L’établissement secondaire et l’histoire de l’éducation
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1En présentant une série d’articles groupés autour du thème de l’établissement scolaire, notre propos est de mettre l’accent sur l’importance nouvelle qu’a pris cet objet, a priori très banal, dans l’historiographie récente de l’enseignement en France, et d’attirer l’attention sur l’intérêt de cette émergence. Dans cette optique, le choix de l’enseignement secondaire – le terme est anachronique pour la période moderne, mais il a le mérite de souligner une continuité indéniable entre les collèges d’humanités et les lycées contemporains – peut apparaître comme une gageure. Très tôt codifiée et encadrée par des congrégations enseignantes puis par l’État, cette forme d’enseignement semble promettre peu de découvertes locales. D’ailleurs, que resterait-il à découvrir puisque aucun autre type d’établissement scolaire n’a fait l’objet d’autant de monographies ?
2En fait, l’intérêt d’études centrées sur les établissements secondaires est au moins autant dans le questionnement que dans la découverte. C’est dans les établissements que se produit la rencontre entre les élèves et les maîtres, que l’enseignement mais aussi, et plus largement, l’encadrement éducatif et pédagogique des élèves sont mis en œuvre, et que des contraintes matérielles, financières, spatiales, temporelles, s’exercent sur ceux qui ont en charge d’organiser cette rencontre. De ce fait, nombre de questions communes à ce genre d’enseignement, comme les dispositifs pédagogiques, l’évolution des enseignements et des exercices, celle du métier enseignant et de ses composantes, les conditions d’accueil des élèves ou le coût de l’éducation, trouvent des éclairages nouveaux quand on les envisage dans le cadre de l’établissement et non plus comme des données isolées de leur contexte. Mais cet usage de la réalité locale ne va pas de soi. Le poids historique de l’État français, l’importance idéologique de la guerre scolaire, ne prédisposaient pas les historiens français à se montrer particulièrement attentifs aux déterminants locaux de l’histoire éducative, et les courants intellectuels dominants n’ont pas contribué, jusqu’à une date assez récente, à combattre cette tournure d’esprit. L’évolution du climat intellectuel général, la reformulation des termes de la question scolaire, la décentralisation aussi, ont mis des problématiques nouvelles à l’ordre du jour et encouragé les historiens à élargir leur point de vue.
3Nous nous proposons, dans cette rapide introduction, d’évoquer les raisons historiques et scientifiques de l’émergence de l’établissement scolaire dans les sciences sociales et l’historiographie, de nous interroger sur le rapport paradoxal de ce phénomène avec l’évolution du genre monographique, de souligner l’historicité de cette forme d’organisation pensée à tort comme inhérente à la scolarisation, et, en nous appuyant sur les articles réunis ici, de montrer comment le croisement d’interrogations thématiques fait de l’établissement un objet historique renouvelé.
1. L’établissement scolaire dans l’action publique et dans les sciences sociales
- 1 Nous ne proposons ici qu’une lecture très sommaire de l’évolution des problématiques dominantes. Po (...)
- 2 En dehors des approches de l’école inspirées du marxisme, comme celle de Christian Baudelot et Roge (...)
- 3 On se contentera de mentionner un classique: Raymond Boudon: L’inégalité des chances, Paris, Armand (...)
4L’établissement scolaire est, en France, une des découvertes récentes des sciences sociales appliquées à l’enseignement1. Depuis le milieu des années 1960, les systèmes dominants d’interprétation de la société avaient substitué à la foi dans les capacités émancipatrices et égalitaires de l’école une série de lectures critiques qui mettaient au contraire l’accent sur ses fonctions de reproduction sociale ou sur ses dimensions oppressives2. Dans cette optique, l’établissement n’avait d’autre existence que celle d’un lieu où se jouait une partie socialement déterminée, et l’étude locale n’avait d’intérêt qu’au titre de la vérification d’une interprétation donnée au préalable. Le principal courant opposé à ces lectures critiques3 procédait de son côté d’une démarche inspirée par l’économie néo-classique, partagée entre la mesure macro-sociale et l’analyse des comportements individuels, et ne reconnaissant – tout comme les systèmes critiques évoqués ci-dessus – aucune place déterminante aux instances intermédiaires.
- 4 Voir l’article de Philippe Savoie: « Autonomie et personnalité des lycées: la réforme de 1902 et se (...)
- 5 Circulaire du 23 février 1977, mentionnée dans Jean-Louis Boursin: L’administration scolaire, Paris (...)
- 6 Rapport de la Commission d’études sur la fonction enseignante dans le second degré(présidée par Lou (...)
5La découverte par les sciences sociales de l’établissement scolaire comme objet et comme échelle d’observation a marqué le retour à la question du fonctionnement après le règne du fonctionnalisme, et, dans une certaine mesure, le retour à l’approche qualitative après celui du quantitatif. Ce tournant théorique, en grande partie inspiré par la sociologie américaine, a été précédé d’une redécouverte de l’établissement scolaire par l’action publique. Redécouverte et non découverte, puisque le rapport parlementaire de 1899 voulait déjà faire du développement de l’autonomie et de la personnalité des établissements une des principales solutions à la crise de l’enseignement secondaire ; l’importance que ce rapport leur accordait rejoignait d’ailleurs une des préoccupations les plus constantes de l’administration de l’Instruction publique au cours du xixe siècle4. Dès les années 1960, époque où la centralisation institutionnelle atteint son apogée en France, l’Éducation nationale est touchée, comme les autres administrations de l’État, par un mouvement de déconcentration. La mise en place des programmes d’activités culturelles et éducatives (PACTE), lors de la décennie suivante, s’efforce de stimuler les initiatives locales et l’utilisation pédagogique du milieu environnant dans l’enseignement secondaire. Les chefs d’établissements sont invités à entretenir des contacts réguliers avec la presse et les moyens d’information pour que soient connus la vie et les réalisations de leur établissement5. Pour les réformateurs de l’enseignement, à la même époque, l’autonomie pédagogique et organisationnelle de l’établissement est la condition indispensable de l’initiative et de l’innovation, et donc le seul remède à la crise de la relation pédagogique6. C’est avec l’application des lois de décentralisation de 1982 que la volonté officielle de renverser le centralisme éducatif devient manifeste, quoique limitée dans son champ d’application, le caractère national des programmes restant notamment de rigueur pour l’essentiel. C’est aussi à cette époque que la France se dote d’une politique de territorialisation de l’action éducative destinée à compenser les inégalités locales de milieu socio-culturel, désormais reconnues comme un déterminant majeur de la réussite scolaire. Le désenchantement engendré par les résultats peu égalitaires de la scolarisation de masse dans l’enseignement secondaire y est bien entendu pour beaucoup.
