- 1 J. Merriman, 2008, p. 121.
- 2 L. Canler, 2006 (1ère éd. 1882), p. 551.
- 3 V. Wright, 1977 p. 70.
- 4 D. B., 1885, p. 9.
- 5 J. M. Berlière, 2012.
- 6 Pour l’étude approfondie de l’épuration des commissaires de police sous la Restauration, voir V. (...)
- 7 C. Cartayrade, 2008 évoque « la difficile émergence d’un nouveau policier » au début du Second Em (...)
1John Merriman avance de façon convaincante que « durant la Restauration, la compétence professionnelle devint prépondérante dans les évaluations systématiques des policiers »1. Après la révolution de 1848, Marc Caussidière est nommé à la tête de la préfecture de police ; Louis Canler, qui devint chef du service de la Sûreté en mars 1851, après l’éviction de ce dernier, estime que « sous son administration personne ne fut révoqué à la préfecture »2. À en croire l’historien et le mémorialiste, les commissaires de police n’auraient finalement pas souffert outre mesure des changements de régime politique avant la Troisième République. En revanche, selon Vincent Wright, les commissaires de police – comme les préfets – démissionnèrent en masse en septembre 1870 et en 1877 car « parfaitement conscients du sort qui leur était réservé », ils s’infligèrent une « auto-épuration »3. L’appréciation est accréditée par ce commissaire contemporain des événements évoqués suggérant que les effectifs policiers ont été notoirement expurgés par les républicains en prétendant qu’« il y avait certainement dans le personnel de la police impériale d’honorables exceptions puisque certains de ses membres ont été conservés par le gouvernement actuel qui les juge dignes de sa confiance »4. Si l’ampleur des révocations dans la magistrature ou le corps préfectoral a effectivement laissé une importante documentation, les vagues d’évictions ou de départs volontaires des commissaires de police à l’aube de la Troisième République restent à vérifier et éventuellement à mesurer. Des recherches récentes sur les commissaires de police parisiens durant la Révolution5 et la Restauration6 ont permis d’élargir un regard jusqu’alors focalisé sur la haute administration ou le pouvoir exécutif, c’est-à-dire sur l’épuration la plus visible mais pas nécessairement représentative des échelons subordonnés. En revanche, les périodes postérieures demeurent obscures concernant ce groupe professionnel, dont les contours évoluent au gré de la création ou suppression de formations policières7.
- 8 Le projet « Systèmes policiers européens, xviiie-xixe siècles », soutenu par l’ANR et coordonné p (...)
- 9 Depuis une quinzaine d’années, Jean-Noël Luc anime ce chantier prolifique à l’université Paris IV (...)
- 10 On trouvera néanmoins quelques tentatives de mises en série appliquées au recrutement, aux trajec (...)
- 11 A. Lignereux, 2008.
- 12 A.-D. Houte & A. Lignereux, 2007, p. 45-71.
2Cette tentative de quantification s’inscrit dans l’essor plus large de l’histoire des polices8 et des gendarmeries9. Mais en dépit d’une prolifération de travaux, l’histoire sociale des policiers reste encore largement méconnue. Plus encore, aucune recherche sérielle conséquente sur ce groupe professionnel – plutôt, ces groupes – n’a été entreprise pour l’époque contemporaine10. En revanche, des études relatives aux gendarmes ont quantifié leur travail de maintien de l’ordre et de pacification face aux rébellions11 ou la présence de cette force de l’ordre vue comme essentiellement rurale et qui pourtant investit largement l’espace urbain dans la deuxième moitié du xixe siècle12. Ces mises en séries contredisent ainsi sans conteste les représentations tenaces sur les militaires.
- 13 Que nous avions présenté pour la première fois in D. Kalifa & P. Karila-Cohen, 2008, p. 263. Ces (...)
3Un matériau archivistique inexploité car inédit13 permet d’interroger à nouveaux frais l’image d’une Sûreté générale étrillée par les hommes forts du pouvoir en 1870 et durant la décennie suivante. L’horizon parisien – probablement surdéterminé et surexposé – est également dépassé pour atteindre une échelle nationale encore inexplorée puisque ces fiches embrassent l’ensemble des commissaires de police municipale, à l’exclusion de ceux de la préfecture de police. Les conclusions tirées de l’épuration de la magistrature et du corps préfectoral ont sans doute été trop rapidement extrapolées au corps des commissaires de police, extrapolations largement nourries par les intentions des républicains vigoureusement proclamées en septembre 1870. Plusieurs phases contradictoires paraissent à l’œuvre durant la décennie 1870, répondant elles-mêmes à des changements de gouvernement d’inspirations divergentes alors que le régime se maintient. De même, les logiques gouvernementales doivent s’accommoder de contingences politiques locales pour nommer des hommes « acceptables » ou ne pas destituer des fonctionnaires professionnellement efficaces, quoique politiquement compromis.
