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Dossier

État, réformistes et philanthropes : un état des lieux de l’offre d’enseignement industriel dans l’Égypte coloniale (1882-1919)

State, reformists and philanthropists: A survey of industrial school-based education in colonial Egypt (1882-1919)
Annalaura Turiano
p. 41-70

Abstracts

This paper presents a first mapping of the school-based industrial education which developed in Egypt at the turn of the 20th century. We first analyse the initiatives promoted by the Ministry of Public Instruction. We look then at the more numerous ones launched by private individuals. The founding of industrial schools is observed in a wide geographical context, before the focus narrows to the scale of the city, in order to scrutinise the dynamics at work at the local level. The case of Alexandria, where several trade schools were founded at the beginning of the century, holds our attention. We will attempt to show that the founding of industrial schools was the result of different projects, ranging from social reform to the “revival” of the Egyptian industry.

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  • 1 Ce travail a été réalisé dans le cadre du laboratoire d’excellence LabexMed-Les sciences humaines (...)
  • 2 Pascal Crozet, Les sciences modernes en Egypte. Transfert et appropriation (1805-1902), Paris, Geu (...)

1Entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle, des écoles industrielles sont établies dans plusieurs villes égyptiennes1. L’apprentissage scolaire des savoir-faire techniques et industriels n’est pas un fait nouveau en Égypte. Dès la première moitié du XIXe siècle, plusieurs établissements d’enseignement technique sont fondés dans le contexte d’un processus volontaire de modernisation de l’État. Ils visent à former des cadres pour l’armée et la nouvelle administration. Pièce maîtresse de ce dispositif scolaire, l’École polytechnique (Muhandiskhana) forme à partir de 1834 plusieurs générations d’ingénieurs. Depuis 1839, fonctionne en outre au Caire une école des arts et métiers, qui prépare aux métiers de la mécanique et de l’industrie et fournit les cadres techniques intermédiaires aux administrations de l’État2.

2À la fin du siècle, ce sont d’autres catégories de travailleurs, ouvriers qualifiés et artisans expérimentés, que les nouvelles écoles industrielles entendent former. Ce qui est nouveau est aussi la diversité des acteurs engagés dans leur fondation et leur fonctionnement. Si l’État gère directement quelques établissements censés former les ouvriers qualifiés pour ses différentes administrations, les écoles industrielles qui voient le jour sont quasiment toutes le fruit d’initiatives privées (philanthropes, sociétés de bienfaisance, instances communautaires, missionnaires).

  • 3 Nazan Maksudyan, « Orphans, Cities and the State: Vocational Orphanages (“Islahhanes”) and the Ref (...)
  • 4 Sur la formation des ingénieurs égyptiens au XIXe siècle, voir Ghislaine Alleaume, L’école polytec (...)

3Étudié récemment par les historiens de l’Empire ottoman et du Maghreb colonial, l’enseignement industriel dans le contexte égyptien demeure un chantier peu défriché3. Seules quelques pages lui sont consacrées dans des ouvrages généraux sur l’histoire de l’éducation. La recherche s’est davantage intéressée aux formations techniques de haut niveau ou bien aux formes d’apprentissage des métiers dans le cadre des corporations4.

  • 5 Je fais référence ici à l’expression utilisée par l’historienne américaine Mine Ener pour qualifie (...)

4Pourtant, l’étude de ce secteur éducatif présente un double intérêt aussi bien pour une histoire des discours et des pratiques scolaires en contexte colonial que pour une histoire sociale de la philanthropie. D’une part, la multiplication des formes d’apprentissage scolarisé marque une nouvelle étape dans les modalités de transmission des savoir-faire industriels. Il serait alors intéressant de s’interroger sur l’introduction de nouvelles pédagogies, l’identité des agents chargés de leur conception et de leur mise en œuvre (éducateurs, traducteurs, contremaîtres et moniteurs) ainsi que leurs interactions. D’autre part, la fondation d’un certain nombre d’écoles industrielles à l’initiative de sociétés de bienfaisance invite à s’interroger sur l’évolution des formes de la bienfaisance et notamment sur la mise en place d’une « charité active »5.

5Fruit d’une première enquête exploratoire dans les archives publiques égyptiennes et britanniques, cet article ne prétend pas élucider ces questions. Il entend plutôt proposer un premier état des lieux de l’offre scolaire industrielle en Égypte entre 1880 et 1919. Pour ce faire, nous nous appuyons sur un corpus de sources hétérogènes en langue arabe, anglaise, française et italienne : rapports du Foreign Office, correspondance entre le ministère égyptien de l’Instruction publique et la Présidence du Conseil des ministres ; articles de journaux et de revues ; études sur l’état de l’industrie et l’enseignement professionnel au début du XXe siècle ; rapports d’activités annuels de sociétés de bienfaisance ; archives missionnaires. Ces matériaux permettent davantage d’interroger les discours des élites sur ce type d’enseignement et les objectifs qu’elles lui assignent que de saisir les modes de fonctionnement des écoles et les résultats atteints. Ces sources sont aussi peu disertes quant aux contenus des formations et aux publics qui fréquentent les écoles.

6L’attention est donc ici portée davantage à la diversité des initiatives dans le domaine de l’enseignement industriel, au cadre politique et intellectuel dans lequel elles s’inscrivent, ainsi qu’à l’identité des acteurs qui en sont à l’origine. Nous analyserons le rôle de l’administration de l’enseignement technique, puis les initiatives, plus nombreuses, lancées par des acteurs privés. La fondation des écoles est observée dans un cadre géographique large, avant de rétrécir la focale à l’échelle de la ville, pour scruter les dynamiques à l’œuvre au niveau local. Alexandrie retient alors notre attention : capitale financière de l’Égypte jusqu’au XXe siècle, les établissements d’enseignement industriel y sont plus nombreux et leur histoire mieux documentée. La simultanéité de leur fondation et leur proximité spatiale permettent de formuler des hypothèses sur l’enjeu que l’enseignement industriel représente pour plusieurs types d’acteurs ainsi que sur les objectifs qu’ils se fixent.

I. L’Administration de l’enseignement technique : « former aux nouveaux métiers, moderniser les arts traditionnels »

  • 6 Frédéric Abécassis, « L’enseignement du français en Égypte dans les années 1920 : une nébuleuse à (...)
  • 7 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne 1830-1950. Genèse et essor d’une (...)

7La création d’écoles industrielles (madāris sinā‘iyya) s’inscrit dans un cadre politique marqué par l’occupation britannique (1882). Au début, les occupants s’intéressent peu à l’enseignement, la priorité étant de sortir le pays de la banqueroute. Pendant de nombreuses années, la part du budget de l’État consacré à l’éducation ne dépasse pas 1 %6. À la fin des années 1880, l’intervention britannique dans le secteur éducatif s’accentue, notamment sous la pression de Douglas Dunlop, inspecteur, puis conseiller au ministère de l’Instruction publique. L’enseignement devient payant, l’anglais remplace petit à petit l’arabe comme langue véhiculaire et l’anglicisation du corps professoral progresse rapidement. En 1893, le ministère de l’Instruction est réduit à un département dépendant du ministère des Travaux publics7.

  • 8 À ce sujet, voir Ghislaine Alleaume, L’école polytechnique du Caire…, op. cit., p. 203 et suiv.
  • 9 Donald M. Reid, « Educational and Career Choices of Egyptian Students, 1822-1922 », International (...)

8Durant les premières années de l’occupation britannique, l’enseignement technique connaît un déclin. Fleuron de cet enseignement, l’École polytechnique (Muhandiskhana), créée au Caire dans le cadre des réformes mises en œuvre par Mohammed Ali (Mehmet Ali), forme depuis 1834 des ingénieurs pour le service d’irrigation et accessoirement pour les travaux de voirie et de construction. C’est par cette filière que sont passées plusieurs générations d’hommes ayant donné à l’Égypte ottomane une large part de ses cadres administratifs8. Après 1882, le prestige de cette institution se ternit. Les réformes entreprises au ministère des Travaux publics par les Britanniques à partir de 1884, en bloquant les possibilités d’avancement des personnels égyptiens, contribuent à déprécier cette filière. Les ingénieurs britanniques occupent désormais tous les postes d’encadrement. Peu à peu désertée par le public, la Muhandiskhana n’est plus que « l’ombre d’elle-même » en 18909.

  • 10 Émile Fahmī Shannūda, Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī…, op. cit., p. 194.
  • 11 Dār al-wathā’iq al-qawmiyya (Archives nationales égyptiennes), Le Caire [désormais DWQ], Majlis al (...)
  • 12 Émile Fahmī Shannūda, Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī…, op. cit., p. 195.

9L’école des arts et métiers du Caire semble à peine mieux s’en sortir. Créée en 1839, supprimée puis rouverte en 1868, elle est alors placée sous la direction de l’ingénieur français Éloi Guigon, qui la réorganise selon le modèle de l’école des arts et métiers d’Aix-en-Provence. Dispensant un enseignement à la fois pratique et théorique, elle fournit à la fin du XIXe siècle des cadres techniques à différentes administrations de l’État dont celle des chemins de fer et télégraphes10. Les multiples recompositions de ses sections, ainsi que les changements apportés à son programme (1887, 1899, 1902) modifient toutefois le rôle dévolu à cette institution11. En augmentant le nombre d’heures destinées à la pratique dans les différents ateliers (sept heures par jour) au détriment des cours théoriques (trois heures par jour), la réforme de 1887 fait de l’école des arts et métiers le lieu de formation d’un personnel subalterne12.

  • 13 Evelyn Baring, Rapport sur l’Égypte et le Soudan pour l’année 1905, Le Caire, Imprimerie nationale (...)
  • 14 Foreign Office [désormais FO], 407/165, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence January (...)

10Alors que les formations techniques supérieures perdent le prestige et la fonction qui étaient les leurs, le Haut-Commissaire britannique, Lord Cromer, souligne en 1905 tout l’intérêt qu’il y a à fonder des écoles d’apprentissage industriel. D’après lui, si l’Égypte est un pays « éminemment agricole » et que, de ce fait, « l’agriculture doit représenter le premier soin », il y a « tout de même un besoin grandissant de travail perfectionné pour le développement des industries utiles »13. Durant son mandat, le pays est organisé en fonction des besoins de l’économie britannique. L’amélioration des finances constitue une priorité, l’intensification des cultures pour l’exportation est encouragée (coton et canne à sucre notamment). Par le qualificatif « utiles », qu’il attribue à certaines industries, telles que l’industrie cotonnière, le secteur des transports et l’industrie du bâtiment, Lord Cromer assigne une fonction principale à l’enseignement industriel : former de jeunes Égyptiens aux nouveaux métiers requis par la croissance démographique et urbaine, mais surtout par une économie tournée vers l’exportation des matières premières14.

  • 15 FO, 407/175, Affairs of Egypt and Sudan. Further Correspondence, 1910, p. 304.
  • 16 FO, 407/165, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence January-March 1906, p. 117.
  • 17 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne, op. cit., p. 233.
  • 18 FO, 407/165, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence January-March 1906, p. 117.

