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Suivre la voie fluviale

Politiques environnementales au Canada sous le Régime français (1663-1760)
Following river routes. Environmental policies in Canada under French rule (1663-1760)
Benjamin Furst
p. 62-81

Résumés

Alors que l’abondance de l’hydrographie est mentionnée dans de nombreuses sources décrivant le Canada, colons et administrateurs s’accommodent des réalités environnementales de la colonie. De fait, dans ses tentatives pour faciliter la circulation fluviale, l’État se heurte à un manque de moyens qui limite les capacités d’aménagement. Contrairement à d’autres territoires français, il concentre son action sur les rivières et, en dépit de l’omniprésence de l’eau, il privilégie l’adaptation des pratiques plutôt que la transformation du milieu. Les mesures de gestion de l’hydrographie révèlent ainsi l’importance des initiatives locales et le contraste entre les volontés politiques affichées et les réalisations concrètes.

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Texte intégral

1Le Canada est « sans contredit le pays du monde où il y a le plus d’eau », écrit Pierre François-Xavier de Charlevoix en 1744 dans son Histoire et description générale de la Nouvelle-France [1744 : 168]. Au cœur du troisième tome, au côté des descriptions des Amérindiens et de la vie des colons de Nouvelle-France, on trouve une présentation qui se veut exhaustive de l’environnement canadien, issue de l’expérience personnelle du jésuite vingt ans plus tôt. Les populations, la flore et la faune y figurent en bonne place, mais P. F.-X. Charlevoix présente également le climat, le relief et l’hydrographie de ce territoire encore mal connu des Européens.

2L’intérêt du jésuite pour le réseau hydrographique n’est pas inhabituel. Dès les voyages de Samuel de Champlain, au début du xviie siècle, les cours d’eau sont omniprésents dans les récits des explorateurs, voyageurs et administrateurs, parce qu’ils le sont aussi dans leur périple. La première rencontre avec l’environnement canadien se fait par le Saint-Laurent, dans le golfe puis l’estuaire, large de plus de 120 kilomètres à son entrée. C’est depuis un navire que les voyageurs et les colons découvrent un territoire qui, pendant tout le Régime français, ne s’étend guère au-delà des rives de ce fleuve, long de quelque 1 200 kilomètres, et de ses principaux affluents [M. Trudel 1974 ; Harris 1984 : 22-25]. La morphologie fluviale conditionne d’ailleurs le choix des sites d’implantation des villes : Québec à l’endroit où le Saint-Laurent se resserre, sa largeur passant d’une quinzaine de kilomètres en aval de l’île d’Orléans à un kilomètre au cap Diamant, une distance qui permet aux batteries de canons de contrôler le passage vers l’amont ; Trois-Rivières et Montréal, où la confluence d’autres rivières importantes crée des sites idéaux pour la traite de fourrures, encore accentuée par la présence de rapides en amont de Montréal. Lorsque les missionnaires et les explorateurs circulent au Canada ou vers les Pays d’en Haut et la Louisiane, c’est le tracé des rivières qu’ils suivent. Entre Québec et Montréal, les seigneuries sont pour la plupart organisées perpendiculairement à la rivière, elles-mêmes souvent subdivisées en rangs parallèles qui garantissent à chaque habitant un accès au cours d’eau et à ses ressources.

3Ce rôle structurant du Saint-Laurent a fortement influencé l’historiographie canadienne [Dagenais et Cruikshank 2016]. Les études diachroniques sont nombreuses. Les travaux de l’économiste Harold A. Innis [1930] sur les denrées principales (staples) ont accordé un rôle majeur au réseau hydrographique laurentien dans le développement économique de la Nouvelle-France, puis du Canada. À la même période, la thèse laurentienne [Creighton 1937] considérait le fleuve comme l’élément le plus structurant de l’évolution territoriale, mais aussi politique, socio-économique et culturelle du Canada. Le géographe Cole Harris [1967] y voyait une mer intérieure autant qu’une rivière, comme Jean-Claude Lasserre qui relevait sa double fonction de transit et de « “rue principale” d’un pays » [1980 : 10]. Plus récemment, Pierre Camu [1996, 2005] a proposé une synthèse diachronique de la circulation sur le fleuve.

4Sur ces fondements, les études sur le Canada français ont surtout cherché à démontrer le rôle moteur de l’hydrographie dans l’évolution socio-économique du pays. Elles minorent ainsi les interactions entre dynamiques humaines et non humaines dans cet espace laurentien et écartent de facto les dimensions politiques et administratives de sa gestion. Ces questions sont abordées pour des périodes plus récentes à des échelles locales [Dagenais 2011] ou régionales, en raison notamment des grands travaux de canalisation [Macfarlane 2014] et d’exploitation hydroélectrique du réseau laurentien [Evenden 2015], ainsi que du caractère frontalier du fleuve [Hall et Starr 2016 ; Macfarlane 2016]. Inversement, des travaux novateurs ont été menés sur les zones humides du Saint-Laurent avec une perspective diachronique [Hatvany 2003 ; Plante et al. 2006] ou comparée [Moussette 2008], montrant l’évolution de ces espaces et des usages qui s’y rattachent sans pour autant questionner leur rôle dans le processus de colonisation du Canada français.

  • 1 Cette compagnie de commerce créée par Richelieu en 1627 était chargée de développer la colonie can (...)

5L’action de la Monarchie est pourtant sensible sur la vallée laurentienne. Les années 1663-1665 sont celles de l’arrivée en Nouvelle-France de représentants du pouvoir royal chargés d’administrer la colonie. Le dernier gouverneur nommé par la Compagnie des Cent-associés1 est remplacé, un conseil souverain créé, un intendant et des troupes envoyés. À une période où, en métropole, le pouvoir royal s’appuie sur le développement de l’administration (renforcement des intendants), les réformes du droit (ordonnances sur les Eaux et Forêts de 1669 et sur la marine de 1681) et l’apparition d’experts (ingénieurs civils et militaires) pour gérer le réseau hydrographique, dans quelle mesure et avec quelles conséquences a-t-il adapté ses méthodes et ses mesures aux particularités de l’environnement canadien ? Quels étaient les espaces et les milieux pris en compte dans la réflexion et les politiques de développement de la colonie ? Les pratiques de mise en valeur des zones humides ont-elles été transposées ou, au contraire, éludées ?