- 7 Voir l’analyse de Jean-Pierre Obin: « Le projet d‘établissement en France: mythe et réalité », Poli (...)
6Les zones d’éducation prioritaire (ZEP) sont emblématiques de ce mouvement de territorialisation. Inspirées de l’exemple britannique des EPA (Educational Priority Areas) des années 1960, elles constituent la principale application du principe de discrimination positive qui se substitue alors à celui d’égalité formelle. Les établissements classés en ZEP sont dotés de moyens complémentaires destinés à leur permettre de mieux encadrer leurs élèves et de mettre en place des actions spécifiques. Plus généralement, chaque établissement est, quelques années plus tard, incité à se doter d’un « projet d’établissement »7. Cette démarche procède de l’idée, déjà présente dans l’enquête parlementaire de 1898-1899 et dans la réforme administrative de 1902, que l’établissement est l’échelon pertinent pour adapter l’offre et l’organisation scolaires au terrain et à ses problèmes spécifiques. La prise en charge collective que suppose la construction du projet d’établissement contrebalance la volonté d’accorder des pouvoirs accrus au chef d’établissement : la tension entre ces deux objectifs, complémentaires mais en partie contradictoires, était déjà présente voici un siècle. Mais, alors qu’on avait, à cette époque, cherché à renforcer l’autorité des proviseurs en s’appuyant sur leur légitimité professorale (grade et expérience), les années 1980 se détournent au contraire de la figure du chef d’établissement comme primus inter pares pour promouvoir celle du proviseur-chef d’entreprise, qui peut être recruté hors du monde enseignant.
- 8 L’Institut de recherche sur l’économie de l’éducation (IREDU) s’est fait une spécialité de ce type (...)
- 9 Jean-Louis Derouet: Désaccords et arrangement dans les collèges, 1981-1986, Paris, INRP, 1988.
7Le renouvellement de perspective qui a permis l’émergence, du côté des sciences sociales, d’un intérêt pour le local, et en particulier pour l’établissement scolaire, n’est pas séparable de l’évolution de l’action publique. En effet, il procède pour une large part des travaux de sociologues situés à mi-chemin entre l’analyse et la décision, qui ont accompagné et participé aux changements de structures et de pratiques impulsés par les pouvoirs publics. Deux courants sociologiques, radicalement opposés quant aux méthodes, ont pris, dans ce cadre, les établissements scolaires pour objet d’étude. Le premier, proche de l’économie de l’éducation, a cherché à établir l’existence d’un « effet établissement » par des méthodes statistiques, et à isoler les variables qui font que les chances de réussite sont plus grandes dans tel établissement que dans tel autre, toutes choses égales par ailleurs8. Le deuxième, plus vaste et plus divers, met en œuvre des démarches de type ethnographique reposant sur l’observation de terrain. Il emprunte à la sociologie urbaine, à celle des organisations, à la psychologie sociale, et étudie les interactions des différents acteurs et la façon dont celles-ci construisent le « climat » d’un établissement et son rapport avec son environnement, permettant de fonder des actions collectives destinées à améliorer la vie commune ou l’efficacité scolaire9.
- 10 Robert Ballion: Les consommateurs d’école, Paris, Stock, 1982; Stephen Ball et Agnès Van Zanten: « (...)
- 11 Jean-Pierre Briand, Jean Michel Chapoulie: Les collèges du peuple. L’enseignement primaire supérieu (...)
8Il faut ajouter à ces approches internes celles qui se penchent sur la concurrence entre différents établissements et sur les choix et stratégies des familles, à partir d’une analyse en termes d’économie de marché, d’une démarche ethnométhodologique, voire d’un mariage de ces deux types d’approches10. Enfin, on soulignera l’importance de la contribution spécifique des sociologues Jean-Pierre Briand et Jean-Michel Chapoulie, puisque leurs travaux historiques sur les enseignements postélémentaires et leur interprétation d’ensemble de l’institution scolaire et de la scolarisation ont eu une influence décisive sur l’évolution de l’historiographie. En faisant de l’offre effective de places dans les établissements le point central de leur lecture de l’histoire de la scolarisation, ils ont largement contribué à modifier le statut de l’établissement comme objet historique et à donner un sens nouveau aux études locales11. On a pu considérer que cette révision historiographique ne s’appliquait qu’à un secteur particulier, voire marginal, de l’offre éducative, celui des enseignements postélémentaires populaires dont le développement, au xixe siècle et au début du xxe, met en jeu de nombreuses initiatives locales. Nous voudrions démontrer au contraire qu’elle concerne au premier chef l’enseignement secondaire, qui est pourtant passé le premier sous la tutelle directe de l’État. Cela suppose de clarifier au préalable le statut paradoxal des monographies d’établissements secondaires.
2. La crise de la monographie
- 12 Philippe Savoie: « L’État et le local dans l’histoire éducative française », Éducation et Sociétés, (...)
