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Dobashi Yoshimi, Penriuk et sa douleur. Ossements aïnous retenus prisonniers, trad. par Étienne Lehoux-Jobin

Québec, Presses de l’Université du Québec, coll. « Jardin de givre », 2023, 243 p.
Noémi Godefroy
p. 395-402
Référence(s) :

Dobashi Yoshimi, Penriuk et sa douleur. Ossements aïnous retenus prisonniers, trad. par Étienne Lehoux-Jobin, Québec, Presses de l’Université du Québec, coll. « Jardin de givre », 2023, 243 p.

Texte intégral

  • 1 Daniel Chartier, Lucien-Laurent Clercq, Jeffry Gayman et Sakurai Norio ont également collaboré à ce (...)

1Penriuk et sa douleur. Ossements aïnous retenus prisonniers est un ouvrage qui regroupe des poèmes de l’autrice aïnoue Dobashi Yoshimi 土橋芳美 (née en 1947), parus en japonais en 2017 sous le titre Itami no Penriuku. Toraware no Ainu jinkotsu 痛みのペンリウク―囚われのアイヌ人骨. Leur traduction en français (253 pages) par Étienne Lehoux-Jobin, parue en 2023 aux Presses de l’Université du Québec dans la collection « Jardin de givre »1, coïncide avec celle du manifeste de Nukishio Kizō 貫塩喜蔵 (1907 ou 1908-1985), Assimilation et vestiges des Aïnous. Manifeste précurseur autochtone, chez le même éditeur.

  • 2 Missionnaire anglais et pasteur anglican, il vécut à Hokkaido entre 1877 et 1941 et devint spéciali (...)

2Bien qu’il s’agisse d’un manifeste datant de 1933 et d’une suite de poèmes composés huit décennies plus tard, ces deux ouvrages se répondent parfaitement. Le premier, plein d’espoir, appelait à la coexistence fraternelle entre Aïnous et Japonais, dans un esprit de vertu, tandis que le second semble apporter un éclairage rétrospectif sous la forme d’un constat d’échec. En effet, à travers l’œuvre de Dobashi Yoshimi, ce sont les ossements de deux grandes figures historiques aïnoues, prélevés — sans autorisation — par des archéologues japonais, qui s’expriment, par le biais d’une sorte de prosopopée, sur le sort qui leur a été infligé. Ces pillages de tombe ont d’ailleurs eu lieu au moment même où Nukishio Kizō signait son manifeste en 1934. Ces deux grands personnages aïnous sont l’arrière-grand-oncle de Dobashi Yoshimi, Hiramura Penriuk 平村ペンリウク (1832-1903), un chef du village de Biratori 平取 (Hokkaido) ayant enseigné la langue aïnoue au missionnaire John Batchelor (1854-1944)2, et Bafunke バフンケ (1855-1919 ou 1920), de son nom japonais Kimura Aikichi 木村愛吉, chef du village d’Ai à Sakhaline (Aihama 相濱 en japonais et Советское en russe), dont la nièce (Chuhsamma) a épousé le grand ethnographe polonais Bronisław Piłsudski (1875-1930). Leurs ossements, ainsi que ceux de 1 600 autres personnes aïnoues, ont été dérobés sans autorisation, parfois même par la force, lors de pillages de sépultures autochtones à Hokkaido, aux Kouriles et à Sakhaline, entre les années 1880 et 1960 (p. 28), au nom de la recherche scientifique. Et malgré des décennies de demandes de restitution de la part des autochtones, aujourd’hui encore, il reste des os aïnous (dont ceux de l’aïeul de Dobashi), entreposés dans douze universités et dix-sept musées ou centres de recherches au Japon.

3Comme l’indique Jeffry Gayman dans son introduction, Dobashi Yoshimi est née en 1947, à Biratori, dans une famille aïnoue. Elle a entamé sa carrière en écrivant pour le mensuel aïnou Anutari Ainu (Nous, Humains), qui paraît entre 1973 et 1976. Malgré son talent littéraire, elle connaît un hiatus long de plusieurs décennies avant de reprendre la plume. Ses œuvres récentes ont été accueillies favorablement par la critique japonaise.

