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Gestion de l’eau en Asie du Sud

Techniques, irrigation, politiques publiques et sociétés
Water management in South Asia. Techniques, irrigation, public policies and societies
Olivia Aubriot et Romain Valadaud
p. 8-23

Texte intégral

  • 1 Voir le documentaire écrit et réalisé par N. Coste et N. Plumpidis, Eaux douces - eaux amères (52 (...)
  • 2 Voir D. Blanchon, Atlas mondial de l’eau : de l’eau pour tous, Paris, Éditions Autrement (« Collec (...)
  • 3 Voir le site du ministère français de l’Environnement (<https://www.notre-environnement.gouv.fr/themes/economie/l-utilisation-des-ressources-naturelles-ressources/article/les-prelevements-d-eau-douce-par-usages-et-par-ressources>).
  • 4 Bien qu’institution hindoue, la caste s’applique aussi aux musulmans d’Asie du Sud [Voir l’article (...)

1Gérer le trop d’eau pendant la mousson et le manque pendant la saison chaude et sèche est une constante en Asie du Sud, région constituée de l’Inde, du Pakistan, du Bangladesh, du Sri Lanka, du Népal et du Bhoutan. Les impressionnants canaux des pentes himalayennes, ceux des deltas et des plaines rizicoles, les étangs-réservoirs ancestraux du sud de l’Inde, ou encore les célèbres et majestueux stepwell (puits) du Gujarat sont autant d’exemples d’une préoccupation ancienne des paysans et/ou des États à se procurer de l’eau. Des techniques plus modernes comme les barrages et les forages permettent dorénavant de mobiliser des quantités importantes de cette ressource, participant cependant à accroître la pression sur celle-ci. L’augmentation des besoins, dans tous les secteurs, est non seulement liée à la croissance démographique – cette région est dorénavant la plus peuplée du monde (1,8 milliard en 2021) précédant l’Asie de l’Est (1,6 milliard) – mais aussi aux modèles de production et de consommation promus par des politiques publiques favorisant l’extraction productiviste de la ressource. Il en résulte une compétition entre secteurs1 [Birkenholtz 2016 ; Rajesh 2019], ainsi qu’entre utilisateurs d’un même secteur, notamment dans celui de l’agriculture, le plus grand consommateur. En effet, 80 % à 90 % de l’eau déviée de rivières ou pompée dans les nappes y sont utilisés pour l’irrigation (contre 69 % à l’échelle mondiale2 et 10 % en France3). Cette compétition crée des crises environnementales et sociales de plus en plus sévères [Janakarajan et Moench 2006 ; Mukherjee et al. 2018 ; Lele et al. 2021] dans cette région fortement marquée par la hiérarchie issue du système de castes4.

Figure 1. Un agriculteur tamoul observe les canaux à sec, cimentés lors d’un projet de réhabilitation trois-quatre ans auparavant (Pondichéry, 2005).

Figure 1. Un agriculteur tamoul observe les canaux à sec, cimentés lors d’un projet de réhabilitation trois-quatre ans auparavant (Pondichéry, 2005).

Photo : O. Aubriot.

2Que l’utilisation de l’eau soit extractive pour le milieu naturel (irrigation, eau domestique, divers usages industriels) ou dérivative (hydroélectricité, traitement de l’eau), elle nécessite des infrastructures. Or, la gestion de l’eau a souvent été réduite à ses aspects techniques, prérogatives des ingénieurs. Les sciences sociales se sont emparées tardivement (dans les années 1990) du sujet [voir, par exemple, Casciarri et Van Aken 2013 ; Trottier et Fernandez 2010]. Ce dossier d’Études rurales s’inscrit dans le courant des recherches qui visent à penser ensemble les aspects sociaux et techniques de l’eau. Ce courant est traditionnellement divisé en deux branches. L’approche « hydrosociale » analyse des rapports de pouvoir systémiques dans la gestion de l’eau [Linton et Budds 2014]. L’approche sociotechnique s’intéresse à la manière dont les relations sociales s’incarnent et sont déterminées par les infrastructures et les institutions de gestion de l’eau [Van der Kooij et al. 2015]. C’est sous ce regard que se place ce numéro spécial. Les infrastructures hydrauliques, incontournables éléments de la gestion de l’eau, y sont analysées dans la dialectique qu’elles entretiennent avec les institutions impliquées dans cette gestion.

