Anthologie de la musique congolaise (RDC)
Anthologie de la musique congolaise (RDC)
Vol. 1. Musique des Lunda du Katanga. Enregistrements: Jos Gansemans, 1972. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 401.
Vol. 2. Songs of the Okapi Forest. Mbuti, Nande and Pakombe. Enregistrements: John Hart et Erik Lindquist, 1973-2004. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 402 (titre en anglais).
Vol. 3. Musiques du pays des Mangbetu. (Asua, Beyru, Mangbele, Mangbetu). Enregistrements: Didier Demolin, 1984-1990. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 403.
Vol. 4. Musique des Salampasu. Enregistrements: Jos Gansemans, 1973. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 404.
Vol. 5. Musique des Tshokwe du Bandundu. Enregistrements: René Ménard et Benoît Quersin, 1981. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 405.
Vol. 6. Musique des Kwese. Enregistrements: René Ménard, 1984-1985. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 406.
Vol. 7. Musique des Kongo-Mbata. Enregistrements: Benoît Quersin et Ludiongo, 1974. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 407.
Vol. 8. Musique des Tetela. Enregistrements: Benoît Quersin et Esole Eka Likote, 1975. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 408.
Vol. 9. Musique des Leele. Enregistrements: René Ménard, 1985. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 409.
Vol. 10. Musique de l’Ubangui. (Banda-Mono, Ngbaka-Minagende, Ngbaha-Ma’bo, Ngbandi). Enregistrements: Benoît Quersin et Esole Eka Likote, 1975. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 410.
Vol. 11. Musique des Nkundo. Enregistrements: Benoît Quersin, 1971-1972. CD Fonti Musicali/Musée royal de l’Afrique centrale fmd 411.
Texte intégral
- 1 Zaïre. Musique des Salampasu. Ocora/BRT 558 597.
- 2 Polyphonies Mongo. Ocora OCR 53 (réédité en CD: Ocora C 580050) et Musiques de l’ancien royaume Ku (...)
- 3 Petites musiques du Zaïre. Buda records 1973792.
- 4 Archives 1910-1960. MRAC. Fonti Musicali fmd 220; Zaïre: Ekonda. Bobongo-Sortie de la walé. Collec (...)
1Le label belge Fonti Musicali, en association avec le Musée royal de l’Afrique centrale, a commencé la publication d’une anthologie de la musique congolaise, dirigée par Jos Gansemans, qui comprend actuellement onze volumes. Chacun d’entre eux est consacré à une population ou à une région. Les enregistrements ont tous été effectués dans les limites des frontières politiques de la RDC, même lorsqu’une population vit dans plusieurs pays, comme c’est le cas par exemple pour les Lunda, qui vivent également en Angola et en Zambie (ce qu’indique d’ailleurs le texte du livret). Le MRAC avait déjà édité une série de vinyls sur le même sujet, mais si j’en juge par ceux qui sont en ma possession il n’y a pas de doublon, pas plus qu’avec les disques édités chez OCORA par Jos Gansemans1 et Benoit Quersin2. Seules quelques plages avaient déjà été publiées par Kongo Zabana3. Signalons également que Fonti Musicali avait déjà publié plusieurs CD sur les musiques de la RDC4.
2Le premier CD, consacré aux Lunda du Katanga, comporte notamment des pièces instrumentales pour lamellophones accompagnés de tambours et de bâtons de rythme, arc en bouche ou à résonateur externe, ensembles de flûtes de Pan à l’accord hexatonique, tambour à friction ou tambours à fente. Mise à part une berceuse, les pièces vocales ont été enregistrées lors de rituels ou de cérémonies de cour.
- 5 Voir, par exemple, le CD « Survivance». Franklin Boukaka, ses sanzas et son orchestre congolais. B (...)
3Le CD de la région de l’Okapi nous permet de mieux comprendre les rapports entre les groupes pygmées, ici les Mbuti, et les Bantous sédentaires. S’ils sont surtout renommés, à juste titre, pour leur art de la polyphonie vocale, les Pygmées empruntent également des instruments, lamellophones ou trompes, aux peuples qui vivent à l’orée de la forêt, jouant également d’instruments éphémères comme ces flûtes constituées par une tige d’herbe. Les Pakombe ont de leur côté été influencés par la musique des Mbuti et, au cours des cérémonies, ce sont souvent ces derniers qui jouent les tambours. Les Nande ont un rapport beaucoup plus distant avec les Mbuti. Arrivés récemment, ils font du commerce avec eux et les influences musicales ne sont pas évidentes. Un chanteur s’accompagne ici d’une guitare sans frettes « faite à la maison», qui permet de bien comprendre la relation avec le jeu d’instruments traditionnels comme les lamellophones5, ce que l’on retrouve dans les musiques urbaines, soukouss et rumba congolaise.
- 6 Daniel de Coppet et Hugo Zemp: ‘Aré’aré, un peuple mélanésien et sa musique (avec un LP 17). Paris (...)
