My Autobiography
Albert Reynolds, My Autobiography, Londres, Transworld Ireland, 2009, 486 p., ISBN 978 1 848270 42 8.
Full text
1En présentant sa démission au Dáil en novembre 1994, Albert Reynolds avait promis que le moment venu, il s’expliquerait et mettrait les choses au clair (set the record straight). Le moment semblait opportun quinze ans plus tard puisque, comme il l’écrit dans le prologue, la paix était installée en Irlande du Nord de manière durable.
2Bien que son récit s’organise autour des deux points précédents, l’on peut diviser cette autobiographie en trois parties, d’une manière fort arbitraire il est vrai tant les liens semblent évidents entre les idées du jeune Reynolds, son parcours professionnel et nombre de ses initiatives politiques à venir (l’on notera avec intérêt, par exemple, que l’une de ses premières activités, l’organisation de bals et de spectacles, lui permit d’établir des liens très étroits des deux côtés de la frontière, tant dans les milieux catholiques que protestants). Dans les deux premières parties, A. Reynolds revient d’abord sur son enfance et son adolescence avant de décrire ensuite, en homme d’affaires accompli, les grandes étapes de sa vie professionnelle. La troisième partie retrace son parcours d’homme politique, de ses débuts au niveau local (il livre, au passage, d’excellentes anecdotes sur le fonctionnement de la vie politique irlandaise) aux différents ministères qu’il a occupés (c’est d’ailleurs quand il est ministre de l’Industrie et du Commerce, puis ministre des Finances vers la fin des années 80, que s’enracinent les fondements du Tigre celtique) jusqu’à sa nomination comme chef de file du Fianna Fáil et Taoiseach en février 1992.
3C’est d’ailleurs au moment où Reynolds relate ses deux ans et demi comme Premier ministre que son ouvrage prend une tout autre dimension puisqu’il fait véritablement découvrir à son lecteur les arcanes du pouvoir irlandais. S’il aborde certaines questions économiques et sociales (distillant, au passage, quelques détails sur l’obtention d’importants crédits européens au titre des fonds structurels et de cohésion en 1992), c’est assurément le récit des démarches et des tractations, en partie secrètes, conduisant à la signature de la Joint Declaration de Downing Street en décembre 1993 puis aux cessez-le-feu de l’I.R.A. provisoire et des paramilitaires loyalistes en août et octobre 1994 qui demeure le plus passionnant. Si ce récit qui occupe plus de la moitié de l’ouvrage parvient, en partie, à éviter le côté subjectif de toute autobiographie, c’est sans doute parce que Reynolds prend un soin tout particulier à ce qu’il soit entrecoupé des témoignages des acteurs-clés de l’époque (B. Clinton parmi d’autres), témoignages qu’il fait habilement dialoguer avec ses propres souvenirs. Au passage, le lecteur sera sans doute étonné d’apprendre l’intensité des liens unissant A. Reynolds et J. Major, l’ancien Premier ministre britannique, mais le plus important reste le récit des nombreux échanges informels (ainsi que les liens privilégiés) par l’intermédiaire de M. Mansergh ou du Père A. Reid entre A. Reynolds et des figures du mouvement républicain (G. Adams, M. McGuinness), sans oublier les contacts tout aussi secrets avec les membres du mouvement loyaliste (G. Spence) et le rôle de médiateur encore joué par des religieux comme le Révérend R. Magee. Si, chemin faisant, Reynolds dénonce l’ego de plusieurs hommes politiques (J. Hume en tête), qu’il ne cache pas ce qu’il pense de B. Ahern, son successeur comme chef de file du Fianna Fáil, et que le caractère partisan de son récit fait surface, parfois au détour de quelques remarques, l’on peut s’interroger sur la façon récurrente avec laquelle il se met en avant en se présentant comme un « preneur de risque » (a risk-taker), seul détenteur de la solution, bataillant contre vents et marées pour montrer la voie. Son parcours d’homme d’affaires joue sans doute pour beaucoup tout comme sa personnalité pour expliquer cette vision des choses, et nul ne saurait lui en tenir rigueur tant cela semble un écueil difficilement évitable lorsque l’on écrit son autobiographie. Par ailleurs, il est incontestable que cet ouvrage obéit aussi à la volonté de Reynolds de donner sa propre version des faits et répondre aux nombreuses attaques qu’il a dû affronter.
4L’ensemble s’accompagne de deux encarts photographiques illustrant les rencontres et les moments politiques importants de Reynolds, d’une reproduction de la Joint Declaration de 1993 et d’un glossaire fort utile pour comprendre les nuances idéologiques que revêtent certains des termes employés. En apportant un éclairage précieux sur les décennies 80 et 90, cette autobiographie comble un vide certain laissé par les ouvrages d’histoire et permet de mieux appréhender nombre des enjeux politiques, économiques et sociaux de l’Irlande à la fin du xxe siècle. L’on ne peut que remercier Albert Reynolds de nous avoir enfin offert sa vision des événements.
References
Bibliographical reference
Julien Guillaumond, “My Autobiography”, Études irlandaises, 35-1 | 2010, 192-194.
Electronic reference
Julien Guillaumond, “My Autobiography”, Études irlandaises [Online], 35-1 | 2010, Online since 30 September 2010, connection on 06 December 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudesirlandaises/1922; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/etudesirlandaises.1922
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