Navigation – Plan du site

AccueilNuméros51-52Géopolitique de l’espace extra-at...Espace(s) de la géopolitiqueLa surveillance des émissions ant...

Géopolitique de l’espace extra-atmosphérique
Espace(s) de la géopolitique

La surveillance des émissions anthropiques de CO2 depuis l’espace : un enjeu géopolitique émergent

Monitoring the CO2 anthropogenic emissions from space: an emerging geopolitical issue
Grégoire Broquet et Frédéric Chevallier

Résumés

L’accord de Paris sur le climat en 2015, et plus généralement les politiques de lutte contre le changement climatique s’appuient sur une connaissance des émissions de gaz à effet de serre, en particulier de dioxyde de carbone (CO2), dues à l’activité humaine, établie par des inventaires combinant des données sur ces activités et des coefficients d’émissions correspondants. Cette approche présente aujourd’hui des limitations, avec des niveaux d’incertitudes variables en fonction des pays et des secteurs d’activité, et en termes de délais et de résolution spatiale et temporelle, qui pénalisent la transparence et la fiabilité recherchées par l’accord de Paris. Or l’acquisition et le traitement d’observations, notamment satellitaires, des concentrations atmosphériques de CO2 pourrait permettre des estimations rapides et fiables des émissions de CO2 à différentes échelles spatiales, et un contrôle voire une amélioration de la qualité des inventaires. Cet article montre ainsi que cette approche atmosphérique, longtemps limitée à la recherche scientifique, émerge aujourd’hui comme un moyen de répondre au besoin politique de nouvelles capacités de suivi des émissions de CO2. L’Europe affiche de grandes ambitions dans ce domaine, avec la mission spatiale Copernicus Anthropogenic Carbon Dioxide Monitoring (CO2M) et la préparation d’un service opérationnel de suivi atmosphérique des émissions anthropiques de CO2, qui alimenterait les déclarations officielles des émissions européennes. Cependant, la maturité actuelle des chaînes de traitement ne permet pas encore de qualifier un tel système. L’utilisation de ses estimations des émissions de CO2 dans un cadre international pose de nombreux défis techniques et politiques, que cet article discute, en leur donnant un contexte et des perspectives générales. Il s’appuie pour cela sur une revue d’articles scientifiques et de rapports pour les décideurs politiques, et sur une connaissance des échanges internationaux sur le sujet.

Haut de page

Texte intégral

Introduction

1L’accord de Paris sur le climat a été signé par 194 États et l’Union européenne (UE) en 2015, lors de la 21e Conférence des parties (en anglais « 21st Conference of the Parties », COP21) à la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) (CCNUCC, 2024a). Par cet accord, les signataires se sont engagés conjointement à limiter l’augmentation de la température moyenne de la planète d’ici 2100 en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Même si l’exploitation des opportunités qu’il ouvre pour la collaboration internationale reste incertaine (Lavallée et Maljean-Dubois, 2016), il s’agit du jalon de la lutte contre le changement climatique le plus important depuis la reconnaissance du dérèglement climatique du fait des activités humaines lors de la conférence des Nations Unies à Rio de Janeiro en 1992 et la COP3 de la CCNUCC à Kyoto en 1997. Suivant le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC), l’accord de Paris et les COP depuis 2015 soulignent par ailleurs le besoin de limiter l’augmentation de la température par rapport aux niveaux préindustriels à 1,5 °C (GIEC, 2019). Cette limitation de l’augmentation de la température passe principalement par une réduction globale et massive des émissions anthropiques de gaz à effet de serre (GES), responsables du changement climatique, et en particulier des émissions anthropiques de dioxyde de carbone (CO2). Elle passe également par l’accroissement de l’absorption du CO2 atmosphérique dans les sols, la biosphère terrestre ou les océans (des « puits » de CO2), par des procédés industriels ou par la gestion des écosystèmes, du fait de la nécessité d’avoir un bilan « négatif » des émissions de GES à la fin du siècle pour atteindre l’objectif des 2 °C (Fawcett et al., 2015 ; Dooley et al., 2018 ; CCNUCC, 2023a), et dans la mesure où même s’il est réduit, le bilan des émissions « positives » de GES dans l’atmosphère restera probablement élevé pendant longtemps (Roelfsema et al., 2020).

2Le CO2 est le principal GES anthropique. Ses émissions anthropiques sont celles dont la contribution au réchauffement depuis l’ère préindustrielle est la plus grande (entre 0,5 et 1,2 °C en 2010-2019 par rapport à 1850-1900) (GIEC, 2021). Les émissions anthropiques de CO2 sont essentiellement le produit de la combustion des combustibles fossiles pour la production d’énergie (énergie électrique, chaleur, alimentation de moteurs thermiques). La déforestation et l’utilisation de carbonates pour la construction et la chimie (notamment pour la cimenterie) sont les deux autres grandes causes de ces émissions. Cependant, depuis l’ère préindustrielle, près de la moitié du CO2 émis dans l’atmosphère par ces activités humaines est captée par les puits naturels de CO2 que sont les océans et les écosystèmes terrestres (Friedlingstein et al., 2023). En effet, l’augmentation de la concentration atmosphérique de CO2 liée aux émissions anthropiques déséquilibre les échanges physiques de CO2 à l’interface océanique avec une pression en CO2 accrue du côté de l’atmosphère, générant des flux de l’atmosphère vers les océans. Cette augmentation fertilise par ailleurs les écosystèmes, amplifiant leur captage de CO2. À cela s’ajoute l’impact de la gestion des écosystèmes par l’Homme, qui a accru leur productivité et la fertilité des sols. L’absorption de CO2 correspondante permet ainsi de limiter l’accroissement du CO2 dans l’atmosphère et donc l’effet de serre (Canadell et al., 2007). Or, l’évolution des puits naturels de CO2 reste incertaine avec la dégradation possible des écosystèmes et des échanges physiques et biologiques avec les océans du fait de l’impact du changement climatique (Lenton et al., 2019 ; Qin et al., 2021). De façon générale, il y a ainsi un intérêt scientifique, politique et sociétal à quantifier précisément l’ensemble des flux (émissions ou absorptions) de CO2 entre la surface terrestre et l’atmosphère pour mieux identifier, comprendre et contrôler les processus sous-jacents, et pour mieux anticiper leur évolution et leur impact dans le futur.

3Les accords internationaux obtenus lors des COP de la CCNUCC ou au sein de l’Union Européenne (le « pacte vert pour l’Europe » ; Commission Européenne, 2023) et les politiques climatiques nationales (comme la stratégie nationale bas-carbone du ministère français de la transition écologique et solidaire -MTES- ; MTES, 2020) ou territoriales (par exemple celle des réseaux internationaux de villes et de collectivités régionales et locales que sont le C40 et l’International Council for Local Environmental Initiatives -ICLEI- ; Greenhouse Gas Protocol, 2021) s’appuient sur des inventaires d’émissions de GES, notamment les inventaires nationaux établis dans le cadre de la CCNUCC. Ces inventaires sont compilés à partir de données de la consommation de combustibles fossiles ou d’indices des activités à l’origine des émissions et absorptions de GES, et de facteurs d’émission plus ou moins standards, permettant la conversion des indices d’activité en estimation des émissions (Citepa, 2023). Or, comme cet article va le montrer, cette source d’information présente de nombreuses limitations, parfois en termes de fiabilité, et de façon plus systématique en termes de résolution spatiale et temporelle, et de délai d’accès à l’information.

4Depuis une vingtaine d’années, le concept de surveillance des émissions associées à l’activité humaine à partir d’observations des concentrations atmosphériques de CO2 émerge progressivement (GIEC, 2006 ; Ciais et al., 2015 ; Bergamaschi et al., 2018). Ces observations correspondent généralement à des mesures en continu de stations au sol ou à des données de télédétection spatiale. Leur traitement avec des outils numériques proches de ceux utilisés pour la prévision météorologique permet de quantifier et cartographier les émissions et absorptions de CO2. On envisage ainsi de déployer d’importants réseaux d’observation du CO2 atmosphérique pour des estimations rapides et fiables des émissions anthropiques à différentes échelles spatiales, couvrant des bilans ou des cartographies aux échelles planétaires à locales, avec la quantification des émissions nationales, régionales ou pour des villes et des grands sites industriels. Ces estimations doivent permettre un contrôle de la qualité des inventaires, voire un ajustement des facteurs d’émission pour les secteurs d’activité où ils sont le plus incertains. Des estimations basées sur la mesure sont en principe le gage d’une source d’information transparente et indépendante des émetteurs. L’utilisation de la mesure spatiale présente de nombreux avantages par rapport à celle des stations de mesures au sol : elle devrait accroître la couverture de l’observation à l’ensemble de la planète, l’homogénéité de l’acquisition des données et de leur traitement et l’indépendance des estimations, puisqu’elle ne nécessite pas d’installation et donc de coopérations locales.

5L’Europe montre aujourd’hui de grandes ambitions dans ce domaine. La mission Copernicus Anthropogenic Carbon Dioxide Monitoring (CO2M) du programme européen d’observation de la terre Copernicus et de l’Agence Spatiale Européenne (European Space Agency, ESA), qui doit être lancée en 2026 (Meijer et al., 2023), sera la principale source d’observations atmosphériques à court terme pour l’estimation des émissions anthropiques de CO2. Ces observations seront traitées et exploitées par le futur système opérationnel de suivi atmosphérique des émissions anthropiques de CO2, le CO2 Monitoring and Verification Support capacity (CO2MVS) de Copernicus (CAMS, 2021) que l’Europe développe actuellement (Pinty et al., 2017). Ce système doit alimenter les déclarations des émissions européennes. Cependant, son niveau de maturité ne permet pas encore de qualifier un tel système : l’utilisation de ses futures estimations des émissions de CO2 dans le cadre international posé par l’accord de Paris, ou pour le développement de services aux territoires et le secteur privé, pose de nombreux défis techniques et politiques que la communauté scientifique et les agences institutionnelles tentent aujourd’hui de relever et d’anticiper.

