Skip to navigation – Site map

HomeNumérosvol. 24, n° 1Dossier principalComment faire lorsqu’il est déjà ...

Dossier principal

Comment faire lorsqu’il est déjà trop tard ? Une perspective tragique des crises modernes

Mary-Liéta Clément and Christophe Roux-Dufort

Abstracts

Based on an in-depth study of the literature on Greek tragedy and organizational crises, the article explores the tragic dimension of crises. It describes the strategies deployed in the face of events that overwhelm leaders and their ability to manage and control. The use of this tragic lens allows us to make two contributions: first we put forward a definition of a tragic crisis, second we elaborate a model of a crisis development from which we derive recommendations for improving the management of pandemics and crises that meet the conditions of the tragic. Throughout the article, we illustrate our developments with the case of the management of the pandemic by the Quebec government.

Top of page

Full text

1De nombreux modèles et outils de gestion de crise fournissent aux décideurs et aux gouvernements des moyens efficaces pour prévenir, gérer et apprendre des catastrophes majeures (Williams et al. 2017 ; Waller, Lei et Pratten, 2014). Cependant, des évènements impensables tels que les attaques terroristes (09/11, attentats de la mosquée de Québec, etc.), les récents épisodes climatiques majeurs (canicule extrême de 2021 dans l’Ouest canadien par exemple) ou encore la pandémie de COVID-19 ont souligné leurs limites (Dror, 2001 ; Clément et Roux-Dufort, 2020).

2L’épreuve des faits a donc incité les chercheurs à relativiser l’idée selon laquelle il était possible d’anticiper et de contrôler les crises ; ces derniers expliquent qu’elles demeurent des phénomènes incompressibles auxquels les gestionnaires devront irrémédiablement faire face (Boin et Cornnell, 2007 ; Lew et al., 2020). La vague de travaux récents sur la résilience organisationnelle démontre cette préoccupation pour équiper les organisations à soutenir le choc des crises que l’on ne peut anticiper (Richter et Wilson, 2020 ; Burnard et al., 2018). Dans le présent article nous étayons cette veine de réflexion en partant du postulat selon lequel accepter l’idée que les crises sont de plus en plus inévitables et incompressibles, c’est leur donner une nature profondément tragique au sens de la tragédie grecque classique, un genre théâtral qui expose des personnages à des forces échappant à leur contrôle et à des dilemmes contradictoires ne pouvant être résolus que par des décisions déchirantes, porteuses de désespoir et de terreur (Romilly, 2014 ; Judet de la Combe, 2012). À cet effet, nous utilisons donc la tragédie grecque comme une métaphore pour analyser les enjeux éthiques et organisationnels de la gestion de crise.

3Une métaphore est une figure de style dans laquelle un terme ayant un sens littéral est rapproché d’un contexte différent afin de suggérer une ressemblance (Sackmann, 1989). Elle produit une réponse sensorielle permettant de capter des thèmes subtils que le langage délaisse et en fait ressortir d’autres, moins évidents (Bolman et Deal, 2003 ; Taber, 2008 ; Morgan, 1986). La métaphore permet de faire un diagnostic d’une situation, au sens ancien du mot grec, c’est-à-dire de discerner son caractère et de la déchiffrer (Morgan,1986 ; Cirka et Corrigall, 2010). Utilisée dans la littérature en gestion, elle permet de mettre en lumière différentes facettes de l’organisation, de traiter des questions trop complexes, ouvre un regard différent sur la réalité et, par conséquent, favorise la construction théorique (Weick, 1998 ; Bolman et Deal, 2003). À titre d’exemple, Kathleen Eisenhardt (1997), souligne les facettes irrationnelles de la stratégie organisationnelle à travers la métaphore du jazz. Bruce Henderson (1989) met en lumière les cycles de vie de l’organisation et le concept de « survie du plus fort » en utilisant la métaphore de la biologie évolutive. Cette métaphore lui permet de repenser le paradigme de l’organisation et, par conséquent, de donner une nouvelle façon de voir ces cycles.

4En gestion, les théoriciens tentent souvent de surmonter la complexité des crises en posant l’hypothèse qu’elles sont des évènements que l’on doit comprendre en fonction de leurs causes et de leurs conséquences, mais cette idée empêche une analyse réaliste et complète (Williams et al., 2017 ; Bundy et al., 2017). C’est pourquoi dans cet article nous utilisons la métaphore comme un moyen d’embrasser cette complexité, comme certains auteurs l’on fait. En effet, Sharma (2002) utilise la métaphore des « structures dissipatives » pour comprendre le fonctionnement des organisations dans un environnement chaotique. Stephen Brown (2003), à travers le mythe de Crésus et du Roi Midas décrit la crise de représentation que vit le marketing, ou encore Monika Müller (2021) qui met en valeur l’aspect cyclique des crises managériales à travers le mythe de Sysiphe de Camus. Bien que les mythes antiques soient souvent mobilisés, à notre connaissance la métaphore de la tragédie grecque n’a jamais été mise en avant pour étudier les crises et nous pensons qu’elle pourrait ouvrir de nouvelles voies. En effet, le mot crise est souvent raccordé à celui de la tragédie en référence à la catastrophe, puisque les tragédies se terminent mal la plupart du temps (Judet de la combe, 2012). Il existerait donc un lien étroit entre les deux. La tragédie décrit à travers l’intrigue et le dénouement, une situation difficile mettant à l’épreuve des personnages au destin surdéterminé qui essayant de le fuir, l’accomplissent. Également, dans la tragédie, les héros réalisent l’ampleur de leurs actes lorsque la crise a livré son dernier verdict (Judet de la combe, 2012). Dans cette perspective, ce genre théâtral nous permet aussi de voir qu’en situation de crise les comportements et les stratégies des décideurs ne sont pas uniquement fondés sur une gestion rationnelle des évènements et guidés par des plans ou des outils (Clément et Roux-Dufort, 2020 ; Miner et al., 2001 ; Weick, 1998 ; Parnell et Crandall, 2020). Ils sont également construits sur des interprétations alternatives et plus désirables de la réalité, mais aussi sur des intuitions destinées à maintenir l’espoir parmi les membres des équipes de crise et la population générale. La tragédie grecque nous aide enfin à découvrir comment ces décisions peuvent aggraver la crise et conduire les décideurs à mesurer parfois trop tard l’ampleur de leurs échecs. Ce point de vue novateur nous permettra de mieux saisir le phénomène et de mener une réflexion sur les aspects tragiques de la gestion gouvernementale de la pandémie de COVID-19 ainsi que sur ses enjeux éthiques.