  • 3 Terme signifiant « cri d’alarme pour prévenir d’un danger ».

4L’œuvre originale comprend la suite de poèmes intitulée « Penriuk et sa douleur. Ossements aïnous retenus prisonniers » ainsi que la correspondance entre Dobashi Yoshimi et l’université de Hokkaido où sont conservés les restes de son aïeul. Dans la présente traduction, cette correspondance a été remplacée par un second poème, « Penriuk et Bafunke : peutanke3 à la vingt-sixième heure ». Si l’on peut regretter de ne pas avoir accès aux échanges entre Dobashi et l’université, il n’en reste pas moins que la traduction des deux poèmes est complétée par une présentation générale de la collection, un avis au lecteur, des notes linguistiques, une introduction, une préface, une postface, une note du traducteur, suivis d’une chronologie historique, politique et littéraire du peuple aïnou et d’une bibliographie sélective.

  • 4 Voir, par exemple, Nanta Arnaud, « Expositions coloniales et hiérarchie des peuples dans le Japon m (...)

5L’introduction par Jeffry Gayman (p. 16-41) s’ouvre sur « l’une des grandes injustices encore commises de nos jours dans le cadre du programme colonialiste » (p. 16), les recherches menées sur les restes humains, qui justifiaient des hiérarchies entre habitants des métropoles coloniales et des colonies (p. 17-18)4. Gayman présente ensuite rapidement qui sont les Aïnous, et parmi eux, Penriuk et Bafunke, des chefs de village qui ont incarné les valeurs essentielles de pawetok (éloquence), shiretok (beauté) et rametok (courage) (p. 23 et 27). Il propose ensuite un point sur la recherche scientifique sur les ossements aïnous – leur mode de prélèvement, leur traitement –, ainsi que sur l’absence de restitution et d’excuses (p. 28-32).

  • 5 Voir Iboshi Hokuto, Tsukahara Fumi et Blanche Patrick (trad.), Chant de l’étoile du Nord. Carnet de (...)
  • 6 Il est lui-même l’auteur d’essais et de textes littéraires portant sur Hokkaido et les Aïnous, parm (...)

6Avant de revenir plus en détails sur la structure de l’ouvrage, il brosse ensuite un aperçu de l’essor d’un mouvement littéraire aïnou, situant ainsi Dobashi Yoshimi au sein d’une longue lignée qui s’étend du début du siècle dernier, avec Iboshi Hokuto 違星北斗 (1901-1929)5, jusqu’à aujourd’hui. Cet aperçu se termine par une note d’espoir : « Malgré les circonstances cathartiques de sa création, ce livre porte une vision d’espoir pour l’avenir de la culture, de la langue et des valeurs aïnoues » (p. 35). Cette vision est partagée par le préfacier du texte original, le philosophe Hanazaki Kōhei 花崎皋平 (né en 1931)6, qui souligne le « grand talent littéraire » de Dobashi, mais aussi la valeur de cette œuvre en tant qu’« acte d’expression qui encourage et vitalise le mouvement actuel pour l’indépendance et l’autonomie du peuple aïnou » (p. 48).

7Le premier poème s’ouvre sur la joie de Penriuk à l’occasion de la visite de son arrière-petite-nièce le 11 juillet 2016, venue rendre hommage à ses ossements à l’université de Hokkaido. Il souhaite lui raconter leur histoire (p. 51-53). Son récit paraît avoir plusieurs vocations : une vocation édifiante – en ce qu’il met en lumière quelques-unes des grandes étapes de l’annexion du territoire aïnou et de l’assimilation de sa population autochtone (p. 63-65), ainsi qu’une vocation cathartique, d’apaisement et de pardon, pour Dobashi, comme pour son aïeul (p. 91, 94 et 99).