3Dans ce dossier, des auteurs d’horizons divers sont mobilisés afin de montrer que des regards multiples sont nécessaires pour expliciter le maillage d’éléments sociaux, techniques et hydrauliques de l’utilisation de l’eau. La géographie communique ainsi avec l’archéologie, la sociologie et l’écologie participant aux humanités environnementales. Ces études, interdisciplinaires ou mono-disciplinaires, permettent l’exploration de la thématique à différentes échelles et rendent compte de l’importance « micro » et « macro » de la dimension sociotechnique. Ainsi, les débats autour des infrastructures et de leur gestion agitent tout autant les habitants de quartiers socialement différents à Pondichéry qu’ils opposent des visions techniques entre ingénieurs à l’échelle du Gange. Il s’agit donc d’étudier comment l’organisation de la société et les choix politiques influencent les choix techniques et la gestion locale de l’eau et, en retour, comment les techniques influencent les flux d’eau et la manière dont l’eau et les sociétés se façonnent mutuellement.

Gérer l’eau dans des pays de mousson

  • 5 Les premiers barrages du piémont himalayen népalais furent construits pour lutter contre les inond (...)
  • 6 Voir le 6e rapport d’évaluation du GIEG, daté du 20 mars 2023 (<https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-cycle/>).
  • 7 Au sein d’une même famille les infrastructures peuvent être très variées : la terminologie locale (...)

4Dans cette région, la saison des pluies s’étend majoritairement de juin à septembre, avec quelques variations géographiques. Au Pakistan, par exemple, les pluies de mousson sont généralement faibles, les rivières étant surtout alimentées l’été par les glaciers, lesquels sont rechargés par les pluies d’hiver [Bookhagen et Burbank 2010]. Au Sri Lanka et dans le sud-est de l’Inde, les précipitations sont surtout en octobre et en novembre. Avec ce climat de mousson, il faut gérer le trop d’eau5, mais aussi le manque pendant la saison sèche. Cette dernière est difficile à surmonter en avril et en mai, mois pendant lesquels des records de température ont été atteints ces dernières années, le changement climatique rendant cette partie du globe encore plus vulnérable aux inondations et aux sécheresses6. Historiquement, les habitants ont inventé et amélioré des infrastructures qui, pour l’irrigation, peuvent se répartir en trois grandes familles7 : les réservoirs, les canaux et les puits.

5Stocker l’eau a toujours été une préoccupation dans les pays arides et semi-arides. Les étangs-réservoirs semi-endigués (« tanks ») d’Inde du Sud et du Sri Lanka, développés essentiellement du vie au xiiie siècle, sont en cela exemplaires. Loin d’être des objets techniques neutres, ces réservoirs ont été et sont encore au centre d’enjeux sociopolitiques. D. Mosse [2003] a montré comment leurs interconnexions ont été façonnées au gré des relations de pouvoir et des intérêts des souverains. Pendant des siècles, l’hydrologie et les infrastructures hydrauliques ont ainsi été utilisées politiquement.

6Dévier l’eau des rivières jusqu’aux champs a également une histoire plus ou moins ancienne selon les lieux. Dans la plaine du Gange ou les deltas du sud de l’Inde, des systèmes d’irrigation (modernisés) soutiennent de très fortes densités de population. Des canaux à flanc de montagne alimentent des rizières depuis le xvie siècle au Népal, et sont gérés par les communautés locales selon des règles diverses [Pradhan 1989]. De la même façon, des canaux allant chercher l’eau de fonte des glaciers sont indispensables pour les oasis de l’ouest himalayen [Labbal 2007] ou du Karakorum, avec un ordre de distribution de l’eau qui reproduit les relations sociales hiérarchisées [Kreutzmann dans ce numéro].

7Les puits existent également de longue date et étaient historiquement équipés de techniques d’exhaure de l’eau, manuelles (à l’aide de picote ou de poulie) ou à traction animale. Ils arrosaient chacun des surfaces réduites, mais demeuraient une source importante d’irrigation avant l’époque coloniale [Hardiman 1998]. Cette histoire ancienne de l’irrigation correspond à la première des trois phases des politiques de gestion de l’eau distinguées par T. Shah [2009].

  • 8 Avec la partition entre le Pakistan et l’Inde en 1947, ce réseau a dû être réorganisé. Le partage (...)

8Selon cet auteur, cette phase se poursuit avec la période de l’impérialisme productif (constructive imperialism) (1800-1970), caractérisée par la construction de barrages et de grands réseaux d’irrigation, initiée par les Britanniques. Ces derniers ont colonisé la majeure partie de l’Asie du Sud (sauf certaines principautés indiennes, le Népal et le Bhoutan). En appliquant les principes de la « science de l’Empire » [Gilmartin 1994], l’administration coloniale a grandement transformé la vallée de l’Indus en créant le plus grand réseau d’irrigation mondial8. Les Britanniques ont également transformé le rapport à la terre et à l’eau en modifiant le système de taxation foncière, en assignant l’usufruit de l’eau souterraine aux propriétaires fonciers et en façonnant des administrations spécifiques comme le département des travaux publics en charge notamment des grands étangs séculaires et des réseaux hydrauliques qu’il a créés.