La tragédie et le tragique

5Née en Grèce à Athènes, la tragédie grecque est un genre théâtral qui se traduit fondamentalement par la mise en scène d’un personnage noble luttant contre un scénario surdéterminé dont il connait déjà l’issue (Romilly, 2014). Dans l’espoir d’y faire face, il prend des décisions déchirantes lui faisant commettre des erreurs fatales, alors qu’il pense bien faire (Szondi, 2003). Ce genre théâtral nous offre ainsi une perspective riche pour saisir la nature des crises parce qu’il rend compte, d’une part, de leur nature incompressible et, d’autre part, des stratégies déployées pour faire face à l’inéluctable nécessité des évènements (Comte-Sponville, 2018). Il ouvre donc une réflexion originale sur le comportement et les décisions d’un gestionnaire en situation de crise et, ce faisant, offre la possibilité de mieux situer la nature tragique des crises. Notre analyse des travaux des philosophes et plus particulièrement de Clément Rosset (2014), ainsi que des littéraires sur la tragédie (Romilly, 2014 ; Judet de la Combe, 2012 ; Steiner, 1993 ; Szondi, 2003), nous a ainsi conduits à établir cinq dimensions permettant d’en rendre compte.

Les dimensions du tragique

6Notre revue de la littérature sur la tragédie débouche sur cinq dimensions principales qui font le tragique. Nous les présentons en détail dans cette section.

La nature du scénario tragique

7La première dimension touche à la particularité de la trajectoire tragique qui met en scène l’irruption d’un scénario brutal, qui provoque le renversement du cours normal de la vie du héros sans qu’il ne puisse rien changer à sa trajectoire (Romilly, 2009). Cet évènement signe un point de non-retour qui renverse l’équilibre de vie préalablement établi par le héros (Fabre, Gruson et Leclerc-Olive, 2007). Dans le mythe d’Œdipe, l’oracle annonce d’emblée ce scénario inéluctable auquel Œdipe sera soumis. Il tuera son père et épousera sa mère. Il s’agit du bouleversement complet et d’un changement radical de trajectoire selon une destinée annoncée d’avance et qui, quoiqu’il arrive, se déroulera comme le prédit l’oracle. Le tragique trouve ainsi sa source dans la nature inéluctable, insurmontable et irrémédiable du scénario annoncé qui laisse d’emblée le héros dans une situation d’impuissance à renverser le cours des évènements contre laquelle rien ne semble pouvoir être opposé.

Le double de la réalité

8Dans le mythe d’Œdipe, l’annonce faite par l’oracle est cependant incomplète et imprécise. En ce sens, l’ambigüité des informations données au héros rend impossible l’anticipation de la façon dont il chutera (Judet de la Combe, 2012 ; Steiner, 1993 ; Romilly, 1998). Le héros est donc placé devant la seule alternative possible – et pourtant paradoxale – de chercher par tous les moyens à détourner la trajectoire des évènements pour faire mentir les oracles. Pour ce faire, il va construire une seconde réalité, qui lui permettra de maintenir l’espoir qu’il pourra faire mentir la prédiction et de dévier le scénario de son implacable déroulement. Clément Rosset (1993) assimile cette seconde représentation du réel à un double de la réalité. Une sorte de réalité dupliquée construite par le héros à partir de laquelle il lui semble qu’il va pouvoir reprendre la main sur la prophétie. Ce double de la réalité est plus acceptable que le scénario des oracles et permet au héros de se détacher du réel et de fuir ainsi ce déterminisme tragique. C’est pourquoi Œdipe décide de quitter Corinthe pour Thèbes en pensant qu’il s’écartera de cet inacceptable destin et se convainc ainsi qu’il vient d’y échapper (Rosset, 1993).

Des décisions déchirantes et sacrificielles

9Comme souligné précédemment, dans le mythe d’Œdipe, le jeune héros horrifié par l’annonce de l’oracle refuse de se rendre à l’évidence et tente de déjouer la prophétie en prenant la décision de partir à Thèbes pour sauver ses parents. Cette décision est en réalité un sacrifice puisqu’elle l’oblige à renoncer définitivement à sa vie royale. Cet aspect révèle la nature intimement sacrificielle des décisions prises par le héros tragique qui offre comme ultime garantie que seul un prix élevé permettra de déjouer la prophétie des oracles. Cette troisième dimension révèle la nature et les conséquences des décisions du héros pour échapper au scénario. Elles sont par nature déchirantes et sacrificielles et sont vécues comme sont les seules options possibles pour sortir de la trajectoire des évènements en marche.

La nature autoréalisatrice des décisions

10La quatrième dimension du tragique tient à la nature autoréalisatrice des choix du héros. C’est en cherchant à modifier la trajectoire du scénario annoncé qu’il crée lui-même les conditions de l’accomplissement de la prophétie (Romilly, 2014 ; Judet de la Combe, 2012). Tel est le cas dans la décision d’Œdipe de partir pour Corinthe. Elle lui donne le sentiment d’avoir la liberté de pouvoir agir sur la décision de l’oracle. Toutefois, celle-ci est illusoire, car on apprend bien vite qu’en réalité, elle n’est qu’un pas de plus dans l’engrenage de la tragédie. Autrement dit, les décisions que le héros prend en pensant échapper à son destin sont en réalité à revers de ce qu’il vise et le pousse au contraire vers le scénario annoncé (Szondi, 2003).

Une double temporalité

11Rosset (2014) explique qu’il existe deux temporalités distinctes dans la tragédie. D’une part, le temps mouvant, c’est-à-dire le temps chronologique tel que nous le concevons, minute par minute. D’autre part, le temps tragique, c’est-à-dire un temps arrêté, voire intemporel, qui est une interprétation a posteriori et schématique de l’évènement. Pour Rosset (2014), la compréhension du temps tragique d’un évènement ne se fait qu’après coup, c’est-à-dire une fois que l’évènement est terminé, autrement dit une fois que l’horreur nous transperce et nous cristallise. Tant que le temps se déroule, le héros peut encore se dire qu’il est libre d’échapper au destin annoncé par l’oracle. Cependant, le tragique commence lorsque tout est en place et que l’évènement ne peut qu’arriver. Pour revenir à l’exemple d’Œdipe, ce n’est qu’après avoir tué son père et épousé sa mère que le héros réalise que l’annonce de l’oracle vient d’être exaucée. La cinquième composante du tragique tient donc à cette idée que la nature tragique d’un évènement ne se révèle qu’à la fin, lorsque tout est achevé et qu’il est déjà trop tard. Cette révélation naît de la collision de deux temporalités. Celle d’un temps mouvant, chronologique auquel on pense toujours pouvoir échapper, puis celle d’un temps tragique qui dévoile rétrospectivement au héros son ignorance et la nature insurmontable et irrémédiable des évènements.