  • 7 Isabella Bird (1831-1904) : voyageuse et écrivaine britannique. En 1878, elle se rend à Hokkaido où (...)

8La narration est parfois entrecoupée par des extraits de documents écrits, permettant ainsi à Penriuk d’évoquer un événement, moment, ou personnage importants : un hommage rédigé à l’occasion de la cérémonie d’inauguration d’un monument commémoratif en sa mémoire en 1934 (p. 107-108) ; des extraits du rapport d’enquête sur les ossements conservés à l’université de Hokkaido (p. 61 et p. 88) ; d’autres du journal de voyage d’Isabella Bird7 (p. 67) ou bien encore de l’autobiographie de John Batchelor (p. 70). Batchelor est d’ailleurs présenté comme un acteur central de l’histoire, du fait qu’il traitait les Aïnous d’égal à égal, et qu’il s’intéressait à la culture aïnoue vivante, s’opposant ainsi à l’idée d’une « population en voie de disparition » (horobiyuku minzoku 滅び行く民族) (p. 68-74). Sa femme Louisa fait également l’objet de louanges ; la première intervention directe de Dobashi Yoshimi dans le texte prend d’ailleurs la forme d’une prière lors de son recueillement sur la tombe de Louisa Batchelor (p. 77-80). À cette occasion, Penriuk se réjouit de la conversion de son arrière-petite-nièce au christianisme (p. 80).

  • 8 Voir, par exemple, Yamada Takako, The World View of the Ainu: Nature and Cosmos Reading from Langua (...)

9Dans la troisième partie du poème (p. 83-94), Penriuk revient sur la visite de Dobashi. Les nombreuses données chiffrées (dates, nombre de membres de la famille présents, nombre d’employés de l’université sur place, numéros d’inventaire du classement des ossements), qui semblent symboliser les aspects logistiques de cette rencontre, s’opposent en tout point à la charge émotionnelle de ce moment tant attendu et unique (p. 83-84). Porté par l’émotion, Penriuk réclame la reconnaissance d’un « droit des ossements » et s’insurge : il devrait être au pays des morts, plutôt que d’avoir été tiré de son sommeil éternel et d’errer comme il le fait (p. 86). En effet, dans la cosmologie aïnoue, il existe plusieurs outre-mondes où se rendent les âmes (ramat) des personnes défuntes. Si leurs actions, la manière dont elles sont décédées et leur mode de sépulture le leur permettent, leurs âmes rejoignent le pays des dieux (Kamui moshir). Dans le cas contraire, elles se rendent dans des pays souterrains, où elles ne peuvent pas être réunies avec leurs proches déjà défunts, ou demeurent et errent dans le monde des Hommes (Ainu moshir)8. Malgré tout, face aux os de son aïeul, Dobashi, qui s’exprime directement une seconde fois, se sent apaisée, et promet de le ramener à Biratori (p. 90-92). Face à elle, Penriuk se dit heureux, sa souffrance accumulée lavée par les larmes de sa « chère descendante » (p. 93-94).

  • 9 Voir Godefroy Noémi, « Japan and the Ainu in the Early Modern Period », Oxford Research Encyclopedi (...)

10La quatrième partie du poème évoque la restitution et le rapatriement, quelques jours après cette rencontre, des ossements de douze personnes au village de Kineusu 杵臼. Penriuk regrette l’absence de « décence » de l’université de Hokkaido (p. 96), mais il se montre surpris et réjoui d’entendre prononcer de l’aïnou lors de la cérémonie de commémoration des ancêtres (icharpa) (p. 96-97), tout comme de voir des Japonais parmi ceux qui l’ont rendue possible. Il appelle sa descendante à pardonner aux Japonais, pour ne pas risquer d’éprouver de la rancune vis-à-vis de ceux qui, parmi eux, ont montré « humainement leur largeur d’esprit » (p. 99), en d’autres termes, de pardonner aux Shamo (« Japonais »), car il y a parmi eux des shisam, de « bons voisins », en langue aïnoue (p. 100). Le terme Shamo est une corruption du terme shisam ; il en est venu à porter un sens péjoratif, du fait du comportement des Japonais présents en territoire aïnou vis-à-vis des autochtones, au moins à partir du xviie siècle9.