Figure 1. Le Saint-Laurent et ses affluents, du lac Ontario au Saguenay.

Figure 1. Le Saint-Laurent et ses affluents, du lac Ontario au Saguenay.

Carte : B. Furst

Le modèle colonial de la vallée laurentienne

D’une économie de la traite à une colonie de peuplement

6Dans l’histoire de la colonisation du Canada par les Français, les zones humides ne constituent pas un enjeu essentiel. L’exploration de la vallée laurentienne est d’abord marquée par des intérêts exclusivement commerciaux. Au xvie siècle, la pêche à Terre-Neuve et la traite de fourrures sont le prélude à une installation permanente. Entre 1608, date de la fondation de Québec, et les années 1660, la présence française reste cependant faible. Laissée aux mains d’adjudicataires, puis de compagnies de commerce, la gestion de la colonie tourne entièrement autour du commerce de pelleteries avec les Amérindiens : c’est l’époque « du comptoir » [M. Trudel 1963]. Le peuplement, auquel est pourtant conditionné le monopole de la traite, est délaissé par les compagnies qui cherchent avant tout à tirer le meilleur profit de leur présence au Canada. Cette attitude explique d’ailleurs pourquoi les Français s’implantent au cœur de la vallée laurentienne : ils peuvent ainsi commercer directement avec les nations algonquines et huronnes, maîtresses des routes de traite mais initialement moins rompues au commerce avec les Européens. En raison de la conception amérindienne d’un partenariat commercial, celui-ci est doublé d’une alliance militaire intégrant les Français dans le jeu géopolitique laurentien, ce qui les entraîne à participer aux expéditions contre les Iroquois voisins [Trigger 1990 : 242-255 ; Havard et Vidal 2008 : 82-83]. À ce commerce s’ajoute l’effort missionnaire, qui conduit notamment à l’envoi de plusieurs ordres au Canada et à la fondation de Montréal en 1642. La « ville missionnaire » [Deslandres 1993 : 17] devient l’implantation la plus en amont de la colonie et remplace d’ailleurs Québec, puis Trois-Rivières comme principal centre de traite des fourrures.

7Dans cette première étape de la colonisation, le système hydrographique laurentien constitue avant tout un réseau de circulation, support des entreprises commerciales et religieuses qui contribuent à améliorer la connaissance de l’espace canadien. Les rivières sont les seules voies de communication accessibles aux Français et concentrent les contacts, les échanges et les premières implantations. Explorateurs et missionnaires suivent leurs tracés et rapportent de leurs expéditions des cartes et des récits qui permettent d’améliorer la connaissance de cet environnement. La proximité des Amérindiens conduit à l’adoption rapide de pratiques locales dont la plus évidente et la plus durable est l’usage du canot : le Saint-Laurent n’est accessible aux embarcations européennes que jusqu’à Montréal, et ses affluents, Saguenay excepté, sont fermés aux bateaux, trop lourds pour être portés le long des rapides qui émaillent les rivières. La navigation sans portage est ainsi impossible entre Montréal et le lac Ontario, entre ce dernier et le lac Érié, et entre l’amont de la rivière Richelieu et le Saint-Laurent.

8Les Français ont donc tôt fait d’adopter largement le canot d’écorce amérindien dont la légèreté permet de le porter, et dont le faible tirant d’eau autorise la descente des rapides, tout en pouvant supporter d’importantes charges. Pour Gilles Havard [2016 : 282] : « ce petit vaisseau précaire, mais pratique et dévoreur d’espace, fut un peu à la Nouvelle-France ce que le galion fut à l’empire colonial espagnol ». En 1709, l’intendant Raudot écrit que pendant la saison chaude, « on fait […] tous les voyages en canot » [2018 : 62] et quand Pehr Kalm visite la colonie en 1749, il note que « devant chaque maison, il y a, retenu à la grève, un petit canot propre, bien construit, et de forme élégante » [1880 : 198].

  • 2 Les villages iroquoiens du Saint-Laurent décrits par Jacques Cartier en 1534 ont disparu le siècle (...)
  • 3 Déclaration du roi qui reprend possession de la Nouvelle-France, mars 1663, Archives nationales d’ (...)

9Au début du xviie siècle, il n’y a plus d’Amérindiens sédentaires dans la vallée laurentienne2, ce qui permet aux Français de s’y implanter. Ils y sont toutefois peu nombreux jusqu’en 1663 : les quelque 3 000 colons sont concentrés autour de Québec, Trois-Rivières et Montréal. La valorisation des terres canadiennes reste rare, celle des zones humides encore davantage alors même qu’en Acadie, des travaux d’assèchement à grande échelle de marais sont menés depuis les années 1630, à l’aide de techniques poitevines [Butzer 2002]. Lorsque, peu satisfait de la gestion du Canada par la Compagnie des Cent-associés, le pouvoir royal le rattache au domaine royal en 16633, il s’emploie à le transformer en colonie de peuplement.

La valorisation des terres dans la vallée laurentienne : défricher plutôt qu’assécher

10Pour assurer cette colonisation, l’État se repose sur le régime seigneurial, chaque seigneur étant chargé du peuplement de ses terres en concédant des censives à des particuliers. Les seigneuries sont découpées en bandes de terre longues et étroites, perpendiculaires à la rivière : des terres agricoles à défricher sont bordées d’un côté par l’eau, de l’autre par la forêt. L’habitat rural s’organise de façon linéaire le long du fleuve et de ses affluents, même si la plupart des infrastructures sont assez éloignées du rivage ou en surplomb : elles sont ainsi à l’abri des inondations (contrairement au premier site de Montréal ou à la basse-ville de Québec), ce qui explique que la plupart des mentions de débordements n’évoquent que rarement des dommages matériels [Harris 2012 : 72-78 ; Deudon 2016 ; Furst 2017 : 384-385]. En raison de l’omniprésence des rivières, îles, battures, marais, mouillères et prairies sont nombreux, d’autant que sur le Saint-Laurent, les effets de la marée se font sentir jusqu’en amont de Trois-Rivières, ce qui retient d’ailleurs l’attention des observateurs des xviie et xviiie siècles [Boucher 1664 : 9 ; Charlevoix op. cit. : 67].

