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Pratiques paysannes oubliées

L’étêtage et l’émondage des arbres en Grande-Bretagne (1600-1900)
Sandrine Petit et Charles Watkins
p. 197-214

Résumés

Résumé
En Grande-Bretagne l’étêtage et l’émondage des arbres étaient des pratiques courantes jusqu’au xviie siècle. Au milieu du xviiie siècle, l’émondage devient plus rare et tend quasiment à disparaître au cours du xxe. Il persiste dans les régions rurales méditerranéennes, en Scandinavie et dans la zone intertropicale. Cet article retrace le cheminement des idées d’auteurs spécialistes de l’agriculture, de la forêt et du paysage, dont les écrits, publiés entre 1600 et 1900, ont été analysés. Peu d’entre eux s’intéressent à l’émondage et cette pratique suscite au fil du temps une attention moindre relayée par une vive critique au fur et à mesure que, à partir du xviie siècle, les disciplines forestière et agricole s’individualisent.

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Notes de l’auteur

Les auteurs sont reconnaissants au British Council et à l’Université de Nottingham pour leur soutien. Une version anglaise a été publiée dans la revue Rural History XIV (2), 2003 : 157-176.

Texte intégral

1L’émondage des arbres était une pratique très répandue en Grande-Bretagne jusqu’au xviiie siècle. Peu d’ouvrages lui ont cependant été consacrés. Jadis, les populations rurales plantaient, entretenaient et utilisaient les arbres se trouvant dans les haies, en bordure de rivière ou dispersés dans les terres de pâture ou de culture. Les arbres représentaient alors une source majeure de fourrage et de bois. Le feuillage était périodiquement récolté pour nourrir le cheptel bovin et ovin. Les branches de plus grosse dimension étaient aussi taillées pour le chauffage domestique. Au milieu du xixe siècle, ces usages tendent à décliner ; ils auront disparu à partir de la seconde moitié du xxe siècle. Aujourd’hui l’émondage est toujours pratiqué en Europe, notamment dans plusieurs pays méridionaux (Italie, Grèce, Bulgarie), mais en Scandinavie également. En zone tropicale, cette pratique demeure une opération de production de fourrage et de combustible, fondamentale pour les populations rurales.

2Cet article propose une histoire des idées relatives à l’émondage à partir des écrits des ingénieurs de l’agriculture et des forêts ainsi que de ceux des jardiniers paysagistes qui se sont exprimés entre 1600 et 1900. Nous pouvons scinder cette période en deux phases. Du xviie au xviiie siècle, l’émondage est une pratique traditionnelle peu documentée mais que les agronomes et les forestiers citent comme étant utile aux paysans. À la fin du xviiie siècle, les praticiens et les théoriciens des sciences agricoles, forestières et paysagères vont critiquer avec vigueur ce prélèvement de bois et de feuillage, et voir dans l’émondage l’expression d’un usage obsolète et dégradant de l’arbre. Cette pratique, qui a aujourd’hui quasiment disparu en Grande-Bretagne, bénéficie depuis peu d’un regain d’attention de la part des écologues et des paysagistes. Les arbres émondés sont considérés comme des éléments importants du paysage et du patrimoine et font désormais l’objet de programmes de conservation en Angleterre et en Norvège [Haeggstrom 1988, 1990].

3Nous disposons d’informations éparses concernant la pratique d’émondage et les raisons de son déclin ; les savoir-faire qui s’y rattachent sont tout aussi méconnus. Cette lacune s’expliquerait par le caractère hybride de cette pratique. Ni purement forestière ni purement agricole, l’opération d’émondage aurait été marginalisée par l’agronomie et la foresterie au moment où ces dernières s’affirmaient comme des disciplines séparées. Ces approches sectorielles auraient accru la division entre espaces forestiers et espaces agricoles et favorisé l’exclusion de leurs usages respectifs [Watkins et Kirby 1998 : XII]. Le manque d’intérêt pour les arbres des espaces ruraux s’est perpétué jusqu’à une époque très récente. La FAO a lancé en 2000 une étude sur les arbres hors forêts, ce qui pourrait marquer une curiosité nouvelle vis-à-vis des usages des arbres champêtres [Bellefontaine et al. eds. 2001].

L’étêtage et l’émondage dans l’espace et dans le temps

Définitions

4L’émondage désigne une « opération consistant à couper les branches latérales, et parfois le tronc, pour faire naître des rejets » (Le Petit Robert). Étymologiquement, émonder, c’est rendre net, rendre propre, non seulement en éliminant certaines branches au ras du tronc mais aussi en coupant l’extrémité des branches ou les rameaux, à la périphérie de la cime. D’ailleurs le Littré donne la définition suivante : « nettoyer les arbres, les débarrasser des branches mortes, des plantes parasites, des mousses, etc. ».

  • 1 To pollard (verbe) ; a pollard (nom) désigne l’arbre étêté ; pollarding veut dire l’étêtage.
  • 2 Parfois orthographié dans les anciens textes «to shread » ; «shredded trees» désigne les arbres émo (...)

5La récolte périodique des rameaux s’opère selon deux techniques : l’étêtage et l’émondage. L’étêtage ou culture en têtards suppose de récolter régulièrement les rejets provenant de la section du tronc à une certaine hauteur au- dessus du sol. En anglais, le terme qui désigne l’arbre est pollard1. Le bourgeon terminal est donc sectionné et d’abondants rejets de même taille se développent au niveau du tronc. Les arbres deviennent alors des arbres têtards. La seconde technique revient à préserver le bourgeon terminal et à tailler les branches latérales. Le tronc intact, rectiligne, est plus long que dans le cas des arbres têtards et pourra être valorisé comme bois de charpente [Le Play ed. 1996]. Ce mode de culture devrait être appelé « émondage », en anglais to shred2. Le terme « émondage » sert souvent à indiquer indifféremment l’étêtage ou l’émondage [Trivière 1991]. Ainsi il nous arrivera d’employer les mots « coupe », « ravalement », « rabattement » ou « taille », s’agissant des deux techniques de coupe, et l’expression « pratique d’émondage » rassemblera les deux modes de culture. En revanche, pour traduire de façon précise pollarding et shredding, nous emploierons respectivement « étêtage » et « émondage ».

