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Dossier

« This is me not caring » : la négociation des compétences dites féminines dans le monde professionnel de the good wife

Barbara Dupont

Résumés

Fermement attachées au rôle de mère et impliquées dans la prétendue essentialisation du lien entre les femmes et la sphère domestique, les compétences dites féminines sont largement dépréciées dans un monde du travail qui demeure soigneusement genré. En approchant la fiction populaire comme une possible lecture en creux de la réalité sociale, cette analyse se penche sur le monde professionnel fictif de la série américaine The Good Wife (CBS, 2009-2016). L’objectif de cet article est d’identifier les stratégies mobilisées par la série pour articuler le féminin et le masculin dans un contexte où ils peuvent sembler mutuellement exclusifs, en interrogeant ce que fait le cadre professionnel au féminin, et inversement. Cette recherche décèle, au sein de la série, plusieurs formes de perturbation du féminin, dans les limites d’un féminisme blanc néolibéral.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 « foreground the reality that the traditional feminine sphere of the home remains painfully exclusi (...)
  • 2 « The construction of gender is both the product and the process of its representation »

1Depuis sa seconde vague, un rôle essentiel du féminisme a été de « mettre au premier plan la réalité selon laquelle la sphère traditionnellement féminine du foyer demeure douloureusement hermétique au monde du travail, et presque entièrement le domaine des femmes »1 (Whelehan, 2010 : 156, ma traduction). À cet espace domestique est immanquablement associé une série de compétences, de valeurs et d’attributs qui, par extension, restent liés aux femmes lorsqu’elles pénètrent le cadre professionnel. Par sa fonction de « mise en lisibilité de la réalité sociale » (Chalvon-Demersay, 2000 : 852), la fiction permet une lecture en creux des mécanismes à l’œuvre dans cette répartition des compétences entre femmes et hommes, entre féminin et masculin dans notre société, mais elle autorise également à explorer des stratégies d’approche nouvelles proposées par les textes fictionnels, qui ne se contentent pas de refléter le réel, mais qui le configurent activement (852). A fortiori, les textes issus de la culture populaire et donc massivement consommés se révèlent être des lieux cruciaux de représentation, et donc de construction des enjeux sociaux, notamment le genre. Pour Teresa de Lauretis, les textes culturels populaires peuvent en effet être compris comme des « technologies du genre », dans le sens où « la construction du genre est à la fois le produit et le processus de sa représentation »2 (1987 : 9, ma traduction). Ainsi, ces textes sont engagés dans un processus de réciprocité entre leur monde imaginé et la réalité sociale, et sont non seulement marqués par les normes de genre, mais les produisent également.

  • 3 « contributes to making some stereotypes uninhabitable [… or] might allow certain depictions (such (...)

2Dans cette perspective, cet article s’intéresse à la représentation des personnages féminins dans le monde professionnel fictif de la série américaine grand public The Good Wife (King et King, CBS, 2009-2016) et plus particulièrement, à la façon dont la série articule les compétences traditionnellement perçues comme féminines dans un cadre professionnel davantage chargé de valeurs associées au masculin. Il s’agira donc d’identifier les stratégies mobilisées par la série pour articuler le féminin et le masculin dans un contexte où ils peuvent sembler mutuellement exclusifs, en interrogeant ce que fait le cadre professionnel au féminin, et inversement. Ainsi, en mettant en lumière différentes stratégies d’approches du féminin dans The Good Wife, cet article vise également, en filigrane, à encourager une réflexion sur la capacité des séries grand public à « contribuer à rendre certains stéréotypes inhabitables » ou à « permettre à certaines représentations […] de prendre de nouvelles significations »3 (Lotz, 2006 : 20, ma traduction).

3Créée par le couple formé par Michelle et Robert King, The Good Wife est une série dramatique dont les sept saisons ont été diffusées par le network américain CBS entre 2009 et 2016. En termes de réception, elle rassemblait hebdomadairement entre 11 et 13 millions de téléspectateurs et a remporté plusieurs récompenses, dont les prestigieux Emmy Awards et Golden Globes. Puisant son inspiration dans deux univers professionnels distincts, mais qui, dans le cadre de la série se confondent, The Good Wife peut être décrite comme un drame politico-légal. Nous y suivons le retour d’Alicia Florrick dans le monde du travail après plus de dix ans d’absence, après qu’elle a été confrontée à un scandale impliquant son époux, Peter Florrick. Ce dernier est envoyé en prison, tandis qu’Alicia se relance dans sa carrière d’avocate abandonnée à l’époque au profit de ses deux enfants, Zach et Grace, aujourd’hui adolescents.

Aspects méthodologiques

4L’approche employée s’attardera moins sur les ressorts narratifs mobilisés par la série, que sur les caractéristiques du monde sériel en tant que tel, en choisissant comme points d’ancrage les personnages qui l’habitent. Si s’intéresser exclusivement aux habitants du monde fictif de la série peut sembler n’offrir qu’un point de vue partiel sur l’idéologie qui anime celle-ci, Philippe Hamon rappelle pourtant que le personnage renferme en lui le sens du récit et fonctionne comme « ‘unité’ à la fois constituante et constituée, synthèse simultanée d’événements sémantiques alignés, régissante de l’intrigue et régie par elle » (2011 [1986] : 19). Se focaliser sur le personnage du récit comme résultat « d’une construction, d’un effet de cohésion, d’un effet de lisibilité » (7), c’est donc révéler les principes organisateurs de la diégèse. Par ailleurs, « les personnages imaginés ont […] l’énorme avantage, par rapport aux acteurs sociaux réels, d’être moins contingents. Plus stylisés, plus cohérents, plus expressifs, plus prévisibles » (Chalvon-Demersay, 2005 : 81-82), rendant dès lors la lecture du monde fictif plus aisée. Ainsi, leur analyse permet de « faire de la cohérence des personnages un levier analytique pour accéder à leur univers logique et normatif » (81). Il s’agira donc d’identifier, à travers la caractérisation des différents personnages, des constantes qui nous éclairent sur les représentations véhiculées par la série et les pistes de réflexion qui peuvent en être dérivées.

