaux-les-Bains ou Vittel, hôpital à Maréville, hôtel transformé en prison à Évaux-les-Bains –, l’itinérance enferme le détenu dans un « espace répressif59 » labyrinthique qui « prend […] toute sa place dans une conception de la justice politique fondée sur la maîtrise de la vie psychique des prisonniers60 ».

Lieux et formes de la privation de liberté : un durcissement progressif

33À cette incertitude géographique s’ajoute l’instabilité des conditions de détention. Si l’itinérance carcérale d’Herriot semble inscrite dans une tendance générale à la privation croissante de liberté, les moments de durcissement et d’assouplissement se succèdent sans logique apparente.

  • 61 Vincent Giraudier, Les bastilles de Vichy…, op. cit.
  • 62 Jacques Bruyas, seul biographe à donner des détails sur cet épisode, évoque des rhumatismes, mais a (...)
  • 63 Ibid.

34Chez lui, à Brotel, Herriot constate un durcissement progressif de ses conditions de détention : alors que les portes du domaine et les routes alentour sont gardées jour et nuit, les visites d’abord tolérées sont rapidement réduites aux membres de la famille puis interdites. C’est toutefois le lieu d’Évaux-les-Bains qui symbolise le durcissement : pendant quarante jours, les prisonniers – Herriot y retrouve entre autres Léon Jouhaux et d’anciens cagoulards – sont placés au secret, conséquence probable de la pression exercée par la Gestapo depuis l’invasion de la zone Sud et de son association progressive à la gestion de la dernière des « Bastilles de Vichy61 ». En février 1943, le prisonnier, âgé de 71 ans et malade62, est transféré dans une maison du village où il retrouve son épouse et des conditions de détention moins strictes, même si les prisonniers avaient déjà été autorisés à se promener quelques heures par jour dans le parc adjacent. Après la levée du secret, Herriot peut sortir se promener dans la campagne environnante sous la surveillance d’une gendarme63.

  • 64 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 275.
  • 65 Fred Kupferman, Laval, op. cit., p. 525.
  • 66 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 280.

35À l’été 1943, toujours sans être informé du motif, Herriot est remis aux autorités allemandes qui le placent en résidence surveillée avec son épouse à Vittel. Sous une surveillance étroite de la Gestapo, qui tranche avec le relatif desserrement des conditions de détention des deniers mois dans la Creuse, il est toutefois rapidement transféré à l’hôpital psychiatrique de Maréville, près de Nancy. Serge Berstein explique ce transfert par une dépression64 quand Fred Kupferman affirme qu’Herriot feint la folie pour échapper à la déportation65. Quoi qu’il en soit, la remise à la Gestapo semble marquer un net durcissement des conditions de détention et une privation désormais totale de liberté. Après l’échec de la manœuvre de Laval qui le fait venir à Paris en août 1944 pour tenter de le convaincre de réunir la Chambre afin d’éviter l’arrivée au pouvoir du général de Gaulle, Herriot refuse à nouveau les différentes propositions d’évasion qui lui sont faites. À Paris d’abord, Pierre Laval et Otto Abetz lui proposent de rejoindre la Suisse, puis on l’informe d’un plan d’évasion préparé par la Résistance, mais il craint l’exécution d’otages en représailles66. À Nancy, ensuite, le préfet André Jean-Faure rapporte dans le récit du dernier entretien entre Herriot et Laval qu’il donne au Monde en 1969 que Pierre Laval tente une dernière fois de convaincre Herriot de fuir avec la complicité du préfet et des résistants lorrains, afin de gagner Paris et de prendre la tête du gouvernement, ce qu’Herriot refuse finalement.

  • 67 Selon Renaud Meltz, Herriot aurait déjà dû être transféré en Allemagne comme otage avec les autres (...)
  • 68 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 207.
  • 69 Henri Besseige, Herriot parmi nous, op. cit., pp. 347-350. L’auteur a pu consulter un manuscrit iné (...)
  • 70 Ibid., p. 351.
  • 71 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 281.

