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Mémoire de la critique

« Je suis un mauvais disciple » (à propos de Francis Ponge)

Entretien avec Gérard Macé réalisé par Marie Frisson entre 2022 et 2024
Marie Frisson

Texte intégral

1Gérard Macé est né en 1946. Du Jardin des langues (1974) au Navire Arthur et autres essais (2020), en passant par Vies antérieures (1991) ou Colportage (1998-2018), son œuvre mêle poésie et critique, vers et proses, mais également fiction et réel, rêverie et souvenir. Son dernier essai, La Pensée des poètes, a paru en 2021 aux éditions Gallimard.

2À la fin des années 1990, dans la continuité de sa démarche poétique, Gérard Macé commence à pratiquer la photographie, qu’il envisage comme une autre façon d’observer le monde et de saisir l’instant, au rythme des voyages et des déambulations. Les éditions Le Temps qu’il fait ont publié un certain nombre d’ouvrages où apparaît cette pratique photographique, comme Éthiopie, le livre et l’ombrelle (2006), Kyoto : un monde qui ressemble au monde (2011). C’est également aux éditions Le Temps qu’il fait qu’a paru en 2024 Bibliothèque tournante, une série d’entretiens rassemblés et réédités par Laurent Demanze.

3Silhouette parlante, ouvrage mêlant vers et prose, a paru en janvier aux éditions Gallimard.

4Nous publions ici un entretien réalisé pour La Fabrique pongienne, au cours duquel Gérard Macé revient sur sa relation à la figure de Ponge et à son œuvre. Nous publions également, avec l’aimable autorisation de Gérard Macé, d’Armande Ponge, une retranscription de la première lettre adressée par Gérard Macé à Francis Ponge, en 1969.

  • 1 Gérard Macé,  Bibliothèque tournante, éd. L. Demanze, Mazères, Le Temps qu’il fait, 2024.

Marie Frisson Vous avez publié en janvier 2024, avec Laurent Demanze, un volume qui réunit divers entretiens que vous aviez donnés auparavant1. Ponge y est évoqué : à quel moment entre-t-il dans votre bibliothèque personnelle ? Et quels autres auteurs découvrez-vous éventuellement en même temps que Ponge ?

  • 2 Philippe Sollers, Francis Ponge, Paris, Seghers, « Poètes d’aujourd’hui », 1963.
  • 3 Victor Segalen, Stèles, Peintures, Équipée, préf. P.-J. Jouve, éd. A. Joly-Segalen, Paris, Club du (...)
  • 4 Eugène Guillevic, Terraqué, poèmes, Paris, Gallimard, 1942.

Gérard Macé Autant que je puisse me souvenir (la mémoire est un millefeuille soumis à la pression des âges), c’est en classe de première que j’ai découvert Francis Ponge, grâce au volume de la collection « Poètes d’aujourd’hui ». La première version, celle de Philippe Sollers2. C’est aussi le moment où j’ai découvert Victor Segalen, dont venaient d’être rééditées Stèles, Peintures, Équipée3. « Un Breton en Chine », avait titré Le Nouvel Observateur sous la plume de Mandiargues. Et puisque j’évoque la Bretagne, il me faut ajouter la lecture de Guillevic (en commençant par Terraqué4) dont la concision et la simplicité m’ont rendu accessible l’écriture du poème. Mon admiration inconditionnelle pour Michaux est venue plus tard. Il se défend comme personne !

M.F. Quelle est votre lecture à ce moment de la tradition poétique ?

  • 5 Rémy Belleau, « Petites inventions », Les Poètes du xvie siècle, éd. Albert-Marie Schmidt, Gustave (...)
  • 6 Jean Rousset, La Littérature de l’âge baroque en France : Circé et le paon, Paris, Corti, 1953.

G.M. Curieusement, ce ne sont pas les modernes qui ont compté le plus à cette époque, mais les poètes du xvie siècle. C’est la première Pléiade que j’ai achetée, où figurent en bonne place Sponde, Chassignet, du Bartas, ainsi que Rémi Belleau et ses Petites choses5. J’ai continué avec l’anthologie de Jean Rousset, et son essai intitulé Circé et le paon6, qui m’a mené à Rome.

  • 7 Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 26 janvier 1969 », Archives familiales A. Ponge. L’astéris (...)

M.F. Votre première lettre à Francis Ponge est datée du 26 février 1969. Vous lui écrivez : « [v]ous ne sollicitez “que quelques jeunes hommes et l’avenir”. / Jeune homme*, je ne sollicite que l’avenir et Francis Ponge7 ». Vous aviez en quelque sorte entendu son appel ? 

  • 8 Francis Ponge, « La Mort à vivre », Proêmes, Œuvres complètes, éd. B. Beugnot, Paris, Gallimard, «  (...)
  • 9 Francis Ponge, « Rhétorique », ibid., p. 192.

G.M. Son appel ? Nous n’étions pas en guerre… Mais il est vrai qu’il a fait partie de mon roman d’apprentissage, et qu’il m’a aidé, au-delà de la littérature, à ne pas sombrer dans le pessimisme, le désespoir, ce qu’il appelle « la mort à vivre8 ». Et j’ai su par cœur le proême intitulé Rhétorique9. Art poétique et manuel de survie.

M.F. Vous avez ensuite été reçu rue Lhomond. Quel souvenir gardez-vous de cette première rencontre avec Francis Ponge ?

  • 10 Francis Ponge, Pour un Malherbe, Œuvres complètes, éd. B. Beugnot, Paris, Gallimard, « Bibliothèque (...)
  • 11 Pierre-Henri Simon (1903-1972) est un historien de la littérature et un écrivain, entré à l’Académi (...)

G.M. Je me souviens d’une pièce étroite, rectangulaire, avec une fenêtre à gauche en entrant, un lustre abandonné par Dubuffet, un tableau de Braque... Et surtout d’une conversation confiante, chaleureuse. Interrompue par un coup de fil de Sollers, lié à la préparation des Entretiens. J’ai vu aussi des manuscrits en cours, et si je ne vous en dis pas davantage, c’est que cinquante-cinq ans après, c’est impossible. D’autant que je n’ai pas d’agenda, et que je ne tiens pas de journal. Est-ce ce jour-là qu’il m’a signé son Malherbe10 ? C’est probable, car c’est un livre qui a beaucoup compté, entre les pages duquel j’ai toujours gardé l’article négatif de Pierre-Henri Simon11 paru dans Le Monde : un monument d’incompréhension !

