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Éditorial

Monique Grandbastien, Pierre Mœglin et Daniel Peraya

Texte intégral

1Ce premier numéro de l’année 2023 est un numéro varia, y figurent trois articles de recherche, complétés par trois lectures critiques et une introduction à la rubrique débat-discussion qui, cette année, propose de prendre du recul à l’ère de l’hybride et du tout distanciel en réinterrogeant la notion de présence.

2Après une année 2022 fortement marquée par des analyses et des retours d’expériences de formations mises en place rapidement pendant et après la pandémie, dans ce premier numéro de 2023, nos auteurs reviennent aux fondamentaux de la formation à distance, en approfondissant les questions relatives à la motivation des apprenants et aux ressources de formation.

3L’une des conséquences de la mise en ligne forcée de tous les enseignements a été le développement de formations en ligne pour les publics de classes primaires et secondaires. Les résultats d’une enquête auprès de principaux de collège a été publiée dans le numéro précédent, nous poursuivons cette ouverture avec un texte relatif aux ressources dans la formation aux médias dans les lycées et une lecture critique sur le rôle de l’oral dans les apprentissages.

4Plus généralement, on observe de nombreux sujets communs à plusieurs textes qui se font ainsi tacitement écho en abordant ces sujets selon des points de vue voisins ou complémentaires. Ils témoignent de convergences fortes dans les préoccupations des auteurs, qui, nous l’espérons, correspondent également aux attentes de notre lectorat.

5Deux articles sont consacrés à la question de la motivation des apprenants dans les formations en ligne de type MOOC. Ils font référence tous deux à la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan, qui, nous rappellent-ils, postule « que la motivation n’est pas une caractéristique intrinsèque stable de l’individu, mais un phénomène dynamique résultant de l’interaction entre l’apprenante ou l’apprenant et son environnement ». Ils développent deux aspects complémentaires de la motivation, l’un en proposant une échelle de mesure de la motivation, l’autre en analysant des formes de soutien à la motivation des étudiantes et des étudiants. La question de la motivation a déjà été abordée dans DMS. La consultation par mots clés renvoie aux numéros 6, 10, 13, 17, 19, 22, 26 et 33. Par ailleurs, lorsque la motivation ne constitue pas le point central de la recherche, elle est évoquée comme une des facettes d’autres préoccupations, par exemple, et en nous limitant à l’année 2022, l’étude de Cathia Papi (DMS n° 37) sur les causes d’abandon au sein d’un Mooc ou bien la grille d’analyse proposée dans (DMS n° 40) par Yannick Stéphane, Nleme Ze et Gaëlle Molinari destinée à rendre compte de la nature et de l’intensité de l’implication des apprenants dans les forums de Mooc.

6L’article de Mejdi Ayari, Béatrice Mabillon-Bonfils et Laurent Jeannin, intitulé « Élaboration d’une échelle de mesure de la motivation dans un dispositif de cours en ligne ouvert et massif (EMOC-CLOM) en contexte francophone » explique comment cette échelle a été élaborée à partir de jeux de données collectées auprès d’apprenants inscrits au MOOC « Préparer et réussir le DELF B2 et le DALF C1 » de l’Université de Jendouba (Tunisie). Les auteurs invitent d’autres chercheurs à se saisir de cette grille pour tester son adéquation à d’autres contextes.

7L’article de Eva Louvet et Henrico-Pio Basile, intitulé « Mise à distance des enseignements dans le contexte de la crise sanitaire : Comment soutenir la motivation des étudiants ? » présente une étude empirique ayant pour objectif de vérifier l’efficacité d’un dispositif pédagogique s’inscrivant dans le courant des pédagogies actives pour soutenir la motivation des étudiants. Ce dispositif a été conçu dans le cadre de la mise à distance des enseignements pendant la crise sanitaire liée à la COVID-19. Les données de l’étude ont été collectées auprès de 83 étudiants de licence de psychologie. Les auteurs concluent à une appréciation positive de leur dispositif pédagogique que rien n’empêche de pérenniser, transformant de facto le retour au présentiel en formation hybride.

8À côté de la motivation, et en lien direct avec le maintien de celle-ci, la qualité et l’adéquation aux besoins des ressources mises en ligne sont des facteurs déterminants dans le succès d’un parcours d’apprentissage. L’hybridation croissante des formations donne alors une importance particulière aux ressources de formation. Le texte proposé par Sabine Bosler et intitulé « Les ressources en éducation aux médias et à l’information à destination des enseignants du CLEMI : quelle(s) médiation(s) des savoirs ? » est donc particulièrement bienvenu.