6L’objectif de cet article est de présenter ces défis, et de donner une vision d’ensemble de la question du suivi spatial des émissions anthropiques de CO2 permettant d’en mesurer les enjeux. Pour cela, il s’appuie sur une revue d’articles scientifiques et de rapports pour les décideurs politiques, et sur une connaissance des échanges internationaux sur le sujet. Les sections suivantes traitent ainsi le cadre imposé par l’accord de Paris et les inventaires actuels, le contexte scientifique et technique de la mise en place de systèmes opérationnels de quantification des émissions à partir d’observations depuis l’espace, et les défis de leur application. En guise de synthèse et de conclusion, la section finale donne quelques perspectives générales pour la surveillance des émissions anthropiques de CO2 depuis l’espace.

Les inventaires des émissions de CO2

Les inventaires des émissions et absorptions de CO2 de la CCNUCC et les limitations associées

7L’accord de Paris repose sur les engagements de chacune des parties signataires à réduire ses émissions ou leur accroissement à plus ou moins long terme, les « Contributions déterminées au niveau national » (en anglais « Nationally Determined Contributions », NDC). Il repose également sur le bilan collectif régulier de ces engagements, des progrès réalisés et de leur cohérence avec l’objectif de limitation du réchauffement climatique : le Bilan Mondial (en anglais « Global StockTake », abrégé en « GST » dans la suite) (Perugini et al., 2021 ; Brocchieri et Perugini, 2022). Ce GST a lieu tous les cinq ans, dans un cadre de transparence renforcée (Enhanced Transparency Framework, ETF). Il doit s’appuyer sur des inventaires des émissions nationaux dont la qualité, la fiabilité et la précision est donc critique pour la réussite de l’accord de Paris.

8Depuis les années 2000, dans le cadre du protocole de Kyoto, l’UE et une quarantaine d’États (correspondant à l’annexe I de la CCNUCC), regroupant les pays industrialisés qui étaient membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 1992 et les anciennes républiques de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) en transition vers l’économie de marché, sont juridiquement engagés à fournir chaque année à la CCNUCC un inventaire normalisé de leurs émissions de GES sur la période de 1990 à deux ans avant la date de livraison. Cet inventaire doit notamment décrire l’ensemble des émissions annuelles de CO2 liées à l’activité humaine : les émissions liées aux énergies et carbonates fossiles, ainsi que les émissions et la séquestration du CO2 atmosphérique liées à l’Utilisation des Terres, au Changement d’Affectation des Terres et à la Foresterie (UTCATF) (Citepa, 2023). Il est public (CCNUCC, 2024b) et évalué par une équipe d’experts au sein de la CCNUCC. Cet effort continu et ambitieux d’inventaire permet aujourd’hui une bonne connaissance des bilans annuels et nationaux des émissions de CO2 d’origine fossile (liées à l’utilisation des combustibles et carbonates fossiles) pour les pays concernés (Perugini et al., 2021). Mais ce n’est pas le cas pour les émissions anthropiques liées à l’UTCATF, car les variations de la masse de carbone des sols et des écosystèmes sont très dures à estimer aux échelles régionales ou nationales, et du fait de la difficulté d’établir des règles adaptées pour la classification des terres et des émissions et absorptions par les écosystèmes qui doivent être prises en compte (Petrescu et al., 2020 ; McGlynn et al., 2022 ; Luers et al., 2022). Par ailleurs, les engagements de réduction des émissions pris par les États impliquent des changements rapides de consommation des combustibles fossiles dans les secteurs de la production d’énergie, du transport, etc. qui pourraient accroître l’incertitude sur les facteurs et donc sur les bilans d’émissions fossiles dans les décennies à venir. Enfin, avec la mise en place du GST, les pays dits « en développement » (pays de l’annexe II de la CCNUCC) doivent désormais également fournir des rapports d’inventaires biennaux, même s’ils n’ont pas toujours accès à des informations ou à des données fiables (Ciais et al., 2015 ; Perugini et al., 2021). Ce problème s’applique à la Chine qui est pourtant aujourd’hui le premier émetteur de CO2 (Korsbakken et al., 2016 ; Han et al., 2020). L’accord de Paris crée un cadre de collaboration internationale permettant de soutenir l’établissement des inventaires dans ces pays, mais la fiabilité des rapports dépend de la volonté d’investissement et de coopération de chaque pays. Dans tous les cas, chaque pays est responsable in fine du rapport de ses propres émissions, ce qui pose des questions d’indépendance des estimations, en dépit des procédures d’évaluation croisées mises en place.

9Des systèmes de surveillance, déclaration et vérification des émissions (en anglais « Monitoring, Reporting and Verification », abrégé en MRV ci-après ; Bellassen et al., 2015) ou d’ETF ont pourtant été mis en place, notamment dans le cadre de la CCNUCC pour assurer la transparence et la fiabilité des inventaires. Cependant, les systèmes MRV imposent essentiellement un suivi de bonnes pratiques (comprenant l’utilisation de facteurs d’émission standards ou dont la valeur est démontrée), l’analyse quantitative des niveaux d’incertitudes associés aux inventaires et la validation ou la confrontation des inventaires avec des données indépendantes. Ainsi, la capacité de ces systèmes et des revues expertes multilatérales de l’ETF à limiter l’incertitude sur les inventaires dépend elle-même de la disponibilité et de l’accès à des données fiables et indépendantes (OCDE, 2018).

10Par ailleurs, l’action climatique s’appuie en grande partie sur des politiques urbaines et territoriales. Il y a donc un besoin d’information locale, auquel ne répondent par les inventaires nationaux. Les inventaires territoriaux existants (Greenhouse Gas Protocol, 2021 ; en France : les inventaires pour certaines régions -AIRPARIF, 2024- et villes -Ville de Paris, 2020-) s’appuient eux-mêmes souvent sur des facteurs d’émission moyens ou standards qui ne tiennent pas compte de l’impact parfois important de réglementations ou de pratiques locales sur les taux d’émission de CO2 associés à un niveau de production ou d’activité donné (Cochran, 2011).

11Enfin, la compilation des données d’activité nécessaires à l’établissement d’inventaires, qu’ils soient locaux ou nationaux, prend du temps. Les rapports d’inventaires de la CCNUCC sont publiés par exemple avec plus d’un an de retard par rapport aux émissions les plus récentes qu’ils documentent. Il manque une capacité de suivi en temps réel (donc intra-annuel) des émissions locales comme nationales pour l’aide à la gestion des émissions.

L’apport d’un suivi des émissions et absorptions de CO2 basé sur des mesures atmosphériques

12Dans ce contexte, l’utilisation de mesures atmosphériques indépendantes avec des approches objectives et standardisées pour la quantification des émissions et absorptions de CO2 parait prometteuse. Que ce soit avec l’amélioration de la connaissance de facteurs d’émission ou des niveaux d’activité utilisés dans la compilation des inventaires, ou en apportant des estimations permettant l’évaluation des inventaires (notamment dans le cadre des systèmes MRV), les données de CO2 atmosphériques devraient permettre l’accroissement de la fiabilité et de la transparence des bilans d’émissions du GST. En principe, ces données peuvent également permettre de générer des estimations des émissions en temps quasi-réel et aux échelles nationales et locales (pour des régions administratives, des villes, des grands sites industriels).

13La mesure satellitaire ne nécessite ni l’implantation potentiellement intrusive de structures au sol, ni la mise en place de coopérations dans les différents pays pour assurer une couverture quasi planétaire de l’atmosphère et donc des émissions. Cette couverture satellitaire a aussi l’avantage d’être relativement homogène autour du globe. Si des stations de mesures au sol ont pu être installées en Amérique latine ou en Afrique par les pays hôtes (Labuschagne et al., 2018) ou dans le cadre de collaborations entre agences et laboratoires de recherche de différents pays incluant les pays hôtes (Morgan et al., 2015 ; Tiemoko et al., 2021), les stations de mesure aux États-Unis et en Chine ont essentiellement été installées et maintenues par des laboratoires de ces pays respectifs. Par ailleurs, l’accès à la plupart des données des stations états-uniennes et européennes est libre, mais l’accès aux données des stations en Chine est plus difficile. À ce jour, le problème d’accès aux données est principalement lié aux stratégies de partage des différentes institutions en charge des stations, mais il pourrait revêtir des aspects plus politiques à l’avenir. La limitation géographique des réseaux sol est également fortement liée à des problèmes de logistique (sécurité, capacité à accéder aux stations et à des ressources locales pour leur maintenance, etc.)

Le suivi satellitaire des émissions de CO2

14Les variations spatiales ou temporelles (accroissements ou diminutions) des mesures de concentrations atmosphériques proches des sources ou des puits de CO2 sont en grande partie liées et proportionnelles à ces sources et puits. La modélisation du transport atmosphérique du CO2, qui s’appuie sur des simulations météorologiques, permet le filtrage de ces variations et leur interprétation en termes de flux de CO2 entre la surface terrestre et l’atmosphère. Les méthodes « d’inversion de la modélisation du transport atmosphérique » (abrégé en « inversion atmosphérique ») correspondantes permettent ainsi de quantifier et cartographier les puits et sources de CO2 à partir des mesures de concentration.

15Initialement développées dans le secteur de la recherche sur le cycle du carbone pour quantifier les flux naturels de CO2 à l’échelle de continents et d’océans, ces méthodes peuvent aujourd’hui s’appuyer sur des réseaux d’observations toujours plus denses, et sur un nombre croissant de missions spatiales d’observation du CO2. Ces observations permettent dès à présent de cibler des sources anthropiques dont les signatures atmosphériques sont beaucoup plus localisées que les grandes aires de puits naturels (Bergamaschi et al., 2018).

16L’implémentation des systèmes d’inversion atmosphérique utilise généralement les principes mathématiques et des outils numériques très proches de ceux de l’assimilation de données pour la prévision et la ré-analyse en météorologie et en océanographie. On se réfèrera à Rayner et al. (2019) et à Jacob et al. (2022) pour un aperçu de la théorie et des différents types de systèmes (qui sont très similaires pour l’estimation des flux de CO2 et de méthane). Les sections suivantes présentent les principes généraux du suivi des émissions et absorptions de CO2 à la surface de la terre avec l’inversion atmosphérique, en particulier dans le cas de l’utilisation des données satellitaires.