11L’intérêt envers l’enseignement pratique se concrétise dans l’ouverture d’une école industrielle à Manṣūra (1899), puis dans la fondation de deux ateliers modèles au Caire (1902) et à Asyūt (1905). Dans ces trois établissements, directeurs et contremaîtres de chaque section sont des Britanniques. Le reste du personnel technique (assistants, mécaniciens, ouvriers) et enseignant (chargé notamment de l’enseignement du dessin et de l’arithmétique) est composé d’Égyptiens, issus de l’école des arts et métiers, puis recrutés parmi les anciens élèves des écoles industrielles15. En 1905, les ateliers modèles du Caire, dirigés par Johnson Pacha, comprennent plusieurs sections : travaux métallurgiques, réparation et montage de machines, maroquinerie, menuiserie, ameublement, peinture murale et décoration16. L’atelier modèle d’Asyūt comprend les mêmes sections que celui du Caire auxquelles est rajouté en 1909 un département de cordonnerie. Les deux ateliers modèles fonctionnent en outre comme des ateliers d’entretien et de réparation du matériel technique appartenant aux administrations de l’État17. L’école industrielle de Manṣūra est, quant à elle, plus particulièrement mise au service du développement agricole. En 1907, elle accueille 148 élèves répartis entre plusieurs sections consacrées aux métiers du bois dont la plus récente est spécialisée dans la fabrication d’instruments aratoires18.

  • 19 Avocat, Sa‘ad Zaghlûl est le futur leader du parti nationaliste Wafd, parti issu de la délégation (...)
  • 20 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne, op. cit., p. 230.

12À partir de 1906, les Britanniques donnent une plus grande impulsion au secteur éducatif. Sous la pression conjointe des nationalistes égyptiens et de la Chambre des Communes, Lord Cromer nomme Sa‘ad Zaghlūl (1858-1927)19 à la tête du département de l’Instruction qui redevient en même temps un ministère. Le nouveau Haut-Commissaire britannique, Eldon Gorst (1907-1911), s’attelle dès le début de son mandat à réformer le secteur éducatif. Il s’agit de répondre aux revendications du mouvement nationaliste égyptien, pour qui le développement de l’éducation constitue un enjeu central20.

  • 21 FO, 407/172, Affairs of Egypt and Sudan. Further Correspondence, 1908, p. 112.

13Le secteur technique bénéficie aussi de cette volonté de réforme. La création de l’administration de l’enseignement technique (agricole, industriel et commercial), rattachée au ministère de l’Instruction publique, date de décembre 1906 et peut être interprétée comme l’une des réponses apportées à la surenchère nationaliste. Après avoir remis un rapport d’expertise sur l’état et le potentiel développement de l’enseignement technique dans toutes ses branches, Sidney H. Wells, ancien proviseur de l’École polytechnique de Battersea à Londres, est nommé directeur de la nouvelle administration. Sa création s’accompagne d’une augmentation du budget du ministère de l’Instruction publique (s’élevant à 23 530 livres égyptiennes)21.

  • 22 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne, op. cit., p. 233.

14Avec la mise en place de cette nouvelle administration, l’enseignement technique connaît des recompositions. Pour ce qui est de la branche industrielle, une hiérarchisation selon trois degrés est établie. Placée au sommet de la pyramide, l’École polytechnique est réorganisée à la fois dans ses sections et ses programmes. Le travail manuel dans les ateliers est réduit au bénéfice de l’enseignement théorique et du dessin. La durée des études est portée à quatre ans, dont deux communs et deux de spécialisation. Ainsi réorganisée, l’École récupère progressivement son prestige. L’école des arts et métiers vient désormais représenter un ordre d’enseignement moyen, chargé de former des cadres techniques intermédiaires distincts à la fois de l’ouvrier qualifié et de l’ingénieur diplômé de l’École polytechnique22.

  • 23 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole, industriel et co (...)
  • 24 DWQ, MW, 0075-044821, Règlement concernant l’exemption du service militaire pour les élèves des éc (...)
  • 25 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole… », art. cit., p. (...)

15Les ateliers modèles (wirash numūdajiya) et les écoles industrielles (madāris sinā‘iyya) constituent la base du dispositif. Ce sont les seules filières gratuites destinées aux classes laborieuses qui se fixent pour objectif de former des artisans et des ouvriers qualifiés23. D’une durée de quatre ou cinq ans, l’enseignement dispensé est largement pratique et tourné vers la production. Les élèves passent la plus grande partie de la journée scolaire dans les ateliers. Trois heures seulement sont consacrées aux cours théoriques24. Ces derniers se limitent à quelques rudiments de lecture, de dessin et de calcul25. Acceptant des commandes (machines, pièces de rechange, mobilier, confection d’habits et fabrication de chaussures), qui viennent à la fois des administrations de l’État et de particuliers, ces filières fonctionnent comme des usines et sont soumises à un impératif de rentabilité. En 1911, Sidney Wells résume ainsi les objectifs assignés aux écoles industrielles par la nouvelle administration qu’il préside depuis quatre ans :

  • 26 Ibid., p. 353.

« L’administration a toujours insisté sur le fait que la vraie fonction d’une école industrielle est de faire apprendre les principaux métiers existant dans l’endroit où elle se trouve pour les améliorer et leur donner de l’extension. Comme surcroît d’obligation, elle doit chercher à faire revivre des industries qui autrefois étaient florissantes et qui ont été abandonnées et ensuite créer des nouvelles qui semblent être utiles au district »26.

  • 27 Hanan Hammad, Industrial Sexuality. Gender, Urbanization and Social Transformation in Egypt, Unive (...)
  • 28 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole… », art. cit., p. (...)

16En plus de former aux nouveaux métiers requis par le fonctionnement d’une économie coloniale, les nouvelles filières sont chargées d’enseigner les artisanats locaux. Parmi les principaux centres de l’industrie textile, Mahalla, dans le Delta, qui abrite depuis 1912 le deuxième marché du coton de l’Égypte après le marché de Mināt al-basal à Alexandrie, est choisie pour installer une école de tissage. La madrasat al-nasīj est ouverte en 1910 dans l’une des artères principales de la ville27. C’est aussi avant tout le tissage du coton qui est enseigné à l’école de Sūhāg ouverte en 1912, du fait de sa proximité avec Akhmīn, l’un des plus importants centres de la Haute-Égypte pour cette branche industrielle28.

  • 29 Ibid.
  • 30 FO, 407/ 164, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1905, p. 133.
  • 31 British Library, Londres [désormais BL], IOR/ L/PJ/6 1414, « Technical Education in Egypt », The T (...)

17Quant au deuxième objectif indiqué par le directeur de l’administration de l’enseignement technique, à savoir « faire revivre des industries […] autrefois florissantes », il s’agit plus précisément d’endiguer le déclin des certaines industries traditionnelles, qui souffrent, d’après Wells, de la compétition des produits importés d’Europe au point que certaines, telles que la confection des tapis dans le district de Beni Souef, auraient déjà disparu29. Le « déclin » des industries traditionnelles égyptiennes, sur lequel nous reviendrons plus loin, est un leitmotiv des discours de nombreux contemporains de M. Wells, qu’ils soient Égyptiens ou Européens. Sous la plume de Lord Cromer, il était en partie justifié en tant qu’effet secondaire du « progrès technologique » apporté par les colonisateurs30. Pour Wells, la faiblesse des artisanats locaux est un argument supplémentaire pour soutenir le développement de l’enseignement industriel. La revivification des arts traditionnels ne peut, d’après lui, que passer par leur modernisation, autrement dit, par l’introduction de nouveaux procédés et méthodes de travail, ainsi que de nouveaux appareillages31.

  • 32 FO, 407/ 164, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1905, p. 132.
  • 33 FO, 407/175, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1911, p. 85.

18Les écoles industrielles sont censées devenir les vecteurs de cette modernité technique. Par l’introduction de machines, la transmission de nouveaux habitus de travail et de nouvelles conceptions du temps, l’objectif est d’élever les modes de production « aux standards européens »32. Les sources à notre disposition sont peu disertes quant aux pédagogies réellement adoptées. Elles ne permettent pas non plus de mesurer le degré d’intégration des contenus et des savoir-faire techniques par les élèves. Toutefois, en soulignant que certaines écoles, tout en scolarisant un nombre croissant d’élèves, « sont loin d’avoir atteint les standards prévus », le rapport britannique sur l’enseignement technique de 1911 semble suggérer des écarts entre les objectifs annoncés et leur réalisation33.

  • 34 FO, 407/172, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1908, p. 112.
  • 35 DWQ, MW, 0075-044821, Note au Conseil des ministres sur le projet de subventions aux écoles indust (...)

19Quel rôle joue l’administration de l’enseignement technique dans le développement de ces écoles industrielles ? Deux sections la composent, l’une chargée de la direction et du développement des écoles existantes, l’autre ayant pour mission d’établir le plan des écoles industrielles à édifier, d’en définir la structure et d’en fixer les sections et les curricula en fonction de leur implantation géographique34. Par ailleurs, elle assiste techniquement et financièrement les écoles industrielles privées. De 1906 à 1909, sept établissements privés obtiennent des subventions et des terrains gouvernementaux à un prix de faveur. En contrepartie, ils acceptent de se soumettre à l’inspection du gouvernement. La politique de subvention permet à l’État de limiter les dépenses par rapport à l’ouverture de nouvelles écoles. Elle se veut en outre un encouragement à l’initiative privée, qui vise à ne pas compromettre le principe du laisser-faire à la base de la politique éducative britannique en Égypte35.

  • 36 FO, 407/182, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1914, p. 58.

20À la veille de la révolution de 1919, le département de l’enseignement technique fait état de dix-sept écoles industrielles, dont trois directement gérées par le ministère de l’Instruction publique, à travers l’administration, et quatorze subventionnées qui scolarisent en tout près de 7 000 élèves. Elles offrent plusieurs formations que nous pouvons regrouper en quelques grandes catégories : travaux de métaux, travaux du bois, peinture et décoration, marqueterie, cordonnerie, métiers du livre et tissage. Le département de mécanique avec ses sous-sections (construction et réparation de machines, d’automobiles et de pièces de rechange) est le plus prisé, ce qui pousse les dirigeants de plusieurs écoles à en introduire un à chaque fois que le budget le permet36.

  • 37 FO, 848/7, Milner Mission, vol 7., Technical, Industrial and Commercial Education, Note from the D (...)
  • 38 BL, IOR/ L/PJ/6 1414, « Technical Education in Egypt », The Times, 22 septembre 1915.
  • 39 J. W. A. Young, A little to the East. Experience of an Anglo Egyptian Official 1899-1925, unpublis (...)

21Malgré leur diversité, les formations offertes ne correspondent que partiellement aux objectifs assignés à l’enseignement industriel. Wells souligne l’absence de formation professionnelle dans les métiers du bâtiment, pourtant jugés, on s’en rappellera, particulièrement dignes d’intérêt du point de vue de la formation professionnelle37. Pour ce qui est de l’enseignement des artisanats locaux, peu de mesures sont prises jusqu’en 1914 à l’exception de l’école d’Asyūt et d’Abū Tīj spécialisées respectivement dans la marqueterie, le travail de l’ivoire et le tissage. Par ailleurs, l’introduction des techniques européennes ne manque pas de susciter des critiques dans le milieu de la presse anglophone et parmi certains fonctionnaires britanniques. Dans un article qu’il consacre en 1915 à l’état de l’enseignement technique en Égypte, le correspondant du journal britannique The Times au Caire exprime ses craintes quant à l’introduction des techniques modernes au détriment des méthodes en usage dans le pays, qui risquent de supprimer, d’après lui, « l’originalité et la touche personnelle dans l’exécution qui a rendu le travail des artisans si renommé autrefois »38. Pour sa part, J. W. A. Young, inspecteur des Finances entre 1899 et 1925, considère les méthodes de tissage européennes introduites dans l’école de Sūhāg comme responsables de l’abandon des méthodes de tissage traditionnelles dans le centre voisin d’Akhmīn39.