5En s’appuyant sur l’application que propose Sarah Sepulchre des travaux de Philippe Hamon, le personnage sera donc appréhendé « non comme une personne, mais comme une représentation » (2007 : 82) construite progressivement au fil du texte, de façon directe et indirecte. De façon directe, cette caractérisation s’opère « dans le discours des personnages, [et] par l’instance responsable de la narration (description physique, psychologique ou sociale, commentaires de l’instance narrative) ». De façon indirecte, la caractérisation du personnage se révélera « par ses actions (action unique, répétitive ou itérative ; potentielle ou réalisée), par son nom (prénom, surnom), par son statut social (généalogie, rôle social ou familial), et par son environnement ou son habillement » (Pawliez, 2011 : 192).

6La première partie de cet article sera destinée à établir une sorte de cartographie du féminin dans sa relation au pouvoir professionnel décrit dans la série, notamment via les personnages périphériques féminins qui y occupent régulièrement des positions largement investies en réalité par les hommes. C’est bien la description du monde professionnel proposée par The Good Wife qui sera ici explicitée. La deuxième partie de ce texte portera sur la manière dont la série valorise et déjoue les supposées spécificités féminines dans un univers professionnel traditionnellement connoté comme masculin, en se penchant sur la caractérisation de l’héroïne, Alicia, en lien avec la sphère domestique, puis en explorant l’une des spécificités de la série : l’évolution graduelle de son héroïne à cet égard. Enfin, la dernière section prolongera la réflexion entamée sur les compétences labélisées féminines en l’emboîtant dans l’argument de l’essentialisation du rôle de mère accolé aux femmes. Il s’agira alors d’explorer les modalités de représentation de ces compétences du care dans la série, qui tente de traduire de différentes façons l’aspect construit et arbitraire de ce lien. Les compétences de care doivent être comprises, dans le cadre de cet article, comme les compétences développées par la « réponse concrète aux besoins des autres – travail domestique, de soin, d’éducation, de soutien ou d’assistance, entre autres », souvent attribué à une supposée nature féminine (Molinier, Laugier et Paperman, 2009 : 11-12), et que nous appellerons travail de care.

L’accès à la sphère professionnelle dans The Good Wife

Faire apparaître les femmes où elles manquent

  • 4 Les networks sont les chaînes télévisées américaines gratuites et régulées au niveau fédéral.
  • 5 Le rapport ajoute que le genre télévisuel dans lequel les personnages féminins sont les plus représ (...)

7The Good Wife se distingue dans un premier temps pour une simple raison : la série est portée par un personnage principal féminin, Alicia. Si les héroïnes sérielles ne font aujourd’hui plus figures d’exception, il convient de se demander dans quelle mesure elles contribuent à diversifier les représentations du féminin, ses normes et ses modalités (Courcoux, 2015 : 78). Par ailleurs, le paysage télévisuel actuel demeure marqué par une présence masculine majoritaire au centre de ses programmes. Ainsi, le rapport annuel Hollywood Diversity observe que la part de rôles principaux réservés aux femmes dans les fictions de networks4 se maintient depuis trois ans autour de 36 % (Hunt et al., 2018 : 15). En élargissant l’observation à l’entièreté des rôles occupés par des femmes, la proportion monte à 44 % (15), sachant que le type de programme dans lesquels les personnages féminins sont les moins représentés est le type de programme le plus représenté sur nos écrans : la série dramatique5 (13). Or, Alicia est également entourée de personnages féminins forts, notamment sa supérieure Diane Lockhart qui, comme Alicia, figure dans la totalité des épisodes de The Good Wife (tout comme Cary Agos, le troisième personnage à être présent dans chaque épisode), Kalinda Sharma, l’enquêtrice de la firme qui deviendra une amie d’Alicia, ou encore Lucca Quinn, qui arrive en début de septième et dernière saison, après le départ de Kalinda dans la saison précédente. Dès lors, si un casting féminin imposant n’est bien sûr pas automatiquement gage de représentations progressistes, il reste que The Good Wife participe à l’effort nécessaire pour établir une visibilité croissante des femmes dans la fiction sérielle contemporaine.

  • 6 « The workplace is profoundly gendered in ways that are both more and less obvious. »
  • 7 « a crucial space for the integration of women »

8De plus, Alicia Florrick est largement représentée à travers sa profession : son retour dans le monde du travail est en effet le point de départ de la série, et son leitmotiv. Ainsi, l’imposante présence féminine au sein du casting est de facto appréhendée dans l’espace fondamental et problématique qu’est le cadre professionnel. Comme l’explique Delphine Gardey, analyser la condition des femmes aujourd’hui doit aller de pair avec une observation soutenue du travail, notamment parce que l’inclusion des femmes dans le monde salarié, hors du périmètre domestique, a conduit à des modifications sans précédent dans la perception du rôle qui leur était jusqu’alors attribué (2011 : 40-41). À cet égard, la sphère professionnelle, qui demeure « profondément genrée, de façon à la fois plus et moins évidente6 » (Cranny-Francis et al, 2003 : 223, ma traduction), constitue un locus important de réflexion sur le genre. Or le monde professionnel dépeint dans The Good Wife s’avère être, en réalité, un environnement largement masculin : en effet, d’après l’American Bar Association, si près de la moitié des étudiant.e.s inscrit.e.s en école de Droit sont des femmes, celles-ci ne représentent que 35 % de la profession légale (American Bar Association, 2018 : 2). Dès lors, créer une fiction aux nombreux personnages féminins dans un environnement traditionnellement masculin est d’emblée digne d’intérêt et en fait « un espace crucial pour l’intégration des femmes »7 (Lotz, 2006 : 147, ma traduction).

9En parallèle, la série utilise les personnages périphériques pour faire figurer des femmes à des postes élevés dans lesquels elles sont largement sous-représentées dans la réalité. Autrement dit, quand il s’agit de représenter des fonctions peu occupées par des femmes (les fonctions hiérarchiquement élevées, notamment), la série choisit fréquemment des personnages féminins pour les remplir. Dans la première saison (S01E15) par exemple, Diane (l’une des fondatrices de la firme dans laquelle travaille Alicia) entame une relation sentimentale avec Kurt, qui aperçoit sur son bureau une photo d’elle serrant la main d’Hilary Clinton. Plus tard, lorsque Diane se rend chez lui, elle remarque une photo le représentant serrant la main de Sarah Palin. Si ces indices ont d’abord un usage narratif pour signifier le sérieux désaccord politique entre les deux personnages, ils rappellent aussi aux spectateurs et spectatrices la présence de femmes influentes dans le monde politique.

