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Dossier

Expérimenter les sciences : regards croisés sur Antoine-Laurent de Lavoisier

De la réception de son œuvre par le savant-minéralogiste Alexandre Brongniart à sa restitution par le chimiste-biographe Maurice Daumas
Experimenting with science : Cross-perspectives on Antoine-Laurent de Lavoisier. From the reception of his work by the scientist-mineralogist Alexandre Brongniart to its restitution by the chemist-biographer Maurice Daumas
Martine Mille

Résumés

Cet article porte la focale sur l’influence de Lavoisier sur les carrières respectives d’Alexandre Brongniart et de Maurice Daumas. Il s’agit de comprendre comment la méthode lavoisienne a influencé leurs parcours. Comment ont-ils appréhendé le travail savant et l’expérimentation en science et en technique : Brongniart, en qualité d’acteur, de savant et de décideur, Daumas en tant qu’historien également chimiste, qui sait l’importance de l’expérimentation en science ? Ainsi, relire leur manière de concevoir, de faire, dire, écrire la science, qu’ils ont promue tant au XIXe siècle qu’au XXe siècle, permet d’éclairer aussi bien le parcours d’Alexandre Brongniart que celui de Maurice Daumas. Nous poserons, dans un premier temps, les jalons biographiques des protagonistes, pour dans un second temps, préciser l’influence de Lavoisier sur leur parcours et enfin, aborder les moyens déployés de vivre, dire, diffuser et expérimenter la science (pure ou dédiée aux arts du feu).

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Texte intégral

1Peut-on évoquer de nos jours, a posteriori, un « Phénomène Daumas » à propos des « Journées Daumas » qui se sont tenues, réunissant la communauté historienne des techniques. Ainsi, le 16 avril 2016 était organisée par Laure Ciccione et Jean-Philippe Passaqui, sous la présidence d’Anne-Françoise Garçon, au Centre d’Histoire des techniques de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, la Master Classe « Maurice Daumas, entre histoire des techniques et archéologie industrielle1 Plus récemment, le 10 juin 2023, c’est dans ce lieu emblématique du Cnam et éminemment cohérent avec les thématiques de cette journée éponyme, que se tenait, dans l’Amphithéâtre Abbé Grégoire, la Journée d’étude Maurice Daumas (1910-1984) : historien, conservateur et muséologue des sciences et des techniques, organisée cette fois par Marie-Sophie Corcy pour le Musée des arts et métiers, en collaboration avec le Comité des Travaux Historiques et Scientifiques (CTHS). Les contemporains de Daumas au Centre de Documentation en Histoire des Techniques (CDHT) qu’il avait fondé en 1960 : Alexandre Herléa, Gérard Jigaudon ou Gérard Emptoz, des chercheurs reconnus, parmi lesquels Danielle Fauque, Marie-Sophie Corcy ou Lionel Dufaut, se succédaient.

  • 2 Danielle Fauque, « Maurice Daumas, de la biographie de Lavoisier à l’histoire des instruments scien (...)
  • 3 Je remercie vivement André Guillerme pour m’avoir parlé de cette contribution et Claudine Fontanon (...)

2Un hommage était rendu à ce personnage majeur de l’histoire des techniques, pilier du patrimoine industriel, reconnu au niveau international. La présentation par Danielle Fauque de l’historien de la chimie, en particulier sa lecture critique de ses ouvrages fondateurs sur Lavoisier, a permis de restituer Daumas, nous le rendant plus accessible2 Sans oublier la notice rédigée par André Guillerme, « Maurice Daumas (Bézier, 19 décembre 1910 - Paris, 18 mars 1984) », qui s’imposait comme une évidence, pour restituer la carrière du conservateur-professeur du Cnam. En effet, les trois volumes du Dictionnaire biographique des professeurs du Cnam (1945-1975) - œuvre au long cours, significative et importante pour l’histoire de l’institution - se sont attachés à rendre l’épaisseur des parcours des professeurs du Cnam, à partir des archives conservées in situ, en sollicitant nombre d’historiens des sciences et des techniques (Guillerme, à paraître)3 Cette contribution se situe dans cette lignée. Elle propose ici, cependant, comme un pas de côté, de s’attacher au parcours d’historien des sciences de Maurice Daumas, et cela en lien avec son travail de biographe de Lavoisier.

  • 4 Il s’agit de son travail de thèse d’État, sous la direction de Gaston Bachelard. Dès l’introduction (...)

3Il apparait pertinent en effet de porter la focale sur l’influence que Lavoisier et sa méthode dans les sciences ont eu sur le parcours de Brongniart au XIXe siècle puis de Daumas au XXe siècle. Comment ont-ils appréhendé le travail savant et l’expérimentation dans les sciences et les techniques ? Brongniart, en qualité d’acteur, de savant et de décideur ; Daumas en tant qu’historien également chimiste, qui sait l’importance de l’expérimentation dans les sciences, depuis son premier Lavoisier, paru en 1942, jusqu’à son Lavoisier théoricien et expérimentateur, étude argumentée et exigeante de Lavoisier parue en 19554 Dans cet article, nous portons un intérêt tout particulier à l’expérimentation dans les sciences et l’influence de Lavoisier – décrite par Daumas – sur les méthodes de travail de Brongniart. Cette « nouvelle religion » de l’époque (Adell, Lamy 2016) semble lier nos deux protagonistes, Daumas et Brongniart, au-delà des rapports chronologiques.

4L'approche des sciences tant par le savant minéralogiste Alexandre Brongniart (1770-1847), que par l'un des pères de l'histoire des techniques et de l'archéologie industrielle, Maurice Daumas (1910-1984), passe par l'expérimentation, la constitution de collections, le travail savant au quotidien, et par des sciences appliquées à la technique enfin. La biographie permet ici de comprendre leur formation de chimiste et de pharmacien comme l'une des clés d'entrée dans le parcours scientifique. Pour Brongniart, ce sera par une méthode de faire, de dire, d'écrire les sciences, fondant la paléontologie avec Cuvier, et en marquant de son empreinte significative des disciplines comme l'histoire naturelle, la minéralogie, la zoologie, la géologie ou les arts céramiques, avec le Traité élémentaire de minéralogie (1807) et le Traité des arts céramiques (1844). Pour Daumas, il s’agit d’écrire l'histoire de la chimie, via des biographies de savants (Lavoisier et Arago), et par une Histoire de la science (1957), où il restitue l’apport des disciplines - des sciences dures aux sciences de l’homme - en s’inscrivant par la suite, comme l’un des pères fondateurs du patrimoine industriel - avant de proposer l'Histoire générale des techniques (1977), toujours unanimement reconnue.

5Ainsi, relire leur restitution des sciences permet d’éclairer les parcours d’Alexandre Brongniart et de Maurice Daumas. Nous nous attacherons à la première partie de la carrière de Maurice Daumas, celle d’historien des sciences (1941-1955). Son parcours s’oriente ensuite vers l’histoire des techniques et le patrimoine industriel. Nous le confronterons à la méthode du travail savant, la « façon de Monsieur Brongniart », présenté, quant à lui, plus comme le minéralogiste et le chimiste que comme le directeur de la Manufacture de Porcelaine de Sèvres. Nous poserons, dans un premier temps, les jalons biographiques des protagonistes, Maurice Daumas et Alexandre Brongniart, par une méthodologie croisée, au-delà des temporalités biaisées pour, dans un second temps, préciser l’influence de Lavoisier sur leurs parcours. Il s’agira de comprendre l’apport méthodologique du savant, révélé avec les restitutions par Daumas de l’Acte chimique (1941) au Lavoisier théoricien-expérimentateur (1955). Le parcours savant de Brongniart, déclinant les méthodes de chimie Lavoisienne, mettant plus particulièrement en avant l’expérimentation dans les sciences.

De quelques jalons biographiques de Messieurs Daumas et Brongniart

Maurice Daumas (1910-1984)

  • 5 Maurice Daumas, originaire de Béziers, est issu d’une famille d’enseignants.
  • 6 AD Yvelines, 6U 468-4 : Les établissements Doitteau étaient une féculerie dès la fin du XIXe siècle (...)
  • 7 Créée le 17 novembre 1941 par Alexis Carrel, lié au Maréchal Pétain pendant la Première Guerre mond (...)