  • 9 Voir l’article « Irrigation of the Indus River », sur le site de l’Encyclopedia Britannica (<https://www.britannica.com/place/Indus-River/Irrigation>).
  • 10 Voir R. S. Sakthivadivel, et al., Performance evaluation of the Bhakra irrigation system, India, u (...)

9La politique de construction des barrages et de grands systèmes d’irrigation a été poursuivie après l’Indépendance, étendant le contrôle de l’État sur les territoires concernés. P. Mollinga et G. J. Veldwisch décrivent ces périmètres étatiques d’irrigation gravitaire comme « les longs bras de l’État qui atteignent tous les villages où l’irrigation est envisagée et qui sont ainsi intégrés dans la société moderne » [op. cit : 229, notre traduction]. Ces dispositifs sociotechniques modifient durablement les territoires sur lesquels ils sont déployés, par leur échelle sans précédent et par leur mode de gestion. De tels réseaux de canaux peuvent en effet couvrir jusqu’à 2 millions d’hectares au Pakistan9, 1,3 million d’hectares en Haryana, Inde10 ou encore 64 000 hectares dans l’étroite plaine du Népal [Valadaud 2021]. Ces vastes ensembles alimentant les terres de milliers de paysans étaient gérés par les ingénieurs de l’État qui fixaient les calendriers d’irrigation et décidaient de l’ouverture des vannes. À l’opposé, la plupart des systèmes paysans, de taille plus modeste, étaient encore entre les mains des communautés locales.

10Au tournant des années 1990, le modèle néolibéral promu par les bailleurs de fonds remet alors en cause la « grande hydraulique » [Ruf 2011]. Dans ce contexte, un certain nombre d’arguments sont avancés par ces acteurs décisionnaires pour justifier le retrait du soutien étatique aux grands systèmes d’irrigation : faibles efficiences techniques et agronomiques, coûts d’entretien très élevés, inégalité d’accès à l’eau (entre l’amont et l’aval notamment), problèmes environnementaux de salinité des terres ou de sols engorgés d’eau. Cela pave alors la voie à d’autres révolutions sociotechniques : celle de la multiplication des puisages privés et celle de la décentralisation de la gestion.

Vers une gestion individuelle de l’eau

  • 11 Voir F. Molle, et al., « The groundswell of pumps : multilevel impacts of a silent revolution », d (...)

11Vient ensuite, à partir de 1970, la troisième période que T. Shah qualifie « d’irrigation atomistique » [op. cit. : 5], pour définir l’irrigation individuelle par pompage. La diffusion de cette technique représente une « révolution silencieuse »11, qui permet l’accès à l’eau souterraine (par des forages profonds ou des puits) et à l’eau de surface (prélèvement dans des rivières, drains ou canaux d'irrigation). T. Shah s’est surtout concentré sur l’irrigation par eau souterraine, au développement fulgurant en Asie du Sud (fig. 2). Plusieurs facteurs l’expliquent : une technologie (le pompage) devenue accessible à des millions d’individus car relativement bon marché, la possibilité d’irriguer dorénavant des zones qui, avant cela, dépendaient uniquement de la pluie et dans la plupart des pays des incitations gouvernementales au forage et à l’achat de pompes, ainsi qu’une électrification de la campagne et une électricité subventionnée (politiques de la révolution verte).

Figure 2. Extraction d’eau souterraine par pays.

Figure 2. Extraction d’eau souterraine par pays.

Source : World water development. Report, 2015, Nations unies.

  • 12 Voir F. Sugden, Landlordism, tenants and the groundwater sector : lessons from Tarai-Madhesh, Nepa (...)

12L’Inde est devenue, et de loin, le plus gros utilisateur de cette ressource à des fins agricoles (fig. 2). La puissance des pompes permet à leurs propriétaires de vendre l’eau dont ils n’ont pas besoin, générant des marchés informels entre voisins, les petits agriculteurs sans pompe pouvant ainsi accéder à l’eau souterraine [Shah op. cit.]. Le Pakistan, gros utilisateur d’eau souterraine pour l’irrigation, connaît aussi de tels marchés [Qureshi et al. 2020]. Le Népal, malgré son fort potentiel souterrain dans la plaine, présente un certain retard par rapport à ses voisins. De fait, l’électricité n’arrive pas dans les champs. En outre, les métayers, nombreux, ne peuvent investir dans un forage et sur un terrain qui ne leur appartient pas12, les politiques publiques n’ayant pas pris en compte l’inégalité d’accès à ce type d’irrigation [Valadaud 2023]. Le développement spectaculaire de l’irrigation par eau souterraine en Asie du Sud donne lieu à de grands débats sur la « gestion anarchique » de cette eau [Shah op. cit.] et la quête effrénée qu’elle suscite [Janakarajan et Moench op. cit. ; Aubriot 2013]. Les subventions et les modes de distribution de l’électricité, en tant que mesures indirectes pour limiter les pompages, sont également au cœur des discussions entre scientifiques [Narayanamoorthy et Deshpande 2005].