L’observation des concentrations atmosphériques de CO2 depuis l’espace

17Le CO2 absorbe une partie du rayonnement solaire, que ce soit pendant le trajet de ce rayonnement vers la surface terrestre ou une fois ce rayonnement réfléchi par cette surface. Dans certaines bandes du proche infra-rouge (IR), cette absorption par le CO2 est relativement aisée à identifier, à isoler de l’absorption du rayonnement solaire par les autres gaz atmosphériques, et à lier à la concentration atmosphérique de CO2. La mesure dans ces bandes du proche IR du rayonnement solaire réfléchi par la surface terrestre avec un spectromètre localisé à bord d’un satellite permet donc de quantifier la concentration moyenne de CO2 le long du double trajet à travers l’atmosphère de ce rayonnement, c’est-à-dire la concentration moyenne sur « des colonnes » atmosphériques à la verticale du satellite (Figure 1).

Figure 1. Illustration de l’observation des concentrations atmosphériques de CO2 par satellite

Figure 1. Illustration de l’observation des concentrations atmosphériques de CO2 par satellite

Schéma illustrant le double trajet du rayonnement du soleil à travers l’atmosphère avant d’être perçu par un satellite. Le satellite mesure ici le spectre des luminances énergétiques reçues dans des intervalles de longueurs d’onde choisies. Ce spectre porte la marque des molécules de CO2 rencontrées le long du trajet lumineux et représentées sur le globe par une carte des concentrations moyennes de CO2 sur la verticale le 14 octobre 2021 à 21h, temps universel coordonné.

18C’est en suivant ce principe que les satellites existants dédiés à l’observation du CO2 réalisent des mesures du rayonnement dans le proche IR. La plupart d’entre eux est placée en orbite basse héliosynchrone, générant des données à heure locale constante, mais des concepts d’observation en orbite géostationnaire (depuis un point fixe au-dessus de l’équateur) sont désormais également envisagés. La résolution spatiale de leurs instruments est très variable, de même que leurs modes d’acquisition, qui peuvent correspondre à des balayages discontinus ou continus sur une fauchée (c’est à dire une largeur au sol) plus ou moins grande, dans la direction orthogonale à la trace de déplacement du satellite au sol, ou avec des modes de ciblage en dehors de cette trace. En fonction de ces paramètres, les satellites peuvent fournir des sondages plus ou moins denses, voire des images à plus ou moins haute résolution et plus ou moins larges des champs de concentrations de CO2 moyennées sur la verticale (Figure 2) (Crisp et al., 2018).

Figure 2. Image de panache anthropique de CO2 générée à partir des mesures satellitaires

Figure 2. Image de panache anthropique de CO2 générée à partir des mesures satellitaires

Image de CO2 générée à partir des mesures de la mission OCO-3 le 30 juin 2021 (version des données : NASA ACOS v10.4), couvrant le panache d’une centrale électrique au charbon en Mongolie Intérieure (Chine). La flèche indique la direction du vent près de la surface dans la zone d’observation.

19Le procédé de calcul des concentrations de CO2 correspondant aux mesures spectrales du satellite est cependant complexe et s’appuie sur des outils de modélisation du transfert radiatif dans l’atmosphère, incluant notamment les effets de diffusion du rayonnement par les aérosols. Il s’appuie également sur des outils d’inversion similaires à ceux utilisés pour l’inversion du transport atmosphérique. En effet, les modèles de transfert radiatif simulent une absorption du rayonnement en fonction d’une composition atmosphérique donnée. Il faut donc inverser statistiquement ce processus pour déduire d’un spectre du rayonnement la composition atmosphérique correspondante, et notamment la concentration de CO2. Les données de concentrations atmosphériques satellitaires correspondent ainsi à des estimations, avec des niveaux d’incertitude significatifs en comparaison des signaux recherchés. Par ailleurs, le principe de cette observation spatiale du CO2 repose pour l’instant sur des spectromètres « passifs » qui observent le rayonnement solaire s’il parvient jusqu’à eux. De nuit, il est impossible avec une telle approche d’accéder à la connaissance des concentrations de CO2. En présence de nuages épais, le rayonnement n’atteint pas le sol et ne recèle aucune information sur le CO2 dans la partie basse de l’atmosphère qui contient la meilleure information sur les émissions et les absorptions. Ces deux limitations ainsi que d’autres aspects théoriques et techniques rendent aujourd’hui importante la complémentarité entre mesures spatiales et mesures depuis le sol et dans l’atmosphère (données aériennes par avions, ballons, drones etc.), et en particulier les mesures in situ (Pinty et al., 2019). En effet, de nombreux types d’instruments permettent une mesure in situ très précise des concentrations de CO2 que ce soit depuis des stations fixes ou sur des plateformes mobiles.

Principe général de la quantification des sources et puits de CO2 par inversion atmosphérique

20En moyenne, dans l’atmosphère, la concentration de CO2 est aujourd’hui de 419 parties par million de molécules d’air (ppm) (NOAA, 2024). Cette concentration varie sous l’effet des flux de CO2 à la surface terrestre, et à un degré bien moindre, du fait du temps de vie du CO2 dans l’atmosphère (Tans et al. 1997). À grande échelle temporelle, depuis l’ère préindustrielle, cette concentration augmente continument sur l’ensemble de la planète du fait des émissions anthropiques. A l’échelle intra-annuelle, la partition des grands courants atmosphériques et les écarts d’émissions et de puits naturels génèrent entre les hémisphères Nord et Sud un gradient et un déphasage du cycle saisonnier de la concentration de CO2 principalement associé à celui de l’absorption par photosynthèse des écosystèmes (Figure 3). À ces grandes variations s’ajoutent des variations continentales, régionales, et locales, mensuelles, synoptiques voire instantanées, associées aux sources et absorptions diverses de CO2, notamment celles dues aux activités anthropiques, aux écosystèmes terrestres, aux océans, et aux eaux côtières et continentales. Ces variations peuvent être très fortes près de la surface, mais le transport horizontal et vertical de CO2 dans l’atmosphère s’accompagne de sa diffusion et donc du mélange des signaux associés aux différents sources et puits. Les champs de CO2 gagnent donc en homogénéité au fur et à mesure que celui-ci se diffuse sur la verticale, hors de la couche limite de surface atmosphérique, et la signature d’une source ou d’un puits local devient rapidement évanescente (à faible distance, ou peu de temps après l’interruption de l’émission ou du puits). Enfin, l’amplitude des signaux et des variations sur les colonnes atmosphériques associés à des flux continentaux, régionaux et locaux, même en considérant ceux de forêts continentales, n’excède généralement pas quelques ppm (voire 1 ppm pour les grandes villes), ce qui est faible en comparaison de la concentration moyenne atmosphérique de 419 ppm. La valeur de cette amplitude est proche de la précision typique des estimations des colonnes individuelles de CO2 à partir des mesures satellitaires (de l’ordre de 1 ppm ; Jacobs et al., 2023).

Figure 3. Cartographie mondiale des concentrations de CO2 à partir des mesures satellitaires

Figure 3. Cartographie mondiale des concentrations de CO2 à partir des mesures satellitaires

Observations de CO2 (en ppm) à travers le monde, générées à partir des mesures de la mission OCO-2 en juin 2021 (version des données : NASA ACOS v11.1).

21La détection et la quantification des émissions de CO2 d’une source « ponctuelle », comme un groupe de cheminées d’un grand site industriel, à partir d’images satellitaires des concentrations de CO2 au voisinage de cette source représente un cas pratique d’inversion atmosphérique relativement simple à concevoir. Cette source ponctuelle industrielle génère, en suivant la direction du vent, un panache de CO2 qui se superpose au champ de CO2 de fond, c’est-à-dire aux 419 ppm en moyenne autour de la planète ainsi qu’à des variations associées aux autres flux naturels et anthropiques régionaux. On peut détecter ce panache dans les images satellitaires de CO2, locales, même si celles-ci sont fortement bruitées du fait des incertitudes sur les estimations des colonnes de CO2 à partir des mesures satellitaires, en recherchant les accroissements de CO2 spatialement cohérents (Barré et al., 2021). Or la connaissance plus ou moins précise du champ de vent local permet de modéliser le panache que génèrerait un niveau d’émission du site industriel donné, et notamment son amplitude. En inversant le processus de transport atmosphérique associé au panache, on peut donc déduire d’une observation de l’amplitude du panache le niveau des émissions du site.

22Le concept peut être généralisé à celui de la cartographie temporalisée des puits et sources de CO2 à partir d’un ensemble d’observations des concentrations atmosphériques, qu’elles soient satellitaires ou non. L’objectif est de couvrir un ensemble de flux d’intérêts (émissions et flux naturels nationaux, pour une zone urbaine, puits associé à un grand écosystème, à une forêt spécifique, émissions d’un site industriel etc.) sur un domaine qui peut être planétaire, régional ou local. La modélisation du transport atmosphérique de CO2 sur ce domaine permet la simulation des champs atmosphériques de CO2 et de leurs variations spatio-temporelles pour une estimation donnée de la cartographie temporalisée des flux. L’inversion statistique de ce transport permet une estimation des flux qui correspond de façon optimale à l’ensemble des observations sur ce domaine. Lorsque l’ensemble des observations est trop épars pour bien couvrir et quantifier l’ensemble des flux dans le domaine considéré, l’inversion atmosphérique s’appuie fortement sur une connaissance a priori des flux, dérivée de modèles de processus du cycle du carbone et d’inventaires d’émissions : elle les corrige pour réduire les écarts entre simulations et observations. Ainsi, des inventaires spatialisés, désagrégeant les bilans nationaux en cartes d’émissions sur la base d’indices de répartition des activités (tels que l’inventaire Emissions Database for Global Atmospheric Research -EDGAR- du Joint Research Center de la Commission européenne, couvrant le monde à ~10 km de résolution ; Janssens-Maenhout et al., 2019), sont largement utilisés voire développés dans le domaine de l’inversion atmosphérique.

Évolution de l’approche

23Au début des années 2000, l’inversion atmosphérique a été essentiellement utilisée pour identifier les zones de fort puits naturel entre les différents continents. Le bilan planétaire et annuel des émissions fossiles était déjà bien quantifié, l’accroissement planétaire annuel de la concentration de CO2 atmosphérique était parfaitement bien caractérisée à l’aide de stations de mesure au milieu de l’océan Pacifique, et le puits océanique était assez bien connu du fait de nombreuses campagnes de mesure dans l’océan et de ses faibles variations spatiales et temporelles. Le puits annuel des écosystèmes à l’échelle de la planète était donc déduit des autres composantes du cycle du carbone, mais il restait à déterminer dans quelles zones ce puits était le plus fort, et sous l’effet de quels processus. Les mesures in situ de quelques dizaines de stations sol étaient alors assimilées dans des systèmes d’inversion atmosphérique à l’échelle mondiale (Chevallier et al., 2010).