6Maurice Daumas est d’abord un chimiste. Sa carrière débute comme technicien de laboratoire, de 1935 à 1942, au laboratoire municipal de la Préfecture de Paris, après avoir obtenu une licence de chimie à la Sorbonne5 De 1942 à 1944, il rejoint le secteur privé, entrant au laboratoire de recherche de la Société Doitteau, à Corbeil6 On le retrouve en 1944 comme attaché à la Fondation pour l’étude des problèmes humains, qui deviendra par la suite l’Institut National d’Études démographiques (INED), dont les premiers chercheurs recrutés s’installent à Meudon, puis à l’Institut Rothschild (Herléa 2018/2019). De 1944 à 1947, Daumas, par ses fonctions au sein de la Fondation Alexis Carrel, puis à l'Institut National d'Études Démographiques, pendant et après la Seconde Guerre mondiale, en publie les travaux. Du fait de ses fonctions au secrétariat général, il ne peut ignorer les idées sujettes à caution, portées par ces institutions, eu égard aux théories développées par la Fondation Carrel, crée par le gouvernement de Vichy (et qu’il ne pouvait ignorer, même en qualité de collaborateur technique) (Drouard 1983)7 Cependant, à côté de cet emploi, Daumas continue à s’intéresser aux sciences et tire de cette période un « ouvrage érudit et militant », L'acte chimique : essai sur l'histoire de la philosophie chimique (Bruxelles 1945) » (Guillerme, à paraître). Il propose également des articles de vulgarisation et participe, avec Paul Angoulvent, à la création de la collection « Que sais-je ? » promise à un bel avenir aux Presses universitaires de France. Il y publie, en 1941, Les matières plastiques.

  • 8 Archives Cnam, dossier M. Daumas, « Lettre du Conservateur pour la titularisation », 24 janvier 194 (...)

7Il entre par la petite porte au Cnam, en 1947, comme ces « auditeurs-visiteurs du soir » qui souhaitent progresser en mécanique, « jusqu'à l'obtention d'un diplôme d'ingénieur-mécanicien et si possible d'électricien8 ». Après avoir fréquenté assidument les cours de Gaston Bachelard au Collège de France pendant la guerre, il se lance sous sa direction dans une thèse d’État en philosophie. Soutenue en 1952, la thèse principale sur Les instruments scientifiques aux XVIIe et XVIIIe siècle documente les pratiques et les ateliers de construction française voire européenne, tout comme la diffusion des appareils scientifiques. Sa thèse complémentaire livre une biographie : Lavoisier, théoricien et expérimentateur, grâce à l’étude des collections de Lavoisier, conservées au Musée des arts et métiers. Le dépouillement et le catalogage sont d’autant plus facilités qu’il y est conservateur, adjoint d’abord en 1947, puis conservateur en chef, jusqu’à sa retraite en 1960. Nous en tirerons profit pour illustrer la deuxième partie de cette contribution.

  • 9 Les Documents pour l’histoire des techniques complètent le dispositif forgé par Daumas au Cnam. Il (...)

8Sa carrière au Cnam continue avec succès : il fonde en 1960 le Centre de documentation d’histoire des techniques (CDHT) qu’il dirige jusqu’à sa retraite en 1976 ; une chaire d’histoire des techniques est créée pour lui, en 1969, au Cnam, à Paris9 Durant cette période, il forgea la somme majeure pour cette discipline que constitue l’Histoire Générale des Techniques [1962-1979], à partir des sources du CDHT, des collections du Musée des arts et métiers. Cependant, l’histoire des sciences demeure parmi ses centres d’intérêt, avec la publication d’ouvrages sur les instruments scientifiques (1951 et 1953), livrant l’Histoire de la science éditée dans la prestigieuse collection de l’Encyclopédie de la Pléiade (Daumas 1957) :

« Cet ouvrage collectif dont il a la responsabilité et dont il rédige le tiers, permet aux sciences d'accéder à la catégorie “culture”. Il reconnaît, balise et étoffe le champ épistémique, privilégie les scientifiques français dans des disciplines particulières - mathématiques, astronomie, géologie, biologie - mais présente enfin les sciences de l'homme - démographie, sociologie, ethnologie - pour les mettre au même niveau que les sciences physiques » (Guillerme, à paraître).

  • 10 Son Histoire générale des techniques en cinq volumes, parue aux PUF, rend les techniques accessible (...)

9Si ses missions de conservateur au Musée des arts et métiers lui ont permis d’orienter ses travaux en histoire des sciences vers l’étude des instruments scientifiques, c’est vers l’histoires des techniques (et par la suite l’archéologie industrielle) que les recherches de Maurice Daumas vont finalement s’orienter, confirmant ainsi que les disciplines-sœurs pouvaient se rejoindre au cours d’une carrière prolifique (Daumas 1980)10

Alexandre Brongniart (1770-1847)

  • 11 Sa mère, Anne-Louise Degrémont (1744-1829), tient boutique de lingerie quartier de la Trinité. Son (...)
  • 12 Les Brongniart se lancent en affaire avec l’entrepreneur Le Tellier, achetant des terrains et les l (...)

10Précisons maintenant le parcours d’Alexandre Brongniart. Avant de devenir le savant minéralogiste et académicien, qui s’est illustré dans nombre de disciplines comme la géologie, la botanique, la chimie, l’histoire naturelle et les arts du feu, c’est d’abord un fils de la boutique parisienne11 L’architecte Brongniart, son père, mène une belle carrière, livrant à Paris de beaux hôtels particuliers aristocratiques néo-classiques (avant la Révolution), la Bourse de Commerce ou le Père Lachaise (sous l’Empire)12 Il est nommé en 1782 contrôleur des bâtiments de l'École militaire et architecte des Invalides, fonction prestigieuse qui assure la fortune du couple, logé à l'hôtel des Invalides : une position enviée parmi les élites parisiennes avant la Révolution. Elisabeth Vigée-Lebrun, Houdon, Hubert Robert, aussi bien que Parmentier ou Lavoisier se côtoient chez les Brongniart.

  • 13 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3357, Journal de voyage aux Pyrénées, n° 2 - germi (...)
  • 14 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3358, Journaux sédentaires et agenda.

11Après des études de médecine, et grâce à la solide formation en chimie reçue au Jardin du Roi où son oncle Antoine-Louis Brongniart (1742-1804) est préparateur de chimie, Alexandre est formé en 1786 à la première École des mines, celle de Balthazar Sage (Thépot 1998 : 73 ; Garçon 2012 : 148). On y enseignait aux futurs ingénieurs la minéralogie, la chimie et la docimasie (Fonteneau 2016 : 354), leur permettant l’accès à l’administration comme inspecteur du gouvernement (Garçon 2004 : 32 ; Laboulais 2012). Acquis aux idées libérales, Alexandre sera, à la Révolution, versé comme élève-infirmier dans l’Armée des Pyrénées, où les merveilles de la Nature le laissent sans voix, en particulier le Cirque de Gavarnie13 Ses journaux de voyage nous le montrent herborisant, toujours à la recherche de minéraux ou d’insectes, qu’il envoie, soigneusement classés et étiquetés, chez ses parents14

12Alexandre a eu une belle carrière de minéralogiste : il est élu en 1796 à la Chaire de minéralogie au Muséum, puis en 1815 à l’Académie des sciences à la section de minéralogie et, en 1822, à la Chaire de minéralogie générale (fig.1). Son parcours est également celui d’un des personnages incontournables de la construction des sciences au XIXe siècle, par ses positions, sa carrière dans des disciplines majeures, mais également dans sa manière de concevoir les sciences mises à disposition des confrères par la sociabilité savante, déployée tant dans les lieux de science qu’en son for privé (Mille 2021).

Fig. 1. Portrait d’Alexandre Brongniart

Fig. 1. Portrait d’Alexandre Brongniart

Cette lithographie de Brongniart date de 1832, au moment de son élection à la présidence de la Société Géologique de France, récompensant à 63 ans le long parcours de minéralogiste et géologue de l’ingénieur en chef des mines également administrateur de la manufacture de porcelaine de Sèvres. Elle le montre en tenue de ville et non pas en tenue d’académicien comme lorsqu’il est souvent portraituré en tant qu’administrateur de la Manufacture de porcelaine de Sèvres.

Source : Lithographie de Delpech par Maurier, 1833. Dossier biographique Brongniart, Académie des sciences.

  • 15 AN F 14 2716, Lettre Brongniart 3 avril 1810 au Conseil des Mines : « « toujours utile à l’art des (...)