10De même, les exemples de surreprésentation des femmes à des postes majoritairement occupés par des hommes ne manquent pas : la politicienne afro-américaine Wendy Scott-Carr se présente pour devenir procureure dans la saison 2, tandis qu’en 2015, 79 % des procureur.e.s élu.e.s aux États-Unis étaient des hommes blancs (Fandos, 2015) ; Vanessa Gold est considérée pour devenir sénatrice dans la saison 3, alors que 2012 marquait le record historique de 20 % de femmes au Sénat américain (Keller, 2012) ; Maddie Hayward, une brillante PDG, fait campagne pour devenir gouverneure dans la saison 4: seulement six gouverneurs sur les cinquante en fonction étaient des femmes (Lawless et Fox, 2012 : 1) ; Lana Delaney (présente dans douze épisodes répartis sur cinq saisons) est un agent spécial du FBI, une position à laquelle on trouve 20 % de femmes en réalité (FBI Jobs, 2018). L’un des exemples les plus frappants de surreprésentation féminine est incarné par le personnage de Victoria Adler (S01E10), qui occupe la fonction de présidente de la Cour suprême, alors qu’aucune femme n’a, à ce jour, occupé ce poste dans la réalité. Elle demandera ensuite à Diane de siéger en tant que juge de la Cour suprême, un poste que seules quatre femmes avaient occupé au cours de l’histoire américaine quand la série s’est terminée en 2016, contre 109 hommes (Supreme Court of the United States, 2016). Si cette manœuvre peut être perçue comme servant simplement la narration de la série, il reste qu’elle est appliquée avec une constance et une persistance telles au fil des saisons qu’il semble légitime de supposer qu’elle émane d’une intention réelle de l’équipe créative derrière The Good Wife de faire, de cette façon, écho au réel.

La prise en compte explicite des obstacles structurels

11Si se concentrer sur les personnages féminins de cette façon est essentiel afin de défier la sous-représentation des femmes (à la fois dans la fiction sérielle et à certaines fonctions), Susan Douglas met en garde contre ces femmes occupant, dans la fiction, des postes qu’elles luttent pour obtenir dans la vie réelle : aussi délectables que soient les parcours de ces personnages fictifs, ils peuvent également être symptomatiques de ce qu’elle qualifie de « féminisme intégré » (embedded feminism), à savoir la tendance, au sein de la culture populaire, à présenter ces femmes comme attestant des objectifs atteints – et donc obsolètes – du féminisme (Douglas, 2010).

  • 8 « So you’re the woman? […] I’m the black. » Les traductions de dialogues en français présentes dans (...)
  • 9 « The only reason I hired you is because it looked good to have a woman in the office. »

12Pour sa part, The Good Wife contourne en partie cet écueil à travers une prise en compte explicite des discriminations rencontrées par les femmes dans le monde du travail. Tout d’abord, la série illustre efficacement le rôle de faire-valoir joué par les femmes (et certaines minorités) dans différents contextes professionnels, comme l’illustre un épisode de la troisième saison : lorsqu’il est demandé à Alicia de contribuer à un panel d’experts, l’un des participants lui sert la main en affirmant, en guise de présentation : « Vous êtes donc la femme ? Je suis le Noir. »8 (S03E19). De même, lors de la première saison, l’ancien employeur de Diane lui assène : « La seule raison pour laquelle je t’ai engagée, c’est parce que ça faisait bien d’avoir une femme dans nos bureaux »9 (S01E9). De cette façon, la série reconnait et insiste sur l’existence des obstacles que présente le cadre professionnel comme espace genré. Elle traite également de ce problème de façon plus frontale via des références claires au mouvement féministe et à ses objectifs : deux personnages, dont Diane, sont explicitement présentés comme étant féministes et décrivent régulièrement les obstacles structurels, tel le plafond de verre, qui s’imposent aux femmes. Afin de dissiper tout doute quant à l’inclination féministe de la série, la sixième saison inclut un caméo de Gloria Steinhem expliquant à Alicia l’importance de la présence des femmes en politique (S06E03).

13Cette insistance sur des éléments cruciaux de la seconde vague féministe, ici littéralement incarnée par l’une de ses figures de proue, pose toutefois les limites de la portée politique de la culture populaire, par définition amenée à circuler dans et à travers les structures dominantes du pouvoir, et piégée dans une ambivalence propre à sa nature mainstream. En effet, les séries grand public, particulièrement celles issues des networks, sont mues avant toute chose par des intérêts économiques. Dès lors, si « les séries de networks sont […] de plus en plus politiquement engagées » sous l’impulsion de la concurrence grandissante sur le marché télévisuel ces dernières décennies (Boutet, 2011 : 43), il reste qu’elles présentent un contexte de diffusion particulier qui colore immanquablement les représentations qu’elles soumettent au public : en sa qualité de série de network, The Good Wife est soumise à un modèle économique largement basé sur la publicité, et à des normes restrictives quant à ce qui peut y être dit et montré (Barthes, 2011 : 49-50). Elle se voit donc contrainte de jouer le jeu de la concurrence tout en proposant un discours suffisamment audacieux pour attirer le public, mais suffisamment consensuel pour répondre aux différentes obligations qui définissent son statut.