24L’accroissement régulier du système d’observation du CO2, et notamment le développement de réseaux de dizaines de stations de mesure en continu en Europe et en Amérique du Nord, puis à partir de la fin des années 2000 le lancement de missions satellitaires dédiées aux observations de CO2 a permis l’émergence de systèmes d’inversion atmosphérique régionaux, à plus haute résolution, visant la distribution des flux naturels aux échelles sous-continentales (Broquet et al., 2011). De surcroît, les émissions d’origine fossile étant restreintes à des zones très limitées, le suivi de ces émissions a commencé à être envisagé avec la mise en place de systèmes d’inversion atmosphérique à l’échelle de la ville (Bréon et al., 2015), ou d’inversion de panache de sites industriels (Nassar et al., 2017) (Figure 2). Toutefois, sur une image satellitaire, ou pour des observations horaires, l’amplitude du signal correspondant aux émissions fossiles est souvent plus faible que celui des flux naturels. À l’échelle de l’année, l’absorption de CO2 liée à la photosynthèse (en journée et surtout au printemps et en été) s’agrège aux émissions de CO2 liées à la respiration des écosystèmes (qui dominent les flux naturels la nuit, en automne et en hiver). Au final, les flux d’origine fossile sont plus importants que les flux naturels. Or les observations atmosphériques de CO2 doivent être interprétées à fine résolution temporelle pour démêler l’impact très variable des champs météorologiques, et en particulier du vent, sur le lien entre flux et concentrations atmosphériques. Les émissions d’origine fossile sont donc une cible a priori plus complexe que les flux naturels.

25La détection et l’inversion des panaches de CO2 des villes et grands sites industriels à l’aide de l’imagerie spatiale de CO2 à haute résolution s’apparente à la détection et à l’inversion des panaches dans les images satellitaires de polluants et de méthane (CH4), qui ont fait leurs preuves (Sherwin et al., 2023). Mais à ce jour, il n’y a pas encore sur orbite une mission d’imagerie spatiale de CO2 à haute résolution sur une grande largeur, c’est-à-dire avec une grande fauchée. La situation va radicalement changer avec le lancement de la mission CO2M à partir de 2026.

Les missions spatiales dédiées au suivi des flux de CO2

26Il est possible d’estimer des concentrations de CO2 atmosphérique dans les colonnes à la verticale des satellites à partir de mesures dans l’IR thermique, suivant un principe et un protocole similaires à ceux de l’estimation des concentrations de CO2 à partir des mesures dans le proche IR. Les mesures dans l’IR thermique de missions satellitaires de météorologie telles que celles de l’Interféromètre atmosphérique de sondage dans l’infrarouge (IASI) du Centre National d’Études Spatiales (CNES) (Crevoisier et al, 2009) ont donc parfois été exploitées pour la quantification des flux naturels de CO2 aux échelles continentales. Cette exploitation reste exploratoire car les mesures dans l’IR thermique sont en fait peu sensibles aux variations des concentrations de surface qui sont très importantes pour caractériser les flux, et parce que l’incertitude sur l’estimation des concentrations de CO2 déduites des mesures dans l’IR thermique est plus grande que celle sur l’estimation des concentrations de CO2 déduites des mesures dans le proche IR.

27Les premières mesures dans le proche IR exploitées pour l’estimation des concentrations de CO2 et des flux associés ont été celles de la mission ENVIronment SATellite (ENVISAT) de l’ESA (2002-2012), qui comportait de nombreux instruments et couvrait ainsi un large éventail de spectres de rayonnement. Cependant, la résolution spectrale et spatiale limitée pour les bandes associées à l’estimation des concentrations de CO2 n’a pas permis d’obtenir des produits de qualité pour ce gaz.

28Les premières missions véritablement consacrées à l’estimation des concentrations de CO2 avec des spectromètres dédiés entièrement ou en grande partie aux bandes du proche-IR pertinentes pour cette espèce ont été la mission japonaise (Japan Aerospace Exploration Agency -JAXA / National Institute for Environmental Studies -NIES) Greenhouse Gases Observing Satellite (GOSAT ; 2009-présent) et la mission américaine (National Aeronautics and Space Administration -NASA / Jet Propulsion Laboratory -JPL) Orbiting Carbon Observatory-2 (OCO-2, lancée en 2014). Elles restent aujourd’hui, avec leurs successeurs GOSAT-2 (lancée en 2018) et OCO-3 (instrument placé sur la station spatiale internationale en 2019 ; Figure 2) les principales missions d’observation du CO2. Les missions chinoises (Ministry of Science and Technology –MOST / Chinese Academy of Sciences –CAS / China Meteorological Administration -CMA) TanSat et TanSat-2 (depuis 2016) complètent le panel actuel des missions institutionnelles dédiées au CO2. La mission Microcarb du CNES et de l’Agence spatiale du Royaume-Uni (United Kingdom Space Agency) devrait rejoindre cette constellation en 2025 (CEOS, 2024).

29Or, ces missions ont été principalement conçues pour le suivi des flux naturels de CO2 à l’échelle des continents et des bassins océaniques, avec une résolution et une densité spatiales relativement faibles (pour les missions GOSAT) ou une fauchée étroite (pour les missions OCO-2, OCO-3 et TanSat). Seule exception, la mission OCO-3 intègre un mode de visée dédié à l’acquisition d’images d’environ 80×80 km2 sur les villes et grands sites industriels. Ce mode de visée a produit plusieurs milliers d’images depuis la mise en opération de la mission, ce qui illustre son utilisation à relativement haute fréquence et son rôle majeur dans les objectifs de la mission. Leur petite taille limite la capacité à traiter les panaches issus des mégapoles, mais ces images préfigurent la nouvelle génération d’instruments imageurs dont la principale mission sera le suivi des émissions anthropiques, et qui devrait être lancée dans les années à venir. La mission Microcarb intégrera également un mode de visée vers les grandes sources anthropiques, le « mode ville », produisant des images de plus petite taille (~40 km × 40 km) et moins fréquentes que celles d’OCO-3, mais toujours dans le but d’apporter des données précurseurs des imageurs à venir. On note enfin que les mesures sur des fauchées étroites de la mission OCO-2 croisent régulièrement des panaches d’amplitude relativement forte sous le vent de grandes sources anthropiques. Le traitement de ces sections de panaches peut poser des difficultés à la fois pour assurer que le pic de concentration associé correspond bien à un panache anthropique, ou pour identifier la source correspondante, ce qui restreint les cas pour lesquels une identification et une quantification de source est pertinente, mais l’analyse des données OCO-2 a permis de nombreuses estimations pour de grandes centrales thermiques et des villes (p.ex. Nassar et al, 2017 ; Chevallier et al, 2022).

30La constellation de deux à trois satellites imageurs CO2M (ESA/UE) du programme Copernicus sera la première des missions d’imagerie sur large fauchée (> 200 km) en continu à relativement haute résolution spatiale (4 km2) et devrait rester la principale source d’information satellitaire sur les émissions anthropiques dans les années qui suivront son lancement en 2026. C’est la première mission spatiale dont la configuration a été principalement étudiée pour permettre la quantification des émissions anthropiques, et plus généralement le programme institutionnel le plus ambitieux pour le suivi des flux de CO2. La mission Global Observing SATellite for Greenhouse gases and Water cycle (GOSAT-GW, JAXA/NIES), qui doit être lancée prochainement, apportera également une imagerie des champs de CO2.

31Le secteur privé génèrera peut-être lui aussi des projets ambitieux, avec le développement croissant de concepts de constellations de nanosatellites imageurs à très haute résolution spatiale (< 1 km2). La société privée canadienne GHGSat a déjà lancé des nanosatellites pour la détection de panaches de CO2 et de CH4 et la quantification des émissions associées. Seules les observations de CH4 semblent aujourd’hui exploitables, mais les progrès pour ce gaz ont été très rapides et les résultats correspondants sont aujourd’hui convaincants, ce qui est prometteur pour l’observation du CO2. L’emprise croissante du « new space » (l’industrie spatiale d’initiative privée) et les soutiens gouvernementaux pour son développement alimentent d’ores et déjà la naissance de start-up visant le développement d’instruments et de plateformes satellitaires pour le suivi des GES, principalement le CO2 et le CH4 (Evroux, 2022).

Le CO2MVS, les systèmes nationaux et les services avals

32L’exploitation des mesures satellitaires pour le suivi des flux de CO2 nécessite l’utilisation de systèmes de modélisation et d’inversion statistique qui peuvent être complexes et coûteux en temps de calcul. Les systèmes de détection et d’inversion de panaches dans les images de GES reposent le plus souvent, pour l’instant, sur des approches et des codes très simples. Ainsi, l’application de ces systèmes au traitement des données OCO-2 et OCO-3, ou des images de CH4 ou de polluants (telles que les images de CH4, de CO et de NO2 de l’instrument TROPOspheric Monitoring Instrument -TROPOMI- de la mission Copernicus Sentinel-5P) représente, pour l’instant, des coûts de calcul relativement faibles. Mais cela s’explique par la quantité relativement faible des données exploitées jusqu’à présent, par le manque de panaches aisés à distinguer dans les données existantes ou par le conservatisme des algorithmes actuellement utilisés qui se concentrent sur les panaches d’un ensemble limité de très grandes sources (Chevallier et al., 2022). La multiplication des missions spatiales et l’augmentation du volume et de la précision des données à traiter demanderont des ressources croissantes ou la complexification des algorithmes d’inversion atmosphérique. Des codes d’intelligence artificielle sont déjà testés pour la détection et l’inversion de panaches (Dumont Le Brazidec et al., 2024). Par ailleurs, quoi qu’il en soit de l’inversion atmosphérique, la génération des données de concentrations à partir des mesures de spectres de rayonnement reste complexe et nécessite des améliorations afin d’augmenter la précision des estimations de concentrations. En effet, les observations de CO2 actuelles sont entachées de biais importants dont les structures spatiales perturbent la capacité à interpréter les variations des concentrations en termes de flux de surface. Enfin, la représentativité temporelle des panaches observés dans l’imagerie satellitaire n’est au plus que de quelques heures. Leur exploitation pour produire des estimations avec une représentativité temporelle pertinente (à l’échelle de la journée, du mois, de l’année) nécessite l’ingestion de jeux de données complémentaires, probablement multiples.