Répartition géographique

6Aujourd’hui encore, le feuillage d’arbres sert de fourrage dans les territoires montagneux de la Grèce [Halstead 1998 ; Rackham 1989 ; Saratsi 2002], de l’Espagne et en Bulgarie [Haeggstrom 1998]. En Italie du Nord, dans la région de Vicence par exemple, la culture du frêne, de l’aulne, du peuplier et du hêtre perdure, et le fourrage produit est soit directement consommé soit stocké [Bargioni et Sulli 1998]. En Norvège, les branches des peupliers, des frênes, des pins, des saules, des ormes, des sorbiers sont rabattues et le feuillage est séché puis stocké. Haeggstrom décrit les prés aux arbres étêtés destinés à la production fourragère, le long des rivages de la Baltique, dans le sud-ouest de la Finlande et en Suède méridionale [1998]. En Norvège occidentale, quelques agriculteurs ont toujours recours au fourrage ligneux, en particulier pour ses effets prétendument bénéfiques pour la santé animale [Austad 1988 : 21]. L’émondage sert également à la production de bois de chauffage, de charbon de bois et de bois de construction. En France, l’augmentation du prix du bois de chauffage au cours des dernières décennies a permis de maintenir l’émondage des arbres des champs, mais, contrairement à la pratique paysanne ancienne, les branches sont rabattues, par des ouvriers, à des intervalles plus longs, et, d’un diamètre plus large, les rondins fournis sont adaptés aux foyers des cheminées [Trivière op. cit.].

7En zone tropicale, on accorde peu d’attention à l’émondage bien que ce soit une technique répandue de production de fourrage et de combustible, notamment en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Le fourrage ligneux est vital pour le cheptel élevé dans les régions sèches comme le Sahel [Petit et Mallet 2001]. Sa valeur nutritive est scientifiquement reconnue [FAO 2001] et les deux tiers des 10 000 espèces d’arbres africaines peuvent être utilisées pour le pâturage [FAO 1992]. Parfois, le feuillage est si précieux qu’il donne lieu à un marché et à une réglementation des usages. Au Mali, le fourrage de Pterocarpus erinaceus est, en saison sèche, vendu à la capitale Bamako. En 1989-1990, 1 400 tonnes de fourrage frais ont ainsi été commercialisées [Anderson et al. 1994]. Dans les montagnes d’Asie, le ravalement des arbres est une pratique courante. Les arbres fourragers sont cultivés entre autres par les agriculteurs en Inde, au Népal et au Sri Lanka. Au Rajasthan (Inde), la propriété des arbres fourragers est clairement établie et les droits d’exploiter un arbre font l’objet de transactions marchandes [Delouche 1992]. Peu d’auteurs, au nombre desquels Khanal et Subba [2001], ont renseigné les savoirs locaux concernant le fourrage ligneux et sa valeur nutritive, en l’occurrence au Népal. Près de Katmandou, l’augmentation de la population a encouragé, pour la production de fourrage, la plantation d’arbres près des habitations [Gilmour et Nurse 1991]. L’émondage se pratique aussi dans les systèmes agroforestiers, par exemple dans le système traditionnel quezungual au Honduras : les arbres provenant d’une régénération naturelle sont conservés et leurs branches sont régulièrement récoltées [Hellin et al. 1999]. Ces cas ne sont pas exhaustifs mais indiquent l’importance de l’émondage dans les systèmes de production des zones rurales. Dans les régions tropicales et sèches, les feuilles des arbres fertilisent le sol et sont transformées en outils et en charpentes.

Origines et prémices

8La pratique d’émondage est très ancienne. Les études archéologiques la font remonter au néolithique [Rasmussen 1990]. À l’époque préhistorique, les feuilles d’orme et de frêne auraient constitué l’alimentation principale du bétail [Iversen 1960 ; Spray 1980 ; Troels-Smith 1960 citée par Vera 2000 : 81]. Les textes datant des périodes romaines évoquent la consommation de fourrage ligneux par le bétail. En Europe centrale et occidentale, l’orme, le frêne, le sorbier, le noisetier, l’aubépine et même certains conifères auraient été taillés afin de produire du fourrage [Vera op. cit. : 110].

9Les représentations picturales des paysages, les écrits (littérature savante, textes de droit, baux de fermage) et la présence de vieux arbres émondés prouvent la fréquence de ce mode de culture de l’arbre en Europe au cours des siècles passés. Haeggstrom [1994, 1996] a remarqué combien on figurait les arbres émondés dans les peintures dès le Moyen Âge et ce jusqu’à nos jours. Il considère que le tableau « Les Très Riches Heures de Jean Duc de Berry », datant de 1411-1416, est la première représentation réaliste d’arbres étêtés, entretenus, disposés de façon linéaire le long de la Seine [Haeggstrom 1994]. Linnard [2000 : 21] a retrouvé une illustration du xiiie siècle montrant des arbres émondés et en taillis. En Grande-Bretagne, l’émondage des saules sur les rives des rivières est attesté dès le xiiie siècle [Rackham 1976 : 171]. Au Moyen Âge on trouvait beaucoup d’arbres émondés dans les pâtures boisées (silva pastilis) [Muir 2000 : 104 ; Rackham 1976 : 146]. D’après Tittensor [1977-1978 : 364], des hêtres persistent encore aujourd’hui dans le Mens (Sussex). Les toponymes nous renseignent sur la vivacité de la pratique. Ainsi, le terme Hollins ou ses dérivés désignaient probablement les endroits où le houx était utilisé comme fourrage, précisément dans le nord de l’Angleterre et dans la New Forest [Muir op. cit. : 95 ; Radley 1960-1961 : 91 ; Spray op. cit. : 99 ; Thirsk 1967 : 191 ; Tubbs 1968].

  • 3 Ancient countryside : paysage formé avant 1700, opposé à planned countryside.

10Sur de nombreux territoires de Grande- Bretagne, témoignant de cette tradition paysanne, de très vieux arbres émondés subsistent dans d’anciennes propriétés domaniales, dans les communaux, les parcs et les haies [Linnard op. cit. : 133 ; Muir op. cit. ; Rackham 1980]. Les arbres émondés, dont la présence dans les haies était quasiment systématique, donnaient à la campagne ancienne3 sa typicité. En effet, le paysage se composait d’un réseau dense de haies, d’arbres épars et de petits bois. L’instauration du système des enclosures, entreprise au cours du xviiie siècle afin d’enclore les terres et de supprimer les communaux, transforma de manière radicale ce paysage structuré par un linéaire boisé et des bosquets.