11Ces zones humides sont bien exploitées, mais ne nécessitent guère de travaux d’assèchement : à la chasse et à la pêche déjà pratiquées par les Amérindiens, ne s’ajoutent à l’arrivée des Européens, que le pâturage et la récolte du foin [Plante et al. op. cit. ; Moussette op. cit.]. Les terres cultivables, défrichées individuellement par chaque censitaire, sont plus volontiers gagnées sur la forêt que sur la rivière. On trouve mention de travaux d’assèchement de prairies humides [Lavallée 1993 : 15], mais ils demeurent ponctuels et localisés, sans commune mesure avec ce qu’on observe à la même période en Acadie ou en métropole.

  • 4 En 1735, on recense 39 063 habitants. Recensement général du Canada en 1735-1736, 1737, ANOM, COL (...)

12Dans ce domaine, l’action du pouvoir royal existe, mais demeure marginale : la Monarchie n’use de son autorité que pour encadrer quelques travaux de drainage litigieux [Coates 2003 : 139-140] et pour arbitrer des conflits d’usages, qui demeurent relativement rares en raison de la faible densité démographique. Elle encourage également régulièrement mais indirectement des entreprises de pêcherie commerciale en accordant monopoles, privilèges et soutien matériel et financier [Furst op. cit.]. De fait, malgré une accélération du peuplement4, la valorisation des zones humides ne suscite l’intérêt ni des habitants, ni du pouvoir royal qui concentre l’essentiel de son action sur un enjeu économique plus important : la maîtrise de la navigation.

Des canots plutôt que des canaux

13Dans la colonie canadienne, où la circulation est un enjeu essentiel, les voies d’eau constituent souvent le meilleur support. Les grands chemins sont construits tardivement, entre 1709 et 1737 pour la liaison Québec-Montréal [Sanfaçon 1958 ; Robichaud 2012], de 1744 à 1749 pour relier Montréal aux forts du lac Champlain [Lavallée op. cit. : 24]. D’une manière générale, la concentration de la colonie le long du Saint-Laurent et le manque de moyens humains et financiers pour engager les travaux de création d’un réseau routier font de la navigation le moyen de transport prédominant pendant la belle saison. Pendant les cinq mois d’hiver, toutefois, les crues, les glaces et le froid empêchent toute circulation fluviale, alors que les raquettes, traîneaux et carrioles permettent les déplacements terrestres.

« Rendre communicables tous les commerces de ces grands et vastes pays »

14Les administrateurs doivent donc tenir compte des impératifs de la navigation dans leurs politiques et leurs pratiques. Il est donc logique que, préoccupés par le développement de la colonie canadienne et conscients de l’importance de la navigation pour le territoire, ils se penchent sur les possibilités d’appliquer en Nouvelle-France une politique qui semble faire ses preuves en métropole.

15Côté canadien, Pierre Boucher, gouverneur de Trois-Rivières juge dès 1664 que le réseau navigable peut être augmenté : « si ce pays-icy estoit habité, je ne doute pas que l’on ne rendist navigable plusieurs rivières qui ne le sont point, et cela, à peu de frais ». L’auteur, qui vit au Canada depuis ses 13 ans, a eu le temps de prendre conscience de l’enjeu de la navigation et des obstacles qui subsistent : « ce qui empesche nos rivières d’estre navigables, se sont des cheutes d’eau qui se rencontrent par endroits, ou des rapides, et cela aux unes plus qu’aux autres » [Boucher op. cit. : 147-149]. Des discours aussi ambitieux demeurent rares mais ils existent et trouvent un écho, de l’autre côté de l’Atlantique. Vauban, qui a fait ses preuves comme hydraulicien, mais aussi comme théoricien de la navigation en France, envisage lui aussi dans son Mémoire sur les moyens de rétablir nos colonies, un immense réseau de lacs et de rivières navigables interconnectés par des canaux à creuser :

je ne vois rien de comparable dans le monde à cette propriété qui peut rendre communicables tous les commerces de ces grands et vastes pays avec des facilités aussi commodes que si elles étaient faites exprès [publié dans Virol (dir.) 2007 : 572-573].

16En dépit de cet optimisme, le seul projet d’envergure tenté par les Canadiens et soutenu par le pouvoir royal est celui du contournement des rapides de Lachine, qui bloquent le passage vers l’amont de Montréal, en direction des Grands Lacs et des lieux de traite des fourrures.

L’échec du canal de Lachine

  • 5 Mémoire donnant une description du Canada et de ce qui s’y trouve d’avantageux tant pour les intér (...)

17Contemporain de P. Boucher, l’abbé sulpicien François de Salignac de la Mothe-Fénelon, dont l’ordre possède la seigneurie de l’île de Montréal, imagine le creusement d’un canal depuis le village de Lachine jusqu’à la rivière Saint-Pierre, qui passe au sud de Montréal. Il devrait contourner les rapides et rendre les Grands Lacs accessibles aux embarcations européennes5. Le supérieur des sulpiciens montréalais, François Dollier de Casson, plaide avec les mêmes arguments pour cette réalisation, une requête provisoirement refusée par le supérieur général de l’ordre en France, faute de moyens [Bonin 1936 : 272 ; Dickinson 2007 : 41].

  • 6 Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry, Carte d’une partie de l’isle de Montréal, 1er octobre 1733, AN (...)

18Les travaux ne commencent qu’en 1689, avec le soutien indirect du pouvoir : l’intendant autorise la compagnie à mobiliser, en guise de main-d’œuvre, les habitants de la paroisse de Lachine incapables de payer leurs taxes [Bonin op. cit. : 272-273]. Interrompu une première fois par une attaque iroquoise, le projet est provisoirement abandonné en 1690 : la roche, trop dure, nécessite des moyens bien supérieurs à ceux dont disposent les Sulpiciens6. En 1700, Dollier de Casson s’adjoint les services de Gédéon de Catalogne, arpenteur et officier des troupes de marine au Canada, sans plus de succès. Le supérieur général de l’ordre le pousse à se rendre à l’évidence :

des principaux officiers du pays ont dit que l’entreprise du canal dont vous avez fait marché excède le pouvoir non seulement d’un particulier, mais d’une communauté, et qu’il n’y a que le roi qui pût en faire les frais [cité dans Bonin op. cit. : 287].