33Le déploiement de missions spatiales à visée opérationnelle, comme le programme CO2M, doit donc s’accompagner de la mise en place de systèmes sophistiqués de traitement des données des missions satellitaires, CO2M et autres, des mesures des réseaux sol et des sources d’informations complémentaires : observations des polluants co-émis par la combustion des combustibles fossiles, inventaires spatialisés et données d’activités à haute résolution spatiale et temporelle, etc. (Pinty et al., 2017). La conception du futur système européen CO2MVS en est aujourd’hui l’expression la plus aboutie, l’objectif étant d’assurer un suivi opérationnel des émissions anthropiques et des absorptions naturelles de CO2 sur l’ensemble de la planète et à haute résolution spatiale, dont les estimations pourront être agrégées aux résolutions annuelles et nationales. La complexité de l’architecture du système et les défis associés à l’intégration de flux de données complexes et variés explique qu’une série de projets européens accompagne son développement sous la houlette du Centre Européen pour les Prévisions Météorologiques à Moyen Terme (CEPMMT) et en coopération avec la communauté européenne de recherche dans le domaine de l’inversion atmosphérique. Des connexions importantes seront mises en place avec les services de l’ESA (pour le satellite et l’instrument) et de l’Organisation européenne pour l’exploitation des satellites météorologiques (European Organisation for the Exploitation of Meteorological Satellites -EUMETSAT-, pour le segment spatial au sol) en lien avec l’acquisition des mesures et la génération des données de CO2 de CO2M. Le CO2MVS doit être opérationnel et exploiter les données CO2M dès l’année 2026 pour produire en 2028 des estimations pertinentes pour le 2e GST, puis, de façon régulière et sur le long terme, pour les GST suivants.

34Les données Copernicus, comme les données des missions de la NASA et de la JAXA, sont libres d’accès et d’utilisation. Toutes ces données nourrissent donc le développement de systèmes de traitement, notamment aux États-Unis, en Europe, au Japon et en Chine. Ces systèmes peuvent eux-mêmes alimenter le développement de services avals. Ainsi, en parallèle du développement du CO2MVS, différents projets de systèmes opérationnels de suivi des émissions de GES nationaux et urbains voient le jour en Europe. Un programme national a été lancé dans ce sens en Allemagne. Le Royaume-Uni, la Suisse et l’Allemagne incluent des résultats d’inversions atmosphériques pour le CO2, le CH4 ou le protoxyde d’azote (N2O) dans les annexes de leurs inventaires nationaux pour leur évaluation. Dans ces exemples, les efforts sont principalement institutionnels et alimentés par des laboratoires de recherche. Le secteur privé s’intéresse lui aussi à la question et cherche à développer des services pour les territoires et les municipalités, ou de valorisation des estimations des émissions industrielles (suivi, indices financiers etc.). Il n’existe pas encore d’exemple de service de suivi des émissions de CO2 utilisant les données satellitaires, mais les cas de services de suivi des émissions industrielles de CH4 basés sur les données spatiales, ou de suivi des émissions urbaines de CO2 basés sur des réseaux sol dédiés montrent que le lancement de missions comme CO2M devrait rapidement changer la situation.

35Si de nombreuses entreprises devraient fonder leurs analyses sur les données publiques des missions spatiales institutionnelles, d’autres pourraient lancer leurs propres constellations de satellites comme c’est déjà le cas pour le suivi atmosphérique des émissions de CH4 avec la société GHGSat, et comme cela est déjà envisagé pour le CO2.

Défis à court terme et perspectives techniques

36Malgré l’émergence de nombreux projets publics et privés de suivi satellitaire des émissions de CO2 et les échéances serrées pour la mise en opération de systèmes comme le CO2MVS, cette activité génère encore de nombreuses questions techniques que la communauté scientifique cherche à résoudre.

La fréquence de revisite d’une ville ou d’un site par une constellation de trois satellites CO2M sera d’environ deux jours, alors que la représentativité temporelle des estimations associées à l’inversion d’un panache de CO2 correspondant dépassera difficilement quelques heures. De plus, les nuages rendront un grand nombre de ces revisites inexploitables. Si la couverture nuageuse d’une scène est partielle, et que seuls des fragments du panache sont visibles sur les images, la qualité des estimations pourra être fortement dégradée. Même pour des images complètes de panaches et du champ de fond dans son voisinage, le niveau d’incertitude sur les estimations des émissions données par les inversions seront élevées du fait des erreurs instrumentales, des erreurs sur les champs de CO2 dérivés des mesures satellitaires (liées aux incertitudes sur le transfert radiatif), des erreurs sur la détection du panache et sur la caractérisation du champ de concentration de fond, et des incertitudes sur le champ de vent associé (incertitudes sur l’inversion du transport atmosphérique). Afin que le rapport entre le signal généré par une source et le bruit associé à toutes ces sources d’erreurs soit assez élevé pour permettre des estimations, il faut un niveau d’émission élevé.

37Avec CO2M, seules des grandes sources locales pourront être quantifiées avec une précision convenable, typiquement, les sites industriels et aires urbaines émettant plus d’une mégatonne de carbone par an (1MtC/an) sous forme de CO2. Ces sources représentent en cumulé la moitié des émissions mondiales de CO2 associées aux énergie fossiles. Sur un an, avec trois satellites CO2M et pour une source de plus de 1MtC/an, on pourra typiquement espérer 15 à 60 estimations des émissions sur quelques heures avec moins de 20 % d’incertitude (Lespinas et al., 2020). Au vu des défis techniques associés et de la nouveauté relative du concept, cette seule capacité pourra être considérée comme un succès de l’observation spatiale. Mais elle n’en restera pas moins limitée pour produire des bilans d’émissions nationaux indépendants et précis. Il sera probablement difficile de traiter les signaux diffus dans les images de CO2M et de les attribuer aux flux naturels ou anthropiques, à des territoires bien délimités, à des secteurs d’activité ou à la gestion des différents types d’écosystèmes. Même pour les grandes sources industrielles ou urbaines, la couverture et la qualité des estimations sera hétérogène, du fait de la variation des conditions locales d’ensoleillement, atmosphériques, de surface etc.

38De façon générale, à ce stade, le traitement des données satellitaires dédiées au suivi des flux de CO2 reste en très grande partie un objet de recherche, qui suscite l’exploration d’une grande diversité d’approches et le développement d’une grande variété de systèmes. Cet éparpillement en limite probablement la portée pour une exploitation opérationnelle à très court terme, mais de nombreuses perspectives techniques permettent d’espérer une croissance radicale des capacités. La résolution, la couverture spatio-temporelle et la précision des données satellitaires de CO2 va rapidement s’accroître avec la multiplication des missions : missions à très haute résolution spatiale, comme la mission Twin Anthropogenic Greenhouse Gas Observers (TANGO) que l’ESA vient de sélectionner (ESA, 2024), grandes constellations de micro- ou nanosatellites, missions en orbite géostationnaire, qui permettront une imagerie à haute fréquence temporelle sur une région donnée, instruments actifs utilisant leur propre rayonnement pour la mesure de l’absorption du CO2 atmosphérique, et donc permettant des observations sans ensoleillement local (de nuit, et aux très hautes latitudes en hiver), etc. Le traitement des données lui-même et son potentiel devraient progresser avec l’utilisation d’approches et de systèmes de modélisation permettant d’extraire une quantité croissante d’information des mesures satellitaires, et avec une capacité croissante à combiner les données d’observation spatiale du CO2 avec des observations ou des informations complémentaires.

39À court terme, les objectifs de l’exploitation des observations spatiales de CO2 peuvent être la vérification des bilans des flux de CO2 à de très grandes échelles, comme les bilans planétaires (l’objectif commun du GST), continentaux ou pour des groupes de pays, la génération d’indicateurs d’émissions pour les pays manquant de moyens pour la compilation d’inventaires fiables, d’indicateurs des variations spatiales et temporelles aux échelles sous-nationales et intra-annuelles, et d’indicateurs des variations des émissions en temps quasi-réel. Dans certains cas, notamment pour l’UTCATF, le traitement de ces observations devrait permettre l’amélioration des facteurs d’émission les plus incertains, et la correction des inventaires. Des comparaisons entre les déclarations officielles de flux de CO2 associés à l’UTCATF dans des grands pays et des estimations issues des observations satellitaires existantes sont déjà étudiées (Figure 4) (Chevallier, 2021).

Figure 4. Flux annuels de CO2 du secteur UTCATF pour dix grands signataires de la CCNUCC

Figure 4. Flux annuels de CO2 du secteur UTCATF pour dix grands signataires de la CCNUCC

Flux annuels de CO2 du secteur UTCATF pour dix grands signataires de la CCNUCC estimés par les signataires eux-mêmes (disques verts) et par l’enveloppe d’incertitude à 1-σ des deux dernières inversions atmosphériques du service Copernicus (bleu pour l’inversion pilotée par les prélèvements d’air près de la surface et orange pour l’inversion pilotée par les données du satellite OCO-2). Les valeurs positives indiquent que le secteur UTCATF du signataire est une source de CO2 dans l’atmosphère.

Coopération et cadre internationaux

40On observe pour l’instant une forte collaboration internationale autour du développement de l’observation spatiale du CO2 et de ses émissions. On peut l’inscrire dans le contexte de séries de succès lors des COP depuis l’accord de Paris, avec l’obtention de consensus et de décisions importantes pour la lutte contre le changement climatique malgré la montée actuelle des tensions politiques internationales, et même si ces décisions ne paraissent pas encore à la hauteur des enjeux climatiques (Maslin et al., 2023 ; Arora, 2024 ; Citepa, 2024). Une des explications de ce contexte est probablement l’absence de contrainte significative pour obliger les États à respecter leurs engagements dans le cadre de l’accord de Paris (Lavallée et Maljean-Dubois, 2016).