M.F. La correspondance évoque un recueil envoyé à Francis Ponge le 16 janvier 1970 : est-ce qu’il s’agit du Trésor de l’homme de Saint-Pol-Roux préfacé par Mandiargues suivi d’un texte critique de vous, « L’Œuvre en miettes de Saint-Pol-Roux » ? Vous engagez alors un dialogue avec Ponge à partir de son œuvre et d’œuvres d’autres auteurs que vous admirez, par le biais de l’écriture critique. Est-ce que vous écriviez déjà à l’époque en dehors de l’enseignement et de la recherche ou est-ce que vous aviez le projet de devenir vous-même écrivain ?

G.M. Oui, j’écrivais depuis longtemps. J’avais écrit une tragédie à l’âge de quinze ans, intitulée Les Indes. En prose, et plutôt brève, qui mettait en scène Charles Quint le premier jour de son règne, se demandant s’il devait garder ou non les colonies. Ne riez pas… À l’époque dont vous me parlez, j’écrivais des poèmes de façon décidée, même si je n’en ignorais pas la faiblesse, ou le caractère trop peu personnel. J’avais trouvé ma voie, pas mon style.

  • 12 Gérard Macé, « Un aïeul énorme », Colportage, Paris, Gallimard, « NRF », 2018, p. 80-87.

M.F. Vous lui écrivez le 18 juillet 1974 au sujet de la publication dans « Les Cahiers du Chemin » d’un texte que vous lui dédiez, intitulé « Un aïeul énorme12 » : « [d]ans mon silence, mes tâtonnements, mes apprentissages, je n’ai pas cessé de vous lire. Vous le verrez peut-être par les pages jointes ». Était-ce une prise de position critique, voire théorique ? Poétique ? Ou les deux ?

G.M. Prise de position théorique, sûrement pas. Que sa lecture m’ait accompagné, je vous l’ai dit, relevait de l’ordre de la salubrité. Ne dire que ce que l’on veut dire, pour renvoyer une fois de plus à Rhétorique, c’était à la fois une exigence et une façon d’exister. C’est dire que les paroles toutes faites, les slogans, les manifestes m’étaient totalement étrangers.

  • 13 Gérard Macé, Le Jardin des langues, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1974.
  • 14 André Pieyre de Mandiargues, « Préface », dans G. Macé, Le Jardin des langues, op. cit., p. 9-10.

M.F. Votre premier ouvrage, publié en 1974, Le Jardin des langues13, est préfacé par André Pieyre de Mandiargues, qui est sensible à la forme de nouveauté métaphorique et syntaxique que comporte votre conception du poème en prose. Ce dernier remarque le soin particulier avec lequel vous travaillez les associations de mots et d’images, en le rapprochant de l’écriture de Péret. Il note également la vigilance dont vous faites preuve quant au répertoire poétique convenu (qui associerait le lapin en fuite et le champ de luzerne, par exemple14). Cela semble pourtant vous porter loin de Ponge…

G.M. Il y a loin, en effet, du lâchez tout surréaliste au compte tenu des mots. Mais les apparences, en ce qui concerne mon premier livre, sont en partie trompeuses. J’ajoute qu’entre Mandiargues et Ponge, il n’y avait pas d’incompatibilité : l’amitié était réelle, autant que l’admiration du premier pour le second. Mandiargues aimait admirer, il en a donné de multiples preuves.

  • 15 Gérard Macé, Le Jardin des langues, op. cit., p. 72.
  • 16 Gérard Macé, Bois dormant [1983], Paris, Gallimard, « Poésie », 2002.

M.F. Toutefois, le recours au « dictionnaire » comme remontée à la racine des mots et des langues selon « nos manies troglodytes15 » est au cœur de la fabrication de ces blocs ciselés de prose que constituent les poèmes en prose du Jardin des langues. Vous êtes aussi animé par le souci des nomenclatures, « de Linné à Littré16 », comme l’indique la préface aux proses de Bois dormant

G.M. Le « jardin des langues » me vient du Jardin des plantes, et l’on peut se promener dans nos serres avec Francis Ponge. Certes, mon jardin à cette époque est en friche, pas loin d’être sauvage, mais le paysage s’est transformé avec les deux livres suivants, Les Balcons de Babel et Bois dormant. Mes trois premiers livres forment un tout, animés par le jeu, dans tous les sens du terme, entre les mots et les choses, les choses et leur nom. Entre l’arbitraire et la nécessité, c’est dans cet espace que se situe le langage poétique.

  • 17 Gérard Macé, Leçon de chinois, Saint-Clément, Fata Morgana, 1981.

M.F. Pouvez-vous nous parler un peu de la genèse de Leçon de chinois17, qui conduit une rêverie à partir d’un autre dictionnaire ?

  • 18 Eliane Formentelli (dir.), Regard, espaces, signes : Victor Segalen, Paris, L’Asiathèque, 1978. Ce (...)

G.M. L’écriture chinoise, comme les hiéroglyphes, m’a fasciné très tôt. Je ne suis pas le seul, mais cette fascination a vite laissé la place à l’apprentissage, même rudimentaire. En ce qui concerne le chinois, j’ai profité d’un colloque Segalen, à la fin des années 197018, pour parler à François Cheng de mon envie d’y voir plus clair. Ce qui était imprévu, c’est que le désir de considérer le caractère chinois comme un signe linguistique, une écriture et non une magie, ou une naïve représentation des choses, m’amènerait à rejouer mon rapport au français, à revivre ce que mon entourage familial avait vécu comme une honte et une frustration, le fait de ne pas avoir fait d’études. Dans cette petite aventure liée au langage, et à des signes étrangers, je devenais à la fois le lettré et l’ignorant. 