Essences concernées

11L’émondage ne se limitait pas à l’usage d’une espèce ligneuse. Au contraire étaient taillées maintes essences, tels le frêne, l’orme, le hêtre, le chêne, le saule, l’aulne, le charme, l’aubépine, l’érable, le prunellier, le houx, le châtaigner. Le frêne et l’orme étaient particulièrement recherchés pour le fourrage [Spray op. cit.]. Le charme servait à la fabrication de charbon de bois de très bonne qualité mais était également ravalé pour son feuillage [Haeggstrom 1998 ; Warrington et Brookes 1998]. Aujourd’hui les saules têtards sont encore étêtés pour dégager les voies d’eau [Barnes et Skipper 1995].

12La périodicité des tailles dépendait des besoins en fourrage ou en bois. Ainsi, pour le fourrage, les arbres étaient taillés annuellement ; pour le bois, l’intervalle était plus long : de l’ordre d’une dizaine d’années. L’analyse des cernes d’accroissement révèle que l’émondage avait une périodicité de 13 ans dans la forêt d’Epping, de 12 à 36 ans dans la forêt de Hatfield et de 18 à 25 ans dans la forêt de Hainault [Rackham 1989 : 247].

Méthodologie

13Cet article se fonde sur l’étude d’environ 200 documents publiés, dont les auteurs sont des savants, des chroniqueurs, des ingénieurs, dans les domaines de la forêt, de l’agriculture et du paysage. Nous avons consulté l’ensemble des ouvrages du début du xviie siècle concernant l’agriculture et l’amélioration des terres en général, et les premiers travaux de la fin du xviie consacrés à la forêt. De plus, nous avons examiné les General Views, diagnostics agricoles rédigés dans le cadre des « comités d’agriculture » pour chaque comté et parues entre 1793 et 1813. Elles offrent une vision panoramique de l’émondage sur le territoire britannique. Enfin, ont été pris en compte les textes de foresterie et les écrits des paysagistes-jardiniers du xviiie et du xixe siècle.

  • 4 Le mot rundle, ou son équivalent runnel, est utilisé dans le comté de Radnor pour désigner un arbre (...)

14On constate que l’émondage est un élément relativement mineur dans la plupart des documents, bien que fréquemment on y fasse allusion. Aucun ouvrage ne discute ces techniques en tant que telles ; probablement n’étaient-elles d’ailleurs pas considérées comme relevant d’un savoir-faire et ne méritaient-elles pas l’attention des savants. Une grande variété de termes désignent cette pratique, certains étant typiques d’une dénomination locale4. Cette variété augure de la richesse des usages et des pratiques de culture des arbres champêtres.

Arbres têtards et arbres émondés : une ressource importante entre 1600 et 1750

15Plusieurs manuels d’agriculture datant de la fin du xvie siècle et du début du xviie traitent de la culture des arbres dans les campagnes. Walter Blithe, Gervase Markham et John Worlidge débattent à l’époque de l’amélioration des techniques agricoles et de l’instauration du système d’enclosure qu’ils présentent comme nécessaires au progrès agraire [Thirsk 1985 : 378, 547]. Foure Bookes of Husbandry de Heresbach, publié en 1577, est aussi un ouvrage qui fait date : l’exploitation des arbres, leur physiologie et les techniques de pépinière y sont discutées. Dans sa seconde édition, The English Husbandman de Gervase Markham, datant de 1615, contient un passage concernant les arbres : « The ordering of all sorts of woods ». Markham propose là une organisation rationnelle des plantations et un élagage systématique afin de produire du bois de construction pour les navires [Sharp 1975 : 53]. Pour lui, les haies représentent une source de bois et augmentent de surcroît la valeur d’un domaine. De leur côté, Gabriel Plattes et Samuel Hartlib partagent les mêmes idées [ibid. : 56] : ils sont soucieux de l’approvisionnement en bois de la marine et voient dans les haies une réserve de ce précieux matériau [ibid. : 54]. Certains contemporains tel Arthur Standish tiennent un discours alarmiste et annoncent une crise nationale liée à la pénurie de bois [ibid. : 55].

16La superficie boisée atteint, au cours du xviie siècle, son niveau le plus bas [Watkins et Kirby op. cit. : xii] alors que l’influence mondiale de la Grande-Bretagne repose sur sa force navale et, par conséquent, sur la disponibilité en bois pour la fabrication des navires de la flotte royale. La Royal Society de Londres commandite à John Evelyn une étude sur les forêts. Publiée sous le titre Sylva en 1664, celle-ci constitue le premier ouvrage de référence sur le sujet et Evelyn devient un des conseillers de la Couronne en matière de protection des forêts. Dans Sylva, il encourage les propriétaires terriens à planter des arbres pour assurer l’approvisionnement en bois ; à cette intention sont fournies des descriptions détaillées des espèces ligneuses. Au même moment paraît un volume majeur dans le domaine agricole : Systemae Agriculturae de John Worlidge.

17Un ouvrage de Moses Cook de 1670 va considérablement influencer la sylviculture : The Manner of Raising, Ordering and Improving Forest-Tree. D’autres auteurs font part de leurs conseils pour une bonne gestion de l’approvisionnement en bois. Dans England’s Improvement Revived, John Smith [1670] mentionne la taille des arbres dans un paragraphe dédié à l’entretien et à l’élagage. Forestier au service du roi celui-ci recommande d’établir des plantations le long des rivières navigables [Sharp op. cit. : 60]. Dans England’s Improvement by Sea and Land, Andrew Yarranton [1677] suggère une amélioration des voies navigables pour le transport du bois ramassé à l’intérieur des terres.

18La plupart des auteurs du xviie siècle ne s’opposent pas à l’émondage ; ils préconisent cependant de l’éviter quand il s’agit de produire du bois pour la construction navale. Ainsi Heresbach introduit-il une distinction entre le terme wood, qui s’appliquerait au bois de basse qualité et au bois de chauffage, et le terme timber, qui s’appliquerait au bois de charpente, au bois d’œuvre. Heresbach [1577 : 101] conseille de ne pas étêter le chêne dont le tronc est utilisé comme bois d’œuvre. Dans les autres cas, le chêne, le saule ou le hêtre peuvent être taillés en têtards « à 7 ou 8 pieds au-dessus du sol » [ibid. : 104]. Pour Worlidge [1669 : 160], l’émondage est idéal en ce qu’il permet d’avoir, dans les parcs ou le long des routes, des arbres au tronc net et dont les branches sont à une hauteur appropriée. Ainsi, Worlidge [ibid. : 135] ne désapprouve pas l’émondage lorsqu’il affirme que les arbres émondés ont, en tout lieu, leur place. Dans le chapitre « Of Pruning Forest-Trees » de son livre The Whole Art of Husbandry, Mortimer se fait l’avocat de l’émondage qu’il considère comme similaire à l’élagage [1707 : 396]. Les arbres tortueux peuvent être rendus rectilignes par l’émondage, donc émondage et production de bois d’œuvre sont compatibles. Il pense que la porosité du tronc attribuée à l’émondage résulte en fait d’une taille maladroitement effectuée et qui facilite la pénétration de l’humidité [ibid. : 393].