  • 10 « postfeminism continues to ventriloquize feminism but the effect isn’t to raise the consciousness (...)
  • 11 « Postfeminism is white and middle-class by default […] It is thus also a strategy by which other k (...)
  • 12 « Feminism is “taken into account,” but only to be shown to be no longer necessary »

14Ce polissage s’opère immanquablement dans la nature féministe que tente de revêtir le programme, en se parant des atours de la seconde vague (les revendications attenant au monde professionnel en première ligne), tout en adoptant une rhétorique féministe convenue, superficielle, logée dans les interstices d’un discours qui se veut fédérateur, notamment en direction d’un public féminin plus mature, détenteur de temps et d’argent nécessaires à la consommation assidue de ces séries (Whelehan, 2010 : 158 ; Miller, 2017 : 149). Dès lors, il est clair, d’une part, que l’engagement de la série doit être compris dans le cadre forcément restrictif de sa popularité, dans lequel « le postféminisme continue de ventriloquer le féminisme, mais l’effet recherché est moins de sensibiliser que de gagner la complicité du public »10 (Whelehan, 2010 : 162, ma traduction). Le résultat est donc un féminisme immanquablement dépolitisé, « blanc et de classe moyenne par défaut » qui fonctionne comme « une stratégie par laquelle d’autres différences sociales sont négligées »11 (Tasker et Negra, 2007 : 2, ma traduction). D’autre part, ces appels du pied au féminisme ancrent bel et bien le récit dans un univers diégétique qui décrit les femmes – blanches et de classe moyenne – de façon positive et progressiste, sans ignorer les défis auxquels seraient confrontées ces mêmes femmes dans la vie réelle. The Good Wife ne se contente pas, comme nombre de textes qualifiés de postféministes, de « prendre en compte le féminisme, mais seulement pour montrer qu’il n’est plus nécessaire »12 (McRobbie, 2004 : 259, ma traduction), mais inscrit au contraire ses personnages dans un monde dans lequel les enjeux de la deuxième vague (dans son expression universalisante) sont convoqués comme autant de rappels de la prégnance des inégalités de genre.

Compétences dites féminines, travail dit masculin

15Nous venons de le voir, dans les limites postféministes que nous avons exposées, The Good Wife se révèle critique quant aux difficultés d’accès des femmes au marché du travail, plus particulièrement dans les fonctions majoritairement peuplées d’hommes et essentiellement caractérisées par des valeurs et compétences perçues comme masculines. La série rend visibles les femmes occupant ces postes, gonfle, au sein de son monde, la représentation féminine à ces mêmes postes et éclaire de façon répétée les obstacles entravant l’accès, puis l’ascension de ses personnages féminins aux positions majoritairement masculines. Pourtant, l’univers professionnel décrit dans la série demeure empreint de pouvoir, d’ambition et de compétition, des domaines fortement connotés comme masculins dans l’imaginaire collectif (Jullier et Laborde, 2012 : 55). Comme le remarque Sophie Heine (2015 : 103), s’adapter à ce type de fonction « dans la plupart des sphères professionnelles suppose d’adopter un comportement s’écartant des stéréotypes classiques sur la féminité, [… s’éloignant] de la norme de la ‘féminité’« , créant alors ce qu’elle décrit comme « une dissonance cognitive » entre l’activité perçue comme masculine d’une part et l’individu féminin d’autre part. Dès lors, que fait The Good Wife de cette tension entre les compétences de care prêtées aux femmes (l’empathie, le soin et l’attention à l’autre, la bienveillance…), et la sphère professionnelle représentée, qui valorise des traits perçus comme masculins ?

Des compétences domestiques car féminines, féminines car domestiques

  • 13 « Mum, pick up the phone ! »

16Le lien entre des qualités supposément féminines et les inégalités professionnelles passe largement par la longue histoire du travail reproductif, et notamment maternel, des femmes. En effet, « les ressorts de la persistance des inégalités sur le marché du travail sont fondamentalement liés à ce qui se passe dans la famille, c’est-à-dire au partage des tâches domestiques et aux contraintes liées aux enfants » (Meurs, 2014 : 57). Tout se passe en effet comme si les compétences dites féminines appartenaient naturellement, intrinsèquement aux femmes, qui les importent alors automatiquement de la sphère domestique vers la sphère professionnelle. Le cas d’Alicia est clair à ce sujet, étant donné que la fiction l’ancre d’emblée dans un imaginaire domestique fort dès qu’est prononcé le titre de la série. Comme le notent Nygaard et Lagerwey, « The Good Wife » invoque à la fois la ‘bonne’ héroïne (en opposition à l’anti-héroïne) et la figure de l’épouse martyre conciliante aux côtés de son mari (2017 : 109), décrivant Alicia à la fois par un système familial, et par sa position au sein de ce système. Si les premières images de l’épisode pilote confirment cet état de fait en nous présentant la protagoniste aux côtés de son époux lors d’une conférence de presse au cours de laquelle il admet avoir fait appel à des prostituées, c’est aussi son rôle de mère qui nous est régulièrement rappelé, notamment par l’intermédiaire de la sonnerie de son téléphone – la voix de sa fille répétant « Maman, décroche ! »13

17Si l’ancrage domestique d’Alicia au sein de la série n’est pas à négliger, c’est avant tout parce qu’il permet à la série d’apporter un éclairage nuancé, car évolutif, sur les compétences de care associées à Alicia, et sur leur gestion lorsque celles-ci interagissent avec l’univers professionnel diégétique. Car le problème du partage sexué des compétences n’est pas seulement le constat, réducteur, de la différence des sexes, mais aussi le poids que prennent ces abstractions dans les différentes sphères sociales, culturelles, politiques et professionnelles, et qui renvoie systématiquement à la fois la femme et le féminin au rang inférieur. Le dualisme répartissant les compétences féminines et masculines s’accompagne en effet d’une valorisation culturelle implicite qui, comme le constate Françoise Héritier, « fonctionne négativement pour le sexe féminin exclusivement » (2012 [1996] : 293). Or, comme l’écrit Carol Gilligan, « [b]ien que l’indépendance d’action et de jugement soit considérée comme l’une des caractéristiques de l’âge adulte, c’est surtout en fonction des soins et du bien-être qu’elles prodiguent à autrui que les femmes se jugent elles-mêmes et sont jugées » (citée par Molinier, Laugier et Paperman, 2009 : 16). Ainsi, les qualités perçues comme davantage féminines, d’une part, justifient le rôle déséquilibré des femmes dans le travail reproductif – non rémunéré et effectué dans le cadre du foyer et, d’autre part, désavantagent ces dernières dans le cadre du travail productif, étant donné que certaines de ces caractéristiques qui leur sont accolées de facto y sont dépréciées, voire considérées comme des obstacles.

  • 14 « Her heart’s in the right place »
  • 15 « Her heart’s in the right place? That used to be the quickest way to get fired from your firm. Are (...)