- 14 Pour reprendre le titre de l’ouvrage dirigé par M. Bergère & J. Le Bihan, 2009.
4Les fiches nominatives des milliers de commissaires de police sous la Troisième République présentent chacune la chronologie de la carrière des fonctionnaires. Les policiers connurent-ils alors « la tourmente »14 qui leur était promise en septembre 1870 ? Ces fiches permettent-elles de saisir les modalités que la profession vécut lors de ces transitions politiques, et, réciproquement, comment ces phases durent composer avec ce corps d’une indispensable force publique ? Les très nombreuses mutations observées doivent-elles s’interpréter comme une épuration, et seulement comme une épuration, ou certaines d’entre elles furent-elles d’abord des gratifications ?
- 15 Le fichier du personnel policier de la Sûreté générale demeure dans ce lieu alors que toutes les (...)
- 16 Cotés 20010260 (/1, /2, et ainsi de suite jusqu’à /12), douze cartons rassemblent des milliers de (...)
- 17 126 fiches retenues dans la boîte n° 1 (sur un total d’environ 1 100 fiches), 136 fiches dans la (...)
5Le Centre des archives contemporaines (CAC désormais) des Archives nationales (AN) à Fontainebleau15 recèle le fichier alphabétique des commissaires de la police de la longue Troisième République ; certains ont commencé leur carrière en servant Napoléon III, d’autres l’ont entamée bien après en jurant obéissance au maréchal Pétain. En attendant d’être minutieusement comptées, le nombre de fiches s’approche très grossièrement d’une douzaine de milliers. Seules les trois premières boîtes ont été utilisées pour cette monographie16, soit approximativement un quart du matériau disponible ; trois mille fiches environ ont été consultées. Parmi celles-ci, trois critères ont présidé à la constitution de l’échantillon de travail. Ont été d’abord retenus les commissaires qui ont entamé leur carrière à la Sûreté générale avant 1870. Ensuite, les fiches d’individus ayant accompli une carrière dans une autre force de l’ordre ou l’armée pendant le Second Empire ; de façon surprenante a priori, on verra que de nombreux commissaires de la police républicaine ont pour origine professionnelle la gendarmerie impériale – redevenue nationale en septembre 1870. Les fiches des hommes intégrés à la Sûreté générale après le Quatre-Septembre ont enfin été comptées afin de voir si leur engagement a résisté aux soubresauts du gouvernement d’Ordre moral, en 1875, à la crise du Seize-Mai et à l’instauration de la « République des républicains » en 1878. Ces critères se sont imposés a posteriori, en constatant la diversité des biographies, quoique des points communs émergent entre trois groupes détaillés ci-dessous. Le total se porte à 387 cas17, dont 381 ont été retenus – six fiches étant ambiguës ou inexploitables.
6Le choix aléatoire des fiches répertoriées et la proportion d’individus pris en considération par rapport au nombre total de commissaires de police durant la période garantissent la représentativité de l’échantillon, en tenant toutefois compte des réserves précisées infra.
Tableau 1. Les commissaires de police sous la IIIe République
Note. Les chiffres en exposant renvoient aux trois cartons envisagés.
Source. Échantillon CAC, 20010260.
- 18 Journal des commissaires de police, en ligne sur le site Gallica de la BNF, URL : http://gallica. (...)
7En effet, si l’apparente continuité alphabétique du fichier paraît attester de son exhaustivité, la lecture du Journal des commissaires de police18 permet de déceler des lacunes, certes minimes en regard du nombre total de fiches. Il paraît donc impossible d’établir un recensement exhaustif assuré des commissaires de police durant cette période. Sans doute arriverait-on à la somme prosopographique la plus fiable en croisant le fichier de la Sûreté générale avec le Journal des commissaires de polices. Comme ce périodique récapitule les dates et lieux de nomination de commissaires dans ses livraisons annuelles, la méthode consiste à voir si les fonctionnaires mentionnés apparaissent dans le fichier. Réciproquement, on peut sélectionner une date d’affectation sur une fiche et en chercher la correspondance sur le numéro du journal de l’année concernée. Il faut pourtant constater que si le fichier comporte des lacunes, inversement certaines fiches de commissaires mentionnent des nominations qui n’apparaissent pas dans la liste récapitulative dressée chaque année par le Journal des commissaires. Ces lacunes seront ensuite confirmées par une autre source, d’origine préfectorale. Le périodique comme le fichier donnent ainsi l’illusion de l’exhaustivité, ce qui n’invalide néanmoins pas la signification des informations qui émergent de l’une et l’autre de ces sources qu’il est donc possible de croiser afin de remédier à ces insuffisances.