M.F. C’est dire aussi l’importance qu’ont revêtue pour vous des recueils de proses comme Le Parti pris des choses, pour lequel Ponge vous écrit une dédicace lors de votre deuxième rencontre aux Gobelins, ou de Proêmes.

  • 19 « À mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot [...] » (Francis Ponge, « Le Cageot (...)

G.M. « Entre cage et cachot, la langue française a cageot19 », on connaît ce début d’un poème du Parti pris, qui résume la méthode (et l’interrogation) de Francis Ponge. J’aimais assez la grammaire, et la linguistique, pour entendre les vérités des linguistes, mais elles me semblaient un peu réductrices. J’avais assez lu les poètes pour savoir que le cratylisme est aussi à l’œuvre, malgré tout. Par ailleurs, il y a chez Ponge une haute tenue, qui fait de sa prose un vers qui va au bout de la ligne.Vous évoquez une rencontre aux Gobelins, où j’habitais alors. Il s’agissait d’un déjeuner, et Francis Ponge est arrivé avec ce pense-bête que j’ai toujours gardé : « Demander à G. M. : oxymoron, qu’est-ce que c’est que ça ? ».

  • 20 Gérard Macé, Pensées simples, Paris, Gallimard, « NRF », 2011, p. 23-24.
  • 21 Gérard Macé, La Carte de l’empire. Pensées simples II, Paris, Gallimard, « NRF », 2014, p. 46-47.

M.F. L’attention portée aux choses du monde ne se départ pas non plus, chez Ponge, comme chez vous, d’une forme de sensualité. Dans Pensées simples20, vous revenez d’ailleurs, partant de Chardin, sur le motif de l’huître et de sa symbolique, que connaissait Ponge, ainsi que sur l’œillet, en dialogue avec Rimbaud21.

  • 22 Francis Ponge, « Les Plaisirs de la porte », Le Parti pris des choses, op. cit., p. 21.
  • 23 Francis Ponge, « L’Huître », ibid., p. 21.
  • 24 Francis Ponge, « L’Œillet », La Rage de l’expression, OC I, p. 356.
  • 25 Bryan Deleu a ainsi rendu hommage à Francis Ponge en 2022.

G.M. À propos d’expression de la sensualité dans l’œuvre de Ponge, j’ajouterais « Les Plaisirs de la porte22 » à « L’Huître23 » et à « L’Œillet24 ». Plus largement, en termes de plaisirs terrestres, voire d’épicurisme, j’ai récemment trouvé, chez un viticulteur de Condrieu, une cuvée intitulée « Proême », comme un juste retour à l’envoyeur25. En hommage à Ponge, évidemment, et à sa manière de s’affranchir des règles classiques, sans les ignorer.

M.F. L’intérêt que vous portez aux poèmes en prose du Parti pris ou des Proêmes ne vous empêche pas d’apprécier également la deuxième veine formelle que cultive Ponge à partir des années de guerre, celle de la forme ouverte, comme dans La Rage de l’expression

G.M. La rage, Dieu sait si je l’ai éprouvée, à ma façon. Et je comprends parfaitement l’envie de déplier le poème en prose, de le donner à voir sous toutes ses coutures avec ses variantes. Il y a là une façon de prolonger le plaisir, puisque Ponge est un sensuel, que la brièveté de l’inspiration (j’allais dire, du coitus) laisse sur sa faim. Dans mon cas, c’est plutôt d’un livre à l’autre que j’ai déployé ce que j’avais à dire, sans le savoir. 

  • 26 Gérard Macé,  Bibliothèque tournante, op. cit., p. 91-92.

M.F. Vous évoquez « un art du montage dans la pratique de la poésie » qui vous sied, dans l’entretien avec Thierry Romagné26

G.M. Ce que j’appelle l’art du montage, c’est tout simplement la composition. Qui, dans un livre de poèmes, se fait au fur et à mesure, et qui peut changer jusqu’à la fin. Au fur et à mesure que le propos se précise, qu’un univers se fait jour, dans un climat mental toujours prêt à subir des changements. C’est même cette petite aventure qui est passionnante, parce qu’elle ne connaît pas la ligne droite.

  • 27 Francis Ponge, L’Écrit Beaubourg, OC II, p. 895-912.
  • 28 « Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 27 mars 1977 », Archives familiales A. Ponge.

M.F. Ponge obtient une forme de consécration au moment de l’inauguration du centre Pompidou en 1977 où sont présentées deux expositions. Vous êtes à Rome à ce moment-là, mais une lettre du 27 mars 1977, témoigne du fait que vous continuez à suivre l’évolution de l’œuvre de Ponge qui vous a envoyé par ailleurs l’édition des Actes du colloque de Cerisy. Vous écrivez que Pierre Oster vous a apporté L’Écrit Beaubourg27 et le catalogue de l’exposition que vous n’avez pu voir. Vous écrivez également : « [j]’ai repensé souvent au [M]as des Vergers, au palmier foudroyé, au lierre apporté par Paulhan, à l’althasea offert par qui, je ne me souviens plus… Et grâce à vous je me figure Beaubourg comme la serre immense d’une “nature morte28” ». Diriez-vous que Francis Ponge est un intercesseur pour vous en peinture et en critique d’art ?

  • 29 Francis Ponge, « De la nature morte et de Chardin », L’Atelier contemporain, OC II, p. 661.
  • 30 Francis Ponge, « Matière et mémoire », Le Peintre à l’étude, OC I, p. 116-123.

G.M. L’Écrit Beaubourg n’est pas ce que je préfère chez Ponge. L’exercice (inauguration, célébration) encourageait trop une tendance à la solennité, qui prenait alors un tour officiel. Il n’empêche que son rapport à la peinture fait partie de son œuvre, et témoigne de son goût pour la matière. Je ne crois pas qu’il ait été pour moi un intercesseur, mais dans ce registre, je mets par-dessus tout ses pages sur Chardin29, et son texte sur la pierre lithographique30. Matière et mémoire, palimpseste et persistance rétinienne, tendresse et sensualité s’expriment là comme rarement de façon aussi claire.

  • 31 Francis Ponge, « Exposition Springer », L’Atelier contemporain, OC II, p. 593.