  • 7 Extraits d’une lettre de Vaudreuil et de Beauharnois à Pontchartrain, 1703, ANOM, COL C11A 21/fol. (...)
  • 8 Bibliothèque et Archives Canada, MG18-G6 2, p. 347, Mémoire du roi à Callière et à Beauharnois, 7 (...)
  • 9 Lettre de Vaudreuil et des intendants Raudot à Pontchartrain, 3 novembre 1706, ANOM, COL C11A 24/f (...)

19Le conseil est entendu. Fort de l’appui des autorités coloniales, le père Breslay, successeur de Dollier, sollicite le soutien du roi, qui se montre sensible à la demande. Un document de travail portant les commentaires du secrétaire d’État de la Marine montre que le pouvoir royal trouvait le projet assez intéressant pour envisager d’en demander des plans et d’y faire travailler des soldats7, mais la prudence prévaut. Versailles sollicite un mémoire, puis un plan et une évaluation de la faisabilité du projet8. Les autorités coloniales, tout en vantant les bénéfices de l’aménagement pour la colonie et le roi, envoient l’ingénieur Beaucour « visiter et sonder9 » ce canal, et en évaluer le coût, finalement trop élevé. La guerre de Succession d’Espagne draine le budget et le roi annonce qu’il :

  • 10 Mémoire du roi à Vaudreuil et Raudot, 30 juin 1707, ANOM, COL C11G 1/fol.88.

n’est pas en estat a présent d’entreprendre une pareille despense, aussy c’est un ouvrage à ramener à la paix à moins qu’on ne trouvast les moyens de le faire faire sans qu’il en coustast rien à Sa Majesté. 10

Figure 2. Les tentatives de contournement des rapides de Lachine (1689-1701)

Figure 2. Les tentatives de contournement des rapides de Lachine (1689-1701)

Carte : B. Furst. Sources : V. Mahaut, Recensement cartographique des anciens cours d’eau de l’île de Montréal et tracé des creux et des crêtes. Cartographic survey of the island of Montreal's former watercourses showing thalwegs and crest lines [document cartographique], 2016 ; ANOM, 03DFC483B, Chaussegros de Léry, Gaspard-Joseph, Carte d'une partie de l'isle de Monréal depuis la pointe à Cardinal jusques au courant de Ste Marie avec la ville de Montréal, 1733 ; BANQ, G/3452/M65/1890/M35 CAR, H. Malingre, Plan de l’île de Montréal, 1890.

  • 11 Projet de la dépense à faire en Nouvelle-France pour le service du roi pendant l’année 1734, signé (...)
  • 12 Lettre de Chaussegros de Léry à Maurepas, 20 octobre 1733, ANOM, COL C11A 60/fol. ; ANOM, COL C11A (...)

20Une dernière tentative, en 1733, se solde par le même constat : le canal est trop cher, malgré ses bénéfices potentiels. La somme estimée représente deux tiers du budget annuel de la colonie, loin des vingt à trente-cinq mille livres envisagées par G. de Catalogne11. Le pouvoir royal et les Sulpiciens eux-mêmes renoncent finalement au projet12.

  • 13 Édit portant permission de faire une navigation en Picardie par les rivières de Somme et d’Oise, e (...)

21Le dénominateur commun de ces échecs successifs est le manque de moyens consentis aux projets. En métropole, le pouvoir royal investit volontiers dans de telles entreprises, aussi ambitieuses soient-elles : le canal du Midi, coûte plus de 17 millions de livres – dont le tiers est avancé par le roi – et occupe entre 8 et 12 000 ouvriers [Cotte 2003 : 51-72]. La plupart des travaux de canalisation s’y accompagnent d’ailleurs d’entreprises de dessiccation des marais que les ouvrages traversent13, une relation dialectique inexistante au Canada, tant dans les discours que dans les projets : le petit lac Saint-Pierre est plutôt envisagé comme un moyen de réduire la distance à creuser que comme une zone à assécher. Pour de tels travaux, les Sulpiciens ne disposent ni de l’expertise technique, ni des moyens matériels et financiers qui dépassent largement ce que le pouvoir royal consentirait à investir. Ce dernier est le seul en mesure de mener des entreprises de cette ampleur, mais accaparé par les guerres, peu enclin à financer des aménagements lourds dans une colonie lointaine qui connaît de toute façon des difficultés de développement, il ne se donne guère les moyens de ses ambitions.

L’omniprésence de la navigation

22Pour favoriser la circulation essentielle au commerce, mais aussi à la guerre contre les Iroquois et les Anglais, les administrateurs au Canada délaissent donc rapidement toute velléité d’aménager les rivières, adaptant plus volontiers leurs propres pratiques à l’environnement local. Les efforts pour assurer la communication au sein de la colonie et avec les avant-postes méridionaux transparaissent dans la correspondance et les sources administratives, notamment pour les questions militaires.

23De fait, dès les premiers temps de la colonie, les conflits avec les Iroquois et avec les Anglais conditionnent l’usage de l’espace. À partir de 1663 et jusqu’en 1755, pour protéger le territoire des attaques ennemies, des forts sont créés le long des rivières permettant l’accès à la colonie (depuis les lacs Ontario et Champlain). Éloignés des foyers de peuplement, ces forts sont accessibles uniquement par voie d’eau. Par ailleurs, le succès des expéditions françaises repose sur la mobilité des troupes qui suivent, elles aussi, les rivières pour gagner l’Iroquoisie et la Nouvelle-Angleterre.

  • 14 Mémoire des choses absolument nécessaires pour l’entreprise de guerre à faire en 1687, ANOM, COL C (...)

24Lorsque c’est possible, on utilise des bateaux à fond plat, mieux adaptés au transport du matériel de guerre européen. En 1671 et 1672, les gouverneurs Courcelles, puis Frontenac remontent ainsi le Saint-Laurent jusqu’au lac Ontario, décidés à prouver aux Iroquois que les Français sont capables de rejoindre leur territoire avec des canons. Par la suite, le gouverneur Denonville, considérant les canots trop chers et trop fragiles, requiert deux cents bateaux pour sa campagne de 1687, toujours contre les Iroquois, en n’oubliant pas de prévoir « cinquante paquets de cordage […] pour hasler les bateaux dans les rapides14 ». De manière générale, les embarcations européennes, notamment des barques à voile, sont employées là où les conditions le permettent : à proximité des forts des Grands Lacs, sur le lac Champlain et dans la partie amont de la rivière Richelieu.