8La date de rédaction de ces fiches fait également question. Plusieurs groupes peuvent être distingués par l’unité de calligraphie respective les caractérisant. À chaque époque, un seul « commis aux écritures » semble avoir été en charge de la composition de ces fiches, au terme de la carrière du fonctionnaire. On constate également que les fiches de policiers terminant leur carrière à peu d’années d’intervalle présentent non seulement la même écriture mais également la même disposition des renseignements mentionnés, qui récapitulent donc les étapes de la carrière. Selon les années, l’administration et ses secrétaires renseignent différemment des informations similaires ce qui rend parfois difficile leur comparaison. La lecture de ces fiches réparties sur l’ensemble de la Troisième République, rédigées au fur et à mesure des départs – volontaires ou non – dans le corps des commissaires reflète toutefois une uniformisation relative de l’écriture administrative (Figure 1).
Figure 1. D’un régime l’autre. Carrière du commissaire Arnaud entre 1855 et 1891
Note. Cette fiche est représentative de carrières ininterrompues ne portant aucune trace des changements politiques et des bouleversements administratifs des années 1870.
Source. AN, CAC, 20010260/1.
9Ces fiches indiquent l’identité succincte du fonctionnaire par son état civil, son « niveau de fortune », éventuellement sa religion – détail qui perdure jusqu’à la Première Guerre mondiale et qui figure également sur les fiches annuelles d’appréciation par les autorités préfectorales et judiciaires, conservées dans les archives départementales – ainsi que le degré d’instruction, en particulier la maîtrise de langues étrangères ou d’idiomes régionaux, parfois déterminante pour une affectation en zone frontalière dans la police spéciale des chemins de fer ou dans une police municipale.
- 19 Archives départementales [AD] de Côte-d’Or [ADCO], 8M7, lettre du ministre de l’Intérieur au préf (...)
- 20 La préfecture de police conserve son propre fichier des commissaires qu’elle emploie. Cette étude (...)
10L’incendie des archives de la Sûreté générale ainsi que de la préfecture de police à Paris pendant la Commune privent l’administration « des éléments d’appréciation qu’elle possédait sur le personnel des commissaires de police », comme le regrette le ministre de l’Intérieur à Versailles19. Par la circulaire du 4 novembre 1872, le directeur de la Sûreté générale sollicite l’aide des préfets pour reconstituer le fichier central du personnel policier20 ; les notices des commissaires en poste dans leur département de résidence durant les années 1860 doivent être envoyées à Paris. Si le fichier central strictement informatif reconstitué est dépourvu des appréciations sur les qualités et défauts des fonctionnaires, cela ne signifie évidemment pas que l’administration ne dispose nullement des appréciations préfectorales rédigées durant le Second Empire et conservées dans les chefs-lieux des départements. Seule la fiche de Pierre Besnier de Bligny mentionne que « le dossier de ce fonctionnaire a été incendié en 1871 ». La mention « décédé » ne permet pas de savoir si le fonctionnaire a exercé des fonctions après 1870 ; il fait ainsi partie des six notices insuffisamment renseignées ou trop ambiguës pour être exploitables.
- 21 Q. Deluermoz, 2012, p. 137-148. On pourra également lire dans les pages suivantes de cet ouvrage (...)
- 22 Y. Dalotel, 1987, p. 25. Émile de Kératry démissionna de son poste d’attaché au ministère des Aff (...)
- 23 ADCO, 8M7, 5 octobre 1870. On verra ultérieurement ce que recouvre cette distinction entre police (...)
- 24 Les commissaires de police qui perdent leur poste en raison de l’annexion de l’Alsace-Lorraine pa (...)
11Après l’instauration de la République du Quatre-Septembre, l’heure ne peut être qu’à une réorganisation profonde de la force publique. Les républicains désormais au pouvoir ont, en effet, pour la plupart, souffert de la police du Second Empire autoritaire, puis du regain de tensions en 186921. Le 24 décembre 1870, Léon Gambetta et Jules Ferry déposent une proposition de loi pour la suppression du préfet de police, après avoir eux-mêmes subi la surveillance de ses agents. La fin du régime fut particulièrement funeste à la réputation des forces de l’ordre et le préfet de police installé au soir du 4 septembre, le comte Émile de Kératry, « veut régler ses comptes avec le régime du coup d’État de 1851, poursuit les chefs de la police Bonapartiste »22 et aurait procédé à de multiples révocations. Cette première et vive réaction laisse alors penser que le paysage policier est appelé à changer radicalement. Des notices portent effectivement trace de transformations institutionnelles, comme celles entraînées par le décret du 10 septembre 1870 qui supprime les postes de commissaires cantonaux, ce qui provoque de facto l’inactivité de ces fonctionnaires, comme le justifie l’euphémisme du directeur général délégué du ministère de l’Intérieur au préfet de la Côte-d’Or avançant que « les circonstances ont pu rendre nécessaires plusieurs changements dans le personnel des commissaires de police ou dans la police des chemins de fer »23. Treize commissaires sur les 173 ayant entamé leur carrière sous le Second Empire sont explicitement « mis en inactivité » en septembre 1870 et dans les mois qui suivent24. Le commissaire Eugène Belbèze, en inactivité depuis septembre 1870, est « remplacé purement et simplement le 29 mai 1871 » (Figure 2).