18Dès la première saison de The Good Wife, cet état des choses est formulé. Alors que Will (qui codirige la firme) décrit Alicia en soulignant « Elle a bon cœur »14 (S01E10), son interlocuteur, un juge, lui répond « Elle a bon cœur? C’était le meilleur moyen d’être viré dans ta firme » avant de lui demander : « Tu couches avec elle ? »15 Cette supposition, qu’il semble identifier comme la seule explication plausible de la tolérance de Will envers cette qualité, exprime sans détour le dénigrement de ce trait de caractère dans le cadre professionnel (qui justifierait même un licenciement), tout en renvoyant Alicia au rôle d’objet sexuel, sans rapport avec ses compétences professionnelles.

19Or, dans la première saison de la série, Alicia est largement décrite par ces traits féminins : elle est présentée comme étant particulièrement compatissante avec les client.e.s (surtout les mères), elle est émotive, consciencieuse, honnête, à l’écoute. Ces qualités sont mises en avant par le récit, au point qu’Alicia elle-même se lasse d’être caractérisée de la sorte. Alors qu’elle est soudainement intégrée à une affaire sans intérêt ni aucun rapport avec ses dossiers en cours, Alicia confie son agacement à Kalinda :

  • 16 « Alicia : I’m tired of being the one who has to hand-hold the clients. […]

Alicia – J’en ai marre d’être celle qui doit tenir la main des clients […]
Kalinda – Ce n’est pas une conspiration. Tu fais ça bien !
Alicia – C’est ce que mon frère disait pour que je fasse les tâches ménagères : ‘Alicia fait ça bien !’16 (S01E11)

20Ainsi, alors que ses compétences de soin et d’attention sont à nouveau utilisées contre elle (dans ce cas-ci, en étant préposée aux tâches inintéressantes et peu formatrices), Alicia signale à Kalinda (et par là même, aux spectateur.rice.s) le caractère arbitraire du lien entre ces tâches et une soi-disant prédisposition de sa part à les effectuer. En invoquant spécifiquement la réaction enfantine de son frère face aux tâches ménagères, Alicia éclaire la réalité quotidienne du partage inégal du travail domestique et l’illusion créée d’une inclination naturelle des femmes pour le travail de care : « [C]’est sous la contrainte de devoir s’occuper des autres que la disposition au care a quelque chance (pas toujours mais souvent) de se développer. La disposition ne précède pas le travail de care, elle y trouve l’occasion de s’y exercer » (Molinier, Laugier et Paperman, 2009 : 15). En objectant, à l’inclination au care qui lui est prêtée, l’absurdité d’une manœuvre qu’elle connait depuis l’enfance, le personnage d’Alicia resitue ses compétences dans un apprentissage social, dissociant ainsi une prétendue nature féminine du travail de care.

Un lien qui se distend au fil des saisons

  • 17 We women stay in the shadows, we smile, we comfort, we nurse, but we’re always there. You are a goo (...)
  • 18 Peter can’t win without you. You know that. Peter only wins with your Good Housekeeping seal of app (...)

21Si le cas de The Good Wife est particulièrement intéressant dans son traitement des compétences jugées féminines et de la façon dont celles-ci interagissent avec la sphère professionnelle, c’est aussi parce qu’il offre à son héroïne la possibilité d’évoluer. En effet, à mesure qu’Alicia prend conscience de ce raccourci récurrent entre son statut de femme et la justification d’un traitement différencié, son personnage entame une lente métamorphose, amorcée en fin de première saison. Jackie, la mère de Peter, confie par exemple à Alicia : « Nous, les femmes, restons dans l’ombre. Nous sourions, nous réconfortons, nous soignons. Mais nous sommes toujours présentes. Tu es une femme digne de ce nom, Alicia. [Peter] a besoin de toi »17 (S01E22). Si ces propos servent indéniablement la caractérisation du personnage de Jackie, c’est la réaction d’Alicia qui nous intéresse ici. Cet aparté cristallise en effet la transformation d’Alicia qui se rend compte de l’aliénation mais aussi du potentiel que représente cette étiquette domestique : elle se dirige alors vers Peter, en grande conversation avec un interlocuteur dont Alicia comprend qu’il pourrait être bénéfique à sa propre carrière. Alicia choisit ainsi d’exploiter, pour son avancement professionnel, la place prédominante qui lui est prêtée dans la sphère domestique, résumée de façon limpide par Eli Gold, le consultant de campagne de Peter, dans le dernier épisode de la première saison : « Peter ne peut pas gagner sans toi, tu le sais. Peter ne gagne qu’avec ton sceau royal du parfait ménage. Les électeurs doivent vous voir ensemble, sur cette scène, main dans la main »18 (S01E23).

  • 19 À cet égard, il d’ailleurs intéressant de noter que les femmes ne sont pas les seules à user de ce (...)

22Cette prise de conscience progressivement opérée par Alicia de la possible utilisation stratégique de la dépréciation de ses qualités dites féminines trouve un écho notoire dans le casting secondaire de la série, notamment à travers Nancy Crozier, une jeune avocate ambitieuse qui n’hésite pas à jouer de l’innocence qu’on lui prête volontiers, ou encore Patti Nyholm, qui instrumentalise régulièrement l’image de femme douce et vulnérable que lui confère sa condition de femme enceinte, puis de mère19. En complétant de la sorte le discours de l’héroïne, la série engage une juxtaposition des valeurs prétendument féminines et masculines : en transformant les personnages féminins, porteurs passifs et involontaires de compétences dévaluées, en sujets conscients de ces inégalités et agissant à leurs propres fins, The Good Wife fait un pas dans le sens de la « débinarisation » de ces spécificités sexuées.