Bois de chauffage et fourrage

19L’étêtage est fréquemment cité quand les auteurs font allusion à la production de bois de chauffage. Standish [1611 : 13] reconnaît que la taille et l’émondage contribuent à accroître la production de bois de feu. Markham juge l’étêtage nécessaire dans les zones dépourvues de bois, les arbres procurant à ceux qui les ont plantés des revenus utiles.

20Worlidge [op. cit. : 126] encourage la plantation d’arbres têtards dans les haies. Selon lui, lorsque le bois de feu manque, il faut planter des espèces à croissance rapide, tels le frêne, l’orme, le peuplier, le saule, puis les émonder après cinq à dix ans de croissance. Il estime que l’émondage ou l’étêtage doivent être préférés au taillis pour la production de bois de feu. Dans The Whole Art of Husbandry, Mortimer préconise d’utiliser, comme combustible, le bois d’orme récolté par émondage, tout en préservant le sommet de l’arbre. Cette pratique autorise une récolte régulière de bois de chauffage et permet de faire du tronc un fût de bon bois [Mortimer op. cit. : 331, 397]. Pour Ellis, l’orme et l’érable destinés au bois de chauffage devraient être taillés en janvier. L’étêtage des arbres ne nuit pas à la prospérité locale ; d’ailleurs les émondes de l’orme et du frêne brûlent en faisant un « feu digne d’une reine » (fire for a queen) [1742, I : 56].

21Au xviie siècle, les feuilles d’arbres constituent, l’hiver, un fourrage additionnel. Les moutons sont nourris des frondaisons de l’orme, du frêne, du peuplier, du chêne ou encore du houx [Heresbach op. cit. : 140]. Le feuillage d’orme est recherché et, d’après Worlidge [op. cit. : 133], il est très apprécié des bovins qui, en cette saison, le préfèrent à l’avoine. Cet auteur remarque également que ces arbres taillés sont spécialement bien adaptés aux terres de pâture, les rejets poussant à une hauteur inaccessible au bétail [ibid. : 160]. Meager [1697 : 120] confirme la bonne association de l’élevage et de l’émondage : le peuplier, le tremble, le saule, l’aulne fournissent de l’ombre et un bon fourrage aux ruminants.

22La pratique d’émondage a été différemment perçue selon les espèces ligneuses concernées. Parmi elles, le chêne bénéficie d’un statut à part. Nombre d’auteurs déplorent qu’il soit taillé. Cook [1676 : 58] déclare que les paysans abîment les meilleurs chênes en les réduisant à l’état d’arbres têtards. Il souhaite qu’une loi stricte condamne ceux qui étêtent le chêne, roi des arbres [ibid. : 42]. Pour favoriser leur croissance et fournir du bois d’œuvre les chênes et les ormes situés dans les haies peuvent cependant être émondés [ibid. : 141]. En revanche, selon l’influent Batty Langley, l’étêtage du chêne est avantageux puisque les chênes étêtés vivent plus longtemps [1728 : 212]. Tous approuvent la taille des arbres appelés aquatiks, c’est-à-dire les essences hydrophiles, à l’instar du saule et du peuplier [Blith 1653 : 165 ; Markham 1635, II : 67]. Sans cette taille, ces arbres relèveraient davantage de l’ornementation que d’une production rentable [Worlidge op. cit.].

L’influence de John Evelyn

23John Evelyn, dont le livre Sylva a marqué les esprits, parle peu de la pratique d’émondage. Est-il mal à l’aise avec cette question, sachant qu’au fil des différentes éditions de l’ouvrage, il change le contenu des paragraphes la concernant ? Ainsi, dans la première édition de 1664, il déclare presque théâtralement : « Je ne suis pas un grand ami des arbres étêtés, car la taille rend des arbres dont on aurait pu tirer du bon bois rabougris et tortueux, les met en danger à cause des blessures qu’elle provoque et l’humidité peut ainsi s’infiltrer. » À force de constat, il en accepte peut-être l’usage, précisant la fréquence (tous les 10 ou 12 ans) et la période privilégiée pour l’effectuer (au début du printemps ou à la fin de l’automne).

24Dans les éditions suivantes, Evelyn amende le texte original en reprenant les termes d’auteurs contemporains. Dans celle de 1669, il ajoute : «Le chêne souffrira d’être un arbre têtard, c’est-à-dire d’avoir sa tête coupée. » En 1706, il note que le chêne peut être bon pour les mâts, s’il n’est pas trop taillé, mais qu’il ne peut alors faire du bois d’œuvre [1706 : 208]. Dans l’édition de 1679, il blâme les paysans (husbandmen) qui pratiquent l’émondage [1679 : 151]. Il se réfère à Moses Cook et distingue les arbres qui s’accommodent bien de la taille, tel le charme, d’autres, comme le frêne, qui endurent cette « barbarie ». Il prétend que l’orme, ainsi rabattu, s’affaiblira au niveau du pied, et que son tronc deviendra creux si toutefois il en réchappe [Evelyn 1669 : 141]. En 1669, Evelyn reconnaît néanmoins qu’une coupe fréquente pourrait prolonger la vie des arbres et il justifie de la sorte la présence de vieux arbres émondés dans les cours d’église et autour des édifices anciens. En 1706, reprenant la thèse de Timothy Nourse, il commente l’impact de l’émondage sur les arbres : les chênes et les ormes étêtés ont des troncs de grande circonférence mais ce sont des troncs creux. Le frêne présent dans les haies, une fois « décapité » (decapitated), se remet difficilement de la lame de la scie [Evelyn 1706 : 46-47].

