Représentation syndicale et transition libérale en Égypte
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1Cette recherche s'inscrit dans notre étude sur les mutations de la scène politique et économique de l'Égypte urbaine et rurale, ainsi que sur les différents modes d'expression des groupes sociaux, depuis le début de la libéralisation économique dans les années soixante-dix. Le présent article analyse la représentation syndicale des travailleurs à travers une double lecture°: celle de l'organisation de la Fédération générale des syndicats de travailleurs d'Égypte (FGSTE) – syndicat unique représentant 4 millions de travailleurs (soit le quart de la population active occupée) –, et celle des élections syndicales de 1996, qui ont permis d'attribuer les 25°000 sièges des élus des différents niveaux hiérarchiques du syndicat.
2L'étude de la représentation syndicale du travail et de sa principale institution, la FGSTE, se heurte à une difficulté majeure°: l'information requise par les cadres analytiques traditionnels n'est pas disponible, car elle est un enjeu de pouvoir et de gestion politique. D'une part, les données syndicales exhaustives ne sont connues que de la FGSTE et du ministère du Travail, qui élaborent les listes de votants et de candidats, organisent et contrôlent les élections. Ces données officielles sont communiquées au public de façon parcimonieuse, chaque support médiatique recevant seulement une partie de l'information. D'autre part, seules les informations relatives au sommet de la hiérarchie syndicale sont publiées de façon exhaustive. Plus on descend vers la base de cette hiérarchie plus les données se font rares et contestables, tant dans les déclarations officielles, les estimations des chercheurs ou des partis, que dans la littérature consacrée au mouvement syndical.
3L'imprécision des données, qui tient à la fois au caractère corporatiste de la FGSTE et au mode d'affiliation systématique et collective, n'est pas rédhibitoire pour notre analyse. Nous proposons en effet de rechercher les logiques qui sous-tendent la structuration du syndicat et son évolution au cours du processus de libéralisation. Nous en déduirons la dynamique de la gestion politique du travail par l'État et les acteurs sociaux. Pour ce faire, nous déterminerons les différents critères de classement des travailleurs utilisés par l'État, tant dans la législation du travail que dans la gestion de l'activité syndicale, qui traduisent la forme de représentation syndicale voulue par le pouvoir politique, et permise par le rapport des forces sociales. Nous avons retenu trois types de critères de classement des travailleurs°: ceux de l'affiliation au syndicat, ceux du découpage des circonscriptions électorales et des syndicats, et ceux de la sélection de l'élite syndicale.
4Nous partons de l'hypothèse que le syndicat représente des catégories de travailleurs partageant les mêmes intérêts, lorsqu'il négocie les conditions de travail et d'emploi ainsi que la répartition des richesses créées par le travail. Nous considérons le syndicat comme l'instrument de négociation de l'ouvrier face aux autres parties de la relation de travail°: le patron, la direction ou l'État confronté aux instances extérieures politiques ou économiques. Sur la base des informations recueillies et des classements opérés, nous proposons une double lecture de la représentation syndicale du travail en Égypte à travers°: 1°) la composition de la FGSTE, son organisation, ses institutions, son élite°; 2°) l'événement électoral de 1996, son contexte et sa gestion dans le cadre de l'action du mouvement ouvrier et syndical.
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5Pour reconstituer la structure de la FGSTE et les résultats des élections syndicales de 1996, nous avons eu recours à plusieurs sources d'information. Nous avons en premier recherché les données chiffrées, officielles et officieuses, de la FGSTE et du ministère du Travail, communiquées à la presse, ou publiées dans des articles ou ouvrages scientifiques récents1. Nous avons donc utilisé l'essentiel de la presse écrite relatant les faits et exprimant le point de vue des courants politiques concurrents dans la confrontation électorale. Nous avons ainsi dépouillé de septembre à novembre 1996 le mensuel Al-'Amal (Le Travail) de la FGSTE, les quotidiens nationaux2, l'hebdomadaire du Parti (islamiste) du Travail Al-Sha'b (Le Peuple)3et les hebdomadaires des deux principaux partis de gauche, Al-Ahâlî (La Nation) pour le Parti du Rassemblement4, et Sawt al-'Arab (La Voix des Arabes) pour le Parti nassérien, ainsi que la revue communiste Al-Yasâr (La Gauche)5. Nous avons également analysé les rapports des organisations égyptiennes de défense des droits de l'homme, relatifs à l'organisation et au déroulement du scrutin6. Le recoupement de ces différentes sources nous a permis d'estimer le nombre d'adhérents de la Fédération et leur répartition, par branche et selon les niveaux de la hiérarchie. Il nous a aussi permis d'évaluer la participation aux élections et leurs résultats. Nous avons enfin observé la campagne électorale sur le terrain, dans certaines circonscriptions du Caire. Nous avons décrypté ses slogans, ses tracts et ses affiches, interrogé des acteurs syndicaux membres de partis ou d'institutions indépendantes7.
6Dans une première partie, nous reconstituerons la composition et l'organisation hiérarchique de la FGSTE. Nous définirons d'abord les différents critères de classement des travailleurs en catégories constitutives des syndicats de branche de la Fédération (tableaux 1 et 2 en annexe). Nous montrerons ensuite par quels mécanismes le pouvoir politique assure son contrôle sur l'organisation syndicale°: «°verrouillage°» des niveaux supérieurs de l'organisation syndicale, pouvoir hiérarchique, représentation sectorielle et non géographique, découpage électoral très fin, modulable selon les contingences politiques, sélection rigoureuse et immobilisme de l'élite syndicale. Nous tenterons d'expliquer la gestion très bureaucratique du syndicat par les fonctions politiques et économiques assignées à l'organisation et à son élite. Dans une seconde partie, nous rappellerons le contexte économique, politique et syndical des élections syndicales de 1996, du point de vue de l'État comme de celui des acteurs sociaux. Nous récapitulerons enfin dans deux tableaux synoptiques (en annexe), les conclusions des deux lectures précédentes°: le tableau 3 classera les formes de la représentation syndicale, selon le cadre organisationnel et législatif de la relation de travail, l'employeur, la formation du salaire et la branche d'activité°; le tableau 4 résumera l'évolution des formes institutionnelles et du cadre législatif de la relation de travail depuis 1976.
Composition et organisation hiérarchique de la FGSTE
7La législation et l'intervention de l'État définissent trois types de critères de classement des travailleurs°: ceux de l'affiliation au syndicat, ceux du découpage électoral, et enfin ceux de la sélection de l'élite syndicale. Les critères d'affiliation déterminent les catégories de travailleurs bénéficiant de l'organisation syndicale et du droit de représentation dans l'entreprise ou dans le syndicat. Les critères de découpage électoral structurent chaque syndicat en circonscriptions, comités syndicaux et syndicats, selon certaines caractéristiques des affiliés. Ces caractéristiques regroupent les travailleurs en catégories homogènes, et déterminent la nature des intérêts qui seront représentés dans le syndicat. Les critères de sélection de l'élite syndicale indiquent les choix effectués par l'État, parmi les différents modes de représentation possible, pour obtenir une organisation syndicale conforme aux besoins de la libéralisation économique. Après avoir estimé le nombre d'adhérents à la Fédération, nous chercherons, dans un premier temps, les logiques qui sous-tendent sa structuration à travers°: 1°) les critères de classement (explicites et implicites) des travailleurs°: branche économique, type d'employeur, droits du travail, formation des salaires, droits syndicaux°; 2°) les critères de regroupement des travailleurs en catégories constitutives des syndicats de branche, et en catégories de travailleurs non affiliés à un syndicat. Nous décrirons ensuite l'organisation hiérarchique de la FGSTE et les mécanismes de sélection de son élite.
Composition de la FGSTE par catégories d'adhérents
- 8 La population active occupée (+°5 ans) est en 1996 de 16 millions, dont 2 millions ne relevant pas (...)
- 9 Depuis la huitième mandature 1987-1991. Le syndicat est la structure de base qui dispose d'une per (...)
- 10 Le paiement de cotisations sociales, qui attestent de l'exercice d'un travail légal, affilie les t (...)
8La FGSTE est l'organisation syndicale unique représentant 4 millions de travailleurs, soit le quart de la population active occupée8. Elle est constituée de 23 syndicats de branche9. Pour les catégories de travailleurs définies par la loi, l'affiliation au syndicat, elle-même réglementée par la loi et l'intervention de l'État, est systématique10.
Nombre d'adhérents et d'élus syndicaux à la FGSTE
- 11 Faute de statistiques officielles publiées, notre estimation ne peut être que très approximative e (...)
9Les estimations du nombre d'adhérents à la Fédération varient, selon les sources, de 3 à 4,3 millions, et celles du nombre de circonscriptions syndicales (d'entreprise ou de zone) fluctuent entre 1°500 et 2°500. Sachant que le comité syndical élu comprend de 7 à 21 membres (selon le nombre de travailleurs par entreprise ou par zone), nous évaluons le nombre des élus entre 25°000 et 30°00011.
Critères de classement explicites des travailleurs
- 12 Au recensement de 1996, la population active occupée est estimée à 16 millions de personnes, dont (...)
- 13 Les travailleurs indépendants et les salariés des petites et moyennes entreprises de moins de 50 e (...)
10La littérature relative à l'organisation syndicale n'utilise que deux critères de classement des travailleurs affiliés à la FGSTE°: branche économique et personnalité juridique de l'employeur (public ou privé). La répartition géographique et la confession sont rarement prises en compte dans les analyses. Le critère de la branche économique correspond à la fois à l'encadrement institutionnel de la production nationale par ministère et à une classification statistique par type d'activité. Il est utilisé par la FGSTE et le ministère du Travail pour dessiner les contours des 23 syndicats°: agriculture, enseignement, santé, télécommunications, chemins de fer, postes, industrie textile, industrie mécanique, industrie militaire, etc. Le critère de la personnalité juridique de l'employeur apparaît dans les statistiques de la FGSTE qui annonce que 75°% de ses affiliés appartiennent au secteur public et 25°% au secteur privé. Comme la plupart des observateurs (chercheurs ou syndicalistes) s'accordent sur la quasi-inexistence de sections syndicales élues dans les grandes et moyennes entreprises privées, les adhérents du secteur privé (1,12 million) ne peuvent concerner que très marginalement les travailleurs des entreprises privées de plus de 50 employés (1 à 1,5 million), autorisées avant 1993 par la loi à élire un comité syndical12. En recoupant les données du recensement sur la répartition de la population active13 et celles de la FGSTE sur la composition des syndicats, nous déduisons que les adhérents du secteur privé concernent 3 catégories d'actifs°: 1°) les salariés cotisant de petites et moyennes entreprises déclarées°; 2°) les travailleurs indépendants devant solliciter auprès de l'administration une licence d'exercice°; 3°) les candidats à l'émigration. En effet, l'obtention d'une licence professionnelle ou d'un passeport est conditionnée par le paiement de la cotisation au syndicat correspondant. De plus, tout travailleur, non titulaire d'un diplôme universitaire l'affiliant à un syndicat professionnel et cotisant aux assurances sociales est systématiquement inscrit à un syndicat de la FGSTE.
11Les critères de localisation et de confession sont sensibles dans un pays qui proclame l'unité nationale. Incomplètes sur la répartition géographique, les données sont totalement inexistantes concernant la confession des affiliés, des candidats ou des élus.
Critères de classement implicites des travailleurs
12Pour les employés du secteur public, nous ajouterons au critère courant de branche ceux de droits du travail, de formation des salaires, et de droits syndicaux. Les droits du travail désignent le cadre juridique qui fixe les droits et devoirs des travailleurs. La formation du salaire décrit la répartition entre composante fixe et composante variable ainsi que le mode de calcul de la retraite et de la prime de fin d'activité. Les droits syndicaux concernent la participation de délégués élus au conseil d'administration de l'établissement.