Figure 2. Carrière d’Eugène Belbèze, l’une des rares brutalement interrompues en septembre 1870
Source. AN, CAC, 20010260/1.
12Cependant, il faut se garder de penser que le changement de régime en septembre 1870 donna lieu à un mouvement massif de révocations parmi les commissaires de police de la Sûreté générale. En effet, huit révocations mentionnées comme telles ont été relevées parmi les 173 commissaires en place sous le précédent régime, soit 4,6 % de l’échantillon. Il faut ajouter à ce nombre, sept démissions ; trois dès septembre 1870 et trois autres à l’été 1871. Paradoxalement, on verra qu’il ne faut pas interpréter a priori ces révocations ou ces démissions comme des évictions définitives. On peut se demander si ces départs volontaires anticipent une révocation crainte ou manifestent l’opposition du fonctionnaire au changement de régime.
13En 1877, après le Seize-Mai, un nouveau mouvement de personnel est sensible, avec une ampleur plus accentuée encore. Six révocations sont prononcées, dont l’une d’un commissaire déjà touché par cette mesure en 1870. Trois démissions sont données. En revanche, le vocabulaire comme la pratique évoluent. À la révocation peu ou prou brutale succède le remplacement plus ou moins punitif, c’est-à-dire la mutation, dont on ne sait vraiment à qui les commissaires la doivent : autorités préfectorales, judiciaires, maires, leur propre sollicitation ? Neuf commissaires sont dans cette situation, dont l’un était démissionnaire le 4 septembre 1870. Les mutations s’opèrent rapidement, durant l’été 1877. En définitive, peut-on estimer dans cet échantillon le nombre de commissaires irrévocablement exclus de la carrière policière par un régime républicain incertain, en recherche de lui-même ? (Figure 3).
Figure 3. Mouvement de personnel dans le corps des commissaires de police de la Sûreté générale dans les années 1870 et au début des années 1880
Source. Échantillon CAC, 20010260.
14Avant d’analyser plus précisément la courte période allant du printemps 1877 à l’hiver 1878, les sommets des années 1870, 1877 et 1878 tendent à conforter l’hypothèse, par leur coïncidence avec les changements politiques, de la nature punitive des mutations de personnel. La figure 3 montre d’abord la diversité des termes employés pour mettre entre parenthèses la carrière d’un policier, y placer un point final ou des points de suspension. Néanmoins, il faut se méfier de cette apparente hétérogénéité paraissant rendre compte de situations administratives différentes. Les mots de « révocation » ou de « démission » ne sont pas nécessairement suivis d’un arrêt définitif de la carrière du fonctionnaire ; réciproquement, les termes de « disponibilité » ou de « remplacement » peuvent signifier pour le commissaire un retrait sans retour dans sa profession. Ce vocabulaire incertain employé par l’administration traduit-il sa difficulté à saisir ce qu’elle-même mit en œuvre à l’égard de son personnel ? Et ce lexique flottant n’est-il pas lui-même la manifestation de l’écart entre décision politique et action publique ? On peut ensuite relever le pic de 1870 qui correspond d’abord à une réforme structurelle, induite par la conjoncture : la fin des emplois de commissaire cantonal. De nouveaux postes doivent donc être trouvés pour des fonctionnaires désormais sans emploi car sans affectation géographique. En somme, le commissaire demeure quand le commissariat est dissout. Cela explique en majeure partie les mouvements de réintégration des années 1871 et 1872, hormis quelques cas de fonctionnaires particulièrement compromis avec le régime précédent examinés par l’administration. Ces bouleversements sur la carrière des commissaires, beaucoup plus considérables au cours de la Troisième République (1877-1878) qu’au moment de la rupture politique de 1870, revêtent une signification indéterminée. Observe-t-on en 1870 les effets de la continuité administrative du Second Empire, d’une part, et, d’autre part, une politisation accrue en république lors d’une situation de forte incertitude et d’alternances rapides ?
15La figure 3, enfin, ne montre pas l’intense phénomène en deux temps des mutations des années 1877 et 1878. Jusqu’alors exclusivement associées à une volonté punitive, voire vindicative, ces mutations revêtent pourtant des finalités diamétralement opposées selon le commissariat auquel le fonctionnaire est destiné.
- 25 Félix Brayer poursuivit ensuite sa carrière parmi les « barons » – terme employé à l’époque – de (...)