M.F. Vous avez en effet en commun une sensibilité pour les arts visuels et le goût de la visite des ateliers. Il vous écrit d’ailleurs en dédicace de De la nature morte et de Chardin, le 23 mars 1980 : « à mon ami Gérard Macé, pour qu’il lise et préfère à ma prose les belles images ici qui l’illustrent ». Pouvez-vous nous parler de Ferdinand Springer, avec lequel Ponge a collaboré en 1967 et en 197331 ? C’est finalement après être allé le voir que vous avez écrit votre première lettre à Francis Ponge.

  • 32 Lao Tseu, Tao tö king, trad. Liou Kia-Hway, préf. Etiemble, Paris, Gallimard, « Idées », 1974.

G.M. Un peu avant 1970, une amie niçoise, qui était peintre, m’a amené dans l’arrière-pays jusqu’à l’atelier de Ferdinand Springer. Devant les tableaux, j’ai évoqué Francis Ponge, dont je ne pouvais savoir qu’il était un ami du peintre. Ce fut une chance, car généreusement, Springer m’a suggéré d’aller à Bar-sur-Loup, au Mas des Vergers. Ponge était absent, j’ai fait le tour de la propriété, après quoi j’ai écrit rue Lhomond, où Ponge m’a proposé de venir le voir.Je ne savais rien à l’époque de Ferdinand Springer, en particulier qu’il avait été emprisonné pendant la guerre au camp des Mille, en même temps que Max Ernst. Il avait fui l’Allemagne nazie parce qu’il avait épousé une femme juive. Je l’ai fréquenté pendant les années qui ont suivi, à Paris où il habitait place des Vosges. J’ai été particulièrement impressionné par les gravures qu’il avait réalisées pour une édition du Tao tö king, dont j’avais lu la traduction dans la collection « Idées » de Gallimard32. Et j’ai acheté plus tard aux enchères, pour une bouchée de pain, un paysage provençal aux arrière-plans chinois, que j’ai sous les yeux lorsque j’écris. 

  • 33 Gérard Macé, Leçons de choses, dessins Émile Boucheron, Paris, Gallimard, « NRF », 2004. 

M.F. Diriez-vous un mot des dessins d’Émile Boucheron et de ses « leçons de choses33 » ?

  • 34 Serge Boucheron (1933-2023), disciple de Georges Canguilhem, professeur de philosophie au Lycée Con (...)

G.M. J’ai eu en classe préparatoire un professeur de philosophie qui est mort il y a quelques mois34, et qui, pendant toutes ces années, fut mon ami le plus proche, ainsi qu’un lecteur assidu. L’été, j’allais le voir en Touraine, dans son village natal où il avait une maison, et c’est ainsi que j’ai découvert une nature morte encadrée, des chapeaux de femme. C’était l’œuvre de son père, une « leçon de chose » dessinée à l’école, avec une grande sensibilité, et un sens plastique étonnant pour un gamin de cet âge, élevé à la campagne au début du xxe siècle. C’est ainsi que j’ai eu envie d’écrire, et de publier à tirage limité ces « leçons » enluminées, si je puis dire, au crayon de couleur. Puis Gallimard en a fait une édition courante. Comme je devais étoffer mon texte, je me suis documenté sur ce village, ses habitants, pour esquisser une sorte d’ethnographie en France. J’ajoute que l’instituteur, fauché dès le début de la Grande Guerre, avait préparé, pour ses élèves ou pour l’édition, une géographie illustrée qui, elle, a été publiée chez Allia, par les soins de Serge Boucheron. Tout cela forme un univers, celui de l’école républicaine, des objets dont on prend soin, de la campagne telle qu’elle n’existe plus.

M.F. Avant le choix d’un bercail à Paris ou en Touraine, les années passées à Rome ont été déterminantes pour votre œuvre…

G.M. J’ai dit ailleurs que le baroque m’avait permis d’entrer dans Rome, alors que je n’avais pas fait d’études classiques (le latin semblait superflu dans mon lycée de banlieue, inutile pour un fils d’ouvrier). La poésie du xvie siècle m’a donné le goût de l’architecture (quelques photos en noir et blanc ont suffi), et je suis allé à Rome, en 1970, pour voir les chefs-d’œuvre du Bernin et de Borromini. On ne se rend pas compte, aujourd’hui, à quel point le baroque était méprisé, quand il n’était pas simplement ignoré. Je me suis livré à un jeu de piste dans Rome, car rien n’était signalé de ce que je voulais voir, et je me suis promené avec ivresse dans ce labyrinthe. De 1975 à 1977, j’ai séjourné à la Villa Médicis dont Balthus était le directeur. Au retour j’ai écrit Rome ou le firmament, un mot que j’empruntais à « L’Huître » de Francis Ponge, ce qu’il a aussitôt reconnu lorsque j’ai publié le début du livre dans la Nouvelle Revue française

  • 35 Gérard Macé,  Bibliothèque tournante, op. cit., p. 90.
  • 36 « Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 22 janvier 1979 », Archives familiales A. Ponge.
  • 37 Gérard Macé, Rome ou le firmament [1983], Paris, Arléa, « Arléa Poche », 2018.
  • 38 « Pour Francis Ponge, présent dans ce livre (afin de lui redire combien toute poésie vit aussi d’un (...)
  • 39 Gérard Macé, Vies antérieures [1991], Paris, Gallimard, « L’Imaginaire », 2022, p. 18-28.
  • 40 Ibid., p. 11-14 (le scribe), p. 25-31 (Ésope), p. 35-41 (Jérôme), p. 45-51 (Tarafa et le roi d’Hîra (...)
  • 41 Gérard Macé, Les Trois Coffrets, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1985.
  • 42 Gérard Macé, Le Dernier des Égyptiens, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1988.