13L'étude de l'évolution de la définition par l'État des différentes catégories de travailleurs relativement à ces trois critères révèle l'existence de mouvements alternatifs de segmentation et d'unification dans la gestion politique des relations de travail.
14a) Droits du travail°: unification, éclatement, réunification du code du travail. En édictant la Charte nationale en 1962, l'État s'était engagé à employer tous les diplômés. Dans ce but, il créa la même année le ministère du Travail, chargé de recruter les diplômés des différentes professions, dans chaque gouvernorat, entre l'administration et le secteur public. Leur embauche était régie par une réglementation commune leur garantissant la stabilité de l'emploi, la couverture médicale, le versement d'une retraite et le droit aux congés, en contrepartie d'un système de sanctions uniforme. Ces principes furent codifiés avec le développement du système législatif°: Constitution de 1971, loi sur les assurances sociales en 1975, loi sur les syndicats en 1976, lois n°°47 et n°°48 de 1978 régissant le travail respectivement dans le secteur et les services publics et dans la fonction publique, loi de 1981 du travail dans le secteur privé. Mais dans les années quatre-vingt, la tendance à la segmentation se substitue à celle de l'unification.
- 14 Le changement de compétence entraîne un changement de dénomination°: en 1979, le ministère du Trav (...)
- 15 La loi n°°203 de 1991 relative au secteur public comporte deux volets°: d'une part, la réorganisat (...)
- 16 C'est peut-être le vif débat que la loi unifiée a suscité parmi les travailleurs, les syndicaliste (...)
15D'une part, l'État se désengage à un rythme croissant du recrutement des diplômés14. Il laisse d'abord les entreprises publiques industrielles, puis les services publics et enfin l'administration, déterminer librement leurs besoins en personnel et n'impose plus ses candidats. D'autre part, la différenciation entre les cadres réglementaires des différentes catégories de personnels s'accentue, touchant en premier les ouvriers et employés du secteur public industriel. Depuis 1991, ils sont privés par la loi n°°203 des «°acquis°» que leur garantissait la loi n° 47 de 1978 en matière de sécurité d'emploi, de salaire, de congé et de sanction15. Aujourd'hui, ils attendent16 le vote du code unifié du travail, qui réduit les droits des salariés du secteur public au niveau établi par la loi de 1981 pour le secteur privé. En contrepartie, le statut et la rémunération des cadres supérieurs du secteur et des services publics, ainsi que de certaines administrations, ont été considérablement améliorés par la loi n°°203 de 1991. En échange de cette amélioration, ils subissent une plus grande précarité, selon le principe de la gestion sur objectifs.
- 17 La décentralisation s'effectue d'abord au niveau du lieu de la décision, qui se déplace du haut de (...)
16b) Formation du salaire°: éclatement de la grille unique. Durant les années soixante, les salaires des fonctionnaires et des employés du secteur public étaient régis par une grille unique. Les classifications étaient déterminées par le diplôme et l'ancienneté, indépendamment de la branche d'activité. Les salaires du secteur public comme de l'administration, nationale ou locale, étaient prélevés sur le budget de l'État. La part fixe du salaire était donc déterminée de façon uniforme pour tous les salariés de l'État. La part variable du salaire recouvrait les primes (de pénibilité, risque, repas, rendement), la participation au profit, les heures supplémentaires, etc. Plus faible que la part fixe du salaire, elle dépendait des capacités financières propres et de la politique de chaque entreprise. Elle permettait de distinguer à la marge les catégories de travailleurs selon les primes accordées à chaque diplôme ou profession. Dans les années quatre-vingt, la décentralisation s'étend progressivement à toutes les décisions relatives à la production et au fonctionnement des entreprises publiques17°: recrutement de la main-d'œuvre, fixation des prix, choix et financement de l'investissement, commerce intérieur et extérieur, détermination de la part variable du salaire. La modulation de la part variable du salaire a permis d'accentuer durant les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix la distinction entre les employés des différentes branches et entreprises, entre les établissements, puis entre les ateliers d'une même entreprise. Les ratios moyens part variable/part fixe du salaire varient aujourd'hui de 3/4 dans l'industrie publique, à 2/3 dans les services publics et 1/2 dans l'administration. Comme la part variable du salaire est plus exposée que sa part fixe aux aléas de l'activité économique 'de l'entreprise et à l'arbitraire de l'employeur, le traitement des fonctionnaires apparaît aujourd'hui plus stable, bien que plus faible, que les salaires des employés des entreprises et des services publics.
- 18 La société égyptienne est ainsi implicitement structurée par la Constitution en deux classes°: cel (...)
- 19 Cette restriction a été généralisée aux entreprises publiques déficitaires en cours de restructura (...)
17c) Droit syndical et représentation dans l'entreprise°: de la généralisation à la limitation. La constitution de 1971, confirmant les principes établis par la Charte de 1962, stipule que la représentation des «°ouvriers et des paysans°»18 dans toute instance représentative ne doit pas être inférieure à 50°%. Reprenant ce principe, la loi n°°73 de 1973 précise que les conseils d'administration des entreprises et services publics doivent être constitués du chef d'établissement et de huit autres membres, parmi lesquels se trouvent quatre représentants élus du personnel, dont au moins deux «°ouvriers°». Le droit à la représentation constituait déjà en 1973 un élément de différenciation des salariés, puisque les fonctionnaires de l'administration en étaient privés. La segmentation entre le secteur public industriel et les services publics sur la question du droit à la représentation apparaît avec la loi n°°203 de 1991. La loi n°°203 réduit en effet la représentation du personnel au conseil d'administration des entreprises publiques à deux élus pour cinq membres désignés°; elle supprime l'obligation de compter un ou plusieurs «°ouvriers°» parmi les élus, et autorise le président du holding de tutelle à restreindre le conseil aux seuls cinq membres désignés par lui19. Enfin, la privatisation de 50% de leur capital a permis d'exclure 262 entreprises publiques du système de représentation du personnel avant les élections de 1996. En effet, si la loi syndicale autorise l'élection d'un comité syndical dans les entreprises privées de plus de 250 employés, le code du travail n'impose la représentation d'élus du personnel au conseil d'administration de l'entreprise que dans le secteur public.
Les catégories de travailleurs affiliés constitutives de la FGSTE (tableaux 1 et 2)
- 20 Moins de 50 employés, cotisant aux assurances sociales et soumis à la loi 137 de 1981, relative au (...)
18a) Les «°artisans°». La FGSTE recense, parmi ses affiliés, 25°% d'actifs du secteur privé, soit plus d'un million de personnes. Nous désignons par «°artisans°» les trois catégories d'actifs définies dans les critères de classement explicites des travailleurs (salariés des petites et moyennes entreprises20, indépendants possédant une licence d'exercice, émigrés). En effet, ces travailleurs sont systématiquement affectés, après règlement de leur cotisation syndicale, à un syndicat de la FGSTE correspondant à leur activité. Du fait de leur dispersion en des milliers de micro-entreprises, le ministère du Travail se charge de définir leurs circonscriptions syndicales et d'organiser l'élection (ou la désignation) de leurs comités syndicaux et de leurs délégués à leurs syndicats respectifs. Les circonscriptions sont formées à différents niveaux de représentation du ministère du Travail (gouvernorat, canton, quartier) de façon à réunir le nombre légal d'électeurs. Les comités syndicaux d'artisans sont regroupés au sein de quatre syndicats de la FGSTE°:
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le Syndicat de l'agriculture regroupe 253°000 exploitants et salariés. Les «°artisans°», soit 160°000 petits exploitants non propriétaires de terres, constituent les 2/3 de ce syndicat°;
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le Syndicat de la construction et de la transformation du bois compte 72°800 cotisants, dont les 3/4 (54°600) sont des indépendants, ou des entrepreneurs privés et leurs salariés°;
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le Syndicat des transports terrestres comprend 48 600 inscrits. 38°000 chauffeurs, soit les 3/4 d'entre eux, sont indépendants ou salariés du secteur privé°;
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le Syndicat du tourisme et de l'hôtellerie recense 40°000 inscrits. 85°% d'entre eux sont des patrons ou employés de café, restaurant et services aux particuliers (coiffeurs, garagistes, etc.).
19L'obligation pour les artisans de payer des cotisations à l'administration et l'affiliation systématique à la FGSTE qui en découle permettent à l'État de contrôler le marché du travail et d'organiser les professions artisanales, en Égypte comme dans le cas de l'émigration.
20L'affiliation des artisans à la FGSTE est plus fréquente en ville qu'à la campagne, le contrôle des professions croissant avec la concentration urbaine. Leur faible taux de participation aux élections syndicales est révélé par le mode de constitution des comités syndicaux d'artisans. En effet, les membres (7 à 21) de la plupart de ces comités ne sont pas élus par leur base, faute de candidats ou d'électeurs en nombre suffisant. Ils sont soit désignés par leurs syndicats respectifs, soit cooptés par les membres du comité de la mandature précédente. Ces comités sont ainsi dominés par les travailleurs des entreprises et des services publics°: favorisés par la législation du travail, ils sont concentrés dans de grands établissements ou administrations généralement situés en zone urbaine. Ainsi, les Syndicats de l'agriculture, des transports terrestres, de la construction et du bois, sont dirigés respectivement par des fonctionnaires des directions et services agricoles locaux dépendant du ministère de l'Agriculture, des employés des sociétés publiques de transport, des employés des sociétés publiques du bâtiment-travaux publics (BTP) ou de matériaux de construction. Les catégories auxquelles appartiennent les délégués ne constituent respectivement que 33°%, 18°% et 12°% des affiliés de chacun de ces syndicats. Malgré leur importance numérique relative, les artisans sont de ce fait sous-représentés dans les conseils d'administration de leurs syndicats respectifs. Néanmoins, leur affiliation obligatoire a pour l'État une utilité politique directe°: elle renforce le poids de la direction de la FGSTE et du ministère du Travail dans les syndicats, par l'intermédiaire des nominations effectuées par la hiérarchie aux comités syndicaux d'artisans.
21b) Les fonctionnaires. 1,2 million de fonctionnaires de l'administration centrale et locale constituent le quart des effectifs de la FGSTE. Leurs principaux syndicats sont ceux de l'enseignement et de la recherche (306°000), de la santé (133°000), des services administratifs et sociaux (219°000), des services publics de voirie (180°000), de la distribution (110°000), des banques et assurances (130°000), de la presse et des médias (54°000). Les fonctionnaires bénéficient de la sécurité de l'emploi et de traitements réguliers. En effet, la part variable du traitement ne constitue que 50°% de ce dernier et ne peut être sujette à réduction, puisque l'employeur est une grande administration centrale (ministère ou gouvernorat) dégagée des exigences de la rentabilité économique.
22Dans les agglomérations urbaines et les capitales de gouvernorats, les syndicats de fonctionnaires jouent un rôle éminent dans le règlement des conflits du travail par l'intermédiaire des comités tripartites. Assumant des fonctions similaires à celles des Prud'hommes en France, les commissions tripartites rassemblent les représentants des employés, des employeurs et du ministère du Travail.
23L'affiliation des fonctionnaires à leur syndicat est automatique dans les grandes administrations. La cotisation syndicale (1°£e soit 0,25°$) est prélevée à la source sur le traitement brut, avec les autres prélèvements obligatoires°: assurances sociales, impôts, taxes, etc. La cotisation est versée directement par l'employeur au syndicat sous contrôle de l'inspection financière au ministère du Travail. Mais le fonctionnaire cotisant ne dispose pas de carte de membre du syndicat, réservée aux membres du comité syndical élu ou nommé. La participation des fonctionnaires aux élections syndicales semble limitée, puisque les membres de la plupart des comités syndicaux sont désignés ou cooptés (le nombre de candidat égalant celui' des sièges, le vote est inutile). Ces membres cooptés proviennent le plus souvent des services de gestion du personnel et des secteurs juridiques appartenant aux réseaux des syndicats, de la FGSTE et du ministère.