  • 13 Pendant longtemps les propriétaires fonciers étaient légalement définis comme les usagers légitime (...)
  • 14 Voir l’étude de R. Meinzen-Dick, Groundwater markets in Pakistan : participation and productivity. (...)

13Pour ne reprendre que les exemples de l’Inde et du Népal, l’usage non régulé de millions de pompes individuelles se combine avec peu de modifications des lois sur l’eau et le foncier. Les propriétaires fonciers sont de facto considérés comme propriétaires de l’eau souterraine13, et peuvent en faire l’usage qu’ils souhaitent. Cette appropriation individuelle de l’eau, facilitée par des moyens techniques (les pompes) et le cadre légal, complexifie les relations relatives à l’usage de l’eau. On observe en effet un désintérêt de la part des paysans les plus aisés pour l’utilisation des canaux, en faveur du pompage. Or, ils sont souvent les moteurs de la gestion collective. En se détournant des canaux gourmands en entretien, ils en fragilisent la gestion et accélèrent le processus de dégradation des réseaux d’irrigation de surface14 [Valadaud op. cit.]. Ainsi, le déclin de l’utilisation des infrastructures collectives de surface et la multiplication des forages privés participent à la remise en question de la gestion commune de l’eau. Les forages, creusés et gérés individuellement, reflètent et accentuent les inégalités d’accès à l’eau. Face à la baisse du niveau des nappes, seuls les forages profonds, équipés de pompes puissantes et apanage des paysans les plus aisés, peuvent continuer l’extraction de la ressource. L’appropriation individuelle de l’eau se généralise donc en Asie du Sud, d’autant plus que la plupart des États soutiennent cette évolution des pratiques d’irrigation. En subventionnant les forages, les politiques publiques contribuent à renforcer les inégalités d’accès et l’insoutenabilité écologique de l’exploitation des ressources en eau.

  • 15 Des fontaines distinctes existaient pour les personnes qui étaient considérées comme intouchables. (...)

14Les solutions promues par les programmes de développement ne vont pas nécessairement à l’encontre de cette tendance. Au Népal, par exemple, il est nécessaire pour les paysans de composer des petits groupes de propriétaires fonciers pour bénéficier de subvention à la mise en place d’un puisage collectif à usage agricole [Valadaud op. cit.]. L’appropriation individuelle ou par petits groupes de la ressource – qui accroît les inégalités d’accès – touche également l’eau potable en milieu rural15 [André-Lamat 2017], l’eau d’irrigation par canaux collectifs [Valadaud et Aubriot 2019], celle utilisée par les industriels [Rajesh op. cit. ; Van Rooijen et al. 2009], ou encore, les étangs communaux qui au Népal sont sujets à une mise sous contrat individuel incitée par l’État [Sarrazin 2020]. Mais des exemples de résistances à ces tendances d’expropriation existent aussi [Birkenholtz op. cit. ; Sarrazin op. cit.].

15Le fait que cette phase soit celle de « l’atomisation » ne doit pas cacher d’autres dynamiques à l’œuvre depuis la fin des années 1980 et qui relèvent des modifications institutionnelles imposées par les politiques de la gestion participative et de la gestion intégrée de l’eau. La gestion participative de l’eau (participatory irrigation management, PIM), telle que l’ont théorisée Elinor Ostrom [1992] et ses collègues, a donné lieu à la mise en place, en Asie du Sud et ailleurs, de groupements d’usagers de l’eau. L’État a confié à ces associations la gestion des infrastructures collectives, essentiellement pour l’eau de surface, qu’elles soient « modernes » [Valadaud op. cit. ; Mollinga et Vedwisch op. cit.] ou anciennes rénovées [Kreutzmann dans ce numéro]. Dans tous les pays d’Asie du Sud, le résultat est le même. L’établissement d’associations d’irrigants s’est souvent fait sans prendre en compte le tissu socio-politique préexistant. Capturées par les élites, ces associations sont noyautées par les partis politiques et ne travaillent que peu au maintien d’un commun d’irrigation de surface [Valadaud op. cit. ; Aubriot et Prabhakar 2011]. La détérioration consubstantielle des infrastructures de surface renforce le développement des pompages privés et donc l’atomisation de la gestion de l’eau.