41Les données d’observation du CO2 des missions institutionnelles américaines, japonaises et européennes sont en accès libre et largement partagées, de même que l’expertise pour les développements instrumentaux et le traitement des données. La communauté d’experts (scientifiques, industriels, inventoristes) est aujourd’hui très fortement structurée en Europe autour de la préparation de la mission CO2M et du service CO2MVS du programme Copernicus, et aux États-Unis, dans une moindre mesure, autour des programmes OCO-2/-3. L’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) s’investit maintenant pour coordonner les efforts à l’échelle du globe avec le programme « Global Greenhouse Gas Watch » (WMO, 2023). Des normes internationales sont à l’étude autour des estimations atmosphériques des émissions (ISO, 2020).

42À plus long terme, la solidité de la coopération internationale sera questionnée par des rivalités en termes de leadership, de souveraineté, de normes, de transparence des instruments et des logiciels, de maîtrise des technologies correspondantes, d’autonomie, d’utilisation de données opposables pour se confronter à des estimations défavorables, de concurrence commerciale, etc. Si la coopération de part et d’autre du Pacifique entre les programmes GOSAT (Japon) et OCO-2 (États-Unis) a été exemplaire, le premier aidant le second après l’échec du lancement du précurseur d’OCO-2 en 2009 (Crisp et al., 2012), la coopération intra-européenne entre les programmes Microcarb et CO2M depuis 2015 a été moins manifeste, et les programmes chinois sont difficilement lisibles depuis l’extérieur (CEOS, 2024).

43En particulier, il y a des freins à l’utilisation des données spatiales dans le cadre des accords internationaux comme celui de Paris : la question d’une gouvernance planétaire qui s’appuierait sur des instruments nationaux d’un petit nombre de pays (en l’état : les États-Unis, les pays européens, le Japon, le Canada et la Chine), et celle de la transparence apportée par de telles données, qui d’un côté augmente la confiance, mais de l’autre pose des problèmes de souveraineté et d’accès à des informations sensibles, notamment pour les pays ne disposant pas de ces instruments (Albergel, 2021). L’observation spatiale des émissions de CO2 est d’ailleurs souvent promue comme un support à l’établissement des inventaires plus que comme un outil de vérification.

44Le nouveau paradigme est au fond plus agressif que celui de la CCNUCC et du GST, qui se veut le moins intrusif possible, et pour lequel chaque État signataire est l’acteur principal de son propre inventaire et du suivi des progrès pour la réalisation de ses NDC. Ce dernier ayant été peu efficace en termes de réduction des émissions, l’Europe et les États-Unis (ou du moins certaines agences états-uniennes comme la NASA) essaient de coordonner des systèmes d’information pour « mettre au pilori » les États qui ne diminueront pas suffisamment les leurs. L’adage « Vous ne pouvez pas gérer ce que vous ne pouvez pas mesurer » mis fréquemment en avant s’applique implicitement à la gestion des émissions des autres (Stephens, 2011, NASA, 2014). Par nature, cette approche favorise tensions et rivalités.

45On peut d’ailleurs craindre que la multiplication des missions spatiales, avec des géométries, temporalités et précisions d’observation très variables, et la multiplication des systèmes de traitement génèrent des flux d’estimations trop hétérogènes et donc, parfois intentionnellement, plus d’opacité que de transparence, voire plus de manipulation que de neutralité dans l’exploitation de mesures.

46Ainsi, il est essentiel de conserver l’accès libre aux données de référence et de mettre en place des standards internationaux pour la mesure et les traitements des données. La coordination internationale pour les programmes spatiaux (notamment via les structures en place telles que l’OMM, le Group on Earth Observations -GEO- et le Committee on Earth Observation Satellites -CEOS) doit probablement être renforcée.

47Ces différents aspects sont fortement pris en compte dans la préparation du service CO2MVS de Copernicus pour assoir sa légitimité à fournir des estimations pour le GST, avec un travail important d’étalonnage et de standardisation des méthodes et des protocoles pour le traitement des données en lien avec l’OMM, et en impliquant les agences d’inventaires afin d’assurer la cohésion entre les produits du service et les attendus du cadre formel de la CCNUCC et des GST.

Conclusion : perspectives générales

48Le potentiel et les limites actuelles de l’utilisation des données atmosphériques de CO2 pour la quantification des émissions et puits de CO2 sont connus et documentés dans les directives du GIEC pour la CCNUCC depuis 2006 (GIEC, 2006). La méthodologie générale des inventaires détaillés de référence pour la CCNUCC et le GST ne va pas être bouleversée dans la décennie à venir, mais la donnée satellitaire peut s’imposer progressivement comme une source de contrôle, d’amélioration et d’information complémentaires pour les inventaires. Il est essentiel pour cela d’assurer une forte interaction entre les experts du domaine du suivi spatial des flux de CO2 et les inventoristes, et l’utilisation par ses derniers des estimations issues des données satellitaires.

49L’exploitation de l’observation spatiale en support du GST pose la question de sa pérennisation et de sa stabilité. Le coût financier d’une mission comme CO2M est élevé : le budget correspondant aux deux premiers satellites de la constellation ayant initialement été estimé à environ 450 millions d’euros (ESA, 2020). Or, au-delà de la mission CO2M, il y aura un besoin d’accroître la constellation des satellites dédiés à l’observation du CO2 et de croiser des modes d’observations variés pour couvrir la plupart des émissions aux échelles spatiales et temporelles d’intérêt. Il est donc impératif de valider rapidement le concept CO2MVS en environnement réel (niveaux de maturité technologique > 6 sur l’échelle « Technology readiness level », TRL) auprès des publics ciblés, en particulier les décideurs politiques et économiques.

50Les observations spatiales de CO2 seront exploitées dans des approches intégrées avec l’assimilation de données socio-économiques (telles que celles utilisées pour les inventaires), de données des réseaux de mesure au sol, et de données de polluants émis conjointement avec le CO2 par les processus anthropiques et naturels sous-jacents. Ainsi, le suivi des émissions de CO2 sera étroitement lié dans sa mise en œuvre comme dans ses implications à la question de la surveillance de la qualité de l’air et à celle de l’évolution des comportements socio-économiques.

51Le rôle du secteur privé pose des questions. Il apportera des approches et des modes d’exploitation innovants, et il pourra soutenir l’expansion de la constellation des satellites d’observation du CO2. Mais les synergies pourraient être limitées, soit parce que les objectifs du secteur privé (et donc la configuration de leurs instruments et de leurs chaînes de traitement) se distingueraient des objectifs institutionnels de soutien aux politiques climatiques aux échelles planétaires et nationales, et notamment au GST, soit parce qu’il développerait des canaux d’estimation parallèles et quasi-concurrentiels (ce qui questionnerait l’accès libre aux données institutionnelles). Les initiatives du secteur privé, encouragées par les institutions pour stimuler l’activité économique, pourraient poser des difficultés à l’établissement d’estimations indépendantes de référence.

52Le rôle de l’observation spatiale du CH4 semble aujourd’hui plus évident et mieux établi que celui de l’observation spatiale du CO2. Les facteurs d’émission et les inventaires sont en effet beaucoup plus incertains pour les émissions de CH4 que pour les émissions de CO2. Les émissions de CH4 sont en grande partie liées à des fuites de gaz naturel qui représentent une perte pour le secteur industriel, et la détection et la quantification de ces fuites peuvent donc être associées à un bénéfice économique immédiat. Les panaches atmosphériques de CH4 correspondants sont généralement plus faciles à détecter dans les images satellitaires dans le proche-IR et à traiter que les panaches de CO2, qui se superposent aux signaux très variables des flux naturels de CO2. Enfin, la dynamique de suivi atmosphérique des émissions de CH4 s’est accélérée avec l’établissement du « Global Methane Pledge » lors de la COP26, qui a donné naissance à des initiatives publiques comme privées pour établir des méthodes éprouvées pour la détection et la quantification de ces émissions (par exemple dans le cadre du projet International Methane Emissions Observatory -IMEO- du Programme des Nations unies pour l’environnement ; UNEP, 2024).

53Il devient urgent de mettre en place de nouvelles capacités de suivi des émissions de CO2 auxquelles l’observation spatiale des concentrations atmosphériques devrait pouvoir contribuer en partie. Les engagements formels des États auprès de la CCNUCC (les NDC) ne permettant pas encore d’assurer une limitation de l’augmentation de la température moyenne de la planète en dessous de 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels (CCNUCC, 2023b), il est essentiel de s’assurer collectivement que ces engagements soient au moins respectés.

Haut de page

Bibliographie

AIRPARIF, 2024, « Inventaire AIR-CLIMAT-ENERGIE », En ligne : https://www.airparif.fr/sites/default/files/document_publication/bilan_emissions_IDF_2021.pdf.

Albergel, E., 2021, « Earth observation satellites: Monitoring greenhouse gas emissions under the Paris Agreement », Public Policy Master Thesis, SciencesPo school of public Affairs. En ligne : https://www.sciencespo.fr/public/sites/sciencespo.fr.public/files/ALBERGEL Eve.pdf

Arora, P., 2024, « COP28: ambitions, realities, and future », Environmental Sustainability, vol. 7, n° 1, p. 107-113.

Barré, J., Aben, I., Agustí-Panareda, A., Balsamo, G., Bousserez, N., Dueben, P., et al., 2021, « Systematic detection of local CH4 anomalies by combining satellite measurements with high-resolution forecasts », Atmospheric Chemistry and Physics, vol. 21, n° 6, p. 5117-5136.

Bellassen, V., Stephan, N., Afriat, M., Alberola, E., Barker, A., Chang, J.-P., et al., 2015, « Monitoring, reporting and verifying emissions in the climate economy », Nature Climate Change, vol. 5, n° 4, p. 319-328.

Bergamaschi, P., Danila, A. M., Weiss, R., Ciais, P., Thompson, R. L., Brunner, D., et al., 2018, « Atmospheric monitoring and inverse modelling for verification of greenhouse gas inventories », EUR 29276 EN, Publications Office of the European Union, Luxembourg, ISBN 978-92-79-88938-7, doi: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.2760/759928, JRC111789, En ligne: https://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/handle/JRC111789.

Bréon, F. M., Broquet, G., Puygrenier, V., Chevallier, F., Xueref-Remy, I., Ramonet, M., et al., 2015, « An attempt at estimating Paris area CO2 emissions from atmospheric concentration measurements », Atmospheric Chemistry and Physics, vol. 15, n° 4, p. 1707-1724.