4Les Mangbetu, présentés dans le volume 3, ont gardé leurs musiques de cour où les ostinati vocaux sont soutenus par des tambours, à fente ou à membrane, des hochets, une cloche double et une trompe. Ils ont également été influencés par leurs voisins pygmées, les Asua, et leurs polyphonies exécutées par des ensembles de trompes sont souvent une réplique des polyphonies vocales asua. Ils jouent également d’une cithare-en-terre, alors que leurs voisins, les Beyru, accompagnent leur chant d’un lamellophone. Les femmes et les jeunes filles pratiquent des jeux rythmiques en frappant l’eau des rivières avec leurs mains creusées en forme de cuillers, ce qui évoque étonnamment les enregistrements exécutés à l’autre bout du monde par Hugo Zemp chez les ‘Aré’aré6.
5Dans le volume 4, les Salampasu jouent une musique où xylophones et tambours à membrane sont prédominants, ainsi que les lamellophones. Ainsi, dans la « danse des flûtes de Pan», celles-ci ne sont pratiquement pas jouées par les danseurs (qui peuvent être une centaine), qui se contentent de les tenir dans leur main, l’orchestre étant constitué de lamellophones et de percussions. La plupart des pièces présentées sont des musiques de danse, jouées en diverses occasions: divertissement, rituels d’initiation ou d’intronisation d’un chef, funérailles…
- 7 Ouganda. Musique des Acholi. Chants de sagesse et d’exode. Inédit W 260130.
6Les Tshokwe du volume 5, qui vivent également au nord-ouest de l’Angola et en Zambie, pratiquent des musiques essentiellement vocales, accompagnées par des tambours à membrane, un racleur, une bouteille percutée ou un rhombe. Ils utilisent également des guitares fabriquées localement, aussi bien pour accompagner les danses traditionnelles que pour des expressions plus « hybrides», comme ce chant inspiré par l’œuvre de Papa Wendo, un des plus célèbres interprètes de rumba congolaise des années 1950. Il s’agit surtout de musiques collectives, souvent destinées à la danse, exécutées la plupart du temps lors des rituels comme le mukhanda, lié à la circoncision, sur lequel on aurait aimé en savoir davantage. Il est d’ailleurs un peu regrettable que le texte, pour l’ensemble de la collection, ne soit pas plus précis. Même s’il est en trois langues, anglais, flamand et français, et que cela prend de la place, il est toujours possible d’ajouter un fichier pdf, comme par exemple pour le CD Inédit consacré à la musique des Acholi7.
7Présentés dans le volume 6, les Kwese se considèrent comme les « petits-enfants» des Lunda et les « frères» des Pende et des Soonde. Ils s’en distinguent cependant, ne serait-ce que par la pratique du tambour à friction qui est ici quasiment réservé aux femmes et qui évoque la voix du léopard, symbole de celle du chef. Les instruments sont moins nombreux que ceux des peuples voisins. Il s’agit essentiellement d’un arc à résonateur externe, de « sifflets» (ce qui ne veut pas dire grand-chose au niveau organologique: ce sont des flûtes à embouchure terminale dont l’extrémité distale est bouchée, qui n’ont rien à voir avec un « sifflet» européen qui est une flûte à conduit) en bois ou en corne d’antilope et d’une trompe en ivoire. Ils jouent également d’un xylophone à dix-sept touches et d’un tambour à fente. Les polyphonies vocales accompagnent les anciennes danses rituelles devenues danses de divertissement, alors que le répertoire vocal en solo est particulièrement riche, complaintes ou chants satiriques.
8Chez les Kongo-Mbata, auxquels est consacré le volume 7, on peut entendre des ensembles de cinq trompes jouées en hoquet, accompagnées par deux tambours à membrane, ainsi que des ensembles de sept tambours à fente à tête anthropomorphe utilisés dans les rituels des sociétés secrètes. La cloche double à battant externe est liée au pouvoir du chef. Il existe apparemment bien d’autres instruments qui ne sont pas présents dans ce CD. Les chants rituels sont également restés très présents, pouvant regrouper vingt-six personnes au cours du rituel propitiatoire nkita.
9Les Tetela du volume 8 sont des maîtres du tambour à fente lokombe dont les diverses hauteurs correspondent aux tons de la langue parlée, si bien qu’outre leur fonction proprement musicale ils servaient à transmettre des messages, comme dans bien d’autres régions d’Afrique centrale. Les autres idiophones sont des hochets, des cloches, simples ou doubles, ainsi qu’un lamellophone. Ils jouent également d’un « sifflet» et d’une trompe traversière. Le seul cordophone semble être la guitare, fabriquée sur place et utilisée dans des pièces de musique « néo-traditionnelle» dont deux exemples sont donnés ici, l’un d’eux étant un chant déplorant l’assassinat de Clément Ngambo, chef de la Jeunesse lumumbiste. Les musiques vocales sont souvent des chants à répons exécutés pour le divertissement, mais aussi pour la louange des chefs ou dans un but curatif.