  • 16 Pour le cas du fleuve Krishna, voir J. P. Venot [2008].

16Dans les années 2000, l’idée de coordonner le partage de l’eau et de faire participer les différents acteurs à l’échelle d’un bassin-versant donne naissance à la politique de la gestion intégrée des ressources en eau (GIRE). Les recherches qui auparavant étaient focalisées sur l’irrigation se sont élargies à l’eau. À l’instar des politiques de la PIM, la GIRE avait l’intention de créer durabilité et efficacité pour l’utilisation de la ressource. Mais les critiques de ce modèle sont importantes. Parce qu’elle dépolitise les interactions autour de l’eau en mettant en place des outils de gestion très techniques, laissant souvent le pouvoir à certains groupes d’intérêts et excluant de facto les acteurs les moins favorisés en capitaux sociaux et économiques [Molle 2012], la GIRE n’atteint pas ses objectifs de gestion équilibrée de la ressource. En outre, elle est un modèle qui, dans les faits, n’est pas toujours appliqué. Elle n’arrive pas, notamment, à contrer le phénomène de « fermeture des bassins », c’est-à-dire la quasi-absence d’écoulement d’eau d’un fleuve dans son delta du fait de ses nombreux barrages et dérivations16. La GIRE comme la PIM n’ont pas permis de réinstaurer une dimension collective à la gestion de l’eau. En ce début de xxie siècle, l’eau en Asie du Sud est donc une ressource de plus en plus convoitée, dont les modèles de gestion ne sont pas parvenus à une distribution égale et durable.

Des transformations plus ou moins silencieuses de la gestion de l’eau

  • 17 Voir également les exemples mentionnés par B. Girard dans ce numéro, mais qui ne sont pas au cœur (...)

17Les infrastructures comme les barrages, les grands systèmes d’irrigation et, depuis cinquante ans, le pompage dans les nappes souterraines ou le projet indien d’interconnexion des fleuves ont attiré l’attention de nombreux scientifiques. Elles ont été l’objet de polémiques entre chercheurs [Molle et al. 2009] voire de luttes de la part de la société civile17 [Baviskar 2007 ; Sharma 2018]. Les auteurs du présent numéro se sont concentrés sur d’autres infrastructures ou des situations qui relèvent de transformations plus ou moins silencieuses de la gestion de l’eau, mais tout aussi structurantes pour le futur de la ressource. Ainsi un cas concerne les relations de pouvoir entre ingénieurs sur un projet de traitement de l’eau du Gange (Girard) ; un autre les facteurs sociohistoriques expliquant les transformations des réseaux d’irrigation paysans dans la haute vallée de la Hunza au Pakistan (Kreutzmann) ; un troisième le processus de patrimonialisation d’un étang-réservoir dans la ville de Pondichéry (Richard-Ferroudji et al.) et un quatrième l’assèchement par les agriculteurs des étangs et autres infrastructures hydrauliques à Mandu en Inde centrale (Aubriot et Casile).

18Trois des contributions concernent des infrastructures anciennes, aux trajectoires sociotechniques toutes différentes. Au Pakistan, les canaux à flanc de montagne sont toujours utilisés. En Inde du sud, en zone périurbaine, les étangs-réservoirs ne servent guère pour l’irrigation – et ce depuis que l’eau souterraine a supplanté celle de surface, avant même que la ville n’envahisse l’espace – et ont été transformés ces dernières années en patrimoine à préserver. En Inde centrale, les étangs et autres infrastructures hydrauliques héritées de l’époque médiévale font, au contraire, l’objet d’un nouvel usage avec l’irrigation par pompage. Ces quelques exemples montrent comment les infrastructures hydrauliques sont transformées par l’évolution des sociétés qui les utilisent (ou les abandonnent) et qu’elles peuvent être remobilisées pour de nouveaux usages, voire par de nouveaux acteurs.