11La cinquième partie du poème décrit un coup de théâtre ; les os présentés de manière indubitable comme étant ceux de Penriuk ne le sont peut-être pas. Dobashi est décontenancée (p. 104-105) et Penriuk est déconcerté : ne sont-ils pas censés être des spécialistes, ceux qui l’ont déterré à des fins d’analyse en 1933 ? De fait, Penriuk se montre dubitatif vis-à-vis du fait de rassembler les ossements aïnous à Shiraoi, dans le tout nouvel « Espace symbolique pour l’harmonie entre les peuples » que représente le Musée national aïnou (Upopoy) ; s’il est fréquenté par des « scientifiques » et des « chercheurs », comment pourrait-il être un lieu d’hommage aux morts (p. 112-113) ? Après avoir été dépossédés, être tombés dans la misère, poussés aux travaux forcés, les Aïnous voient leurs os devenir des jouets (p. 110-111).

12La sixième partie du poème constitue son dénouement. Penriuk tente de consoler sa descendante, entouré des âmes errantes des autres ossements. Sur le campus sylvestre de l’université de Hokkaido, qui ressemblerait presque à un village aïnou d’antan, il organisera une procession de crânes pour prier les divinités, afin d’être libérés de cette situation (p. 116-117). Il ajoute avec humour qu’il continuera à suivre les cours de l’université, lui, l’un des plus anciens élèves, dont le numéro d’inventaire fait office de numéro d’étudiant (p. 119-120). Les dernières paroles de Penriuk ont pour objectif de donner de la force à Dobashi : « Les Aïnous ne s’éteignent pas/ils sont bien vivants ! […] essuie tes larmes et relève-toi. L’histoire de Penriuk et de sa douleur/continue de la raconter » (p. 123).

13La structure du poème en parties distinctes reflète l’ascenseur émotionnel qu’a subi Dobashi Yoshimi, comme une sorte de reflet déformé, voire inversé, du modèle des cinq étapes du deuil de Kübler-Ross : la joie des retrouvailles, la gratitude envers les époux Batchelor, l’apaisement, coupés court par la colère induite par la découverte de la méprise quant à l’identité des ossements, colère qui s’efface finalement au profit d’un dénouement porteur d’espoir.

14La postface, rédigée de la main de Dobashi, est très courte (p. 125-126). Outre sa gratitude à Hanazaki Kōhei, elle y exprime son ressenti : ce livre étrange s’est comme écrit de lui-même, et les larmes qu’elle a versées lors de toute cette affaire n’étaient pas que les siennes, mais celles des ossements aïnous.

  • 10 Voir Godefroy Noémi, « Domination et dépendance : l’évolution du statut des chefs aïnous en Asie or (...)
  • 11 L’un des sens du terme Ainu en langue aïnoue est « être humain », ce qui renforce l’idée, présente (...)
  • 12 Ceci est particulièrement choquant car, d’après la tradition orale aïnoue, l’une des manières de se (...)

15Le second poème traduit dans cet ouvrage (p. 127-148) a pour titre « Penriuk et Bafunke : peutanke à la vingt-sixième heure » (le titre en japonais n’est malheureusement pas précisé). Comme le terme aïnou peutanke l’indique, il s’agit d’un cri d’alarme et de détresse de la part des ossements de Penriuk et de Bafunke, qui dialoguent entre eux. Mais on peut aussi y voir un plaidoyer, appelé charanke en langue aïnoue10, dont l’un des objectifs est d’obtenir réparation, voire compensation, pour un acte commis contre les plaignants. Bafunke s’insurge auprès des divinités de la profanation des sépultures – « Kamuy ! Cet acte/un crime d’une telle gravité/envers les Aïnous/envers les humains/11ne pardonnez pas un tel sacrilège ! » (p. 140). Or, les responsables ne s’en cachent pas (p. 142). Pis, ils sont allés jusqu’à faire bouillir la dépouille de Bafunke pour la débarrasser des restes de chair, qui se sont alors répandus dans les égouts (p. 143)12.