Le tragique dans la crise

12Dans cette section, nous utilisons les cinq dimensions présentées ci-dessus comme lentille analytique pour discuter de la nature tragique des crises. Pour ce faire, nous les soumettons aux travaux réalisés dans cette discipline et en tirons des propositions de recherche, autant du point de vue des scénarios de crise que des stratégies mises en place par les gestionnaires ou les gouvernements pour les gérer. Ces propositions sont illustrées avec l’exemple de la gestion de la pandémie par le gouvernement du Québec afin de souligner les difficultés et les stratégies mobilisées pour y faire face.

La confiscation des options

13Au même titre que la tragédie met en scène un scénario qui échappe au contrôle du héros sous l’effet d’une rupture soudaine, les auteurs en gestion de crise sont assez consensuels sur l’idée qu’une crise est un évènement soudain et inattendu venant perturber le système de référence en place et le cours normal du rythme des affaires (Pearson et Clair, 1998). La majorité des chercheurs la décrivent d’ailleurs comme une rupture et la notion d’évènement déclencheur atteste de cette idée d’un point de non-retour qui précipite la situation dans une dynamique qui va échapper aux gestionnaires (Roux-Dufort, 2009). La tragédie ajoute cependant des ingrédients que les travaux en gestion de crise considèrent comme contournables. Alors que la gestion de crise suppose que les gestionnaires disposent de moyens pour détourner la marche des évènements aussi bien en anticipant certains bouleversements en amont qu’en organisant une réponse planifiée pendant les évènements pour réduire les conséquences et ainsi accélérer un retour à la normale (Williams et al., 2017 ; Roux-Dufort, 2000 ; Mitroff, 2002 ; Bundy et al., 2017), la vision tragique se fonde quant à elle sur la nature inéluctable, insurmontable et irrémédiable des évènements et scelle en quelque sorte l’impuissance des gestionnaires à en changer le cours en leur confisquant toute alternative de contournement (Rosset, 2014 ; Romilly, 2009). C’est à partir de ce point de non-retour que la nature tragique d’une crise se révèle aux yeux des acteurs et en particulier des gestionnaires. La crise de la COVID-19 nous en offre d’ailleurs un exemple frappant, non seulement du point de vue de ses conséquences, mais aussi par le caractère d’emblée inéluctable, insurmontable et irrémédiable qu’elle impose aux gouvernements (Doucet, 2020). Dans le cas particulier du Québec, nous considérons que la nature tragique de la pandémie s’inscrit dès la déclaration de l’état d’urgence sanitaire, le 13 mars 2020. Non pas seulement en raison du nombre de personnes potentiellement infectées, mais aussi parce qu’à ce moment précis, l’équipe du gouvernement provincial mesure très vite que la propagation rapide du virus rend inopérants tous les plans prévus depuis plusieurs années à la fois par le gouvernement fédéral ou provincial pour contrer des épidémies et des pandémies de grippe (Commissaire à la santé et aux bien-être, 2020). Ces plans, réactualisés lourdement au lendemain de l’épisode de grippe H1N1, n’abordaient pratiquement pas la possibilité d’un confinement général du pays en cas de pandémie de grippe (ministère de la Santé et des Services sociaux, 2006). En mars 2020, la particularité et la virulence de la COVID-19 ne permettaient pas aux procédures établies par le Plan québécois de lutte contre les pandémies de répondre dans l’immédiat à un virus aussi contagieux dont certains porteurs étaient asymptomatiques (Doucet, 2020). Dès mars 2020, les contaminations massives et la capacité hospitalière insuffisante au Québec ainsi que l’inexistence de remède ou de vaccin ont en quelque sorte signé un point de non-retour, confirmant que la province n’avait pas d’autre choix que de faire face à ce virus (INSPQ, 2020a). Ce qui rend la crise tragique est non seulement l’arrivée rapide d’un scénario qui annonce que les activités quotidiennes vont être bouleversées et que plus rien ne sera pareil, mais également le sentiment prégnant qu’un scénario inéluctable vient d’arriver et qu’il n’est plus possible d’empêcher la propagation du virus et, par là même, la mort certaine de plusieurs centaines de personnes. La crise tragique s’impose en quelque sorte sur toutes les réalités que les acteurs avaient envisagées ou vont envisager. Nous en dérivons la proposition suivante :

14Proposition 1 : Une crise est tragique quand elle impose aux dirigeants une réalité insurmontable au regard de leurs moyens de contrôle, les empêchant d’éviter des conséquences qu’ils savent d’emblée catastrophiques pour l’organisation et ses parties prenantes.

La duplication du réel

15La deuxième composante du tragique a trait aux stratégies déployées par les héros pour affronter le scénario inéluctable. Dans la tragédie grecque, face au scénario annoncé par l’oracle, le héros grec refuse son impuissance en se forgeant une seconde réalité plus abordable qui lui rendrait son pouvoir. En gestion de crise également, plusieurs recherches ont souligné des stratégies similaires telles que le déni de la réalité ou la distanciation (Roux-Dufort, 2009 ; Yuan et al., 2019). Confrontés à des situations difficiles en effet, les gestionnaires préfèrent parfois nier la réalité pour se persuader qu’ils ont encore le contrôle (Roux-Dufort, 2009 ; Yuan et al., 2019). Ce processus permet d’alimenter l’espoir d’une sortie de crise possible (Laughlin, 1979). Nous suggérons donc que face à un scénario inéluctable ou insurmontable tel que décrit dans notre première proposition, les gestionnaires se forgent eux aussi une représentation de la réalité plus assimilable dans l’espoir de pouvoir déjouer la situation. Cette représentation s’impose alors comme une nouvelle réalité – un double – qui leur permet de se convaincre que tout reste possible. Dans le cas de la COVID-19, devant l’augmentation des cas dans le monde, le premier ministre du Québec et son équipe de direction refusent l’idée d’une propagation massive du virus et d’une augmentation du nombre de morts, et confinent drastiquement la population dès mars 2020 (Cabinet du premier ministre, 2020). En confinant, le gouvernement québécois tente de créer un scénario alternatif à la réalité meurtrière de la pandémie.