13Il connait également une carrière d’ingénieur des Mines longue de plus de quarante ans (Moatti 2012). En 1794, il est nommé ingénieur des Mines par le Comité de salut public, par l’entremise de son cousin Fourcroy et de Berthollet. En 1800, toujours grâce à ses soutiens, le voilà administrateur de la Manufacture Impériale de Porcelaine de Sèvres (pour quelque quarante années). En 1818, il est promu ingénieur en chef des Mines, et, en 1828, ingénieur en chef des Mines sédentaire de 1re classe. En 1834, il demande son maintien dans le Corps pour ses travaux en géologie avec Cuvier (Laboulais 2012). C’est d’ailleurs en qualité d’ingénieur des Mines qu’il revendique sa longue carrière à la tête de la manufacture de Sèvres, en particulier par sa solide formation de chimiste. On pourrait dire qu’il est à Sèvres par « délégation de service public, détaché du Corps des mines »15

Temporalités biaisées et méthodologie croisée : le moment-Lavoisier

  • 16 Depuis Daumas, de nombreux travaux historiens ont jalonné la recherche sur Lavoisier. Signalons ain (...)

14Dans ce deuxième temps de notre contribution, nous prenons appui sur ses travaux sur Lavoisier, cela même si nous n’ignorons pas que le champ de recherche sur ce savant et son apport à l’histoire des sciences s’est depuis lors développé16 Ce dossier thématique nous offre en effet une opportunité méthodologique : celle de lier le genre biographique en histoire des sciences et des techniques à une temporalité qui ferait volontairement fi d’une linéarité admise. Il s’agira ici de casser une temporalité pseudo-linéaire, de faire se confronter certaines réalités à deux parcours scientifiques, celui d’Alexandre Brongniart, précoce disciple du père fondateur de la « nouvelle chimie » et celui de Maurice Daumas, lui-même chimiste de formation et initialement biographe de Lavoisier, a priori chronologiquement bien éloignés. Cependant, en confrontant ces parcours, on comprend l’influence et l’aura qu’aura exercé sur eux un Antoine-Laurent de Lavoisier depuis longtemps érigé en pilier de l’histoire des sciences. Cela permet de revisiter le parcours des deux chimistes.

15C’est pourquoi nous emprunterons à la linguistique le concept d’empan chronologique : il permet de mettre en évidence de grandes évolutions, repérant également certains moments particuliers qui ont influé le parcours - même a minima - des protagonistes (Abouda et Skrovec 2022). Grâce à l’empan chronologique, si les regards croisés d’un contemporain et d’un historien des sciences apparaissent nécessairement disruptifs, leurs apports respectifs peuvent être alors discutés sans craindre les dangers de l’anachronisme. Néanmoins, nous n’occultons pas les écueils de ce raisonnement : en effet, ni Brongniart, ni Daumas n’ont eu la même perception du « Moment-Lavoisier » de l’histoire des sciences.

16D’ailleurs, même si Lavoisier lui-même nous semblait fermement persuadé de participer de manière significative à l’évolution de la science, aurait-il pu saisir ses engagements savants comme « un « moment » ? Fut-il ainsi perçu par ses contemporains ? Avait-il conscience de faire partie d’une histoire « en train de se faire » (Adell, Lamy 2016 ; Beretta, Brenni 2022) ? L’empan chronologique propose ici une entrée, une clé de lecture. Nous ne pouvons nier l’impact de ces éléments temporels associés. Cependant, cela nous permet de restituer certaines dynamiques à l’œuvre mais aussi de comprendre le contexte d’élaboration des notions et des disciplines abordées.

Daumas, historien de Lavoisier

  • 17 Cette procédure permet aux savants ou inventeurs de déposer le résultat d’une recherche, sous forme (...)

17Avec Lavoisier Théoricien et expérimentateur, Daumas se place délibérément dans un mouvement de renouveau des études sur Lavoisier, en prenant en compte les influences sociales exercées sur les savants. Il livre une chronologie de l’activité scientifique de Lavoisier, précisant le déroulement des périodes d’activités du savant (Daumas 1955 : 3), grâce, en particulier, aux registres de laboratoire et aux plis cachetés, ouverts depuis, conservés à l’Académie des Sciences (Carosella 2020)17 :

« Il nous a paru intéressant de rechercher, avec plus de détail [..], comment il utilisa et adapta d’une part les techniques de l’expérimentation, d’autre part, les conceptions générales de la science de son temps ». (Daumas 1955 : 4).

18L’art d’expérimentateur de Lavoisier est ainsi mis en exergue par Daumas : l’habileté avec laquelle il effectuait ses manipulations, son métier d’opérateur, la méthode qui dirigeait son action, insistant sur la beauté des démonstrations, comme lorsqu’il décompose l’acide nitrique par le mercure, en un schéma parfait (Daumas 1955 : 129). Lavoisier, qui conçoit les expériences, procède à un enchaînement de manipulations, qui précisent les savoir-faire du chimiste au laboratoire, le soin apporté tout comme les gestes prompts et efficaces :

« Pour réussir la plupart des expériences qu’il eut à exécuter, il fallait au chimiste une sûreté de main et de coup d’œil sans défaillance. Il [Ndrl : Lavoisier] a souvent insisté lui-même sur plusieurs difficultés et sur la nécessité d’une sorte d’entrainement dans l’exécution de certains gestes » (Daumas 1955 : 130).

19Daumas donne ensuite l’exemple du mémoire sur la combustion des chandelles, expérience au cours de laquelle Lavoisier introduit une bougie allumée dans une cloche :

« Introduire la bougie, achever de plonger la cloche et la redresser, doit être l’affaire d’un clin d’œil, et il faut de nécessité recommencer jusqu’à ce qu’on soit arrivé au degré de prestesse nécessaire pour que toutes ces opérations soient faites en un instant presque indivisible. » (Daumas 1955 : 130).

20Se référant au mémoire sur la respiration des animaux, au cours de laquelle Lavoisier installait un cobaye sous cloche, Daumas précise le geste prompt pour introduire un petit animal d’expérience sous la cloche :

« dès qu’il était dans la cloche, nous le soulevions dans l’air qu’elle contenait à l’aide d’une espèce de sébille en bois, montée sur trois pieds et recouverte de toile de crin. La sébille était passée à travers l’eau : il fallait en vider l’eau avec un siphon, puis placer l’alcali au moyen d’un entonnoir adapté à un tube recourbé ». (Daumas 1955 : 130). 

21Lavoisier de conclure [en toute simplicité, pourrait-on ajouter] :

« Ces opérations se font avec facilité quand on y est habitué ».

Point d’orgue : le parcours de Lavoisier dans les sciences (1743-1794)

22Présentons maintenant Antoine-Laurent de Lavoisier. Son parcours dans les sciences commence par un goût immodéré pour les merveilles de la Nature et par l’herborisation :

  • 18 Cette somme éditée en 2022 est majeure pour le champ de recherche sur Lavoisier ; l’un des auteurs, (...)

« In the early 1760s, Lavoisier became acquainted with the botanist and mineralogist Jean-Etienne Guettard, and as early as 1763 he followed him on his mineralogical excursions at Villers-Cotterets. On these excursions Lavoisier collected mineral specimens and wrote two mémoires on natural history. In 1763 he also joined the botanist Bernard de Jussieu « dans ses herborisations » (Berretta, Brenni 2022 : 19)18 

23Lavoisier assiste Jean-Étienne Guettard, de l'Académie des sciences, dans l'élaboration de l'Atlas minéralogique de la France [1766-1780]. Parrainé par Henri Louis Duhamel du Monceau, grand ami de son père, Lavoisier est élu membre de l’Académie des sciences le 18 mai 1768 et siège au Louvre à l’âge de vingt-quatre ans. Précoce, il présente un premier rapport sur la physiologie de la respiration devant l'Académie des sciences en 1777.

24On connait son parcours : il pose les fondements de la chimie moderne, avec ses travaux sur la combustion, l’air, l’eau, bouleversant ainsi, en 1770, le monde de la chimie, en remettant en cause la théorie admise du phlogistique. En 1789, il livre le Traité élémentaire de chimie, deux ans seulement après avoir proposé, avec Berthollet, Hassenfratz, Guyton de Morveau et Fourcroy, les révolutionnaires Éléments de la nomenclature chimique…, autant de jalons qui ressortent comme une véritable révolution de cette discipline (Bensaude-Vincent 1993). La chimie était une science d’observation fort avancée comme le démontra en 1789 la nomenclature chimique, « présentant un tableau ramassé et harmonieux des corps simples et de tous leurs composés identifiés » (Daumas 1955 : 114).