  • 13 Le 8 mai 2023, les ossements de quatre Aïnous de Sakhaline ont été rapatriés depuis l’Australie, où (...)

16Contrairement au ton de Penriuk dans les dernières tirades du poème précédent, les derniers vers du second poème semblent teintés d’amertume et de pessimisme. Comment la science peut-elle justifier de tels crimes ? Comment l’université de Hokkaido peut-elle espérer cacher cette « vérité […] connue du monde entier »13 (p. 145) ? Comment oser refuser des autorisations de restitution aux familles, alors même qu’aucune autorisation de piller les sépultures n’a jamais été demandée (p. 146-147) ? Ce refus condamne ces ancêtres aux limbes, à errer sans trouver le repos, et pour toutes ces raisons, il faut lancer un cri d’alarme (peutanke).

  • 14 Souyri Pierre-François, « Une forme originale de domination coloniale ? Les Japonais et le Hokkaido (...)
  • 15 Yamada Takako, « Anthropological Studies of the Ainu in Japan: Past and Present », Japanese Review (...)
  • 16 Chamberlain Basil Hall, Aino Folk-tales, Londres, The Folk-lore society, 1888 ; Batchelor John, The (...)

17Le travail de traduction d’Étienne Lehoux-Jobin est remarquable. Malgré la difficulté de traduire des vers libres du japonais vers le français et la décision de reproduire presque à l’identique le nombre de pieds et de strophes (p. 152), cette traduction fluide sonne juste. Comme dans le cas du Manifeste de Nukishio, la vocation pédagogique de l’ouvrage est perceptible d’emblée ; l’introduction et les chapitres explicatifs (126 des 234 pages) visent à présenter l’autrice et son œuvre, mais aussi à faire connaître l’histoire des Aïnous. Une explication un peu plus fournie sur les modes de sépulture aïnoue et les croyances liées à l’au-delà aurait pu participer à éclairer les propos de Penriuk et Bafunke, ainsi que le traumatisme de leur descendance. Par ailleurs, malgré le caractère extrêmement utile de la bibliographie des principales sources sur les Aïnous en langue française, on regrettera l’absence de certains travaux de référence14. Concernant les sources en anglais, il manque des travaux importants portant spécifiquement sur la question de la restitution des os15, ainsi que des sources primaires portant sur la période à laquelle ont vécu Penriuk et Bafunke16.

18Il ne fait aucun doute que la lecture de cet ouvrage intéressera un public vaste et varié – des amateurs et amatrices de poésie aux personnes qui s’intéressent aux populations autochtones, aux revendications des minorités en contexte postcolonial, aux femmes de lettres contemporaines, au Japon, et aux Aïnous. Les derniers vers des poèmes de Dobashi sont d’ailleurs la preuve tangible que « les Aïnous ne s’éteignent pas [et qu’] ils sont bien vivants ! » (p. 123), mais aussi qu’il faut continuer à transmettre l’histoire de ces ossements : « L’histoire de Penriuk/et de sa douleur/continue de la raconter » (p. 123). Grâce au travail de toute l’équipe de spécialistes mobilisée par les Presses de l’Université du Québec, c’est désormais chose faite auprès du grand public francophone, et il faut les en remercier.

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Notes

1 Daniel Chartier, Lucien-Laurent Clercq, Jeffry Gayman et Sakurai Norio ont également collaboré à cet ouvrage.

2 Missionnaire anglais et pasteur anglican, il vécut à Hokkaido entre 1877 et 1941 et devint spécialiste de la langue et de la culture aïnoues.