16Par ailleurs, la littérature spécialisée montre qu’au-delà de maintenir l’espoir d’une sortie possible, le déni permet aux gestionnaires de contrer le sentiment d’impuissance, tout du moins dans les premières phases, et de leur permettre de prendre des décisions (Yuan et al., 2019). Ces décisions ne sont pas prises sur la base de modèles réfléchis et planifiés, mais reposent plutôt sur des processus intuitifs nourris surtout par l’espoir d’en sortir (Samba et al., 2019 ; Eisenhardt, 1997). Dans la même veine, le tragique met en scène un héros dans l’illusion de pouvoir agir contre la prophétie (Rosset, 1993) et illustre comment ses décisions reposent sur des pressentiments qui lui permettent d’envisager une issue possible (Romilly, 1998 ; Vernant et Vidal-Naquet, 1982). Nous suggérons que la nature tragique des crises exceptionnelles se situe aussi dans les tentatives des gestionnaires de tout faire pour conserver l’illusion d’agir et nourrir l’espoir d’y mettre fin. Ce besoin d’entretenir l’espoir à travers ce double de la réalité les pousse donc à prendre des actions parfois risquées en se fiant à des intuitions éloignées des schémas planifiés et réfléchis, que l’on trouve dans les procédures et les plans habituels, en raison du manque de visibilité sur la situation (Curnin et al., 2020 ; Okoli et Watt, 2018 ; Parnell et Crandall, 2020 ; Kahneman, Slovic et Tversky, 1982).

17Au Québec, la décision de déconfiner la population au mois de mars 2021, après la deuxième vague, a été prise par le gouvernement au détriment des avis des experts scientifiques qui préconisaient plus de prudence et de progressivité dans ces réouvertures compte tenu de l’incertitude liée au variant Delta, dont l’apparition au Québec était encore timide (INSPQ, 2022). À peine quelques semaines après, il a fallu de nouveau confiner la population. Ces dissonances entre la décision politique et économique et l’avis scientifique peut être relue à l’aune de la lentille tragique dans laquelle l’espoir est entretenu sur la base d’un pari qu’une troisième vague pourrait être contrôlée, alors même que l’expérience préalable des pays asiatiques et européens à cette période témoignait de l’inverse.

18Proposition 2a : Une crise est tragique lorsque, pour faire face à l’inéluctable scénario, le dirigeant crée une réalité concurrente dans laquelle il recouvre le sentiment d’une possibilité de changer la trajectoire du scénario de la crise.

19Proposition 2b : Une crise est tragique lorsque les décisions prises par le dirigeant à l’intérieur de ce double reposent sur des intuitions pour entretenir l’espoir d’une sortie de crise parmi les parties prenantes de l’organisation.

La logique sacrificielle

20Dans la tragédie grecque, le héros n’a pas d’autre choix que de prendre des décisions déchirantes et sacrificielles pour tenter d’échapper au scénario annoncé (Vernant et Vidal-Naquet, 1982 ; Romilly, 1998). À ce titre, la littérature sur la gestion de crise montre également que le sacrifice est utilisé dans les situations difficiles comme solution ultime pour retrouver un équilibre (Kent et Boatwright, 2018). Durant la pandémie de COVID-19, par exemple, au Québec, le premier ministre et son équipe ont pris la décision de sacrifier la croissance économique en fermant les commerces et les services non essentiels dans l’espoir de limiter la propagation du virus et l’achalandage des unités hospitalières (Talbot et Yerochewski, 2021 ; Gouvernement du Québec, 2020). Bien que les conséquences des politiques de confinement n’aient pas pu être toutes mesurables dès leur mise en application, le gouvernement du Québec ne pouvait pas totalement ignorer les effets qu’une telle position pourrait avoir sur les finances publiques – pour la plupart déjà largement déficitaires – sur l’inflation liée aux injections massives d’argent dans les circuits économiques ou sur les inégalités et la santé mentale de la population (Talbot et Yerochewski, 2021 ; Wawanoloath, 2021). Ces positions ont été d’autant plus sacrificielles que des décisions de confinement ont été prises à plusieurs reprises entre mars 2020 et octobre 2021 au Québec (INSPQ, 2022). Les dernières décisions étant prises en meilleure connaissance des sacrifices qu’elles impliquaient que celle prise dès le printemps 2020, pour laquelle peu de retours historiques étaient disponibles. Cette réflexion nous mène donc à penser qu’en présence d’un évènement incontrôlable, toutes décisions ou tentatives réalisées pour sortir et dévier le scénario nécessitent une part d’abnégation, comme une sorte de prix à payer pour tenter de s’extirper de ce qui apparaît comme inéluctable.

21Proposition 3 : Une crise est tragique lorsque les dirigeants prennent la décision de sacrifier l’équilibre sociétal pour entretenir l’espoir de dévier la trajectoire du scénario imposé.

Des décisions autoréalisatrices

22Dans la tragédie, apeuré par l’annonce de l’oracle, le héros cherche à fuir son destin. Toutefois, c’est en cherchant à y échapper qu’il l’accomplit, car il est condamné quoiqu’il arrive au scénario annoncé (Szondi, 2003 ; Romilly, 2014 ; Judet de la Combe, 2012). En d’autres termes, la tragédie met en scène la nature autoréalisatrice des décisions du héros. Dans la même veine, plusieurs chercheurs tels que Charles Schwenk (1985) expliquent que les gestionnaires en contrôle d’un évènement en situation difficile et de crise ont tendance à moins percevoir les risques qu’elle présente (Goodie et Young, 2007 ; Langer, 1975). James Lewis (2019) explique également que la peur de l’arrivée d’un évènement peut induire une mauvaise représentation de la réalité du risque. Cela peut conduire les gestionnaires à prendre des risques supplémentaires et à mettre en œuvre des actions qui peuvent avoir un effet opposé à celui souhaité (Tversky et Kahneman, 1974). Cette réflexion nous mène à penser qu’une crise devient tragique lorsque le gestionnaire, pensant être capable de maîtriser le scénario, prend ses décisions au-delà de la réelle compréhension de la situation, ce qui le mène à résorber ou à intensifier la crise et à provoquer son escalade. Dans le cas de la crise de la COVID-19, le confinement instauré dans le but de limiter les conséquences meurtrières du virus pourrait aussi être considéré comme un facteur d’amplification de la crise dans la mesure où il a généré une véritable crise économique et sociale (Poulin et al., 2021). Au Québec, des économistes estiment que les fermetures visant à freiner la propagation du virus – décidées le 14 mars 2020 – ont fait reculer le PIB de la province de 9,5 % et de 14,7 % en avril, ont fait tripler le taux de chômage pour atteindre 17 % et ont entraîné d’autres enjeux de santé majeurs (Institut de la statistique du Québec, 2020). Au fond, les décisions sanitaires, comme celles des différents confinements, ont précipité la crise avec un effet domino qui fit passer la pandémie d’une crise originellement sanitaire à une crise touchant de nombreuses sphères de l’organisation des sociétés contemporaines (Doucet, 2020). Cela souligne que le tragique ne désigne pas la nature intrinsèque d’un évènement comme s’il s’agissait d’une propriété inhérente à un scénario. Il s’agit de mettre en avant ici l’idée que les décisions des dirigeants au cœur d’une crise peuvent contribuer aussi à rendre la crise tragique.