25Lavoisier, même s’il est reconnu pour son rôle majeur en histoire des sciences, était également un homme politique, très lié à l’Ancien Régime. En effet, il acquiert, à 26 ans, la charge de fermier général en charge de la collecte des impôts [1768-1791] et celle de Régisseur des Poudres [1775-1792], charge où il impulse de nouvelles méthodes de fabrication du salpêtre (liant ainsi la chimie à ce secteur d’activité essentiel à la défense du pays) (Bret 2002). Ce sont d’ailleurs ces fonctions, et non pas son parcours de savant, qui devaient le conduire à l’échafaud en 1794 – bien que nombre de savants se soient mobilisés pour épargner sa vie. Il était également acquis au mouvement physiocrate:

  • 19 « Lavoisier s’engagea activement dans la réforme de l’agriculture : [dans] la propriété dont il hér (...)

“Lavoisier actively engaged in the reform of agriculture : [in] the property he inherited at Bourget for agricultural experiments, adopted as the laboratory for the Comité d’administration d’agriculture […], at Fréchines, between Blois and Vendôme, where he conducted large-scale experiments in different branches of agriculture” (Berretta et Brenni 2022 : 50)19

L’influence de Lavoisier sur Alexandre Brongniart : de son parcours savant à la méthode du savant

26C’est quand on aborde l’expérimentation dans les sciences que l’approche croisée, développée ici, s’avère saisissante de la « méthode du savant », de cette « façon de Monsieur Brongniart », et qui n’a rien à renier à son illustre prédécesseur Monsieur de Lavoisier (Mille 2018 : 78-84). Cette pratique est celle qui, de collecte en identification, d’essais en échecs, de notes prises sur sites ou en laboratoires, de rapports en leçons dévoilés en traités, véritables synthèses, nomenclatures et classifications comprises, de validation par l’expérience et de retour vers le terrain, permet au travail savant de progresser vers des buts avoués qui, bien souvent, dépassent leurs auteurs et manipulateurs (Mille 2018 : 78-84). Il s’agit d’un long cheminement dans la pratique des sciences au quotidien qui revient inexorablement vers le terrain (Brongniart 1807 et 1844).

  • 20 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3357, Journal de voyage aux Pyrénées, n° 2 - germi (...)
  • 21 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3358, journal 13, 20 prairial an 8 : « Je vais ave (...)

27Comment devient-on savant en cette fin de XVIIIe siècle ? Dans le cas du jeune Brongniart, ingénieur des Mines en devenir, c’est d’abord par goût des choses de la Nature : ses collectes d’insectes, de roches envahissent sa chambre au grand désarroi de sa mère20 On retrouve également dans le parcours du père de la chimie moderne le même éveil à la nature, par les promenades et les herborisations que relatent leurs journaux. En effet, c’est très jeune que Brongniart se frotte à la matière et au règne animal, à la chimie ensuite. Sa mère se plaint de sa chambre, qui héberge les insectes rapportés de balades avant d’être épinglés sous cloche et étudiés. Les carnets sédentaires du jeune Alexandre portent la trace de sorties où nul insecte ne vient se prendre dans ses filets21 Jeune élève ingénieur des Mines, il crapahute le long des falaises normandes pour détacher telle roche, qui sera ensuite passée au tamis, calcinée dans son laboratoire : autant de manipulations répétées, qu’on retrouve chez le jeune Lavoisier et qui apparaissent comme une des qualités nécessaires aux « apprentis » chimistes du XVIIIe siècle.

  • 22 Ce chimiste réputé sera nommé professeur à la chaire des Arts chimiques au lycée républicain en 179 (...)

28D’ailleurs, le tout jeune Alexandre rencontre Lavoisier : dans son premier « laboratoire », celui que son père lui a installé sous les toits, il donne une leçon de chimie lavoisienne… devant son illustre auteur ! Il est bien évidemment félicité et encouragé avec chaleur par cet ami de son cousin Antoine-François Fourcroy (1755-1809), apôtre de la chimie lavoisienne, et qui est également l’un des initiateurs de la nomenclature chimique en 1787. L’anecdote est belle et participe d’une légende épigraphique livrée plus tard par son gendre, Jean-Baptiste Dumas. Déjà, le terreau était propice pourrait-on ajouter, puisqu’Alexandre est formé à la chimie par son oncle Antoine-Louis Brongniart (1742-1804), démonstrateur de chimie au Collège de pharmacie de Paris [1777-1790], premier apothicaire du roi Louis XVI [1779-1790], avant de devenir démonstrateur au Jardin du Roi en 177922

Des pratiques d’expérimentation en sciences à la méthode du savant

29Comment Brongniart et Daumas ont-ils appréhendé le travail savant et l’expérimentation en science et en technique : Brongniart, en qualité d’acteur, de savant et de décideur, Daumas en tant qu’historien également chimiste, qui sait l’importance de l’expérimentation en science ?

30Le geste du chimiste dédié ici aux sciences se dessine. Les outils peuvent être aussi bien rudimentaires, aussi simples par leur préhension que le piolet de l’ingénieur des Mines (Sennett, 2010), usuels comme ces casiers de tris, de transport des roches, jusqu’à devenir – comme la berline de Monsieur Brongniart, aménagée par maintes poches pour les roches ou spécimens (Bernasconi 2015) – symboliques de leur participation à une « science en train de se faire », ou comme les précieux instruments scientifiques du laboratoire de Lavoisier, divulgués aux amateurs et curieux dans les collections du Musée des arts et métiers (Adell, Lamy 2016).

Quel cheminement épistémologique et méthodologique ?

31Pour notre étude, nous confronterons la méthode lavoisienne fondée sur l’expérimentation et la reproductibilité des expériences validant la théorie, que Daumas précise dans l’Acte Chimique, à celle de Brongniart, dans sa pratique de chimiste et de minéralogiste, par exemple à Sèvres, dans les expériences de chimie appliquée aux arts du feu, testant lui-même la fiabilité des formules des pâtes, ou la qualité des couvertes des poteries communes (Enquête des Préfets, 1805-1810, dans Dubus & Pannequin 1999 ; Mille 2018). Une expérimentation dans les sciences qu’il applique et connait par sa formation tant d’apothicaire et de chimiste que d’ingénieur des Mines : tout concoure ici à préciser avec cohérence l’apport de l’expérimentation dans les sciences.

32D’ailleurs, Daumas ne s’y est pas trompé. Il perçoit cette méthode – qui part, certes, d’un état des lieux empirique – comme pertinente pour aider à poser des théories, comme celle de la respiration par Lavoisier en 1777 devant l’Académie des Sciences. Pour Brongniart, ce seront des formules de pâtes fixées et restituées dans le Traité des arts Céramiques (1844). C’est tout un cheminement, tant pratique qu’intellectuel, qui ressort de l’épistémologie des sciences que retrace Daumas. Nous tenterons de comprendre comment Alexandre Brongniart, inspiré par l’aura lavoisienne, participe, également dans ses fonctions sévriennes, de cette mythologie positiviste des Sciences.

33Nous pensons pouvoir trouver dans cette approche un intérêt épistémologique et méthodologique. En effet, nous aborderons, à travers ces savants et historiens des sciences, des fondements et des méthodes de la connaissance scientifique, avec la production et la validation de connaissances scientifiques, qui sont des objets d’étude en soi. Ainsi, nous nous référerons à certaines des avancées majeures d’Alexandre Brongniart, qui ressortent de la construction scientifique au XIXe siècle. Abordées grâce à certains exemples documentés de son parcours de minéralogiste, par quelques « circonstances » temporelles, elles apparaissent comme participant à la construction scientifique dans la géologie comme discipline (Mille et Fernandez 2021).

34Par sa production scientifique, fondant certaines sciences dont les acquis sont toujours perceptibles - Carte Géognostique du Bassin de Paris (1811-1822) ou Coupe théorique de divers terrains, roches et minéraux, qui entrent dans la composition du sol du Bassin de Paris (1832) - Brongniart participe à la transmission des savoirs et en construit le discours. C’est dans ce sens qu’il nous propose une vision épistémologique des sciences. Nous nous situons dans une approche locale de l’épistémologie : en se focalisant sur la science chimique, géologique, technique ou céramique, les protagonistes cherchent à caractériser l’objet de science étudié : en analysant et en discutant les hypothèses fondamentales tout comme en évaluant, selon la méthode Lavoisienne, le degré de fiabilité des résultats au prix d’expériences.