9En effet, l’établissement scolaire a occupé en France, jusqu’à une période récente, une place paradoxale dans l’histoire de l’éducation, à la fois objet d’étude le plus courant et grand absent de la réflexion sur l’école12. La monographie d’établissement scolaire, et tout particulièrement d’établissement secondaire, a été un genre dominant avant de subir un fort déclin, quantitatif et qualitatif.
- 13 Marie-Madeleine Compère, Dominique Julia: Les collèges français, 16e-18e siècles,Répertoire 1: Fran (...)
- 14 Circulaire du 19 mars 1908, Bulletin administratif du ministère de l’Instruction publique, t. 83, p (...)
10Il existe beaucoup de monographies historiques portant sur les collèges d’humanités de l’Ancien Régime, mais ce genre a été particulièrement en vogue dans les dernières décennies du xixe siècle. Par exemple, sur les 83 collèges de plein exercice de la moitié sud de la France recensés dans Les collèges français, 79 ont fait l’objet d’au moins une monographie. Pour 44 d’entre eux (53 %), la monographie de référence a été réalisée au cours de la période 1880-191413. Pourquoi cette faveur particulière ? Plusieurs explications peuvent être avancées. D’abord, une conjoncture de politique générale dans laquelle les catholiques, et les conservateurs en général, entendent montrer combien les lycées contemporains ont raison d’être fidèles à la tradition humaniste. Les républicains, et notamment les partisans de l’enseignement scientifique étudient volontiers, pour leur part, les écoles centrales, établissements créés sous la période thermidorienne de la Convention. Les monographies de lycées et de collèges, nombreuses également, sont encouragées par les autorités nationales. Gaston Doumergue, ministre de l’Instruction publique, souligne en 1908 l’intérêt de ces monographies « tant pour l’histoire des établissements eux-mêmes que pour l’histoire générale de l’enseignement secondaire ». Il demande aux recteurs de prêter leur concours à la direction de l’enseignement secondaire pour la constitution d’un catalogue et d’une collection complète de ces monographies, et de « susciter et guider les bonnes volontés » parmi le personnel des lycées et collèges pour qu’une publication soit entreprise partout où il n’en existe pas encore14. La conjoncture scientifique, elle aussi, est favorable. La monographie s’impose alors dans une perspective d’histoire positiviste pour laquelle l’édifice de la connaissance historique se construit à partir de tout élément bibliographique, du moment que celui-ci s’appuie sur des documents authentiques : c’est le rapport au document qui crée la vérité historique. Aussi, indépendamment des engagements idéologiques qui les sous-tendent, ces monographies présentent de grandes qualités d’information : les documents sont en général dûment répertoriés dans des fonds d’archives, et souvent reproduits correctement.
- 15 P. Caspard: « Histoire et historiens de l’éducation en France », Les dossiers de l’éducation, 1988, (...)
- 16 On a relevé systématiquement, dans la catégorie pertinente de la bibliographie (rubrique 56, intitu (...)
11Cette ère bénie de la monographie se clôt avec la Première Guerre mondiale. On observe alors une double raréfaction. Raréfaction du genre en soi, puisque, dans le recensement déjà cité, seuls 21 collèges font l’objet d’une monographie de référence postérieure à 1914. Raréfaction relative ensuite : Pierre Caspard constatait en 198815 que le genre monographique, qui atteignait 57, 5 % de la production générale en histoire de l’éducation entre 1953 et 1964, passait à 38,3 % des items produits entre 1971 et 1985. En partant d’une définition tout à fait extensive de la monographie historique d’établissement, on recense 286 ouvrages de ce type (dont 6 thèses et 4 mémoires de maîtrise) dans la bibliographie annuelle publiée par Histoire de l’éducation entre 1977 et 199716. La crise de la monographie se manifeste d’abord par un affaiblissement au plan qualitatif (sans jugement de valeur sur la qualité des textes) : plus du tiers de ces monographies comporte moins de 12 pages et 21 % seulement plus de 100 pages, la moitié de ces dernières dépassant 200 pages. Les formes éditoriales sous lesquelles ces monographies ont été publiées constituent un second indice de cette crise. Des deux grandes catégories de publication qui émergent, la première est la revue d’histoire locale (34,5 %), qui constitue une forme éditoriale traditionnelle et bien adaptée à l’objet ; la seconde, l’édition non commerciale (29 %, soit 77 brochures diverses, éditées par l’établissement, par une association ou à compte d’auteur) est révélatrice des conditions de la production monographique d’aujourd’hui. Les « vrais ouvrages », accessibles sur le marché du livre, sont au nombre de 30 seulement (un peu plus de 10 %). La monographie n’apparaît donc plus comme un objet d’étude « sérieux », constat confirmé par le fait que trois de ces ouvrages seulement ont fait l’objet d’un compte rendu dans une autre revue qu’Histoire de l’éducation, qui en a pour sa part publié vingt-quatre (y compris deux thèses) : un nombre encore faible, puisque la revue se donne pour tâche de couvrir l’ensemble du champ.
12Dans la monographie, la volonté d’affirmer la personnalité de l’établissement aboutit généralement à célébrer les grandes figures du corps enseignant, les proviseurs ou les principaux les plus marquants, les anciens élèves sortis du rang, et à rechercher le reflet des événements locaux ou nationaux. À l’époque du positivisme dominant, il n’y a guère de conflit entre cette pratique et celle des historiens de profession. Les auteurs de monographies scolaires, membres du clergé ou des professions libérales, enseignants ou chefs d’établissement, partagent avec les universitaires une culture largement commune et il n’y a pas de différence fondamentale entre les discours historiques que tiennent les uns et les autres. Histoire et commémoration se distinguent alors bien dans les esprits. La célébration du centenaire des lycées, en 1902, n’a pas forcément donné lieu à une monographie historique. Au lycée Charlemagne, par exemple, on a représenté une pièce de théâtre et lu des textes parodiques au cours d’un spectacle de divertissement ; à Toulouse, la célébration a consisté dans la visite guidée des bâtiments.