25Une analyse des différentes éditions de Sylva révèle qu’Evelyn discute la pratique d’émondage à partir d’informations éparses et parfois contradictoires. Son point de vue est plutôt nuancé et son jugement paraît peu assuré. Il s’oppose néanmoins vigoureusement à l’étêtage du chêne et à celui de toute autre essence pouvant produire du bois d’œuvre de grande qualité non sans avoir constaté que la taille de certains arbres prolonge leur durée de croissance et de vie.

  • 5 May pole : poteau autour duquel on dansait au mois de mai.

26Les idées de John Smith et de Andrew Yarranton sont proches de celles de leur contemporain Evelyn. Pour Smith [op. cit. : 74], les arbres émondés, arbres nains ou ressemblant à des mâts de Mai5, produisent un bois brut valable seulement pour la construction de bâtiments d’habitation et la fabrication de perches. Il remarque que les arbres taillés ou émondés périssent dans les forêts de Sa Majesté alors que les arbres étêtés poussent lentement et vivent plusieurs centaines d’années.

27Moses Cook s’est davantage intéressé aux arbres émondés que John Evelyn. À plusieurs reprises, s’agissant du frêne et de l’orme, il recourt à l’expression « bons arbres têtards » (good pollards). Il note que les saules et le « peuplier d’eau » sont faits pour être étêtés [1676 : 18]. Cook voit dans l’émondage une pratique rentable d’approvisionnement en bois et en fourrage [ibid. : 102]. Il prône ainsi l’émondage systématique des peupliers d’eau pour la production du bois. Il tente d’expliquer, par le flux de sève, la forme des arbres étêtés : la sève se concentrerait dans la tête de l’arbre têtard et alimenterait de jeunes rejets [ibid. : 76]. Le livre de Moses Cook atteste que l’émondage est très répandu à la fin du xviie siècle. En témoigne, inclus dans une section plus générale concernant la dendrométrie, un paragraphe traitant spécifiquement de la mesure des arbres têtards.

28Au milieu du xviiie siècle, William Ellis, agriculteur de Gaddesden dans le comté de Hertford, est un des auteurs les plus lus [Fussell 1950 : 6]. Il prodigue des conseils aux propriétaires terriens et en profite pour leur vendre des semences et des outils. Dans son livre The Timber-Tree Improved, il consacre un chapitre au « frêne têtard » ainsi qu’un autre au « frêne standard ». Le frêne têtard passe pour produire du bon bois. En effet, si Ellis pense que l’étêtage abîme le chêne, pour lui, les autres essences tels le frêne, l’aulne, le saule, l’orme, l’érable s’accommodent bien de la taille. Il souligne que celle-ci est profitable au saule et que l’étêtage peut être répété tous les trois ans [Ellis op. cit. : 106]. Remarquons que l’arbre têtard est une des trois catégories de forme d’arbre définies par Ellis, au même titre que l’arbre standard et le baliveau.

29Jusqu’au milieu du xviiie siècle, l’émondage est décrit selon une perspective utilitariste et de façon positive, en particulier pour certaines espèces ligneuses. Ses avantages en termes de production sont cités par les auteurs les plus influents dans le domaine de l’agriculture. Cette approche sera relayée par une critique beaucoup plus vive dans les décennies qui vont suivre.

L’étêtage et l’émondage vigoureusement calomniés entre 1750 et 1850

Le point de vue des General Views : une pratique détestable

30Les experts en agriculture de la seconde moitié du xviiie siècle voient dans l’émondage et l’étêtage des pratiques obsolètes et rétrogrades. L’un des principaux opposants à ces pratiques est Arthur Young, le secrétaire du Comité d’Agriculture (Board of Agriculture), une institution établie en 1793.

31Arthur Young est l’éditeur des Annales de l’Agriculture (Annals of Agriculture) [Thirsk 1985 : 588]. Pour lui, l’étêtage est une pratique ancienne, dommageable et qui n’a pas sa place dans un contexte de développement et de modernisation agricoles. L’étêtage et l’émondage sont « barbares » et méprisables ; ils ruinent la production de bois d’œuvre et enlaidissent le paysage du sud-est de l’Angleterre [Young 1769 : 92, 308].

32Arthur Young est scandalisé par le fait que l’on se serve du feuillage comme fourrage. Il cite à ce propos un décret français réglementant cette pratique et en profite pour présenter l’agriculture anglaise comme supérieure à sa voisine d’outre-Manche qui n’a pu éradiquer cet usage. Selon Young, la récolte de rameaux est courante en Italie et en France pour ce qui est de l’orme, du peuplier, du frêne, du charme, du hêtre et de l’aubépine. Les feuilles de chêne sont mélangées à celles d’autres essences, ce qui constitue d’ailleurs un excellent fourrage [Young 1785 : 62]. Les Français utilisent les feuilles de peuplier et d’orme pour nourrir leurs moutons, les feuilles de houx ayant, elles, la réputation d’augmenter la production laitière des brebis [id.].

  • 6 « We declare ourselves enemies to pollards. »

33«Nous nous déclarons les ennemis des arbres têtards »6, scande William Marshall [1796, I : 100] en écho aux propos de John Evelyn. Marshall n’apprécie guère les haies boisées qu’il juge peu appropriées pour clôturer les parcelles. Les arbres têtards de petite taille empêcheraient l’air de circuler et nuiraient à la bonne croissance des cultures [ibid. : 56]. Ces arbres contribuent néanmoins à l’approvisionnement des paysans en bois de feu et en perches, surtout quand les bois et les taillis sont rares. Les taillis produisent en revanche des tiges plus longues et plus lisses [ibid. : 183]. Quant aux saules, ils méritent d’être plantés et étêtés [ibid. : 142].

34Les General Views éditées par le Comité d’Agriculture couvrent tout le territoire britannique et nous permettent d’analyser l’ensemble des particularités régionales et les points de vue respectifs des ingénieurs du développement agricole. Sur les 120 rapports existants, 40 font référence à l’étêtage, à l’émondage ou à la taille des haies. Décrivant les régions anciennes, certains de ces ouvrages évoquent un dense réseau de haies. D’après ces études, les haies boisées représenteraient une importante source de bois dans les comtés de North Riding of Yorkshire, Gloucester, Mid Lothian et Worcester. Si la plupart sont très critiques vis-à-vis de l’émondage, 5 de ces rapports affirment l’utilité de cette pratique en termes de production de fourrage et de bois.

