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La figure héroïque du pionnier sioniste

L’appropriation des zones marécageuses de Palestine (fin xixe s.-années 1950)
The heroic figure of the Zionist settler: The appropriation of marshlands in Palestine (from the end of 19th century to the 1950s)
Élisabeth Mortier
p. 102-125

Résumés

Cet article analyse l’évolution des stratégies juives et sionistes d’appropriation des zones marécageuses de Palestine, de la fin du xixe siècle aux premières années de l’État d’Israël. Situés principalement dans la vallée de Jezréel, autour du lac Ḥula et dans la plaine côtière, les espaces marécageux, infestés par la malaria, sont achetés par les premiers agriculteurs juifs en raison de leur moindre coût. Dans le cadre de la montée des tensions politiques entre populations juive et arabe pendant le Mandat britannique (1922-1948), les zones marécageuses et leur drainage sont placés au cœur des stratégies territoriales pour la construction du futur Foyer national juif. Ces espaces témoignent de la mise en action des idéaux sionistes de « régénération » des juifs et de transformation de la terre d’Israël.

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Texte intégral

  • 1 Nous adoptons dans cet article, selon l’usage communément admis, l’emploi de la majuscule pour le (...)

1À la fin des années 1940, l’auteur sioniste d’origine allemande Cheskel Zwi Kloetzel dépeignait ainsi la conquête des terres par les Juifs1 en Palestine : « Dans la reconstruction du Foyer national juif dans le pays de leurs ancêtres, les juifs ont “collectionné” des déserts, des marais, des montagnes rocailleuses, dont personne ne voulait et que personne n’habitait, et ils les ont changés en champs, en jardins, en vignobles, en vergers, créant ainsi de “l’espace vital” pour des milliers de leurs frères […] » [1947 : 3]. Dans ce discours sioniste où l’auteur réactive l’adage formulé par Israël Zangwill d’une « terre sans peuple pour un peuple sans terre », les Juifs auraient ainsi transformé les terres incultes de Palestine, une Palestine décrite comme déserte, ou peu s’en faut. Ces terres incultes sont réparties par C. Z. Kloetzel en trois catégories principales : les terres marécageuses, les espaces désertiques et les territoires montagneux empierrés. C’est en s’attachant à la première catégorie que notre article se propose d’analyser les stratégies territoriales et les discours présents dans la transformation de ces espaces de Palestine.

  • 2 Plusieurs orthographes pour Ḥula sont présentes dans les sources : Huleh, Houla, Hula.

2Ces espaces marécageux sont principalement concentrés dans le nord de la Palestine : la vallée de Jezréel [Gottman 1935 : 150] (nommée également plaine d’Esdraelon), la Galilée, les marais de Kabarah et le bassin du lac Ḥula2. D’autres zones humides sont situées le long de la plaine côtière. Étudiée par le géographe et archéologue français Félix-Marie Abel [1933 : 114], la formation des principales zones humides de Palestine est ainsi décrite par le géographe Jean Gottman [op. cit : 145] :

Sur le flanc occidental de l’anticlinal palestinien, de nombreux petits wadis, à sec ou presque en été, descendent vers la Méditerranée, créant souvent des marais sur leurs rives plates.

3Ces espaces sont marqués par une densité de peuplement faible et par la prolifération de la malaria. Dès les années 1880, la colonisation agricole juive en Palestine ottomane change la perception de ces terres humides, naguère évitées : elles deviennent de nouveaux espaces de conquête agricole. Puis, dès la structuration du mouvement sioniste en Palestine au tournant du xixe siècle, renforcée par la déclaration Balfour du 2 novembre 1917, les terres marécageuses se situent au cœur des enjeux stratégiques du contrôle du territoire palestinien et deviennent les lieux privilégiés de la démonstration de techniques importées d’Europe et d’Amérique du Nord.

4Des projets de colonisation agricole juive en Palestine furent menés bien avant la mise en forme institutionnelle et politique du projet sioniste par Théodore Herzl dans son ouvrage Der Judenstaat en 1896 [Bensoussan 2005]. Les pogroms de 1881 en Russie, déclenchés après l’assassinat du tsar Alexandre II, entraînèrent un mouvement de migration juive en Palestine organisé par les Amants de Sion qui établirent plusieurs villages agricoles. Ainsi, de 1882 à 1903, entre 20 000 et 30 000 juifs ont migré en Palestine pour se consacrer au travail agricole [Perrin 2000 : 98]. Près de vingt ans après l’implantation des premières colonies agricoles, le sionisme, mouvement idéologique, social et politique complexe, se structure par le rassemblement à Bâle du premier Congrès sioniste sous la direction de Théodore Herzl en 1897. Le « sionisme », mot inventé par Nathan Birnbaum en 1890 et repris par T. Herzl, désigne le mouvement de recherche d’un territoire souverain pour le peuple juif.

  • 3 C’est le refus du projet territorial sioniste en Ouganda proposé par Théodore Herzl en 1903 qui en (...)

5Dans les premières années du xxe siècle, la quête d’un territoire pour les juifs se focalise sur la Palestine ottomane, considérée comme l’antique terre d’Israël [Charbit 2007 : 43]3. L’Organisation sioniste se dote alors des institutions nécessaires pour l’achat et le développement d’une présence agricole pérenne. En 1901, le Fonds national juif (JNF) est ainsi créé pour faciliter l’achat de terres aux propriétaires arabes ottomans dans le but de les enregistrer comme « propriété éternelle et inaliénable du peuple juif » [Katz 2005 : 35]. Des bureaux dédiés au développement des terres agricoles, en particulier la gestion des ressources en eau, le drainage des marais et l’afforestation, sont rapidement fondés au sein du JNF [idem]. La Palestine Land Development Company (PLDC), autre organisation sioniste d’achat de terres, naît en 1908.

6À la veille de la Première Guerre mondiale, pourtant, une grande partie des établissements agricoles juifs de Palestine ne sont pas issus du jeune mouvement sioniste. En effet, on y dénombre plusieurs dizaines de villages agricoles financés par le baron français Edmond de Rothschild. Son œuvre philanthropique entamée dans les années 1870 souhaite répondre aux besoins économiques et moraux de la population juive miséreuse de la Palestine ottomane par le développement de structures agricoles [Antébi 2003]. Le projet d’un territoire souverain pour le peuple juif mené par l’organisation sioniste n’est pas celui choisi par le baron. Ses villages agricoles sont gérés à partir de 1899 par la Jewish Colonization Association (JCA), puis pendant le Mandat britannique (1923-1948), par sa branche palestinienne, la Palestine Jewish Colonization Association (PICA), fondée en 1924. Considérée comme un retour à la terre, la colonisation agricole est bien au cœur d’un projet de régénération des Juifs porté par les sionistes ainsi que par le Baron [Laurens 1999 : 129]. Le Juif nouveau doit naître de ce nouveau contact avec la terre d’Israël, la terre de ses ancêtres, progressivement désignée en hébreu par l’expression « Eretz Israël ». La rédemption des Juifs par le travail d’une terre supposée délaissée donne corps à l’image du pionnier juif, haloutz en hébreu [Bensoussan op. cit. : 641]. Cette idéologie sioniste se confronte à la réalité politique complexe du Mandat confié aux Britanniques par la Société des nations lors de la conférence de San Remo de 1920, dont la charte est ratifiée en 1922. Le gouvernement mandataire britannique est tenu par une « double obligation » [Picaudou 2006 : 159-176] : permettre la réalisation de la promesse d’un « foyer national juif » faite aux sionistes dans la déclaration Balfour du 2 novembre 1917 tout en garantissant les droits de la population arabe de Palestine.