13Par la suite, le genre monographique a été discrédité, parmi les historiens de métier, par une image trop marquée par le « patriotisme d’établissement » et la recherche de l’anecdote, à l’époque où dominaient les analyses critiques du système scolaire, et où se développait, par ailleurs, une histoire de l’éducation plus conforme aux nouvelles exigences de la discipline historique. De plus, l’éclatement de la conscience historique commune qui existait il y a un siècle a conduit à brouiller les repères et à confondre, sous le nom d’histoire, tout discours portant sur le passé. Les monographies récentes offrent en fait un témoignage de reconnaissance envers un établissement qu’on chérit pour une raison ou pour une autre. Elles s’apparentent à l’œuvre pie ou à la fête de famille ; elles se présentent comme un album d’images, au sens propre du terme parfois (5 recueils de photos de classe, 3 catalogues d’exposition) ; et, au sens figuré, comme un ensemble d’anecdotes et souvenirs (4 recueils exclusifs de souvenirs) ; quand on a recours aux documents, ils sont livrés sans analyse ni commentaire. L’occasion est souvent fournie par un anniversaire : c’est le cas de 42 des 286 items recensés.
- 17 Les lieux de mémoire, 13 volumes en trois séries (la République, la Nation, la France). Voir en par (...)
14La monographie d’établissement représente ainsi l’un des lieux les plus propices pour expérimenter le rapport entre mémoire et histoire. Il serait vain et fallacieux de les opposer entre elles. Au contraire, à l’origine de l’histoire, il est nécessaire qu’un groupe humain (qu’il s’agisse d’une nation, d’une corporation professionnelle ou d’une famille) se construise une identité, qu’on ne peut forger sans rapport à la mémoire. Pensons à l’entreprise de Pierre Nora17. Les contributeurs, choisis parmi les meilleurs historiens, y tiennent un discours parfaitement conforme à la déontologie historique, c’est à dire critique et distant, sur des objets symboliques de la mémoire collective. Ce n’est donc pas la liaison entre mémoire et histoire qui voue généralement à l’échec l’entreprise de la monographie d’établissement, c’est l’incapacité pour les auteurs d’en faire un objet historique digne de ce nom.
3. Dépasser la monographie
- 18 Notamment J.-P. Briand, J.-M. Chapoulie, op. cit. Le Service d’histoire de l’éducation s’est lancé (...)
15Il peut sembler paradoxal que, depuis que des historiens ont entrepris d’intégrer l’échelle de l’établissement à l’histoire de l’enseignement, la monographie d’établissement attire moins de vocations. Comme beaucoup de paradoxes, celui-ci signale que le problème est mal posé. Il ne semble pas, en effet, que la multiplication des études de cas fasse avancer beaucoup la compréhension de l’enseignement secondaire si on utilise à chaque fois une grille de lecture qui privilégie le singulier, le remarquable, le pittoresque, au détriment de ce qui est banal, dans la moyenne et conforme à la réglementation. On peut certes se demander à quoi sert d’écrire des monographies si c’est pour n’y montrer que ce qu’on trouverait ailleurs. Le déclin du genre montre sans doute que la réponse n’est pas donnée d’avance. On observera d’ailleurs que l’ouvrage collectif que nous présentons ici ne propose qu’une seule étude de caractère monographique, et que celle-ci replace le cas du collège de la Trinité à la fois dans son contexte lyonnais et dans le cadre de son appartenance à un ordre enseignant international, celui des jésuites. Les autres contributions posent des problèmes généraux et enrôlent dans l’analyse des séries plus ou moins importantes d’établissements, comme le font la plupart des travaux qui ont réhabilité l’établissement scolaire18. Nous n’en tirons pas la conclusion que, pour aborder le rôle de l’établissement dans l’histoire de l’enseignement, il faudrait commencer par tourner le dos aux études de cas, bien au contraire. Nous dirons plutôt que les études de cas ne prennent leur sens que si elles adoptent une problématique à la fois applicable à l’exemple étudié et généralisable à d’autres, que si elles sont conçues dans un esprit comparatiste et articulées avec une information rigoureuse quant au contexte historique et au cadre institutionnel et réglementaire.
- 19 Voir la note d’actualité scientifique de F. Huguet: « Les pensions et institutions privées secondai (...)
- 20 Le Lycée Henri-IV, Paris, Thionville, Gérard Klopp éditeur, 1996, qui consacre une de ses quatre pa (...)
- 21 L’ouvrage de Jean-Pierre Levert: Un lycée dans la tourmente. Jean-Baptiste Say 1934-1944, Paris, Ca (...)
- 22 Lycée Louis-le-Grand, « depuis 1563 ».
16Il faut aussi, nous semble-t-il, aborder l’établissement secondaire en s’efforçant de se défaire de l’idée qu’il constituerait une donnée évidente et quasi-éternelle. Le concept d’établissement scolaire est certes immédiatement accessible au sens commun. Chacun sait ce qu’est une école, celle qu’on a fréquenté, celle où l’on conduit ses enfants, celle où l’on enseigne, le cas échéant. Pourtant, quand il s’agit de déterminer ce qui fait qu’un établissement se distingue des autres, on se surprend à mettre en œuvre une catégorisation pour le moins hétérogène. Dans l’histoire des pensions et institutions privées, cette difficulté se présente à chaque pas. La même entité administrative et pédagogique peut se rencontrer sous le nom de son propriétaire – et en changer à l’occasion d’une succession – comme sous celui de la rue où il se trouve, ou sous un patronyme qu’on lui a choisi19. Une monographie peut annexer à l’histoire d’un établissement ouvert au début du xixe siècle l’histoire des lieux où il est né20, désigner par son statut moderne un établissement qui relevait autrefois d’une autre catégorie21. Un des plus prestigieux lycées français peut, sur sa brochure officielle, afficher fièrement la date de création du collège jésuite qui l’a précédé dans les lieux plusieurs siècles auparavant22. Il y a dans ces petits glissements de quoi susciter la réflexion sur ce qui constitue un établissement.