M.F. Oui, vous expliquez d’ailleurs dans l’entretien avec Thierry Romagné35 que c’est le télescopage de deux images, celle de « L’Huître » de Ponge et de la vision de Rome au crépuscule36, depuis probablement les jardins de la Villa Médicis, qui a induit le titre de l’ouvrage qui suit : Rome ou le firmament37, publié en 1983.Avec Rome, on rejoint aussi le rappel d’une filiation avec Ponge (dont témoignait déjà la dédicace d’Ex Libris38), sauf que, si l’héritage antique compte pour vous, vous ne manifestez pas de préférence envers la romanité. Par exemple, dans Vies antérieures, vous citez Simonide de Céos39, mais aussi d’autres figures comme Ésope, saint Jérôme ou le roi d’Hîra et Tarafa40. N’y a-t-il pas un goût du mystère chiffré dans votre œuvre qui vous distingue de Ponge et vous rapproche de Nerval et de Gautier ? La figure du scribe dans Vies antérieures fait du reste écho à certains de vos ouvrages antérieurs, comme Les Trois Coffrets41, qui évoque une Romaine du iie siècle et Le Dernier des Égyptiens42, qui suit la trace de Champollion ?

G.M. C’est juste.

  • 43 Dominique Rabaté, « Sur « la piste romanesque » de Champollion », Gérard Macé, la « pensée littérai (...)

M.F. Par le goût pour cette autre tradition, celle des récits fantaisistes et fantastiques du xixe siècle, vous vous distinguez peut-être aussi de Ponge par une forme de « tentation romanesque » – pour reprendre la piste ouverte par Dominique Rabaté43 au sujet de Champollion ?

G.M. Je me distingue de Francis Ponge, parce que je suis un mauvais disciple. Je veux dire par là que mes admirations, mes intérêts, mes fréquentations n’ont jamais fait de moi un suiveur. Je n’ai pas écrit pour imiter, ou alors c’est à mon insu. D’ailleurs, il me semble que la lecture de Ponge encourage à inventer sa propre voie. Quant à la tentation romanesque, elle est bien faible. Je parlerais plutôt d’un goût pour la narration, dont on oublie trop souvent qu’elle ne se résume pas au roman. Ce sont les histoires brèves qui ont ma faveur : les contes, les histoires zen, les apologues et les fables.

  • 44 Dominique Viart, « Gérard Macé, colporteur de livres et de mondes », Gérard Macé, la « pensée litté (...)
  • 45 Gérard Macé, Vies antérieures, op. cit., p. 26.
  • 46 Gérard Macé, Pensées simples, op. cit., p. 79-80. Gérard Macé, La Carte de l’empire : Pensées simpl (...)

M.F. Oui, vous avez en commun le goût de la fable44. Vos deux œuvres sont nourries toutes les deux par la littérature du xviie siècle : vous avez, moins que Malherbe, La Fontaine en commun... La Fontaine que vous évoquez régulièrement, de Vies antérieures45 à Pensées simples46.

G.M. Oui, Perrault, La Fontaine m’ont souvent accompagné ; Lewis Carroll aussi.

  • 47 « Nous revenons (presque) de Rome, une fois encore – et j’essaie d’écrire sur Borromini (pour dire, (...)

M.F. Rome vous a porté à écrire sur Francesco Borromini en établissant un lien avec le passé antique de la ville, mais aussi en vous intéressant à la créativité formelle singulière du rival du Bernin47. On pourrait croire à un hommage déguisé à l’entreprise pongienne…

G.M. C’est la réconciliation de l’antique et du baroque, mais le conflit entre un baroque austère, celui de Borromini, et un baroque plus exubérant, celui du Bernin. Chez Francis Ponge, la tension entre le classique et le baroque anime souvent sa prose. C’est même ce qui fait son intensité, et son charme. Tension, également, entre la forme achevée, aussi serrée qu’un sonnet, et les variantes, les variations à l’infini…

  • 48 Francis Ponge, « Le Galet », Le Parti pris des choses, op. cit., p. 49-56. « Entre caillou et roche (...)
  • 49 Gérard Macé, Où grandissent les pierres, Saint-Clément, Fata Morgana, 1985, p. 17-18.

M.F. Est-ce que vous seriez d’accord pour dire que l’attention portée par Ponge au proche, vous l’avez poursuivie dans le lointain, le lointain géographique comme le lointain onirique ? Je pense notamment au petit volume paru chez Fata Morgana en 1985, Où grandissent les pierres, qui, faisant appel à « la légende et la géologie », rappelle « Le Galet48 » et qui évoque l’archipel du Japon, un univers où « météores et mousses répondent à la sécheresse de l’océan49 ». On verrait ici se joindre à la lecture de Ponge, celle, par exemple, de Blaise Cendrars ou de Nicolas Bouvier.

G.M. J’approuve, en mettant Segalen et Michaux, sans oublier les ethnographes, à la place de ceux de Cendrars et de Bouvier. Ce n’est pas de l’ordre du jugement, c’est juste plus précis. 

  • 50 Gérard Macé, Tambours debout, dessins Michel Danton, Mazères, Le Temps qu’il fait, 2022.
  • 51 Gérard Macé, Bibliothèque tournante, op. cit., p. 86, p. 89 et p. 93
  • 52 « Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 25 juin 1976 », Archives familiales A. Ponge.

M.F. Vous cultivez aussi un goût pour les autres langues et les autres signes (jusque dans le dialogue avec les vignettes de Michel Danton dans Tambours debout50) – ce qui rappelle la filiation avec Michaux que vous avez déjà évoquée, ainsi que le rappelle Bibliothèque tournante51. L’allégorie de la tour de Babel est présente dès votre deuxième recueil, Les Balcons de Babel, publié en 1977. D’ailleurs, dans la lettre du 25 juin 1976 que vous envoyez à Francis Ponge52, vous évoquez vos réflexions critiques qui le concernent, mais vous lui annoncez simplement que le manuscrit du recueil est accepté par Gallimard et vous ne vous étendez pas sur le contenu, comme s’il était moins concerné.

G.M. Par discrétion, tout simplement, et pour ne pas prendre le risque de l’ennuyer.