7De la fin du xixe siècle à la naissance de l’État d’Israël, les achats de terres menés par la Pica, le JNF ou la PLDC dans les zones marécageuses de Palestine sont régis par des cadres juridiques différents et évoluent au gré des transformations politiques majeures qui secouent le Moyen-Orient.

8Dans le cadre de la domination ottomane en Palestine, le droit foncier est défini par le Code foncier de 1858, héritier de la période des Tanzimat. Ce code reprend les pratiques répandues dans les campagnes de l’Empire ottoman et œuvre à la diffusion de la propriété privée [Bunton 2009]. La spécificité foncière de la Palestine réside dans l’importance des terres dites mush’a, propriétés foncières possédées en quote-part au sein des communautés villageoises [Mundy 1996]. Lorsque les Britanniques prennent le contrôle de la Palestine, ce cadre juridique évolue en fonction de leur perception très différente du droit foncier, de leurs diverses expériences coloniales et de leurs projets de développement économique du pays. Ainsi, le système des terres mush’a est-il perçu comme un frein à l’augmentation de la production agricole par les Britanniques. Tout en reconnaissant les catégories foncières définies par le Code foncier, les Britanniques cherchent à accroître leur maîtrise juridique du territoire palestinien par la mise en place d’un livre de propriété et d’un cadastre fiscal dès les premières années du mandat [Gavish 2005] ainsi que par la promulgation de land ordinances. L’étude des conditions juridiques de l’achat de terre par les sionistes en Palestine auprès des propriétaires fonciers arabes dans la période mandataire est un sujet largement étudié dans l’historiographie anglo-saxonne, arabe et israélienne comme le démontrent les travaux récents de Martin Bunton [2007], Aida Essaid [2013] et Yossi Katz [op. cit.].

9On interrogera la place spécifique de la transformation des zones marécageuses de Palestine dans l’élaboration de l’imaginaire du pionnier juif à la conquête de terres incultes. L’achat et la transformation des terres marécageuses par les institutions juives ou sionistes de Palestine s’inscrivent dans différentes logiques territoriales et interactions avec la population arabe, ainsi qu’avec l’autorité ottomane puis mandataire. Nous analyserons tout d’abord l’évolution de la place donnée à ces régions dans le projet territorial et agricole des Juifs en Palestine. Puis, nous montrerons que l’appropriation de ces terres participe à la construction de l’image du « pionniérisme » et à l’élaboration d’un discours sioniste sur l’action environnementale en Palestine.

Stratégies territoriales juives et conquête des zones marécageuses

10Des premières implantations juives par les Amants de Sion et la JCA aux achats de terres menés par le JNF, l’appropriation des zones marécageuses évolue au gré des capacités financières juives et de l’élaboration des stratégies territoriales sionistes. L’achat de ces espaces humides, après avoir été motivé par un choix économique pratique à la fin du xixe siècle, s’inscrit au siècle suivant dans une stratégie territoriale et agricole sioniste pour devenir à la fin du Mandat britannique un enjeu essentiel du tracé de la frontière nord du futur État juif.

Les premières colonisations juives et la conquête des vallées

  • 4 Un firman est un édit qui émane du sultan de l’Empire ottoman.
  • 5 Lettre du 16 septembre 1921, d’Élie Krause, Archives de l’Alliance israélite universelle, Paris, s (...)

11En 1870, Charles Netter, membre de l’Alliance israélite universelle (créée en 1860), fonde Mikveh-Israël, la première ferme-école de Palestine grâce à un firman de la Porte4. Située au sud de la ville côtière de Jaffa, Mikveh-Israël est construite sur un marécage infesté par la malaria5. Cet établissement qui est la première entreprise de retour à la terre des Juifs français en Palestine donne au baron Edmond de Rothschild l’impulsion pour le financement et le soutien d’autres implantations agricoles en Palestine. Dans le cadre d’une souveraineté ottomane méfiante des acquisitions foncières européennes, le choix de l’achat de terres pour la fondation des villages agricoles répond à partir des années 1880 – et pour une vingtaine d’années – à deux impératifs principaux : éviter les terres les plus convoitées de Palestine, afin de ne pas provoquer la défiance des autorités ottomanes, et sélectionner des terres à faible coût [Laurens op. cit. : 131]. Cette stratégie foncière pousse les chargés d’affaires du baron à s’orienter en partie vers les terres les plus délaissées par la population arabe : les marécages du nord du pays, ainsi que les petits espaces marécageux de la plaine côtière.

  • 6 Le terme Yishouv désigne la communauté juive de Palestine avant la création de l’État d’Israël.

12Nombre de Juifs qui s’installent dans ces zones insalubres contractent la malaria. À la fin de la Première Guerre mondiale, les autorités britanniques estiment qu’un enfant sur deux vivant dans les villages juifs souffre de la malaria [Sufian 2007 : 84]. Le futur Premier ministre d’Israël et dirigeant politique du Yishouv6, David Ben Gourion, n’est pas épargné par cette maladie. Il raconte dans ses mémoires [1986 : 35] ses crises de fièvre provoquées par la malaria dans une colonie de la plaine côtière où il s’installe quelques mois après son arrivée en Palestine en 1906 :

Pendant les crises qui survenaient à peu près tous les dix jours, je ne pouvais ni bouger ni bien sûr travailler. J’avais chaque fois quarante de fièvre et délirais complètement. Cela durait trois ou quatre jours, puis la fièvre tombait, me laissant à bout de forces, brisé. Je me fis une philosophie et appris à connaître la durée du cycle et à savoir quand je serais malade de nouveau.

  • 7 Voir N. Joffe et A. Ribuot, 2017, Certaines batailles se font en silence. L’afforestation comme ar (...)