24c) Les employés des services publics. Les 403°000 salariés des services publics ne bénéficient pas d'une sécurité de l'emploi aussi grande que celle des fonctionnaires. Leur salaire est moins stable, puisque les 2/3 de celui-ci sont variables. De plus, les organismes publics qui les emploient sont moins centraux que les ministères dans la hiérarchie des entités publiques et davantage soumis à l'impératif de rentabilité économique. Cinq syndicats dominent les services publics°: chemins de fer (71°000), télécommunications (56°000), postes (30°000), transports maritimes (75°000), transport aérien (19°000). La participation électorale des employés des services publics est plus élevée que celle des fonctionnaires. En effet, l'élection de leurs comités syndicaux met en compétition des candidats multiples, et réalise un taux de participation aux votes de 75°% des inscrits. Rappelons que certains de ces services (télécommunications, chemins de fer et transports urbains) furent, depuis le début du siècle, les précurseurs et les fers de lance du mouvement ouvrier revendicatif et syndical en Égypte.
25d) Les employés du secteur public industriel. Les 847°000 inscrits du secteur public industriel représentent le quart des affiliés à la FGSTE. Ils sont employés dans 268 entreprises industrielles, dépendant de 17 holdings de tutelle, regroupés sous un même ministère du secteur public, et régis par la loi n°°203 de 1991. Ils se répartissent entre les syndicats suivants°: textile (245°000), agro-alimentaire (193°000), industries mécaniques (161°000), industries militaires (26°000), chimie (127°000), pétrole (75°000), mines et carrières (20°000). Leur situation est moins stable que celle des fonctionnaires et des employés des services publics, tant du point de vue de la sécurité de l'emploi que de la stabilité du salaire, dont les 3/4 sont variables. Leur participation électorale est de ce fait la plus forte (90°%), de même que la compétition entre les candidats, dont la campagne électorale spectaculaire mobilise des slogans revendicatifs professionnels et politiques. Les dirigeants de leurs syndicats constituent l'élite politique tant de la FGSTE que des instances représentatives locales et nationales, où ils occupent la majorité des sièges «°ouvriers°» prévus par la Constitution.
- 21 Un colloque sur la participation féminine aux élections syndicales de 1996 a été organisé conjoint (...)
26e) Les minoritaires°: femmes, jeunes, coptes. La représentation des «°minoritaires°» traduit une action volontariste des pouvoirs publics, commune à toutes les instances représentatives, politiques ou professionnelles. Nous ne connaissons pas le nombre exact de travailleuses affiliées à la FGSTE en 199621, mais nous pouvons déduire des statistiques de l'emploi et de l'observation que leur présence est plus importante dans les secteurs où l'emploi et les conditions de travail sont stables. On les trouve donc en priorité parmi les fonctionnaires, puis dans les services publics et dans une moindre mesure dans le secteur public industriel. Elles sont rares parmi les artisans, peu de femmes obtenant l'autorisation d'exercer une profession artisanale ou un permis d'émigrer pour le travail. Nous constatons que des femmes ont siégé aux différentes instances de la FGSTE depuis sa création. Leur participation a varié d'une élection à l'autre, probablement en relation avec révolution du taux d'activité féminin dans les différents secteurs, comme en fonction de leur position dans le contexte social et politique. Aux élections de 1996, 728 femmes ont été élues aux comités syndicaux d'entreprises. Elles se répartissent entre la fonction publique (581 sièges), le secteur public industriel (101 sièges) et les services publics (46 sièges). Quatre d'entre elles ont obtenu un siège dans les conseils d'administration des Syndicats des services administratifs, du tourisme, de la chimie et des postes. Fait symptomatique du climat politique de 1996, pour la première fois depuis 1970, une déléguée de syndicat (celui de la chimie) est promue au conseil d'administration de la FGSTE. D'autre part, les candidatures féminines avaient été soutenues par des stages de formation syndicale et politique, organisés par la FGSTE, des ONG égyptiennes ou étrangères et les universités.
27La représentation des jeunes dans l'entreprise était encore récemment limitée à la redistribution des ressources de l'établissement. Les pouvoirs publics encourageaient le développement par le Syndicat des clubs sportifs d'entreprise. Ces clubs assuraient la mobilisation syndicale des jeunes employés, grâce aux ressources financières qui leur étaient affectées et qui étaient contrôlées par le syndicat. La suppression du plancher de 20°% imposé à la représentation des diplômés au comité syndical pourrait permettre un meilleur accès des jeunes, généralement plus diplômés que les travailleurs plus âgés.
28La minorité confessionnelle copte, qui n'apparaît dans aucune statistique, est représentée au travers des élus coptes siégeant au niveau national, indépendamment de sa répartition géographique ou sectorielle.
Les absents du syndicat
29Près de 10 millions de travailleurs ne sont pas affiliés à la FGSTE, bien que relevant de celle-ci d'après la loi. Ces «°absents°» du syndicat appartiennent aux catégories suivantes°:
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Les travailleurs urbains du secteur informel°: ce sont les artisans et les journaliers travaillant dans des entreprises illégales (non enregistrées et échappant à l'impôt), comme les vendeurs ambulants et les prestataires de services aux particuliers, ou les salariés clandestins (ne cotisant pas aux assurances) d'entreprises légales, ou les artisans exerçant dans les activités et professions ne nécessitant pas la délivrance d'une licence par l'administration.
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Les ouvriers et exploitants agricoles (propriétaires ou locataires) qui n'exercent pas d'autre profession et n'ont pas recours à l'administration pour obtenir un passeport ou une licence.
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Les employés des grandes entreprises modernes ou traditionnelles du secteur privé industriel et des services°: la représentation syndicale, bien que légale, n'existe pas dans les établissements de plus de 50 employés. Le décret ministériel de 1993, qui relève la limite minimale à l'élection d'un comité syndical d'entreprise à 250 employés, renforce le barrage à la syndicalisation du secteur privé non artisanal.
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Les employés contractuels du secteur public°: depuis 1985, l'embauche dans les entreprises publiques a porté essentiellement sur des contrats à durée déterminée, qui constitueraient, selon des déclarations de responsables de branches, de 20 à 30°% des effectifs. Les textes de loi ne sont pas explicites sur leurs obligations et droits syndicaux (cotisation, vote et éligibilité) mais l'observation semble indiquer qu'ils ne participent pas aux élections.
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Les fonctionnaires et les soldats du contingent de l'armée et de la police auxquels la loi interdit toute organisation syndicale.
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Les fonctionnaires de l'administration locale en zone rurale et dans les villes de campagne, où la capacité du syndicat à régler les conflits est bien inférieure à celle des institutions traditionnelles (famille, confrérie, parti, administration).
L'organisation hiérarchique de la FGSTE
30Le système électoral interne au syndicat est réglementé à la fois par la loi et par l'intervention tant du ministère de la Main-d'œuvre que du sommet de la hiérarchie syndicale. Il détermine le degré de démocratie autorisé par le pouvoir politique. Nous montrerons en premier lieu que le système de délégation, qui constitue les différents niveaux de la hiérarchie syndicale, «°verrouille°» le contrôle politique du syndicat dès la base de ce dernier. Nous rappellerons comment la loi et l'intervention du ministère de la Main-d'œuvre renforcent le pouvoir hiérarchique dans le syndicat. Nous examinerons ensuite les règles de découpage des circonscriptions électorales et de sélection de l'élite syndicale et la manière dont l'État détermine et gère le risque politique lié aux relations de travail.
31Le schéma en annexe illustre la structure syndicale, les mécanismes de formation des organisations et de sélection de l'élite de la FGSTE aux différents niveaux hiérarchiques.
Un système de délégation «°verrouillé°» au niveau du syndicat de branche
32De 1°500 à 2°500 circonscriptions d'affiliés électeurs élisent (ou voient nommés) de 1°500 à 2°500 comités syndicaux. Les élections sont contrôlées par autant de commissions électorales secondaires supervisées par 33 commissions électorales principales. Ces dernières sont réparties entre les directions du travail de chacun des 26 gouvernorats et des 7 grandes zones industrielles.
33Chaque circonscription élit un comité syndical composé de 7 à 21 membres selon le nombre de votants dans la circonscription. Chaque votant doit choisir dans une liste agréée par la FGSTE le nombre requis de candidats au comité.
34Les membres du comité syndical élisent un bureau de trois membres (président, secrétaire et trésorier, selon l'ordre des voix obtenues). Ils élisent également à leur syndicat de branche des délégués, dont le nombre varie selon le nombre d'inscrits, et qui peuvent inclurent des membres du bureau. Ces délégués et le bureau constituent l'élite des permanents syndicalistes.
35Dans chacun des 23 syndicats de branche, les délégués des comités syndicaux élisent un conseil d'administration (CA) de 11 à 21 membres selon le nombre d'affiliés. Le CA du syndicat élit un bureau de 6 membres (président, secrétaire, trésorier et leurs adjoints respectifs). Il désigne également ses délégués à l'assemblée générale de la Fédération et son représentant au CA de cette dernière.
36Le CA de la Fédération, composé d'un élu pour chacun des 23 syndicats, élit son président et son bureau. Le président élu répartit les tâches entre les membres restant du CA.
37Depuis la création du ministère du Travail, la tradition qui consiste à nommer, au poste de ministre, le président de la FGSTE de la mandature précédente s'est perpétuée. Lorsque le ministre ne cumule pas les deux fonctions, il est nommé en même temps que le nouveau président de la FGSTE est élu par ses pairs. La parfaite entente entre les deux hommes, condition nécessaire au bon fonctionnement de l'activité syndicale, fait également partie de la tradition.
38Le même individu peut cumuler la présidence de deux niveaux successifs des quatre niveaux de la hiérarchie syndicale (comité syndical, syndicat, Fédération, ministère).
39Le système de délégation précédemment décrit «°verrouille°» le contrôle politique de la Fédération au niveau des syndicats. En effet, l'élite syndicale (assemblée générale du syndicat et au-delà) ne représente que de 0,1°% de l'ensemble des électeurs (affiliés). L'élite des instances dirigeantes (conseil d'administration du syndicat et au-delà) est limitée à 0,0125°% de cette base. Le cumul des mandats au sein de cette élite consolide son pouvoir et ses privilèges matériels. Son caractère minoritaire, ainsi que le système de cooptation dominant à partir du syndicat, renforce la logique de consensus et l'esprit de corps.
Des relations de pouvoir exclusivement hiérarchiques
- 22 Les élections durent 2 mois, du dépôt des candidatures (octobre) au choix des délégués, et membres (...)
- 23 Les deux autres assesseurs du bureau de vote représentent le personnel et sont désignés par l'empl (...)
40Le ministère supervise toutes les procédures électorales22 aux différents niveaux de la Fédération. Il fixe la date et le lieu du scrutin (dans l'entreprise ou les antennes locales du ministère). Il reçoit et contrôle les candidatures, par l'intermédiaire de ses directions régionales, de gouvernorat ou de grande zone industrielle. Il désigne un des trois assesseurs du bureau de vote, et un des quatre23 assesseurs de la commission de dépouillement des votes.
- 24 Toutes les grandes grèves ouvrières réclament la dissolution du comité syndical, dont la majorité (...)
- 25 Le syndicat collecte les cotisations. Il reverse 60°% des fonds au comité syndical (qui ne peut pe (...)
41La loi ne donne pas aux électeurs affiliés au syndicat le droit de retirer leur confiance au comité syndical qu'ils ont élu24. Dépourvu de personnalité juridique, le comité syndical n'a aucune autonomie financière ou politique25. Toute élection syndicale, à quelque niveau que ce soit, doit être avalisée par l'échelon supérieur, avant d'être reconnue légalement. Toute structure du syndicat peut de surcroît s'opposer à une procédure électorale concernant un échelon inférieur ou le dissoudre.