19Une diversité d’acteurs est impliquée dans la gestion de l’eau dans les articles présentés ici. B. Girard, ayant interrogé des activistes, des ingénieurs, des experts ou encore des représentants politiques, s’attache à décrire les luttes de pouvoir entre ingénieurs lors de l’instauration de la GIRE pour dépolluer le Gange. Le nouveau programme oppose des groupes d’ingénieurs, chaque groupe défendant un modèle technique et des intérêts (personnels) spécifiques. Cet article n’est pas sans rappeler le travail de l’historien F. Graber [2007] qui analyse les tensions entre ingénieurs des ponts et chaussées et ingénieurs de terrain, ainsi que les intérêts différents que chaque groupe défend à Paris à la fin du xixe siècle. Dans le cas décrit par H. Kreutzmann dans les montagnes pakistanaises, les ingénieurs se sont récemment immiscés dans la gestion locale de l’eau, de même que les organisations non gouvernementales, par l’intermédiaire de projets d’irrigation, transformant la gestion traditionnelle. Ces nouveaux acteurs ont remplacé les anciennes élites dans leur fonction de contrôle de la distribution de l’eau. À Pondichéry, A. Richard-Ferroudji et ses co-auteurs constatent que c’est davantage la société civile, à travers des ONG et des associations de riverains, qui développent des actions pour tenter de créer du lien social autour de l’infrastructure hydraulique. À Mandu, en Inde centrale, l’anarchie dans l’utilisation des pompes individuelles s’explique, pour O. Aubriot et A. Casile, non seulement par l’absence de gestion collective antérieure à l’arrivée des pompes, mais aussi l’absence de régulation des pompages par la mairie pourtant responsable du foncier des étangs. Ces divers exemples illustrent plusieurs cas de figure : la mainmise des ingénieurs sur des infrastructures de grande ampleur, un désengagement très relatif de l’État et de ses ingénieurs (en référence à la politique de gestion participative) ou, au contraire, une absence d’intervention quand il s’agit de l’utilisation des pompes individuelles.

20Les contributions abordent plus ou moins directement les questions de la régulation des usages et de l’appropriation de la ressource à l’aide de la technique. À Mandu, l’absence de régulation des pompages se traduit par une appropriation individuelle de l’eau par les agriculteurs. Celle-ci est explicitement à l’origine d’une « dépossession silencieuse pour les autres usages » qui pourtant ne fait pas l’objet de conflits ouverts. Dans la vallée de la Hunza, qui a perdu son autonomie en 1974 et a alors été pleinement intégrée dans la gestion administrative du Pakistan, le développement de l’irrigation a longtemps été un enjeu pour les souverains qui, en contrôlant l’exploitation de la ressource, assuraient leur domination sur les communautés villageoises. La priorité d’accès à l’eau donnée aux hameaux les plus anciens a instauré une certaine inégalité entre groupes de parenté, que l’appropriation communautaire de l’eau et des infrastructures n’a pas fait totalement disparaître. Comme le montre l’analyse des conflits de pouvoir entre ingénieurs en vue de proposer des solutions de traitement des eaux du Gange, une régulation par l’État n’est pas nécessairement une réponse efficace aux problèmes d’eau. Enfin, à Pondichéry, ce n’est plus la ressource qui est appropriée, les enjeux se portant davantage sur l’infrastructure (la gouverneure incitant à la préservation de l’étang) et sur l’espace autour, notamment l’emplacement du temple de chaque communauté.

21Ces exemples mettent également en avant une évolution de la place de l’agriculture dans l’économie des utilisateurs des infrastructures hydrauliques. Comme la vallée de la Hunza au Pakistan est maintenant dotée d’un accès routier aisé, certains biens de première nécessité sont disponibles à un prix modique et une partie de la force de travail migre vers les centres urbains. En conséquence, si l’irrigation pouvait être une clé de lecture pour comprendre la société, elle n’est plus au centre de l’organisation sociale et économique villageoise. À Pondichéry, l’expansion de la ville s’est faite sur des terres agricoles, transformant un étang « rural » en étang « urbain ». Le processus de patrimonialisation à l’œuvre transforme l’étang « abandonné » en étang « ranimé ». Mandu, au contraire, est un site encore fortement rural, peuplé de populations tribales pauvres. L’irrigation par pompage individuel dans les étangs y est généralisée depuis vingt ans et permet d’introduire une deuxième saison de cultures, en hiver. Cette augmentation de la production agricole maintient davantage la population sur place et raccourcit la durée des migrations vers les villes. Ainsi, même si l’Asie du Sud a encore une population rurale importante, l’urbanisation prend de l’ampleur, empiétant sur le milieu rural. La pénétration de l’économie de marché modifie la place de l’agriculture dans l’économie des ménages ruraux : l’importance de l’agriculture diminue dans la vallée de la Hunza (agriculture qui ne peut être davantage intensifiée à cette altitude), mais au contraire augmente à Mandu (grâce à l’introduction de l’irrigation en hiver). La place de l’irrigation doit alors être analysée au regard des connexions entre le monde agricole et d’autres dynamiques sociales et économiques (migrations de travail, envoi d’argent par les migrants, tourisme, économie de plus en plus marchande, urbanisation…).