  • 15 Talon à Colbert, 13 novembre 1666, RAPQ 1930-1931, p. 53.
  • 16 Frontenac à Colbert, 2 novembre 1672, RAPQ 1926-1927, p. 15.
  • 17 Mémoire des choses absolument nécessaires pour l’entreprise de guerre à faire en 1687, ANOM, COL C (...)

25Le canot demeure toutefois incontournable. Dès 1665, le régiment Carignan-Salières, envoyé pacifier les Iroquois, en utilise15. Faute de bateau, les premiers intendants et gouverneurs font de même16. Dans les campagnes de 1687, les canots représentent le poste de dépense le plus important : ils coûtent moins cher à construire que des bateaux, mais leur manœuvre exige de recourir à des canoteurs expérimentés, c’est-à-dire des Canadiens « qui seuls ont l’usage et l’adresse de monter les rapides, cascades ou saults d’eau qui sont en grand nombre17 », si bien que près de 36 % du budget estimé sont consacrés au trajet entre Montréal et le fort Frontenac (voir graphique). On trouve ainsi mention de l’utilisation des canots jusqu’à la fin du Régime français : en 1752, L. Franquet [1889 : 17] évoque un artisan qui « en fait une si grande quantité qu’il touche du roy tous les ans plus de 6 000 livres ». Si l’aménagement du réseau hydrographique se révèle impossible en Nouvelle-France, le pouvoir royal sait ainsi s’adapter rapidement et durablement aux spécificités du milieu pour la conquête et la défense du territoire en modifiant ses propres pratiques et stratégies.

Figure 3. Part consacrée à la navigation dans le budget prévisionnel de l’expédition contre les Iroquois en 1687.

Figure 3. Part consacrée à la navigation dans le budget prévisionnel de l’expédition contre les Iroquois en 1687.

Graphique : B. Furst. Sources : Mémoire des choses absolument nécessaires pour l’entreprise de guerre à faire en 1687, ANOM, COL C11A 9/fol.168-173.

L’hydrographie du bas Saint-Laurent : une vision maritime du fleuve

26Aux enjeux militaires qui conditionnent la politique de gestion de l’hydrographie en amont, se conjugue le problème de l’accès à la colonie par la voie maritime, indispensable au lien avec la métropole et qui revêt une dimension stratégique. Là aussi, l’action du pouvoir royal est concentrée sur la rivière, elle-même, pour en améliorer la maîtrise en dressant des cartes et en formant des pilotes. Les terres côtières ne bénéficient que marginalement de cette politique calquée sur les réformes maritimes qui s’appliquent alors de l’autre côté de l’Atlantique.

Les débuts de l’hydrographie canadienne

  • 18 Voir, par exemple, le récit du naufrage du vaisseau l’Éléphant le 1er septembre 1729, Procès-verba (...)

27La navigation sur le bas Saint-Laurent est, en effet, particulièrement difficile. Disposer de spécialistes du fleuve, capables de guider les navires le long d’un parcours dangereux, où les conditions météorologiques, les courants, les glaces et les bancs de sable causent de nombreux naufrages et échouements18, se révèle rapidement indispensable. Les Anglais en font les frais lors de deux expéditions contre Québec. En 1690, celle de William Phips, retardée sur le Saint-Laurent faute de pilotes, n’arrive devant la ville que le 16 octobre, si tard dans la saison que l’hiver approchant oblige les troupes à rembarquer une semaine plus tard. En 1711, les navires de Hovenden Walker ne parviennent même pas à Québec : une erreur de pilotage cause le naufrage d’une partie de la flotte dans le golfe du Saint-Laurent, forçant l’amiral à faire demi-tour [Havard et Vidal op. cit. : 116 ; Stacey 2015].

  • 19 Mémoire de Talon au roi sur le Canada, 2 novembre 1671, Rapport de l'Archiviste de la province de (...)

28La formation de pilotes fait partie donc des premiers objectifs des agents de la monarchie à leur arrivée en Nouvelle-France. À bord du navire qui l’amène à Québec, en 1665, l’intendant Jean Talon note la difficulté à naviguer et rencontre des pilotes qui embarquent à Tadoussac pour guider le navire sur le dernier tronçon. Au-delà d’une nécessité, J. Talon y voit rapidement une opportunité. En 1671, il écrit au roi que si les jeunes Canadiens continuent de se former à la navigation, « il y a lieu d’espérer que ce pays deviendra une pépinière de navigateurs, de pescheurs, de matelots ou d’ouvriers19 ». La formation des pilotes fait donc partie intégrante du projet de l’intendant qui, chargé de développer la colonie au-delà du seul commerce de fourrures, explore de multiples possibilités de valoriser le territoire.

  • 20 Ordonnance de la marine, du mois d’aoust 1681, Paris, chez C. Osmont, 1714, livre I, titre VIII, a (...)
  • 21 Voir le document daté du 15 juin 1678, reproduit et non signé, provenant des archives de la provin (...)

29Les cours destinés à former des pilotes au Canada naissent dans les années 1660, en même temps que les classes d’hydrographie se développent en France, dans le sillage de la modernisation de la Marine engagée par Colbert et Louis XIV. De part et d’autre de l’Atlantique, les initiatives sont d’abord privées : à Dieppe, c’est l’abbé Denys qui fonde cet enseignement en 1663. Au Canada, il est assuré par Martin Boutet, un arpenteur qui enseigne au collège jésuite de Québec [Audet 1970 : 20-21 ; Burke-Gaffney 1986]. Dans tous les cas, l’État s’intéresse de près à cette formation. En France, un premier collège de Marine est fondé à Saint-Malo en 1669 [Fauque 2000 : 370], et l’ordonnance de la marine d’août 1681 entend instaurer des « professeurs d’hydrographie, pour enseigner publiquement la navigation20 » dans les principales villes maritimes. Dans la colonie, le pouvoir royal intervient dès l’arrivée de Jean Talon, qui fait ouvrir l’enseignement de M. Boutet à tout habitant désireux de devenir pilote [Burke-Gaffney op. cit.], et le professeur reçoit un brevet du roi en 167821. Contrairement à la métropole, la Monarchie ne crée pas d’infrastructure mais s’appuie sur celles qui existent déjà. À la mort de M. Boutet, faute d’enseignant, il en est ainsi provisoirement fini des cours d’hydrographique.

