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Mervyn MCLEAN, Weavers of song. Polynesian music and dance

Auckland, Auckland University Press, 1999. X + 543 pages, cartes, transcriptions musicales, nombreuses illustrations (B&W), plusieurs appendices et un CD annoté. Relié
Peter Crowe
Traduction de Ramèche Goharian
p. 330-331
Référence(s) :

Mervyn MCLEAN, Weavers of song. Polynesian music and dance. Auckland, Auckland University Press, 1999. X + 543 pages, cartes, transcriptions musicales, nombreuses illustrations (B&W), plusieurs appendices et un CD annoté. Relié.

Texte intégral

1Puisse ce livre magnifique paraître en poche, à un prix abordable, pour garnir chaque atoll polynésien comme une preuve évidente d’héritages vivants ! On le placerait sur la table après le repas, en ayant eu bien soin de débarrasser les restes de nourriture pour ne pas mélanger le tapu avec le noa, et on le chanterait joyeusement en famille : « Nous sommes trois maintenant, qu’allons-nous chanter ? Va pour un Non nobis Domine ! » Ainsi en est-il pour un manuscrit du début du dix-neuvième siècle, trouvé dans la bibliothèque publique de Bath, au Royaume-Uni.

2McLean pense que l’extraordinaire polyphonie himene à six voix des îles Cook et de Tahiti est une élaboration, dans le style local, d’airs fugués populaires parmi les non-conformistes britanniques de la fin du dix-huitième et du début du dix-neuvième siècles, qui les ont aussi importés en Amérique. Prenons l’exemple de « When Jesus wept » qui est en mode mineur avec un septième degré bémolisé, quasi phrygien. Le chef répète la mélodie avec tout le monde jusqu’à la mettre bien en place, puis il commence à chanter, suivi des autres qui reprennent exactement le même air, comme dans une ronde. Les Britanniques sont rompus à ce genre d’exercice depuis fort longtemps, comme le montre « Sumer is i-cumin in, lude sing cucu… », censé être la première polyphonie européenne, datant d’environ 1245 (voir Manuscrit Reading). Heureusement quelques bourgeois notèrent ces joyeuses chansons alors qu’ils négligeaient les harmonies sauvages, les abandonnant aux champs, aux camps et aux milices. La polyphonie n’a jamais été une affaire d’évolution, il fallait juste en avoir l’intuition, en observant les oiseaux. Lorsque les officiers de Cook mentionnèrent ces chants, on s’empressa, dès l’arrivée de l’Endeavour à Londres, de les supprimer comme quelque chose d’impossible, en fait comme un affront à la « civilisation ».

3Ce que Cook et ses hommes entendirent était une polyphonie indigène ignorant toutes les règles du « Gradus ad Parnassum », étant bien entendu que le terme « ignorer » ne signifie pas ici « mépriser » mais « être inconscient de ». A partir de cette culture de la combinaison des voix, les Polynésiens poussèrent les airs fugués aussi loin que leur voix leur permettait de « hurler » ou de « grommeler », techniquement parlant. D’où l’élaboration d’une splendeur inégalée. La polyphonie complexe fut découverte indépendamment dans les îles Salomon, comme le montrent bien les enregistrements de Hugo Zemp. Quel était donc le problème des historiens de la musique ? Une oreille faussée ?

4Mclean comble ses lecteurs avec ses descriptions par régions, ses comparaisons et ses idées sur la diffusion des chants et des danses. Il étudie les styles de chant, domaine dans lequel la terminologie est approximative, mais il fournit au lecteur certaines idées sur la « nasalité ». Comme la plupart des ethnomusicologues, il est fort pour ce qui est du « qui, quoi, où et quand », mais il se pose ensuite la question du « pourquoi », c’est-à-dire pourquoi la musique devient ce qu’elle est précisément à tel moment, en tel endroit et chez tel peuple.

5Un point fort de cet ouvrage est un CD de 70 minutes, comprenant 43 exemples-clés illustrant le texte et les transcriptions musicales, pas toujours complètes. Les notes sont exactes en euro-musique, les textes ne sont pas toujours traduits parce qu’ils sont souvent intraduisibles.

6En conclusion, cet ouvrage agréable et bien écrit du doyen de l’ethnomusicologie du Pacifique, bon pour tout marae, montre que notre auteur a le sens de la métaphore et l’intuition de ce que chanter signifie, surtout chanter autrement. On pourrait pour cela interroger les rongorongo. De plus, tous les lecteurs peuvent savourer les belles illustrations même s’ils ne connaissent pas assez de solfège pour transformer la musique imprimée en sonorités vibrantes. Cela nous ramène au « pourquoi ».

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Pour citer cet article

Référence papier

Peter Crowe, « Mervyn MCLEAN, Weavers of song. Polynesian music and dance »Cahiers d’ethnomusicologie, 14 | 2001, 330-331.

Référence électronique

Peter Crowe, « Mervyn MCLEAN, Weavers of song. Polynesian music and dance »Cahiers d’ethnomusicologie [En ligne], 14 | 2001, mis en ligne le 10 janvier 2012, consulté le 03 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ethnomusicologie/209

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Auteur

Peter Crowe

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Droits d’auteur

CC-BY-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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