36Remis à la Gestapo, sans doute comme otage67, il est reconduit à Maréville puis transféré quelques jours plus tard en Allemagne, à Babelsberg, près de Potsdam. Détenu dans un ancien sanatorium reconverti en lazaret, il bénéficie de bonnes conditions de détention malgré une surveillance étroite et les privations de rigueur en Allemagne – Herriot rapporte avoir reçu à cette période « la ration la plus simple, parfois une soupe seulement68 ». Francophile et hostile au nazisme, le docteur Simm, qui dirige l’établissement, lui permet de lire littérature et presse françaises et met à sa disposition un poste de radio. Si les nuits sont souvent passées dans la promiscuité du bunker situé sous le bâtiment pour se protéger des bombardements, le prisonnier peut se promener la journée dans le parc du sanatorium, toujours accompagné par un policier. Il est même invité à célébrer Noël 1944 avec le docteur Simm, puis autorisé à visiter Potsdam en janvier 1945, toujours sous étroite surveillance, son hôte s’opposant aussi, le 22 avril 1945, alors que les troupes soviétiques approchent, à un transfert à Berlin aux mains de la police qui pourrait annoncer une exécution69. C’est à Babelsberg qu’Herriot est libéré par l’Armée rouge le 2470 ou le 25 avril 194571.

Conclusion

37S’il diffère de ceux d’autres cadres de la Troisième République par sa temporalité, le parcours du prisonnier politique Herriot illustre bien, au même titre que ceux des accusés de Riom, la dimension géographique du processus de privation de liberté des opposants politiques à Vichy. Que ce soit dans les deux années où il conserve sa liberté de mouvement et une marge étroite d’action politique, ou au fil de l’itinérance carcérale entamée en 1942, l’expérience du président de la Chambre des députés souligne tout à la fois l’importance de l’ancrage de la privation de liberté dans des lieux symboliques – ceux de la détention, de la résidence ou de l’expérience de la perte des libertés – et le rôle des déplacements d’une prison à une autre dans la politique répressive mise en place par l’État français et l’occupant.

38Le processus de privation de liberté est certes plus progressif pour Herriot que pour d’autres opposants mais il débute dès la période de la « réclusion volontaire » dans sa résidence iséroise et de la « résistance légale » peu efficace menée avec Jules Jeanneney. Ainsi, Brotel, mais aussi Lyon, Vichy et Châtelguyon, constituent d’une certaine manière déjà des lieux de privation de liberté pour Herriot entre 1940 et 1942 puisque ce dernier y est confronté à la perte progressive de ses libertés politiques, à la frustration de l’impuissance, la privation de liberté de mouvement ne venant qu’au terme du processus.

39C’est donc d’abord la chronologie qui distingue le traitement subi par Herriot de celui des autres figures de la Troisième République ayant refusé de se rallier au régime de Vichy. Dans un premier temps, il est sans doute avec Jules Jeanneney l’un des opposants qui conservent le plus de liberté, puisque non seulement ils ne sont pas emprisonnés, mais qu’ils conservent leur statut de présidents des Chambres, leurs bureaux et le personnel pour les faire fonctionner. Cette situation contraste avec celle d’autres ministres hostiles au nouveau régime, en particulier les accusés du procès de Riom (Édouard Daladier, Georges Mandel, Paul Reynaud, Léon Blum), ou bien Marx Dormoy et Jules Moch qui sont arrêtés et emprisonnés dès 1940. La situation s’inverse toutefois en partie en 1942 : alors que leur résistance légale a valu à Jeanneney et à Herriot de perdre les quelques libertés politiques qui leur restaient, l’obstination de ce dernier à affirmer son opposition à Pétain et à Laval fait diverger son destin de celui de son homologue du Sénat et le rapproche de celui de Blum ou de Daladier. Alors que Jules Jeanneney se retire à Grenoble et se tient en marge de la politique, Édouard Herriot est arrêté, assigné à résidence puis emprisonné, à une période où certains des opposants les plus précocement arrêtés ont déjà été libérés – Jules Moch et Vincent Auriol, par exemple, sont libérés dès 1941 même s’ils demeurent surveillés. Le destin d’Herriot semble alors rejoindre celui de Léon Blum, d’Édouard Daladier ou de Paul Reynaud, remis à la Gestapo comme otages et emmenés en Allemagne dès le printemps 1943. Même s’il est lui aussi désormais entre les mains de la Gestapo, Herriot reste finalement en France, sans doute en raison des manœuvres de Pierre Laval, et ne rejoint l’Allemagne qu’à l’été 1944, à la veille de la libération de Paris, dans une prison différente mais similaire au château d’Itter où sont détenus Reynaud et Daladier, quand Blum et Mandel, victimes des lois antisémites, sont emprisonnés à Buchenwald.