- 23 Marie-Madeleine Compère: Du collège au lycée (1500-1850), Paris, Gallimard-Julliard, 1985. Voir l’a (...)
- 24 On parle bien ici du modèle des écoles centrales et non de leur réalité, qui fut souvent assez diff (...)
17L’apparition de l’établissement scolaire, au sens où nous comprenons aujourd’hui cette notion, est, quant à elle, tout à fait situable dans le temps et directement liée à la naissance de ce que nous appelons l’enseignement secondaire. En effet, en regroupant sous un même toit boursiers, internes payants et externes, en leur délivrant un enseignement échelonné par niveaux, en plaçant à leur tête un principal, les collèges d’humanités du xvie siècle parisien ont inventé cette structure complexe à l’intérieur de laquelle s’organisent non seulement l’enseignement mais aussi, pour partie, l’éducation de la jeunesse23. C’est le modèle qui a fini par coloniser la plupart des formes scolaires contemporaines. On range, faute d’une typologie plus précise, les écoles centrales de la Convention dans la catégorie des établissements. Mais si l’on se place d’un point de vue fonctionnel, on ne devrait parler d’établissement scolaire que là où l’on trouve des enseignements organisés en niveaux hiérarchisés dont le franchissement successif trace un (ou des) cursus à l’intérieur d’une filière déterminée, et où une administration commune prend en charge, outre l’organisation de l’enseignement proprement dit, celle de fonctions complémentaires telles que les enseignements et activités annexes et optionnels, l’encadrement du travail personnel, la surveillance des élèves, la distribution de repas, l’internat, la fourniture de matériel et d’instruments pédagogiques, etc. Ce modèle, celui des collèges d’humanités et des lycées, s’oppose radicalement à celui des écoles centrales qui sont une juxtaposition de chaires, sans administration commune, sans cursus imposé, sans encadrement pédagogique24. Ces deux modèles ne représentent d’ailleurs pas deux formes d’organisation scolaire exclusives l’une de l’autre. Les collèges d’Ancien Régime comme l’enseignement secondaire au xixe siècle font dépendre le statut des professeurs de la chaire qu’ils occupent, opposant une logique de la carrière, qui suppose souvent la mobilité, aux intérêts de l’établissement. La tension entre ces deux dimensions de l’institution scolaire, celle de l’établissement et celle de la chaire, est caractéristique de l’enseignement secondaire. Elle recoupe l’écartèlement de la pédagogie secondaire entre un modèle reposant largement sur la répétition et l’exercice – comme celui qui associe étroitement, dans les collèges humanistes et les lycées du xixe siècle, la classe du professeur et le travail fait sous la direction des répétiteurs – et un autre modèle fondé sur la notion de transmission des connaissances, qui est celui du cours moderne, hérité lui-même de la leçon universitaire médiévale, et qui reste caractéristique de l’enseignement supérieur.
18Dépasser la monographie, c’est donc dépasser l’évidence de la notion trop familière d’établissement, prendre conscience de l’historicité de cette forme d’organisation, et donc faire de l’étude de cas l’occasion, non pas d’une contemplation plus ou moins complaisante, mais d’un questionnement historique. Parmi les grandes questions relatives à l’établissement scolaire d’enseignement secondaire, quelques-unes ont un caractère fondamental et existentiel : celle des relations de l’établissement avec son environnement social et physique ; celle de son identité, c’est-à-dire de son unité quand il est constitué de parties hétérogènes, et de son autonomie, de sa personnalité propre s’il dépend d’une autorité supérieure et appartient à un réseau d’où il tire appui, subsides, équipement et moyens humains ; celle de ses relations de concurrence ou d’interdépendance avec d’autres établissements. Ces trois dimensions de l’existence des établissements sont interrogées par les contributions réunies ici. Nous en ferons donc la clé de notre mise en perspective de ces contributions.
- 25 En mai 1968, on évoque encore le lycée-caserne pour en dénoncer la discipline.
- 26 Voir l’article de Marc Le Cœur: « Les lycées dans la ville: l’exemple parisien (1802-1914) »,infra, (...)
19Le thème de la fermeture ou de l’ouverture est un classique du discours courant sur les établissements. Un lieu commun consiste à présenter le collège jésuite, le lycée napoléonien ou le lycée de jeunes filles d’autrefois comme refermés sur eux-mêmes, tels des couvents ou des casernes auxquels on les assimile volontiers25. À l’inverse, depuis quelques décennies, l’idée qu’il faut ouvrir les établissements est devenue dominante, même si le souci de l’ordre ou du sérieux des études la tempèrent parfois : ouvrir sur l’extérieur, ouvrir sur la vie. On ne peut mieux dire que par cette antinomie le parallèle entre clôture physique et retrait du monde. C’est l’évolution de ce couple que montre Marc Le Cœur à travers l’étude des lycées parisiens et de leur architecture. Soucieux d’abord d’afficher leur cloisonnement, ceux-ci subissent leur environnement urbain comme une source de contraintes avant d’adopter progressivement, à la fin du xixe siècle, et parallèlement à la transformation de la pédagogie et à l’adoucissement de la discipline, une attitude moins défensive qu’illustre éloquemment le nouveau hall d’entrée de Louis-le-Grand, ouvert sur la rue Saint-Jacques et baigné de lumière26.
- 27 Voir l’article de Stéphane Van Damme: « Sociabilités et cultures urbaines. Le rôle du collège de la (...)