13La mise en valeur de ces terres humides passe alors par la plantation de nombreux eucalyptus camaldulensis, des arbres d’origine australienne7. Importés en Palestine par les Juifs, ils permettent de drainer les marais en raison de leur fort besoin en eau [Aaronshon ibid]. En 1872, l’acclimatation des eucalyptus se fait d’abord à l’école agricole Mikveh-Israël [El-Eini 1999 : 78]. L’eucalyptus se répand ensuite dans l’ensemble des espaces marécageux acquis par les colons juifs. Sa forte implantation en Palestine en fait « l’arbre juif » [idem : 78] par excellence, aux yeux de la population arabe. On le retrouve par ailleurs dans l’ensemble du pourtour méditerranéen.

Figure 1. Le lac Hula en 1935

Figure 1. Le lac Hula en 1935

Photo : auteur inconnu, Central Zionist Archives, Jérusalem.

14Les premières acquisitions menées par le JNF à partir de 1901 poursuivent dans un premier temps la stratégie foncière de la Jewish Colonization Association en achetant aux propriétaires arabes locaux les terres délaissées à faible coût économique. Puis, une stratégie territoriale plus politique est mise en place pour établir de larges pans de terres agricoles continus appartenant au JNF [Katz 2005]. Cette stratégie se déploie notamment le long de la vallée de Jezréel, située au nord du pays, entre Nazareth et la Samarie. Le Fonds national juif souhaite désormais développer des « fronts pionniers agricoles », c’est-à-dire des implantations agricoles dans des zones d’où les Juifs étaient jusque-là totalement absents [Dieckhoff 1989 : 32]. Le fond de la vallée de Jezréel correspond précisément à cette stratégie territoriale sioniste et aux impératifs financiers. Dans cette vallée, les terres achetées, en partie marécageuses, sont considérées comme des espaces au potentiel agricole fertile. Le drainage de ces zones est donc un préalable indispensable pour développer ces nouvelles implantations agricoles de la population juive. Finalement, alors que, depuis des siècles, les paysans arabes s’étaient tenus éloignés des espaces marécageux afin d’éviter la malaria, alors que ces vallées marécageuses étaient traditionnellement les espaces d’incursions et de pillages de tribus arabes, les sionistes du JNF opèrent une modification profonde de la répartition de la population et des terres agricoles sur le territoire de la Palestine par l’achat et le drainage mis en œuvre.

15C’est avec le concours britannique que les sionistes mènent ces drainages. Après la promesse faite par les Britanniques dans la déclaration Balfour du 2 novembre 1917 d’établir un Foyer national juif en Palestine, les sionistes font des suggestions. En 1920 notamment, lors des négociations autour de la mise en place du Mandat britannique en Palestine, Chaïm Weizmann, dirigeant de l’Organisation sioniste mondiale, envoie un rapport au comte Curzon, secrétaire d’État aux Affaires étrangères britanniques, pour lui présenter les principales orientations agricoles à privilégier. Le drainage des zones marécageuses pour étendre les terres cultivables et éradiquer la malaria est au cœur de ses propositions d’aménagement du territoire :

  • 8 Lettre de Chaïm Weizmann à Earl Curzon, Secretary of State for Foreign Affairs, 2 février 1920, Mi (...)

Les actions les plus importantes que les Public Works devront mener sont liées au drainage et à l’assainissement. L’importance de la malaria empêche toute immigration organisée. La vitalité des immigrants serait affaiblie et leur vie mise en danger par le moustique de malaria. Le drainage des marais est bien sûr la manière la plus fiable de combattre la malaria, et toute autre mesure sanitaire ne sert que de palliatif et n’éradique pas les causes de la maladie. Le nombre de marais à drainer est relativement faible. Ce travail devrait commencer immédiatement 8. [notre traduction]

16L’assainissement des marécages est donc une étape indispensable pour en faire des terres fertiles et permettre l’extension de l’immigration juive en augmentant les capacités d’absorption économique du pays [Sufian op. cit.]. Cette situation semble paradoxale puisque les migrants juifs des années 1930 s’installent majoritairement en ville et non en zone rurale.

La question financière et sanitaire du drainage des espaces humides

  • 9 Voir le rapport de Sir J. Hope Simpson Palestine. Report on Immigration, Land Settlement and Devel (...)

17Malgré les enjeux politiques posés par les sionistes, l’instauration du Mandat britannique en Palestine en 1920-1922 fait de la gestion des marécages un enjeu pragmatique, avant tout sanitaire, financier et juridique. Lorsqu’elle s’impose comme puissance mandataire de la Palestine, la Grande-Bretagne est riche de son expérience de la lutte contre la malaria dans l’Empire, et en particulier en Inde. De premières actions de drainage et d’assainissement pour éradiquer la malaria avaient été menées dès la fin de la Première Guerre mondiale dans ses camps militaires [El-Eini 2006]. Elle en poursuivit d’autres ensuite dans certains espaces de la vallée du Jourdain et autour des villes de Palestine. En 1930, le rapport de Sir John Hope Simpson commence son bilan de la situation sanitaire du pays en évoquant au passé l’omniprésence, sans doute exagérée, de la malaria : « Au moment de son occupation, la Palestine était un pays saturé par la malaria »9.

  • 10 Drainage Ordinance of Surface Water, 1942. Israel State Archives, מ /13/726
  • 11 Memorandum on the Water Resources of Palestine, présenté par le gouvernement de Palestine aux Nati (...)
  • 12 Voir le rapport de Sir J. Hope Simpson Palestine. Report on Immigration…, p. 26.
  • 13 Pamphlets on Malaria, 1925-1926, Israel State Archives מ/28/6541.
  • 14 Lettre de la Zionist Commission de Palestine, 24 juillet 1919, Central Zionist Archives, Jérusalem (...)

18La lutte contre cette maladie passait par la planification du drainage des zones marécageuses, par des recherches sur le développement des moustiques anophèles porteurs du parasite par les entomologistes britanniques, pour se terminer par la mise en place de lois comme l’Ordonnance de drainage des eaux de surface de 194210. L’objectif de cette loi, la seule liée à l’eau promulguée avec succès pendant la période du Mandat, était de permettre au Water Commissioner britannique de délimiter les zones à drainer et de planifier les travaux d’assainissement11. D’une façon générale, pendant la période du mandat britannique les acteurs dans la transformation des zones humides se multiplièrent. Les départements britanniques du gouvernement de Palestine s’associèrent en effet avec des organismes privés ou internationaux – comme la fondation Rockefeller ou la Société des nations – pour éradiquer la malaria du pays12. Des institutions arabes participèrent également au drainage, le Conseil suprême musulman œuvra notamment pour le marais de Wadi Rubin, situé dans la plaine côtière. La lutte britannique contre la malaria, de plus, passait par la pédagogie, moyen bien moins coûteux que le drainage, pour tenter d’en limiter l’expansion. Le Department of Health distribua ainsi dans les années 1920 des prospectus explicatifs, en arabe et en hébreu, sur la malaria et les moustiques anophèles13. Mais seul le drainage des marécages permettait un recul efficace de la maladie. Le rapport de Sir John Hope-Simpson de 1930 soulignait l’importance des travaux d’assainissement menés par le JNF et la PICA dans les principaux espaces de colonisation agricole : les marécages de la plaine côtière, le marais de Kabarah et la vallée de Jezréel. Ainsi, dès les années 1920, l’Exécutif sioniste de Palestine, organe d’action de l’Organisation sioniste, et le JNF s’étaient associés pour trouver les fonds nécessaires à l’assainissement des importantes colonies agricoles de Degania, Kinereth et Merhavia. Les colons juifs de ces trois colonies situées respectivement à l’ouest du Jourdain, dans la région du lac de Tibériade et dans la vallée de Jezréel étaient fortement frappés par la malaria. En 1919, avant l’instauration du mandat, l’Organisation sioniste avait même qualifié la condition sanitaire de ces espaces de « très critique »14.