23Proposition 4 : La crise est tragique lorsque les décisions prises par les dirigeants pour tenter de faire face à l’inéluctable scénario et d’en reprendre le contrôle, le précipitent et l’accentuent.

L’échec rétrospectif

24La recherche sur la gestion de crise souligne l’importance du temps. Elle met en avant les créneaux opportunistes que les organisations peuvent utiliser au sein desquels la prévention, la réaction à chaud ou encore l’apprentissage sont possibles (Kovoor-Misra et Nathan, 2000). Dans la perspective évènementielle de la crise (Forgues et Roux-Dufort, 1996), la crise est vue comme une rupture qui accélère considérablement la vitesse des évènements et suscite un sentiment d’urgence et de compression du temps (Pearson et Clairs, 1998). L’approche processuelle introduit un temps plus long et décrit les crises comme une accumulation de dysfonctionnements qui se développe et qui surgit et s’accélère sous l’influence d’un évènement déclencheur (Roux-Dufort, 2009). De façon générale, la littérature sur les crises part du postulat d’un temps linéaire qui s’écoule minute par minute. Toutefois, le tragique y oppose une autre temporalité, un temps presque arrêté auquel le héros n’aurait accès que rétrospectivement (Rosset, 2014) lorsqu’il se rendra compte que la réalité qu’il a tentée de construire, les décisions prises et les sacrifices qu’il a faits pour tenter d’éviter le scénario annoncé, n’ont été d’aucune efficacité pour enrayer la prophétie.

25Nous pourrions donc proposer que le gestionnaire, tant que le temps se déroule, a tendance à surestimer sa capacité à contrôler un évènement et à pouvoir agir sur des résultats ou encore à supposer que par un effort supplémentaire, il peut le modifier (Schwenk, 1985 ; Langer, 1975). Toutefois, le temps tragique rend impossible la neutralisation du scénario quand il est arrivé à son terme (Rosset, 2014). Il ne peut donc réaliser son impuissance, seulement quand tout est fini, autrement dit lorsqu’il est trop tard (Helms-Mills, 2003 ; Furey et Rixon, 2019). Par exemple durant l’épidémie de COVID-19, pour anticiper l’engorgement des hôpitaux de la province, le gouvernement du Québec a pris la décision de ne pas déplacer vers des unités hospitalières les patients des CHSLD (centres d’hébergement de soins de longue durée) ayant besoin de soins particuliers. Cette décision fut très controversée par les syndicats de soignants qui accusent le gouvernement d’avoir privé ces patients de soins et d’avoir accentué les décès au sein de ces établissements (Protecteur du citoyen, 2021 ; FSSS-CSN, 2021). La sous-estimation des risques à long terme a eu des conséquences dévastatrices et a davantage poussé le gouvernement dans une gestion de crise plus complexe, alors qu’il cherchait à en réduire les effets.

26Proposition 5 : Une crise est tragique lorsque les dirigeants pensant avoir le contrôle du scénario tout au long de son déroulement doivent constater l’échec de leurs actions lors des étapes de rétroaction.

Discussion : le tragique, les crises et l’éthique

27L’usage de la métaphore de la tragédie grecque nous conduit à proposer une réflexion sur l’éthique en situation de crise et plus particulièrement sur la pandémie de COVID-19. Cette étude souligne que l’éthique dans les crises passerait par trois points, le premier étant d’accepter une part du destin et de fatalité (Romilly, 2009 ; Laignel-Lavastine, 2020). Tout comme le héros tragique, les dirigeants doivent admettre la part de vulnérabilité et d’inévitabilité qu’imposent les crises (Doucet, 2020). Le deuxième point consiste à accepter la vulnérabilité des gouvernements aux crises, c’est-à-dire admettre la part d’irrémédiable dans les crises et le manque de remède pour faire face au scénario imposé (Rosset, 2014 ; Doucet, 2020). Le troisième point consiste à accepter que le tragique place nos gouvernements dans des choix difficiles et exigeants nécessitant parfois de trancher dans le vif (Vernant et Vidal-Naquet, 1982 ; Romilly, 1998 ; Kent et Boatwright, 2018 ; Laignel-Lavastine, 2020). Sur ce dernier point, le tragique désigne un ordre qui se situe bien au-delà du raisonnement binaire entre le bien et le mal. Il propose une réflexion extramorale (Laignel-Lavastine, 2020) et éthique. En effet, la crise contraint les dirigeants à prendre parfois des décisions difficiles qui demandent une optique large, prenant en compte les spécificités des communautés, du contexte, des valeurs de chacun ainsi que de l’environnement. La dimension tragique nous montre donc que le choix éthique en situation de crise consisterait « à trouver des points d’équilibre justifiables au regard de chaque situation concrète considérée » (INSPQ, 2020a ; Doucet, 2020).

28La métaphore de la tragédie grecque soulève aussi la notion d’espoir en temps de crise et nous ramène à son caractère éthique (Romilly, 1998 ; Vernant et Vidal-Naquet, 1982). Notre analyse montre que l’espoir pousse le gestionnaire à agir, mais pose aussi la question de ses limites. Jusqu’où espérer et jusqu’où faire espérer en situation de crise ? L’espoir éthique serait donc un espoir qui répondrait à un certain nombre de valeurs proposées par le cadre de réflexion sur les enjeux éthiques liés à la pandémie de COVID-19 établies par l’INSPQ (2020a) telles que la confiance, la transparence, la prudence ou encore la justice, mais qui respecterait aussi la part de fatalité que le tragique des crises souligne. Notre étude montre que l’espoir permet de transcender l’idée d’inéluctabilité que fait régner la crise, mais l’espoir éthique est celui qui renvoie aussi à l’idée de surdétermination, rappelant que l’espérance à ses limites (Laignel-Lavastine, 2020).