  • 40 De manière générale, l’enseignement féminin, qu’il soit dispensé dans les Kuttābs (écoles élémenta (...)
  • 41 Judith E. Tucker, Women in nineteenth Century Egypt, Cambridge, Cambridge University Press, 1985, (...)

22Une autre remarque s’impose quant au public visé par ces nouvelles écoles. L’offre de formation industrielle ne concerne que les garçons. Les filles qui, jusqu’en 1909, ne bénéficient que d’un accès restreint à l’enseignement primaire gouvernemental et doivent attendre les années 1920 pour que la première école secondaire leur soit ouverte au Caire, sont aussi reléguées aux marges de ce système embryonnaire d’enseignement technique40. Pourtant, comme l’ont montré Judith E. Tucker et, plus récemment Hanan Hammad, les femmes issues des classes laborieuses ont toujours joué un rôle économique important notamment dans le secteur textile41.

  • 42 FO, 407/ 178 Affairs of Egypt and Sudan, Further Correspondence, janvier-juin 1912, p. 113.

23La masculinisation de l’enseignement technique est d’autant plus évidente dans le cas de l’école d’Asyūt. En 1915, les dirigeants de l’école décident d’accorder une plus grande place à l’enseignement des arts traditionnels, tels que la confection des tapis et le tissage. Bien qu’il s’agisse de métiers où les femmes ont toujours été très actives, aucune section pour les filles n’est envisagée. La formation professionnelle des filles se limite dans un premier temps à la seule économie domestique, comme l’atteste l’ouverture au Caire, en 1910, de l’école ménagère de Kubba, placée sous la direction de l’administration de l’enseignement technique. Centrée sur l’enseignement de l’économie domestique, elle se fixe pour objectif la formation de « bonnes épouses et mères »42. Alors que les garçons bénéficient de nouvelles formations scolaires industrielles d’après une identification entre métiers de l’industrie et masculinité, les femmes en restent exclues et continuent de se former sur le tas.

  • 43 FO, 848/7, Milner Mission, vol. 7., Technical, Industrial and Commercial Education, S.H. Wells, «  (...)
  • 44 Ibid.

24Ce n’est qu’en 1915 qu’une section pour les filles dispensant des cours de couture, de tricot et de confection d’habits est ouverte au sein de l’école tenue par la Société de bienfaisance copte à Būlāq au Caire. Une deuxième école privée enseignant la couture est établie à Alexandrie quelques années plus tard43. Ces évolutions poussent l’administration de l’enseignement technique à s’interroger, à son tour, sur la transformation de l’école ménagère en une école de métiers (confection d’habits, couture et broderie orientale). En reconnaissant le rôle économique des femmes dans certaines industries, telles que la vannerie, la fabrication de châles et de calottes brodées et la confection de tapis, Wells envisage par ailleurs l’envoi dans certains centres du Delta et de la Haute-Égypte d’instructeurs itinérants (travelling instructors) pour la tenue de cours techniques ponctuels destinés aux ouvrières44.

25Ainsi, jusqu’en 1919, l’enseignement scolaire industriel reconnait comme seules spécialités féminines les métiers de la couture, de la broderie et du tissage de tapis. Cet enseignement professionnel destiné aux filles reste en outre, pendant de nombreuses années, l’apanage de l’initiative privée.

II. Enseignement industriel et initiative privée : entre réforme sociale et « renaissance » de l’industrie égyptienne

  • 45 À propos de l’émergence des associations de bienfaisance, voir Lisa Pollard, « Egyptian by Associa (...)
  • 46 Au-delà de l’aumône rituelle (zakāt), les œuvres de bienfaisance sont assurées par différentes ins (...)
  • 47 À propos de la question de la réforme, voir Alain Roussillon (dir.) Entre réforme sociale et mouve (...)

26Les premières écoles industrielles privées sont ouvertes à l’initiative de sociétés de bienfaisance (al-jam‘iyyāt al-khayriyya) dont la fondation remonte, en Égypte comme dans d’autres provinces de l’Empire ottoman, au dernier quart du XIXe siècle45. Émanation d’élites séculières qui empruntent aux modes d’organisation des confréries soufies et des corporations de métier, elles incarnent de nouvelles formes de solidarité et d’entraide sociale et défient le quasi-monopole de la charité que détiennent les institutions religieuses46. La fondation des sociétés de bienfaisance est aussi très strictement liée à l’émergence, dans les milieux lettrés et savants, d’une pensée réformiste que la domination étrangère sur l’Égypte concourt à alimenter47.

  • 48 Gilbert Delanoue, « Endoctrinement religieux et idéologie ottomane : l’adresse de Muhammad ‘Abdu a (...)
  • 49 Alain Roussillon, « Réforme sociale et production des classes moyennes. Muhammad ‘Umar et “l’arrié (...)

27Face à une Europe conquérante qui tend à imposer ses modèles, juristes, lettrés et journalistes s’interrogent sur les questions relatives à la modernité et à l’identité de l’Égypte. Sous leur plume, le concept de réforme (islāh), ayant trait à plusieurs aspects de la vie sociale, politique et culturelle, devient courant. Pour ces élites réformistes, l’éducation constitue la pierre angulaire de la réforme. Le dynamisme missionnaire et les nombreuses initiatives étrangères en matière d’éducation sont considérés comme autant des signes de la faiblesse du système éducatif autochtone qu’il s’agit de revivifier. Dans son mémoire adressé en 1887 au Shaykh al-islām à Istanbul, Muḥammad ‘Abduh, après avoir mis en garde contre l’« invasion » des écoles missionnaires, souligne l’urgence d’un enseignement religieux reformé dans l’ensemble de l’Empire ottoman48. Pour Muḥammad ‘Umar, auteur de L’état présent des Égyptiens ou le secret de leur arriération, paru au Caire en 1902, la réforme de la société doit commencer sur le terrain de l’éducation. L’État n’étant pas à même d’assurer cette tâche, la solution consisterait dans la création d’associations porteuses d’un programme de réformes49.

  • 50 Iman Farag, « Enjeux éducatif et réforme sociale », in Alain Roussillon (dir.) Entre réforme socia (...)
  • 51 Linda Herrera, « The Soul of a Nation: ‘Abdallah Nadim and educational reform in Egypt (1845-1896) (...)
  • 52 Al-Jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1905-1906, p. 15.

28Le mouvement de fondation d’écoles privées par les sociétés de bienfaisance s’inscrit dans ce climat intellectuel et traduit, comme le souligne Iman Farag, « la prise en charge d’un projet d’éducation par les élites égyptiennes »50. Pionnière, l’Association de bienfaisance islamique (al-jam‘iyya al-khayriyya al-islāmiyya), est créée à Alexandrie par le journaliste et homme de lettres ‘Abdallah al-Nadīm en 1879. S’inspirant fortement de la Société islamique de Beyrouth, l’association ouvre une école dont le programme est calqué sur celui des écoles gouvernementales bien qu’une plus grande importance soit consacrée à la langue et à l’histoire arabe et égyptienne et aux études islamiques.51 Quelques années plus tard, une autre société de bienfaisance islamique, Al-‘Urwa al-Wuthqā (Le lien indissoluble), est constituée dans la ville-port. L’association porte le même nom que la revue fondée à Paris en 1884 par Muhammad ‘Abduh et Jamāl al-Dīn al-Afghāni, qui figurent parmi les principaux penseurs du courant réformiste musulman. Si les liens entre l’association et la revue ne peuvent être établis avec certitude, le choix de ce nom révèle très vraisemblablement l’adhésion des membres de l’association aux idéaux réformistes propagés par ‘Abduh et al-Afghāni, notamment en matière d’éducation. En 1905, elle gère déjà deux orphelinats et près d’une vingtaine d’écoles dont cinq entièrement gratuites (quatre pour les garçons et une pour les filles)52.

  • 53 Dina El-Khawaga, « Le renouveau copte actuel : raisons d’émergence et modes de fonctionnement », i (...)

29Au tournant du XXe siècle, les sociétés de bienfaisance sont établies dans leur grande majorité sur des bases communautaires. En occupant le terrain investi jusque-là par les institutions ecclésiastiques, les coptes fondent à leur tour plusieurs associations qui concentrent leur action sur le terrain de l’assistance aux plus démunis. L’une des plus importantes, la Société de bienfaisance copte, est fondée par Boutros Ghali en 1881. Elle ouvre dans les années suivantes les premiers orphelinats et hôpitaux coptes au Caire. D’autres sociétés, à l’instar de la société Tawfīq créée en 1891, font de l’accès au savoir une priorité53.

  • 54 Mine Ener, Managing Egypt’s Poor…, op. cit., p. 100.
  • 55 Malgā abnā’ al-sabīl, Al-mar’a al-misriyya, mars 1924, p. 307-311.
  • 56 Al-jam‘iyya al-‘urwa al-wuthqā, Taqrīr sanawī, 1905-1906, p. 17.

30Les premières écoles industrielles sont fondées dans le cadre de cet activisme philanthropique. Certaines fonctionnent à la fois comme des orphelinats et des écoles de métier. C’est le cas de l’orphelinat industriel al-Abbāsiyya (Malgā al-Abbāsiyya) fondé au Caire en 1892 par la Société de bienfaisance islamique, plus connue sous le nom d’al-Maqāsid54. Les initiatives dans le domaine de la formation professionnelle se multiplient dans les années suivantes. En 1904, la société de bienfaisance copte Tawfīq fonde une école de menuiserie et de forge dans le quartier de Faggalah au Caire, qui accueille 30 élèves en 1908. Un autre orphelinat industriel « l’orphelinat des enfants errants » (Malgā abnā’ al-sabīl) est ouvert dans l’arrondissement de Shubra, quelques années plus tard. Les élèves y sont instruits dans le tissage des tapis, la fabrication de mobilier en bois et la vannerie55. À Alexandrie, l’école de la Société des portefaix de la Douane, incorporée en 1905 au réseau d’institutions gérées par la société al-Urwa al-Wuthqā, comprend dans sa section technique deux départements, l’un scolarisant les garçons (instruits entre autres dans le tissage des étoffes), l’autre s’adressant aux filles (l’une des spécialités qui leur est offerte est la confection de tapis)56.

  • 57 Beth Baron, The Women’s Awakening in Egypt: Culture, Society and the Press, New Haven, Yale Univer (...)
  • 58 « Fī wirash al-mar’a al-jadīda », al-mar’a al-misriyya, decembre 1928, p. 123.
  • 59 Beth Baron, Egypt as a Woman. Nationalism, Gender and Politics, Berkeley, University of California (...)

31La plupart des initiatives en faveur de l’enseignement professionnel des filles émanent du milieu associatif féminin qui connaît un réel essor dans les premières décennies du XXe siècle57. Désireuses de contribuer à la « renaissance de la femme » (al-nahda al-nisā’iyya), les membres de ces associations appartiennent dans leur grande majorité aux élites égyptiennes. Elles estiment avoir un rôle de guides et d’instructrices à l’égard des femmes issues des classes laborieuses. Ce projet se concrétise, entre autres, dans la fondation d’écoles à caractère professionnel. En 1914, l’Association des femmes coptes ouvre dans la capitale égyptienne une école offrant aux jeunes filles des formations de couture, broderie et autres métiers à tricoter. Fondée au lendemain de la révolution de 1919, l’association « La femme nouvelle » (al-mar’a al-jadīda) se consacre aussi à l’éducation des filles défavorisées. Elle ouvre à partir de 1919 plusieurs ateliers dans le quartier de Mounira au Caire, où les apprenties suivent des cours de couture, de broderie et de tissage de tapis58. Ce sont des initiatives semblables que l’Association de la renaissance des femmes (Jam‘iyyat al-nahda al-nisā’iyya), fondée par Labiba Ahmad, promeut en ouvrant au Caire en 1921 un atelier de couture pour jeunes filles59. La presse joue un rôle de premier plan dans la promotion et le développement de ces initiatives, lançant des appels aux dons et informant le lectorat des activités organisées par les associations. Des revues féminines, telles que al-Mar’a al-misriyya (La femme égyptienne) proposent souvent des portraits de jeunes apprentis en classe ou dans les ateliers des écoles. En montrant la conversion des enfants pauvres à une vie industrieuse, ces images entendent promouvoir les bienfaits de la philanthropie (illustrations 1A et 1B).