  • 15 Government of Palestine, Memorandum on the Water Resources of Palestine, presented by the Governme (...)

19En 1947, au moment où les Britanniques s’apprêtent à remettre le Mandat dans les mains de l’Organisation des nations unies, un ensemble de projets de drainage, principalement à destination des villages arabes de la région de Beisan, de Haïfa, d’Acre et de la Galilée sont planifiés pour un coût total estimé à plus de 200 000 livres palestiniennes, mais le départ des Britanniques de Palestine en mai 1948 ne permit pas leur réalisation15.

20Malgré l’évidence des enjeux politiques et stratégiques, dont les organisations sionistes sont conscientes depuis longtemps, les Britanniques envisagent l’aménagement des zones humides principalement d’un point de vue pragmatique et sanitaire, tout au long du Mandat. Au contraire, pour les sionistes et la Pica, la question du drainage est autant une question de salubrité publique que de développement des terres agricoles en faveur de la colonisation sioniste, ce qui fait de la question de l’assainissement avant tout un enjeu de développement démographique et territorial du Yishouv. Les budgets des organisations juives dédiés au drainage restent constants jusqu’à la création de l’État d’Israël en 1948. Ces budgets élevés permirent, au milieu des années 1930, aux institutions sionistes d’achat de terre de s’intéresser au plus grand marais de Palestine : la région de Ḥula. La dimension stratégique, agricole et politique de son drainage devient aussi importante que l’éradication de la malaria.

La conquête des terres humides de la région du lac Ḥula 

  • 16 Central Zionist Archives, Jérusalem, dossier KH7/78.
  • 17 Ibid.

21Les marais autour du lac Ḥula situé à l’extrême nord-est de la Palestine se forment par le débordement du lac l’hiver en raison de l’apport des eaux du Jourdain. En 1914, une partie de ces terres fut concédée par le gouvernement ottoman à deux propriétaires arabes beyrouthins afin de les mettre en valeur16. La tribu arabe Ghawarina occupait une portion importante de cette concession de Ḥula [Tyler 1994 : 827]. En 1906, 3 000 de ses membres vivent sur ce territoire [Frantzman et Kark 2001 : 10]. Installés dans la région de Ḥula depuis le début du xixe siècle, ils habitent dans une dizaine de villages17.

22Cependant, aucune opération majeure de drainage ne fut menée durant les années de la concession arabe qui s’acheva dans les années 1930. Dès l’imposition de l’autorité administrative britannique, en 1920, l’intérêt sioniste pour le drainage et l’appropriation de la plus grande région marécageuse de Palestine, la vallée du lac Ḥula, à la frontière syrienne est exprimé par Chaïm Weizmann. Il l’indique dans ses recommandations au comte Curzon :

  • 18 Lettre de Haïm Weizmann à Earl Curzon, Secretary of State for Foreign Affairs, 2 février 1920, Mid (...)

La région la plus importante est le Lac Ḥula au nord de Tibériade. Le drainage du Lac Ḥula aurait un triple avantage : cela permettrait premièrement de se débarrasser d’un grand centre d’infection de la malaria, et cela libérerait un large espace de terre fertile ; et troisièmement, cela rendrait disponible pour l’irrigation les eaux du lac Merom, qui sont à présent une source de la maladie, ce qui augmenterait, voire décuplerait ainsi la fertilité de la région voisine18. [notre traduction]

23La région de Ḥula, principalement habitée par les Bédouins, est présentée ici avant tout comme un espace de développement des terres agricoles dans la région nord de Palestine grâce au drainage.

Figure 2. Les papyrus dans les marais du lac Ḥula en 1935

Figure 2. Les papyrus dans les marais du lac Ḥula en 1935

Photo : auteur inconnu, Central Zionist Archives, Jérusalem.

24Si l’Organisation sioniste mondiale envisage ce drainage dès 1920, l’achat effectif de terres dans cette région par les principaux organismes sionistes n’intervient qu’au cours des années 1930. En 1934, après plusieurs années de négociations avec les Britanniques et les propriétaires arabes, la Palestine Land Development Company (PLDC) rachète la concession de Ḥula pour y développer de nouvelles implantations agricoles, moyennant des travaux de drainage importants. Au milieu des années 1930, le JNF en partenariat avec la PICA accompagne ce front agricole pionnier par l’achat de terres dans le but de faire fructifier leur valeur et le rendement agricole par le drainage [Katz 2005 : 40]. Ces acquisitions s’inscrivent dans la stratégie sioniste de développement de nouveaux espaces agricoles, là où la population juive est encore peu représentée.

25En effet, les années 1930 s’inscrivent dans un nouveau contexte où les Britanniques se désolidarisent de plus en plus des entreprises agraires sionistes. Les troubles politiques et sociaux de 1929 et la grande révolte arabe de Palestine en 1936 durcirent la politique migratoire de la puissance britannique à l’encontre des migrations juives. L’idée générale était qu’une immigration juive trop importante menaçait les équilibres fragiles de la société palestinienne, pour des raisons économiques notamment. Dès 1930, le rapport de Hope-Simpson encourageait le gouvernement britannique à évaluer la capacité économique d’absorption du pays et à prendre en compte le taux du chômage juif pour déterminer (à la baisse) la politique migratoire juive en Palestine. Le développement de l’agriculture et de son rendement devint alors un enjeu majeur des sionistes, afin de justifier le maintien de l’immigration. Or les marais de Ḥula possédaient selon les organisations sionistes un potentiel agricole important, identifié également par les Britanniques à la condition que de larges opérations de drainage y soient conduites.

26Donnons un autre exemple de cette politisation du drainage des zones humides. L’intérêt sioniste pour les terres marécageuses du nord de la Galilée illustre, lui aussi, la stratégie territoriale sioniste. Alors que la commission Peel envisageait pour la première fois (1936-1937) un premier plan de partage de la Palestine, donc un futur État juif, il importait pour les sionistes d’étendre le plus possible le territoire qui leur serait concédé. L’implantation de villages agricoles juifs continus dans les espaces frontaliers de la Palestine mandataire était un moyen à long terme d’influencer le tracé du futur Foyer national juif.