22Les questions environnementales sont en toile de fond de tous les articles. Dans celui concernant le Gange, même si cette pollution est probablement d’origine plurielle (agricole, industrielle, domestique), le programme dont il est question se concentre plus spécifiquement sur la pollution par les eaux usées des villes. B. Girard analyse pourquoi les nouvelles techniques et solutions alternatives proposées par les experts ne peuvent être mises en œuvre dans le programme, du fait de l’ingénierie civile publique qui reste maîtresse de la gestion du fleuve, elle-même très liée au pouvoir politique. À Pondichéry, l’étang est pollué par les rejets de l’hôpital et de l’urbanisation, et subit une eutrophisation qui requiert un entretien régulier, enjeu de la mobilisation pour la patrimonialisation de la retenue d’eau. Dans la vallée de la Hunza, les questions environnementales sont davantage liées à la quantité d’eau disponible et au tourisme, récent, qui induit une pression sur la ressource dans les oasis montagnardes. À Mandu, le tourisme y participe aussi, mais la menace sur l’eau est surtout due aux agriculteurs qui pompent dans toutes les infrastructures hydrauliques disponibles, privées ou publiques. Ceci génère une grande compétition avec les autres usages de l’eau (pisciculture, abreuvement des troupeaux, eau domestique), accroît la précarité hydraulique et le labeur des populations qui n’ont pas accès au réseau d’alimentation du bourg.

23Enfin, tous les articles montrent l’influence soit des politiques publiques sur les pratiques des irrigants (en Hunza et à Mandu), sur les conceptions des gestionnaires de l’eau (dans le cas de la GIRE pour les ingénieurs), soit du politique sur les solutions techniques et/ou institutionnelles choisies (dans les modèles d’ingénierie privilégiés ou les groupements d’experts sollicités dans le traitement de l’eau du Gange, mais aussi dans le soutien politique de la Gouverneure de Pondichéry à certaines associations). Ces contributions explorent aussi la manière dont les rapports sociaux de pouvoir influencent les choix techniques. En Hunza, la hiérarchie sociale se reflète dans l’organisation de la distribution de l’eau. En Inde, la société civile lutte contre les projets de barrages du gouvernement, faisant écho aux groupes d’ingénieurs qui s’affrontent à travers des visions techniques différentes pour dépolluer le Gange. Le changement du contexte technique et socio-économique explique en partie l’évolution de la gestion de l’eau : dans la vallée de la Hunza, l’exode rural et la vente de terres à des acheteurs extérieurs participent à la perte de contrôle de la distribution de l’eau par les communautés locales ; à Mandu l’électrification du plateau a permis la diffusion des pompes individuelles et le pompage non régulé vient bouleverser la culture du stockage de l’eau. À Pondichéry, des citadins, sensibles aux questions environnementales et au caractère sacré de l’eau, se mobilisent pour la patrimonialisation d’étangs urbains. Dans un contexte de pression croissante sur la ressource en eau, l’arène politique voit s’affronter une diversité d’acteurs revendiquant des visions et des usages différents.

24Finalement, ce numéro spécial explore les dimensions sociotechniques de certaines problématiques liées à l’eau en Asie du Sud. Les articles décrivent des situations très différentes, dans des contextes sociaux et géographiques spécifiques, ancrés localement, à travers un prisme pluridisciplinaire. Malgré ces différences, ils soulignent des phénomènes récurrents relevant de défis exacerbés dans cette région du monde : la difficulté de la gestion collective, la multiplication exponentielle des pompages, la pollution des rivières et des étangs. Les contributions illustrent les évolutions profondes des dynamiques à l’œuvre dans le façonnement mutuel des eaux et des sociétés. Répondre aux défis contemporains ne peut se faire uniquement par des modifications techniques et oblige à une compréhension interdisciplinaire et multiscalaire de la complexité engendrée par les divers usages de l’eau.

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Bibliographie

André-Lamat, Véronique, 2017, « De l’eau source à l’eau ressource : production d’un capital environnemental ou d’un commun. L’exemple de l’eau domestique au Pharak (Népal) », Développement durable et territoires 8 (3) (<https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/developpementdurable.11869>).

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Notes

1 Voir le documentaire écrit et réalisé par N. Coste et N. Plumpidis, Eaux douces - eaux amères (52 min), produit par l’Institut français de Pondichéry, 2007 (<https://vimeo.com/223447091>).

2 Voir D. Blanchon, Atlas mondial de l’eau : de l’eau pour tous, Paris, Éditions Autrement (« Collection Atlas/monde ») 2022.

3 Voir le site du ministère français de l’Environnement (<https://www.notre-environnement.gouv.fr/themes/economie/l-utilisation-des-ressources-naturelles-ressources/article/les-prelevements-d-eau-douce-par-usages-et-par-ressources>).

