Tambours du Maroc/Drums of Morocco. Aadat. Dqa Marrakchya, Heddawa Aissawa, Haouariyat.
Tambours du Maroc/Drums of Morocco. Aadat. Dqa Marrakchya, Heddawa Aissawa, Haouariyat. Enregistrements, textes, illustrations et photo d’Antonio Baldassare. Notice en français et anglais. 1 CD Al Sur ALCD 121/M7 853.
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- 1 Pour éviter toute confusion, les termes vernaculaires sont ici reproduits selon la notation de l’au (...)
1Ce disque comprend neuf pièces caractéristiques de la musique populaire urbaine marocaine, regroupées en fonction de leur appartenance aux répertoires de quatre « confréries » : les Dqa1 et les Haouariyat, ainsi que les Aïssawa et les Heddawa, spécifiquement religieuses. L’utilisation qui est faite du terme de « confrérie » pour Dqa et pour Haouariyat est ici particulière : Dqa s’appliquant normalement à la forme musicale jouée et Haouariyat renvoyant à la tribu des Haouara.
2De cette musique, ce disque offre quelques beaux exemples, très saisissants par leur vitalité. Les deux premières pièces, intitulées Hafouz et Touichya, appartenant au Dqa Marrakchya (Dqa de Marrakech), sont caractérisées par l’emploi d’un tambour-sur-cadre tara, de castagnettes en métal qraqèb et de tambours en forme de gobelet dont les petits sont nommés tarija et les plus gros derbouka. Les deux pièces, chantées respectivement par un double chœur alterné et par un soliste et un chœur, sont constituées de deux parties dont la dernière est chantée recto tono sur différents degrés selon un développement ascendant. Dans la première pièce une trompe n’ffar superpose sa note unique aux voix. La deuxième pièce se distingue par l’intervention de formules rythmiques battues avec les mains, comme c’est souvent le cas dans les musiques du monde arabe.
3Les trois pièces des Heddawa, chantées en alternance par deux hommes (ou par un soliste et deux hommes ?) sont caractérisées par l’emploi de tambours en forme de gobelet gwal assez semblables à la derbouka mais munis d’un timbre, et du gros tambour à deux peaux t’bila, frappé avec deux baguettes. Avec son rythme majestueux et ses voix profondes, la pièce 4 est particulièrement attachante même si, dans la deuxième partie rapide, on peut regretter que l’enregistrement ne donne pas assez de présence aux voix.
4Les deux pièces suivantes, intitulées Dhikr et Ḥadra (et non pas Hadra qui signifie « amusement »), représentent les Aïssawa. La première est chantée en alternance par deux hommes, vraisemblablement les mêmes que dans les pièces des Heddawa, à en juger par leurs voix. Les tambours sont les tara et le t’bila ainsi que le bendir, autre type de tambour-sur-cadre. La ḥadra, pièce la plus longue du disque, soit 13’05’’, dont la deuxième moitié est exécutée par le hautbois rheta avec les tambours, n’est cependant pas très convaincante et reflète assez mal l’idée suggérée dans la notice d’une musique propice au déclenchement de la transe.
5Les deux dernières pièces appartiennent aux Houariyat et sont les seules pièces exécutées par des femmes. Celles-ci s’accompagnent aux tambours tarija, tara et derbouka et à la cloche naqqous. Ici non plus, le choix musical ne paraît pas heureux et l’enregistrement ne permet pas bien d’apprécier les voix.
6Si, en dépit de ces quelques faiblesses, les enregistrements sont de qualité, la notice est en revanche assez inconsistante et comporte un certain nombre d’erreurs. Tout d’abord le titre du disque, Tambours du Maroc. Aadat, a de quoi dérouter puisqu’il ne s’agit ni de musique de tambours exclusivement, ni de aadat, « habitude », « coutume » (voir la notice p. 3) qui s’applique plutôt à ce qui est rituel. Or ici, plusieurs pièces retenues relèvent surtout du divertissement (les deux pièces Haouariyat et la deuxième pièce de Dqa).
7Les instruments de musique font l’objet de schémas fort utiles illustrant les différents types, mais les légendes laissent malheureusement de côté les termes vernaculaires qu’on trouve surtout dans les notes relatives aux différentes pièces.
8On pourrait s’attendre aussi dans la notice à des commentaires plus proches des enregistrements, voire à des transcriptions représentant les différents rythmes. Or, seule la deuxième pièce est accompagnée d’une transcription du rythme sur quatre portées superposées, chacune divisée en deux en fonction des techniques de jeu. S’il est tout à fait intéressant pour la connaissance de ces musiques de disposer de telles partitions, la transcription proposée ici, avec ses alternances entre doubles croches et doubles croches pointées, ponctuées de successions de quarts de soupirs, de huitièmes de soupirs, voire de quarts et de huitièmes de soupirs pointés, aurait gagné à être simplifiée : comment évaluer la différence entre les durées de frappes de différents instruments quand celle-ci se réduit à un huitième de soupir ?
- 2 J’adresse mes remerciements à mon collègue Lahsen Hira à l’Université Hassan II de Mohammedia au Ma (...)
9En ce qui concerne les textes chantés2, l’auteur a choisi une formule curieuse qui consiste à donner le texte soit en arabe, soit dans sa traduction française, mais jamais les deux à la fois.
10Le texte intitulé Bismillah et donné en français est censé être celui de la pièce 4, alors que ce texte, composé de douze lignes, appartient à trois pièces différentes (les six premières lignes à la pièce 4, les trois suivantes à la pièce 5, les trois dernières à la pièce 6). La même confusion règne pour les pièces 8 et 9 dont les textes ont été mal découpés.
11Nombre de détails typographiques ou orthographiques attestent d’un certain manque de rigueur. Mais plus grave est le manque total d’informations sur les dates et les lieux d’enregistrements. A en juger par l’absence d’atmosphère de fond et de commentaires d’ordre contextuel, il s’agit vraisemblablement d’enregistrements effectués hors situation, voire en concert. On ne peut que regretter qu’une musique d’une telle valeur ait été publiée de façon aussi expéditive.
Notes
1 Pour éviter toute confusion, les termes vernaculaires sont ici reproduits selon la notation de l’auteur.
2 J’adresse mes remerciements à mon collègue Lahsen Hira à l’Université Hassan II de Mohammedia au Maroc, qui a bien voulu m’aider à résoudre les problèmes relatifs aux textes chantés en arabe.
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Bibliographical reference
Miriam Rovsing Olsen, “Tambours du Maroc/Drums of Morocco. Aadat. Dqa Marrakchya, Heddawa Aissawa, Haouariyat.”, Cahiers d’ethnomusicologie, 8 | 1995, 250-252.
Electronic reference
Miriam Rovsing Olsen, “Tambours du Maroc/Drums of Morocco. Aadat. Dqa Marrakchya, Heddawa Aissawa, Haouariyat.”, Cahiers d’ethnomusicologie [Online], 8 | 1995, Online since 04 January 2012, connection on 16 September 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ethnomusicologie/1244
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