27La preuve, s’il en fallait, de cette importance du drainage pour les sionistes est le discours de David Ben Gourion à l’hôtel Biltmore le 12 mai 1942 à New York. Il fit l’éloge de la transformation des marais de Ḥula opérée par les sionistes :

  • 19 Cité dans D. Ben Gourion [op. cit. : 101].

La partie la plus malsaine de la Palestine, qui était considérée comme incultivable non seulement par les Arabes mais encore par le gouvernement [britannique], est en train de devenir, grâce à nos colons, la région la plus prospère et la plus productive de la Palestine19.

  • 20 Dossier « Hula Drainage », Israel State Archives, Jérusalem, פ-13/1500.
  • 21 Voir l’article de D. A. Schmidt, « Israel is draining swamps for farms », The New York Times, 18 a (...)

28Cette perception très élogieuse de la transformation sioniste de cette région était quelque peu excessive, puisque des travaux titanesques de drainage ne furent réellement entrepris qu’au cours des premières années de l’État d’Israël. En 1953, en effet, des travaux de creusement de canaux de drainage, d’arrachement des papyrus, arbre traditionnel des zones humides et d’évacuation de la tourbe, furent lancés20 pour transformer cet espace de plusieurs milliers d’acres en « l’une des régions agricoles les plus fertiles du monde » selon The New York Times du 18 août 195321. La conquête des zones marécageuses a également engendré des discours sionistes sur la valeur des pionniers juifs et sur l’environnement palestinien.

Le pionnier et l’environnement palestinien dans le discours sioniste

29Des discours valorisant la bravoure des premiers colons juifs et les capacités techniques des sionistes accompagnent la conquête territoriale et agricole des espaces marécageux tout au long du Mandat. Les différents développements de l’agriculture juive en Palestine apparaissent, en effet, rapidement comme la mise en pratique des idéaux sionistes fondateurs : le nouvel ancrage des Juifs venus d’Europe en Eretz Israël, leur régénération par le travail de la terre, et le retour de la Palestine à une fertilité rêvée [Ben-Amos 2010 : 173-200]. À travers l’étude de la conquête de ces terres, il est possible d’analyser l’élaboration du mythe du pionnier sioniste et du discours sioniste sur l’environnement palestinien.

La rédemption par le travail de la terre

30La conquête des terres marécageuses s’inscrit au cœur de l’idéal sioniste de rédemption des Juifs par le travail de la terre. L’idée d’un retour à la culture de la terre du peuple juif répond à la volonté sioniste de rompre avec la vie en diaspora (une vie réputée avilie, loin du contact avec la terre et avec l’agriculture) et de former un Juif nouveau, dont la force viendrait du contact renouvelé avec Eretz Israël. Les premiers migrants juifs qui œuvrèrent à la fondation de colonies agricoles furent donc nommés « les pionniers ». Comme l’écrit Georges Bensoussan, « le pionniérisme est l’illustration du sionisme en actes » [op. cit. : 641]. Le choix du mot « pionnier » (haloutz) pour désigner les premiers agriculteurs juifs n’est pas anodin, car les pionniers sont, dans la pensée sioniste, à l’avant-garde du rassemblement du peuple juif en Palestine [Sternhell 2004 : 137]. Ainsi, leur action en faveur du drainage et de la transformation des terres agricoles doit être comprise comme une démarche politique préludant au futur Foyer national juif. La mise en valeur de la terre est aussi perçue comme une construction de la légitimité du projet sioniste à revendiquer la terre de Palestine.

Figure 3. Un tracteur dans les marais du Kibboutz Nir David dans la vallée de Beit Shéan, décembre 1936.

Figure 3. Un tracteur dans les marais du Kibboutz Nir David dans la vallée de Beit Shéan, décembre 1936.

Photo : auteur inconnu, Central Zionist Archives, Jérusalem.

31Le rôle des terres marécageuses dans la formation du mythe du pionnier peut être analysé par l’historien à travers les récits sionistes de fondation de colonies agricoles, la presse sioniste et les mémoires des acteurs juifs de la colonisation. Le JNF ainsi que les autres organisations sionistes ont publié, en hébreu, en anglais et parfois en français, des récits qui retracent les premières années des colonies agricoles et leur évolution. En diffusant des informations sur leurs actions agricoles et politiques en Europe et aux États-Unis, le but de ces ouvrages est de convaincre le lectorat du bien-fondé du projet sioniste en Eretz-Israël.

32Le drainage des marécages est donc un topos des récits de fondation. Prenons l’exemple de Hadera, colonie agricole, fondée au début du xxe siècle dans les marécages du nord de la Palestine. En 1938, l’écrivain et agriculteur sioniste Moshe Smilansky publie à Tel-Aviv, en hébreu et en anglais, un livret qui illustre le lien construit dans les récits sionistes entre appropriation des marécages et « pionniérisme ». Après avoir décrit minutieusement le paysage marécageux de Hadera et ses défis agricoles, il retrace un dialogue [1938 : 15] qu’il aurait tenu avec un autre colon :

“Et que faire des marais ?”, me demanda un de mes camarades.
Des marais ! N’importe quoi ! Balivernes ! Nous les assainirons… planterons des arbres… sèmerons du blé. Il n’y a pas de terre plus fertile qu’un marais assaini !
Les marais seront assainis ! Nous planterons des arbres ici, nous sèmerons du blé ! Les jeunes esprits reprirent espoir. [Notre traduction]

33L’assainissement des marais est présenté comme le lieu même de l’expression du courage et de l’espoir des pionniers. Les difficultés posées par l’aménagement des marécages exaltent, dans ces récits, la figure héroïque du pionnier prêt à tous les sacrifices pour l’aboutissement du projet sioniste. Son engagement va parfois jusqu’à la mort, ce qui en fait ainsi un martyr de la cause sioniste. La malaria, en effet, tue plusieurs colons juifs de Hadera. Moshe Smilansky [op. cit. : 37] met en lumière dans son récit les réactions des habitants face à l’ampleur de l’épidémie et aux risques encourus par les pionniers :

Néanmoins, aucun homme ne changea de position. Allions-nous fuir au cœur de la bataille ? Quitter Hadera pour la laisser retourner à son état premier ? Comment pourrions-nous ? Certains l’ont dit : il vaut mieux mourir pour Hadera que vivre sans elle ! [Notre traduction]

34Ce récit de la fondation de Hadera glorifie le sens du sacrifice des pionniers pour la cause sioniste afin de légitimer l’action de colonisation agricole en Palestine et, sans doute, susciter auprès du lectorat des actions de soutien. Ce sont les dons financiers des sympathisants sionistes à travers le monde qui financent en grande partie l’Organisation sioniste et les compagnies d’achats de terre [Katz 2005]. Il leur est donc indispensable de présenter leur travail comme une mise en action concrète des idées sionistes en Palestine. Les difficultés rencontrées par les pionniers dans les marécages des implantations sionistes servent de matériau littéraire intéressant pour sublimer ces hommes et leur entreprise agricole. L’achat de la concession Ḥula en 1934 par la Palestine Land Development Company entraîna également la publication de récits valorisant le travail des pionniers. Par exemple, un petit livret écrit en anglais intitulé Huleh, imprimé en Palestine en 38 000 exemplaires dans les années 1940, décrit de manière grandiloquente les épreuves qui attendent les pionniers installés dans ces zones marécageuses :

  • 22 Huleh, Jerusalem, Goldberg’s Press. Auteur et date inconnus.