16Au sein du groupe des 173 commissaires ayant commencé leur carrière avant 1870, huit sont donc révoqués au soir du changement de régime ou peu après, deux sont relevés de leur fonction, trois sont placés en disponibilité. Mis en inactivité en 1870, l’un est démissionnaire en juillet 1871, deux autres sont remplacés la même année sans qu’une reprise de fonction soit mentionnée – seule la fiche de Joseph Alin, « mis en inactivité sur la demande du Préfet de l’Allier. Remplacé par Buzzini, 16 novembre 1871 », laisse d’ailleurs entrevoir le caractère coercitif de la mesure, le quatrième est explicitement révoqué après ce moment de suspension, le dernier reprend un poste à Rivesaltes en juillet 1877 puis est révoqué en décembre. Cet ultime cas est ambigu car il est difficile de savoir si Joseph Auzeill doit son éviction à des motifs politiques – sa réintégration puis sa révocation rapide épousent le calendrier des vicissitudes gouvernementales et des renouvellements parlementaires – ou à des raisons personnelles, liées notamment à la régression envisageable de ses aptitudes professionnelles durant cette période prolongée de retrait. Au sein de cet ensemble particulièrement compromis aux yeux du nouveau gouvernement, la fonction de commissaire spécial, spécifiquement dévolue au renseignement politique et administratif, ne paraît pas être un facteur d’aggravation des sanctions. Ainsi, Eugène Balleyguier-Loudun, dont la fiche figure ci-après, commissaire spécial en résidence dans la capitale sur la ligne de Paris jusqu’à Bordeaux est-il révoqué au profit de Félix Brayer, également commissaire spécial à Paris25. Or, Félix Brayer n’est pas un homme neuf ; il a été commissaire durant tout le Second Empire qu’il a consciencieusement servi en gravissant les étapes du cursus honorum du corps aux postes de commissaire municipal, central ou spécial. Dans les années 1860, le Journal des commissaires de police rend d’ailleurs hommage à ses ouvrages d’instruction professionnelle destinés à ses collègues. Ces apparences ne donnent pas vraiment l’image d’une rupture politique, malgré la révocation qui frappe E. Balleyguier-Loudun. Au contraire, la carrière de F. Brayer incarne des continuités personnelle, professionnelle et institutionnelle qui démentent les velléités réformatrices de 1870 (Figure 4).
Figure 4. Fiche du commissaire Eugène Balleyguier-Loudun, révoqué sans appel
Source. AN, CAC, 20010260/1.
- 26 Émile de Marcère, le grand ordonnateur des mutations postérieures à la fin du gouvernement d’Ordr (...)
17Le contexte des années 1877 et 1878 doit d’abord être résumé car l’attention à la chronologie permet d’éviter d’oublier des éléments indispensables à la compréhension des graphiques et des développements statistiques. Le 16 mai 1877, le conservateur Albert de Broglie revient au pouvoir, à la tête d’un nouveau gouvernement d’Ordre moral qui entend redonner la primauté au pouvoir exécutif alors que la Chambre, à majorité républicaine, prétend établir une république d’abord parlementaire. Celle-ci est dissoute le 25 juin 1877. De nouvelles élections se préparent alors durant tout l’été et le début de l’automne, élections législatives dans lesquelles les commissaires de police sont appelés à surveiller les municipalités et contrecarrer les desseins de l’opposition gouvernementale. Or, le 14 octobre 1877, la Chambre retrouve sa majorité républicaine. Albert de Broglie est évincé au profit de Jules Dufaure, qui forme un gouvernement de centre-gauche. Émile de Marcère est nommé ministre de l’Intérieur le 13 décembre 1877 ; républicain conservateur, il vient d’être réélu député du Nord et a immédiatement présidé une commission d’enquête sur les menées de l’administration mise en place par le « ministère du Seize-Mai ». Parmi les préfets – c’est-à-dire les supérieurs hiérarchiques des commissaires – 83 nommés par le gouvernement d’Ordre moral sont remplacés à partir de la mi-décembre26. Les élections aux conseils municipaux du 6 janvier 1878 assoient un peu plus la domination républicaine. Représentants de l’autorité administrative centrale à la jonction des pouvoirs politiques locaux, comment les commissaires ont-ils subi ces revirements rapides et ces pressions contradictoires ? (Figure 5).
Figure 5. Mutations et mouvements de personnel parmi les commissaires de police de la Sûreté générale entre le 16 mai 1877 et les élections de novembre 1877
Source. CAC, 20010260, parmi un échantillon de 282 fonctionnaires.
Figure 6. Mutations et mouvements de personnel parmi les commissaires de police de la Sûreté générale après les élections de novembre 1877 et durant l’année 1878
Note. Parmi un échantillon de 282 fonctionnaires.