Brocchieri, F., Perugini, L., 2022, « D6.3 User Requirement Document | CoCO2: Prototype system for a Copernicus CO2 service », En ligne: https://www.coco2-project.eu/node/331.

Broquet, G., Chevallier, F., Rayner, P., Aulagnier, C., Pison, I., Ramonet, M., et al., 2011, « A European summertime CO2 biogenic flux inversion at mesoscale from continuous in situ mixing ratio measurements », Journal of Geophysical Research: Atmospheres, vol. 116, D23303, doi: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1029/2011JD016202.

CAMS, 2021, « COP26: CAMS to help measure progress towards CO2 goals », site internet de CAMS, https://atmosphere.copernicus.eu/cop26-cams-help-measure-progress-towards-co2-goals.

Canadell, J. G., Le Quéré, C., Raupach, M. R., Field, C. B., Buitenhuis, E. T., Ciais, P., et al., 2007, « Contributions to accelerating atmospheric CO2 growth from economic activity, carbon intensity, and efficiency of natural sinks », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 104, n° 47, p. 18866-18870.

CCNUCC, 2023a, « First global stocktake », En ligne: https://unfccc.int/sites/default/files/resource/cma2023_L17_adv.pdf.

CCNUCC, 2023 b, « Nationally determined contributions under the Paris agreement », En ligne: https://unfccc.int/sites/default/files/resource/cma2023_12.pdf.

CCNUCC, 2024 a, « L’Accord de Paris », site internet de la CCNUCC, https://unfccc.int/fr/a-propos-des-ndcs/l-accord-de-paris.

CCNUCC, 2024 b, « National Inventory Submissions 2024 », site internet de la CCNUCC, https://unfccc.int/ghg-inventories-annex-i-parties/2024.

CEOS, 2024, « Greenhouse gas satellite missions portal », site internet du CEOS, https://database.eohandbook.com/ghg/.

Chevallier, F., Ciais, P., Conway, T. J., Aalto, T., Anderson, B. E., Bousquet, P., et al., 2010, « CO2 surface fluxes at grid point scale estimated from a global 21-year reanalysis of atmospheric measurements », Journal of Geophysical Research: Atmospheres, vol. 115, D21307, doi: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1029/2010JD013887.

Chevallier, F., 2021, « Fluxes of Carbon Dioxide From Managed Ecosystems Estimated by National Inventories Compared to Atmospheric Inverse Modeling », Geophysical Research Letters, vol. 48, n° 15, p. e2021GL093565.

Chevallier, F., Broquet, G., Zheng, B., Ciais, P., Eldering, A., 2022, « Large CO2 Emitters as Seen From Satellite: Comparison to a Gridded Global Emission Inventory », Geophysical Research Letters, vol. 49, n° 5, p. e2021GL097540.

Ciais, P., Crisp, D., Denier Van Der Gon, H., Engelen, R., Heimann, M., Janssens-Maenhout, G., Rayner, P., Scholze, M., 2015, « Towards a European Operational Observing System to Monitor Fossil CO2 emissions », European Commission – ISBN 978-92-79-53482-9. En ligne : https://www.copernicus.eu/en/news/news/new-co2-green-report-2019-published

Citepa, 2023, « Rapport CCNUCC (NIR) », En ligne : https://www.citepa.org/fr/ccnucc/.

Citepa, 2024, « COP-28 : Malgré un premier pas vers la sortie des combustibles fossiles et l’adoption des règles sur les fonds pertes et préjudices, le bilan global de Dubaï est mitigé », En ligne : https://www.citepa.org/fr/2024_01_a03/.

Cochran, I., 2011, « Analyse des inventaires locaux d’émissions de gaz à effet de serre : quel inventaire pour quelle utilisation ? », in B. Duplessis & C. Raux (Éd.), Économie et développement urbain durable  : Émissions urbaines : inventaires et politiques publiques & Transport et usage du sol, Développement durable, Paris, Presses des Mines, p. 15-31.

Commission Européenne, 2023, « Commission welcomes completion of key 'Fit for 55' legislation, putting EU on track to exceed 2030 targets », site internet de la Commission Européenne, https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_23_4754.

Crevoisier, C., Chédin, A., Matsueda, H., Machida, T., Armante, R., Scott, N. A., 2009, « First year of upper tropospheric integrated content of CO2 from IASI hyperspectral infrared observations », Atmospheric Chemistry and Physics, vol. 9, n° 14, p. 4797-4810.

Crisp, D., Fisher, B. M., O’Dell, C., Frankenberg, C., Basilio, R., Bösch, H., et al., 2012, « The ACOS CO2 retrieval algorithm &ndash; Part II: Global XCO2 data characterization », Atmospheric Measurement Techniques, vol. 5, n° 4, p. 687-707.

Crisp et al., 2018, « A constellation architecture for monitoring carbon dioxide and methane from space, CEOS Greenhouse Gas White Paper », En ligne: https://ceos.org/observations/documents/CEOS_AC-VC_GHG_White_Paper_Publication_Draft2_20181111.pdf

Dooley, K., Christoff, P., Nicholas, K. A., 2018, « Co-producing climate policy and negative emissions: trade-offs for sustainable land-use », Global Sustainability, vol. 1, p. e3.

Dumont Le Brazidec, J., Vanderbecken, P., Farchi, A., Broquet, G., Kuhlmann, G., Bocquet, M., 2024, « Deep learning applied to CO2 power plant emissions quantification using simulated satellite images », Geoscientific Model Development, vol. 17, n° 5, p. 1995-2014.

ESA, 2020, « Contract signed to build Europe's carbon dioxide monitoring mission », site internet de l’ESA, https://www.esa.int/Applications/Observing_the_Earth/Copernicus/Contract_signed_to_build_Europe_s_carbon_dioxide_monitoring_mission -:~:text=Taking the mission a significant,start building the two satellites.

ESA, 2024, « NanoMagSat and Tango Scout missions get go-ahead », site internet de l’ESA, https://www.esa.int/Applications/Observing_the_Earth/FutureEO/NanoMagSat_and_Tango_Scout_missions_get_go-ahead.

Evroux, C., European Parliamentary Research Service, 2022, « EU space policy: Boosting EU competitiveness and accelerating the twin ecological and digital transition », En ligne: https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/BRIE/2022/698926/EPRS_BRI(2022)698926_EN.pdf.

Fawcett, A. A., Iyer, G. C., Clarke, L. E., Edmonds, J. A., Hultman, N. E., McJeon, H. C., et al., 2015, « Can Paris pledges avert severe climate change? », Science, vol. 350, n° 6265, p. 1168-1169.

Friedlingstein, P., O’Sullivan, M., Jones, M. W., Andrew, R. M., Bakker, D. C. E., Hauck, J., et al., 2023, « Global Carbon Budget 2023 », Earth System Science Data, vol. 15, n° 12, p. 5301-5369.

GIEC, 2006, in Eggleston, H. S., Buendia, L., Miwa, K., Ngara, T., Tanabe, K. (Eds.), « IPCC guidelines for national greenhouse gas inventories, prepared by the national greenhouse gas inventories programme », IGES. En ligne : https://www.ipcc-nggip.iges.or.jp/public/2006gl/.

GIEC, 2019, « Réchauffement planétaire de 1,5 °C - Résumé à l’intention des décideurs, Résumé technique Foire aux questions Glossaire », En ligne : https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/SR15_Summary_Volume_french.pdf.

GIEC, 2021, Masson-Delmotte, V., Zhai, P., Pirani, A., Connors, S.L., Péan, C., Berger, S., Caud, N., Chen, Y., Goldfarb, L., Gomis, M.I., Huang, M., Leitzell, K., Lonnoy, E. Matthews, J.B.R., Maycock, T.K., Waterfield, T., Yelekci, O., Yu, R., Zhou, B. (Eds.) « IPCC Climate Change 2021: The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Sixth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change », Cambridge University Press, Cambridge, United Kingdom and New York, NY, USA, 2391 pp. doi: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1017/9781009157896.

Greenhouse Gas Protocol, 2021, « Global Protocol for Community-Scale Greenhouse Gas Inventories », En ligne: https://ghgprotocol.org/sites/default/files/standards/GPC_Full_MASTER_RW_v7.pdf.

Han, P., Zeng, N., Oda, T., Lin, X., Crippa, M., Guan, D., et al., 2020, « Evaluating China’s fossil-fuel CO2 emissions from a comprehensive dataset of nine inventories », Atmospheric Chemistry and Physics, vol. 20, n° 19, p. 11371-11385.

ISO, 2020, « Greenhouse gas and climate change management and related activities », site internet de l’organisation internationale de normalisation, https://committee.iso.org/home/tc207sc7.

Jacob, D. J., Varon, D. J., Cusworth, D. H., Dennison, P. E., Frankenberg, C., Gautam, R., et al., 2022, « Quantifying methane emissions from the global scale down to point sources using satellite observations of atmospheric methane », Atmospheric Chemistry and Physics, vol. 22, n° 14, p. 9617-9646.

Jacobs, N., O’Dell, C. W., Taylor, T. E., Logan, T. L., Byrne, B., Kiel, M., et al., 2024, « The importance of digital elevation model accuracy in XCO2 retrievals: improving the Orbiting Carbon Observatory 2 Atmospheric Carbon Observations from Space version 11 retrieval product », Atmospheric Measurement Techniques, vol. 17, n° 5, p. 1375-1401.

Janssens-Maenhout, G., Crippa, M., Guizzardi, D., Muntean, M., Schaaf, E., Dentener, F., et al., 2019, « EDGAR v4.3.2 Global Atlas of the three major greenhouse gas emissions for the period 1970–2012 », Earth System Science Data, vol. 11, n° 3, p. 959-1002.

Korsbakken, J. I., Peters, G. P., Andrew, R. M., 2016, « Uncertainties around reductions in China’s coal use and CO2 emissions », Nature Climate Change, vol. 6, n° 7, p. 687-690.

Labuschagne, C., Kuyper, B., Brunke, E.-G., Mokolo, T., van der Spuy, D., Martin, L., et al., 2018, « A review of four decades of atmospheric trace gas measurements at Cape Point, South Africa », Transactions of the Royal Society of South Africa, vol. 73, n° 2, p. 113-132.

Lavallée, S., Maljean-Dubois, S., 2016, « L’Accord de Paris : fin de la crise du multilatéralisme climatique ou évolution en clair-obscur ? », Revue juridique de l’environnement, vol. 41, n° 1, p. 19-36.