23Le personnage d’Alicia connait pour sa part une évolution lente mais certaine au fil des saisons, dont la septième et dernière révèle un contraste saisissant à différents niveaux avec le premier volet de la série. Le lien entre Alicia et la sphère domestique, opéré de façon si franche aux débuts de The Good Wife, s’effrite au court des saisons pour se trouver définitivement ébranlé lors de la septième, d’une part car Alicia y annonce sa volonté de divorcer, concluant d’ailleurs la discussion par un choix de mots significatif, « ça, c’est moi qui m’en fiche » (this is me not caring) (S07E18), d’autre part, car le temps d’une dizaine d’épisodes (de S07E05 à S07E13 inclus), un arc narratif transforme l’appartement d’Alicia en cabinet d’avocates. Si, comme l’explique Philippe Hamon au sujet des personnages de romans, les lieux dans lesquels s’inscrit l’héroïne fonctionnent comme « une sorte de ‘métonymie narrative’ : le tout pour la partie, le décor pour le personnage » (1972 : 108), remplissant donc une fonction de redondance descriptive de la narration, l’ambiguïté fonctionnelle du foyer d’Alicia au cours de ces épisodes n’est pas anodine. Cette réunion des sphères domestique et professionnelle peut en effet être comprise comme une suspension temporaire de la dichotomie des compétences qui y sont associées ou, à tout le moins, d’une tentative de les brouiller. Il est d’ailleurs intéressant de noter que lorsqu’Alicia met fin à son entreprise à domicile et revient travailler dans la firme de ses débuts, la série insiste pour qualifier cette situation de « retour à la maison » (S07xE13, S07xE14, S07xE17), poursuivant donc ce jeu de perturbation des sphères.

  • 20 That’s a sign of growth, right?
  • 21 Were you wanting me to cry, Mr. Canning? Oh, my God. I thought my husband no longer cheated!
  • 22 You think you can play the emotional card with me? You think I'm going to break down and cry? Look (...)

24Si cette dernière saison poursuit et entérine la distanciation de l’héroïne de la sphère domestique, les compétences qui y sont associées sont elles aussi transformées de façon significative par l’évolution d’Alicia, visiblement moins émotive et compatissante au fil du récit. La dernière saison semble confirmer ce changement en explicitant à plusieurs reprises l’absence, de la part d’Alicia, de l’émotion attendue par son interlocuteur, voire par elle-même. Elle se surprend à ne pas pleurer après avoir vu son amant embrasser une autre femme, et ajoute « ça signifie que je grandis, non ? »20 (S07E17) ; lorsque Louis Canning, avec qui Alicia travaille occasionnellement, s’étonne de l’absence de réaction d’Alicia à qui il vient d’apprendre que Peter a entretenu une relation de plusieurs années avec l’une de ses collègues, elle s’amuse : « Vous vouliez que je pleure, M. Canning ? [Puis, en feignant de pleurer comme un enfant] Oh mon dieu, je pensais que mon mari avait arrêté de me tromper ! »21 (S07E21) ; alors que l’avocat qui poursuit Peter en justice énumère les obstacles que représenteront ce procès pour la famille d’Alicia, elle répond : « Vous pensez pouvoir jouer la carte de l’émotion avec moi ? Vous pensez que je vais fondre en pleurs ? Regardez-moi. Est-ce que j’ai l’air de m’effondrer ? »22 (S07E22). En permettant au personnage d’Alicia d’évoluer de la sorte, en relâchant progressivement son attachement à la sphère domestique et aux compétences qui la prolongent, The Good Wife propose une réflexion au long cours sur le caractère arbitraire du lien unissant les femmes et les compétences de care, qui deviennent alors instrumentalisées, dénoncées, feintes, voire absentes. Toutefois, cette évolution d’Alicia semble aller dans le sens d’un féminisme néolibéral individualiste, qui cherche les réponses en soi plutôt que dans la structure sociale, et finit par se conformer, plutôt que de résister, au jeu de l’entreprise telle qu’elle existe aujourd’hui (Orgad, 2017 : 168).

Les inéluctables compétences maternelles

25Au-delà de l’interaction entre les compétences perçues comme étant féminines et un milieu professionnel plutôt masculin dans l’imaginaire collectif, The Good Wife se démarque par son exploration profonde et complexe de la maternité, qui évite bien souvent les pièges de la représentation postféministe que sont la glorification domestique ou, à l’inverse, l’investissement exclusif de la sphère professionnelle (Nygaard et Lagerwey, 2017 : 109). Si cet élément est essentiel à notre propos, c’est parce que l’argument général vis-à-vis des compétences spéciales des femmes, sur lequel se construit nombre d’inégalités persistantes sur le marché du travail, comme leur prétendue capacité à être plus empathiques et plus à l’écoute, est souvent liée à leur rôle de mère, perçu comme inhérent et naturel. En effet, « le postulat selon lequel le bien-être des bébés et des jeunes enfants devrait faire l’objet d’une attention toute particulière de la part des mères est souvent imbriqué […] à un argument plus général sur la capacité des femmes à se montrer plus empathiques et plus soucieuses d’autrui » (Heine, 2015 : 52), engendrant dès lors une vision essentialiste de la place, du rôle et des compétences prêtées aux femmes, fermement ancrée dans la conception actuelle de la maternité.

Le mythe de la bonne mère : aussi inéluctable qu’inatteignable

26Dans la série, les attentes ambivalentes et démesurées envers la maternité sont directement visées, et plus précisément, ce que Rebecca Feasey nomme « le mythe de la bonne mère » (2012). Elle décrit ainsi la tendance schizophrénique de la télévision contemporaine à sanctifier une maternité absolue et inévitable (en promouvant des discours sur la façon et le moment d’avoir des enfants, plutôt que sur la décision d’en avoir ou non), tout en dénigrant simultanément les femmes qui échouent dans ce rôle, notamment lorsqu’elles travaillent. Ainsi, le mythe de la bonne mère se décline d’une part, en un discours sur le caractère inéluctable de la maternité et d’autre part, en un discours décourageant pour celles qui s’y attèlent. Dans The Good Wife, cette tension est incarnée par les trois personnages féminins qui gravitent autour d’Alicia, formant ainsi un discours en mosaïque sur la nécessité de repenser la maternité dans la fiction sérielle, tout en construisant, par opposition, le personnage de l’héroïne.

  • 23 « It both responds and contributes to renewed public discussion of the myth that women can ‘have it (...)

27Un premier aspect est abordé par Diane et Kalinda, les deux protagonistes les plus visibles de la série après Alicia. Si elles trouvent leur place dans le débat sur la représentation de la maternité, c’est précisément parce qu’aucun arc narratif les concernant ne traite cette question. Tandis que Susan Faludi soulignait déjà dans Backlash (1991) la tendance à délégitimer les femmes décidant de faire passer leur carrière avant une éventuelle vie de famille, les représentations positives de personnages féminins assumant pleinement la priorité qu’elles donnent à leur carrière sont d’une importance décisive. Diane et Kalinda se tracent donc une carrière qui ne prend ni les contours d’un choix par défaut ni d’un renoncement, mais bien d’une décision entière et valide, présentée dans la série comme une option disponible parmi d’autres. C’est notamment à cet égard que The Good Wife « répond et contribue au renouveau du débat public autour du mythe selon lequel les femmes peuvent tout avoir »23 (Orgad, 2017 : 167, ma traduction).