Le projet Huleh exige la mobilisation de nos meilleures énergies, la force la plus absolue et les efforts prolongés dont nos pionniers ont toujours fait preuve dans leur labeur pour l’édification de la Palestine. Ce projet exige des efforts physiques immenses, le courage sans faille d’expérimenter et de faire face à la maladie, l’acceptation d’un mode de vie primitif et la volonté d’offrir tous les sacrifices qui pourraient leur être demandés. Mais nos halutzim ne nous failliront pas22. [Notre traduction]

35Les marais sont perçus et présentés comme les espaces d’expression et de développement de toutes les caractéristiques attribuées au Juif nouveau régénéré par le travail de la terre : vitalité, force physique, courage, sacrifice et détermination.

36Les marécages ne sont pas seulement pour les sionistes les lieux de renaissance de leur peuple mais ils sont également des espaces de démonstration de leurs capacités de transformation de l’environnement palestinien pour l’accorder à leur perception de ce que doit être Eretz-Israël.

37Ce discours héroïque qui associe pionniers et assèchement des marais dans un élan digne du collectivisme soviétique embellit des histoires personnelles souvent plus difficiles, de personnes pour lesquelles le passage par les marais correspond souvent à un échec et à un abandon [Bensoussan op. cit. : 643]. On a vu comment D. Ben Gourion, à son arrivée en 1906, avait souffert de la malaria sans devenir pour autant un meilleur pionnier – puisqu’il devint journaliste à Jérusalem dès 1910.

La transformation de l’espace palestinien dans l’élaboration du discours sioniste

38Dans les Cahiers juifs en 1935, publiés en français, D. Ben Gourion décrit ainsi le rôle de l’action sioniste dans la transformation de l’espace palestinien :

  • 23 Cité dans D. Ben Gourion [op. cit. : 85].

La définition gouvernementale du sol « non cultivable » n’est pas moins originale : c’est, prétend-il [Ben Gourion désigne ici, de façon sarcastique, les allégations du gouvernement de la puissance mandataire], un sol qui ne cède pas aux moyens de cultures primitifs des fellahs. Selon cette définition, la région de Houla, une des plus riches et fertiles de Palestine, devrait être considérée comme incultivable. Notre tâche n’est donc pas seulement d’acquérir toujours plus et plus de terres, mais de rendre, d’une part, fertiles les terrains empierrés et ensablés depuis des siècles, et de l’autre, de travailler avec toujours plus d’intensité les terrains défrichés 23.

39Il y a dans cet écrit du dirigeant de l’Agence juive les principaux traits des discours sionistes élaborés pendant le Mandat britannique sur ce que doivent être les terres de Palestine : des espaces jusqu’ici délaissés par des paysans palestiniens, mais qui sont et seront transformés et rendus fertiles par le travail et les techniques sionistes. Ce discours fait de la présence multiséculaire des Arabes sur la terre palestinienne un échec, dû à des « techniques primitives » ayant échoué à rendre fertile l’ensemble du territoire. Les sionistes paraissent ainsi les porteurs d’une nouvelle « modernité » et efficacité technique qui légitiment pleinement leur présence et l’acquisition de terres.

40Dans ce passage caractéristique comme dans bien d’autres textes, les terres marécageuses, comme la région de Ḥula, sont depuis la fin du xixe siècle, des espaces d’élaboration d’un discours sioniste sur l’environnement palestinien qui s’articule autour de trois principaux points : le dénigrement des modes d’appropriation arabes des marécages, la démonstration de l’efficacité des techniques développées par les sionistes jugées par eux comme « modernes » en opposition à la « primitivité » de celles des Arabes, et enfin la recherche d’un rééquilibrage des terres de Palestine pour mieux correspondre à la fertilité fantasmée d’Eretz Israël. Ces discours s’élaborent, là encore, dans les livrets de récit de fondation ainsi que dans les écrits à visée scientifique produits par des chercheurs sionistes reconnus dans le monde académique européen et nord-américain.

41La constitution d’un discours environnemental dénigrant les techniques agricoles des habitants et valorisant l’importation de nouveaux modes d’appropriation des terres par les Européens n’est pas propre à la Palestine mandataire et doit être replacée dans le contexte historique des sociétés coloniales. La recherche récente de Diana K. Davis [2012] présente les processus de remise en question de la légitimité des techniques agricoles des paysans algériens dans les discours émanant de la puissance coloniale française. Dans le cadre de la Palestine mandataire, les écrits scientifiques sionistes et les récits de la colonisation agricole sont construits pour légitimer auprès des autorités mandataires britanniques la mise en place d’un Foyer national juif, puis à la fin des années 1930 la revendication d’un État. Conscients de la double obligation inscrite dans la Charte du Mandat britannique en Palestine [Picaudou op. cit. : 159-176], les sionistes cherchent à démontrer dans leurs discours que les transformations de l’environnement qu’ils mènent bénéficieront également à la population arabe. Ils se présentent comme les seuls capables d’assainir les marécages en raison de leurs connaissances techniques, mais aussi par la mise en avant de l’appartenance mythifiée des Juifs à la terre de Palestine.

  • 24 Articles rassemblés dans le dossier KH7-78, Central Zionist Archives, Jérusalem.

42De la même manière, les sionistes font le constat de l’absence de travaux de drainage de grande ampleur dans la région de Ḥula par les propriétaires arabes de la concession avant qu’elle ne soit reprise par les sionistes. Cette incurie devient un argument qui démontre, pour ces derniers, l’incapacité arabe à faire fructifier le sol palestinien. Deux articles au sujet de la concession de Ḥula, l’un publié dans le journal sioniste Davar le 3 décembre 1934 et l’autre écrit en 1935 par Julian L. Meltzer24 présentent, dans un style teinté d’orientalisme, les bédouins de cette région comme incapables d’augmenter les capacités agricoles des marécages. Les sionistes imposèrent donc dans leurs écrits, diffusés dans les milieux britanniques, européens et nord-américains, une perception particulière de l’environnement où toute terre palestinienne, qu’elle soit marécageuse, empierrée ou désertique, doit être travaillée pour assurer un développement économique et agricole pérenne. Cette conception est intimement liée à la nécessité pour les sionistes de justifier une immigration massive.