Règles constitutives du découpage électoral°: sectorisation et stabilité politique
42La composition des différents niveaux hiérarchiques de l'organisation syndicale obéit aux règles du découpage de ses circonscriptions électorales, établies conjointement par le ministère du Travail et la FGSTE. La logique de représentation du travail repose sur l'activité et non sur une base géographique, de façon à atténuer l'impact politique des grandes concentrations ouvrières et les risques d'extension de la contestation. La juxtaposition des deux espaces de la représentation et de la mobilisation syndicales est évitée sur le plan local comme au sein de l'entreprise. Le découpage de la circonscription électorale est dessiné en fonction du nombre d'affiliés et selon les deux principes de représentation unique par branche (sans distinction géographique) et de réduction du risque politique au niveau le plus décentralisé (l'entreprise ou la circonscription d'artisans).
43a) Une représentation unique par branche sans distinction géographique. Chaque entreprise élit un comité unique appartenant à un seul syndicat de branche. Lorsque les établissements de l'entreprise sont dispersés entre plusieurs gouvernorats, c'est la localisation du siège qui est retenue. Le découpage des circonscriptions syndicales d'entreprises publiques est structuré en branches d'activités, suivant la gestion sectorielle du secteur public prévalant avant 1991. Il diffère donc du découpage administratif et politique en gouvernorats et districts qui prévaut pour les élections législatives et municipales, et qui est utilisé pour les circonscriptions syndicales d'artisans. La logique de représentation du travail privilégie donc l'activité et évite la proximité géographique. Il n'existe pas de fédérations régionales, mais seulement des regroupements régionaux de délégués aux syndicats de branche et à la Fédération. Ces regroupements régionaux n'ont pas d'existence juridique, et leurs membres sont nommés par le Conseil d'administration de la Fédération.
44Dépourvue de reconnaissance formelle, la représentation géographique apparaît dans l'assemblée générale du syndicat, grâce aux quotas de délégués attribués aux entreprises selon leurs effectifs. Cette représentation est néanmoins biaisée, puisque les «°petits ensembles syndicaux°» sont relativement mieux représentés que les «°grands°». En effet, le système des quotas ne compense pas les écarts de taille. Ce biais permet de marginaliser les grandes concentrations ouvrières revendicatives au profit des circonscriptions plus modérées. La représentation géographique disparaît officiellement dans les instances de décision (Conseil d'administration et bureau), où les quotas ne s'appliquent plus. Cependant, c'est encore le représentant du syndicat comprenant le plus d'affiliés (textile) qui est coopté au sommet de la hiérarchie (présidence de la Fédération).
- 26 Avant 1995, cette décision revenait au ministre du Travail et au président de la FGSTE.
45b) Limiter le risque politique au niveau de l'entreprise. Le risque de mobilisation au sein de l'entreprise est atténué par la possibilité de réduire le nombre de représentants des secteurs susceptibles de produire une contestation. Les présidents de la FGSTE et du syndicat concerné26 peuvent décider, selon les circonstances politiques, de modifier la représentation des différents secteurs d'activité au sein d'une même entreprise. Il leur suffit de changer le nombre d'élus par secteur ou de choisir entre deux systèmes de pondération des voix°: celui de la circonscription ouverte et celui de la circonscription fermée.
- 27 En 1996, le ministère subordonne son accord aux candidatures individuelles à la confirmation par l (...)
46Dans la circonscription ouverte, l'ensemble des votants de l'entreprise élisent la totalité des membres du comité syndical. Dans la circonscription fermée, le vote de chaque secteur se limite à ses propres candidats. Dans les deux cas, les élus sont sélectionnés selon l'ordre des voix et les quotas préétablis par secteur. La circonscription fermée permet d'écarter les opposants susceptibles d'obtenir suffisamment de voix en dehors de leur secteur pour devancer les candidats du gouvernement dans l'ordre des voix. Les syndicalistes opposants sont généralement relégués aux secteurs ayant peu de personnels (entrepôts, administration, etc.). Le ministère du Travail peut également refuser certaines candidatures ou imposer, comme en 1996, des démarches supplémentaires27 visant à dissuader les candidats extérieurs à la sélection de la FGSTE. Malgré ces procédures, des opposants parviennent aux comités syndicaux (400 élus sur 25°000 en 1996). Le verrouillage des niveaux supérieurs de la hiérarchie est plus efficace et empêche l'accès des opposants.
Les règles de sélection de l'élite syndicale
47L'élite syndicale de la FGSTE est sélectionnée de façon à concentrer la représentation syndicale autour de l'élite ouvrière des grandes entreprises publiques. Ces salariés, qui bénéficient de la sécurité de l'emploi, des meilleurs salaires et sont héritiers des traditions revendicatives, sont également les plus susceptibles de menacer la stabilité politique. Suivant le progrès technologique et l'évolution de l'organisation du travail, les critères définissant l'élite ouvrière se sont déplacés des ouvriers qualifiés alphabétisés aux techniciens titulaires de diplômes intermédiaires. La pérennité de l'élite syndicale est renforcée depuis 1991, de façon à limiter la contestation au changement de politique économique. Les fonctions politiques et économiques de l'élite syndicale se sont diversifiées et étendues depuis 1957. Elles font du syndicat unique une des institutions politiques et économiques de l'État. Elles justifient, autant que la gestion du risque politique, l'ampleur du contrôle politique qu'exerce l'État sur l'élite syndicale.
- 28 Le taux d'analphabétisme en zone urbaine est de 26°% pour 1996. Sachant que ce taux est plus élevé (...)
- 29 En 1996,2 millions de diplômés se répartissent entre 26 syndicats professionnels, correspondant au (...)
- 30 Selon l'organe de la FGSTE, Al-'Amal, 80°% des mandats du Syndicat de l'enseignement ont été renou (...)
- 31 Le Bureau des entreprises publiques estime les travailleurs de plus de 40 ans en sureffectif dans (...)
48a) La scolarisation et le diplôme. Les critères de scolarisation et de diplôme restreignaient jusqu'en 1995 le droit de deux catégories de travailleurs à représenter eux-mêmes leurs intérêts spécifiques dans la Fédération°: les analphabètes et les diplômés. D'une part, la législation interdit aux illettrés de poser leur candidature. Bien que leur recrutement ait été proscrit dans les années quatre-vingt, 20°% environ des employés du secteur public relèvent encore de cette catégorie. Il en va de même pour les artisans28. Ce sont, pour l'essentiel, les travailleurs les plus âgés. D'autre part, la loi syndicale n°°36 de 1976 imposait un plafond de 20°% à la représentation des titulaires de diplômes universitaires affiliés également à un syndicat professionnel29. Cette restriction s'appliquait à toutes les instances de la hiérarchie syndicale. Le double critère scolaire privilégiait la représentation dans la FGSTE des travailleurs d'âge et de niveau de formation moyens, qui constituaient le gros des troupes des ouvriers et employés du secteur public. Or, en 1995, la Haute Cour constitutionnelle juge inconstitutionnel le plafond imposé aux diplômés. En libérant leur représentation, cet arrêt permet de modifier la composition socioprofessionnelle de l'élite syndicale en faveur des plus diplômés30. Il anticipe révolution de la population active, dont le niveau scolaire s'est élevé, et que les moins qualifiés sont amenés à quitter prochainement. En effet, le programme de restructuration et de privatisation des entreprises publiques a engagé depuis 1992 des réductions d'effectifs et de salaires, qui touchent en priorité les salariés les plus âgés31. Ces vieux travailleurs étaient traditionnellement représentés par les syndicalistes de leur génération, formés «°sur le tas°», qui avaient conquis depuis les nationalisations les instances de la FGSTE.
- 32 La minorité communiste, héritière du mouvement syndical historique, se trouve également parmi ces (...)
49Cette «°gérontocratie°» syndicale, bien qu'apparentée à la majorité gouvernementale32, est considérée par les responsables gouvernementaux comme un obstacle au processus de libéralisation de l'économie. La modification de la loi syndicale en 1993 leur permet néanmoins de conserver leurs mandats après leur mise à la retraite. De plus, la séparation entre la direction des syndicats de travailleurs et celle des syndicats professionnels est maintenue, puisque le cumul de mandats entre syndicats différents est toujours interdit par la loi. Mais, à moyen terme, on peut s'attendre à ce que le renouvellement de l'élite syndicale ouvrière au profit des qualifications les plus élevées ait aussi pour conséquence de renforcer l'exclusion politique des travailleurs les moins qualifiés.
50b) L'immobilisme de l'élite syndicale. Le taux de renouvellement des élus entre les deux élections de 1991 et 1996 varie considérablement entre les différents niveaux de l'organisation syndicale. Élevé dans les comités d'entreprise (90°%), il diminue dans les conseils d'administration des syndicats (60°%) et est minimal au niveau de la Fédération (30°%). En d'autres termes, le fait que 10°% seulement des syndicalistes de base aient été réélus par les travailleurs, n'a pas empêché 70°% des dirigeants des instances supérieures de conserver leur siège. Dans les milieux syndicaux, on entend souvent que les membres du conseil d'administration de la Fédération ne quittent leur poste que pour cause de retraite ou de décès.
- 33 Les modifications de la loi syndicale s'appliquent parfaitement au président de la FGSTE. Retraité (...)
51Cette stabilité de la hiérarchie, qu'atteste l'âge moyen de ses membres, a des causes institutionnelles. Premièrement, la loi syndicale exige qu'un élu ait passé au moins deux mandatures consécutives à un niveau déterminé pour pouvoir être coopté au niveau supérieur. Deuxièmement, la durée des mandatures a été étendue de 2 à 5 ans. Troisièmement, la loi syndicale a été modifiée en janvier 1995, de façon à maintenir en place les cadres syndicaux ayant dépassé l'âge de la retraite, et à autoriser leur réélection à un même niveau syndical, au-delà de deux mandatures consécutives. D'une part, la loi modifiée permet de conserver son mandat et de rester éligible, en obtenant une embauche de complaisance d'un autre employeur immédiatement après la fin du précédant contrat. Cette dérogation a été néanmoins restreinte à certains cas, soumis à l'approbation d'une commission dirigée par le Président de la FGSTE. D'autre part, la loi n'impose plus d'être réélu à un comité syndical de base pour pouvoir se représenter au conseil d'administration d'un syndicat ou de la Fédération33.
52On peut trouver aussi des raisons fonctionnelles au renforcement de la pérennité de la bureaucratie syndicale°: l'objectif de maintien du consensus autour de la politique gouvernementale, et les intérêts matériels afférents à l'exercice du ou des mandats. En effet, ces derniers permettent d'être élu député, de siéger dans des conseils d'administration d'entreprises et de holdings, de voyager, etc.
53Le contrôle très strict du renouvellement de l'élite syndicale présente un avantage certain pour le pouvoir politique. Il permet de moduler la représentation de l'opposition dans les différentes instances de la FGSTE d'une élection à l'autre, en fonction du consensus politique national du moment. En effet, la répression politique qui vise les candidats de l'ensemble de l'opposition syndicale limite les candidatures et oriente les résultats de façon à faire concorder la représentation syndicale avec la représentation politique de l'opposition. Ainsi, les élections syndicales et les élections législatives sont effectuées simultanément depuis 1976 (1979, 1984,1987, 1991, 1996). La répartition des sièges entre les courants de l'opposition est similaire dans les syndicats et au Parlement. En 1984 et 1987, cette répartition était de trois élus islamistes pour un élu de gauche. Elle s'inverse en 1991 et 1996, la gauche obtenant trois fois plus de sièges que les islamistes au Parlement comme dans les syndicats de travailleurs. Cette concordance permet au gouvernement de gérer la transition économique et politique avec plus de cohérence. En effet, le consensus obtenu au niveau politique avec les partis d'opposition est d'autant plus facilement respecté par leur base militante syndicale respective que ce respect conditionne la présence de leurs partis au sein du consensus avec la majorité.