M.F. On rapproche souvent les Pochades en prose de Ponge de ses premières rencontres avec des peintres et des plasticiens, de ses premiers écrits sur l’art (notamment à cause du titre qui emprunte au vocabulaire des beaux-arts). Mais ce sont surtout des pages de notes lumineuses au moment de la découverte du site de Sidi-Madani où il est invité avec Camus, Calet, et Kermadec pour donner des conférences sur la poésie.
Il y a peut-être une autre veine d’écriture poétique ébauchée ici : le journal de voyage, que vous développerez davantage que lui. S’agit-il pour vous d’une forme de jubilation dans le dépaysement et la confrontation avec une altérité nouvelle ?

G.M. Une altérité nouvelle, oui, c’est bien cela. L’épreuve du réel passe par des expériences renouvelées. Le trouble, le vacillement apportent autant que les certitudes, qu’ils mettent en crise. D’où le chinois, les hiéroglyphes, l’attention aux rêves et à la photographie, les voyages au Japon et en Afrique. C’est moins proche de nous que la lessiveuse ou le mimosa, mais cela joue un rôle comparable. C’est la forme que prend le monde, à un certain moment. Les jardins de Kyoto, comme la Rome baroque ou les chefferies du pays bamileke sont des constructions qui sont aussi des vues de l’esprit.

  • 53 Gérard Macé, Le Goût de l’homme, Paris, Folio, coll. « Essais », 2002.

M.F. Il faut peut-être aussi prendre en compte la place que vous accordez à l’être humain, explicitement présent dans le titre de votre hommage à Dumézil, Le Goût de l’homme53, et dans vos photographies…

G.M. Ah ! L’être humain ! Que nous ne connaissons pas mieux que la méduse ou la pieuvre. Mais je m’en voudrais d’enfoncer des portes ouvertes, même si elles ont tendance à se refermer.Dans Le Goût de l’homme, j’ai accompagné en pensée ceux qui ont proposé quelques versions de l’homme, ses mythes, ses mœurs, sa barbarie et sa grandeur. Et puis, j’ai essayé de deviner l’auteur, non pas au-delà de ses écrits, mais dans ses œuvres. Dumézil se prêtait particulièrement à ce jeu-là, parce qu’il l’appelait de ses vœux, et parce qu’il a parsemé ses livres de confidences.

  • 54 Nous présentons dans ce dossier une photographie de Gérard Macé, extraites de la série « Murs et so (...)

M.F. Vous aviez parlé photographie, par ailleurs, avec Ponge ? Lui aviez-vous montré votre travail photographique54 ?

G.M. Je n’en ai pas eu l’occasion, car j’ai photographié tardivement. À partir de 1997.

M.F. Vous êtes requis actuellement par la lecture de Dante et par la publication d’un nouveau recueil de poèmes avec des pièces en prose. Est-ce là la reprise de textes antérieurs et d’inédits selon l’art du montage que nous évoquions tout à l’heure, ou un nouvel ensemble pensé comme une construction close ?

G.M. Un nouvel ensemble, qui fait alterner vers et prose, poème et glose. Je l’ai intitulé Silhouette parlante, titre emprunté à l’expérience cinématographique. J’ai été cette silhouette dans Mon crime de François Ozon. 

  • 55 Gérard Macé, « Un aïeul énorme », Colportage, op. cit.

M.F. Alors Ponge aujourd’hui, « un aïeul énorme55 » ?

G.M. Le terrain de la poésie est souvent meuble, avec Ponge, elle repose sur un sol ferme.

  • 56 René Descartes, Discours de la méthode, éd. J.-F. Revel et J.-M. Beyssade, Paris, Librairie général (...)

M.F. Terminons alors avec Descartes : « [a]u contraire [des sceptiques], tout mon dessein ne tendait qu’à m’assurer et à rejeter la terre mouvante et le sable pour trouver le roc et l’argile56 ». Francis Ponge comme une fondation solide de roc et d’argile pour construire son œuvre propre, cela vous convient ?

G.M. Citation qui tombe à propos, en effet. Je n’ai jamais voulu abandonner la raison ni le réel, même si je le trouve plus incertain que Francis Ponge. Il m’est arrivé de penser, à mes débuts, que je voulais appliquer sa leçon à l’imaginaire. Illusion sans doute, mais qui fut utile.

Murs et sols no 54

Murs et sols no 54

© Gérard Macé.

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Annexe

Première lettre de Gérard Macé à Francis Ponge, datée du 26 février 1969

Gérard Macé

10 rue Raspail

92 Courbevoie

Courbevoie, le 26/II/69

Francis Ponge,

Vous ne sollicitez « que quelques gens et l’avenir ».

Jeune homme1, je ne sollicite que l’avenir et Francis Ponge.

Vous qui pour tout savez prendre la peine qu’il faut, voilà que j’ose vous demander de prendre la peine de me lire, afin de m’entendre puisque je ne peux m’empêcher de parler (pardonnez-moi de ne savoir me contenir).

Après ma visite à Ferdinand Springer, je suis allé la semaine dernière jusqu’à votre repaire de Bar s/Loup.

J’ai vu votre maison : pierres assemblées pour une bâtisse sans faille, la nudité pleine, se suffisant à elle-même… le contraire accompli du baroque enfin trouvé là.

J’ai levé les yeux jusqu’au faîte du palmier qui au-dessus de votre toit vit du moindre frisson d’air, comme la lyre tendue.

Je suis resté un long moment dans votre jardin (l’ordre et le soin sans artifices) ; je suis parti apaisé et content après avoir goûté à vos oranges et laissé par terre quelques écorces. C’est pour vous dédommager de ce larcin que je vous écris aujourd’hui. Je veux vous rendre par cette lettre ce que je vous ai volé. Qui d’autre que vous pourrait être mieux placé pour savoir que les mots seuls sont des ersatz des choses, puisque c’est vous qui vous me l’avez appris ?

Francis Ponge, la pierre que vous roulez (dans le torrent de votre vie) amasse peut-être mousse. Pour moi je vous suis sur votre chemin.

S’il fallait que je sois votre Mainard ou votre Racan (que je ramène quoi si cela ne mène à rien ?) ce serait pour faire un livre auquel je rêve (donc, auquel je travaille) intitulé peut-être « Moulin de la Parole2 », un parti pris des mots, le seul parti qui nous restera lorsque nous aurons supprimé, dans notre collective folie, les hommes et les choses. Déjà, les ailes du moulin tournent, pendant que s’envolent les illusions.