35Déjà, en 1946, Daumas précisait qu’au XVIIIe siècle, n’importe qui ne pouvait devenir chimiste. Cependant, les chimistes n’étaient nullement des amateurs : « Il ne faudrait pas tenir pour des manipulateurs maladroits qui pratiquaient un art rudimentaire. Les hommes de ce temps étaient au contraire ; très habiles ; leur adresse, la finesse de leurs opérations étonnent toujours lorsqu’on relit leurs descriptions » (Daumas 1946 : 41). Il ajoute :

« N’importe qui, alors, ne pouvait devenir chimiste, même en étudiant. Il fallait une certaine habileté manuelle qui n’est même plus nécessaire maintenant que tout appareil peut être commandé à un fabricant spécialisé. Le chimiste devait être artisan en fer et en bois, verrier, connaître des tours de mains pour luter une allonge, chauffer modérément une cornue, se servir du chalumeau, des pinces, du marteau. Avant toute expérience, il avait à préparer lui-même ses produits, à les purifier, à les obtenir cristallisés ou anhydres suivant les besoins, à redistiller ses liqueurs. Il préparait ses acides, ses sels, ses métaux, ses luts, son charbon. Il allumait et entretenait ses foyers. Le métier de chimiste était sale, fatiguant. Et l’on relève plusieurs plaintes arrachées alors à la plume de quelques chimistes sur leur état ; noircis, brûlés en été, gelés en hiver, exposés aux vapeurs, aux déflagrations ; obligés de veiller de longues heures sur leurs vaisseaux, les chimistes sont représentés comme des hommes sans cesse en haleine, toujours déçus, dépités et transis, de surcroît en butte à l’hostilité de leur entourage ». (Daumas 1946 : 41-42).

36Selon Daumas, il est cohérent d’étudier la technique d’expérimentateur de Lavoisier et les moyens matériels simples ou élaborés comme ceux qu’il promeut par la construction d’instruments scientifiques pour exécuter ses travaux (Daumas 1955 : 113). Il réalise des opérations de cristallisation et distillations, malgré un matériel « rudimentaire » ; Daumas nous fait entrer dans le laboratoire. Il nous laisse entrevoir, comme par-dessus son épaule, les gestes techniques du chimiste : nous entrons alors dans cette arrière-cuisine de la chimie. La description par Daumas ressort bien du concept de « régime pratique de la pensée opératoire » et comme de celui « régime technique de la pensée opératoire » (Garçon 2012 : 25-27).

Où l’influence de Lavoisier se découvre dans la « façon » de l’ingénieur des Mines et de minéralogiste de Brongniart

« Lavoisier introduisait deux grandes méthodes dans la recherche chimique : l’expérimentation rigoureuse, la déduction logique […]. Elles le conduisirent à interpréter les faits, à construire son système nouveau et à vérifier par l’expérience que ce système répondait à la réalité. Une telle démarche de raisonnement n’avait jamais été appliquée en chimie avant lui » (Daumas 1946 : 56).

  • 23 Lavoisier donne la liste d’ustensiles, tome V, Œuvres.

37La méthode de Lavoisier consistait à peser précisément les corps avant la réaction, à peser les éléments qui en résultaient et pouvoir reconstituer exactement le corps du départ, avec les éléments issus de l’analyse. L’expérimentation passe d’abord par le matériel et donc un appareillage conséquent23 Lavoisier disposait de ressources financières de par sa position à la Ferme Générale. Lors de l’inventaire en 1793, on dénombre 5 000 à 6 000 pièces de verrerie et de poterie (cornues, creusets, cucurbites, entonnoirs, bocaux, capsules) (Daumas 1955 : 116). Daumas précise l’importance des pharmaciens, chez qui les chimistes se procuraient les produits nécessaires aux expériences de chimie, 

« moins courants, […] des sels, des sulfures, des composés d’antimoine, d’arsenic, le phosphore, s’achetaient comme l’oxyde rouge de mercure » (Daumas 1955 : 115).

38Notons ici que Brongniart est issu, quant à lui, d’une lignée de pharmaciens, établis rue de le Harpe. Selon le biographe de Lavoisier,

« la chimie avait fait jusqu’à cette époque un grand usage du feu pour calciner, distiller, macérer, évaporer. […] une partie de l’art du chimiste consistait à savoir gérer le feu du fourneau suivant les besoins de l’expérience en cours (Daumas 1955 : 120).

« Les verres ardents constituaient des instruments de chauffage d’une utilisation commode et très souple […] permettaient de calciner des substances sous des cloches, dans des enceintes fermées et de voir les phénomènes d’absorption ou de dégagement de gaz se produire (Daumas 1955 : 122).

39La méthode du savant Brongniart semble se construire en miroir de celle de Lavoisier, quand on lit les transcriptions de ses campagnes de terrain tout comme les enseignements dispensés ou les traités qu’il publie. Ce parcours ressort, tout comme Lavoisier, d’une pratique élitaire de la science : comme académicien reconnu et du fait de ses responsabilités à la tête d’un établissement industriel d’État. Des parallèles s’imposent ici. Ils sont caractéristiques des parcours académiques construits de ces « touche-à-tout » de la science au tournant des XVIIIe et XIXe siècles. C’est en consultant ses journaux de voyage et ses carnets de laboratoire qu’on perçoit que Brongniart a intégré la méthode lavoisienne et cette pratique exigeante dans les sciences : celle de la reproductibilité de l’acte scientifique, puis de la réplication industrielle (à Sèvres par exemple).

  • 24 Bibliothèque de l’Institut de France, MS 2849-2852, An IX-1842, « Essais céramiques, registre 3, Es (...)

40Le principe de reproductibilité, constitutif de la chimie moderne, se retrouve dans les carnets de laboratoire conservés à l’Institut de France, et qui portent traces des essais24 En parfait chimiste, émule de Lavoisier, Brongniart fait aussi l’expérience du feu. Le Traité des arts céramiques en fait état : la conduite du feu (vol. II : 225), le jugement du feu (vol II : 671), sans oublier ni le four pour la cuisson des pates céramiques (vol. I : 186), ni la cuisson à Sèvres (vol. II : 295-298). Cette influence se retrouve, de même, quand Brongniart analyse les effets du plomb dans les couvertes de produits de ménage - la céramique commune : la chimie lavoisienne est convoquée pour comprendre les compositions, la transformation des matières, la combustion si essentielle aux arts du feu avec l’Enquête des Préfets, (1805-1810), (Dubus, Pannequin 1999 ; Mille 2018).

41Après avoir précisé par l’exemple de la conduite du feu dans le domaine de la céramique les pratiques de chimie appliquées aux arts, prenons comme autre exemple le domaine des sciences dures, de la minéralogie, cela afin de saisir la méthode du savant Brongniart. Ainsi, en 1813, dans le Cours de géognosie à la Faculté de Paris, Brongniart propose un essai de classification des terrains. Notons que cette étape intervient entre deux éditions des Essais de géologie minéralogique de 1811 et 1822 et avant la publication du Tableau des terrains composant l’écorce du Globe (1829). Prises par Omalius d’Halloy, les notes de ce cours de Brongniart, qu’il n’avait pas jugé suffisamment vérifiées pour être publiées, permettent de retrouver ainsi une des étapes intermédiaires de la stratigraphie. Cette classification de 1813 apparait comme une étape de travail non publiée.

Fig.2. Alexandre Brongniart, « Escarpement à Coulommiers », Juillet 1819

Fig.2. Alexandre Brongniart, « Escarpement à Coulommiers », Juillet 1819

Ce croquis préparatoire de Brongniart placé en fin de son journal de voyage, après ses prises de notes sur les lieux, donne à voir le travail de transcription des visites sur site. Il aura été dressé sur site, revu par Brongniart rentré dans sa chambre le soir, modifié sur site en plusieurs fois, voire ensuite dans son cabinet de travail à Paris. On remarque la précision qui, déjà, en émane : ce n’est pas un simple dessin mais le résultat d’une progression matérielle et intellectuelle de restitution graphique…, ébauche d’une carte en coupe qui sera amendée, précisée et colorée, et remise enfin au graveur avant édition en 1832. On visualise ainsi la maturation du travail scientifique, depuis les visites sur site avec prises de notes, les vérifications par rapport aux données déjà récoltées et aux échantillons identifiés et catalogués, le travail en atelier pour les compiler et les comparer, avant un retour sur site avec d’éventuelles collectes de spécimens complémentaires pour validation des éléments mis ainsi en corrélation.

Source : Muséum national d’histoire naturelle, Paris, BCMNHN, Ms 2350-10, feuillet 6, journal de voyage, Juillet 1819.

  • 25 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHN, MS 2350, Alexandre Brongniart, Journal, Voyage à Coul (...)

42Après retour sur le terrain – y compris avec un croquis du site de Coulommiers de 1819 (fig.2)25, il précise, en 1829, la subdivision des terrains tertiaires dans le Tableau des terrains (1832) (fig. 3). On assiste donc bien à une science « en train de se faire », avec ses repentirs, ses essais, ses pas de côté, ses confirmations, où le savant forge ses outils, en revenant toujours vers le terrain (Mille, Fernandez 2021 : 58-61).