54c) Les fonctions politiques et économiques de l'élite syndicale. Les fonctions de l'élite syndicale ne se limitent pas à la représentation et au contrôle politique des salariés et des travailleurs indépendants affiliés au syndicat. Elles s'étendent aux diverses structures représentatives, nationales et internationales, des travailleurs et de l'État égyptien. L'élite syndicale gère en outre les fonds des cotisations syndicales et une partie de la redistribution du profit au sein des entreprises.
55Les quelques centaines de permanents de la FGSTE sont une composante majeure des assemblées législatives nationales (Chambre des députés et Sénat) et locales (conseils municipaux). De par la Constitution, la moitié des assemblées doivent être constituées «°d'ouvriers°» ou de «°paysans°», et le président et le vice-président de la FGSTE sont vice-présidents respectivement de la Chambre des députés et du Sénat. Les membres de l'élite syndicale participent également à la politique gouvernementale à travers les conseils d'administration et assemblées générales des holdings et filiales des entreprises publiques, auxquels ils ont été nommés depuis la réforme de 1992. L'élite syndicale défend activement les options politiques générales de l'État égyptien dans les instances syndicales régionales et internationales. La FGSTE est membre actif et fondateur dans la Fédération des travailleurs arabes, l'Organisation du travail arabe, la Fédération des travailleurs africains, la Fédération internationale des syndicats et l'Organisation internationale du travail. L'élite syndicale contrôle la redistribution et le placement des cotisations syndicales obligatoires et volontaires entre les instances syndicales (Fédération, syndicats de branche et comités syndicaux d'entreprise). Elle gère les caisses de solidarité salariales des entreprises, ainsi que les coopératives de biens de consommation et les services financés par l'entreprise (soins, logement, voyages, sport, etc.). Elle supervise les institutions financières, économiques, sociales et culturelles relevant de la FGSTE. Ces institutions furent créées ou élargies suite à la modification n°°1, en 1981, de la loi n°°36 de 1976, accordant à la FGSTE une personnalité juridique distincte de celle des syndicats, et l'autorisant de ce fait à investir les fonds des syndicats dans les différents secteurs d'activité°: la Banque des Travailleurs, fondée en 1983°; l'industrie et le tourisme°; l'Institution sociale, dont l'imposante bâtisse a donné son nom à la place principale de la première banlieue ouvrière de l'agglomération du Grand-Caire, Shubra al-Khayma°; l'Institution culturelle, dont les stages de formation pour cadres syndicaux (en coopération avec des organismes extérieurs) contribuent à la reproduction de l'élite.
56Les membres de l'élite syndicale sont également des cadres actifs de partis et associations à caractère politique. Les présidents des «°Bureaux des travailleurs°» des partis sont les syndicalistes de ces derniers ayant atteint le plus haut degré dans la hiérarchie syndicale°: président de la Fédération pour le PND et présidents de comités syndicaux d'entreprise pour les partis d'opposition (Partis du Travail, du Rassemblement et nassérien). Les fondateurs et dirigeants des ONG de service syndical autorisé par le gouvernement depuis 1992 sont d'anciens syndicalistes, exclus du syndicat suite à leur licenciement, qui appartiennent aux courants politiques (communistes) que l'État ne peut légaliser mais accepte d'associer à la gestion politique des relations de travail.
Lecture des élections de 1996
- 34 Rappelons que les circonscriptions électorales regroupent les affiliés au syndicat sur la base de (...)
- 35 Les 24°600 autres élus se présentent soit comme membres du Parti national démocrate (gouvernementa (...)
57Les élections syndicales de 1996 inauguraient la dixième mandature (1996-2001) de la FGSTE depuis sa création en 1957. Parmi 150°000 candidats aux comités syndicaux des 1 500 à 2 500 circonscriptions électorales34, 25°000 délégués ont été élus, dont 728 femmes et 400 membres de partis d'opposition35. Les élus aux comités syndicaux ont désigné leurs délégués à l'assemblée générale (AG) de leurs syndicats de branche respectifs qui ont choisi à leur tour leurs délégués à l'AG de la Fédération. Les délégués au niveau du syndicat et au niveau de la Fédération ont désigné un conseil d'administration qui élit en son sein un bureau. Outre les 25°000 délégués des travailleurs aux différentes instances du syndicat, les élections syndicales de 1996 ont permis également d'élire leurs 5°000 représentants aux conseils d'administration des entreprises et des services publics.
58Si les élections font apparaître au grand jour tensions, permanences et changements, elles ne constituent pour autant qu'un temps de la vie syndicale. Nous replacerons tout d'abord les élections de 1996 dans leur contexte politique, social et syndical global. Puis, sur la base des informations fournies par ces élections, la composition actuelle du syndicat et les élections précédentes, nous reconstituerons l'évolution de l'organisation et de la représentation syndicales.
Le cadre général°: transition libérale et globalisation
59L'État égyptien conduit depuis 1974 une politique économique visant à renforcer l'intégration de l'Égypte dans l'économie mondiale. Il engage des négociations de partenariat avec les États-Unis et l'Europe, participe à l'OMC, conclut des accords avec le FMI et la Banque mondiale, cherche à développer les relations économiques régionales et investit les cadres de discussion moyen-oriental, arabe et africaine. Ces accords, passés et à venir, sont de nature à modifier les droits et obligations réciproques des acteurs individuels et institutionnels, et ce, sur quatre plans°: relations avec l'extérieur, intervention de l'État, gestion de l'emploi et des salaires, et fonctionnement des institutions représentatives.
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L'internationalisation des entreprises égyptiennes s'est accrue depuis 1974, tant par l'ouverture de secteurs de l'économie égyptienne aux investissements étrangers, que par la déréglementation des importations de marchandises et des exportations de capitaux.
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Le secteur public et la gestion étatique régressent au profit du secteur et de l'initiative privés, tant dans la planification que dans l'investissement ou les réglementations. L'entité «°publique°» tend à être supprimée par l'unification de la législation, les restructurations et les privatisations.
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La relation de travail entre employeurs et salariés est transformée en deux temps°: la segmentation de l'ancienne législation du travail est d'abord accentuée entre 1975 et 1991, pour isoler chaque catégorie, puis remplacée, à partir de 1992, par une législation en voie d'unification, qui assure la flexibilité des salaires et de l'emploi. La gestion du salaire est modifiée simultanément à travers la législation du travail, des caisses de retraite, des assurances de santé et le système des préretraites.
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La réorganisation des institutions politiques en charge de la négociation sociale s'effectue à deux niveaux°: elle passe, d'une part, par la réforme de la réglementation des syndicats professionnels et de salariés, ainsi que des associations patronales (loi n°°32 de 1964 sur les associations, lois sur les unions de Chambres de commerce et d'industrie)°; et, d'autre part, par une intervention politique directe dans le fonctionnement des ces institutions
La gestion politique des élections syndicales
- 36 Par le biais du Bureau des entreprises publiques, chargé de la gestion, de la restructuration et d (...)
60En janvier 1996, le Premier ministre est remplacé après dix années de stabilité de l'équipe gouvernementale. Le nouveau gouvernement promet d'accélérer le processus de privatisation et de libéralisation économique. Un accord avec le FMI est signé, confirmant l'entrée en application de la deuxième phase d'ajustement structurel, après le succès de la stabilisation monétaire (1991-1995). L'opposition sociale à la politique de privatisation englobe une part notable de la base et de l'élite syndicales. Elle perd de l'influence parmi les cadres supérieurs du secteur public, avantagés par la loi n°°203 de 1991. Elle est relayée par l'initiative de l'opposition politique islamiste et de gauche, qui fonde un comité de «°défense du bien public°» et attaque en non-constitutionnalité la politique de privatisation, réclamant plus de transparence et de participation politique. Suite à cette initiative, une circulaire confidentielle du gouvernement36 est communiquée à la presse°: cette directive appelle les directions de holdings et de filiales à contrôler les éléments hostiles à la privatisation.
61L'importance de l'opposition syndicale tient moins au nombre de ses élus qu'à leur influence passée et potentielle. Les élus et militants de l'opposition sont concentrés dans des zones considérées «°stratégiques°» du point de vue de la paix sociale°: zones industrielles et quartiers d'habitation ouvriers anciens des grandes concentrations urbaines, qui ont hérité de fortes traditions de contestation. Or les industries de ces zones sont frappées en priorité par les restructurations et les liquidations, elles sont vouées à être déplacées hors de leurs espaces traditionnels.
- 37 Selon Al-Ahâli du 01/01/1997, organe du Parti du Rassemblement, 250 des 315 candidats (75°%) du Pa (...)
- 38 Avec le multipartisme, la législation et les institutions syndicales deviennent indépendantes de c (...)
- 39 La moitié de ces refus concerne 7 syndicalistes de gauche, élus au comité syndical des aciéries Ha (...)
62La répression de l'opposition syndicale dans les élections de 1996 ne semble pas, d'après les résultats, plus sévère que lors des scrutins précédents, mais elle frappe les islamistes plus durement que la gauche. En effet, si l'opposition n'obtient que 400 des 8°000 sièges aux comités d'entreprise dans l'industrie et les services publics, elle voit gagner par ce score 75°% de ses candidats. Le Parti du Travail et les Frères musulmans n'occupent que le 1/4 de ces sièges, alors que le Parti du Rassemblement et le Parti nassérien en récupèrent les 3/437. Les partis d'opposition attribuent leur faible succès aux procédures visant à les écarter et à falsifier les résultats. Ils contestent le monopole conjoint du ministère de la Main-d'œuvre et de la direction de la FGSTE sur l'établissement des listes d'électeurs, le contrôle des candidatures aux différents niveaux hiérarchiques du syndicat, et le dépouillement des résultats38. Ils réprouvent l'absence de contrôle effectif du ministère de la Justice sur le déroulement du scrutin, ce dernier ne déléguant qu'un observateur par gouvernorat et ne donnant pas de suite à la plupart des plaintes déposées. De fait, des syndicalistes islamistes ont été arrêtés avant les élections afin de les empêcher de se porter candidats. De plus, 14 candidatures39 ont été officiellement rejetées. Mais sur un total de 150°000 candidatures, quelques arrestations et 14 rejets ne sont significatifs que parce que l'opposition reste numériquement marginale.
63Le changement de Premier ministre en 1996 est suivi par une campagne spectaculaire de remise au pas des cadres supérieurs du secteur public et des services publics ainsi que de la base de la hiérarchie syndicale. Le taux de renouvellement des présidents de holdings et de filiales s'amplifie. Les limogeages, placés sous le signe de la lutte contre la corruption, sont entourés d'une grande publicité, grâce à la mise à contribution de la presse d'opposition. Le redressement moral devient l'élément dominant du discours électoral de l'ensemble des syndicalistes. Ils participent ainsi à la campagne d'épuration des directions supérieures du secteur public, qui avaient bénéficié de cinq années d'autonomie relative dans l'autodétermination de leurs propres salaires. Le discours minoritaire de gauche, qui tente de lier la question de la corruption à celle de la privatisation, participe à ce mouvement. Parallèlement, le ministère de la Main-d'œuvre, secondé par la Cour des comptes, organise la mise en ordre des comités syndicaux, d'entreprise, en ouvrant plusieurs dossiers d'infractions financières et administratives. Cette procédure sera utilisée pour exclure du syndicat et des élections les sept élus de gauche aux aciéries Hadisolb de Hilwân.
Le mouvement ouvrier dans la transition°: intensification, segmentation, expectative
64L'adaptation du monde du travail à la transition libérale, dans les grandes entreprises publiques industrielles et de services, revêt plusieurs formes, décelables au niveau de la contestation ouvrière, des revendications, des lieux et formes de mobilisation, et des relations entre les différentes composantes du mouvement ouvrier. Les formes de cette adaptation influent à leur tour sur la représentation syndicale et sa gestion politique.
- 40 Les lois d'exception, dites «°d'unité nationale et de paix sociale°», furent votées en 1978, suite (...)