35Les études qui expriment une opinion des plus négatives sont celles qui correspondent aux comtés de Bedfordshire, Buckinghamshire, Berkshire, Middlesex, Norfolk, Pays de Galles du Nord, North Riding of Yorkshire, Northampton, Somerset, Surrey, Shropshire. L’étêtage et l’émondage y sont qualifiés d’« infâmes » (infamous), « nuisibles » (injurious) ou « repoussants » (disgusting). La valeur d’un arbre émondé serait vingt à trente fois inférieure à celle d’un arbre normal [Middleton 1813 : 344].

36Les savants et ingénieurs en agriculture s’en prennent à l’étêtage et l’émondage pour des raisons d’esthétique paysagère. Pour le révérend Saint John Priest [1813 : 257], les arbres étêtés et émondés font tache dans le paysage et cette pratique est préjudiciable à la santé de l’arbre. Middleton est tout aussi sévère quant aux arbres têtards qu’il observe dans les haies du Middlesex : ils défigurent le comté et les propriétés domaniales dans lesquelles ils se trouvent. Les arbres têtards sont pourris et, dépouillés de leurs branches, les arbres émondés ressemblent à des mâts de mai. Transformer des arbres à bois en arbres têtards s’avère « barbare » [Middleton op. cit. : 344-347].

37Indépendamment de ces critiques, certains auteurs reconnaissent que les produits provenant de cette culture paysanne de l’arbre sont nombreux. La taille des haies permet de pallier la pénurie en bois de feu [Anderson 1784, I : 81] et fournirait même des billes de bonne dimension [Pitt 1813 : 371-372]. D’après Pomeroy [1794 : 21], émonder les ormes, très abondants dans les haies, ralentit leur croissance mais génère la production de rondins. Ce bois est utilisé comme combustible, pour la réfection des barrières, la construction des habitations et pour la fabrication de manches d’outils. Si, dans son étude sur le comté de Hereford, Clark se range à l’avis de ceux qui pensent que ces arbres altèrent la beauté du paysage, il reconnaît en revanche une qualité agronomique en ce que les légumes poussent mieux à l’abri des haies et que, de plus, les rejets servent à consolider ces dernières. Dès lors, voir disparaître une telle pratique est aussi illusoire que la supprimer est impossible [Clark 1794b : 66]. Le maintien et l’entretien des haies restent étroitement liés, pour la petite paysannerie, à une récolte de bois substantielle.

  • 7 Mouvement influent du « pittoresque paysager ». Développé et largement discuté par Price au xviiie (...)

38Seuls quelques auteurs de ces études rurales expriment leur admiration pour ces arbres étêtés incarnant « grandeur et âge » [Vancouver 1808]. Leurs dimensions exceptionnelles sont dignes d’étonnement [ibid. : 262]. Les chênes, vieux et étêtés, sont des chênes vénérables [Secretary of the Board of Agriculture 1813 : 149]. Cette sensibilité rejoint celle de la beauté pittoresque7 telle que la conçoit Uvedale Price [Daniels et Watkins 1991 ; Price 1810].

39Tous sont unanimes pour tenir les fermiers responsables de cette abominable pratique et pour accuser les usufruitiers des terres domaniales plutôt que leurs propriétaires. Les paysans, par ignorance, étêteraient les arbres, croyant par là stimuler leur croissance [Pearce 1794 : 57]. John Middleton [op. cit. : 344] se fait l’avocat des propriétaires domaniaux du Suffolk, parlant d’eux comme de personnes qui souhaitent améliorer l’usage des terres tandis que les paysans manient la hache de façon « barbare » et défigurent le paysage. Dans le Shropshire, Plymley fait un commentaire qui va dans ce sens : il accuse les fermiers de couper les rameaux luxuriants avec une telle maladresse que l’arbre est laissé en piteux état [1803 : 216].

40À l’époque, l’émondage est, pour le paysan, une façon de s’assurer une récolte régulière de bois et de fourrage. Il n’est pas exclu que, par le biais de cette pratique, le fermier ou l’usufruitier affirme aussi ses droits d’usage face au propriétaire. C’est ce que sous-entendent certains auteurs. Dans le comté de Bedford, le paysan revendiquerait comme sa propre récolte la seconde repousse consécutive à une première taille des haies [Stone 1794 : 53]. Dans le comté de Radnor, les locataires auraient pu judicieusement, grâce à l’étêtage, s’approprier les arbres. Les arbres à maturité reviendraient au propriétaire. Une distinction est probablement faite entre les branches et le fût de l’arbre. Celui-ci est propriété du fonds tandis que les branches, considérées comme une récolte, échoient au fermier-locataire. La première année, le paysan coupe quelques branches basses et les brûle en cachette. La deuxième et la troisième année, il coupe davantage de branches ; l’arbre devient alors sa propriété et il peut continuer de l’émonder. Cette coutume est connue dans la région sous le nom de rundle, ce qui veut dire étêter [Clark 1794b : 28].

41Les auteurs des General Views vont faire part de leurs conseils pour éradiquer l’émondage. Ils suggèrent d’ajouter dans les baux des clauses interdisant l’étêtage [Middleton op. cit. : 344-347]. De semblables interdictions figurent dans les plans d’aménagement des propriétés domaniales, par exemple à Buckinghamshire, sur le domaine de Lord Chesterfield [Priest op. cit. : 258-259]. Nathaniel Kent, l’un des conseillers agricoles les plus écoutés, préconise les mêmes mesures [Daniels et Watkins 1991]. Certains chroniqueurs jugent ces clauses inefficaces [Clark 1794b : 26]. John Middleton propose à tout propriétaire une action plus radicale : abattre ces arbres têtards sur l’ensemble de son domaine [Middleton op. cit. : 344].

42Au début du xixe siècle, désignés sous le terme d’improvers, les experts et les conseillers agricoles s’accordent pour condamner l’étêtage et l’émondage et pour éradiquer ce symbole d’une agriculture surannée. Très peu d’auteurs abordent la question de l’usage du fourrage ligneux. Ceux qui en parlent, à l’image d’Anderson [1784, II : 17], y voient une solution extrême réservée aux conditions exceptionnelles de grand froid. Le développement agricole aux xviie et xviiie siècles fait du fourrage ligneux un mode d’alimentation révolu à une époque où le foin, la luzerne et les navets se substituent au feuillage durant l’hiver. En outre, au milieu du xixe siècle, la consommation croissante de charbon dans les zones rurales va faire des émondes un combustible de moindre nécessité.