Un besoin de cartes marines

  • 22 Ordonnance de la marine…, art. 2, p. 66.
  • 23 Voir la carte dessinée par Jean Bourdon, Rivière de St Laurens depuys Montréal jusqu'à Tadoussac, (...)

30Selon l’ordonnance de la marine, l’enseignement des pilotes doit les rendre : « capables de figurer les ports, côtes, montagnes, arbres, tours et autres choses servant de marque aux havres et rades, et de faire les cartes des terres qu’ils découvriront22 ». Cartes et pilotes sont étroitement liés, les premières servant aux seconds dont l’expérience permet en retour de les améliorer. Or, si les premiers pilotes du Saint-Laurent font montre d’une connaissance du fleuve suffisante pour guider les navires jusqu’à Québec, ni eux, ni le pouvoir royal ne disposent, en dépit du travail de l’arpenteur Jean Bourdon23, de cartes assez précises sur lesquelles s’appuyer. En 1685, deux entreprises remédient à la situation indépendamment l’une de l’autre.

31Le secrétaire d’État à la Marine, Colbert de Seignelay, mandate tout d’abord le mathématicien et hydrographe du roi Jean Deshayes pour se rendre en Nouvelle-France et dresser une carte du fleuve [Pritchard 1979 : 129 ; Palomino 2012 : 27]. Cette mission participe de l’intérêt général du pouvoir royal pour l’amélioration de la cartographie et la navigation du royaume : à partir de 1662, il s’attelle en effet, à la structuration des ingénieurs et de la cartographie marine, aboutissant notamment à la publication du Neptune françois [Chapuis 1999 : 101-107].

  • 24 Lettre de Denonville à Seignelay, 13 novembre 1685.

32La première carte marine du Saint-Laurent n’est toutefois pas l’œuvre commandée à J. Deshayes qui est retardé dans ses levers, mais une proposition spontanée de Louis Jolliet, explorateur, marchand et seigneur de terres situées dans l’estuaire. Dessinée par le cartographe canadien Jean-Baptiste Franquelin à partir des levers de L. Jolliet, elle est envoyée en France dès 1685 avec la recommandation du gouverneur Denonville qui en profite pour suggérer d’employer J.-B. Franquelin ou L. Jolliet, tous deux formés à l’hydrographie à Québec, pour améliorer les cartes du fleuve et former les pilotes24. J. Deshayes, L. Jolliet, J.-B. Franquelin opèrent tous trois à un moment clé de l’histoire du Canada en matière d’hydrographie, ces années 1680 où le pouvoir royal mène une politique maritime particulièrement active et reconnaît l’importance de disposer de bonnes cartes et de pilotes compétents pour faciliter la circulation des navires. La colonie renoue ainsi avec la formation des pilotes. En 1687, J.-B. Franquelin reçoit la commission d’hydrographe du roi en Nouvelle-France, avec la double mission d’enseigner la navigation et de cartographier le fleuve. L. Jolliet puis J. Deshayes lui succèdent. Le dernier retourne au Canada « en qualité d’ydrographe » avec la tâche :

  • 25 Lettre de Beauharnois à Pontchartrain, 11 novembre 1702, ANOM, COL C11A 20/fol.191.

de tenir cet hyver une école d’ydrographie et d’aller l’esté prochain veriffier dans le fleuve quelques endroits de la coste du Nord au dessous de Québec sur lesquels il reste quelques observations à faire.25.

Une intervention qui demeure limitée

33La période des années 1685-1706 marque un moment unique de l’implication du pouvoir royal dans l’amélioration des pratiques et de la connaissance hydrographique au Canada. Participant d’un mouvement observable à l’échelle de tout le royaume, elle revêt toutefois des spécificités. Les mesures adoptées pour améliorer ces connaissances confirment le statut particulier du Saint-Laurent, à la fois interface fluviale et maritime. De fait, si les structures et les politiques mises en place dans la colonie sont basées sur celles des façades atlantique et méditerranéenne, les écoles de métropole forment avant tout des pilotes hauturiers, capables de guider les navires dans les voyages au long cours, tandis qu’à Québec, les élèves sont destinés à devenir des pilotes côtiers, conduisant les navires dans le fleuve.

  • 26 Lettre de Beauharnois et Dupuy à Maurepas, 30 octobre 1726, ANOM, COL C11A 48/fol.100v ; Lettre de (...)

34À l’exception de J. Deshayes, la monarchie mobilise les rares personnes compétentes déjà présentes au Canada et valorise des initiatives personnelles. Son action est également limitée dans le temps, puisqu’à la mort de J. Deshayes (1706), le pouvoir royal se désengage de la formation des pilotes, confiée aux jésuites qui la sollicitaient depuis 1696. Leurs cours théoriques sont complétés par une formation pratique assurée par des pilotes et des officiers de l’Amirauté de Québec (créée en 1717) sous contrôle des autorités de la colonie26, ce qui facilite la conservation et la transmission des savoirs pratiques. Les pilotes continuent d’enrichir la cartographie du Saint-Laurent, mais leurs connaissances restent réservées à leur profession, ne remontant en France que pour le bénéfice des cartographes du Dépôt des cartes et plans de la Marine. La création de ce service, en 1720, déplace en effet le lieu d’élaboration des cartes vers Paris, marquant l’institutionnalisation du soutien royal à la cartographie, mais aussi la consécration des cartographes de cabinet, qui au détriment d’une pratique du terrain, s’appuient sur les sources les plus nombreuses et diverses possibles qu’ils compilent pour en tracer des cartes. Le résultat est probant mais, pour des raisons stratégiques, la production des hydrographes du Dépôt reste confidentielle et la carte de J. Deshayes continue de faire référence jusqu’à la fin du Régime français [Pritchard op. cit. : 132 ; Litalien et al. 2007 : 202-203].