43Ce discours sur l’environnement palestinien s’ancre, bien sûr, dans une reconstruction de l’histoire de la Palestine où les périodes biblique et romaine correspondent à des modèles de fertilité que les sionistes souhaitent rebâtir. Les écrits de la Bible, du Talmud et de Flavius Josèphe sont utilisés, d’une part, dans les récits de fondation et, de l’autre, dans les écrits scientifiques comme sources de réflexion afin de transformer l’environnement palestinien, occultant et délégitimant par ce biais la période de domination arabe et surtout ottomane. Ce discours était à l’époque coloniale, d’une façon plus générale, celui qui prévalait à propos du Proche-Orient, naguère fertile à l’époque antique et notamment romaine, ensuite voué au déclin après les invasions arabes et bédouines, qui auraient fait triompher l’élevage extensif au détriment des villes et de l’agriculture. La domination ottomane aurait renforcé ce processus. Le colonisateur français, dans le mandat syrien, ne raisonnait pas autrement et partageait la vision historique promue par les sionistes en Palestine [Weurlesse 1946]. Ainsi, un des livrets de promotion de l’achat par les sionistes de la concession Ḥula retrace l’histoire de cette vallée :

  • 25 Huleh, Jerusalem, Goldberg’s Press. Auteur et date inconnus.

Il est souvent mentionné dans le Talmud que la vallée de Huleh possédait des oliviers et de l’huile d’olive en grande abondance. Au temps de Flavius Josèphe, c’était l’implantation juive la plus peuplée. C’est maintenant un trésor inexploité, couvert de marécages et de vase, à partir duquel les cultivateurs doivent une fois de plus extraire toute sa richesse 25. [Notre traduction de l’anglais]

44Point important : le drainage des marécages n’est pas présenté par les sionistes comme une transformation inédite de la Palestine, mais comme le retour à une période de fertilité antique.

45À la fin du xixe siècle et pendant le Mandat britannique, la conquête territoriale sioniste est donc fortement imprégnée de l’idée de la reconquête de ce qui fut autrefois qualifié de « pays où coulent le lait et le miel ». Les terres marécageuses sont au cœur de la construction d’un discours sioniste sur l’environnement palestinien. Dès la fin des années 1930, cependant, les discours autour de l’appropriation des terres humides de Palestine sont supplantés par ceux sur la conquête du désert.

L’affaiblissement de la conquête des zones humides au profit de la conquête du désert

  • 26 David Ben-Gourion dans Les Cahiers juifs, Paris, 1935, cité dans Ben Gourion [op. cit. : 88].

46À la fin des années 1930 et durant la décennie suivante, soit à la fin de période du Mandat britannique et dans les premières années de l’État d’Israël, le discours sioniste sur la transformation héroïque des marais en terres fertiles s’effaça progressivement au profit du mythe de la conquête du désert. Cet effacement créait une nouvelle histoire sioniste de la conquête de la Palestine, plus saisissante encore et sans doute politiquement plus rentable : après s’être construit dans les marais, le « pionniérisme » se tourne vers le désert du sud, le Néguev. Les écrits de la fin des années 1930 se concentrent davantage sur les capacités sionistes de transformation du désert, en utilisant les mêmes arguments que ceux développés pour les zones marécageuses : l’idée d’une supériorité technique (présentée comme occidentale) sur celle des Arabes (intrinsèquement inaptes par leur arriération), idée qui allait de pair avec la mise en avant du lien historique du peuple juif avec le désert. Ce changement résulte des nouvelles orientations territoriales sionistes alors que s’esquisse la fin du Mandat britannique. David Ben Gourion exprime ce besoin de conquêtes territoriales supplémentaires dès le milieu des années 1930 : « Même l’acquisition de la vallée de Houla n’est plus à la mesure d’une colonisation massive »26. Les sionistes, en effet, cherchent à acquérir de nouveaux espaces pour y accueillir la migration juive à une période de fortes tensions politiques au sein du Mandat, ce que l’on appelle la « révolution » de 1936, vaste protestation des Arabes contre la colonisation sioniste. C’est alors que le projet de partition devient, pour la première fois, inéluctable avec la commission Peel. Le plan Peel de 1937, censé répondre aux troubles de 1936, propose un premier plan de partage de la Palestine [Vareilles 2009]. Or le futur État juif alors dessiné exclut le désert du Néguev de son territoire [Laurens 2002 : 348] : celui-ci va devenir un enjeu crucial.

47Cet intérêt pour le désert comme espace vital de la colonisation s’accélère à la fin des années 1930 et tout au long des années 1940, tandis que le nazisme triomphant en Europe précipite l’exode des juifs qui peuvent encore fuir, et que le Livre blanc de mai 1939, au contraire, limite – au pire moment – l’immigration en Palestine et les possibilités d’achats fonciers sionistes. Face à cette situation, les organisations sionistes, en particulier le JNF, cherchent à s’implanter dans le désert pour influencer les contours du futur État et permettre l’arrivée massive de migrants [Dieckhoff op. cit. : 36]. Il s’agit de poursuivre la stratégie territoriale sioniste en œuvre depuis le début du xxe siècle : créer des colonies agricoles dans des espaces dépourvus jusqu’alors de présence juive. Ces achats de terre ne s’inscrivent alors plus dans le droit foncier ottoman mais dans le cadre des restrictions imposées par la puissance britannique [Katz 2005]. Le désert devient, dans les discours, le plus grand défi technique que les sionistes ont dû relever, comme l’indique David Ben Gourion dans un de ses discours:

La société juive a besoin du Néguev et doit y faire venir ses membres. Le suprême test pour Israël, à cette étape de son histoire, ce n’est pas de lutter contre les forces hostiles postées à ses frontières, c’est de rendre fertiles les terres arides qui constituent 60 % de son territoire.

48Sans doute le désert, davantage que le marais inattendu, correspondait-il à l’imaginaire sioniste (et plus généralement occidental) de la Palestine antique, celle que le Yishouv (et bientôt l’État d’Israël) cherchait à recréer. L’image biblique des hébreux marchant dans le désert persistait, puissamment, aussi dans les représentations des protestants britanniques. Ce lien historique et religieux entre le peuple juif et le désert est d’ailleurs souligné dans les mémoires du premier dirigeant de l’État d’Israël :

Nulle part, pas même à Jérusalem, la continuité avec notre passé n’est autant chargée de sens. Abraham comprenait le Néguev et l’importance qu’il aurait dans la vie de son peuple, ce qui est très proche de ce qu’on pense aujourd’hui en Israël. [Ben Gourion op. cit. : 210]

49D’abord narrée à l’occasion de l’assèchement des marais, la glorification du « pionniérisme » sioniste trouvait son point d’acmé dans la conquête du désert : l’image était plus romantique et finalement plus commode politiquement – un désert n’a pas d’habitants – que le drainage de marais insalubres où vivotaient des fellahs. À sa mort en 1973, Ben Gourion se fit enterrer dans le site grandiose de Sde Boker, kibboutz du Néguev voué à la culture des terres arides, et non dans les plantations de Galilée où il avait jadis souffert de la malaria.