10Le volume 9 présente les Leele, qui avaient la particularité de pratiquer la polyandrie. Les pluriarcs ne sont hélas présents qu’en photo, de même que les divers aérophones, sifflets, rhombes ou ocarinas. On peut cependant entendre une riche variété de membranophones ainsi qu’une trompe et un lamellophone aux lames végétales. Ce sont encore une fois les musiques vocales collectives qui sont à l’honneur pour accompagner danses de réjouissance, rituels ou accueil du roi.
11Plusieurs peuples de l’Oubangui sont présents dans le volume 10. Les Banda-Mono jouent d’un lamellophone dont les onze touches sont faites de rayons de bicyclette martelés. Le musicien est présenté comme un soliste exceptionnel, mais nous ne saurons pas son nom… Des chœurs polyphoniques d’une vingtaine d’hommes interviennent au cours de cérémonies de circoncision ou de chants de guerre, accompagnés par des tambours à membrane. On retrouve des chants de circoncision chez les Ngbaka-minagende, interprétés par un ensemble de trompes et un tambour à peau clouée, alors que les Ngbaka-ma’bo ont emprunté l’arc en bouche à leurs voisins, les pygmées Aka. On peut également entendre une harpe arquée à sept cordes, ce qui nous prouve une fois de plus que les musiques des villages africains ne sont pas statiques puisque l’instrument comporte généralement cinq cordes et qu’il s’agit ici d’une innovation personnelle du musicien. On peut entendre également des chœurs mixtes qui accompagnent un soliste dans un chant de deuil ou un autre destiné à contrecarrer l’influence des sorciers.
12Chez les Nkundo du volume 11, qui font partie du groupe Mongo, le pluriarc est à l’honneur, accompagnant le chant individuel au cours des grandes fêtes. Une calebasse dans laquelle on souffle l’accompagne de sa sonorité grave et ténue. Les chœurs féminins polyphoniques accompagnent le rituel du bobongo ou celui de la sortie de la walé, la femme qui sort d’une longue réclusion après la naissance de son premier enfant (ce qui n’est d’ailleurs pas expliqué dans le livret), auquel le CD fmd 301 est consacré. Tambours à fente et trompes sont également présents, accompagnant par exemple un chant pour les courses de pirogues.
13Cette série, très riche musicalement, devrait être suivie d’autres volumes. Regrettons simplement encore une fois que les textes d’accompagnement ne nous permettent pas d’en savoir plus sur ces musiques remarquables.
Notes
1 Zaïre. Musique des Salampasu. Ocora/BRT 558 597.
2 Polyphonies Mongo. Ocora OCR 53 (réédité en CD: Ocora C 580050) et Musiques de l’ancien royaume Kuba. Ocora OCR 61.
3 Petites musiques du Zaïre. Buda records 1973792.
4 Archives 1910-1960. MRAC. Fonti Musicali fmd 220; Zaïre: Ekonda. Bobongo-Sortie de la walé. Collection de la sonothèque de l’Institut des musées nationaux au Zaïre. vol. 1 & 2. Fonti Musicali fmd 300-301; Elanga Nkake. Losokya. Collection de la sonothèque de l’Institut des musées nationaux au Zaïre. vol. 3. Fonti Musicali fmd 302; Kiti na mesa. Zaïre: Musique mongo. Fonti Musicali fmd 197; Zaïre: Luba. Shankadi du Shaba. Tombe Ditumba. Fonti Musicali fmd 204; Chants de l’orée de la forêt. Polyphonies des Pygmées Éfé. Fonti Musicali fmd 185; Pygmées. Musée Dapper/Fonti Musicali fmd 190 (Asua, Éfé, Kango); Mangbetu. Zaïre: Haut-Uélé. Fonti Musicali fmd 193.
5 Voir, par exemple, le CD « Survivance». Franklin Boukaka, ses sanzas et son orchestre congolais. Bolibana collection BIP 333. Il s’agit d’un exemple enregistré par un artiste de la République du Congo; mais, comme dans bien d’autres régions du continent africain, les frontières culturelles et celles établies par le colonialisme sont loin de toujours coïncider. Voir également un enregistrement plus récent d’un artiste de la RDC: Wendo Kolosoy et le Victoria Bakolo Miziki. « Amba». 1 CD Marabi 46801-2.
6 Daniel de Coppet et Hugo Zemp: ‘Aré’aré, un peuple mélanésien et sa musique (avec un LP 17). Paris: Éditions du Seuil, 1978.
7 Ouganda. Musique des Acholi. Chants de sagesse et d’exode. Inédit W 260130.
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Référence papier
Henri Lecomte, « Anthologie de la musique congolaise (RDC) », Cahiers d’ethnomusicologie, 22 | 2009, 295-299.
Référence électronique
Henri Lecomte, « Anthologie de la musique congolaise (RDC) », Cahiers d’ethnomusicologie [En ligne], 22 | 2009, mis en ligne le 18 janvier 2012, consulté le 13 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ethnomusicologie/1011
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