Lenton, T. M., Rockström, J., Gaffney, O., Rahmstorf, S., Richardson, K., Steffen, W., et al., 2019, « Climate tipping points — too risky to bet against », Nature, vol. 575, n° 7784, p. 592-595.

Lespinas, F., Wang, Y., Broquet, G., Bréon, F.-M., Buchwitz, M., Reuter, M., et al., 2020, « The potential of a constellation of low earth orbit satellite imagers to monitor worldwide fossil fuel CO2 emissions from large cities and point sources », Carbon Balance and Management, vol. 15, n° 1, p. 18.

Luers, A., Yona, L., Field, C. B., Jackson, R. B., Mach, K. J., Cashore, B. W., et al., 2022, « Make greenhouse-gas accounting reliable — build interoperable systems », Nature, vol. 607, n° 7920, p. 653-656.

Maslin, M. A., Lang, J., Harvey, F., 2023 « A short history of the successes and failures of the international climate change negotiations », UCL Open Environment, vol. 5, p. e059.

McGlynn, E., Li, S., F. Berger, M., Amend, M., L. Harper, K., 2022, « Addressing uncertainty and bias in land use, land use change, and forestry greenhouse gas inventories », Climatic Change, vol. 170, n° 1, p. 5.

Meijer, Y., Andersson, E., Boesch, H., Dubovik, O., Houweling, S., Landgraf, J., et al., 2023, « Editorial: Anthropogenic emission monitoring with the Copernicus CO2 monitoring mission », Frontiers in Remote Sensing, 4:1217568. doi: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.3389/frsen.2023.1217568, En ligne: https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/frsen.2023.1217568.

Morgan, E. J., Lavrič, J. V., Seifert, T., Chicoine, T., Day, A., Gomez, J., et al., 2015, « Continuous measurements of greenhouse gases and atmospheric oxygen at the Namib Desert Atmospheric Observatory », Atmospheric Measurement Techniques, vol. 8, n° 6, p. 2233-2250.

MTES, 2020, « Stratégie nationale bas-carbone », En ligne : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2020-03-25_MTES_SNBC2.pdf.

NASA, 2014, « You can manage only what you can measure », site internet de la NASA, https://www.nasa.gov/image-article/you-can-manage-only-what-you-can-measure/.

Nassar, R., Hill, T. G., McLinden, C. A., Wunch, D., Jones, D. B. A., Crisp, D., 2017, « Quantifying CO2 Emissions From Individual Power Plants From Space », Geophysical Research Letters, vol. 44, p. 10,045-10,053.

NOAA, 2024, « Trends in CO2, CH4, N2O, SF6 », site internet du Global Monitoring Laboratory de la NOAA, https://gml.noaa.gov/ccgg/trends/.

OCDE, Climate Change Expert Group, 2018, « Tracking progress towards NDCs and relevant linkages between Articles 4,6 and 13 of the Paris Agreement », En ligne: https://0-www-oecd--ilibrary-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/docserver/358aae24-en.pdf?expires=1716564815&id=id&accname=guest&checksum=2F06F5F1FC2A9B6C9F1D9B8C10F85AC5.

Perugini, L., Pellis, G., Grassi, G., Ciais, P., Dolman, H., House, J. I., et al., 2021, « Emerging reporting and verification needs under the Paris Agreement: How can the research community effectively contribute? », Environmental Science & Policy, vol. 122, p. 116-126.

Petrescu, A. M. R., Peters, G. P., Janssens-Maenhout, G., Ciais, P., Tubiello, F. N., Grassi, G., et al., 2020, « European anthropogenic AFOLU greenhouse gas emissions: a review and benchmark data », Earth System Science Data, vol. 12, n° 2, p. 961-1001.

Pinty, B., Janssens-Maenhout, G., Dowell, M., Zunker, H., Brunhes, T., Ciais, P., Dee, D., Denier Van Der Gon, H., Dolman, H., Drinkwater, M., Engelen, R., Heimann, M., Holmlund, K., Husband, R., Kentarchos, A., Meijer, Y., Palmer, P., Scholze, M., 2017, « An Operational Anthropogenic CO Emissions Monitoring & Verification Support capacity - Baseline Requirements, Model Components and Functional Architecture » doi: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.2760/39384, European Commission Joint Research Centre, EUR 28736 EN, En ligne: https://www.copernicus.eu/en/news/news/new-co2-green-report-2019-published

Pinty, B., Ciais, P., Dee, D., Dolman, H., Dowell, M., Engelen, R., Holmlund, K., Janssens-Maenhout, G., Meijer, Y., Palmer, P., Scholze, M., Denier Van Der Gon, H., Heimann, M., Juvyns, O., Kentarchos, A., Zunker, H., 2019, « An operational anthropogenic CO emissions monitoring & verification support capacity: needs and high level requirements for in situ measurements : report from the CO monitoring task force. », European Commission Joint Research Centre, EUR 29817 EN, En ligne: https://www.copernicus.eu/en/news/news/new-co2-green-report-2019-published

Qin, Y., Xiao, X., Wigneron, J.-P., Ciais, P., Brandt, M., Fan, L., et al., 2021, « Carbon loss from forest degradation exceeds that from deforestation in the Brazilian Amazon », Nature Climate Change, vol. 11, n° 5, p. 442-448.

Rayner, P. J., Michalak, A. M., Chevallier, F., 2019, « Fundamentals of data assimilation applied to biogeochemistry », Atmospheric Chemistry and Physics, vol. 19, n° 22, p. 13911-13932.

Roelfsema, M., van Soest, H. L., Harmsen, M., van Vuuren, D. P., Bertram, C., den Elzen, M., et al., 2020, « Taking stock of national climate policies to evaluate implementation of the Paris Agreement », Nature Communications, vol. 11, n° 1, p. 2096.

Sherwin, E. D., Rutherford, J. S., Chen, Y., Aminfard, S., Kort, E. A., Jackson, R. B., et al., 2023, « Single-blind validation of space-based point-source detection and quantification of onshore methane emissions », Scientific Reports, vol. 13, n° 1, p. 3836.

Stephens, B., 2011, « Greenhouse gas emissions: how to manage what cannot be measured », Carbon Management, vol. 2, n° 1, p. 1-4.

Tans, P. P., 1997, « The Co2 Lifetime Concept Should Be Banished; An Editorial Comment », Climatic Change, vol. 37, n° 3, p. 487-490.

Tiemoko, T. D., Ramonet, M., Yoroba, F., Kouassi, K. B., Kouadio, K., Kazan, V., et al., 2021, « Analysis of the temporal variability of CO2, CH4 and CO concentrations at Lamto, West Africa », Tellus B: Chemical and Physical Meteorology, vol. 73, n° 1, p. 1-24.

UNEP, 2024, « International Methane Emissions Observatory (IMEO) », site internet de l’UNEP, https://www.unep.org/topics/energy/methane/international-methane-emissions-observatory.

Ville de Paris, 2020, « Bilan des émissions de gaz à effet de serre de Paris », En ligne : https://cdn.paris.fr/paris/2020/02/06/dc2edb10d13ae050815850f721f5a837.pdf.

WMO, 2023, « WMO Executive Council endorses global greenhouse gas monitoring plan », site internet de l’OMM, https://wmo.int/news/media-centre/wmo-executive-council-endorses-global-greenhouse-gas-monitoring-plan.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Figure 1. Illustration de l’observation des concentrations atmosphériques de CO2 par satellite
Légende Schéma illustrant le double trajet du rayonnement du soleil à travers l’atmosphère avant d’être perçu par un satellite. Le satellite mesure ici le spectre des luminances énergétiques reçues dans des intervalles de longueurs d’onde choisies. Ce spectre porte la marque des molécules de CO2 rencontrées le long du trajet lumineux et représentées sur le globe par une carte des concentrations moyennes de CO2 sur la verticale le 14 octobre 2021 à 21h, temps universel coordonné.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/espacepolitique/docannexe/image/12822/img-1.png
Fichier image/png, 799k
Titre Figure 2. Image de panache anthropique de CO2 générée à partir des mesures satellitaires
Légende Image de CO2 générée à partir des mesures de la mission OCO-3 le 30 juin 2021 (version des données : NASA ACOS v10.4), couvrant le panache d’une centrale électrique au charbon en Mongolie Intérieure (Chine). La flèche indique la direction du vent près de la surface dans la zone d’observation.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/espacepolitique/docannexe/image/12822/img-2.png
Fichier image/png, 165k
Titre Figure 3. Cartographie mondiale des concentrations de CO2 à partir des mesures satellitaires
Légende Observations de CO2 (en ppm) à travers le monde, générées à partir des mesures de la mission OCO-2 en juin 2021 (version des données : NASA ACOS v11.1).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/espacepolitique/docannexe/image/12822/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 951k
Titre Figure 4. Flux annuels de CO2 du secteur UTCATF pour dix grands signataires de la CCNUCC
Légende Flux annuels de CO2 du secteur UTCATF pour dix grands signataires de la CCNUCC estimés par les signataires eux-mêmes (disques verts) et par l’enveloppe d’incertitude à 1-σ des deux dernières inversions atmosphériques du service Copernicus (bleu pour l’inversion pilotée par les prélèvements d’air près de la surface et orange pour l’inversion pilotée par les données du satellite OCO-2). Les valeurs positives indiquent que le secteur UTCATF du signataire est une source de CO2 dans l’atmosphère.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/espacepolitique/docannexe/image/12822/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 587k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Grégoire Broquet et Frédéric Chevallier, « La surveillance des émissions anthropiques de CO2 depuis l’espace : un enjeu géopolitique émergent »L’Espace Politique [En ligne], 51-52 | 2023-3/2024-1, mis en ligne le 01 septembre 2024, consulté le 08 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/espacepolitique/12822 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12de3

Haut de page

Auteurs

Grégoire Broquet

Chercheur de l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) en sciences du climat et de l’environnement, Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, LSCE/IPSL, CEA-CNRS-UVSQ, Université Paris-Saclay
gregoire.broquet@lsce.ipsl.fr

Frédéric Chevallier

Directeur de recherche du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA), Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, LSCE/IPSL, CEA-CNRS-UVSQ, Université Paris-Saclay
frederic.chevallier@lsce.ipsl.fr

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search