65En 1996, la question du droit de grève n'est pas élucidée, le gouvernement n'ayant pas tenu sa promesse... de faire voter par le Parlement le nouveau code unifié du travail. Le projet de code établit ce droit, tout en posant des limites rigoureuses à son exercice. Interdite par les lois d'exception de 197840, la grève est de fait reconnue par la ratification des conventions internationales du travail par l'Égypte. C'est d'ailleurs sur cette ratification que la juridiction d'exception de la Cour suprême de sécurité de l'État s'est fondée pour rendre un non-lieu, lors du procès des meneurs du conflit des conducteurs de trains, en 1985. Le niveau de contestation ouvrière, mesuré en heures de travail perdues pour cause de grève, est resté constant au cours des dix dernières années, mais ses formes se sont notablement modifiées.
66Entre 1984 et 1990, les grèves portent sur des revendications sectorielles et généralisables aux autres entreprises (paiement des jours chômés, augmentation des indemnités de repas). Elles se manifestent par des débrayages en chaîne qui provoquent l'intervention souvent violente des forces de police. Elles entraînent l'arrestation et la mise en accusation des meneurs et des organisations communistes clandestines accusées de les avoir provoquées. Elles suscitent des mouvements de solidarité relativement longs, qui débouchent sur la satisfaction de l'essentiel des revendications. Ces grèves se soldent par le déplacement ou le licenciement des principaux meneurs et leur exclusion des élections syndicales suivantes. Le Procureur socialiste, doté d'une juridiction en charge des biens publics, dispose en effet d'un droit de veto sur les candidatures. Ce veto est fréquemment utilisé contre les candidats de gauche pendant les années quatre-vingt. Cette période d'instabilité économique est caractérisée par la crise de la dette "extérieure et l'incapacité du gouvernement à mettre en œuvre la réforme économique libérale. Elle correspond à la phase de la «°cohabitation°» tacite avec les islamistes, qui sont autorisés à participer aux élections législatives de 1984 et 1987. Elle se traduit par la répression de la gauche syndicale et le boycott de la gauche politique aux élections législatives de 1990.
- 41 À Shubra, à Hilwân et Mahalla.
67À partir de 1991, les grèves se multiplient mais leurs revendications, leur durée comme leur impact sont généralement restreints à un seul établissement. Elles débutent pendant la crise du Golfe et suite à la grève brutalement réprimée des aciéries en 1989. Ces grèves éclair voient leurs revendications satisfaites presque immédiatement après leur déclenchement, sans intervention des forces de l'ordre. Elles s'inscrivent dans un climat de cohabitation tacite de la gauche politique et syndicale avec un gouvernement en lutte, depuis 1992, contre le mouvement islamiste, modéré et radical. Dans ce contexte, le gouvernement autorise la création, dans les principales zones industrielles en restructuration41, de centres d'aide syndicale et ouvrière dirigés par les syndicalistes communistes exclus de la vie syndicale pendant la période précédente. Ces ONG syndicales, comme celles de défense des droits de l'homme, offrent une défense juridique et syndicale gratuite dans les conflits du travail, la grève étant encore prohibée par la loi. L'existence de ces ONG dépend de financements extérieurs (elles n'ont pas le droit de collecter des fonds en Égypte) et de la tolérance politique du gouvernement. Le gouvernement favorise ainsi la prise en charge des litiges relatifs au travail par des organismes non représentatifs se substituant aux syndicats dans une de leurs fonctions traditionnelles. Cette période de cohabitation voit les 3/4 des candidats présentés par la gauche accéder aux comités syndicaux d'entreprise. Certains de ces élus sont même nommés dans les conseils d'administration des entreprises et des holdings publiques. La gauche politique remplace les islamistes au Parlement, tandis que les intellectuels de gauche sont intégrés dans de nombreuses institutions politiques et culturelles de l'État.
68Deux types opposés de grève du secteur public accompagnent en 1994 la soumission du projet de code du travail au Parlement°: une mobilisation pacifique, menée en juillet par un petit Syndicat (mines et carrières, 20°000 adhérents), et une grève violemment réprimée en septembre dans une entreprise du grand Syndicat du textile (200°000 adhérents).
69Le conflit des mines et carrières bénéficie d'une reconnaissance politique implicite, grâce au soutien de certains syndicats «°frères°» et au silence du CA du syndicat. Le débrayage d'un jour de quelques mineurs dispersés entre de petits gisements disséminés à travers tout le désert, obtient une couverture médiatique remarquable. Négocié par la direction du syndicat, ce conflit aboutit au règlement rapide d'un différend financier opposant le ministère des Finances et le holding gestionnaire depuis 1992, qui avait bloqué le versement des primes aux employés depuis cette date.
70La grève de Kafr al-Dawwâr implique 22°000 ouvriers rassemblés sur un même lieu, dans une des plus grandes concentrations industrielles, située dans la banlieue de la deuxième ville d'Égypte, Alexandrie. L'occupation de l'usine est désavouée par la majorité du comité syndical élu de l'entreprise et par le Syndicat du textile, que dirige le président de la FGSTE et vice-président du Sénat. L'occupation entraîne le siège par la police de l'usine et de la cité ouvrière, et se solde par des morts, des blessés et de nombreuses arrestations. Le conflit aboutit à la suspension provisoire des licenciements (non-renouvellement des contrats à durée indéterminée) et des réductions de primes qui l'avaient déclenché, mais se solde aussi par la fermeture d'établissements anciens. Le directeur avait provoqué la grève en appliquant la nouvelle loi n°°203 de 1991°: il voulait utiliser les licenciements et des réductions de salaires pour rétablir la discipline. D'abord soutenu par le holding de tutelle, il est finalement remplacé un an plus tard, ses méthodes de gestion «°révolutionnaires°» n'ayant pu améliorer la rentabilité de l'entreprise.
71Ces deux types de grèves sont symboliques des difficultés de la mise en application de l'ajustement structurel. Celle des mines illustre les conflits entre bureaucraties (ministère des Finances et holding) liés aux changements organisationnels°: ils concernent plutôt des secteurs sans problème économique grave, sont plus consensuels, mieux organisés et aboutissent à la satisfaction des revendications. La grève du textile illustre au contraire les problèmes de fond de l'ajustement structurel°: réductions d'activité, d'effectifs et de salaires, normes de gestion et de discipline. Les conflits y sont spontanés et violents, leur impact plus tangible sur le rapport de force politique que sur les conditions matérielles des salariés. Les conséquences de ces deux types de conflits sur le syndicalisme diffèrent également. Les grèves «°dures°» tendent à radicaliser le mouvement ouvrier, incitent les directions syndicales à écarter les opposants et le gouvernement à marginaliser les syndicalistes. Les conflits «°consensuels°» renforcent la position du syndicat comme intermédiaire obligé des relations de travail dans les secteurs moins touchés par la libéralisation.
Un mouvement syndical confronté à la rapidité et à l'incertitude du changement
72Dans la négociation tripartite sur le code unifié du travail, la représentation des travailleurs a été restreinte aux dirigeants de la Fédération et des syndicats, face aux représentants du patronat et du ministère du Travail. Cette élite syndicale obtient en 1995 une modification de la loi syndicale qui renforce ses privilèges et assure son maintien pour la durée de la mandature suivante (1996-2001), celle de la mise en œuvre du programme de privatisation. La position de l'élite syndicale durant la négociation sur le code unifié du travail ainsi que les privilèges qui lui sont accordés par la nouvelle loi syndicale suscitent une certaine réprobation au sein de la base.
73L'essentiel des débats syndicaux tourne cependant autour du dilemme posé par la libéralisation radicale engagée en 1991°: le syndicat pourra-t-il assumer les tâches découlant du nouveau code du travail (la négociation des conventions collectives et la protection du niveau des salaires et de l'emploi) alors que la libéralisation et la privatisation du secteur public réduisent à la fois sa base de mobilisation et les droits syndicaux°? De plus, la dérégulation du marché du travail et la régression des droits des salariés font craindre aux syndicalistes une perte de légitimité et un éclatement du mouvement syndical. Ces craintes, partagées par les différentes tendances, favorisent un consensus de type corporatiste qui met en avant trois priorités°:
-
maintenir l'unité syndicale et l'indépendance du mouvement syndical vis à vis des partis°: cet impératif se traduit par une forte réticence de la majorité des syndicalistes vis-à-vis du pluralisme proposé par une minorité de gauche ou islamiste°;
-
renforcer la formation des cadres pour leur permettre d'assumer leurs fonctions de négociation dans la nouvelle période°;
-
développer les ressources financières du syndicat pour alimenter des caisses de solidarité en cas de grève et pour assurer la formation des cadres.
Formes de la représentation syndicale
74Les critères de sélection de l'élite syndicale selon le cadre organisationnel et législatif de la relation de travail, l'employeur et la branche d'activité, sont un indicateur du degré du risque politique que constitue chaque secteur du point de vue des pouvoirs publics. L'étude de ces critères, effectuée dans la première partie consacrée à l'organisation de la FGSTE, est synthétisée dans la grille présentée dans le tableau 3 (annexe).
75La détermination du salaire, entre branches et entreprises publiques, puis entre employés d'une même entreprise, y apparaît comme le principal élément du développement de l'activité syndicale politisée. Les secteurs d'activité regroupés dans les syndicats sont classés par ordre croissant de participation électorale. La ligne 1 indique le déplacement du pouvoir de décision dans la gestion administrative et syndicale (représenté par @) dans chaque secteur, relatif à l'activité économique (pour le public) ou à son contrôle (pour l'artisanat) du sommet de la hiérarchie de l'État vers un niveau plus décentralisé. Ce déplacement entraîne un regain dans le secteur public de la fonction de négociation salariale des syndicats, qui se concentre au niveau des entreprises.
76L'activité syndicale et la participation électorale (indicateurs des lignes 8 à 12) semblent dépendre dans le secteur public du degré de libéralisation et de déréglementation de la détermination du salaire et des conditions de travail (lignes 2 à 7). En effet, la représentation au conseil d'administration de l'entreprise (ligne 8), le choix entre candidats multiples (lignes 9 et 11) et la participation aux élections syndicales (lignes 10 et 12) croissent avec la mobilité du salaire (ligne 2), la différenciation entre cadres supérieurs et employés dans la législation du travail appliquée (lignes 3 et 4), l'insécurité de l'emploi (lignes 5 à 7). Ainsi, les élections syndicales sont davantage politisées et bénéficient d'une plus grande participation dans le secteur public productif que dans les services publics. Elles sont plus politisées dans les services publics que dans l'administration. Font exception à cette règle certains syndicats de services publics, tels que le Syndicat des employés des chemins de fer et celui des employés du téléphone. L'action et la fonction de ces syndicats s'apparente davantage à celles des syndicats du secteur public industriel, du fait des traditions ouvrières militantes dans ces deux secteurs.
77Quant aux syndicats d'artisans et de métiers affiliés à la FGSTE, ils ne connaissent pas de vie syndicale propre, leurs délégués étant désignés (et non élus) par leurs syndicats respectifs et par la Fédération. La très faible participation électorale est due au caractère très formel de l'affiliation au syndicat.
78Les écarts de mobilité – indiquée par le taux de renouvellement des élus (lignes 13 à 15) – entre les trois niveaux hiérarchiques (comité syndical d'entreprise, syndicat de branche, Fédération) montrent que malgré une forte mobilité à la base, les syndicats du secteur public sont soumis, au niveau intermédiaire, à la même stabilité et au même contrôle par le pouvoir politique. La forte mobilité au niveau des comités d'entreprise a peu d'influence sur le fonctionnement du syndicat, les comités syndicaux étant dépourvus de tout pouvoir. Au niveau supérieur de la hiérarchie syndicale, la mobilité est minime (5°%).