20Mais, pour indéniable que soit cette évolution séculaire des lycées, perceptible dans les discours et règlements officiels comme à travers l’architecture, du repli sur soi vers une certaine ouverture, il serait imprudent d’en inférer que les anciens collèges, dont les lycées ont repris en grande partie l’héritage – et, dans cet héritage, précisément une certaine conception de l’établissement scolaire, tout à fait opposée au modèle ouvert et quasiment informel des écoles centrales –, vivaient pour leur part isolés du monde. L’article de Stéphane Van Damme montre au contraire comment le collège de la Trinité de Lyon, un grand collège jésuite, a pu jouer aux xviie et xviiie siècles le rôle d’un pôle scientifique et culturel grâce à son observatoire, à ses collections et à sa riche bibliothèque. Si ces équipements sont peu accessibles aux visiteurs étrangers à l’ordre, ils font néanmoins du collège jésuite, aux yeux de la société lyonnaise comme à ceux des voyageurs, un lieu de référence pour ce qui concerne les pratiques savantes27.
- 28 Voir l’article de Ph. Savoie, id.
21Comme le montrent les deux contributions qu’on vient d’évoquer, le rôle des collèges ou des lycées va bien au delà de l’enseignement proprement dit. Par leur distribution entre les différents quartiers de la ville, leur architecture, leurs équipements, leur renommée, ils contribuent de diverses manières, matérielles ou symboliques, à la dynamique urbaine. Leur rayonnement ne se mesure donc pas seulement au nombre de leurs élèves ou à l’étendue de leur aire de recrutement, et il ne dépend pas directement de leur attitude d’ouverture à l’égard de l’extérieur. D’ailleurs, la clôture ostensible des lycées de la première moitié du xixe siècle a pour premier objectif de gagner la confiance des familles ; loin d’être une démonstration d’hostilité ou de défiance à l’égard de la société locale, elle entre au contraire dans une stratégie de séduction qui exige de maîtriser les contacts entre les personnels de l’établissement et la population : on préfère la solennité d’une distribution des prix à la fraternité du débit de boisson, la bonne renommée acquise au prix d’une longue immersion dans le milieu local à la méfiance qui s’attache à ceux qui ne font que passer. Mais cette volonté de réserve de bon aloi et d’enracinement local rencontre ses limites quand les personnels doivent se loger en ville et que la logique des carrières leur impose de passer d’un établissement à l’autre28.
- 29 Voir l’article de M.-M. Compère et B. Noguès, id.
- 30 Voir l’article de Ph. Savoie, id.
22Dans ces conditions, il est bien difficile de donner une unité et une âme aux établissements. Le problème de l’unité est le premier que les collèges d’humanités aient eu à résoudre pour vivre. Leur genèse, au xvie siècle dans le cadre de l’Université de Paris, consiste en effet dans l’adjonction d’un pensionnat payant à la communauté originelle des boursiers. Pour réussir dans sa tâche, le principal des collèges parisiens d’Ancien Régime doit veiller aux intérêts de cette communauté de base tout en assurant la prospérité du pensionnat et le succès de l’enseignement. Pour s’imposer à tous, boursiers, pensionnaires, élèves externes et régents, il doit gagner la confiance de chacun tout en faisant preuve d’autorité29. Les qualités que réclame cette tâche ne diffèrent guère de celles que les témoins entendus pour l’enquête parlementaire de 1898-1899 souhaiteraient rencontrer chez les proviseurs de lycées. Mais, pour rendre à ces derniers une partie des marges d’initiative dévorées par l’engagement croissant de l’État, et développer ainsi la personnalité de l’établissement, on a recours alors à une séparation administrative et financière de l’internat et de l’externat, tout en leur conservant la tutelle commune du proviseur30.
- 31 Voir l’article de Bruno Belhoste: « La préparation aux grandes écoles scientifiques au xixe siècle: (...)
23Si on s’est inquiété très tôt de l’unité des établissements, de l’existence d’une personnalité collective, de la capacité des principaux ou des proviseurs à établir une autorité sereine, c’est en grande partie parce qu’on a reconnu le rôle de l’établissement dans la qualité des études. À cet égard, la création des lycées sanctionne l’expérience des écoles centrales qui avaient fait de la chaire professorale le cœur de l’institution. Le cas de la préparation aux grandes écoles de l’État est particulièrement éclairant. Assurée déjà dans beaucoup d’écoles centrales, cette préparation devient, sans que cela fasse l’objet d’une réglementation spécifique, une des principales activités des lycées. Mais la préparation est affaire de répétition et d’exercice autant que de cours, et c’est sur ce terrain de l’encadrement pédagogique et de ce qu’on appellerait aujourd’hui l’entraînement des élèves que les pensions et institutions privées, à Paris en particulier, réussissent mieux que les internats des lycées (aux classes desquels elles doivent envoyer leurs pensionnaires jusqu’en 1850). Un véritable système, fait d’intérêts réciproques, lie les chefs d’institutions aux professeurs des classes préparatoires des lycées, dont les premiers peuvent faire le succès ou l’échec. Dans la deuxième moitié du xixe siècle, pour répondre à la concurrence privée libérée par la loi Falloux, certains établissements publics se dotent à leur tour, et avec succès, d’écoles préparatoires quasiment autonomes offrant des conditions de travail plus confortables et plus efficaces31.
24Si la qualité et le renom des professeurs font une partie du succès des établissements, on voit que la question de l’encadrement pédagogique, de la discipline, des conditions de vie et de travail joue un rôle déterminant. C’est cette partie périphérique de l’offre éducative, tout ce qui entoure le cours proprement dit, qui était en cause en 1898 avec la crise de l’internat dans les établissements secondaires publics, et qui est encore aujourd’hui régulièrement en question dans les difficultés récurrentes des lycées et des collèges.