Implications théoriques et pratiques

29D’un point de vue théorique, nous avons avancé cinq propositions de recherche permettant de décrire des comportements probables de gestionnaires et de dirigeants dans des contextes de situation ayant franchi des seuils de non-retour. D’un point de vue pratique, notre étude ouvre des voies de réflexion sur la façon dont les gouvernements peuvent se préparer différemment à gérer les crises. Ainsi la plupart des interventions en gestion de crise se situent aujourd’hui principalement en amont pour préparer, former et entraîner des équipes à anticiper et à faire face à des évènements imprévus. Elles ont aussi lieu pendant la crise, pour équiper les dirigeants et plus généralement les gouvernements en outils et en réflexes de gestion destinés à limiter les conséquences (Kovoor-Misra, Zammuto et Mitroff, 2000 ; Johansen et al., 2012). La situation d’urgence imposée par le développement du virus de la COVID-19 nous a montré que les pandémies pouvaient imposer rapidement un point de non-retour et prendre tout aussi rapidement une ampleur démesurée dépassant les capacités de compréhension et de contrôle des gouvernements. En apportant une lecture tragique, nous proposons de préparer les équipes de crise à évoluer dans des environnements où le temps des interventions préventives et curatives est passé, à reconnaître les biais cognitifs qui peuvent pousser les dirigeants vers la crise et à ne pas perdre de vue les enjeux éthiques tels que la prise en compte des communautés minoritaires, du contexte, de l’environnement, des valeurs de chaque société dans la prise de décisions difficiles et sacrificielles. De tels enjeux et de tels dilemmes sont rarement mis en avant, y compris dans les meilleures pratiques, et devraient être développés dans les formations de gestion de crise et de pandémie.

30Nous proposons aussi que la sortie de la crise tragique puisse se construire sur des stratégies d’espoir mobilisateur afin que la population reste majoritairement concernée à respecter les recommandations sanitaires et à se faire vacciner, pour ce qui concerne la pandémie par exemple. Pour ce faire, il est cependant nécessaire d’observer que le changement est toujours poussé par la vision d’un avenir meilleur, alors que la tragédie est d’emblée encadrée par une prophétie dont on sait qu’elle s’accomplira. Elle se fonde sur un héros solitaire avec ses états d’âme, ses impuissances et ses incontournables désarrois. Un héros qui s’enferme peu à peu sur lui-même sans autre alternative que de tout faire pour accomplir la prophétie malgré lui. Notre recherche montre qu’un gouvernement, en dépit d’une réalité différente que celle du héros tragique, n’est jamais à l’abri de cet enfermement funeste et dérives éthiques. Il peut compter cependant sur des ingrédients essentiels, en particulier la population sur laquelle il peut s’appuyer pour l’aider à sortir de la crise. Il doit être en mesure de forger un double de la réalité mobilisateur, véritable vision de l’après-crise qui impulse et entretient les comportements nécessaires pour l’appuyer dans sa gestion. Cette vision devrait sans doute déjà contenir les germes du changement auquel la crise invite et faire levier sur l’envie collective de s’en sortir pour rejoindre cet avenir.

31Au-delà de la pandémie, il semble que la crise climatique dans laquelle nous sommes entrés ait toutes les allures d’une tragédie, tant il est difficile de concevoir ce que nous pourrions faire pour empêcher les conséquences catastrophiques qui se manifestent déjà autour de nous. Les scientifiques nous disent que nous avons d’ores et déjà passé des seuils irrémédiables. Les gouvernements finiront par prendre des décisions sacrificielles majeures quant à nos modes de développement et de consommation s’ils veulent préserver l’essentiel et notamment la survie de plusieurs populations. La plupart restent pourtant encore adossés aux présomptions qui ont fait notre civilisation thermo-industrielle. Ils s’en remettent au double de la réalité dans lequel tout est encore tenable et où les arbitrages entre nos modes de vie et celui de la planète sont encore compatibles. Ce n’est pas tant une série de mesures de neutralisation du carbone dont il est question aujourd’hui pour s’en sortir, mais peut-être une nouvelle vision d’une ère post-carbone, post-consommation, qui nous donnerait peut-être le goût d’accepter et de soutenir les décisions déchirantes qui se profilent dans un avenir proche.

Top of page

Bibliography

Boin, Arjen et Allan McConnell (2007), « Preparing for critical infrastructure breakdowns: the limits of crisis management and the need for resilience », Journal of contingencies and crisis management, vol. 15, no 1, p. 50-59.

Bolman, Lee G. et Terrence E. Deal (2003), Reframing organizations: Artistry, choice, and leadership, 3e edition, San Francisco, Jossey-Bass.

Brown, Stephen (2003), « Crisis, what crisis? marketing, midas, and the croesus of representation », Qualitative Market Research, vol. 6, no 3, p. 194-205.

Bundy, Jonathan et al. (2017), « Crises and crisis management: Integration, interpretation, and research development », Journal of Management, vol. 43, no 6, p. 1661-1692.

Burnard, Kevin, Ran Bhamra et Christos Sinopoulos (2018), « Building organizational resilience: Four configurations », IEEE Transactions on Engineering Management, vol. 65, no 3, p. 351-362.

Cabinet du ministre de la Santé et des Services sociaux (2020), Pandémie de la COVID-19 – le premier ministre Francois Legault donne de nouvelles consignes pour freiner la propagation du coronavirus, https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/pandemie-de-la-covid-19-le-premier-ministre-francois-legault-donne-de-nouvelles-consignes-pour-freiner-la-propagation-du-coronavirus (consulté le 22 mars 2021).

Cirka, Carol et Elizabeth Corrigall (2010), « Expanding possibilities through metaphor: Breaking biases to improve crisis management », Journal of Management Education, vol. 34, no 2, p. 303-323.

Clément, Mary-Lieta et Christophe Roux-Dufort (2020), « Too late to act: when crises become tragic », Management Decision, vol. 58, no 10, p. 2139-2153.