18Une première vague de mutations est déclenchée durant l’été 1877. Sont concernés 282 fonctionnaires de police alors en poste. Cinq révocations sont prononcées à la suite de l’installation du gouvernement du Seize-Mai, ce qui peut paraître peu. Mais si les pouvoirs publics ne se séparent pas de commissaires indispensables pour assurer l’ordre public, ils procèdent néanmoins à trente-six mutations que l’on peut qualifier de « défavorables », c’est-à-dire sanctionnées par un traitement inférieur (à chaque commissariat correspond une classe – de la cinquième à la classe exceptionnelle – qui détermine le traitement versé au policier occupant le poste) et/ou une affectation sans autre objet que de déplacer le fonctionnaire. En revanche, trente-trois mutations sont vues comme « favorables » car assorties d’une amélioration de traitement et/ou d’une gratification, comme la nomination au poste de commissaire central (« c. c. » sur les fiches) au lieu de commissaire de police (abrégé « c. p. »). La difficulté est d’interpréter ces mutations, qu’elles soient jugées « favorables » ou « défavorables ». Le nouveau gouvernement a-t-il voulu récompenser ou punir certains fonctionnaires ou préparer les élections en s’assurant la fidélité ou en suscitant la crainte de commissaires ? Ces diverses hypothèses s’entremêlent probablement. Quoiqu’il en soit, plus de 40 % du personnel en place changent alors d’affectation, les rétorsions étant finalement de peu majoritaires au regard des améliorations de situation. En 1878, les mutations revêtent la même ambivalence.
19Que se passe-t-il avec le retour des républicains à la Chambre et au gouvernement six mois plus tard ? À nouveau, une puissante lame de fond, plus massive encore, secoue la corporation policière. Près de 60 % des fonctionnaires connaissent un infléchissement de carrière. Néanmoins, le nombre de mutations a priori favorables est désormais majoritaire. Une partie de ces mutations « favorables » restaurent les policiers victimes du gouvernement antérieur dans leur affectation antérieure au Seize-Mai, ou dans une ville proche au sein du même département, avec souvent une amélioration du traitement perçu ou de la fonction exercée. Ces déplacements ont donc une finalité clairement réparatrice et interpréter toutes ces mutations comme des sanctions serait un contresens. L’attention portée au traitement versé après le déplacement, à la classe du commissariat et à la localisation de la ville par rapport à l’affectation précédente permet de déceler le caractère bénéfique de ces mutations. Une archive complémentaire permet de mieux comprendre les significations attachées à ces déplacements.
- 27 CAC, 19940493, art. 15, dos. 262, rapport du préfet des Bouches-du-Rhône au ministre de l’Intérie (...)
20Au début de l’année 1878, le rapport d’un préfet des Bouches-du-Rhône sur les commissaires de son département, au lendemain de la réinstallation des républicains, livre des informations capitales pour saisir les motivations politico-administratives de ces déplacements et les divergences et nuances qui les distinguent en dépit de leur apparente similitude27. Quelques fiches présentes dans l’échantillon collecté peuvent ainsi être rapportées à des observations plus amples.
21La liste des personnel des commissariats des arrondissements du département des Bouches-du-Rhône (voir Tableau 2, en annexe) est, par exemple, remarquable car elle révèle la palette des desseins qui ont pu présider aux mutations des policiers au sortir du « ministère d’Ordre moral ». En effet, des mobiles professionnels s’entremêlent aux considérations politiques, comme en témoigne l’appréciation du préfet au sujet du commissaire de police à Istres, ancien maréchal des logis de la gendarmerie. On discerne également la préoccupation d’une relative équité entre les individus et la prise en compte de la situation familiale quand une mesure trop sévère pourrait précipiter la misère d’un ménage. Volonté de punir des fraudes électorales au profit de l’ancien gouvernement, désir de récompenser l’entente avec les municipalités républicaines, souci de préparer l’avenir de l’institution policière par le réalisme d’une administration qui ne peut se passer d’un tel corps pour imposer la force de son ordre et doit en même temps ménager les conseils municipaux désireux d’ostraciser un commissaire embarrassant… Autant de motifs interdisant une appréciation globale ou des conclusions trop marquées.
- 29 Comme le signale cet extrait de la revue corporative des commissaires, fondée en 1855, qui fait a (...)
22Comme dans d’autres contextes d’avènement d’un nouveau régime, la République avant d’être opportuniste a dû faire preuve de pragmatisme, et cela très précocement. C’est alors un épisode de carrières qui s’interrompent pour mieux continuer. Dès le 11 avril 1871, pour faire face au désordre public, une circulaire émanant du ministre de l’Intérieur à Versailles insiste sur la nécessité de rétablir dans leurs fonctions des commissaires de police « en disponibilité »29.
Figure 7. Le commissaire Joseph Berton, une carrière de trente ans…
malgré une révocation en 1870 et une seconde en 1877
Source. AN, CAC, 20010260/1.