- 32 André Chervel: « De quand date l’enseignement secondaire? », in C. Blanche-Benveniste, A. Chervel, (...)
25Le rôle de l’établissement scolaire ne se résume pas, nous pensons l’avoir montré, à une commodité logistique. Son organisation, la logique de son développement, son gouvernement, son existence même ont un effet de premier ordre sur l’institution scolaire tout entière. Il a ainsi joué un rôle historique fondamental dans la structuration de l’enseignement secondaire, dont l’avènement en tant que forme scolaire n’est que la conséquence lointaine – il faut attendre les années 1830 pour que l’expression elle-même d’enseignement secondaire entre dans la pratique administrative32 – de la réussite des lycées créés en 1802 et devenus, non sans difficultés et adaptations, les établissements modèles que leurs créateurs souhaitaient en faire. Le lycée lui-même est, pour l’essentiel, le descendant des quelques collèges de l’Université de Paris à l’intérieur desquels s’est inventé, non seulement le modèle du collège d’humanités, mais encore celui de l’établissement scolaire lui-même. L’histoire de l’enseignement secondaire et celle des établissements sont donc étroitement liées. Cela nous semble constituer le meilleur argument en faveur d’études historiques centrées sur les établissements secondaires.
Notes
1 Nous ne proposons ici qu’une lecture très sommaire de l’évolution des problématiques dominantes. Pour une présentation synthétique et des pistes bibliographiques, voir Marie Duru-Bellat et Agnès Henriot-Van-Zanten: Sociologie de l’école, Paris, Armand Colin, 1998 (2e édition); et Olivier Cousin: L’efficacité des collèges. Sociologie de l’effet établissement, Paris, PUF, 1999.
2 En dehors des approches de l’école inspirées du marxisme, comme celle de Christian Baudelot et Roger Establet: L’École capitaliste en France, Paris, Maspero, 1971, on pense naturellement aux analyses de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron: Les héritiers, Paris, Éditions de Minuit, 1964, et La reproduction, Paris, Éditions de Minuit, 1970, et à l’influence de Michel Foucault: Surveiller et punir, Paris, Gallimard, 1975, sur les historiens de l’éducation.
3 On se contentera de mentionner un classique: Raymond Boudon: L’inégalité des chances, Paris, Armand Colin, 1973.
4 Voir l’article de Philippe Savoie: « Autonomie et personnalité des lycées: la réforme de 1902 et ses origines », infra,pp. 169-204.
5 Circulaire du 23 février 1977, mentionnée dans Jean-Louis Boursin: L’administration scolaire, Paris, PUF, 1981, p. 97.
6 Rapport de la Commission d’études sur la fonction enseignante dans le second degré(présidée par Louis Joxe), Paris, La Documentation française, 1972; Les Lycées et leurs études au seuil du xxie siècle. Rapport du groupe de travail national sur les seconds cycles, présidé par Antoine Prost, Paris, Ministère de l’Éducation nationale, 1983; Louis Legrand: Pour un collège démocratique, Paris, La Documentation française, 1983.
7 Voir l’analyse de Jean-Pierre Obin: « Le projet d‘établissement en France: mythe et réalité », Politiques d’éducation et de formation, 2001-1: Le projet d’établissement: mythe ou réalité, pp. 9-27.
8 L’Institut de recherche sur l’économie de l’éducation (IREDU) s’est fait une spécialité de ce type d’approches. Voir la présentation d’une recherche de cet institut dans Marie Duru et Alain Mingat: « Le déroulement de la scolarité au collège. Le contexte “fait des différences” », Revue française de sociologie, 29, 1988, pp. 667-690. L’ancienne Direction de l’évaluation et de la prospective du ministère de l’Éducation nationale s’est livrée de son côté à des études statistiques d’inspiration voisine, dans une perspective d’évaluation.
9 Jean-Louis Derouet: Désaccords et arrangement dans les collèges, 1981-1986, Paris, INRP, 1988.
10 Robert Ballion: Les consommateurs d’école, Paris, Stock, 1982; Stephen Ball et Agnès Van Zanten: « Logiques de marché et éthiques contextualisées dans les systèmes scolaires français et anglais », Éducations et Sociétés, n° 1: L’éducation, l’État et le local, 1998, pp. 47-71.
11 Jean-Pierre Briand, Jean Michel Chapoulie: Les collèges du peuple. L’enseignement primaire supérieur et la scolarisation prolongée sous la Troisième République, Paris, INRP-CNRS-ENS Fontenay-Saint-Cloud, 1992; « L’institution scolaire et la scolarisation: une perspective d’ensemble », Revue française de sociologie, 1993, 34 (1), pp. 3-42; « L’institution scolaire, les familles, les collectivités locales, la politique d’État. Le développement de la scolarisation sous la iiie République », in Gérard Bodé, Philippe Savoie (dir.): L’offre locale d’enseignement. Les formations techniques et intermédiaires. xixe-xxesiècles, numéro spécial d’Histoire de l’éducation, n° 66, mai 1995, pp. 15-46.
12 Philippe Savoie: « L’État et le local dans l’histoire éducative française », Éducation et Sociétés, n° 1, 1998, pp. 123-139; G. Bodé, Ph. Savoie: « L’approche locale de l’histoire des enseignements techniques et intermédiaires: nécessité et limites », in G. Bodé, Ph. Savoie (dir.), op. cit., pp. 5-13.
13 Marie-Madeleine Compère, Dominique Julia: Les collèges français, 16e-18e siècles,Répertoire 1: France du Midi, Paris, INRP-CNRS, 1984. Pour établir ce recensement, on a relevé les ouvrages signalés comme monographiques, en excluant les ouvrages de moins de 80 pages et en ne retenant qu’une monographie par collège pour établir la statistique à partir des établissements. Quand il y en avait plusieurs, c’est la monographie qui comptait le plus de pages qui a été retenue. Ces monographies de référence se répartissent comme suit: sans monographie: 4 (5 %); avant 1880: 14 (17 %); 1880-1914: 44 (53%) ; 1915-1939 : 8 (9,6%) ; 1940-1959 5 (5,8%) ; depuis 1960 : 8 (9,6%).