  • 24 « rhetoric of choice »

28Le personnage de Jackie Florrick, pour sa part, incarne davantage le deuxième pan du mythe de la bonne mère qui stigmatise la mère active : celle qui ne choisit pas la sphère qu’elle souhaite occuper (domestique ou professionnelle) doit simplement assumer les conséquences de sa décision. Pour Kim Akass, le discours postféministe actuel sur la maternité relève en effet d’une « rhétorique de choix »24 (2006 : 51, ma traduction) qui laisse aux femmes l’entière responsabilité d’une décision qui n’en est pas une, ancrée dans un système qui condamne les inégalités sur le papier, mais n’aide pas structurellement à les dépasser. Ainsi, Jackie, la mère de Peter, aide Alicia au quotidien avec les enfants et fustige régulièrement cette dernière pour ses choix, sanctifiant ainsi une maternité entière et absolue. Pourtant, au-delà de ce discours désapprobateur, la présence d’un tel personnage, dont la fonction principale est d’aider à prendre soin du foyer et des enfants, amorce une déconstruction du trope de la mère active jonglant naturellement avec les multiples compétences que requiert un tel rôle (Cranny-Francis et al, 2003 : 224) : la rhétorique de choix est ici directement interrogée en soulignant, à travers la nécessaire aide de Jackie (Alicia envisage même d’engager une nounou pour les moments où aucune des deux n’est disponible), les difficultés matérielles et logistiques de concilier une carrière et une vie de famille. Autrement dit, cette incapacité d’Alicia à gérer seule cette accumulation de tâches souligne que « [l]es attentes sociales et symboliques pesant sur les mères signifient que la réalité de leurs choix […] est éminemment relative. Pour pouvoir effectivement parler de choix, il faudrait que différentes options soient disponibles et accessibles » (Heine, 2015 : 59).

Des parentalités alternatives pour enfoncer le clou du constructivisme

29Enfin, la déconstruction du mythe de la bonne mère trouve également écho dans le casting secondaire. Parmi les exemples les plus saillants, on trouve notamment Patti Nyholm, dont il a déjà été question. Apprêtée, incisive et redoutable, elle n’hésite pas à instrumentaliser sa grossesse pour amadouer l’interlocuteur qui peut lui accorder une faveur. Lors de sa première apparition (S01E05), Patti défend une compagnie de trains de marchandises, attaquée par les veuves de trois employés surmenés qui viennent de périr dans un accident. Menaçant d’impliquer les médias, Will la contraint à encourager son client à négocier une pension. La proposition émise par ce dernier semble profondément choquer Alicia, également présente dans la pièce : elle insiste sur le fait que ces femmes sont désormais veuves et que l’une d’elles est mère de trois enfants. C’est le moment que choisit Patti pour se lever – révélant alors son ventre de femme enceinte – avant d’annoncer, après un rapide coup d’œil à sa montre, que son cours de yoga l’attend.

30Dans cette scène, Patti est d’emblée caractérisée par une tension entre son manque total d’empathie d’une part (exacerbé par la profonde injustice de la situation), et la douceur et fragilité culturellement connotées par sa grossesse d’autre part (celle-ci n’étant révélée qu’au dernier moment, entre le commentaire d’Alicia appelant à l’empathie maternelle, et celui de Patti elle-même, traduisant son total détachement). Patti s’appliquera par la suite à utiliser sa grossesse (par exemple, en feignant soudainement une douleur au ventre pour couper court à une déposition ne jouant pas en sa faveur, dans le même épisode), et son enfant ensuite (en enlevant sa tétine pour qu’il pleure, afin de bénéficier d’un report d’audience nécessaire à sa stratégie, par exemple (S01E17)). Ainsi, ce personnage permet de mettre une fois de plus en lumière le caractère construit de l’« idéalisation sociale de la fonction de mère », qui confère à celle-ci une aura sacrée et fragile, la confinant dès lors à ce rôle (Lipovestky, 1997 : 214).

31Au-delà de cette déconstruction de l’image glorifiée de la mère, relativement ponctuelle mais efficace, The Good Wife complète sa mosaïque parentale par le personnage d’Andrew Wiley (présent dans dix épisodes au cours de la série), un ex-enquêteur brillant qui décide de devenir père au foyer quand sa femme lance sa propre entreprise de conception de vaisseau spatial. Son travail ponctuel d’enquêteur pour la firme d’Alicia donne lieu à une série de scènes s’attachant à rappeler sans cesse son rôle de père au foyer : il n’est jamais présent à l’écran sans une poussette ; il entrecoupe son explication de l’enquête pour détailler diverses astuces pour faire manger des carottes aux enfants ; il s’agace lorsqu’un collègue d’Alicia jure devant son bébé, etc. Frôlant la caricature, cette inversion peu subtile des rôles a le mérite de retourner le prétendu bastion féminin qu’est la parentalité, en montrant qu’un rôle souvent laissé aux femmes fonctionne à l’identique quand il est incarné par un homme : Andrew fait face à une nécessaire organisation pratique et aux problèmes d’emploi du temps liés à la parentalité, des soucis qui ne le surmènent que par moments, sans entamer ses compétences professionnelles.

32Ainsi, les personnages de The Good Wife offrent des variations peu courantes dans le paysage télévisuel grand public sur le thème de la parentalité, en proposant un questionnement du mythe de la bonne mère, une tentative de désacralisation de la fonction maternelle, ou encore des femmes qui ne sont pas mères et des hommes qui sont pères, ce qui insiste sur le caractère construit de certaines spécificités supposées du genre féminin.

Conclusion

  • 25 « Assessments that search for an idealized example of feminist characters or role model fail to eng (...)

