MOMBERT (Monique). – Jeunesse et livre en Zone française d’occupation 1945-1949. Sous le signe de la rééducation
MOMBERT (Monique). – Jeunesse et livre en Zone française d’occupation 1945-1949. Sous le signe de la rééducation.– Strasbourg : Presses universitaires de Strasbourg, 1995. – 232 p. (Les Mondes germaniques)
Texte intégral
1En plaçant son ouvrage « sous le signe de la rééducation », l’auteur montre bien que la politique de jeunesse et du livre pratiquée de 1945 à 1949 en Zone française d’occupation (ZFO) en Allemagne visait en premier lieu à rééduquer la jeunesse allemande, cette politique de rééducation n’étant elle-même qu’un aspect d’une politique plus vaste de dénazification, de démilitarisation et finalement de démocratisation, conformément à trois des quatre grands « D » définis à Potsdam par les vainqueurs de l’Allemagne nazie. Cet ouvrage est la version remaniée et élargie de la thèse soutenue par l’auteur en 1985, qui traitait essentiellement de la politique menée, dans ces domaines, par la France dans le Land de Bade. S’il est vrai que chaque Land a pu connaître des évolutions différentes au sein de la ZFO, en particulier au début de l’occupation, quand les directives centrales se faisaient attendre et que les « officiers culturels » pouvaient développer des dynamiques personnelles, on retrouve bien d’un Land à l’autre les mêmes grandes lignes de force. On passe dans ce livre du niveau du Land au niveau de la zone, ce qui permet de mieux faire apparaître le rôle de la Direction de l’Éducation publique et de son chef, Raymond Schmittlein, un grand « féodal » qui a marqué la politique culturelle de la France en Allemagne de son sceau, avec tout ce qu’il pouvait avoir de brillant, d’autoritaire et d’excessif à la fois. Convaincu que le IIIe Reich avait profondément marqué la très grande majorité de la population allemande, R. Schmittlein a conduit la France à adopter le point de vue selon lequel « la rééducation ne [pouvait] être laissée aux Allemands eux-mêmes », se distinguant en cela du modèle américain de rééducation, et à miser surtout sur l’éducation des jeunes. Il s’agissait, en conséquence, de les former bien évidemment par l’école, mais aussi par une politique plus particulièrement ciblée d’activités de jeunesse, de rencontres internationales, de sports et par une politique éditoriale spécifique.
2On retrouve dans tous ces domaines, les caractéristiques propres à l’ensemble de la politique culturelle française en Allemagne après 1945 : contrôle et incitation, le contrôle allant des interventions directes par ordre supérieur de l’occupant à la censure préventive dans la presse, l’incitation apparaissant cependant nécessaire puisque l’objectif était de permettre aux jeunes Allemands de « se libérer du carcan de la pensée dirigée » pour apprendre à réfléchir par eux-mêmes et à agir en toute autonomie, du moins dans la mesure où le régime de l’occupation le permettait. Le grand mérite du livre, fort bien écrit, de M. Mombert est de faire apparaître motivations et ressorts de la politique française de rééducation à partir d’exemples précis. Ses analyses des revues Der Fährmann et Die Zukunft, éditées pour participer à la rééducation de la jeunesse allemande, sont particulièrement éclairantes ainsi que son analyse de la politique du livre, un domaine où action culturelle française et initiatives allemandes se sont plus rapidement mieux conjuguées que dans d’autres domaines pour aboutir à ce qui mérite d’être appelée une réelle coopération, annonciatrice des évolutions qui conduiront de l’occupation à la réconciliation et à la coopération politique entre la France et l’Allemagne après 1949.
Pour citer cet article
Référence électronique
Jérôme Vaillant, « MOMBERT (Monique). – Jeunesse et livre en Zone française d’occupation 1945-1949. Sous le signe de la rééducation », Histoire de l’éducation [En ligne], 85 | 2000, mis en ligne le 12 octobre 2008, consulté le 07 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/histoire-education/435 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/histoire-education.435
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