23La continuité de la carrière du commissaire Joseph Berton illustre la situation qui a globalement prévalu (Figure 7). La grande majorité des commissaires de police du Second Empire ont pu poursuivre leur carrière malgré la tourmente des années 1870 et 1871, puis 1877 et 1878. Après la période de purgatoire administratif qu’est la mise en inactivité ou disponibilité, la plupart des commissaires retrouvent rapidement une fonction, y compris ceux qui démissionnent ou sont révoqués. L’échantillon constitué présente très peu de cas de réintégrations, d’abord car il y eut un faible nombre de révocations ou de mises en inactivité. Révoqué en 1870, le commissaire Joseph Berton est réintégré en septembre 1871. Déjà en poste dans l’est de la France dans une commune désormais annexée, sa maîtrise de l’allemand lui vaut de retrouver une affectation à proximité de la frontière. C’est donc en Meurthe-et-Moselle qu’il subit sa seconde révocation en septembre 1877, où il est réintégré en février 1878, bénéficiant même d’une élévation de classe synonyme d’augmentation de traitement. En poste dans l’Ardèche quand il est mis en disponibilité en septembre 1870, le commissaire Marc Alliaud retrouve ce département en mars 1871, avec, en outre, un doublement de son traitement porté de 1 800 à 3 600 francs. Néanmoins, deux semaines plus tard, il est muté dans l’Hérault, puis rapidement dans le Gard pour revenir un an plus tard à Montpellier et être muté un mois plus tard à Béziers. Si la fin de sa carrière est ensuite moins mobile, il connut encore trois déplacements dans l’est, le centre et l’ouest de la France. Autre exemple, à l’image du précédent, celui du commissaire Joseph Ambrogi, lui aussi mis en disponibilité en septembre 1870. Il retrouve un commissariat à Marseille, en juillet 1871, après avoir laissé celui de Montpellier. Il bénéficie également d’une élévation de traitement au terme d’une mise à l’écart qui ne signifie donc nullement une suspension des droits à l’avancement, à l’instar du commissaire Jacques Bédouret, révoqué en 1870 et qui retrouve un an plus tard la police lyonnaise. Le commissaire Hippolyte Benoît, enfin ; « démissionnaire » à Perpignan le 4 septembre 1870, il est réintégré le mois suivant, à Nice, où il prend la fonction de commissaire spécial. « Remplacé » en juin 1877, il est nommé à Paris, à la Direction de la Sûreté générale en décembre, ce qui signifie une promotion. Il est alors rapidement affecté au commissariat spécial de la gare du Nord – ce qui le range parmi les « barons » du corps – avec une élévation de traitement puis il termine sa carrière en 1884, en ayant atteint depuis 1880 le sommet du traitement de la profession, avec 8 000 francs annuels.
24Globalement, parmi les huit révoqués de 1870, six sont réintégrés en 1871 et un autre en 1872 ; un seul est mis à l’écart définitivement. Faut-il d’ailleurs s’en étonner puisque les élections du 18 février 1871 marquent la victoire des monarchistes et la consolidation d’une république conservatrice dirigée par Adolphe Thiers ? Durant l’été 1877, les commissaires révoqués ou relevés de leurs fonctions par le gouvernement d’Albert de Broglie sont ensuite réintégrés dès les premiers mois de 1878, en répercussion de la formation d’une Chambre à majorité républicaine et d’un gouvernement de centre-gauche à partir de la mi-décembre 1877. Sur les 381 commissaires composant l’échantillon étudié durant la décennie 1870, 276 ont ensuite fait valoir leurs droits à la retraite au terme de leur carrière policière. Il est même surprenant de voir qu’un commissaire démissionnaire en 1871 peut reprendre ses fonctions en mai 1882, certes pour être relevé de ses fonctions quelques mois après. Dans la plupart des situations, les commissaires mis en disponibilité ou remplacés retrouvent un poste dans le même département, voire dans la même ville, avec le plus souvent une hausse de leur traitement.
- 30 A. Lignereux, 2008, a ainsi tenté d’interpréter les mouvements rébellionnaires au premier xixe si (...)
25Pour finir, il est extrêmement délicat d’interpréter ces mutations en se demandant si un dessein politique a présidé à la destination finale imposée aux commissaires30. En effet, ces derniers exercent au sein d’un ressort géographique communal et la dimension départementale importe moins que le rapport de force politique local. Une prospection extrêmement minutieuse demeure donc encore à mener pour approfondir cette interrogation.
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- 31 A.-D. Houte, 2009, p. 133.
- 32 M. Bergère & J. Le Bihan, 2009, p. 31.