Ill. 1A : Les apprentis de l’orphelinat Abnā’ al-sabīl au Caire (1)

Ill. 1A : Les apprentis de l’orphelinat Abnā’ al-sabīl au Caire (1)

Source : ‘Al-malgā abnā’al-sabīl’, al-mar’a al-misriyya, mars 1924.

Ill. 1B : Les apprentis de l’orphelinat Abnā’ al-sabīl au Caire (2)

Ill. 1B : Les apprentis de l’orphelinat Abnā’ al-sabīl au Caire (2)

Source : ‘Al-malgā abnā’ al-sabīl’, al-mar’a al-misriyya, mars 1924.

  • 60 « Malgā al-atfāl wa al-wilāda bi- Qasr al-‘Ayni», al-mar’a al-misriyya, décembre 1920, p. 353 ; «  (...)
  • 61 Il s’agit de l’organe de presse (publié en français) de la Société khédiviale d’économie politique (...)
  • 62 Alain Roussillon, « Le partage des savoirs. Effets d’antériorité du savoir colonial en Égypte », A (...)
  • 63 Entre 1891 et 1909, plusieurs lois criminalisant et punissant le vagabondage sont promulguées. La (...)

32L’ensemble de ces associations se fixent pour objectif le relèvement moral et matériel des catégories les plus démunies, qualifiées dans les sources par le terme générique de pauvres (Fuqarā’ ) ou de malheureux (Ba’isīn). L’enseignement professionnel est censé leur assurer un gagne-pain60. Comme en Europe dans les mêmes années, la question de l’instruction professionnelle est intégrée par ailleurs aux débats sur la délinquance juvénile et l’« enfance errante », menés par des journalistes, des juristes et des universitaires dont certains sont réunis autour de la revue L’Égypte contemporaine61. De plus en plus appréhendées comme des « symptômes d’une maladie du corps social » pour le dire à la manière d’Alain Roussillon, ces questions font l’objet de plusieurs articles qui paraissent dans les pages de la revue entre 1910 et 191962. Ils s’attèlent à mesurer l’ampleur du phénomène et soulignent en même temps l’inadéquation des méthodes répressives en vigueur63. L’éducation professionnelle apparaît dans ces écrits à la fois comme un remède au vagabondage et comme un moyen de réintégration des catégories marginales. Auteur d’une thèse intitulée Le problème de l’apprentissage en Égypte et le rôle de l’enseignement technique, Muhammad Sultan en appelle en 1917 à la fondation d’associations philanthropiques pour assurer la promotion de ce type d’instruction :

  • 64 Muhammad Sultan, Le problème de l’apprentissage en Égypte et le rôle de l’enseignement technique, (...)

« Ne serait-il pas plus charitable et plus utile de refuser l’aumône à ces petits mendiants de profession et de remettre l’argent que nous voulons y consacrer à une société philanthropique qui se formerait dans chaque ville et qui se chargerait de recueillir les vagabonds et les enfants moralement abandonnés pour s’occuper de leur instruction professionnelle ? Il est nécessaire de les diriger vers l’industrie qui seule peut donner du travail à cette catégorie d’enfants et nous pourrons ainsi arrêter le fléau montant du vagabondage dans les grandes villes »64.

  • 65 Hélène Cottenet-Djoufelkit, « L’industrialisation de l’Égypte au XXe siècle », Égypte/ Monde Arabe(...)
  • 66 Voir à ce sujet, Kristin Koptiuch, « Other Workers: A critical Reding of Representations of Egypti (...)

33Reflet de la mission régénératrice que les élites réformistes s’assignent, la fondation d’écoles professionnelles traduit aussi l’intérêt grandissant qu’une partie d’entre elles portent à la promotion de l’industrie et de l’artisanat égyptiens. Au début du XXe siècle, le secteur agricole commence à montrer des signes de faiblesse : la baisse des rendements se conjugue à la concurrence de nouveaux pays sur le marché international65. C’est surtout après la crise de 1907 (qui entraine la chute du prix du coton sur le marché mondial) qu’une frange des élites terriennes commence à réfléchir à la possibilité d’investir le capital cumulé dans d’autres secteurs, dont le secteur industriel66. La Grande Guerre, avec l’interruption des importations qu’elle entraîne, donne une impulsion supplémentaire à ce projet.

  • 67 W. V. Shearer, « Report on the Weaving Industry in Assiout », L’Égypte contemporaine, vol. 1, no 1 (...)
  • 68 Voir à ce sujet, Malak Labib, La statistique d’État en Égypte à l’ère coloniale, op. cit., p. 334.

34C’est durant ces années que paraissent dans les pages de L’Égypte contemporaine de nombreux rapports et études sur l’état de la petite industrie égyptienne. Centrés avant tout sur l’industrie du tissage du fait qu’elle emploie une main d’œuvre nombreuse, ils offrent des analyses contrastées de ses performances. Les auteurs s’accordent à dire en tout cas que les industries du tissage sont négligées, et pointent du doigt le manque de toute forme de protection depuis le début de l’occupation britannique67. Véritables plaidoyers pour la promotion de la petite industrie égyptienne, ces rapports attestent de la centralité acquise par la question industrielle dans les débats économiques de ces années68. Ils prônent par ailleurs le développement de l’éducation professionnelle comme l’un des moyens pour encourager la production industrielle.

  • 69 Le monopole corporatif est officiellement aboli en 1854. Les réformes entreprises par les Britanni (...)
  • 70 René Maunier, « L’apprentissage dans la petite industrie en Égypte, l’organisation actuelle, les r (...)
  • 71 Jean Vallet, Contribution à l’étude de la condition des ouvriers de la grande industrie au Caire, (...)
  • 72 DWQ, MW, 0075-008764, Taqrīr bi-khusūs inshā’ madrasat Muhammad ‘Alī al-sinā‘iyya wa tatwīr al-ta‘ (...)
  • 73 La politique d’industrialisation de Mohammed Ali (1805-1848) vise à réduire les importations et à (...)

35Dans l’étude sur l’apprentissage dans la petite industrie égyptienne qu’il mène en 1912, René Maunier attribue la crise de ce secteur à l’affaiblissement des corporations et à la « décadence » de l’apprentissage. Privées progressivement de leur rôle fiscal, les corporations seraient, d’après l’auteur, sur le point de disparaître et dans l’incapacité, de ce fait, d’assurer un enseignement professionnel69. La solution consisterait, d’une part, dans la réorganisation et la règlementation de l’apprentissage et, d’autre part, dans la multiplication d’écoles industrielles70. À l’instar de René Maunier, d’autres considèrent l’enseignement industriel comme l’un des moyens susceptibles d’assurer la formation d’artisans expérimentés et, à terme, de garantir une « renaissance » de l’industrie égyptienne71. C’est cet objectif que se fixe l’association al-‘Urwa al-Wuthqā à travers l’ouverture d’une école industrielle à Alexandrie. Dans un rapport soumis à la Présidence du Conseil des ministres en 1911, le président de l’association souligne que l’école Muammad ‘Alī a été fondée dans le but de « faire revivre la grandeur industrielle de l’Égypte » (ihyā’ majd misr al-sinā‘ī)72. Le nom donné à cette école, sur laquelle nous reviendrons plus longuement par la suite, n’est d’ailleurs pas anodin. La référence à la politique de Mohammed Ali, qui entre 1816 et 1838 a engagé l’Égypte dans la voie d’une première industrialisation, est manifeste et indique bien dans quelle filiation l’association entend s’inscrire73.

  • 74 FO, 407/175 Affairs of Egypt and Sudan. Further Correspondence, janvier-mars 1906, p. 159.
  • 75 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole… », op. cit., p.  (...)
  • 76 Hanan Hammad, Industrial Sexuality, op. cit., p. 5.
  • 77 Emile Fahmī Shannūda, Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī…, op. cit., p. 201.

36D’autres initiatives viennent de particuliers. En 1903, Mahmud Suleyman Pacha, propriétaire terrien de la province d’Asyūt et membre du Conseil législatif, fonde à ses propres frais une école industrielle à Abū Tīj. Elle scolarise près de 92 élèves en 1907, répartis entre quatre sections (tissage, menuiserie, forge et tournage)74. En 1906, des comités sont constitués dans les provinces de Fayyūm et Beni Souef, dans le Delta du Nil, afin de récolter des dons pour établir deux écoles industrielles. Ouvertes en 1909, elles accueillent 540 élèves en tout deux ans plus tard75. À Mahalla, c’est une famille de notables locaux, engagée dans la culture et le commerce du coton, qui cède un vaste terrain pour la construction d’une école de tissage, inaugurée en grande pompe en 191076. Expression selon l’historien Émile Shennuda « d’un proto-capitalisme national », les initiatives de ces notables visent à promouvoir l’industrie du tissage de la soie et du coton, durablement établie dans ces provinces77.

37Entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle, des formes d’apprentissage scolarisé sont donc en train d’émerger. Il ne s’agit encore que d’un embryon de réseau : à une minorité d’écoles fondées par le gouvernement s’ajoute une multiplicité d’initiatives privées. Des préoccupations économiques et, plus précisément, la volonté de revivifier une industrie locale maintenue par l’occupant dans un état stagnant, se joignent à la mission régénératrice que s’assigne une partie des élites réformistes égyptiennes. Prémices d’un nationalisme économique et réformisme social se conjuguent ainsi dans la promotion d’un enseignement industriel qui s’adresse majoritairement aux garçons sans pour autant exclure les filles.

38Deuxième ville d’Égypte, Alexandrie est au cœur de ce mouvement de fondation d’écoles privées. Les initiatives y sont nombreuses et impulsées par des acteurs qui entrent souvent en compétition les uns avec les autres.

III. Un cosmopolitisme de la bienfaisance ? Des écoles industrielles à Alexandrie

  • 78 Muhammad Sultan, Le problème de l’apprentissage en Égypte…, op. cit., p. 91.

« À partir de 1906, un mouvement important s’est dessiné dans le pays en faveur de l’enseignement technique et l’initiative privée y a participé […] Ce mouvement est né dans la ville d’Alexandrie et s’est ensuite propagé dans tout le pays »78.

  • 79 Ministry of Finance, Statistical returns of pupils attending public and private schools in Egypt f (...)

39D’après Muhammad Sultan, la ville-port aurait joué un rôle pionnier dans la fondation des écoles industrielles. Si cette affirmation ne peut pas être vérifiée, on constate, à la lecture de la statistique scolaire officielle pour l’année 1906-1907, que le nombre d’écoles industrielles y est plus important que dans d’autres villes. Avec cinq établissements, Alexandrie devance le Caire, qui en compte deux à cette date79.

  • 80 Michael J. Reimer, Colonial Bridgehead: Government and Society in Alexandria, 1807-1882, Boulder, (...)
  • 81 C’est parmi les ouvriers des transports et les cigarettiers d’Alexandrie que les premières organis (...)