79Les formes de l'activité syndicale (lignes 16 et 17) au niveau central (Fédération et syndicats) comme local (comités syndicaux) montrent un déplacement progressif de la fonction de négociation du sommet vers la base de la hiérarchie et son élargissement à la détermination du salaire, plus avancé dans l'industrie que dans les services publics et l'administration encore soumis à des cadres législatifs plus rigides. C'est cette fonction de négociation salariale qui confère à l'activité syndicale une intensité plus forte dans l'industrie que dans les services publics et l'administration.
80La sélection des cadres syndicaux est d'autant plus contrôlée par le pouvoir politique, représenté par le ministère de la Main-d'œuvre et la direction de la Fédération, que la mobilité syndicale est élevée à la base. Le tableau 1 (voir en annexe) montre que la désignation des délégués au syndicat sans compétition (par cooptation) concerne la moitié des syndicats de services publics et la quasi-totalité des syndicats d'industrie. La liste unique représentée par (*) s'impose donc en cas d'absence de mobilisation (agriculture, construction, transports routiers, tourisme, services sociaux) ou au contraire de trop forte mobilisation (industries, chemins de fer et postes). Les candidatures multiples représentées par (**) sont tolérées dans les syndicats où la mobilisation syndicale est faible (enseignement, santé, banques, médias, etc.). Le Syndicat des industries mécaniques constitue un cas particulier, dans la mesure où sa composition plurisectorielle (mécanique, électronique et métallurgie) favorise une compétition sur une base sectorielle.
Évolution des formes institutionnelles et du cadre législatif de la relation de travail en Egypte depuis 1957
81La FGSTE fut constituée en 1957 par le regroupement (et la dissolution) de plus de 500 syndicats indépendants, produit d'un demi-siècle de luttes syndicales en Égypte. Associé au parti unique, le syndicat unique visait à gérer les relations de travail sur un mode corporatiste. La candidature aux élections syndicales resta subordonnée à l'appartenance à l'Union socialiste jusqu'en 1976.
82À partir de 1976, le pluripartisme autorise le pluralisme politique au sein du syndicat, même si ce dernier reste limité dans les faits par les procédures de sélection des élus. Le mouvement revendicatif s'amplifie durant les années soixante et culmine durant la mandature 1976-1979. La FGSTE s'oppose au retrait des subventions à la consommation réclamée par le FMI et organise, en décembre 1976, une « Conférence sur les salaires et les prix°». L'annonce des hausses de prix ayant provoqué les «°émeutes du pain°» des 18 et 19 janvier 1977, le gouvernement promulgue les «°lois de la paix sociale et de l'unité nationale°». Ces lois restreignent le droit à toute forme de contestation, dont la grève. Le Procureur général socialiste est doté jusqu'en 1991 d'une juridiction spéciale, chargée de filtrer les candidatures syndicales, de juger les affaires de corruption et de gérer les biens privés mis sous séquestre. Les militants de gauche sont écartés des trois élections successives de 1979,1983 et 1987, malgré leur influence notable dans le mouvement revendicatif de la période. Le droit de contrôle des candidatures est retiré au Procureur socialiste en 1991, alors que commence la phase de «°cohabitation°» entre le gouvernement et l'opposition de gauche.
83Le début de la libéralisation se traduit par une refonte de la législation économique (1974), du secteur public (1975), de l'activité syndicale (1976), du code du travail dans l'administration et le secteur public (1978). Avec la décentralisation des décisions économiques du ministère du Plan vers les ministères sectoriels, la structure de la FGSTE se complexifie, et le nombre de ses syndicats passe de 17 en 1976 à 25 en 1979. Ce nombre est ramené à 23 en 1991, avec la réunification des différentes branches du secteur public sous un même ministère. Mais si sa taille croît, la représentativité de la FGSTE dans le monde du travail diminue avec le développement du secteur privé moderne, qui échappe à la législation syndicale. Dans la mesure où le secteur privé offre des rémunérations très supérieures à celles du public jusqu'à l'apparition de la récession en 1986-1987, la représentation syndicale se justifie davantage dans le public, où les salaires réels sont en permanence menacés par une inflation sans précédent.
84La poursuite de la décentralisation, avec le déplacement du centre de décision économique dans le secteur public des ministères vers les organisations de branche, s'accompagne d'un durcissement du contrôle par l'État de l'activité syndicale°: contrôle des candidatures par le procureur socialiste (1979), renforcement des pouvoirs de la hiérarchie vis-à-vis des comités syndicaux privés de personnalité juridique (1981). La décentralisation se traduit par une précarisation relative de l'emploi et du salaire°: suppression de l'embauche obligatoire et possibilité de moduler les salaires (1983). Alors que la FGSTE est dissociée juridiquement du ministère du Travail, ce dernier abandonne la défense des travailleurs non syndiqués du secteur privé aux juridictions pénales. La seconde vague de libéralisation (1991-1997) débouche sur une refonte de la législation°: secteur privé moderne (1991), secteur public (1991 et 1992), syndicat (1995), et code du travail (1998). La restructuration du secteur public se traduit par une très forte mobilité des cadres supérieurs. Elle opère une forte pression sur les salariés par la menace des réductions massives d'effectifs et de salaires. Elle renforce les prérogatives de la hiérarchie au sein du syndicat, mais réduit la représentation syndicale dans l'entreprise et dans les instances gouvernementales en charge de la politique économique (voir tableau 4).
Conclusion
85L'étude des critères de classification des travailleurs selon les catégories constitutives du syndicat, replacée dans son contexte historique, permet de retracer révolution des logiques de la représentation du travail en Égypte. Bien que théoriquement étendue à tous les travailleurs, salariés ou indépendants, l'affiliation au syndicat concerne presque exclusivement les employés du secteur et des services publics, ainsi que de l'administration. Une part importante des travailleurs du secteur privé artisanal, salariés ou indépendants, y sont affiliés d'office, sans toutefois participer à l'activité syndicale (élections et représentation), faute de mobilisation. Les salariés des grandes et moyennes entreprises du secteur privé sont privés de cadre syndical, la loi n'imposant pas leur affiliation et leur représentation dans leurs entreprises. Dans le secteur public, la représentation syndicale privilégie les ouvriers et employés qualifiés d'âge mûr (30-50 ans), qui sont les plus revendicatifs. Les dernières réformes de la législation tendent à déplacer la représentation vers des catégories plus élevées dans l'échelle sociale (techniciens et encadrement).
86La structure corporatiste du syndicat depuis sa création en 1957 n'a pas empêché le mouvement ouvrier d'unifier ses revendications, par diffusion des acquis d'une branche à l'autre (paiement des jours chômés, indemnités de repas). À côté de la structuration par branches de l'activité économique et syndicale, la législation avait permis l'unification relative des conditions d'emploi et de rémunération dans le secteur public. Cette unité est méthodiquement démantelée par le processus de libéralisation économique, de la périphérie (industrie) vers les éléments plus centraux du secteur public et étatique (services et administration). La segmentation des travailleurs en catégories distinctes touche simultanément le droit au travail et la stabilité de l'emploi, la grille des salaires, et la représentation dans l'entreprise.
87Le découpage électoral, constitutif des différentes structures de base et de la hiérarchie du syndicat, est guidé par les priorités de la gestion du risque politique que représentent les grandes concentrations ouvrières. Ces priorités se résument en trois principes°:
-
Limiter la représentation syndicale à l'élite ouvrière alphabétisée des grandes entreprises publiques qui bénéficient de la sécurité de l'emploi, des meilleurs salaires et sont héritiers des traditions revendicatives.
-
Empêcher la juxtaposition de l'espace de la représentation politique et de celui de la mobilisation physique°: en structurant l'organisation syndicale par branche et non sur une base géographique°; en modifiant la représentation des différents secteurs au sein d'une même entreprise.
-
Assurer une représentation syndicale au courant de l'opposition associé à la «°cohabitation°» politique dans les instances nationales, dans les limites quantitatives les plus faibles possibles.
-
«°verrouillage°» politique des syndicats les plus combatifs est assuré par l'obligation de présenter des listes uniques de candidats aux postes de délégués du comité syndical dans les CA des syndicats. Le contrôle absolu de la hiérarchie syndicale sur les syndicats d'artisans, qui constituent le quart des effectifs de la FGSTE, permet de marginaliser davantage les contestataires dans les syndicats et de les écarter totalement des instances supérieures de la Fédération. La bureaucratie de l'élite syndicale, sélectionnée parmi les éléments les plus «°consensuels°» du corps des ouvriers qualifiés des grandes entreprises et administrations publiques, est assurée d'une grande stabilité de carrière en échange de son adhésion à la ligne politique de la Fédération. Elle assure des fonctions politiques de représentation des travailleurs dans toutes les instances représentatives nationales égyptiennes, et de représentation de l'Égypte dans les instances régionales et internationales.
88Le fondement même de la représentation du travail reste néanmoins la négociation du salaire. L'intensité de l'activité syndicale dans le secteur public dépend clairement du degré de déréglementation de la détermination du salaire et des conditions de travail. En témoignent les corrélations positives entre d'une part, le taux de participation électorale, la diversité des candidats et la politisation des élections, le taux de renouvellement des élus de base, la représentation dans l'entreprise, et, d'autre part, la variabilité du salaire, l'instabilité de l'emploi et la différenciation entre les statuts des cadres et ceux des employés.
89Avec l'application du nouveau code du travail, qui unifiera la réglementation de l'emploi et du salaire dans les secteurs public et privé, et la privatisation, qui réduit les effectifs de la représentation syndicale, la FGSTE est confrontée à un dilemme°: s'adapter ou disparaître. Le code unifié du travail lui assigne de nouvelles tâches (négociation collective et représentation du secteur privé) auxquelles les syndicalistes ne sont pas préparés. Le contexte de dérégulation sociale et de récession économique ne facilite pas la mobilisation des travailleurs dans le secteur privé. Mais l'obligation politique de maintenir un minimum de protection sociale dans les secteurs qui en bénéficiaient auparavant, rend nécessaire la FGSTE, jusqu'à ce que les conventions collectives aient remplacé l'ancienne réglementation du travail dans les différentes branches du secteur public.
Annexe
Tableau 1 : Répartition des syndicats de la FGSTE selon la forme de candidature au conseil d'administration

Notes
1 Citons parmi ces travaux deux colloques organisés et coédités en 1997 par la Faculté d'économie et de sciences politiques de l'Université du Caire, la FGSTE et la Fondation Friedrich Ebert, qui étudient respectivement les élections de 1996 et la place des femmes dans le mouvement syndical:
2 Les quotidiens nationaux expriment en premier lieu l'opinion du courant majoritaire dans le Parti national démocrate, lui-même considéré comme parti du gouvernement.
3 Al-Sha'b ouvre ses colonnes aux Frères musulmans (dont l'organisation reste illégale) et exprime une sensibilité islamiste.
4 Le Parti du Rassemblement rassemble des communistes (dont le parti reste illégal), certains nassériens et des divers gauche.
5 Le parti libéral du Néo-Wafd ne participait pas aux élections syndicales et son journal a de ce fait très peu couvert la confrontation électorale.
6 Marqaz al-Musâ'ada al-Qânûniyya (Centre d'aide juridique), ONG spécialisée dans l'aide juridique au respect des droits de l'homme.
7 Parmi ces institutions, on mentionnera la Dâr al-khadamât al-niqâbiya wa-l-ummâliyya (Centre d'aide syndicale et ouvrière), ONG de service juridique et politique syndical fondée par des syndicalistes communistes au début de l'application du programme de stabilisation et d'ajustement structurel (PAS) en 1991.
8 La population active occupée (+°5 ans) est en 1996 de 16 millions, dont 2 millions ne relevant pas de la FGSTE (diplômés exerçant en libéral, patrons de grandes entreprises, etc.).
9 Depuis la huitième mandature 1987-1991. Le syndicat est la structure de base qui dispose d'une personnalité juridique. La loi distingue, d'une part, les affiliés au syndicat qui ne sont qu'électeurs, et, d'autre part, les élus à un syndicat et à la Fédération, qui en sont membres de droit.