  • 27 Ordonnance de l’intendant Hocquart, 26 avril 1740, BAnQ Québec, E1, S1, P3222 ; Lettre de La Jonqu (...)

35L’essentiel de l’action des pilotes concerne les cours d’eau proprement dits, ce qu’attestent les cartes qu’ils dressent et qui ne vont presque jamais au-delà du trait de côte. La gestion de l’hydrographie laurentienne se rapproche ici davantage des politiques maritimes de métropole que celles de gestion des cours d’eau : l’ordonnance des Eaux et Forêts de 1669 n’est d’ailleurs pas appliquée en Nouvelle-France. À l’instar du reste de la colonie, le pouvoir royal s’attache surtout à développer le potentiel commercial du territoire, qui repose sur la facilité des communications au Canada et avec la métropole. Les berges en général et les zones humides en particulier sont écartées de ces politiques dans un contexte où l’immensité de l’espace canadien rend superflu tout aménagement de grande ampleur, tel que les asséchements. Les pilotes participent cependant à l’exploration des rives de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent. On en retrouve quelques mentions dans la correspondance et les ordonnances, comme en 1735, lorsque Richard Testu de la Richardière est envoyé reconnaître les terres de la baie des Chaleurs ou au début des années 1750, quand Gabriel Pellegrin est sollicité pour explorer la côte nord, dans l’objectif d’installer un fort à Sept-Îles27. Indirectement, les pilotes contribuent donc au développement du territoire puisque ces explorations permettent l’implantation progressive des établissements de pêche et de commerce de fourrures avec les Inuit au xviiie siècle [F. Trudel 1978 ; Crompton 2015].

Conclusion

36Ainsi, les conséquences sur l’hydrographie canadienne de la reprise en main de la colonie par l’État monarchique s’observent moins sur la modification des paysages que sur les pratiques et les comportements. Contrairement à la métropole, aucune altération majeure des cours d’eau, aucun aménagement d’envergure sur les zones humides n’est réalisé dans un espace où seuls le Saint-Laurent et quelques affluents sont le support d’une présence française permanente. Les modalités d’exploitation de l’hydrographie dépendent donc largement d’un contexte politique, économique et démographique. Au Canada, l’immensité du territoire au regard du nombre d’habitants, les modestes moyens consacrés au développement de la colonie, la délégation de la responsabilité du peuplement et de la valorisation agricole au système seigneurial expliquent la primauté accordée par le pouvoir royal à la maîtrise des cours d’eau stricto sensu, au détriment des zones côtières et notamment des espaces humides.

37Sur ces politiques, deux décalages s’observent d’ailleurs. Le premier est le contraste entre les discours des administrateurs, dans la colonie comme en métropole, et les réalisations concrètes du pouvoir royal. Alors que les sources font mention de nombreux projets d’aménagements et d’ambitieux plans de développement du Canada et de son économie à travers l’amélioration de la navigation, les réalisations sont plus modestes, les tentatives plus rares et les succès occasionnels. Le second décalage est celui qui sépare les moyens accordés par le pouvoir royal aux politiques de développement de la navigation en métropole et en Nouvelle-France, où ils sont nettement moindres. Si les temporalités des mesures sont les mêmes, l’intervention de la Monarchie au Canada est essentiellement réactive et ponctuelle. Qu’il s’agisse d’améliorer la maîtrise de la navigation sur l’estuaire, de creuser des canaux ou de mobiliser les savoirs locaux pour circuler sur les rivières, la politique royale en matière de gestion des cours d’eau repose sur des initiatives et des ressources canadiennes : celles des seigneurs comme les Sulpiciens, des experts comme M. Boutet ou L. Jolliet, des habitants qui manœuvrent ou construisent les canots. Les efforts parent au plus pressé et cherchent la rentabilité et l’efficacité immédiate, contribuant à rendre invisibles les zones humides dont la valorisation se révèle in fine inutile au processus de colonisation sous le Régime français. En effet, il faudra attendre le xixe siècle pour que soient réalisés des travaux comme l’assèchement du petit lac Saint-Pierre, à Montréal, corollaire de l’achèvement du canal de Lachine.

38En dépit de ce manque d’investissement, la prise en compte de l’hydrographie canadienne par le pouvoir royal atteste d’une réelle conscience de l’importance et des spécificités de l’environnement nord-américain, essentielle au développement du territoire. Dans un espace où l’eau est omniprésente, structuré par un fleuve qui retient l’attention de P. F.-X. Charlevoix et de nombreux observateurs et administrateurs de la colonie, les rivières ont été indispensables à la pénétration du territoire, mais n’ont pas défini à elles seules le processus de colonisation et de valorisation du Canada. De fait, d’autres éléments ont été tout aussi déterminants, à commencer par l’alliance franco-amérindienne. Néanmoins, les politiques destinées à gérer le réseau hydrographique, bien qu’imparfaites, ont sensiblement contribué à la maîtrise du territoire et à renforcer l’autorité de la Couronne au sein d’une population habituée à une certaine autonomie, participant ainsi à l’affirmation du pouvoir royal français au Canada.

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Notes

1 Cette compagnie de commerce créée par Richelieu en 1627 était chargée de développer la colonie canadienne en échange du monopole de traite des fourrures. Elle est dissoute en 1663, quand le roi rattache la Nouvelle-France au domaine de la Couronne.

2 Les villages iroquoiens du Saint-Laurent décrits par Jacques Cartier en 1534 ont disparu le siècle suivant même si, à partir de 1639, des Amérindiens convertis et sédentarisés vivent à nouveau de manière permanente à proximité des implantations françaises d’abord quelques dizaines, puis plusieurs milliers à la fin du xviiie siècle [Dickinson et Grabowski 1993 ; Harris 2012 : 62].

3 Déclaration du roi qui reprend possession de la Nouvelle-France, mars 1663, Archives nationales d’outre-mer [ci-après : ANOM], COL C11A 2/fol.5-7.

4 En 1735, on recense 39 063 habitants. Recensement général du Canada en 1735-1736, 1737, ANOM, COL G1 460.

5 Mémoire donnant une description du Canada et de ce qui s’y trouve d’avantageux tant pour les intérêts du roi que pour ceux de ses colonies, 1671, ANOM, COL C11A 3/fol.196.