Le point de vue des forestiers : une pratique barbare

43À la fin du xviiie et au début du xixe siècle, les ingénieurs forestiers sont soucieux d’améliorer les plantations, de produire du bois de qualité grâce à l’élagage et de choisir les essences à planter. Quelques auteurs s’intéressent à l’aménagement des anciens bois mais peu de remarques ont trait à la pratique d’émondage. Celle-ci est perçue comme une tradition paysanne aux antipodes d’une technique de production forestière moderne. Elle trahit l’ignorance des paysans vis-à-vis de la science forestière [Sinclair 1832 : 137]. Ainsi West déplore les tailles maladroites des haies par la main des paysans et des fermiers, qu’il excuse pour leurs lacunes [1842 : 115]. Main se démarque de ses confrères en défendant l’idée que les arbres têtards sont utiles dans les exploitations agricoles : un grand nombre de produits proviennent de l’émondage des chênes, des frênes, des ormes et des saules [1839 : 209-210].

  • 8 Le terme anglais le plus fréquent pour désigner ce type de bois est crooked timber.

44L’argumentation des forestiers repose sur la vision d’une culture de l’arbre pour la production de bois d’œuvre. Au début du xixe siècle, le bois idéal reste la bille longue et rectiligne qui approvisionne les chantiers navals. Cependant, avec cette demande en bois de grande dimension et uniforme coexiste un besoin en gournables de membrure8 nécessaires à l’assemblage des pièces utilisées dans la construction des navires. Cette demande va petit à petit décliner avec l’usage des gournables en fer. Les arbres des haies au bois noueux et calleux sont les principaux pourvoyeurs de ce type de matériau. Marshall souligne qu’il n’y a pas meilleur endroit que les haies pour trouver ce précieux bois recherché par la marine [op. cit., I : 55]. Nicol consacre un chapitre aux techniques de taille destinées à rendre noueux le bois de chêne : «Pruning and Training the Oak in the Character of Crooked Timber». Il consacre un autre chapitre à ces arbres ignorés par bien de ses confrères : «On Planting Hedge-Rows and Detached Trees, Pollards, etc.». Il pense en effet que les forestiers ont négligé les arbres isolés ou situés dans les haies, dont la gestion peut être améliorée. Il donne ainsi des conseils sur la plantation d’arbres destinés à l’étêtage mais se garde d’encourager une pratique proche de la barbarie [Nicol 1803 : 199]. La demande en gournables pour la marine est, selon Monteath of Stirling [1824 : 85], dix fois supérieure à celle en bois rectiligne et la valeur de ce bois trois fois supérieure à celle du second. À en croire Brown [1904, I : 512, 622-623], à la fin du xviiie siècle, les arbres des haies étêtés, mutilés et de peu de valeur, sont les plus recherchés par la marine.

Une pratique contraire à la beauté du paysage et à la sensibilité pittoresque

  • 9 Uvedale Price publia en 1794 son Essai sur le Pittoresque.

45Les arbres étêtés et émondés vont faire l’objet d’un débat parmi les spécialistes de l’art paysager à la fin du xviiie et au début du xixe siècle. Parce qu’« ils ne sont pas naturels », certains les considèrent comme disgracieux, de peu d’attrait et monotones [Duncumb 1813 ; Gilpin 1791 ; Simpson 1903 ; Steuart 1828 ; Strutt 1830 ; West op. cit. ; Wise 1863]. D’autres auteurs louent l’originalité que leur confèrent l’irrégularité de leurs formes et leur grand âge [Anonymus 1853 ; Coleman 1859 ; Cook 1902 ; Craig 1821 ; Kennion 1815 ; Maw 1909 ; Monteath of Stirling 1824 ; Nicol op. cit. ; Pontey 1808 ; Sinclair op. cit.]. Le courant du « pittoresque paysager » apprécie le caractère majestueux des arbres vieillis, aux formes tortueuses, alors que, pour lui, les arbres régulièrement étêtés sont assujettis à un usage agricole [Daniels et Watkins op. cit.]. Pour Humphry Repton, architecte paysagiste de renom et auteur de plusieurs ouvrages sur le jardin paysager, les arbres émondés symbolisent la production et le profit contraires à l’éthique artistique [Thomas 1983 : 28]. Un autre théoricien de l’art paysager et pittoresque, Uvedale Price9, prétend que Repton mériterait qu’on lui élève une statue s’il parvenait à susciter chez Mr Pitt un sentiment d’aversion pour les ormes émondés de son domaine afin que ce dernier exerce son autorité et mette un terme à cette pratique abominable ; il ajoute que cela embellirait l’Angleterre bien davantage que tout ce qui a pu être fait jusqu’à présent.

46Analysant le pittoresque des îles britanniques à la fin du xviiie siècle, William Gilpin juge la forme des arbres têtards peu agréable à l’œil du fait de leurs disproportions. Il déplore, comme les autres paysagistes, que ces arbres ne soient pas naturels. Il fait exception de quelques specimens qui auraient recouvré une forme plus harmonieuse sous l’action correctrice de la nature et du temps [op. cit. : 4]. En 1811, Sir Thomas Gery Cullum a recours à des métaphores pour décrire le résultat de l’étêtage et de l’émondage. Selon lui, la première technique donne à l’arbre une allure de chou sur un échalas et, avec la seconde, les branches forment comme les dents d’un râteau [Linnard op. cit. : 156]. Une semblable analogie avait été faite par John Smith en 1670, reprise par les théoriciens du paysage. Dans Sylva Britannica, selon Strutt, les saules étêtés aux troncs décapités constituent un bien laid spectacle, spécialement choquant pour l’œil du peintre [op. cit. : 98]. Main parle de « mutilation », de « déformation » et de « mauvais goût », que seul un ébranchage naturel par le vent ou par le temps peut contrecarrer en restituant une forme naturelle et admirable [op. cit. : 236]. C’est aussi cette forme naturelle et libre que loue Steuart [op. cit. : 60].

47John Claudius Loudon, un des jardiniers les plus importants de l’époque, s’afflige de l’apparence difforme des arbres têtards [1825 : 593]. Knapp se montre plus vindicatif en accusant les paysans : de toutes les pratiques rurales, celle-ci mérite particulièrement d’être éradiquée. Elle incarne le mal (evil) [1829 : 378]. Pour lui, le frêne et le saule souffrent de cette mutilation et dépérissent [ibid. : 54]. La taille peut être réussie comme être d’un effet repoussant ; elle éloigne à chaque fois l’arbre de son port naturel [Craig op. cit. : 286].