Commissaire à la santé et au bien-être (2020), Rapport de la Commissaire à la santé et au bien-être : une gestion opaque et un manque de préparation, https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/rapport-de-la-commissaire-a-la-sante-et-au-bien-etre-une-gestion-opaque-et-un-manque-de-preparation-37418 (consulté le 22 mars 2021).

Comte-Sponville, André (2018), Du tragique au matérialisme (et retour) : vingt-six études sur Montaigne, Pascal, Spinoza, Nietzsche et quelques autres, Paris, PUF.

Curnin, Steven, Benjamin Brooks et Christine Owen (2020), « A case study of disaster decision‐making in the presence of anomalies and absence of recognition », Journal of Contingencies and Crisis Management, vol. 28, no 2, p. 110-121.

Doucet, Hubert (2020), « “Répondre à la vulnérabilité” : l’éthique et les CHSLD au temps de la COVID-19 », Éthique & Santé, vol. 17, no 3, p. 142-146.

Dror, Yehezkel (2001), The Capacity to Govern: A Report to the Club of Rome, London, F. Class.

Eisenhardt, Kathleen (1997), « Strategic decision making as improvisation », dans V. Papadakis et P. Barwise, Strategic Decisions, Boston, Springer, p. 251-257.

Fabre, Perre-Antoine, Pascale Gruson et Michèle Leclerc-Olive (2007), Le sujet absolu : Une confrontation de notre présent aux débats du dix-septième siècle français, Grenoble, Jérôme Million.

Forgues, Bernard et Christophe Roux-Dufort (1998), « Crises: Events or processes », Hazards and Sustainability: Contemporary Issues in Risk Management, vol. 26, no 27, p. 1-37.

FSSS-CSN (2021), La FSSS-CSN devant la coroner pour dénoncer la tempête parfaites dans les résidences pour aîné-es, https://www.csn.qc.ca/actualites/la-fsss-csn-devant-la-coroner-pour-denoncer-la-tempete-parfaite-dans-les-residences-pour-aine-es/ (consulté le 22 mars 2021).

Furey, Mary et Daphne Rixon (2018), « When abnormal becomes normal: how altered perceptions contributed to the ocean ranger oil rig disaster », Journal of Management Policy and Practice, vol. 19, no 3, p. 106-116.

Goodie, Adam et Diana Young (2007), « The skill element in decision making under uncertainty: Control or competence? », Judgment and Decision making, vol. 2, no 3, p. 189-203.

Gouvernement du Québec (2020), COVID-19 - La ministre McCann fait le pont sur la situation actuelle, https://www.msss.gouv.qc.ca/ministere/salle-de-presse/communique-2061/ (consulté le 14 mars 2020)

Helms-Mills, Jean (2003), Making sense of organizational change. London and New-York, Routledge.

Henderson, Bruce (1989), « The origin of strategy », Harvard Business Review, vol. 67, p. 139-143.

INSPQ (2020a), Cadre de réflexion sur les enjeux éthiques liés à la pandémie de COVID-19, http://www.inspq.qc.ca (22 mars 2021).

INSPQ (2020b), Courbe des cas confirmés selon la date de déclaration des cas, annotée des principaux événements et mesures de santé publique liés à la COVID-19 au Québec, https://www.inspq.qc.ca/covid-19/donnees/ligne-du-temps (22 mars 2021).

INSPQ (2022), Ligne du temps COVID-19 au Québec, https://www.inspq.qc.ca/covid-19/donnees/ligne-du-temps (22 mars 2021).

Institut de la statistique du Québec (2020), Indicateurs mensuels : emploi et taux de chômage par région administrative, https://statistique.quebec.ca/fr/produit/tableau/indicateurs-mensuels-emploi-et-taux-de-chomage-par-region-administrative (22 mars 2021).

Institut national de santé publique du Québec (2022), Données sur les variants du SRAS-CoV-2 au Québec, https://www.inspq.qc.ca/covid-19/donnees/variants (22 mars 2021).

Johansen, Winni, Helle Aggerholm et Finn Frandsen (2012), « Entering new territory: A study of internal crisis management and crisis communication in organizations », Public Relations Review, vol. 38, no 2, p. 270-279.

Judet de La Combe, Pierre (2012), « Catastrophe et crise : de l’épopée à la tragédie grecques », Critique, vol. 783-784, no 8, p. 642-652.

Kahneman, Daniel, Paul Slovic et Amos Tversky (1982), Judgment under uncertainty: heuristics and biases, Cambridge University Press, Cambridge.

Kent, Michael et Brendon Boatwright (2018), « Ritualistic sacrifice in crisis communication: a case for eliminating scapegoating from the crisis/apologia lexicon », Public Relations Review, vol. 44, no 4, p. 514-522.

Kovoor-Misra, Sarah et Maria Nathan (2000), « Timing is everything: The optimal time to learn from crises », Review of Business, vol. 21, nos 3/4, p. 31-36.

Kovoor-Misra, Sarah, Raymond Zammuto et Ian Mitroff (2000), « Crisis preparation in organizations: prescription versus reality », Technological Forecasting and Social Change, vol. 63, no 1, p. 43-62.

Laignel-Lavastine, Alexandra (2020), La déraison sanitaire. Le COVID-19 et le culte de la vie par-dessus tout, Lormont, Le Bord de l’eau.

Langer, Ellen (1975), « The illusion of control », Journal of Personality and Social Psychology, vol. 32, no 2, p. 311-328.

Laughlin, Henry Prather (1979), The Ego and its Defenses, 2e édition, New York, J. Aronson.

Lew, Alan et al. (2020), « Visions of travel and tourism after the global COVID-19 transformation of 2020 », Tourism Geographies, vol. 22, no 3, p. 1-12.

Lewis, James (2019), « The fluidity of risk », Disaster Prevention and Management, vol. 28, no 5, p. 636-648.

Miner, Anne, Paula Bassof et Christine Moorman (2001), « Organizational improvisation and learning: A field study », Administrative science quarterly, vol. 46, no 2, p. 304-337.

Mitroff, Ian (2002), « Crisis learning: The lessons of failure », The Futurist, vol. 36, no 5, p. 19.

Müller, Monika (2018), « “Brandspeak: Metaphors and the rhetorical construction of internal branding: The interdisciplinary journal of organization, theory and society », Organization, vol. 25, no 1, p. 42-68.

Okoli, Justin et John Watt (2018), « Crisis decision-making: The overlap between intuitive and analytical strategies », Management Decision, vol. 56, no 5, p. 1122-1134.