10 Le paiement de cotisations sociales, qui attestent de l'exercice d'un travail légal, affilie les travailleurs à un syndicat de la Fédération. Le diplôme universitaire donne accès à un syndicat professionnel (avocat, médecin, ingénieur, comptable, enseignant, etc.). Tout diplômé employé par une entreprise cotisante bénéficie de la double appartenance syndicale. L'appartenance au syndicat de travailleurs est automatique pour les employés du secteur public industriel, des services publics et de l'administration. Elle est obligatoire pour les activités nécessitant l'obtention d'une licence d'exercice délivrée par une administration publique (chauffeurs de taxi, vendeurs du commerce de détail et employés de l'hôtellerie).
11 Faute de statistiques officielles publiées, notre estimation ne peut être que très approximative et ne vise qu'à donner un ordre de grandeur.
12 Au recensement de 1996, la population active occupée est estimée à 16 millions de personnes, dont 12 millions dans le secteur privé. En faisant l'hypothèse que la part des actifs du secteur privé exerçant dans des entreprises de plus de 50 employés (12°%) est restée inchangée depuis 1986, c'est seulement 1,44 million de travailleurs du secteur privé qui étaient susceptibles, avant 1993, d'élire des sections syndicales d'entreprise, soit presque autant que les effectifs annoncés par la FGSTE. Depuis 1993, un décret du ministère du Travail porte à 250 employés le minimum légal pour l'élection de délégués au comité syndical d'entreprise. Cette restriction limite à 500°000 le nombre de travailleurs du secteur privé autorisés à élire une section syndicale d'entreprise.
13 Les travailleurs indépendants et les salariés des petites et moyennes entreprises de moins de 50 employés occupent plus des 4/5e du secteur privé. En 1986, 77°% des travailleurs du secteur privé exerçaient dans des entreprises de moins de 10 employés, 11°% d'entre eux travaillaient dans des petites et moyennes entreprises de 10 à 50 employés.
14 Le changement de compétence entraîne un changement de dénomination°: en 1979, le ministère du Travail et de la Formation est rebaptisé ministère de la Main-d'œuvre et de la Formation. De 1979 à 1986, le ministre de la Main-d'œuvre sera aussi Président de la FGSTE.
15 La loi n°°203 de 1991 relative au secteur public comporte deux volets°: d'une part, la réorganisation des 17 sociétés holdings et de leurs 264 filiales, et, d'autre part, les relations de travail au sein des entreprises. Certains avantages acquis garantis par la loi n°°47 de 1978 réglementant le travail dans le secteur public sont abrogés. En attendant l'application du code unifié du travail, une certaine confusion juridique règne dans le secteur public.
16 C'est peut-être le vif débat que la loi unifiée a suscité parmi les travailleurs, les syndicalistes et les politiciens, qui a retardé sa ratification depuis sa mise à l'ordre du jour du Parlement en 1994.
17 La décentralisation s'effectue d'abord au niveau du lieu de la décision, qui se déplace du haut de la pyramide vers les conseils d'administration des sociétés holdings.
18 La société égyptienne est ainsi implicitement structurée par la Constitution en deux classes°: celle des exploités «°ouvriers et paysans°» et celle des nantis. Pour être considéré ouvrier, il faut ne pas être titulaire d'un diplôme universitaire, et pour être paysan, il faut posséder moins de 5 feddans (2,1 ha). La règle de représentation minimale des ouvriers et paysans est une discrimination positive qui vise à compenser l'injustice héritée de la période coloniale.
19 Cette restriction a été généralisée aux entreprises publiques déficitaires en cours de restructuration ou liquidation, où l'ampleur des dégraissages d'effectifs et des problèmes sociaux rendait la présence de délégués du personnel, même modérés, incompatible avec la gestion souhaitée pour l'entreprise.
20 Moins de 50 employés, cotisant aux assurances sociales et soumis à la loi 137 de 1981, relative au travail dans le secteur privé.
21 Un colloque sur la participation féminine aux élections syndicales de 1996 a été organisé conjointement par la Faculté d'économie et de sciences politiques de l'Université du Caire, la FGSTE et la Fondation Friedrich Ebert. Les actes publiés en 1997 sous le titre «°La femme et le mouvement ouvrier°» fournissent des estimations chiffrées que nous reprenons dans ce paragraphe. La répartition des inscrites entre les différents syndicats de la Fédération pourra être déduite du recensement de 1996. Les statistiques de l'emploi indiquent que 20°% des effectifs publics en 1995 (administration, entreprises industrielles et services) sont des femmes, soit près d'un demi-million d'employées. La FGSTE ne publie pas le détail de la répartition par sexe des élu(e)s entre les différents syndicats.
22 Les élections durent 2 mois, du dépôt des candidatures (octobre) au choix des délégués, et membres des CA et bureaux des syndicats et de la Fédération (novembre). Le calendrier est établi par le ministère en concertation avec les directions des entreprises.
23 Les deux autres assesseurs du bureau de vote représentent le personnel et sont désignés par l'employeur. Deux autres assesseurs de la commission de dépouillement sont nécessaires pour atteindre le quorum°: un syndicaliste et un juge présidant la commission, désignés respectivement par la FGSTE et par le ministère de la Justice.
24 Toutes les grandes grèves ouvrières réclament la dissolution du comité syndical, dont la majorité s'oppose au mouvement. Le CA du syndicat peut, à la majorité des 2/3, dissoudre le comité ou en exclure un membre. Ce fut le cas pour Abû al-'Izz al-Harîrî, député du Parti du Rassemblement et membre du comité syndical de la National Spinning Co. (al-Ahliyya) à Alexandrie.
25 Le syndicat collecte les cotisations. Il reverse 60°% des fonds au comité syndical (qui ne peut percevoir directement ses ressources propres), et 10°% à la Fédération, en dépose 5°% à la Banque du Travail et en conserve 10°%. Comité syndical et syndicat sont soumis au contrôle financier et administratif du ministère du Travail.
26 Avant 1995, cette décision revenait au ministre du Travail et au président de la FGSTE.
27 En 1996, le ministère subordonne son accord aux candidatures individuelles à la confirmation par la FGSTE de la validité de leur adhésion. La mesure semble paradoxale puisque les candidats sont théoriquement salariés et cotisants obligés, donc affiliés au syndicat. Elle peut avoir été justifiée par le souci d'écarter des élections les syndicalistes opposants licenciés ou déplacés de leur entreprise durant la précédente mandature.
28 Le taux d'analphabétisme en zone urbaine est de 26°% pour 1996. Sachant que ce taux est plus élevé chez les femmes que chez les hommes et chez les personnes de plus de 40 ans que chez les jeunes, que les artisans affiliés au syndicat sont des hommes de 20 à 50 ans, on peut estimer le taux d'analphabétisme des artisans syndiqués à 20°%.
29 En 1996,2 millions de diplômés se répartissent entre 26 syndicats professionnels, correspondant aux différents diplômes délivrés par les universités. L'adhésion est obligatoire pour les ordres délivrant une licence d'exercice de la profession (médecins, avocats, journalistes, enseignants), facultative pour les autres syndicats (commerciaux, techniciens, professions sociales, etc.). Dans les années soixante-dix et quatre-vingt, le nombre de syndicats professionnels et de leurs adhérents a considérablement augmenté, grâce à l'explosion du nombre de diplômés. Indépendante de l'exercice réel de la profession (la cotisation suffit), l'adhésion au syndicat est source de prestige social et d'avantages matériels (mutuelles, centrales d'achats, etc.). Elle constitue une structure de représentation professionnelle et politique, même pour ceux qui en sont officiellement privés (ingénieurs militaires, islamistes, etc.).
30 Selon l'organe de la FGSTE, Al-'Amal, 80°% des mandats du Syndicat de l'enseignement ont été renouvelés grâce à la suppression du quota de 20°% de diplômés°: les enseignants ont remplacé les administratifs non diplômés qui les représentaient auparavant.
31 Le Bureau des entreprises publiques estime les travailleurs de plus de 40 ans en sureffectif dans le secteur public à 20°%. Il envisage leur mise à la retraite anticipée contre versement d'une indemnité.
32 La minorité communiste, héritière du mouvement syndical historique, se trouve également parmi ces vieux travailleurs, tandis que les minorités nassérienne et islamiste recrutent davantage parmi les diplômés des écoles techniques, appartenant à une génération plus jeune. Bien que numériquement faible, la minorité de gauche, nassérienne et communiste, est suffisamment influente pour préoccuper les responsables de la restructuration du secteur public et motiver les diverses procédures visant à réduire sa représentation.
33 Les modifications de la loi syndicale s'appliquent parfaitement au président de la FGSTE. Retraité d'une entreprise textile publique, il a été réembauché par une entreprise textile privée dirigée par la même personne que son ancienne entreprise publique. Ne pouvant plus se présenter aux élections du comité de son ancienne entreprise et risquant de ne pas être élu au comité de la nouvelle, la modification de la loi lui a permis de conserver aux élections de 1996 ses mandats de délégué, membre du conseil et du bureau, et président, au Syndicat du textile comme à la Fédération.
34 Rappelons que les circonscriptions électorales regroupent les affiliés au syndicat sur la base de l'entreprise (pour le secteur public) ou d'une zone administrative (pour les artisans et les petites et moyennes entreprises du secteur privé).
35 Les 24°600 autres élus se présentent soit comme membres du Parti national démocrate (gouvernemental) soit comme «°indépendants°».
36 Par le biais du Bureau des entreprises publiques, chargé de la gestion, de la restructuration et de la privatisation des 17 holdings et 264 entreprises publiques.
37 Selon Al-Ahâli du 01/01/1997, organe du Parti du Rassemblement, 250 des 315 candidats (75°%) du Parti ont été élus aux comités d'entreprise°; 49 d'entre eux ont été cooptés aux instances intermédiaires (bureaux de comités ou délégués aux assemblées générales de syndicats). 50 candidats du Parti nassérien sont parvenus aux comités syndicaux d'entreprise, ce qui porte à 300 les élus de la gauche. Le courant islamiste (Parti du Travail et Frères musulmans) a obtenu 92 élus, soit le quart du score de l'opposition.
38 Avec le multipartisme, la législation et les institutions syndicales deviennent indépendantes de celles du travail en 1976. L'intervention des ministères du Travail et de l'Intérieur dans les élections syndicales traduit la difficulté d'appliquer dans les faits cette séparation juridique.
39 La moitié de ces refus concerne 7 syndicalistes de gauche, élus au comité syndical des aciéries Hadisolb de Hilwân, suite à la grève de 1989. Une affaire de détournement de fonds sert de prétexte à leur exclusion.
40 Les lois d'exception, dites «°d'unité nationale et de paix sociale°», furent votées en 1978, suite aux émeutes du pain de janvier 1977.
41 À Shubra, à Hilwân et Mahalla.
Haut de pageTable des illustrations
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Titre | Tableau 1 : Répartition des syndicats de la FGSTE selon la forme de candidature au conseil d'administration |
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Titre | Tableau 2 : Conditions d'appartenance à un syndicat de travailleurs |
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Titre | Tableau 3 : Formes de la représentation syndicale |
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Titre | Tableau 4 : Évolution des formes institutionnelles et du cadre législatif de la relation de travail en Egypte, 1976-1996 |
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Titre | Cadre syndical et mécanisme de formation de l’élite de la FGSTE |
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Pour citer cet article
Référence papier
Gamal Abdel Nasser Ibrahim, « Représentation syndicale et transition libérale en Égypte », Égypte/Monde arabe, 33 | 1998, 181-223.
Référence électronique
Gamal Abdel Nasser Ibrahim, « Représentation syndicale et transition libérale en Égypte », Égypte/Monde arabe [En ligne], 33 | 1998, mis en ligne le 08 juillet 2008, consulté le 17 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ema/1586 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ema.1586
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