40En revanche, le lien entre les actions d’Herriot et le processus de privation de libertés demeure difficile à trancher. Si la relation de causalité entre la résistance légale des deux présidents et le déplacement puis la suppression des bureaux des Chambres est évidente, les causes de l’arrestation et de l’itinérance carcérale d’Herriot, auxquelles Jeanneney échappe, sont sans doute multiples. L’assignation à résidence coïncide en effet avec les lettres de l’été 1942 dans lesquelles Herriot va plus loin que le président du Sénat, ce dernier ne signant que la protestation adressée à Pétain et la lettre au grand rabbin, qui ne sont pas rendues publiques. Ce motif ne peut toutefois être retenu pour expliquer l’escalade vers une détention de plus en plus stricte puisqu’elle intervient à un moment où Herriot, déjà arrêté, ne peut plus agir. Sans doute faut-il y voir la combinaison de la volonté allemande de prendre des otages – les dates, on l’a vu, corroborent cette hypothèse – et de celle de Laval de se ménager une échappatoire.

41Le refus successif de toutes les possibilités d’évasion qui se présentent à lui et l’attitude souvent bravache d’Herriot plaident aussi pour l’hypothèse de Serge Berstein d’une forme de martyre volontaire. En ne franchissant jamais les limites de l’illégalité ni par sa « résistance légale » ni par une fuite à l’étranger, il préserve sa propre sécurité et construit la légende d’un vivant symbole de la République parlementaire tenant tête à Pétain et à Laval. Ce choix de rester en France au prix de ses libertés permet aussi à Herriot de demeurer disponible dans l’hypothèse d’un rétablissement des institutions de la Troisième République, dont il demeure obstinément l’un des seuls défenseurs, avec sans doute le souci de réparer son erreur de juillet 1940 – non pas celle de l’abstention qui est, comme nous l’avons vu, assumée même après le conflit, mais celle de l’interprétation des intentions de Laval et de Pétain.

42En résulte, entre 1942 et 1945, une itinérance carcérale qui fait de la géographie un moyen de la répression. Dans un espace carcéral de la France occupée organisé en réseau, tant les points – les lieux de détention – que les lignes qui les relient – les transferts – constituent des outils au service de l’arbitraire vichyste. La possibilité permanente du départ vers une nouvelle prison contribue à la précarité physique et psychologique des détenus – Herriot, à Évaux-les-Bains puis à Vittel, n’est ainsi épargné ni par la maladie physique ni par la dépression – quand sa mise en scène vient régulièrement rappeler aux détenus leur disgrâce et leur impuissance, les condamnant à une errance sans fin dans un labyrinthe de lieux de privation de liberté.

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Notes

1 Le sujet des destinées des opposants à Vichy, et en particulier de leur détention, a été largement étudié ces dernières années. Par exemple : Olivier Wieviorka, Les Orphelins de la République : destinées des députés et sénateurs français, 1940-1945, Paris, Éd. du Seuil, 2001 ; Vincent Giraudier, Les bastilles de Vichy : répression politique et internement administratif, Paris, Tallandier, 2009 ; Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, Paris, Perrin, 2019.

2 Édouard Daladier, Journal de captivité : 1940-1945, Paris, Calmann-Lévy, 1991 ; Pierre Mendès France, Liberté, liberté chérie : 1940-1942, Paris, Fayard, 1977 ; Jean Zay, Souvenirs et solitude, Paris, Belin, 2017.

3 Édouard Herriot, Épisodes. 1940-1944, Paris, Flammarion, 1950.

4 Fred Kupferman, Laval, Paris, Tallandier, coll. « Biographie », 2006, p. 566.

5 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres, Jules Jeanneney et Édouard Herriot, face au régime de Vichy (1940-1942) », Cahiers Jean Moulin, n° 1, janvier 2015.

6 Jules Jeanneney, Journal politique : septembre 1939 – juillet 1942, Paris, Armand Colin, 1972.

7 Serge Berstein, Édouard Herriot ou la République en personne, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1985, p. 275.

8 Marc André, « L’itinérance carcérale durant la guerre d’indépendance algérienne : entre logique de répression étatique et stratégie de résistance individuelle », Revue historique, 26 mai 2021, n° 698, no 2, pp. 409‑445.

9 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., pp. 267-281.

10 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit. ; Jérôme Henning, Le radicalisme d’Édouard Herriot et la crise des institutions, 1905-1954, Paris, Dalloz, Bibliothèque parlementaire & constitutionnelle, 2019.