Mais il est temps que je l’avoue : je suis professeur, professeur de français. Et voilà qu’avec des élèves de seconde, après tant de fauteurs de troubles (troubles dans l’eau claire où vous buvez), je parle en ce moment de Malherbe.

Et, je ne sais pas si c’était déjà fait, Pour un Malherbe sert de manuel dans un lycée de banlieue. Le croirez-vous ? J’étais passé par Bar s/ Loup (entre autres) pour vous demander la permission. Vous n’étiez pas là, j’ai pris le droit d’utiliser à mes fins (qui seront peut-être des débuts pour quelques adolescents) votre monument.

Quant au mien, il en est à la première pierre, qui prend à peu près cette forme :

      La présence d’un moulin

      suffit au bonheur

      simplement d’être là

                     (comme lui vivant

      du moindre frisson d’air

      nos paroles s’envolant)3

Mais je mens : il manque à mon bonheur votre présence. Pourrais-je vous voir un jour prochain (nous avons le temps) soit à Bar s/Loup (j’y retournerai peut-être en juin) soit à Paris quand vous y êtes ?

Un « écolier »

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Notes

1 Gérard Macé,  Bibliothèque tournante, éd. L. Demanze, Mazères, Le Temps qu’il fait, 2024.

2 Philippe Sollers, Francis Ponge, Paris, Seghers, « Poètes d’aujourd’hui », 1963.

3 Victor Segalen, Stèles, Peintures, Équipée, préf. P.-J. Jouve, éd. A. Joly-Segalen, Paris, Club du meilleur livre, 1955.

4 Eugène Guillevic, Terraqué, poèmes, Paris, Gallimard, 1942.

5 Rémy Belleau, « Petites inventions », Les Poètes du xvie siècle, éd. Albert-Marie Schmidt, Gustave Cohen, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 527-570.

6 Jean Rousset, La Littérature de l’âge baroque en France : Circé et le paon, Paris, Corti, 1953.

7 Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 26 janvier 1969 », Archives familiales A. Ponge. L’astérisque renvoie à cette indication en bas de page : « * j’ai vingt-deux ans ». 

8 Francis Ponge, « La Mort à vivre », Proêmes, Œuvres complètes, éd. B. Beugnot, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », vol. I, 1999, p. 189. Désormais abrégé en OC I.

9 Francis Ponge, « Rhétorique », ibid., p. 192.

10 Francis Ponge, Pour un Malherbe, Œuvres complètes, éd. B. Beugnot, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », vol. II, 2002, p. 3-299. Désormais abrégé en OC II.

11 Pierre-Henri Simon (1903-1972) est un historien de la littérature et un écrivain, entré à l’Académie française en 1967. Son premier roman, Les Valentin, marqué par ses années de militantisme dans les Jeunesses patriotes, s’inscrit dans la veine de la littérature traditionaliste. Il rencontre Emmanuel Mounier en 1933 et reste durablement marqué par sa pensée d’un christianisme social. Prisonnier de guerre, son attitude de résistance lui vaut d’être interné à Lübeck. Il poursuit après-guerre une carrière universitaire à Gand, puis à Fribourg. Il prend position vis-à-vis de la politique menée en Algérie et publie en 1957 un pamphlet Contre la torture qui lui cause des démêlés avec le gouvernement de l’époque. Ami de Beuve-Méry, il entre en 1961 au Monde comme critique littéraire.

12 Gérard Macé, « Un aïeul énorme », Colportage, Paris, Gallimard, « NRF », 2018, p. 80-87.

13 Gérard Macé, Le Jardin des langues, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1974.

14 André Pieyre de Mandiargues, « Préface », dans G. Macé, Le Jardin des langues, op. cit., p. 9-10.

15 Gérard Macé, Le Jardin des langues, op. cit., p. 72.

16 Gérard Macé, Bois dormant [1983], Paris, Gallimard, « Poésie », 2002.

17 Gérard Macé, Leçon de chinois, Saint-Clément, Fata Morgana, 1981.

18 Eliane Formentelli (dir.), Regard, espaces, signes : Victor Segalen, Paris, L’Asiathèque, 1978. Ce colloque du centenaire de la naissance de Victor Segalen réunissait Pierre Emmanuel, Gérard Macé, Jean Roudaut, Henry Bouillier, François Cheng, Giorgio Agamben, Vadime Elisseeff, Eliane Formentelli, Henri Lavondès, Daniel Bougnoux, Kenneth White, Diane de Margerie.

19 « À mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot [...] » (Francis Ponge, « Le Cageot », Le Parti pris des choses, OC I, p. 18).

20 Gérard Macé, Pensées simples, Paris, Gallimard, « NRF », 2011, p. 23-24.

21 Gérard Macé, La Carte de l’empire. Pensées simples II, Paris, Gallimard, « NRF », 2014, p. 46-47.

22 Francis Ponge, « Les Plaisirs de la porte », Le Parti pris des choses, op. cit., p. 21.

23 Francis Ponge, « L’Huître », ibid., p. 21.

24 Francis Ponge, « L’Œillet », La Rage de l’expression, OC I, p. 356.

25 Bryan Deleu a ainsi rendu hommage à Francis Ponge en 2022.

26 Gérard Macé,  Bibliothèque tournante, op. cit., p. 91-92.

27 Francis Ponge, L’Écrit Beaubourg, OC II, p. 895-912.

28 « Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 27 mars 1977 », Archives familiales A. Ponge.

29 Francis Ponge, « De la nature morte et de Chardin », L’Atelier contemporain, OC II, p. 661.

30 Francis Ponge, « Matière et mémoire », Le Peintre à l’étude, OC I, p. 116-123.

31 Francis Ponge, « Exposition Springer », L’Atelier contemporain, OC II, p. 593.

32 Lao Tseu, Tao tö king, trad. Liou Kia-Hway, préf. Etiemble, Paris, Gallimard, « Idées », 1974.

33 Gérard Macé, Leçons de choses, dessins Émile Boucheron, Paris, Gallimard, « NRF », 2004. 

34 Serge Boucheron (1933-2023), disciple de Georges Canguilhem, professeur de philosophie au Lycée Condorcet (Paris 9e).

35 Gérard Macé,  Bibliothèque tournante, op. cit., p. 90.

36 « Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 22 janvier 1979 », Archives familiales A. Ponge.