Parnell, John et William Crandall (2020), « What drives crisis readiness? An assessment of managers in the United States: The effects of market turbulence, perceived likelihood of a crisis, small‐to medium‐sized enterprises and innovative capacity », Journal of Contingencies and Crisis Management, vol. 29, no 4, p. 416-428.

Pearson, Christine et Judith Clair (1998), « Reframing crisis management », The Academy of Management Review, vol. 23, no 1, p. 59-76.

Poulin, Valérie et al. (2021), « Challenges and strategies to adapt the provision of support services to older adults and caregivers during the COVID-19 pandemic: The perspective of community organizations », Canadian Journal on Aging, vol. 40, no 4, p. 591-603.

Protecteur du citoyen (2021), Rapport spécial du protecteur du citoyen. La COVID-19 dans les CHSLD durant la première vague de la pandémie, https://protecteurducitoyen.qc.ca/sites/default/files/2021-11/rapport-special-chsld-premiere-vague-covid-19.pdf (22 mars 2021).

Richter, Andreas et Thomas Wilson (2020), « COVID-19 : implications for insurer risk management and the insurability of pandemic risk », The Geneva risk and insurance review, vol. 45, no 2, p. 171-199.

Romilly, Jacqueline de (1998), « La prévision et la surprise dans la tragédie grecque », Actes du 8e colloque de la Villa Kerylos (Beaulieu-sur-Mer les 3 & 4 octobre 1997), Publications de l’académie des inscription et Belles-Lettre, Beaulieu-sur-Mer.

Romilly, Jacqueline de (2009), Le temps dans la tragédie grecque : Eschyle, Sophocle, Euripide, Paris, J. Vrin.

Romilly, Jacqueline de (2014), La tragédie grecque, 9e édition, Paris, Presses universitaires de France.

Rosset, Clément (1993), Le réel et son double : Essai sur l’illusion, Paris, Gallimard.

Rosset, Clément (2014), La philosophie tragique, 3e édition, Paris, Presses universitaires de France.

Roux-Dufort, Christophe (2009), « The devil lies in details! How crises build up within organizations », Journal of Contingencies and Crisis Management, vol. 17, no 1, p. 4-11.

Sackmann, Sonja (1989), « The role of metaphors in organization transformation », Human relations, vol. 42, no 6, p. 463-485.

Samba, Codou, David Williams et Robert Fuller (2019), « The forms and use of intuition in top management teams », The Leadership Quarterly, vol. 32, no 5, p. 101-349.

Schwenk, Charles (1985), « Management Illusions and Biases: Their Impact on Strategic Decisions », Long Range Planning, vol. 18, no 5, p. 74-80.

Sharma, Subhash (2002). « Radical Change Management (RCM): From Managing Pyramids to Managing in Chaos », Paradigm, vol. 6, no 1, p. 1-9.

Steiner, Georges (1993), La mort de la tragédie, Paris, Galimard.

Szondi, Peter (2003), Essai sur le tragique, Belval, Circe.

Taber, Tom (2008), « Using metaphors to teach organization theory », Journal of Management Education, vol. 31, p. 541-554.

Talbot, Geneviève et Carole Yerochewski (2021), « Pandémie : les logiques inégalitaires du confinement », Nouveaux Cahiers du socialisme, vol. 25, p. 18-25.

Tversky, Amos et Daniel Kahneman (1974), « Judgment under uncertainty: heuristics and biases », Science, vol. 185, no 4157, p. 1124-1131.

Vernant, Jean Pierre et Pierre Vidal-Naquet (1982), Mythe et tragédie en Grèce ancienne, Paris, Maspero (FM/Fondations).

Waller, Mary, Zhike Lei et Robert Pratten (2014), « Focusing on teams in crisis management education: An integration and simulation-based approach », Academy of Management Learning & Education, vol. 13, no 2, p. 208-221.

Weick, Karl (1998), « Improvisation as a Mindset for Organizational Analysis », Organization Science, vol. 9, p. 543-555

Williams, Trenton et al. (2017), « Organizational response to adversity: fusing crisis management and resilience research steams », The Academy of Management Annals, vol. 11, no 2, p. 733-769.

Yuan, Zhimei, Yi Guo et Xingdong Wang (2019), « Firm response, action visibility and consumers’ legitimacy judgment », American Journal of Business, vol. 34, no 2, p. 75-92.

Top of page

References

Electronic reference

Mary-Liéta Clément and Christophe Roux-Dufort, “Comment faire lorsqu’il est déjà trop tard ? Une perspective tragique des crises modernes”Éthique publique [Online], vol. 24, n° 1 | 2022, Online since 31 January 2023, connection on 13 December 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ethiquepublique/6854; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ethiquepublique.6854

Top of page

About the authors

Mary-Liéta Clément

Doctorante à l’Université Laval à Québec, Mary-Liéta Clément rédige une thèse sur la gestion de crise dans les organisations sous la direction de Christophe Roux-Dufort, et enseigne dans la discipline. Elle a présenté les résultats de ses recherches lors des principales conférences européennes en management telles que AIMS 2020 (Association internationale de management stratégique) et EGOS 2020 (Groupe européen d’études organisationnelles) ainsi que dans des revues scientifiques et des ouvrages didactiques.

Christophe Roux-Dufort

Professeur titulaire au Département de management de la Faculté des Sciences de l’administration de l’Université Laval, Christophe Roux-Dufort enseigne la gestion et la communication de crise et a publié près d’une quarantaine d’articles et chapitres de livre sur la gestion de crise. Il a également écrit neuf ouvrages dont : Gérer et décider en situation de crise. Outils de diagnostic, de prévention et de décision chez Dunod ; Le culte de l’urgence. La société malade du temps en collaboration avec Nicole Aubert chez Flammarion ; et Prévenir les crises. Ces Cassandres qu’il faut savoir écouter chez Armand Colin en collaboration avec Thierry Portal. Ses commentaires sur l’actualité des crises sont régulièrement publiés dans la presse économique. Il intervient comme consultant auprès de grandes entreprises internationales sur des thématiques d’exercice de crise, de plan de prévention, de retour d’expérience et de coaching personnel de dirigeant et d’équipe dirigeante en situation difficile.

Top of page

Copyright

The text and other elements (illustrations, imported files) are “All rights reserved”, unless otherwise stated.

Top of page
Search OpenEdition Search

You will be redirected to OpenEdition Search