11 Son témoignage provient en effet pour l’essentiel des notes rédigées en prévision du procès lors de son séjour à la prison de Fresnes et publiées en 1947 : Pierre Laval, Laval parle : notes et mémoires, Genève, C. Bourquin, 1947.

12 « J’extrais des Mémoires que je prépare quelques épisodes relatifs à des faits qui ont éveillé l’attention publique et provoqué les commentaires les plus inexacts. Je cite des textes. Je dis crûment la vérité », cf. Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 5.

13 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 148.

14 Journal officiel de la République française du 20 septembre 1940.

15 Justinien Raymond, « DORMOY Marx », dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, mouvement social, en ligne : https://maitron.fr/spip.php?article22869, mis en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 15 juillet 2021, consulté le 25/02/2024.

16 Le Nouvelliste, 21 septembre 1940, p. 1

17 Gilles Vergnon, « Édouard Herriot et le Front Populaire : rendez-vous manqué, déplacement d’intérêt et bienveillance », dans Bruno Benoit (dir.), Édouard Herriot en quatre portraits, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2020, pp. 181‑192.

18 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 153.

19 Ibid., p. 177.

20 Henri Besseige, Herriot parmi nous, Paris, Magnard, 1960, p. 336.

21 Archives départementales du Rhône (ADR), 10J32, Lettre d’Édouard Herriot à Laurent Bonnevay, 24 juin 1941.

22 Lettre d’Édouard Herriot à Joseph Abel, 9 mars 1941.

23 Lettre d’Édouard Herriot à Joseph Abel, 10 juillet 1942.

24 Notons que les travaux de l’historien local et résistant Maurice Rullière soulignent que la plupart des convives présents lors de ces rencontres se sont engagés activement dans la Résistance, que ce soit par la production de faux papiers, comme Joseph Abel et son ancien adjoint Henri Coppard, ou par l’appui logistique aux maquis, comme Louis Cécillon, hôte d’une des deux rencontres et fusillé en 1944. Leur engagement dans une Résistance active, lié à la mise en place du Service du travail obligatoire (STO), est postérieure à l’arrestation d’Herriot, mais il confirme les affinités de ce dernier avec des milieux résolument hostiles à Vichy. Voir notamment : Maurice Rullière, Résistance en Bas-Dauphiné. Histoire du Secteur VII, libérateur de Bourgoin et de Jallieu, Lyon, Élie Bellier Éditeur, 1982 ; Maurice Rullière, Joseph Abel et Saint-Savin, brochure imprimée à compte d’auteur, 1989.

25 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit., p. 5.

26 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 156.

27 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 267.

28 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 148.

29 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit, p. 10.

30 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 152.

31 Jean-Noël Jeanneney, « Le journal politique de Jules Jeanneney (septembre 1939 – juillet 1942) : édition critique », thèse de doctorat sous la direction de René Rémond, Université Paris Nanterre, 1970, pp. 665-675, cité par Serge Berstein dans Édouard Herriot…, op. cit., p. 270.

32 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., pp. 152-154.

33 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 271.

34 Ibid.

35 Id.

36 Olivier Wieviorka, Les Orphelins de la République…, op. cit., pp. 260-263.

37 Jean-Pierre Azéma, « Vichy face au modèle républicain », dans Serge Berstein et Odile Rudelle, Le modèle républicain, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Politique d’aujourd’hui », 1992, pp. 337‑356.

38 Journal officiel de l’État français, 29 août 1941.

39 Tacoma Times, 28 août 1941.

40 Jérôme Henning, « La résistance légale des présidents des Chambres… », art. cit., p. 12.

41 Journal officiel de l’État français, 26 août 1942.

42 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 162.

43 Ibid., pp. 164-165.

44 Id., pp. 165-168.

45 Michel Soulié, La vie politique d’Édouard Herriot, Paris, Armand Colin, 1962, p. 510.

46 Édouard Herriot, « The Real France Speaks », The American Mercury, n° 213, Vol. III, septembre 1941, p. 274, traduction Yann Sambuis.

47 Voir par exemple « Patriots Issue Stern Warning To Laval », Imperial Valley Press, 9 septembre 1942 ; « Hull Praises Protest To Pétain By Herriot And Jeanneney », The Evening Star, 12 septembre 1942 ; « Herriot Praised On Recent Stand », Wilmington Morning Star, 12 septembre 1942 ; « Pétain is Warned », The Hardin Tribune-Herald, 17 septembre 1942.