26Comme le conclut Arnaud-Dominique Houte pour la gendarmerie, « les mouvements des années 1870-1880 s’insèrent dans une décennie de très forte mobilité » durant laquelle « la volatilité des effectifs s’explique par quantité d’autres facteurs »31 que des motifs politiques d’épuration. Cette évaporation trouve en partie son origine dans les emplois offerts aux militaires à la Sûreté générale ; avoir été gendarme durant le Second Empire ne constitue pas un passé professionnel rédhibitoire pour ensuite servir la République, qu’elle soit conservatrice, réactionnaire ou opportuniste. Comme on l’a vu, la mobilité géographique des commissaires de police relève presque autant d’un mouvement de sanction pour les uns que d’une occasion de gratification pour les autres. Marc Bergère et Jean Le Bihan distinguent trois catégories de réintégrations, dont celle de « fonctionnaires destitués sous le précédent ou la précédente majorité qui, parce que le vent, tournant une nouvelle fois, vient de rappeler au pouvoir les vaincus de la veille, retrouvent un poste […]. Sans doute est-ce au cours des années 1870-1877 qu’il connaît son maximum d’intensité »32. En ce qui touche le corps des commissaires de police, très peu d’évictions définitives ont donc été prononcées et ce « chassé-croisé », qui se prolonge en 1878, ainsi nommé par les deux historiens ne peut être vu comme exclusivement punitif. Les significations des déplacements de fonctionnaires sont non seulement variables mais parfois antagonistes alors que jusqu’à présent les mutations étaient d’abord vues comme vexatoires. Encore faut-il immédiatement ajouter que ces mutations sont ensuite largement décriées par la presse corporative policière au début du xxe siècle. Le phénomène ne s’épuise donc pas à la fin de la décennie 1870 même si l’interprétation des motifs de déplacement glisse d’une échelle politique nationale à une dimension interpersonnelle locale. Les relations entre le maire et le commissaire sont alors essentielles pour décider de la stabilité de ce dernier.
- 33 AD Charente, 4M3, rapport du directeur de la Sûreté générale Boucher-Cadart au ministre de l’Inté (...)
- 34 ADCO, SM7451.
- 35 AD Doubs, M953, circulaire du ministère de l’Intérieur aux préfets, 25 octobre 1909.
27La république opportuniste est à peine en ordre de marche que la volonté d’amélioration du corps des commissaires de police anime le ministère de l’Intérieur car « la sécurité et la confiance qui résultent de l’établissement définitif de la République et du fonctionnement normal de nos institutions ont amené un grand nombre de personnes à solliciter des emplois dans toutes les administrations du Gouvernement et ont fait croître, dans une proportion inconnue jusqu’à ce jour, le nombre des demandes d’admission dans les services de ma direction ». Le nouveau directeur de la Sûreté générale entend donc « relever les fonctions de police » en faisant « subir un examen à ceux qui désirent entrer dans le personnel »33. Plutôt que par une épuration massive et à court terme au sein de la Sûreté générale, le renouvellement du corps des commissaires s’est ensuite accompli par une républicanisation en profondeur et dans la durée. En effet, encore après l’affaire des Fiches en 1904, les notices annuelles de notation administrative des commissaires mentionnent leur cléricalisme prétendu ou leur républicanisme affiché, voire la pratique religieuse de leur épouse34. Progressivement, le régime des recommandations et des appréciations à caractère politique évaluant la « fidélité au régime » des fonctionnaires de la Sûreté générale tend à s’estomper derrière des considérations plus objectives sur leur valeur professionnelle. Ainsi, en 1909, le ministre de l’Intérieur demande-t-il aux préfets, à l’occasion de l’envoi d’un nouveau modèle de notice de renseignements, des indications précises permettant de les évaluer en tenant compte de « certains principes de justice distributive »35. La récurrence des circulaires ministérielles, dès la fin des années 1870 – au moment donc où les effets des soubresauts politiques s’estompent –, soutenant la promotion du recrutement paraît cependant marquer la portée limitée de ces efforts. Ces deux modalités – l’examen et la recommandation – sont alors en concurrence, au lent bénéfice de la première.
- 36 J.-M. Berlière & L. Chabrun, 2001 ; J.-M. Berlière, 2007.
- 37 M. Bergère & J. Le Bihan, 2009, p. 14.
28L’ordre alphabétique du fichier exploré mêle des notices de commissaires de police ayant vécu la fin du Second Empire à celles des fonctionnaires en activité au terme du régime de Vichy. L’écart du traitement réservé aux commissaires par les Troisième et Quatrième Républiques naissantes est immédiatement lisible. En l’occurrence, les crises gouvernementales républicaines furent beaucoup plus décisives pour les carrières des policiers que les changements de régime. Si le mot épuration fait pleinement sens pour ce corps à la Libération36, en revanche, il est inapproprié pour désigner les mouvements de personnel durant les années 1870. En ce qui concerne la police, la coupe offerte par cet échantillon de 381 commissaires majore même l’appréciation de Marc Bergère et Jean Le Bihan concluant que « sans doute a-t-on exagéré l’intransigeance épuratoire des républicains »37. En définitive, ces mouvements massifs de personnel sans éviction donnent le sentiment de réintégrations sans épuration. Réintégrations, car après une période plus ou moins longue de suspension, le déplacement fait autant figure d’ostracisme géographique et de purgatoire administratif, pour les uns, que de retour gratifié à la normale, pour les autres.