9Ce texte mérite une mention particulière à plus d’un titre. Tout d’abord il est issu d’un partenariat1 entre la revue DMS et le Groupement d’Intérêt Scientifique Innovation, Interdisciplinarité, Formation » (GIS 2if)2. Le GIS 2if a créé un prix de thèse en 2022 et, conformément à l’accord qui nous lie, il a été décidé qu’un article portant sur la thèse serait publié dans la revue Distance et Médiation des Savoirs, revue doublement qualifiante pour l’accès aux fonctions de maître de conférences dans les universités françaises en sciences de l’éducation et en sciences de l’information et de la communication. Il est indiqué dans cet accord que « La rédaction de cet article pourra bénéficier de l’accompagnement du comité éditorial de la revue. Cet article s’inscrira autant que possible dans les domaines de compétence de la revue et, à ce titre, il s’efforcera d’apporter des éclairages intéressants sur les questions liées à la distance, ses usages et ses représentations dans l’éducation et la formation. Il comportera la mention du prix de thèse ».

10Ce prix a été décerné pour la première fois en 2022 à Sabine Bosler pour un travail en sciences de l’information et de la communication préparé sous la direction de Olivier Thévenin et de Carsten Wilhelm, et soutenu à l’Université de haute Alsace le 15/12/2020, intitulé « Éduquer aux médias à l’ère numérique. Enjeux communicationnels de la médiation des savoirs en éducation aux médias dans une perspective franco-allemande ». Notons que cette thèse a également été distinguée par le prix universitaire franco-allemand Grand Est.

11Ensuite, du point de vue de la méthode retenue, l’autrice nous propose une étude longitudinale, sur 10 ans, entre 2010 et 2019, des ressources pour l’éducation aux médias constituées par les brochures du CLEMI3 et nous permet ainsi d’analyser le rôle de cet organisme sur la période étudiée pour la médiation des savoirs. Il est rare et donc particulièrement intéressant de pouvoir publier les résultats d’une étude de terrain sur une telle durée.

12Enfin, le sujet traité dans cet article, les ressources pour l’éducation aux médias dans l’enseignement secondaire, est au cœur de toute formation en ligne sur ce sujet. DMS a déjà accompagné la réflexion sur les ressources pour la formation en ligne, notamment en 2020 dans le numéro thématique 31 intitulé « Des ressources aux pratiques éducatives libres : quelle réappropriation dans la formation ouverte et à distance ». Si l’éditorial proposé par Luc Massou, Cathia Papi et Hélène Pulker envisageait tout type de ressources pour tout type de public, les contributions du numéro visaient plutôt le niveau universitaire. Les ressources proposées par le CLEMI, que Sabine Bosler a étudiées, sont plutôt destinées aux enseignants de l’école secondaire qui décident eux-mêmes de celles qu’ils utiliseront avec leurs élèves dans le cadre de leurs cours délivrés en présentiel. Elle nous livre une typologie détaillée de ces ressources. La question du volume 31 est alors plus que jamais d’actualité : quelle réappropriation de ces ressources pour des formations partiellement ou totalement à distance ? On peut y ajouter : l’intermédiation de l’enseignant est-elle modifiée et comment ? et inviter la communauté enseignante à apporter des éléments de réponse au cas par cas.

13La section des lectures critiques comporte trois ouvrages analysés qui sont autant d’invitations à élargir notre regard et à prendre du recul par rapport au quotidien.

14La première recension, écrite par Catherine Aymé et Aliénor Petiot, concerne l’ouvrage édité par S. Collin, J. Denouël, N. Guichon et E. Schneider, paru en 2022 aux Presses des Mines à Paris et intitulé « Le numérique en éducation et formation. Approches critiques ». Les auteures soulignent que « cet ouvrage offre un état des lieux fort utile sur l’approche critique dans le champ de recherche que constitue le NEF [Numérique en Éducation et Formation] ». Elles concluent ainsi : « L’invitation à adopter et conserver une posture réflexive dans tout travail de recherche est bienvenue, particulièrement pour les étudiants de master recherche et les doctorants. La lecture sera précieuse pour tout enseignant-chercheur souhaitant développer ses réflexions sur le sujet du NEF, notamment dans la perspective de développer une collaboration interdisciplinaire. Toutefois, au-delà du public universitaire, il serait souhaitable que d’autres acteurs puissent bénéficier de cette contribution : ingénieurs pédagogiques, personnels liés aux gouvernances universitaires, directions de structures, chargés de projets publics ou privés, etc. ».