48 L’événement est mentionné par le Detroit Evening Star le 13 septembre 1942, et de longs extraits de la lettre sont publiés dans l’article de The Evening Star annonçant l’assignation à résidence d’Herriot, le 3 octobre 1942.

49 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 179.

50 Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, op. cit., p. 188.

51 Une fois assigné à résidence, Herriot explique toutefois être surveillé par « un ambigu de policiers et de gendarmes ». Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 187.

52 Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, op. cit., p. 194.

53 Ibid., p. 187.

54 Id., p. 188.

55 Herriot l’orthographie par erreur Ditkowski dans ses souvenirs. Édouard Herriot, Épisodes..., op. cit., p. 189.

56 Pour Évaux-les-Bains, il se contente de mentionner l’appartenance du policier qui l’accompagne à la Société des Gens de Lettres, et il ne donne aucun détail sur les transferts suivants. Ibid., p. 189.

57 Entre Paris et Potsdam, Herriot est brièvement détenu dans un hôtel de Nancy par la Gestapo.

58 Marc André, « L’itinérance carcérale durant la guerre d’indépendance algérienne », art. cit., p. 410.

59 Ibid., p. 409.

60 Christophe Lastécouères, Prisonniers d’État sous Vichy, op. cit., p. 188.

61 Vincent Giraudier, Les bastilles de Vichy…, op. cit.

62 Jacques Bruyas, seul biographe à donner des détails sur cet épisode, évoque des rhumatismes, mais aussi les conséquences de mauvais traitements infligés à Herriot par ses geôliers, en particulier la privation de sommeil et de nourriture, dont il se serait plaint à Dominique Canavaggio, journaliste à Paris-Soir. Jacques Bruyas, Édouard Herriot, Lyon, Horvath, 1985, pp. 75-76.

63 Ibid.

64 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 275.

65 Fred Kupferman, Laval, op. cit., p. 525.

66 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 280.

67 Selon Renaud Meltz, Herriot aurait déjà dû être transféré en Allemagne comme otage avec les autres parlementaires prisonniers en 1943, lors de sa remise à la Gestapo, et c’est Pierre Laval qui avait obtenu qu’il soit détenu en France afin de conserver la possibilité d’une transition politique négociée en cas de défaite allemande. Si aucun des biographes d’Herriot ne mentionne sa qualité d’otage, il semble donc bien que ce soit avec ce statut que la Gestapo le transfère en Allemagne. Renaud Meltz, Pierre Laval. Un mystère français, Paris, Perrin, 2018, p. 988.

68 Édouard Herriot, Épisodes…, op. cit., p. 207.

69 Henri Besseige, Herriot parmi nous, op. cit., pp. 347-350. L’auteur a pu consulter un manuscrit inédit d’Édouard Herriot intitulé Le Crépuscule des Dieux, relatant sa détention en Allemagne et la chute du Reich. Cette dernière tentative de déplacer Herriot à l’approche des troupes soviétiques afin d’éviter sa libération plaide là encore pour le statut d’otage.

70 Ibid., p. 351.

71 Serge Berstein, Édouard Herriot…, op. cit., p. 281.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Yann Sambuis, « De la révocation à la déportation : Édouard Herriot, un parcours de privation de libertés (1940-1945) »Histoire Politique [En ligne], 52 | 2024, mis en ligne le 01 juin 2024, consulté le 11 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/histoirepolitique/17348 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11vtz

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Auteur

Yann Sambuis

Agrégé et docteur en histoire, Yann Sambuis est chercheur associé au Larhra (UMR 5190) et enseigne à Sciences Po Lyon, à l’Université Lyon 2 et dans le secondaire. Ses travaux portent sur l’histoire politique du premier XXe siècle en France et la caricature politique. Dans la continuité de sa thèse de doctorat, « Édouard Herriot et les forces politiques lyonnaises, 1904-1957 », en cours de publication aux Presses universitaires de Lyon, il s’intéresse en particulier au rôle des crises et des conflits dans la structuration d’un champ politique local, aux représentations satiriques de la politique, et à l’influence des cultures et identités locales et régionales sur la vie politique. Il codirige avec Laurent Bihl (Paris I) le numéro 31 de la revue Ridiculosa, intitulé Caricature et identités locales (à paraître en décembre 2024).

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