3 Terme signifiant « cri d’alarme pour prévenir d’un danger ».

4 Voir, par exemple, Nanta Arnaud, « Expositions coloniales et hiérarchie des peuples dans le Japon moderne », Ebisu. Études japonaises, 37, 2007, p. 3-17, ainsi que ses autres travaux, cités en bibliographie dans l’ouvrage.

5 Voir Iboshi Hokuto, Tsukahara Fumi et Blanche Patrick (trad.), Chant de l’étoile du Nord. Carnet de Iboshi Hokuto, poète aïnou, Paris, Éditions des Lisières, 2018.

6 Il est lui-même l’auteur d’essais et de textes littéraires portant sur Hokkaido et les Aïnous, parmi lesquels le poème « Ainu moshiri no kaze ni fukarete » アイヌモシリの風に吹かれて (Porté par les vents du pays aïnou), primé en 2010 par le prix Oguma Hideo, ou son ouvrage Shizukana taichi. Matsuura Takeshirō to Ainu minzoku 静かな大地 松浦武四郎とアイヌ民族 (La grande terre calme. Matsuura Takeshirō et les Aïnous), Tokyo, Iwanami shoten, 1988, et son essai « Ainu Moshir and Yaponesia: Ainu and Okinawan identities in contemporary Japan », in Donald Denoon, Mark Hudson, Gavan McCormack, Tessa Morris-Suzuki (éd.), Multicultural Japan, Cambridge, Cambridge University Press, 1996, p. 117-132.

7 Isabella Bird (1831-1904) : voyageuse et écrivaine britannique. En 1878, elle se rend à Hokkaido où elle rencontre des Aïnous. Elle publie un récit de ce voyage en 1880 (Unbeaten Tracks in Japan).

8 Voir, par exemple, Yamada Takako, The World View of the Ainu: Nature and Cosmos Reading from Language, Londres, Kegan Paul, 2001.

9 Voir Godefroy Noémi, « Japan and the Ainu in the Early Modern Period », Oxford Research Encyclopedia of Asian History [en ligne] ; « Rethinking Ezo-chi, the Ainu, and Tokugawa Japan in Global Perspective », in Gary P.  Leupp et De-min Tao (dir.), The Tokugawa World, New York, Routledge, 2021, p. 370-404.

10 Voir Godefroy Noémi, « Domination et dépendance : l’évolution du statut des chefs aïnous en Asie orientale (xviie-xviiie siècle) », Extrême-Orient Extrême-Occident, 41, 2017, p. 207-239.

11 L’un des sens du terme Ainu en langue aïnoue est « être humain », ce qui renforce l’idée, présente dans cette strophe, que le fait de profaner des sépultures aïnoues porte atteinte au genre humain dans son ensemble.

12 Ceci est particulièrement choquant car, d’après la tradition orale aïnoue, l’une des manières de se débarrasser d’un mauvais esprit, incarné en animal ou en plante, est de l’enterrer au niveau des lieux d’aisance des femmes (menokoru). Voir, par exemple, l’Histoire de l’homme sauvé par un coucou (Ueda Toshi, Shiraishi Hidetoshi, « Folktales of the Saru Dialect of Ainu: Ueda Toshi’s Uepeker », Chiba Daigaku Yūrashia gengobunka kenkyūron, 5, 2002, pp. 178-196), ou l’Histoire du chat démoniaque (https://ainu.ninjal.ac.jp/folklore/corpus/en/).

13 Le 8 mai 2023, les ossements de quatre Aïnous de Sakhaline ont été rapatriés depuis l’Australie, où ils étaient conservés au musée national d’Australie à Canberra et aux musées Victoria à Melbourne, à la suite de demandes établies par l’Association des Aïnous de Hokkaido et l’Association des Enciw endeuillés (mot désignant les Aïnous de Sakhaline). Voir l’article de Tessa Morris-Suzuki, « Return to the Earth: How Indigenous Repatriation Links Australia to Northeast Asia », Australian Institute of International Affairs, 17 juillet 2023. Le 27 décembre 2023, la loi relative à la restitution de restes humains appartenant aux collections publiques est publiée au Journal officiel en France. En janvier 2012, le musée du Quai Branly avait déjà restitué vingt têtes maories à la Nouvelle-Zélande.