6 Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry, Carte d’une partie de l’isle de Montréal, 1er octobre 1733, ANOM, Dépôt des Fortifications des colonies, 03DFC483B.

7 Extraits d’une lettre de Vaudreuil et de Beauharnois à Pontchartrain, 1703, ANOM, COL C11A 21/fol.35.

8 Bibliothèque et Archives Canada, MG18-G6 2, p. 347, Mémoire du roi à Callière et à Beauharnois, 7 juillet 1703 ; Mémoire du roi à MM. de Vaudreuil et de Beauharnais, 10 juin 1704, ANOM, COL C11G 1/fol.12.

9 Lettre de Vaudreuil et des intendants Raudot à Pontchartrain, 3 novembre 1706, ANOM, COL C11A 24/fol.41v-42.

10 Mémoire du roi à Vaudreuil et Raudot, 30 juin 1707, ANOM, COL C11G 1/fol.88.

11 Projet de la dépense à faire en Nouvelle-France pour le service du roi pendant l’année 1734, signé Hocquart, octobre 1733, ANOM, COL C11A 60/fol.193-206v.

12 Lettre de Chaussegros de Léry à Maurepas, 20 octobre 1733, ANOM, COL C11A 60/fol. ; ANOM, COL C11A 59/fol.54-56v, Beauharnois et Hocquart à Maurepas, 25 septembre 1733.

13 Édit portant permission de faire une navigation en Picardie par les rivières de Somme et d’Oise, et canal de communication desdites deux rivières, 1724, BnF, F-21097 (118), art. 1. (<http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33836377n>).

14 Mémoire des choses absolument nécessaires pour l’entreprise de guerre à faire en 1687, ANOM, COL C11A 9/fol.168.

15 Talon à Colbert, 13 novembre 1666, RAPQ 1930-1931, p. 53.

16 Frontenac à Colbert, 2 novembre 1672, RAPQ 1926-1927, p. 15.

17 Mémoire des choses absolument nécessaires pour l’entreprise de guerre à faire en 1687, ANOM, COL C11A 9/fol.171v.

18 Voir, par exemple, le récit du naufrage du vaisseau l’Éléphant le 1er septembre 1729, Procès-verbal du naufrage du vaisseau du roi l'Éléphant, 12 septembre 1729, ANOM, COL C11A 51/fol.476-478v.

19 Mémoire de Talon au roi sur le Canada, 2 novembre 1671, Rapport de l'Archiviste de la province de Québec [ci-après : RAPQ], 1930-1931, p. 161.

20 Ordonnance de la marine, du mois d’aoust 1681, Paris, chez C. Osmont, 1714, livre I, titre VIII, art. 1, p. 64-65.

21 Voir le document daté du 15 juin 1678, reproduit et non signé, provenant des archives de la province de Québec, « Brevet d’ingénieur en la Nouvelle-France pour le Sr Martin Boutet », Bulletin des recherches historiques 34, 1928, p. 47.

22 Ordonnance de la marine…, art. 2, p. 66.

23 Voir la carte dessinée par Jean Bourdon, Rivière de St Laurens depuys Montréal jusqu'à Tadoussac, 1641, BnF, GE C-5185 (RES).

24 Lettre de Denonville à Seignelay, 13 novembre 1685.

25 Lettre de Beauharnois à Pontchartrain, 11 novembre 1702, ANOM, COL C11A 20/fol.191.

26 Lettre de Beauharnois et Dupuy à Maurepas, 30 octobre 1726, ANOM, COL C11A 48/fol.100v ; Lettre de la Jonquière et Bigot au comte de Jouy, 18 octobre 1750, ANOM, COL C11A 95/fol.81.

27 Ordonnance de l’intendant Hocquart, 26 avril 1740, BAnQ Québec, E1, S1, P3222 ; Lettre de La Jonquière et Bigot à Rouillé, 20 octobre 1750, ANOM, COL C11A 95/fol.94v.-95 ; Lettre de Duquesne à Rouillé, 31 octobre 1753, ANOM, COL C11A 99/fol.125v.-126. Voir aussi le plan réalisé en 1735 par G. Pellegrin d’une concession de Pierre Constantin dans le détroit de Belle-Isle, ANOM, COL C11A 109/f.139.

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Table des illustrations

Titre Figure 1. Le Saint-Laurent et ses affluents, du lac Ontario au Saguenay.
Crédits Carte : B. Furst
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/docannexe/image/16049/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 280k
Titre Figure 2. Les tentatives de contournement des rapides de Lachine (1689-1701)
Crédits Carte : B. Furst. Sources : V. Mahaut, Recensement cartographique des anciens cours d’eau de l’île de Montréal et tracé des creux et des crêtes. Cartographic survey of the island of Montreal's former watercourses showing thalwegs and crest lines [document cartographique], 2016 ; ANOM, 03DFC483B, Chaussegros de Léry, Gaspard-Joseph, Carte d'une partie de l'isle de Monréal depuis la pointe à Cardinal jusques au courant de Ste Marie avec la ville de Montréal, 1733 ; BANQ, G/3452/M65/1890/M35 CAR, H. Malingre, Plan de l’île de Montréal, 1890.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/docannexe/image/16049/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 179k
Titre Figure 3. Part consacrée à la navigation dans le budget prévisionnel de l’expédition contre les Iroquois en 1687.
Crédits Graphique : B. Furst. Sources : Mémoire des choses absolument nécessaires pour l’entreprise de guerre à faire en 1687, ANOM, COL C11A 9/fol.168-173.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/docannexe/image/16049/img-3.jpg
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Pour citer cet article

Référence papier

Benjamin Furst, « Suivre la voie fluviale »Études rurales, 203 | 2019, 62-81.

Référence électronique

Benjamin Furst, « Suivre la voie fluviale »Études rurales [En ligne], 203 | 2019, mis en ligne le 01 janvier 2021, consulté le 12 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesrurales/16049 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/etudesrurales.16049

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Auteur

Benjamin Furst

historien, ingénieur d'études, Centre de recherche sur les économies, les sociétés, les arts et les techniques (Creast), Université de Haute-Alsace, Mulhouse

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Droits d’auteur

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