37 Gérard Macé, Rome ou le firmament [1983], Paris, Arléa, « Arléa Poche », 2018.

38 « Pour Francis Ponge, présent dans ce livre (afin de lui redire combien toute poésie vit aussi d’un sentiment filial) » (Francis Ponge, Album Amicorum, éd. A. Ponge, préf. G. Farasse, Paris, Gallimard, « Les Cahiers de la NRF », 2009, p. 179).

39 Gérard Macé, Vies antérieures [1991], Paris, Gallimard, « L’Imaginaire », 2022, p. 18-28.

40 Ibid., p. 11-14 (le scribe), p. 25-31 (Ésope), p. 35-41 (Jérôme), p. 45-51 (Tarafa et le roi d’Hîra).

41 Gérard Macé, Les Trois Coffrets, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1985.

42 Gérard Macé, Le Dernier des Égyptiens, Paris, Gallimard, « Le Chemin », 1988.

43 Dominique Rabaté, « Sur « la piste romanesque » de Champollion », Gérard Macé, la « pensée littéraire », dans Dominique Viart (dir.), Écritures contemporaines, no 9, Caen, Minard, « Lettres modernes », 2007, p. 131-148.

44 Dominique Viart, « Gérard Macé, colporteur de livres et de mondes », Gérard Macé, la « pensée littéraire », op. cit., p. 17.

45 Gérard Macé, Vies antérieures, op. cit., p. 26.

46 Gérard Macé, Pensées simples, op. cit., p. 79-80. Gérard Macé, La Carte de l’empire : Pensées simples II, op. cit., p. 55.

47 « Nous revenons (presque) de Rome, une fois encore – et j’essaie d’écrire sur Borromini (pour dire, entre autres, combien le baroque romain emprunte à l’Antiquité : baroque, comme nulle part ailleurs, latin et… gothique !…) » (« Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 09 mai 1978 », Archives familiales A. Ponge).

48 Francis Ponge, « Le Galet », Le Parti pris des choses, op. cit., p. 49-56. « Entre caillou et rocher, le galet de Francis Ponge à la fin du Parti pris des choses. Une conclusion lisse et ronde » (Gérard Macé, Pierres de rêve suivi de Absentes de tout bouquet et de Voix mortes, Paris, La Pionnière, 2007, p. 11).

49 Gérard Macé, Où grandissent les pierres, Saint-Clément, Fata Morgana, 1985, p. 17-18.

50 Gérard Macé, Tambours debout, dessins Michel Danton, Mazères, Le Temps qu’il fait, 2022.

51 Gérard Macé, Bibliothèque tournante, op. cit., p. 86, p. 89 et p. 93

52 « Lettre de Gérard Macé à Francis Ponge du 25 juin 1976 », Archives familiales A. Ponge.

53 Gérard Macé, Le Goût de l’homme, Paris, Folio, coll. « Essais », 2002.

54 Nous présentons dans ce dossier une photographie de Gérard Macé, extraites de la série « Murs et sols » qui rend compte de divers cheminements et voyages.

55 Gérard Macé, « Un aïeul énorme », Colportage, op. cit.

56 René Descartes, Discours de la méthode, éd. J.-F. Revel et J.-M. Beyssade, Paris, Librairie générale française, 1973, p. 123.

1 J’ai vingt-deux ans.

2 Gérard Macé, « Moulin de la parole », Syllepses, no 5, hiver 1971, Grenoble, Éditions de la Nauf créatique, 1971.

3 « Les ailes d’un moulin suffisent à la présence blanche : vivant du moindre frisson d’air, nos paroles s’envolant […] », Gérard Macé, « Moulin de la parole », art. cit.

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Table des illustrations

Titre Murs et sols no 54
Crédits © Gérard Macé.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/fabriquepongienne/docannexe/image/306/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 664k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Marie Frisson, « « Je suis un mauvais disciple » (à propos de Francis Ponge) »La Fabrique pongienne [En ligne], 1 | 2024, mis en ligne le 31 décembre 2024, consulté le 21 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/fabriquepongienne/306 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/13g9d

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Auteur

Marie Frisson

THALIM – Université Sorbonne Nouvelle

Spécialiste des formes poétiques et notamment du prosimètre, Marie Frisson s’intéresse aux différentes pratiques poétiques en langue française, ainsi qu’aux pratiques éditoriales. Sa recherche porte le dialogue de la poésie contemporaine avec son passé littéraire et culturel, également avec les autres arts.
Elle est membre du bureau de la Société des lecteurs de Francis Ponge présidée par Benoît Auclerc. Elle a notamment publié « Mémoire, histoire et matériologie » (préf.), dans A. Ponge, Pour une vie de mon père : rétrospective 1943-1945, Paris, Classiques Garnier, coll. « Études de littérature des xxe et xxie siècles », no 125, tome IV, 2024 ; « “Ce qui nous relie” : Claude Esteban et la collection “Poésie” aux éditions Flammarion (1983-1994) », dans I. Diu et S. Linarès (dir.), Éditer en poète, La Fresnaie-Fayel, Otrante, 2024 ; « Jean-Marie Gleize, poète lakiste », dans R. Benini et L. Michel (dir.), Actes du colloque international « Jean-Marie Gleize », Paris, Questions théoriques, 2024 ; « Narcisse inversé : la relation critique de Pierre Chappuis », Revue Nu(e), no 80, 2023, URL :
www.poesibao.fr/revue-nue-n-80-pierre-chappuis/ ; « La critique d’art de Francis Ponge : façon(s) d’écrire. Heur et bonheur d’expression dans Matière et mémoire », dans C. Bayle, P. Kaenel, S. Linarès (dir.), La Critique d’art des poètes, Paris, Éditions Kimé, 2022.

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