48Ces avis divergents indiquent la vivacité des débats concernant la place de l’arbre dans les parcs paysagers au milieu du xixe siècle. Les vieux arbres, généralement des arbres têtards, suscitent l’admiration alors que des arbres régulièrement taillés inspirent le dégoût. Cette opposition apparaît clairement dans l’Essai sur le Pittoresque d’Uvedale Price [Daniels et Watkins op. cit.].

49Cette sensibilité esthétique et paysagère pourrait avoir précipité le déclin de l’émondage à la fin du xixe siècle. La condamnation exprimée par les architectes du paysage a joué un rôle de premier plan. L’émondage pouvait difficilement trouver une légitimité au sein du courant naturaliste naissant [Dagley et Burman 1996, cités par Read 2000 : 113].

50En conclusion, la pratique d’émondage s’est progressivement raréfiée entre 1600 et 1900. Beaucoup d’intellectuels et de savants, agronomes, forestiers, paysagistes, l’ont ignorée. Les auteurs qui la mentionnaient n’étaient pas sollicités par leurs commanditaires pour l’étudier. Les écrits sur la modernisation et le développement agricole s’adressaient aux propriétaires terriens. L’étêtage et l’émondage étaient des pratiques courantes mais probablement jugées abusives. La gestion des haies suscitait davantage d’intérêt, ce qui nous permet de connaître en partie les usages paysans de l’arbre. Une lecture minutieuse d’un grand nombre de textes a montré que les représentations de cette pratique ont changé au cours de la période considérée et qu’elles diffèrent selon les régions étudiées.

51Beaucoup d’arguments ont été avancés contre cette pratique. Tout d’abord, à la fin du xviie siècle, les arbres émondés traduisent une manière obsolète de produire du bois et de nourrir le bétail. Dans le contexte de l’enclosure des terres, une séparation s’amorce entre l’usage agraire et l’usage forestier du sol, qui place l’émondage à la marge des deux. Le bois exploité de cette façon est considéré comme étant de mauvaise qualité. Une autre raison explique que les érudits qui travaillent de concert avec les propriétaires terriens condamnent ce procédé : utilisé par les fermiers pour leur usage personnel, le bois échappe au contrôle du propriétaire. Cette pratique, caractérisant la petite paysannerie, est de peu d’intérêt pour la classe montante des agriculteurs modernes et des propriétaires terriens. Enfin, l’émondage s’oppose à la liberté des formes que dispense la nature et il altère le paysage que l’homme sensible veut plus naturel, expressif et mystérieux, contrairement à l’art hérité de la Renaissance et à l’esthétique géométrique du style français. De cette pratique autrefois bucolique, ces trois arguments ont fait, à la fin du xviiie siècle, un symbole de barbarie et d’arrière-garde.

52Notre analyse rejoint celle de Colin Tubbs [op. cit.] pour qui l’émondage est une pratique bien acceptée en Grande-Bretagne au début du xviie siècle. À la fin du xviiie, malgré l’influence d’auteurs majeurs tels que Evelyn, Young et Marshall, l’émondage reste en vigueur. Néanmoins la critique s’amplifie sous l’influence du mouvement de concentration de la propriété terrienne et parallèlement à une diminution des besoins en fourrage ligneux et à une hausse de l’utilisation du charbon comme combustible. Dans les éditions successives de Sylva, John Evelyn a pour ainsi dire ouvert une brèche favorisant une représentation négative prédominante chez les forestiers.

53Cette culture paysanne de l’arbre champêtre décline probablement à la fin du xviiie siècle, ce qu’atteste le recoupement de différentes sources [Muir op. cit. ; Rackham 1986 ; Radley op. cit. ; Spray op. cit. ; Thomas op. cit.]. L’émondage est critiqué par la nouvelle foresterie scientifique qui s’affirme à la fin du xixe siècle. La taille persiste cependant dans les haies jusqu’au xxe siècle, à la faveur de la crise agricole et de l’affaiblissement du pouvoir des propriétaires. Dans les années cinquante, d’une façon générale, l’émondage est révolu. Ce n’est qu’au cours de ces vingt dernières années qu’il bénéficie d’un regain d’intérêt. Celui-ci réside dans la valeur patrimoniale et paysagère des arbres étêtés et émondés et dans la diversité biologique qu’ils abritent. Ils offrent en effet un habitat de choix à des insectes tels les scarabées et les araignées et un substrat aux champignons rares. Une politique de conservation se dessine. Les arbres émondés pourront peut-être être préservés quelques années encore mais les savoirs associés à cette pratique tels le rabattement des branches, le séchage des feuilles, leur stockage, la valeur nutritive et curative des différentes essences pour le bétail ont été peu documentés dans les ouvrages anciens et sont probablement perdus.

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Notes

1 To pollard (verbe) ; a pollard (nom) désigne l’arbre étêté ; pollarding veut dire l’étêtage.

2 Parfois orthographié dans les anciens textes «to shread » ; «shredded trees» désigne les arbres émondés, «shredding» l’opération.

3 Ancient countryside : paysage formé avant 1700, opposé à planned countryside.

4 Le mot rundle, ou son équivalent runnel, est utilisé dans le comté de Radnor pour désigner un arbre têtard ou un arbre creux [James 1991].

5 May pole : poteau autour duquel on dansait au mois de mai.

6 « We declare ourselves enemies to pollards. »

7 Mouvement influent du « pittoresque paysager ». Développé et largement discuté par Price au xviiie siècle, l’enthousiasme pour l’esthétique du pittoresque sera partagé par ses contemporains, écrivains et peintres.

8 Le terme anglais le plus fréquent pour désigner ce type de bois est crooked timber.

9 Uvedale Price publia en 1794 son Essai sur le Pittoresque.

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Pour citer cet article

Référence papier

Sandrine Petit et Charles Watkins, « Pratiques paysannes oubliées »Études rurales, 169-170 | 2004, 197-214.

Référence électronique

Sandrine Petit et Charles Watkins, « Pratiques paysannes oubliées »Études rurales [En ligne], 169-170 | 2004, mis en ligne le 01 janvier 2006, consulté le 14 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/8062 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/etudesrurales.8062

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Auteurs

Sandrine Petit

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