40La plus grande concentration d’établissements d’enseignement industriel à Alexandrie n’est pas étonnante. La ville bénéficie depuis la seconde moitié du XIXe siècle de l’intégration accélérée de l’Égypte dans les circuits financiers internationaux80. Bien qu’elle doive son développement avant tout au commerce, Alexandrie dispose d’un réseau industriel plus étoffé que Le Caire. Le mouvement de constitution d’une industrie privée, commencé à partir de 1860, s’accélère après l’occupation britannique. Les ateliers et les usines qui jalonnent la ville (fonderies, minoteries, fabriques de cigarettes, ateliers des chemins de fer pour n’en citer que quelques-uns) sont le lieu d’éclosion d’un prolétariat urbain qui commence à se mobiliser81.

  • 82 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930. Histoire d’une communauté citadine, Le Caire, IFAO, p. 245.
  • 83 Frédéric Abécassis, « De la protection par l’école : la sédimentation des traditions d’enseignemen (...)
  • 84 Frédéric Abécassis, « L’enseignement étranger en Égypte (1930-1960) », Aujourd’hui l’Égypte, 1995, (...)

41La croissance économique s’accompagne d’un essor démographique sans précédent. Entre 1882 et 1897, la ville passe de 232 000 à 319 000 habitants82. À la faveur de la croissance urbaine, le marché scolaire se diversifie. Missionnaires catholiques et protestants s’installent dans la ville depuis le milieu du XIXe siècle et multiplient leurs fondations.83 Les écoles des puissances étrangères se disputent également le public scolaire alexandrin, mais elles fonctionnent selon des modèles distincts. Les écoles grecques et italiennes scolarisent d’abord leurs ressortissants, tandis que les écoles françaises et anglaises présentent un caractère intercommunautaire (elles sont investies pour la plupart par des minorités confessionnelles, chrétiennes et juives)84.

  • 85 Sur l’ensemble du territoire égyptien, les écoles étrangères représentent 41 % des établissements (...)
  • 86 Voir à ce propos, Elena Chiti, Écrire à Alexandrie (1879-1940). Capital social, appartenances, mém (...)
  • 87 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 648.

42L’empreinte étrangère sur le marché scolaire alexandrin, bien que remarquable, ne saurait occulter les initiatives privées égyptiennes en matière d’éducation85. Plus souvent décrite comme une ville Ad Egyptum, Alexandrie est l’un des terrains privilégiés de l’action réformiste et nationaliste égyptienne86. C’est dans la ville-port, nous l’avons vu, que les premières sociétés de bienfaisance sont fondées et les premières écoles gratuites ouvertes. À celles-ci s’ajoutent les nombreuses écoles du soir inaugurées par le Parti national87. Alors qu’elle est plutôt connue pour ses établissements d’enseignement prestigieux d’origine étrangère, tels que le Victoria College, fleuron de l’enseignement britannique au Proche-Orient ou le collège Saint-Marc, fondé par les Frères des Écoles chrétiennes, l’un et l’autre fabriques d’élites, Alexandrie abrite aussi de nombreuses écoles destinées aux familles démunies ainsi qu’à un prolétariat naissant.

  • 88 Maurice Fargeon, Les juifs d’Égypte des origines à nos jours, Le Caire, 1938, p. 264.
  • 89 Ibid.

43Les premiers établissements d’enseignement industriel voient le jour dans le contexte de floraison d’écoles privées. S’ils s’inscrivent tous dans un cadre philanthropique, ils connaissent des fortunes variées. La communauté israélite joue un rôle pionnier dans ce mouvement. En février 1897, le comité d’écoles gratuites fonde une école des arts et métiers de garçons afin « de développer parmi la jeunesse indigente des Israélites d’Alexandrie le goût du travail manuel, et d’arriver progressivement à son émancipation »88. L’évolution de cette école est significative. Si la communauté dispose rapidement de locaux qui accueillent trois sections avec leurs ateliers respectifs (menuiserie, cordonnerie, couture), des problèmes de trésorerie viennent contrarier ses ambitions éducatives. Le budget des ateliers étant déficitaire, une solution réside dans le renforcement des liens avec le patronat, en plaçant directement les apprentis chez les industriels alexandrins. L’école se mue alors vers une structure complémentaire, en offrant des cours du soir et en concentrant sa mission sur la transmission culturelle89.

  • 90 À propos de la mission salésienne en Égypte, voir Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à (...)
  • 91 Lieu d’emplacement d’activités textiles depuis l’époque ottomane, Bāb al-Sidra accueille, à partir (...)
  • 92 Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique, op. cit., p. 125.
  • 93 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 353.

44Très actives dans le domaine de l’enseignement populaire, deux missions catholiques, les Salésiens (Italiens) et les Frères des écoles chrétiennes (Français), sont à l’origine d’autres initiatives qui se fixent des objectifs comparables. C’est pour encadrer et scolariser un prolétariat immigré d’origine européenne (italien et maltais avant tout) que les Salésiens s’installent à Alexandrie à la fin du siècle90. Ils ouvrent à cette fin une école des arts et métiers à Bāb Sidra, un arrondissement situé au Sud-Ouest de la ville qui se caractérise par une longue tradition artisanale et une récente activité industrielle91. En 1900, l’école offre six spécialités (menuiserie, typographie, cordonnerie, couture, mécanique et reliure) dont la mécanique et la menuiserie scolarisent à elles seules plus de la moitié des élèves. Le succès de ces filières est à mettre en relation avec l’importance de l’industrie du bâtiment et des activités artisanales qui lui sont liées (menuiserie, travail du fer et de métaux, etc.)92. Les années comprises entre 1900 et 1908 sont en effet particulièrement prospères pour ce secteur industriel, Alexandrie étant, pour reprendre l’expression de Robert Ilbert, en « chantier permanent »93.

  • 94 Archives de l’école salésienne, Alexandrie, 4/C 15, Le père Simonetti à la municipalité, 13 janvie (...)
  • 95 Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique, op. cit., p. 104.

45À l’école des arts et métiers Don Bosco, l’enseignement est largement pratique et orienté vers la production. Tout comme les ateliers modèles gérés par le gouvernement égyptien, elle reçoit des commandes de nombreux clients de la ville, dont les services techniques de la municipalité94. Les réalisations qui sortent des ateliers de l’école alimentent un marché très demandeur en pièces en fer forgé notamment pour les nouveaux immeubles à l’européenne avec balcons qui sont construits partout en ville95.

  • 96 Appelés par le vicaire apostolique Monseigneur Guasco, les missionnaires ouvrent leur première éco (...)
  • 97 Archives de l’Associazione Nazionale per soccorrere i missionari italiani all’estero, Rome, 5/4, l (...)
  • 98 Langue du commerce et des relations extérieures jusqu’en 1850, l’italien perd progressivement son (...)

46Bāb Sidra accueille, à partir de 1898, une deuxième école professionnelle de garçons dirigée par les Frères des écoles chrétiennes, dont la présence à Alexandrie remonte au milieu du siècle96. Elle offre dans un premier temps des formations comparables à celles dispensées par les Salésiens : métiers du livre, mécanique, couture et cordonnerie. Les deux écoles missionnaires ne forment pas seulement aux mêmes métiers, elles se disputent aussi le même public, à savoir le prolétariat européen et la population catholique latine et orientale défavorisée. Les Salésiens craignent en outre que les Frères ne leur soustraient, en plus de la clientèle alexandrine, le public employé par la Compagnie du canal de Suez, à qui ils offrent des conditions de scolarisation particulièrement avantageuses97. L’enseignement que les Frères dispensent en français, langue qui constitue un passeport d’entrée dans la Compagnie, est susceptible de rendre leur école plus attrayante que l’école des Salésiens où tout l’enseignement est assuré en italien98.

  • 99 Souvenir du centenaire de l’arrivée des Frères en Égypte 1847-1947, Alexandrie, École professionne (...)
  • 100 Archives salésiennes centrales, Rome [désormais ASC], F741, Institut Don Bosco d’Alexandrie. Chron (...)
  • 101 Souvenir du centenaire de l’arrivée des Frères en Égypte 1847-1947, op. cit., p. 122.

47Les deux établissements suivent des évolutions différentes et finissent par se révéler plus complémentaires que rivaux. Dans les années 1920, les Frères ferment la section de mécanique par manque de moyens et de personnel qualifié99. Cette décision est aussi liée très vraisemblablement à la concurrence qu’exerce l’école des Salésiens, très proche géographiquement et dont la section de mécanique très prisée fait l’objet de travaux d’élargissements et de rénovation100. Les Frères restent pour leur part spécialisés dans les métiers du livre (typographie et reliure). C’est de l’imprimerie de l’école de Bāb Sidra que sortent la plupart des imprimés à caractère religieux, aussi bien que les manuels scolaires adoptés dans les nombreux établissements d’enseignement que la congrégation dirige en Égypte101.

48À l’est de la ville, Shatbī est à l’instar de Bāb Sidra un quartier en voie d’urbanisation. Plusieurs terrains sont cédés par la municipalité à titre de faveur pour la construction de complexes scolaires. C’est ici que deux grandes écoles industrielles sont érigées au début du XXe siècle (illustrations 2 et 3).

Ill. 2 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Don Bosco

Ill. 2 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Don Bosco

Source : ANSMIE, 5/A, Égypte-Alexandrie, 1913.

Ill. 3 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Muammad ‘Alī

Ill. 3 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Muḥammad ‘Alī

Source : carte postale, s.d. (début XXe siècle), <http://www.delcampe.net>.

  • 102 DWQ, MW, 0075-004821, ministère de l’Instruction publique, Note au Conseil des ministres concernan (...)
  • 103 Al-Jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1905-1906, p. 10.
  • 104 En 1909-1910, sur 349 élèves, 252 sont accueillis à titre gratuit, 44 payent la demi-pension et 53 (...)
  • 105 Al-jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1909-1910.
  • 106 En Angleterre, les boursiers complètent leur formation dans une école technique ou bien sont mis e (...)

49Une souscription lancée en 1903 a permis à la société al-‘ Urwa al-Wuthqā, de récolter 10 000 livres égyptiennes devant servir à l’édification d’un établissement professionnel102. En 1908, le vaste bâtiment de l’école industrielle Muammad ‘Alī est inauguré en grande pompe en présence du Khédive103. Dès la première année, elle s’affirme comme l’une des plus importantes écoles industrielles de la ville scolarisant près de 350 élèves, dont la plupart sont accueillis à titre gratuit104. Proposant une durée d’études de quatre ans, l’école comprend six départements (travaux mécaniques, travaux du bois, ferblanterie, sellerie et cordonnerie, couture et confection d’habillements, imprimerie et reliure). Elle accueille des élèves qui suivent à la fois les cours théoriques (langue arabe et anglaise, dessin, calcul, mécanique, algèbre et chimie) et pratiques, ainsi que des apprentis qui ne s’entrainent qu’à la pratique manuelle dans les différents ateliers105. L’école renoue en outre avec la pratique des missions en Europe, en envoyant une partie de ses élèves et apprentis en Angleterre pour qu’ils y complètent leur formation technique106.

  • 107 Ekaterini Trimi-Kirou, Kinotis grecque d’Alexandrie : sa politique éducative (1843-1932), thèse de (...)

50En 1908, une deuxième école industrielle est fondée à Shatbī par la Kinotis, colonie grecque d’Alexandrie. Portant le nom de la famille de notables qui en a financé la construction, l’école Salvagos (illustration 4) commence à fonctionner en 1908-1909 avec deux départements : la mécanique et la menuiserie. L’année suivante une troisième section, la ferblanterie, y est ajoutée. La durée des études est fixée à trois ans, et l’enseignement y est avant tout pratique. L’évolution de cette école en dit beaucoup sur les priorités que se fixent les notables grecs en matière d’éducation. Si elle acquiert rapidement une bonne réputation, elle est loin d’attirer le nombre d’élèves attendu. Après plusieurs remaniements des curricula et des sections, à la rentrée 1914, la filière industrielle est remplacée par une école commerciale. Plus impliqués dans le négoce que dans l’industrie, les notables grecs estiment qu’une telle filière peut mieux servir leurs intérêts. La courte existence de la section industrielle révèle tout de même l’intérêt suscité par un type d’enseignement qu’ils considèrent comme étant très « moderne » 107.