14 Souyri Pierre-François, « Une forme originale de domination coloniale ? Les Japonais et le Hokkaido avant l’époque Meiji », in Martine Godet, Muriel Carduner-Loosfelt, Hélène Coq-Lossky (éd.), De Russie et d’ailleurs : Feux croisés sur l’histoire – Pour Marc Ferro, Paris, Institut d’études slaves, 1995, et « La colonisation japonaise : un colonialisme moderne mais non-occidental », in Marc Ferro (dir.), Le livre noir du colonialisme : xvie-xxie siècle, de l’extermination à la repentance, Paris, Hachette, 2003, p. 545-574 ; Macé François, « Rythmes humains, rythmes divins dans les épopées ainu », Diogène, 181, 1998, p. 29-38 ; Godefroy Noémi, « Kita no zero nen : Hokkaido, an zéro – Origines et mise en place d’une transition coloniale originale (1869-1872) », Cipango, 18, 2011, p. 105-133 ; et « La minorité aïnoue dans le Japon moderne et contemporain. D’“anciens indigènes”, de nouveau(x) autochtones (1869-2019) », Ebisu. Études japonaises, 56, 2019, p. 255-287.

15 Yamada Takako, « Anthropological Studies of the Ainu in Japan: Past and Present », Japanese Review of Cultural Anthropology, 4, 2003, p. 75-106 ; Bogdanowicz Tomek, « Accepting the “real” past: An investigation into missing Ainu “grave goods” », The Journal of Ainu and Pacific Indigenous Cultures, 3, 2003, p. 47-66 ; Lewallen Ann-Elise, « Bones of Contention: Negotiating Anthropological Ethics within Fields of Ainu Refusal », Critical Asian Studies, 39, 2007, p. 509-540 ; Nakamura Naohiro, « Redressing injustice of the past: the repatriation of Ainu human remains », Japan Forum, 31 (3), 2019, p. 358-377 ; Roellinghoff Michael, « Osteo-hermeneutics: Ainu racialization, de-indigenization, and bone theft in Japanese Hokkaido », Settler Colonial Studies, 10 (3), 2020, p. 295-310.

16 Chamberlain Basil Hall, Aino Folk-tales, Londres, The Folk-lore society, 1888 ; Batchelor John, The Ainu of Japan, the religion, superstitions, and general history of the hairy aborigines of Japan, Londres, Religious Tract Society, 1892 ; Savage Landor Henry, Alone with the hairy Ainu. Or, 3,800 miles on a pack saddle in Yezo and a cruise to the Kurile Islands, Londres, J. Murray, 1893 ; Kindaichi Kyōsuke, Ainu life and legends, Tokyo, Board of Tourist Industry, 1941. Comme illustration de l’utilisation scientifique des ossements pillés, on pourra voir Busk George, « Description of an Aino Skull », Transactions of the Ethnological Society of London, 6 (1868).

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Pour citer cet article

Référence papier

Noémi Godefroy, « Dobashi Yoshimi, Penriuk et sa douleur. Ossements aïnous retenus prisonniers, trad. par Étienne Lehoux-Jobin »Ebisu, 61 | 2024, 395-402.

Référence électronique

Noémi Godefroy, « Dobashi Yoshimi, Penriuk et sa douleur. Ossements aïnous retenus prisonniers, trad. par Étienne Lehoux-Jobin »Ebisu [En ligne], 61 | 2024, mis en ligne le 25 décembre 2024, consulté le 07 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ebisu/10543 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/13140

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Auteur

Noémi Godefroy

Maîtresse de conférences à l’Inalco

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Droits d’auteur

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Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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