Fig.3. Coupe théorique de divers terrains, roches et minéraux, qui entrent dans la composition du sol du Bassin de Paris. par MM. Georges Cuvier et Alexandre Brongniart, 1832

Fig.3. Coupe théorique de divers terrains, roches et minéraux, qui entrent dans la composition du sol du Bassin de Paris. par MM. Georges Cuvier et Alexandre Brongniart, 1832

Cette coupe théorique fruit des travaux de Cuvier et Brongniart sur les alentours du Bassin de Paris, est éditée en 1832, et intervient au moment de son élection à la présidence de la Société Géologique de France. Peu avant, en 1829, était paru le Tableau des terrains qui composent l’écorce du globe, qui proposait déjà une terminologie complexe selon la communauté scientifique. Cette version de 1832, établie en lien avec les Cartes géognostiques et stratigraphiques du Bassin de Paris, dressées avec Cuvier (1812, 1822, puis 1835), jetait les bases de la cartographie géologique moderne. Elle fonde également la paléontologie stratigraphique française avec la subdivision des terrains tertiaires.

Source : Muséum national d’histoire naturelle, Paris

  • 26 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHN, MS 3357, Alexandre Brongniart, Journal Paris Londres (...)

43Brongniart conçoit bien l’acte scientifique, à la manière de Lavoisier : il s’agit d’une science garante de vérité temporelle et d’objectivité. Une légitimité en découle qui s’acquiert, en participant de la construction de ce qui est admis comme « scientifique » (Adell, Lamy 2016). On est bien là dans une science qui se construit, avec cette quête de résultats prouvés, par la reproductibilité : de collectes sur le terrain, du travail sur paillasse au travail de déduction, de campagnes d’essais et d’échecs à la diffusion de résultats lors d’enseignement ou par des traités ; résultats validés par des articles, vus comme autant de points d’étapes, avant de retourner sur le terrain pour vérification des données recueillies26

Épilogue : Modernita et posteritas

  • 27 La notion de « modernité » est, au départ, fondée sur une historicité de l’art par Baudelaire en 18 (...)

44Alexandre Brongniart a-t-il jamais été « moderne » (Latour 1991) ? Telle est la question que l’on peut se poser. Se rendant utile à la communauté par des jalons aussi importants que la stratigraphie en géologie ou le classement des arts céramiques, Alexandre Brongniart avait-il conscience de participer d’une « modernité » (Charles 2011 : 18) ? Nous pouvons tenter de saisir comment, en contemporain et en acteur des sciences, il a pensé son rapport à la modernité, au présent comme au passé27. Comment s’est-il projeté dans l’avenir et comment, avec ses travaux touchant à de nombreuses disciplines, a-t-il abordé l’idée de progrès, d’expérimentation et de diffusion des savoirs scientifiques et techniques ? Pouvons-nous placer les travaux de Brongniart sous le sceau de la « modernité », notion mise en exergue au second XIXe siècle ? Cela semble cohérent (Charles 2011 : 26) : le décalage dans le temps entre l’emploi baudelairien du terme et la réalité est normal, caractérisant ainsi des évènements postérieurs. Au moins jusqu’en 1845, Brongniart, assistant aux grands bouleversements techniques qui assurent la maîtrise accrue du temps et de l’espace, a participé de la « modernité classique » (Charles 2011 : 31).

45Nous venons de revisiter ces parcours savants et représenter, par quelques exemples choisis, les apports aux sciences des traités et autres leçons de Brongniart ou de Daumas, en n’oubliant pas que chacun s’est impliqué à sa manière par une carrière académique significative dans les sciences et les techniques. On ne peut prétendre que Daumas a été un savant, mais sa formation de chimiste lui a permis, tout comme ses fonctions au Musée des arts et métiers, d’avoir un œil sur les travaux de Lavoisier, au plus près des collections conservées au musée, ce qui constitue un atout important pour qui voulait approcher Lavoisier et comprendre, à travers ses instruments de laboratoire, sa manière de concevoir les sciences.

46C’est également par leur travail de catalogage, de nomenclature, de langage, de classification, qu’il convient de lire les parcours de Lavoisier et de Brongniart : chacun avait un goût poussé du détail, de la logique, déclinant les notions jusqu’à la plus infime entrée. Enfin, c’est en « inventeurs », au sens de créer un objet disciplinaire, qu’il importe de considérer ces personnages : Brongniart « invente » le Musée céramique et vitrique de Sèvres, voulu et conçu comme un véritable conservatoire encyclopédique et anthropologique des savoirs, là où rien n’existait en France dans le domaine des arts du feu ; Daumas, quant à lui, sera la cheville ouvrière d’une nouvelle discipline : l’archéologie industrielle.

  • 28 Le Comité Lavoisier, créé en 1948 et réorganisé en 1980, est chargé de publier la correspondance de (...)
  • 29 Il s’agit d’un projet commun au Musée Galilée de Florence et au Centre de recherche en histoire des (...)
  • 30 Paolo Brenni est décédé en 2021, et cet ouvrage commun avec Marco Beretta est donc posthume. Spécia (...)

47Quant à Lavoisier, son œuvre continue à faire couler beaucoup d’encre. Les travaux du Comité Lavoisier de l’Académie des Sciences relèvent de ce grand mouvement de mise à disposition de ces archives pour les chercheurs28. Il a ainsi procédé à l’édition électronique des Œuvres de Lavoisier (Livres, mémoires) en collaboration avec le site Panopticom Lavoisier29 Tout récemment, Marco Beretta et Paolo Brenni30 livraient à la communauté, avec le premier catalogue scientifique de la collection de instruments scientifiques de Lavoisier, une imposante synthèse reconstituant le contexte culturel et social des activités expérimentales de Lavoisier (Beretta, Brenni 2022).

48Relire leur manière de concevoir, de faire, dire, écrire les sciences, qu’ils ont promus tant au XIXe siècle qu’au XXe siècle, permet d’éclairer aussi bien les parcours d’Alexandre Brongniart que de Maurice Daumas. Au-delà des préfaces d’ouvrages, d’introductions de collections ou de traités, de rapports, leurs visions de « passeurs de sciences » apparaissent. En ce sens, leur parcours est éclairant.

  • 31 Daumas est proche des auditeurs, en ayant été un lui aussi ; il assure également deux cours d'histo (...)
  • 32 M. Daumas, « Note sur la situation du Musée des Techniques du C.N.A.M. », lue au Conseil de perfect (...)

49Daumas publie en 1980 L’archéologie industrielle en France, avec Jacques Payen, Alexandre Herléa, Claudine Fontanon, Dominique Larroque, Gérard Jigaudon, l’équipe des chercheurs avec qui il travaillait au CDHT – ce que n’ont pas manqué de rappeler Alexandre Herléa et Gérard Jigaudon, présents à la journée d’étude au Cnam en juin 2023. Maurice Daumas s’est voulu ici « passeur de techniques »31 Une légende dorée précise cet aspect de son parcours : Le matin, il « apporte aux auditeurs de niveau baccalauréat des notions sur l’évolution historique des grandes disciplines scientifiques et techniques qui donnent à la civilisation du XXe siècle ses caractères fondamentaux32 » ; le second cours, avancé, du vendredi matin, était très mécaniste et s’achevait sur « la radioactivité artificielle et l’énergie nucléaire », tout entier dans l’air du temps.

50Le Centre de Documentation en Histoire des Techniques permet aux étudiants d’approcher les sources originales et leur critique historique et de côtoyer chercheurs et érudits. Paru en 1985, Le cheval de César ou le mythe des révolutions techniques critique la vulgarisation scientifique vouée au progrès déterministe et préfère la continuité à la rupture, le passage en douceur des manifestations de la technique. Maurice Daumas consacre ainsi son dernier ouvrage à une critique du positivisme et d’une hypothétique course à la modernité avec la mythologie des révolutions technologiques et industrielles.

51Finalement, Daumas nous semble – eu égard aux défis sociétaux, climatiques et à la mondialisation industrielle en cours de nos jours – sacrément moderne ! Quid de Modernitas ! Lavoisier, Brongniart, Daumas auront eu des parcours saisissants et tous auront été de ces « passeurs de sciences » que Posteritas nous dédie.

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MILLE, Martine. De quelques miscellanées scientifiques et techniques de Monsieur Brongniart. Ou comment l’innovation vint aux poteries communes pour le bien public au XIXe siècle. In : CHOUTEAU, Marianne, FOREST, Joelle, NGUYEN, Céline, (dir.). Genèse des innovations. Les biographies comme vecteur de connaissances du processus d’innovation, Belfort-Montbéliard : Presses de l’UTBM, 2018, p. 67-89.