Ill. 4 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Salvago

Ill. 4 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Salvago

Source : carte postale, s.d. (début XXe siècle), <http://www.delcampe.net>.

  • 108 Dans la chronique salésienne, les Frères sont qualifiés de « pions » à la solde de la France, ASC, (...)
  • 109 Chantal Verdeil, La mission jésuite du Mont-Liban et de Syrie (1830-1864), Paris, Les Indes savant (...)
  • 110 DWQ, MW, 0075-008764, Taqrīr bi-khusūs inshā’ madrasat Muhammad ‘Alī al-sinā‘iyya wa tatwīr al-ta‘ (...)

51En moins de dix ans, cinq écoles industrielles pour garçons voient donc le jour à Alexandrie. La simultanéité de leur fondation frappe tout autant que leur proximité dans l’espace urbain. Si quelques centaines de mètres séparent les écoles professionnelles des missionnaires salésiens et des Frères des écoles chrétiennes à Bāb Sidra, les complexes scolaires Salvagos et Muammad ‘Alī surgissent l’un en face de l’autre en plein cœur de Shatbī. Ce voisinage, aussi bien que la nature des formations offertes, est le reflet de rivalités tout autant que d’une volonté d’émulation. Il éclaire d’abord la vive concurrence entre missions religieuses. Bien qu’elle soit formulée dans un langage aux accents nationalistes108, celle-ci tient moins à l’origine nationale des congrégations qu’à une forme d’esprit de corps comme l’a montré Chantal Verdeil à propos de missions chrétiennes au Proche-Orient109. Pour leur part, les dirigeants de la société al-‘Urwa al-Wuthqā ne cachent pas, du moins dans les discours, la volonté de contrecarrer l’initiative missionnaire en matière d’éducation et de secours aux populations défavorisées. L’ouverture de l’orphelinat al-‘Abbāsī en 1911, qui fournit une partie du public scolaire à l’école industrielle Muhammad Ali, doit permettre « d’abriter une bonne partie des orphelins musulmans accueillis à présent à l’orphelinat de Qalyūb géré par l’American Missionary Association »110.

  • 111 Ekaterini Trimi-Kirou, Kinotis grecque d’Alexandrie, op. cit. p. 323.

52Bien qu’elles poursuivent des objectifs sensiblement différents (revivifier la « grandeur » industrielle de l’Égypte pour les unes, affermir « le prolétariat chrétien » dans la foi pour les autres), les écoles industrielles évoquées s’adressent toutes à des couches populaires qu’il s’agit, dans les intentions des fondateurs, d’accueillir gratuitement ou avec des frais de scolarité réduits. La simultanéité de leur fondation et leur contiguïté spatiale révèlent également, à notre sens, la circulation et le partage d’idées, par-delà les clivages communautaires et confessionnels qui traversent la société alexandrine, concernant le type d’instruction et les modèles pédagogiques à réserver aux classes laborieuses. Cela confirmerait l’hypothèse d’Ekaterini Trimi Kirou selon laquelle l’école Salvagos aurait été fondée moins pour répondre à une demande des Grecs d’Alexandrie que pour montrer à quel point la Kinotis est réceptive aux nouvelles idées en provenance d’Europe ainsi que des milieux réformistes égyptiens sur l’éducation du peuple111.

  • 112 ASC, F383, École des arts et métiers. Origines et objectifs de l’Institut, 1897.
  • 113 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 428 et suiv.
  • 114 Cette dernière a créé un comité spécial chargé de définir les critères pour l’attribution et la ré (...)
  • 115 DWQ, Commission municipale, allocation aux œuvres de bienfaisance pour l’exercice 1915-1916.

53La fondation de ces écoles révèle aussi quelques traits majeurs de l’histoire sociale de la ville en ce début du siècle. Elle atteste tout d’abord de l’activisme missionnaire en matière d’éducation, non seulement dans le but de fabriquer des élites mais aussi, aspect moins étudié dans le contexte alexandrin, de former « de bon chrétiens et d’honnêtes travailleurs »112. La fondation des écoles professionnelles hellénique et israélite atteste par ailleurs de l’évergétisme des notables alexandrins113. Des personnalités comme Costantin Salvagos, qui mettent au service de la communauté qu’ils président une partie de leur fortune (pour la construction d’écoles, d’hôpitaux, et d’autres œuvres de bienfaisance), siègent aussi au conseil municipal. Attribuant des allocations annuelles aux associations ou fondations privées à but charitable, la municipalité complète à partir de 1901 l’action des communautés dans le domaine de la bienfaisance114. Les écoles industrielles dont il a été question se voient alors attribuer une subvention annuelle. Sur 10 000 livres égyptiennes distribuées par la municipalité en 1915, 1 000 sont destinées à l’association al-‘Urwa al-Wuthqā, 50 à l’école des arts et métiers des Pères salésiens et 50 à l’école professionnelle des Frères des écoles chrétiennes. Le reste est reparti entre une centaine d’associations diverses115.

  • 116 L’école juive et l’école des Frères ferment leurs portes au moment où la gratuité de l’enseignemen (...)

54Alexandrie n’est toutefois pas seulement le lieu où se déploient la bienfaisance des notables d’origine étrangère et l’activisme missionnaire. La ville s’affirme aussi, jusque dans le domaine de l’enseignement professionnel, comme un terrain privilégié de l’action des élites réformistes égyptiennes. Avec plus de 500 élèves en 1920, l’école Muammad ‘Alī est la plus grande école industrielle à la veille de l’indépendance formelle de l’Égypte. Elle est par ailleurs l’une des seules à faire preuve de pérennité. Alors que la plupart des écoles évoquées ferment leurs portes entre 1930 et 1950, l’école Muammad ‘Alī se mue progressivement en un institut technique de niveau secondaire. Elle est intégrée en 1953 au réseau des écoles publiques égyptiennes116.

IV. Vers la formation d’une main d’œuvre nationale

55Au tournant du XXe siècle, une pluralité d’acteurs investit l’enseignement industriel. Autour de celui-ci, s’agrègent différents projets qui vont de la réforme sociale à la renaissance des industries traditionnelles égyptiennes. Les années 1905-1919 sont le moment de l’éclosion d’un débat, qui se développe notamment autour de la revue l’Égypte contemporaine, sur la petite industrie et sa revivification à travers un enseignement industriel rénové. Portés par une partie des élites égyptiennes, ces projets se concrétisent dans la fondation de plusieurs écoles industrielles. Cette réflexion se développe à une période où les Britanniques eux-mêmes commencent à s’interroger sur la possibilité d’une réforme de l’éducation et sur le rôle de l’État dans ce processus. Cela aboutit à la mise en place de l’administration de l’enseignement technique. L’État ne joue toutefois qu’un rôle d’encadrement durant la période examinée. La fondation des nouvelles écoles est surtout le fait de l’initiative privée, qui se développe majoritairement dans un cadre philanthropique comme l’exemple alexandrin a permis de le montrer.

  • 117 Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique, op. cit., p. 300 et suiv

56Beaucoup de questions ayant trait aux publics scolaires et aux contenus des formations demeurent ouvertes. Les écoles industrielles sont-elles fréquentées par les classes les plus pauvres auxquelles elles se destinent en priorité ? Le cas de l’école des arts et métiers des Pères salésiens, fréquentée dans les années 1920 par un public de petite classe moyenne, semble suggérer que les écoles sont progressivement investies par d’autres catégories sociales que celles originairement ciblées117. Nous avons choisi d’analyser la mise en place des formations liées aux métiers industriels et à l’artisanat urbain. Il pourrait être fécond de les mettre en parallèle avec les sections commerciales et agricoles, d’autant plus que l’administration de l’enseignement technique a vocation à diriger les trois branches. Certaines écoles (telles que les écoles de Beni Souef, d’Abū Tīj et de Louxor) comprennent en effet une double section, industrielle et agricole. Nous avons relevé par ailleurs la mise en place de spécialités masculines et féminines. Une étude plus particulièrement centrée sur les articulations entre formation professionnelle et construction du genre reste à faire.

  • 118 Voir à ce propos l’ouvrage de Caroline Picquet, Histoire du Canal de Suez, Paris, Perrin, 2009 et (...)
  • 119 George George, « L’Enseignement technique et orientation professionnelle », L’Égypte contemporaine(...)

57Enfin, il serait intéressant de prolonger la réflexion jusqu’aux années de l’entre-deux-guerres et d’interroger les continuités durant la période monarchique (1922-1952). Les bases du dispositif d’enseignement technique sont développées au lendemain de l’acquisition de l’indépendance formelle. Au moment où le nationalisme économique devient un élément majeur de la lutte nationaliste118, les écoles industrielles, qu’elles soient publiques ou privées, sont chargées d’une nouvelle mission : la formation d’une main d’œuvre nationale119. Ces pistes de recherche apporteraient de nouveaux éclairages, non seulement sur un secteur éducatif peu exploré et la mise en place d’une économie de la formation professionnelle, mais aussi plus largement sur une histoire sociale de l’Égypte contemporaine.

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Notes

1 Ce travail a été réalisé dans le cadre du laboratoire d’excellence LabexMed-Les sciences humaines et sociales au cœur de l’interdisciplinarité pour la Méditerranée, portant la référence 10-LABX-0090. Il a bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence nationale de la recherche au titre du projet Investissements d’Avenir A*MIDEX n° ANR-11-IDEX-0001-02.

2 Pascal Crozet, Les sciences modernes en Egypte. Transfert et appropriation (1805-1902), Paris, Geuthner, 2008, p. 123 et suiv.

3 Nazan Maksudyan, « Orphans, Cities and the State: Vocational Orphanages (“Islahhanes”) and the Reform in the Late Ottoman Urban Space », International Journal of Middle East Studies, vol. 43, no 3, août 2011, p. 493-511 ; Hamid Irbouh, Art in the Service of Colonialism: French Art Education in Morocco, 1912-1956, Londres, I. B. Tauris, 2013 ; Stéphane Lembré, « L’enseignement technique industriel en Algérie : projets et enjeux (1900-1958) », Artefact. Techniques, histoires et sciences humaines, no 3, 2015, p. 83-96. Pour ce qui est de l’Égypte, l’ouvrage d’Emile Fahmī Shannūda demeure une référence incontournable : Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī ḥattā thawra 23 yūlyū 1952, Le Caire, Dār al-kātib, 1967. Élisabeth Longuenesse s’est pour sa part intéressée aux diplômés des filières industrielles entre 1943 et 1974 : « Diplômes industriels et service de l’État : les fantassins de la modernisation de l’Égypte. Remarques sur l’histoire de l’Association des diplômés de l’école industrielle (1943-1974) », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, no 101-102, 2003, p. 175-197.

4 Sur la formation des ingénieurs égyptiens au XIXe siècle, voir Ghislaine Alleaume, L’école polytechnique du Caire et ses élèves. La formation d’une élite technique dans l’Égypte du XIXe siècle, thèse pour le doctorat d’État, université Lumière Lyon 2, 1993. Pour l’apprentissage dans le cadre corporatif, voir Pascale Ghazaleh, Masters of the Trade: Crafts and Craftspeople in Cairo, 1750-1850, Cairo Papers in Social Science, vol. 22, no 3, Le Caire, American University in Cairo Press, 1999.