4 Bien qu’institution hindoue, la caste s’applique aussi aux musulmans d’Asie du Sud [Voir l’article de R. Delage « Castes musulmanes en Inde », La vie des idées, 17 mai 2011 (<http://www.laviedesidees.fr/Castes-et-musulmans.html>)]. Les populations dites « tribales » ont quant à elles été classées en bas dans la hiérarchie sociale, les catégories de castes et de tribus ayant été, en outre, figées au xixe siècle par les colons britanniques.

5 Les premiers barrages du piémont himalayen népalais furent construits pour lutter contre les inondations en Inde.

6 Voir le 6e rapport d’évaluation du GIEG, daté du 20 mars 2023 (<https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-cycle/>).

7 Au sein d’une même famille les infrastructures peuvent être très variées : la terminologie locale le reflète [Richard-Ferroudji et al. dans ce numéro] ou au contraire est englobante [Aubriot et Casile ibid.].

8 Avec la partition entre le Pakistan et l’Inde en 1947, ce réseau a dû être réorganisé. Le partage de l’eau, par accord bilatéral, a porté sur les affluents de l’Indus et a nécessité la construction de nouveaux barrages et canaux de liaison [Miner et al. 2009].

9 Voir l’article « Irrigation of the Indus River », sur le site de l’Encyclopedia Britannica (<https://www.britannica.com/place/Indus-River/Irrigation>).

10 Voir R. S. Sakthivadivel, et al., Performance evaluation of the Bhakra irrigation system, India, using remote sensing and GIS techniques. Research report 28, 1999, International water management institute Colombo (Sri Lanka).

11 Voir F. Molle, et al., « The groundswell of pumps : multilevel impacts of a silent revolution », document préparatoire pour le ICID-Asia Meeting, Taiwan, novembre 2003.

12 Voir F. Sugden, Landlordism, tenants and the groundwater sector : lessons from Tarai-Madhesh, NepalResearch report 162, 2014, International water management institute, Colombo, Sri Lanka (<doi: 10.5337/2015.204>).

13 Pendant longtemps les propriétaires fonciers étaient légalement définis comme les usagers légitimes de l’eau souterraine. La loi de 1992 au Népal reconnaît l’eau souterraine comme étatique (Water resource act, 2049, <http://admin.theiguides.org/Media/Documents/WaterResourcesAct1992.pdf>), mais dans la pratique elle est toujours considérée comme appartenant à celui qui peut l’extraire du sous-sol. En Inde le gouvernement central a proposé en 2005 aux différents États de changer leur loi sur l’eau sur ce point mais ils n’ont pas suivi [Cullet 2006]. L’article de F. Landy et al. [2021] analyse les raisons pour lesquelles l’eau souterraine n’y est pas considérée comme une ressource commune.

14 Voir l’étude de R. Meinzen-Dick, Groundwater markets in Pakistan : participation and productivity. Research Report 105, 1996, International food policy research institute Washington DC.

15 Des fontaines distinctes existaient pour les personnes qui étaient considérées comme intouchables. Cette inégalité d’accès à l’eau domestique liée à des questions de pureté religieuse tend à disparaître.

16 Pour le cas du fleuve Krishna, voir J. P. Venot [2008].

17 Voir également les exemples mentionnés par B. Girard dans ce numéro, mais qui ne sont pas au cœur de l’objet traité par cette auteure ici.

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Table des illustrations

Titre Figure 1. Un agriculteur tamoul observe les canaux à sec, cimentés lors d’un projet de réhabilitation trois-quatre ans auparavant (Pondichéry, 2005).
Crédits Photo : O. Aubriot.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/docannexe/image/30790/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 513k
Titre Figure 2. Extraction d’eau souterraine par pays.
Crédits Source : World water development. Report, 2015, Nations unies.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/docannexe/image/30790/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 150k
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Pour citer cet article

Référence papier

Olivia Aubriot et Romain Valadaud, « Gestion de l’eau en Asie du Sud »Études rurales, 211 | 2023, 8-23.

Référence électronique

Olivia Aubriot et Romain Valadaud, « Gestion de l’eau en Asie du Sud »Études rurales [En ligne], 211 | 2023, mis en ligne le 01 juillet 2023, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/30790 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/etudesrurales.30790

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Auteurs

Olivia Aubriot

géographe, chargée de recherche, CNRS, Centre d’études sud-asiatiques et himalayennes (UMR 8077), Aubervilliers

Articles du même auteur

Romain Valadaud

géographe, post-doctorant, IRD, UMR G-EAU, Montpellier

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Droits d’auteur

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