14 Circulaire du 19 mars 1908, Bulletin administratif du ministère de l’Instruction publique, t. 83, pp. 373-374.
15 P. Caspard: « Histoire et historiens de l’éducation en France », Les dossiers de l’éducation, 1988, n° 14-15, pp. 9-29.
16 On a relevé systématiquement, dans la catégorie pertinente de la bibliographie (rubrique 56, intitulée « Histoire des institutions scolaires, enseignement général ») les titres où un établissement secondaire est précisément désigné ou identifiable d’après le titre, et, par extension, les études sur plusieurs établissements quand ils sont liés à une même ville. À la différence du premier recensement on a retenu tous les items à condition qu’ils traitent d’un établissement et qu’ils comportent au moins 5 pages de suite.
17 Les lieux de mémoire, 13 volumes en trois séries (la République, la Nation, la France). Voir en particulier l’introduction: « Entre mémoire et histoire. La problématique des lieux », Les lieux de mémoire, I, 1984, pp. XVII-XLII.
18 Notamment J.-P. Briand, J.-M. Chapoulie, op. cit. Le Service d’histoire de l’éducation s’est lancé depuis longtemps dans la réalisation de répertoires systématiques d’établissements. Deux intéressent l’enseignement secondaire, celui des collèges français d’Ancien Régime et celui des pensions et institutions privées (18e-20e siècles). Sur les collèges, voir Marie-Madeleine Compère, Dominique Julia: « Les collèges sous l’Ancien Régime. Présentation d’un instrument de travail », Histoire de l’éducation, n° 13, déc. 1981, pp. 1-27; Les collèges français, op. cit. Répertoires 1: France du Midi, 1984, et 2: France du Nord et de l’Ouest, 1988, parus; répertoire 3: Paris, sous presse. Sur les pensions et institutions, voir la note d’actualité scientifique de Françoise Huguet, infra,pp. 205-221. On ajoutera l’atlas-répertoire des établissements d’enseignement technique (1789-1945), présenté par G. Bodé, in G. Bodé, Ph. Savoie, op. cit., pp. 201-207. Au titre des pionniers du répertoire d’établissements, on peut mentionner Les établissements des jésuites en France depuis quatre siècles. Répertoire topo-bibliographique (…) sous la direction de Pierre Delattre S. J., Enghien-Wetteren (Belgique), 1947-1957, 5 vol., qui recense les établissements tenus en France par les jésuites depuis l’origine. On notera que cette publication a pour origine le souhait de « commémorer par un ouvrage d’utilité publique le quatrième centenaire de la fondation de l’ordre », première phrase de l’introduction du père Delattre.
19 Voir la note d’actualité scientifique de F. Huguet: « Les pensions et institutions privées secondaires dans la région parisienne (1700-1940): présentation d’une recherche », infra,pp. 205-221.
20 Le Lycée Henri-IV, Paris, Thionville, Gérard Klopp éditeur, 1996, qui consacre une de ses quatre parties à l’abbaye Sainte-Geneviève, « un lieu chargé d’histoire ».
21 L’ouvrage de Jean-Pierre Levert: Un lycée dans la tourmente. Jean-Baptiste Say 1934-1944, Paris, Calmann-Lévy, 1994, est consacré à un établissement qui est, à l’époque, une école primaire supérieure puis un collège moderne.
22 Lycée Louis-le-Grand, « depuis 1563 ».
23 Marie-Madeleine Compère: Du collège au lycée (1500-1850), Paris, Gallimard-Julliard, 1985. Voir l’article de Marie-Madeleine Compère et Boris Noguès: « La direction d’établissement dans les collèges de l’Université de Paris sous l’Ancien Régime », infra,pp. 21-78.
24 On parle bien ici du modèle des écoles centrales et non de leur réalité, qui fut souvent assez différente.
25 En mai 1968, on évoque encore le lycée-caserne pour en dénoncer la discipline.
26 Voir l’article de Marc Le Cœur: « Les lycées dans la ville: l’exemple parisien (1802-1914) »,infra, pp. 131-167.
27 Voir l’article de Stéphane Van Damme: « Sociabilités et cultures urbaines. Le rôle du collège de la Trinité à Lyon (1640-1730) », infra,pp. 79-100.
28 Voir l’article de Ph. Savoie, id.
29 Voir l’article de M.-M. Compère et B. Noguès, id.
30 Voir l’article de Ph. Savoie, id.
31 Voir l’article de Bruno Belhoste: « La préparation aux grandes écoles scientifiques au xixe siècle: établissements publics et institutions privées », infra,pp. 101-130.
32 André Chervel: « De quand date l’enseignement secondaire? », in C. Blanche-Benveniste, A. Chervel, M. Gross (dir.) : Grammaire et histoire de la grammaire. Hommage à la mémoire de Jean Stéfanini, Aix-en-Provence, Publications-Diffusion de l’Université de Provence, 1988, pp. 93-97 (repris dans A. Chervel: La culture scolaire. Une approche historique, Paris, Belin, 1998, pp. 149-159).
Haut de pagePour citer cet article
Référence papier
Marie-Madeleine Compère et Philippe Savoie, « L’établissement secondaire et l’histoire de l’éducation », Histoire de l’éducation, 90 | 2001, 5-20.
Référence électronique
Marie-Madeleine Compère et Philippe Savoie, « L’établissement secondaire et l’histoire de l’éducation », Histoire de l’éducation [En ligne], 90 | 2001, mis en ligne le 09 janvier 2009, consulté le 07 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/histoire-education/828 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/histoire-education.828
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