MILLE, Martine, FERNANDEZ, Mathieu. L’apparition de la carte géologique et le territoire du savant. Trois échelles d’après les carnets d’Alexandre Brongniart (1786-1822). In : FOURNIER, Mauricette, TROIN, Florence (dir.). Cartographies en mouvements. Parcours sensibles. Narration et participation, Territoires 4, Presses universitaires Blaise Pascal, 2021, p. 53-74.

MOATTI, Alexandre. Hommes de science au corps des Mines. 1810-1960. In : GARÇON, Anne-Françoise, BELHOSTE, Bruno (dir.). Les ingénieurs des mines : cultures, pouvoirs, pratiques, Paris : CHEFF, 2012, p. 86-102, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.igpde.1359.

POIRIER, Jean-Pierre. Antoine-Laurent de Lavoisier, 1743-1794, Paris : Pygmalion, 1993.

SENNET, Richard. Ce que sait la main. La culture de l’artisanat. Paris : Albin Michel, 2010.

THÉPOT, André. Les ingénieurs des mines du XIXe siècle. Histoire d’un corps technique d’État. T. 1, 1810-1914, Paris : Éditions ESKA, 1998.

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Notes

1 https://ihmc.ens.psl.eu/09301830-Maurice-Daumas-entre-histoire-des-techniques-et-archeologie.html.

2 Danielle Fauque, « Maurice Daumas, de la biographie de Lavoisier à l’histoire des instruments scientifiques (1941-1955) », Journée Daumas, Cnam, 10 juin 2023.

3 Je remercie vivement André Guillerme pour m’avoir parlé de cette contribution et Claudine Fontanon pour m’en avoir donné la primeur.

4 Il s’agit de son travail de thèse d’État, sous la direction de Gaston Bachelard. Dès l’introduction, il s’intéresse aux deux volets de l’œuvre de Lavoisier : d’une part, le théoricien qui, avec le Traité élémentaire de chimie, restituant la chronologie avec les sources conservées à l’Académie des sciences, en particulier les registres de laboratoire, avec l’établissement de la Nouvelle nomenclature chimique, et le système chimique fondé sur la théorie de l’oxygène moderne en réfutation de la théorie du phlogistique développée par Georg Ernst Stahl et auparavant admise ; d’autre part, les techniques d’expérimentation et les expériences ainsi que les instruments qui devaient permettre de parvenir à cette nouvelle proposition chimique.

5 Maurice Daumas, originaire de Béziers, est issu d’une famille d’enseignants.

6 AD Yvelines, 6U 468-4 : Les établissements Doitteau étaient une féculerie dès la fin du XIXe siècle, implantés en 1931 à Corbeil-Essonnes. Pendant la Seconde Guerre mondiale, grâce au laboratoire de recherche et de contrôle, cellule que rejoint Daumas, deux activités sont développées : la crémosine de blé (sorte de fécule) et la fécule de pomme de terre pour produits alimentaires.

7 Créée le 17 novembre 1941 par Alexis Carrel, lié au Maréchal Pétain pendant la Première Guerre mondiale, la fondation a pour objet l’étude des mesures propres à sauvegarder et améliorer et développer la population Française et ne renie en rien la doctrine eugéniste. Elle sera par la suite à l’origine de la médecine du travail et des études d’aménagements d’usines avec Le Corbusier. Alexis Carrel (1873-1944), issu d’une famille de soyeux lyonnais, chirurgien et biologiste, obtint prix Nobel de physiologie en 1912 pour ses travaux sur la suture vasculaire et la transplantation de cellules sanguines et d'organes. De 1906 à 1939, il s’installe à New York et travaille à l’Institut Rockefeller, qui finance son laboratoire de recherches entre autres sur la chirurgie vasculaire. Carrel y effectue lui- même ses expérimentations dans les conditions les plus strictes. La fondation, d’inspiration eugéniste et collaborationniste, avec une équipe pluridisciplinaire, où Carrel promouvait la technique de la pensée collective, devait péricliter à la Libération. Daumas se trouvait, en occupant ce poste de diffusion des ouvrages de la fondation Carrel, marqué par son origine vichyssoise, au cœur d’un dispositif porté par la politique de Vichy.

8 Archives Cnam, dossier M. Daumas, « Lettre du Conservateur pour la titularisation », 24 janvier 1949.

9 Les Documents pour l’histoire des techniques complètent le dispositif forgé par Daumas au Cnam. Il publie six cahiers entre 1961 et 1968. Une Nouvelle Série des DHT sera éditée 2004 à 2011, grâce à un partenariat CDHTE-SACDHTE : par André Guillerme pour le CDHTE, portée, pour la direction éditoriale, par Liliane Hilaire-Pérez, et gérée et coordonnée, pour la Société des Élèves du CDHTE, par Martine Mille. Elle disponible en ligne : [https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/dht].

10 Son Histoire générale des techniques en cinq volumes, parue aux PUF, rend les techniques accessibles au grand public, notamment les technologies industrielles issues des applications de la science.

11 Sa mère, Anne-Louise Degrémont (1744-1829), tient boutique de lingerie quartier de la Trinité. Son père, Alexandre-Théodore (1739-1813), issu d’une lignée d’apothicaires parisiens, trouve sa voie - après des études de médecine - dans l'architecture, suivant l’enseignement de Blondel à l’Académie royale d’architecture.

12 Les Brongniart se lancent en affaire avec l’entrepreneur Le Tellier, achetant des terrains et les lotissant (Chaussée d’Antin, Saint-Dominique, Invalides) ; s’ensuit une belle clientèle, grâce aux appuis de Mme Montesson et de la Famille d’Orléans. Brongniart est élu à l’Académie Royale d’Architecture en 1777.

13 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3357, Journal de voyage aux Pyrénées, n° 2 - germinal an II.

14 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3358, Journaux sédentaires et agenda.

15 AN F 14 2716, Lettre Brongniart 3 avril 1810 au Conseil des Mines : « « toujours utile à l’art des mines : en employant mes connaissances dans les arts chimiques dans l’administration de la direction d’une manufacture qui appartient au gouvernement et qui est entièrement chimique… j’ai prouvé que les connaissances exigées pour être ingénieur de Mines sont précisément celles qui sont nécessaires d’avoir pour diriger une manufacture chimique ».

16 Depuis Daumas, de nombreux travaux historiens ont jalonné la recherche sur Lavoisier. Signalons ainsi : Poirier, 1993 ; Donovan, 1993 ; Bensaude-Vincent, 1999 ; Corsi, Bret, 2003 ; Berreta, Brenni, 2022.

17 Cette procédure permet aux savants ou inventeurs de déposer le résultat d’une recherche, sous forme de plis cachetés et signés, pour en revendiquer la primauté. Ces plis ne seront ouverts que cent ans après leur dépôt, par la commission ad hoc de l’Académie des sciences.

18 Cette somme éditée en 2022 est majeure pour le champ de recherche sur Lavoisier ; l’un des auteurs, le réputé Paolo Brenni, qui avait consacré sa carrière aux instruments scientifiques, est récemment décédé. « Au début des années 1760, Lavoisier fait la connaissance du botaniste et minéralogiste Jean-Etienne Guettard, et dès 1763, il le suit dans ses excursions minéralogiques à Villers-Cotterets. Au cours de ces excursions, Lavoisier collecta des spécimens de minéraux et écrivit deux mémoires sur l’histoire naturelle. En 1763, il rejoint également le botaniste Bernard de Jussieu « dans ses herborisations ». Traduction de M. Mille.

19 « Lavoisier s’engagea activement dans la réforme de l’agriculture : [dans] la propriété dont il hérita au Bourget pour des expériences agricoles, adoptée comme laboratoire du Comité d’administration d’agriculture [...], à Fréchines, entre Blois et Vendôme, où il mena des expériences à grande échelle dans différentes branches de l’agriculture ». Traduction M. Mille.

20 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3357, Journal de voyage aux Pyrénées, n° 2 - germinal an II. « Je range les insectes rapportés de la course du 19 germinal ».

21 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHM, ms 3358, journal 13, 20 prairial an 8 : « Je vais avec mes élèves à la chasse aux insectes dans la partie de la forest de Bondy qui entoure le Raincy ».