5 Je fais référence ici à l’expression utilisée par l’historienne américaine Mine Ener pour qualifier les nouvelles formes de bienfaisance qui se développent au début du XXe siècle : Mine Ener, Managing Egypt’s Poor and the Politics of Benevolence 1800-1952, Princeton, Princeton University Press, 2003, p. 105.

6 Frédéric Abécassis, « L’enseignement du français en Égypte dans les années 1920 : une nébuleuse à plusieurs degrés de francité », Documents pour l’histoire du français langue étrangère ou seconde, no 27, 2001, En ligne : <https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/dhfles/2576> (consulté le 18 avril 2016).

7 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne 1830-1950. Genèse et essor d’une expertise locale, Paris, Maisonneuve et Larose, 2005, p. 135.

8 À ce sujet, voir Ghislaine Alleaume, L’école polytechnique du Caire…, op. cit., p. 203 et suiv.

9 Donald M. Reid, « Educational and Career Choices of Egyptian Students, 1822-1922 », International Journal of Middle East Studies, vol. 8, no 3, 1977, p. 359.

10 Émile Fahmī Shannūda, Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī…, op. cit., p. 194.

11 Dār al-wathā’iq al-qawmiyya (Archives nationales égyptiennes), Le Caire [désormais DWQ], Majlis al-wuzarā’ (Présidence du Conseil des ministres) [désormais MW], 0075-044807, Règlement de l’École des arts et métiers proprement dite, 1899 ; DWQ, MW, 0075-059720, ministère de l’Instruction publique. Note au Conseil des ministres relative aux modifications proposées pour l’École khédiviale des arts et métiers, juin 1902.

12 Émile Fahmī Shannūda, Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī…, op. cit., p. 195.

13 Evelyn Baring, Rapport sur l’Égypte et le Soudan pour l’année 1905, Le Caire, Imprimerie nationale, 1906-1907, p. 116.

14 Foreign Office [désormais FO], 407/165, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence January-March 1906, p. 107.

15 FO, 407/175, Affairs of Egypt and Sudan. Further Correspondence, 1910, p. 304.

16 FO, 407/165, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence January-March 1906, p. 117.

17 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne, op. cit., p. 233.

18 FO, 407/165, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence January-March 1906, p. 117.

19 Avocat, Sa‘ad Zaghlûl est le futur leader du parti nationaliste Wafd, parti issu de la délégation dépêchée en 1919 à la conférence de Versailles pour demander l’indépendance de l’Égypte. Il fédère autour de lui le mouvement national égyptien.

20 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne, op. cit., p. 230.

21 FO, 407/172, Affairs of Egypt and Sudan. Further Correspondence, 1908, p. 112.

22 Mercedes Volait, Architectes et architectures de l’Égypte moderne, op. cit., p. 233.

23 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole, industriel et commercial en Égypte », L’Égypte contemporaine, no 7, 1911, p. 345-346.

24 DWQ, MW, 0075-044821, Règlement concernant l’exemption du service militaire pour les élèves des écoles industrielles et des écoles d’agriculture libres [en arabe], 20 février 1909.

25 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole… », art. cit., p. 350.

26 Ibid., p. 353.

27 Hanan Hammad, Industrial Sexuality. Gender, Urbanization and Social Transformation in Egypt, University of Texas Press, 2016, p. 5.

28 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole… », art. cit., p. 353.

29 Ibid.

30 FO, 407/ 164, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1905, p. 133.

31 British Library, Londres [désormais BL], IOR/ L/PJ/6 1414, « Technical Education in Egypt », The Times, 22 septembre 1915.

32 FO, 407/ 164, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1905, p. 132.

33 FO, 407/175, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1911, p. 85.

34 FO, 407/172, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1908, p. 112.

35 DWQ, MW, 0075-044821, Note au Conseil des ministres sur le projet de subventions aux écoles industrielles libres [en arabe], 18 mars 1909.

36 FO, 407/182, Affairs of Egypt and Sudan. Further correspondence, 1914, p. 58.

37 FO, 848/7, Milner Mission, vol 7., Technical, Industrial and Commercial Education, Note from the Director-general (Mr. S.H. Wells) on the present position and needs of Technical, Industrial and Commercial Education, mars 1917, p. 12.

38 BL, IOR/ L/PJ/6 1414, « Technical Education in Egypt », The Times, 22 septembre 1915.

39 J. W. A. Young, A little to the East. Experience of an Anglo Egyptian Official 1899-1925, unpublished MS, St Anthony Private Papers, Oxford University, ch. 7, f. 5-6.

40 De manière générale, l’enseignement féminin, qu’il soit dispensé dans les Kuttābs (écoles élémentaires) ou dans les écoles primaires gouvernementales ou missionnaires est orienté vers la formation des jeunes filles aux devoirs de mères et d’épouses. Les femmes sont aussi formées aux métiers de l’enseignement. Cette formation est dispensée depuis 1900 à l’école Saniyya, puis aussi à l’école normale de Būlāq. Voir Mona Russell, Creating the New Egyptian Woman. Consumering, Education and National Identity, 1863-1922, Basingstoke, Palgrave MacMillan, 2004, p. 117 et suiv.

41 Judith E. Tucker, Women in nineteenth Century Egypt, Cambridge, Cambridge University Press, 1985, p. 64 et suiv. et Hanan Hammad, Industrial Sexuality, op. cit., p. 120 et suiv.

42 FO, 407/ 178 Affairs of Egypt and Sudan, Further Correspondence, janvier-juin 1912, p. 113.

43 FO, 848/7, Milner Mission, vol. 7., Technical, Industrial and Commercial Education, S.H. Wells, « Proposals for development of the work of the Department during the period 1920-1925 », 1919, p. 13.

44 Ibid.

45 À propos de l’émergence des associations de bienfaisance, voir Lisa Pollard, « Egyptian by Association: Charitable States and Service Societies, circa 1850-circa 1950 », International Journal of Middle East Studies, vol. 46, no 2, mai 2014, p. 239-257.

46 Au-delà de l’aumône rituelle (zakāt), les œuvres de bienfaisance sont assurées par différentes institutions à la fin du XIXe siècle. Elles prennent la forme de dons à titre individuel ou de fondations pieuses (waqf). Sous le règne de Mehmet Ali (1805-1848), l’État intervient de manière plus large dans le domaine de la bienfaisance. D’autres initiatives sont prises par le ministère des Waqfs. Voir Mine Ener, Managing Egypt’s Poor…, op. cit., p. 45 et suiv.

47 À propos de la question de la réforme, voir Alain Roussillon (dir.) Entre réforme sociale et mouvement national : identité et modernisation en Égypte (1882-1962), Le Caire, Cedej, 1995 ; ainsi que le numéro spécial de la revue Égypte/Monde arabe coordonné par Frédéric Abecassis et Sylvia Chiffoleau (à paraître à l’automne 2018).

48 Gilbert Delanoue, « Endoctrinement religieux et idéologie ottomane : l’adresse de Muhammad ‘Abdu au Cheikh al Islam, Beyrouth 1887 », Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, no 1, 1973, p. 294.

49 Alain Roussillon, « Réforme sociale et production des classes moyennes. Muhammad ‘Umar et “l’arriération des Égyptiens” », in Alain Roussillon (dir.) Entre réforme sociale et mouvement national, op. cit., p. 58 et 81.

50 Iman Farag, « Enjeux éducatif et réforme sociale », in Alain Roussillon (dir.) Entre réforme sociale et mouvement national, op. cit., p. 201.

51 Linda Herrera, « The Soul of a Nation: ‘Abdallah Nadim and educational reform in Egypt (1845-1896) », Mediterranean Journal of Educational Studies, vol. 7, no 1, 2002, p. 5.

52 Al-Jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1905-1906, p. 15.

53 Dina El-Khawaga, « Le renouveau copte actuel : raisons d’émergence et modes de fonctionnement », in Cedej et al. (dir.), Modernisation et nouvelles formes de mobilisation sociale, vol. 1 : Égypte-Brésil (1970-1989), Le Caire, Cedej, 1991, p. 119.

54 Mine Ener, Managing Egypt’s Poor…, op. cit., p. 100.

55 Malgā abnā’ al-sabīl, Al-mar’a al-misriyya, mars 1924, p. 307-311.

56 Al-jam‘iyya al-‘urwa al-wuthqā, Taqrīr sanawī, 1905-1906, p. 17.

57 Beth Baron, The Women’s Awakening in Egypt: Culture, Society and the Press, New Haven, Yale University Press, 1994, p. 172.

58 « Fī wirash al-mar’a al-jadīda », al-mar’a al-misriyya, decembre 1928, p. 123.

59 Beth Baron, Egypt as a Woman. Nationalism, Gender and Politics, Berkeley, University of California Press, 2005, p. 197.

60 « Malgā al-atfāl wa al-wilāda bi- Qasr al-‘Ayni», al-mar’a al-misriyya, décembre 1920, p. 353 ; « Al-jam‘iyya al-mar’a al-Jadīda », al-mar’a al-misriyya, février 1921, p. 67.

61 Il s’agit de l’organe de presse (publié en français) de la Société khédiviale d’économie politique, de statistique et de législation fondée au Caire en 1905. La SKEP est la première société savante à se consacrer aux sciences sociales et à l’analyse des problèmes contemporains. Voir Omnia El Shakri, The Great Social Laboratory: Subjects of Knowledge in Colonial and Postcolonial Egypt, Stanford, Stanford University Press, 2007 et Malak Labib, La statistique d’État en Égypte à l’ère coloniale : finances, espace public et représentation (1875-1922), thèse de doctorat, université d’Aix-Marseille, 2015.

62 Alain Roussillon, « Le partage des savoirs. Effets d’antériorité du savoir colonial en Égypte », Annales islamologiques, vol. 26, 1992, p. 237. Voir René Maunier, « Des rapports entre le progrès de la richesse et l’accroissement de la criminalité en Égypte », L’Égypte contemporaine, vol. 3, no 9, 1912, p. 27-42 et Mahmoud Sami, « Traitement de l’enfance coupable et moralement abandonnée », L’Égypte contemporaine, vol. 4, no 16, p. 561-581.

63 Entre 1891 et 1909, plusieurs lois criminalisant et punissant le vagabondage sont promulguées. La loi sur les enfants vagabonds est édictée en 1908 (loi no 2). La même année, l’École de la réforme, visant à renfermer les jeunes délinquants et vagabonds, est réorganisée au Caire. Voir Mine Ener, Managing Egypt’s Poor…, op. cit. p. 114.

64 Muhammad Sultan, Le problème de l’apprentissage en Égypte et le rôle de l’enseignement technique, thèse de doctorat, université de Lyon, 1917, p. 102.

65 Hélène Cottenet-Djoufelkit, « L’industrialisation de l’Égypte au XXe siècle », Égypte/ Monde Arabe, no 4-5, 2/2000-1/2001, p. 136.

66 Voir à ce sujet, Kristin Koptiuch, « Other Workers: A critical Reding of Representations of Egyptian Petty Commodity Production at the Turn of the 20th Century », in Zackary Lockman (dir.), Workers and Working Classes in the Middle East: Struggles, Histories, Historiographies, Albany, State University of New York Press, p. 60.

