3 | 2000
La censure ou comment la contourner
Ni bilan des pratiques répressives et de leurs conséquences sur la production intellectuelle et artistique en Égypte, ni histoire de la censure au sens large, cette nouvelle livraison de la revue du Centre d’Études et de documentation économiques, juridiques et sociales du Caire (Cedej), s’est voulue tout entière à l’écoute de ce qui se dit et de ce qui ne se dit pas aujourd’hui en Égypte, c’est-à-dire des stratégies de résistances et de contournement inventées par les acteurs (écrivains, journalistes, universitaires ou artistes) afin d’échapper à une double censure, étatique et sociale.
Si la constitution égyptienne garantit bien, en effet, la liberté d’opinion et d’expression, l’état d’urgence imposé depuis 1981 et diverses lois et dispositions légales se conjuguent pour en restreindre singulièrement lexercice. Par ailleurs, l’arsenal juridique disponible et ses interprétations circonstancielles ne président pas seuls aux destinées du dire : un puissant contrôle social est aussi assuré par des initiatives individuelles (dont les campagnes morales ou religieuses attendent parfois une codification juridique) et des voies de fait qui vont de la menace et de l’intimidation à l’assassinat ou aux tentatives d’assassinat. Témoignage de ce qu’il n’y a pas de véritable monopole institutionnel de la morale et/ou de la religion, ce contrôle atomisé triomphe également dans une autocensure multiforme, qui peut prendre, chez les auteurs, la forme extrême du dédit, chez les éditeurs, d’un retrait de la vente, chez les uns et les autres, la recherche ou le passage par d’autres publics, d’autres marchés.
La censure ne date pas d’hier ? certes, mais ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est le manque de visibilité des institutions de l’État et de la société, rendant incertaines des alliances autrefois solides entre l’intellectuel et l’État. Aux acteurs d’aujourd’hui, le savoir-faire des aînés - successivement aiguisé au contact du couperet anglais, monarchique, ou nassérien - n’est que d’un piètre secours, tant à ménager le crédo nationaliste et l’islam « bien compris », la censure (officielle) « à l’égyptienne » contribue à brouiller la donne.
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éditorial [Texte intégral]
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Dossier : la censure
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La Censure ou comment la contourner : introduction [Texte intégral]Dire et ne pas dire dans l’Égypte contemporaine
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L’intervention administrative dans la liberté d’expression [Texte intégral]Entre loi et constitution
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Censure et sens commun en Égypte [Texte intégral]Ou l’invention répétée de la normalité islamique
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Les limites mouvantes du dicible dans la fiction égyptienne [Texte intégral]
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Le texte et la marge [Texte intégral]Critique des mythes de l’Ancien Testament chez cIsâm al-Dîn Hifnî Nâsif
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Le cinéma grand public égyptien entre censure et guichet [Texte intégral]
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Pouvoir de la censure ou censure du pouvoir ? [Texte intégral]L’affaire Yûsuf Wâlî c. al-Shacb
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Sisyphe ou les avatars du nouveau journalisme égyptien [Texte intégral]
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Documents : la censure
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L’affaire Haydar Haydar [Texte intégral]
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Tribune
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Vers une nouvelle jurisprudence islamique [Texte intégral]Compte rendu et traduction par Mona Akouri
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Lettres à l'appui
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Une table tombée du ciel [Texte intégral]Traduction de l’arabe et notes par Ghislaine Alleaume
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En-notes
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Agenda: Un nouvel ordre du jour pour la censure ? [Texte intégral]
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Lectures : Sayyid ‘Ashmâwî et Muhammad Radwân [Texte intégral]
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