BCMNHM, ms 2350, courses de voyages dans le Bassin parisien 1° Promenades Zoo-phyto-lithologiques aux environs de Paris. 20 mars 1788, « quelques insectes lors de la promenade avec M. Vauquelin au bois de Boulogne, le long de la mare de la porte de la Muette ». Jeudi 1er mai, jour de l’ascension, promenade au Prés St Gervais, « Très beau et très chaud temps- Peu de plantes et d’insectes ». Mercredi 2 juillet, herborisation de M. de Jussieu que nous quittâmes à la porte de St Maur, « Quelques insectes et plantes ». Dimanche 6 juillet, à la forest de Bondy, « Peu d’insectes et plantes, une assez belle couleuvre ».

22 Ce chimiste réputé sera nommé professeur à la chaire des Arts chimiques au lycée républicain en 1793 et au Jardin des plantes.

23 Lavoisier donne la liste d’ustensiles, tome V, Œuvres.

24 Bibliothèque de l’Institut de France, MS 2849-2852, An IX-1842, « Essais céramiques, registre 3, Essais pour la composition des pâtes et Essais de poteries et sur les poteries faites », Manufacture de porcelaine de Sèvres, Carnet d’essais, 6 floréal an X, 1829.

25 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHN, MS 2350, Alexandre Brongniart, Journal, Voyage à Coulommiers, 1819. Je remercie les équipes du service photographique et numérisation du Muséum qui, pour cette publication, ont eu à cœur de transmettre la meilleure définition de ce schéma, à partir du document d’archive original.

26 Muséum national d’histoire naturelle, BCMNHN, MS 3357, Alexandre Brongniart, Journal Paris Londres et autres lieux 1790 (détails) ; MS2350 Alexandre Brongniart, Meudon, Promenades, Voyages Zoo-phito-lithologiques (extrait), 1788 ; leçon de géologie non publiée.

27 La notion de « modernité » est, au départ, fondée sur une historicité de l’art par Baudelaire en 1859, permettant une nouvelle perception et conception du temps historique. Le cheminement étymologique, qui aboutit à poser au XIXe siècle la « modernité », part du latin modernus au Ve siècle, définit comme le temps présent ou à peine passé, ou tout près d’advenir ; avec « modernita » (âge moderne), synonyme de « nouveautés », les Anciens (en référence à l’Ancien Testament), s’opposent aux Modernes. Aux XVIe-XVIIe siècles, avec la révolution scientifique galiléenne, s’affirme la science moderne qui remet en cause le monopole idéologique de l’Église de la conception du monde. Les Lumières et l’influence prégnante de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert y compris sur Brongniart au point de dédier un des Services de porcelaine de Sèvres à cet ouvrage – apportent un nouveau régime d’historicité. On passe de « moderne » (au sens de temps nouveaux, porteurs de progrès) à la « modernité », vue comme un processus indéfini et irréversible, qui marque une nouvelle période de l’histoire de l’humanité tournée vers le futur.

28 Le Comité Lavoisier, créé en 1948 et réorganisé en 1980, est chargé de publier la correspondance de Lavoisier pour faire suite à l'édition des Œuvres de Lavoisier. 

29 Il s’agit d’un projet commun au Musée Galilée de Florence et au Centre de recherche en histoire des sciences et des techniques de la Cité des Sciences et de l'Industrie (Paris), https://www2.museogalileo.it/en/library-and-research-institute/projects/databases-and-bibliographies/401-panopticon-lavoisier-en.html .

30 Paolo Brenni est décédé en 2021, et cet ouvrage commun avec Marco Beretta est donc posthume. Spécialiste des instruments scientifiques, il avait mené, de 2017 à 2021, le recatalogage des instruments scientifiques de Lavoisier, au Musée des arts et métiers de Paris, en collaboration avec Marco Beretta.

31 Daumas est proche des auditeurs, en ayant été un lui aussi ; il assure également deux cours d'histoire des techniques au Cnam, à Paris, dont l'un le samedi, jour de grande écoute pour ces employés qui prennent sur leurs congés hebdomadaires le temps de s'instruire encore.

32 M. Daumas, « Note sur la situation du Musée des Techniques du C.N.A.M. », lue au Conseil de perfectionnement du 14 avril 1972 Archives Cnam, dossier M. Daumas, 00025.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1. Portrait d’Alexandre Brongniart
Légende Cette lithographie de Brongniart date de 1832, au moment de son élection à la présidence de la Société Géologique de France, récompensant à 63 ans le long parcours de minéralogiste et géologue de l’ingénieur en chef des mines également administrateur de la manufacture de porcelaine de Sèvres. Elle le montre en tenue de ville et non pas en tenue d’académicien comme lorsqu’il est souvent portraituré en tant qu’administrateur de la Manufacture de porcelaine de Sèvres.
Crédits Source : Lithographie de Delpech par Maurier, 1833. Dossier biographique Brongniart, Académie des sciences.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ephaistos/docannexe/image/12978/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 653k
Titre Fig.2. Alexandre Brongniart, « Escarpement à Coulommiers », Juillet 1819
Légende Ce croquis préparatoire de Brongniart placé en fin de son journal de voyage, après ses prises de notes sur les lieux, donne à voir le travail de transcription des visites sur site. Il aura été dressé sur site, revu par Brongniart rentré dans sa chambre le soir, modifié sur site en plusieurs fois, voire ensuite dans son cabinet de travail à Paris. On remarque la précision qui, déjà, en émane : ce n’est pas un simple dessin mais le résultat d’une progression matérielle et intellectuelle de restitution graphique…, ébauche d’une carte en coupe qui sera amendée, précisée et colorée, et remise enfin au graveur avant édition en 1832. On visualise ainsi la maturation du travail scientifique, depuis les visites sur site avec prises de notes, les vérifications par rapport aux données déjà récoltées et aux échantillons identifiés et catalogués, le travail en atelier pour les compiler et les comparer, avant un retour sur site avec d’éventuelles collectes de spécimens complémentaires pour validation des éléments mis ainsi en corrélation.
Crédits Source : Muséum national d’histoire naturelle, Paris, BCMNHN, Ms 2350-10, feuillet 6, journal de voyage, Juillet 1819.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ephaistos/docannexe/image/12978/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 978k
Titre Fig.3. Coupe théorique de divers terrains, roches et minéraux, qui entrent dans la composition du sol du Bassin de Paris. par MM. Georges Cuvier et Alexandre Brongniart, 1832
Légende Cette coupe théorique fruit des travaux de Cuvier et Brongniart sur les alentours du Bassin de Paris, est éditée en 1832, et intervient au moment de son élection à la présidence de la Société Géologique de France. Peu avant, en 1829, était paru le Tableau des terrains qui composent l’écorce du globe, qui proposait déjà une terminologie complexe selon la communauté scientifique. Cette version de 1832, établie en lien avec les Cartes géognostiques et stratigraphiques du Bassin de Paris, dressées avec Cuvier (1812, 1822, puis 1835), jetait les bases de la cartographie géologique moderne. Elle fonde également la paléontologie stratigraphique française avec la subdivision des terrains tertiaires.
Crédits Source : Muséum national d’histoire naturelle, Paris
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ephaistos/docannexe/image/12978/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 567k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Martine Mille, « Expérimenter les sciences : regards croisés sur Antoine-Laurent de Lavoisier  »e-Phaïstos [En ligne], XII-2 | 2024, mis en ligne le 26 novembre 2024, consulté le 12 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ephaistos/12978 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12rz9

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Auteur

Martine Mille

Je suis chercheure en histoire des sciences et des techniques (SAPRAT-EPHE-PS-Alumni), responsable du GdR Gestes techniques- Mémoire de Métiers vivants. Mes domaines de recherches portent sur l’approche biographique des parcours savants et les ingénieurs de mines (comme le minéralogiste Alexandre Brongniart), via les humanités numériques ; les sociabilités savantes et le genre au XIXe siècle ; l’innovation ainsi que les savoir-faire et les gestes techniques (avec la direction d’ouvrage de Gestes techniques, techniques du geste. Approches pluridisciplinaires (Septentrion, 2017) suivie « des Miscellanées scientifiques et techniques de M. Brongniart » dans Genèse des innovations, Les biographies comme vecteur de connaissances du processus d’innovation (Chouteau, Forest et Nguyen, 2018). Plus récemment, ont été publiés « Pratique de la science et diplomatie des espaces du couple Brongniart » aux Cahiers François Viète (III-11 | 2021), ainsi que « L’apparition de la carte géologique et le territoire du savant… » avec Mathieu Fernandez dans Cartographies en mouvement. Parcours sensibles (Fournier, Troin, 2021), à partir des carnets de voyages de Brongniart selon une approche cartographique via la SIG. Je suis également présidente de la SACDHTE (Société des anciens du CDHTE).

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