33Comme l’explique Amanda Lotz, « les analyses cherchant un exemple idéalisé de personnage ou de modèle féministe ignorent la complexité de la narration sérielle »25 (2006 : 97, ma traduction), mais aussi les contraintes de production et de réception qui s’y attachent. Ainsi, il ne s’agit pas ici de dévoiler un monde diégétique idéologiquement uniforme, ni des personnages d’une constance à toute épreuve. Le cas de The Good Wife présente en effet des limites non-négligeables : tout comme une écrasante majorité de séries grand public, la série inscrit son fond et sa forme dans une logique néolibérale ancrée donc dans une vision spécifique (bien qu’elle se présente comme universelle) de la notion de travail (Bargetz, 2009). Elle participe ainsi à perpétuer une image biaisée et partielle des enjeux féministes qui s’en trouvent dépolitisés, et se contente d’effleurer les questions pourtant décisives de race ou de classe, quand elle ne les élude pas totalement.

34Pourtant, de différentes manières, The Good Wife porte un regard critique sur les catégories aussi vides que débordantes que sont le féminin et le masculin (Scott, 1988 : 148). La série utilise ses personnages pour rendre visible, dans la sphère professionnelle, un féminin qui n’y est pas toujours perçu comme étant pertinent, mais aussi pour figurer de façon explicite et répétée les obstacles structurels entravant l’accès et l’ascension des femmes en milieu professionnel. Les personnages périphériques y incarnent des femmes à des postes auxquels elles sont sous-représentées, voire absentes en réalité, tandis que l’héroïne porte, à travers sa caractérisation, des compétences associées à une forme de féminité dévaluée, mais aussi la conscience de cette dévalorisation, puis la capacité d’agir face à celle-ci. En effet, la progression de l’héroïne met en lumière une forme d’agentivité du personnage, à travers l’instrumentalisation graduelle de ses compétences de care d’une part, et la perturbation des catégories féminin/masculin, domestique/professionnel d’autre part. En inscrivant son personnage principal à la fois dans la sphère domestique et la sphère professionnelle, The Good Wife ouvre une réflexion allant dans le sens d’une déconstruction du lien entre le féminin et les compétences de care et interroge le rôle de mère, qu’elle sort de sa conception inéluctable et immanente, tout en le dissociant des compétences perçues comme féminines.

35De cette façon, The Good Wife invite dans la culture populaire un sujet essentiel du débat féministe, en proposant un monde où, à certains égards, le masculin et le féminin ne sont pas nécessairement envisagés comme relevant automatiquement d’une logique binaire : ils peuvent y être négociés, superposés, non-pertinents parfois. Ainsi, sans épuiser la question ni proposer des solutions inébranlables, cette série appartient aux textes populaires qui doivent être lus comme une compensation symbolique de notre monde, « comme des symptômes de nos aspirations et pour ce qu’[ils] disent de nous » (Jost, 2011 : 62) et, en ce sens, mérite toute notre attention.

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Notes

1 « foreground the reality that the traditional feminine sphere of the home remains painfully exclusive from the world of work and almost entirely the domain of women »

2 « The construction of gender is both the product and the process of its representation »

3 « contributes to making some stereotypes uninhabitable [… or] might allow certain depictions (such as motherhood) to take on new meaning. »

4 Les networks sont les chaînes télévisées américaines gratuites et régulées au niveau fédéral.

5 Le rapport ajoute que le genre télévisuel dans lequel les personnages féminins sont les plus représentés est la télé-réalité (p. 13).

6 « The workplace is profoundly gendered in ways that are both more and less obvious. »

7 « a crucial space for the integration of women »

8 « So you’re the woman? […] I’m the black. » Les traductions de dialogues en français présentes dans le texte sont toutes opérées par l’auteure.

9 « The only reason I hired you is because it looked good to have a woman in the office. »

10 « postfeminism continues to ventriloquize feminism but the effect isn’t to raise the consciousness of the audience as much as to gain their complicity. »

11 « Postfeminism is white and middle-class by default […] It is thus also a strategy by which other kinds of social difference are glossed over »

12 « Feminism is “taken into account,” but only to be shown to be no longer necessary »

13 « Mum, pick up the phone ! »

14 « Her heart’s in the right place »

15 « Her heart’s in the right place? That used to be the quickest way to get fired from your firm. Are you sleeping with her? »

16 « Alicia : I’m tired of being the one who has to hand-hold the clients. […]

Kalinda : Look, it’s not a conspiracy. You’re good at it.

Alicia : That’s what my brother used to say to get me to do chores: “Alicia’s good at it”. »

17 We women stay in the shadows, we smile, we comfort, we nurse, but we’re always there. You are a good woman, Alicia. [Peter] needs you.

18 Peter can’t win without you. You know that. Peter only wins with your Good Housekeeping seal of approval. Voters need to see you together up on that stage holding hands.

19 À cet égard, il d’ailleurs intéressant de noter que les femmes ne sont pas les seules à user de ce qui est perçu comme leurs faiblesses : Louis Canning (présent dans 26 épisodes courant sur l’entièreté de la série), atteint de la maladie de Parkinson (tout comme Michael J. Fox, qui l’incarne), joue régulièrement de son handicap pour obtenir la sympathie de ses opposant.es.

20 That’s a sign of growth, right?

21 Were you wanting me to cry, Mr. Canning? Oh, my God. I thought my husband no longer cheated!

22 You think you can play the emotional card with me? You think I'm going to break down and cry? Look at me. Do I look like I'm breaking down?

23 « It both responds and contributes to renewed public discussion of the myth that women can ‘have it all’. »

24 « rhetoric of choice »

25 « Assessments that search for an idealized example of feminist characters or role model fail to engage the complexity of story-telling in these series »

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Pour citer cet article

Référence électronique

Barbara Dupont, « « This is me not caring » : la négociation des compétences dites féminines dans le monde professionnel de the good wife »Genre en séries [En ligne], 8 | 2018, mis en ligne le 01 décembre 2018, consulté le 26 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ges/534 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ges.534

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Auteur

Barbara Dupont

Barbara Dupont est dipômée en Communication appliquée (IHECS, Bruxelles) et en Cultural Studies (KUL, Leuven). Elle est doctorante en Communication à l’UCLouvain (Louvain-la-Neuve). Ses recherches explorent les représentations des féminités et masculinités dans les séries télévisées mainstream contemporaines, avec un intérêt particulier pour la représentation de la tension sphère professionnelle/sphère domestique, ainsi que l’étude des personnages sériels.

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