Architects of the Resurrection
R. M. Douglas, Architects of the Resurrection. Ailtirí na hAiséirghe and the Fascist ‘New Order’ in Ireland, Manchester, Manchester University Press, 2009, 322 p., ISBN : 978-0-7190-7998-6
Texte intégral
1D’une façon générale, quiconque recherchant des informations sur Ailtirí na hAiséirghe devait, jusqu’à présent, se contenter de quelques lignes, au plus quelques paragraphes, expliquant qu’il s’agissait d’une organisation nationaliste d’extrême droite active en Irlande dans les années 40. À partir de l’examen de nombreuses sources primaires (en premier lieu les archives personnelles du fondateur du mouvement disparu en 1991 mais aussi les archives militaires, celles des services secrets irlandais et britanniques ainsi que des entretiens avec des anciens du mouvement) et d’un vaste travail de réflexion sur l’extrême droite dans le monde au xxe siècle, l’historien R. M. Douglas s’est attelé avec brio dans cet ouvrage à combler ce vide apparent laissé par l’historiographie irlandaise sur la période d’entre deux guerres. Si l’ouvrage replace la naissance et le développement de Ailtirí na hAiséirghe dans le contexte historique des années 1930-40 et, point intéressant, ne se limite pas au cas irlandais, le mérite de l’ouvrage vient surtout de sa remise en question de certaines des idées reçues sur l’histoire irlandaise pendant ces décennies. Deux questions principales servent de fil conducteur à l’ouvrage : 1) les Irlandais, dans leur ensemble, acceptaient-ils le régime politique dans lequel ils vivaient ? 2) la neutralité du pays, plutôt de nature bienveillante à l’égard des Alliés, émanait-elle de la volonté populaire ou relevait-elle en grande partie d’une position du gouvernement Fianna Fáil de l’époque ? Autrement dit, la population dans son ensemble était-elle pro-britannique ?
2Composé de 7 chapitres, l’ouvrage peut se diviser de façon arbitraire en deux grands ensembles, le premier remet en perspective les années 30-40 en Irlande en s’intéressant à ce que l’auteur nomme les « influences anti-démocratiques », autrement dit les forces qui cherchaient, à l’époque, à saper les fondements du système politique (chapitres 1 et 2). Si certaines sont plus connues, celle résultant par exemple de la division du mouvement républicain ou alors l’existence du mouvement fasciste des « Chemises Bleues » (Blueshirts) au début des années 30, l’auteur revient sur ce terreau idéologique en montrant aussi que la société irlandaise de l’époque était traversée par des mouvements anti-communistes poussés par la frange catholique, des mouvements exaltant par exemple les vertus du franquisme et recherchant un modèle de société dans le Portugal de Salazar, mais aussi par des positions antisémites marquées. Cette analyse ouvre une seconde partie entièrement consacrée à Ailtirí na hAiséirghe dans laquelle l’auteur étudie, tour à tour, la naissance du mouvement en 1942, la formation idéologique et le rôle de son fondateur né à Belfast et « leader » (à prendre ici au sens totalitaire du terme) Gearóid Ó Cuinnegáin, ainsi que l’idéologie propre qui animait le mouvement, un mouvement moins préoccupé par l’expansion territoriale comme les partis fascistes européens (quoique le nord de l’île devait être récupéré), que par la volonté d’établir un État Aiséirghe en Irlande, un état totalitaire régi par un parti unique dont l’objectif final était de rechristianiser le monde et sauver la civilisation. L’ouvrage retrace pour finir le parcours de ce mouvement en politique et tente d’expliquer les raisons de son déclin au tournant des années 1940-50.
3En conclusion, si l’on peut regretter le flou, sans aucun doute involontaire, entretenu par l’auteur sur le terme approprié pour qualifier Ailtirí na hAiséirghe (mouvement, parti, organisation politique, les trois réunis ?) au fil de l’ouvrage, il s’agit d’une infime chose au regard des réflexions que suscite la lecture de cette passionnante étude sur l’Irlande de l’entre deux guerres et des enseignements que l’on peut en tirer au regard de l’époque contemporaine.
Pour citer cet article
Référence papier
Julien Guillaumond, « Architects of the Resurrection », Études irlandaises, 36-1 | 2011, 199-200.
Référence électronique
Julien Guillaumond, « Architects of the Resurrection », Études irlandaises [En ligne], 36-1 | 2011, mis en ligne le 30 juin 2011, consulté le 03 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesirlandaises/2257 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/etudesirlandaises.2257
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