Conclusion

  • 27 Voir I. Elazari-Volcani, « Rational Planning of Agricultural Settlement in Palestine », paper read (...)

50Dans son écrit agronomique, Isaac Elazari-Volcani, affirme le principe qui doit, selon lui, guider le succès de la colonisation agricole sioniste en Palestine : « Nous ne pouvons pas nous permettre de rejeter le sol le plus médiocre ou les pires zones climatiques du pays »27. L’idée que les Juifs ont le devoir de transformer à tout prix les espaces les plus difficiles de Palestine s’analyse parfaitement dans l’histoire de la conquête des terres marécageuses. Choisis pour des raisons pratiques pour être les premiers lieux d’établissement des colonies agricoles juives à la fin du xixe siècle, les espaces marécageux furent pleinement inclus dans la stratégie territoriale sioniste de conquête de terre pour établir le Foyer national juif au cours du mandat britannique. Terres à assainir, les marécages furent les lieux de la mise en acte des idées sionistes de régénération des Juifs et de renaissance de la fertilité d’Eretz-Israël. Dans les années 1950, le drainage des marais qui entouraient le lac Ḥula fut terminé. Reléguée aux premiers exploits du sionisme, la transformation des zones humides laissa place aux grands travaux d’aménagements du Néguev. La conquête du désert, notamment à travers les travaux du National Water Carrier qui détourne les eaux du lac de Tibériade vers le nord du Néguev, inauguré en 1964, remplace les marécages dans l’idéal du « pionniérisme » sioniste, désormais israélien. De nos jours, l’ancienne zone marécageuse du lac Ḥula est un espace d’agriculture intensive tandis que le lac est une réserve naturelle gérée par le Fonds national juif, preuve pour l’État hébreu de sa capacité à préserver l’environnement.

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Notes

1 Nous adoptons dans cet article, selon l’usage communément admis, l’emploi de la majuscule pour le substantif Juif. Ce choix désigne ainsi les Juifs comme un peuple.

2 Plusieurs orthographes pour Ḥula sont présentes dans les sources : Huleh, Houla, Hula.

3 C’est le refus du projet territorial sioniste en Ouganda proposé par Théodore Herzl en 1903 qui entraîne le choix ferme et définitif de la Palestine comme territoire du développement du projet sioniste.

4 Un firman est un édit qui émane du sultan de l’Empire ottoman.

5 Lettre du 16 septembre 1921, d’Élie Krause, Archives de l’Alliance israélite universelle, Paris, série Israël, Jaffa-Mikveh XL E123c.

6 Le terme Yishouv désigne la communauté juive de Palestine avant la création de l’État d’Israël.

7 Voir N. Joffe et A. Ribuot, 2017, Certaines batailles se font en silence. L’afforestation comme arme du projet sioniste, mémoire de recherche de l’École nationale supérieure de paysage de Versailles., p. 30.

8 Lettre de Chaïm Weizmann à Earl Curzon, Secretary of State for Foreign Affairs, 2 février 1920, Middle East Centre Archives, Saint Antony’s college, University of Oxford, Herbert Samuel Collection.

9 Voir le rapport de Sir J. Hope Simpson Palestine. Report on Immigration, Land Settlement and Development. Presented by the Secretary of state for the colonies to Parliament by command of His Majesty, 1930, Londres, Her Majesty’s Stationary Office, p. 26.

10 Drainage Ordinance of Surface Water, 1942. Israel State Archives, מ /13/726

11 Memorandum on the Water Resources of Palestine, présenté par le gouvernement de Palestine aux Nations unies, Comité spécial Palestine, juillet 1947, Jerusalem, Goverment Printer, Government of Palestine, p. 2.

12 Voir le rapport de Sir J. Hope Simpson Palestine. Report on Immigration…, p. 26.

13 Pamphlets on Malaria, 1925-1926, Israel State Archives מ/28/6541.

14 Lettre de la Zionist Commission de Palestine, 24 juillet 1919, Central Zionist Archives, Jérusalem, Z4/4000.

15 Government of Palestine, Memorandum on the Water Resources of Palestine, presented by the Government of Palestine to the United Nations’ Special Committee on Palestine in July, 1947. Jerusalem, Goverment Printer, Government of Palestine, p.8.

16 Central Zionist Archives, Jérusalem, dossier KH7/78.

17 Ibid.

18 Lettre de Haïm Weizmann à Earl Curzon, Secretary of State for Foreign Affairs, 2 février 1920, Middle East Centre Archives, Saint Antony’s college, University of Oxford, Herbert Samuel Collection.

19 Cité dans D. Ben Gourion [op. cit. : 101].

20 Dossier « Hula Drainage », Israel State Archives, Jérusalem, פ-13/1500.

21 Voir l’article de D. A. Schmidt, « Israel is draining swamps for farms », The New York Times, 18 août 1953.

22 Huleh, Jerusalem, Goldberg’s Press. Auteur et date inconnus.

23 Cité dans D. Ben Gourion [op. cit. : 85].

24 Articles rassemblés dans le dossier KH7-78, Central Zionist Archives, Jérusalem.

25 Huleh, Jerusalem, Goldberg’s Press. Auteur et date inconnus.

26 David Ben-Gourion dans Les Cahiers juifs, Paris, 1935, cité dans Ben Gourion [op. cit. : 88].

27 Voir I. Elazari-Volcani, « Rational Planning of Agricultural Settlement in Palestine », paper read at the 18th Zionist congress held at Prague, 1933, 1935, Jérusalem, Keren Hayessod, p. 7.

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Table des illustrations

Titre Figure 1. Le lac Hula en 1935
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Titre Figure 2. Les papyrus dans les marais du lac Ḥula en 1935
Crédits Photo : auteur inconnu, Central Zionist Archives, Jérusalem.
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Titre Figure 3. Un tracteur dans les marais du Kibboutz Nir David dans la vallée de Beit Shéan, décembre 1936.
Crédits Photo : auteur inconnu, Central Zionist Archives, Jérusalem.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/docannexe/image/16161/img-3.jpg
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Pour citer cet article

Référence papier

Élisabeth Mortier, « La figure héroïque du pionnier sioniste »Études rurales, 203 | 2019, 102-125.

Référence électronique

Élisabeth Mortier, « La figure héroïque du pionnier sioniste »Études rurales [En ligne], 203 | 2019, mis en ligne le 01 janvier 2022, consulté le 19 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/16161 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/etudesrurales.16161

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Auteur

Élisabeth Mortier

historienne, Centre d’histoire du xixe siècle (EA 3550), Sorbonne Université, Paris

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Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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