67 W. V. Shearer, « Report on the Weaving Industry in Assiout », L’Égypte contemporaine, vol. 1, no 1, 1910, p. 184-186 ; Attya Chenouda, « Notes sur l’industrie du tissage », L’Égypte contemporaine, vol. 1, n1, 1910, p. 187-191 ; Norman Ablett, « Notes on the Industries of Assiut made during june-july 1909 », L’Égypte contemporaine, vol. 1, no 2, 1910, p. 328-333 ; F. Moore Gordon, « Notes on the Weaving industry at Mehalla-Kebir », L’Égypte contemporaine, vol. 1, no 2, 1910, p. 334-339 ; Sidney Wells, « Note préliminaire sur l’industrie du tissage en Égypte », L’Égypte contemporaine, vol. 1, no 4, 1910, p. 578-584 ; « L’industrie du tissage (suite) », L’Égypte contemporaine, vol. 2, no 1, 1911, p. 52-73.

68 Voir à ce sujet, Malak Labib, La statistique d’État en Égypte à l’ère coloniale, op. cit., p. 334.

69 Le monopole corporatif est officiellement aboli en 1854. Les réformes entreprises par les Britanniques privent les corporations de leur rôle fiscal et en accélèrent le déclin. Voir John T. Chalcraft, The striking Cabbies and Other Histories. Crafts and Guilds in Egypt, 1863-1914, Albany, State University of New York Press, 2004.

70 René Maunier, « L’apprentissage dans la petite industrie en Égypte, l’organisation actuelle, les réformes possibles », L’Égypte contemporaine, no 3, 1912, p. 353.

71 Jean Vallet, Contribution à l’étude de la condition des ouvriers de la grande industrie au Caire, Valence, Imprimerie Valentinoise, 1911, p. 22.

72 DWQ, MW, 0075-008764, Taqrīr bi-khusūs inshā’ madrasat Muhammad ‘Alī al-sinā‘iyya wa tatwīr al-ta‘līm al-sinā‘i al-mihnī sanat 1911, p. 8.

73 La politique d’industrialisation de Mohammed Ali (1805-1848) vise à réduire les importations et à assurer l’autosuffisance de l’Égypte en matière d’armement et d’équipement militaire. La convention commerciale anglo-turque (1838), puis le traité de Paris (1841) mettent fin à cette première expérience d’industrialisation.

74 FO, 407/175 Affairs of Egypt and Sudan. Further Correspondence, janvier-mars 1906, p. 159.

75 Sidney H. Wells, « L’organisation et le développement de l’enseignement agricole… », op. cit., p. 359.

76 Hanan Hammad, Industrial Sexuality, op. cit., p. 5.

77 Emile Fahmī Shannūda, Tārīkh al-ta‘līm al-ṣinā‘ī…, op. cit., p. 201.

78 Muhammad Sultan, Le problème de l’apprentissage en Égypte…, op. cit., p. 91.

79 Ministry of Finance, Statistical returns of pupils attending public and private schools in Egypt for the year 1906-1907, Cairo, National Printing Department, 1907, p. 71, 77 et 78.

80 Michael J. Reimer, Colonial Bridgehead: Government and Society in Alexandria, 1807-1882, Boulder, West View Press, 1997, p. 121.

81 C’est parmi les ouvriers des transports et les cigarettiers d’Alexandrie que les premières organisations ouvrières voient le jour à la fin du XIXe siècle. Voir à ce sujet Joel Beinin et Zackary Lockman, Workers on the Nile. Nationalism, Communism, Islam and the Egyptian Working Class, 1882-1954, Princeton, Princeton University Press, 1987, p. 40.

82 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930. Histoire d’une communauté citadine, Le Caire, IFAO, p. 245.

83 Frédéric Abécassis, « De la protection par l’école : la sédimentation des traditions d’enseignement en Égypte au XIXe siècle », in B. Delpal, B. Hours, C. Prudhomme (dir.), France-Levant, de la fin du XVIII siècle à la Première Guerre mondiale, Paris, Geuthner, 2005, p. 128.

84 Frédéric Abécassis, « L’enseignement étranger en Égypte (1930-1960) », Aujourd’hui l’Égypte, 1995, p. 100. En ligne : <https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-00159189/document> (consulté le 18 avril 2016).

85 Sur l’ensemble du territoire égyptien, les écoles étrangères représentent 41 % des établissements et 36,7 % des effectifs en 1906. En 1933-1934, elles scolarisent à Alexandrie le même nombre d’élèves que les écoles égyptiennes modernes. Voir Fréderic Abécassis, « Alexandrie 1929. Réflexions sur le cosmopolitisme à l’École française », Cahiers de la Méditerranée, n° 67, 2003, p. 205.

86 Voir à ce propos, Elena Chiti, Écrire à Alexandrie (1879-1940). Capital social, appartenances, mémoire, thèse de doctorat, université d’Aix-Marseille, 2013, p. 94 et suiv.

87 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 648.

88 Maurice Fargeon, Les juifs d’Égypte des origines à nos jours, Le Caire, 1938, p. 264.

89 Ibid.

90 À propos de la mission salésienne en Égypte, voir Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique. Missionnaires italiens en Égypte : les Salésiens et l’enseignement professionnel (1897-1970), thèse de doctorat, université d’Aix-Marseille, 2016.

91 Lieu d’emplacement d’activités textiles depuis l’époque ottomane, Bāb al-Sidra accueille, à partir de 1880, des ateliers, des entrepôts et des industries de petite et moyenne taille (moulins à vapeur, fabriques de cigarettes, fonderies mécaniques, verreries). Voir Stefano Poffandi, Indicateur égyptien administratif et commercial, Alexandrie, Imprimerie générale, 1897, p. 190 et suiv.

92 Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique, op. cit., p. 125.

93 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 353.

94 Archives de l’école salésienne, Alexandrie, 4/C 15, Le père Simonetti à la municipalité, 13 janvier 1915.

95 Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique, op. cit., p. 104.

96 Appelés par le vicaire apostolique Monseigneur Guasco, les missionnaires ouvrent leur première école en 1847. Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 451.

97 Archives de l’Associazione Nazionale per soccorrere i missionari italiani all’estero, Rome, 5/4, le père Puddu à Schiaparelli, 19 février 1910.

98 Langue du commerce et des relations extérieures jusqu’en 1850, l’italien perd progressivement son prestige en Égypte. Elle reste tout de même répandue dans l’univers des usines et des ateliers industriels, ce qui explique l’attrait qu’exerce l’école Don Bosco malgré la crainte des religieux.

99 Souvenir du centenaire de l’arrivée des Frères en Égypte 1847-1947, Alexandrie, École professionnelle des Frères, 1947, p. 123.

100 Archives salésiennes centrales, Rome [désormais ASC], F741, Institut Don Bosco d’Alexandrie. Chronique de la fondation à 1937, p. 40.

101 Souvenir du centenaire de l’arrivée des Frères en Égypte 1847-1947, op. cit., p. 122.

102 DWQ, MW, 0075-004821, ministère de l’Instruction publique, Note au Conseil des ministres concernant les subventions des écoles industrielles privées, Le Caire, 18 mars 1909.

103 Al-Jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1905-1906, p. 10.

104 En 1909-1910, sur 349 élèves, 252 sont accueillis à titre gratuit, 44 payent la demi-pension et 53 s’acquittent de l’intégralité des frais scolaires. Al-Jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1909-1910.

105 Al-jam‘iyya al-‘Urwa al-Wuthqā, Taqrīr sanawī, 1909-1910.

106 En Angleterre, les boursiers complètent leur formation dans une école technique ou bien sont mis en apprentissage dans des ateliers privés. ‘Aliyya Farag, Al-ta‘līm fī Misr bayna al-juhūd al-ahliyya wa al-ḥukūmiyya, al-Iskandariyya, al-nāshir al-ma‘ārif bi-l-Iskandariyya, 1976, p. 169.

107 Ekaterini Trimi-Kirou, Kinotis grecque d’Alexandrie : sa politique éducative (1843-1932), thèse de doctorat, université de Strasbourg 2, 1996, p. 295.

108 Dans la chronique salésienne, les Frères sont qualifiés de « pions » à la solde de la France, ASC, F741, Institut Don Bosco d’Alexandrie, Chronique de la fondation jusqu’en 1937, p. 5.

109 Chantal Verdeil, La mission jésuite du Mont-Liban et de Syrie (1830-1864), Paris, Les Indes savantes, 2011, p. 133. À propos de la prise en charge des orphelins et des enfants abandonnés dans l’Égypte de l’entre-deux-guerres, voir Beth Baron, The orphan scandal. Christian Missionaries and the Rise of the Muslim Brotherhood, Standford, Stanford University Press, 2014.

110 DWQ, MW, 0075-008764, Taqrīr bi-khusūs inshā’ madrasat Muhammad ‘Alī al-sinā‘iyya wa tatwīr al-ta‘līm al-sinā‘i al-mihnī sanat 1911, p. 8.

111 Ekaterini Trimi-Kirou, Kinotis grecque d’Alexandrie, op. cit. p. 323.

112 ASC, F383, École des arts et métiers. Origines et objectifs de l’Institut, 1897.

113 Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 428 et suiv.

114 Cette dernière a créé un comité spécial chargé de définir les critères pour l’attribution et la répartition des allocations parmi les différents établissements de bienfaisance. Robert Ilbert, Alexandrie 1830-1930, op. cit., p. 436.

115 DWQ, Commission municipale, allocation aux œuvres de bienfaisance pour l’exercice 1915-1916.

116 L’école juive et l’école des Frères ferment leurs portes au moment où la gratuité de l’enseignement devient une prérogative de l’État égyptien dans les années 1950. En revanche, l’école des Salésiens parvient à s’ancrer durablement à Alexandrie. Elle attire quelques centaines d’élèves dans les années 1950 auxquels elle offre des formations axées sur la mécanique et l’électrotechnique.

117 Annalaura Turiano, De la pastorale migratoire à la coopération technique, op. cit., p. 300 et suiv.

118 Voir à ce propos l’ouvrage de Caroline Picquet, Histoire du Canal de Suez, Paris, Perrin, 2009 et l’article de Didier Monciaud, « L’Égyptien pour l’Égyptien (1930-1931). Campagne nationaliste économique et controverse sur l’identité », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, no 95-98, 2002, p. 355-380.

119 George George, « L’Enseignement technique et orientation professionnelle », L’Égypte contemporaine, vol. XIX, n° 110, déc. 1928, p. 589-598.

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Title Ill. 1A : Les apprentis de l’orphelinat Abnā’ al-sabīl au Caire (1)
Credits Source : ‘Al-malgā abnā’al-sabīl’, al-mar’a al-misriyya, mars 1924.
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Title Ill. 1B : Les apprentis de l’orphelinat Abnā’ al-sabīl au Caire (2)
Credits Source : ‘Al-malgā abnā’ al-sabīl’, al-mar’a al-misriyya, mars 1924.
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Title Ill. 2 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Don Bosco
Credits Source : ANSMIE, 5/A, Égypte-Alexandrie, 1913.
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Title Ill. 3 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Muammad ‘Alī
Credits Source : carte postale, s.d. (début XXe siècle), <http://www.delcampe.net>.
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Title Ill. 4 : les écoles professionnelles d’Alexandrie au début du XXe siècle : L’école Salvago
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References

Bibliographical reference

Annalaura Turiano, “État, réformistes et philanthropes : un état des lieux de l’offre d’enseignement industriel dans l’Égypte coloniale (1882-1919)”Histoire de l’éducation, 148 | 2017, 41-70.

Electronic reference

Annalaura Turiano, “État, réformistes et philanthropes : un état des lieux de l’offre d’enseignement industriel dans l’Égypte coloniale (1882-1919)”Histoire de l’éducation [Online], 148 | 2017, Online since 31 December 2020, connection on 09 October 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/histoire-education/3389; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/histoire-education.3389

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