15La seconde recension nous invite à une réflexion encore plus distanciée à propos de la technologie dans les systèmes éducatifs. Elle est proposée par Pierre Mœglin sur l’ouvrage de Laurent Boyer intitulé « Socrate à Santorin. La technologie peut-elle tuer la pédagogie ? », paru à Limoges en 2022, chez Fyp éditions. Laurent Boyer est professeur de philosophie et nous invite à une réflexion philosophique sur le numérique éducatif, d’où l’allusion à Socrate. Quant à Santorin, si ce n’est encore pour vous qu’une île grecque dont vous cherchez désespérément quels liens elle peut entretenir avec les technologies éducatives, il vous faut lire l’ouvrage de Laurent Boyer. Pierre Mœglin nous fait cheminer à travers ce livre, l’on y reconnaîtra les différents courants philosophiques qui peuvent permettre de situer les avancées du projet numérique éducatif dans lequel nous sommes tous embarqués et de nous doter d’une approche philosophique de ce monde numérique. Les cas évoqués sont certes empruntés à l’Éducation Nationale française, mais on en retrouve des équivalents dans beaucoup d’autres pays.

16La troisième lecture, proposée par Coraline Serre, porte sur l’ouvrage de Gwenaelle Chambonnière, intitulé « L’oral au cœur des apprentissages, pistes et enjeux pour enseigner l’oral sous toutes ses formes. » et paru en 2022 aux ESF Sciences humaines. Elle précise d’emblée que « Cet ouvrage s’adresse en priorité aux enseignants de collèges et de lycées, qui sont désireux de former les élèves à l’acquisition de l’oral, une compétence scolaire encore mal définie, et qui sont à la recherche de ressources pour accompagner au mieux les élèves dans ce qui relève aussi d’une construction identitaire et citoyenne ». C’est un ouvrage dans lequel s’articulent approche théorique et recommandations pratiques. Comme perspectives, Coraline Serre amorce un lien avec le rôle de l’oral dans les formations en ligne avec d’une part une nécessaire capacité d’écoute pour les documents vidéo ou audio qu’il faut étudier et d’autre part une capacité d’expression lors des séances synchrones en groupe ou des projets et autres travaux collectifs.

17La rubrique débat-discussion nous invite aussi à prendre un peu de hauteur, mais sur le concept même de distance en éducation, celui qui a fondé l’existence de notre champ de recherche et par conséquent de notre revue.

18Depuis une trentaine d’années, la distance a fait l’objet de nombreuses et nouvelles approches dont Distances et Savoirs (D&S), notamment en 2011, puis Distances et Médiations des Savoirs (DMS), notamment en 2014, et les pistes de réflexion évoquées dans l’édito du numéro 40 se sont fait écho. Il est en effet de notre ressort de nous interroger sur l’évolution du concept de distance, sur les limites de notre champ ainsi que sur les transformations des pratiques surtout dans un contexte de « distance choisie » après la période pandémique de « distance contrainte ». Dans la période post-covid actuelle, surdéterminée par une hyper-connectivité, dans laquelle les limites entre formation sur campus et à distance tendent à s’estomper, ne devrait-on pas réinterroger la présence ? Tel est l’objectif de la rubrique de cette année : soumettre à nos lectrices et à nos lecteurs des propositions interrogeant la notion de présence. Plus précisément, Daniel Peraya et Didier Paquelin proposent de sortir de l’opposition canonique présence-distance qui leur semble, malgré son évolution, enfermer les recherches ainsi que les pratiques de conception et d’ingénierie des dispositifs dans un cadre contraignant et sans doute réducteur au moment où de nombreuses formes de dispositifs – sans doute concurrents – émergent à côté de la formation exclusivement à distance (processus d’hybridation du distanciel et du présentiel, comodalité, etc.).

19Davantage qu’une invitation à la lecture de ce numéro, c’est une invitation à en prolonger et en enrichir les perspectives que nous lançons aujourd’hui. Celles et ceux qui, de très longue date pour certains, nous lisent savent que nous revenons régulièrement sur la notion de distance. Laquelle est bien sûr au cœur du projet sous-jacent à cette revue. Or, le moment est venu aujourd’hui d’un nouvel aggiornamento. Bienvenues sont donc toutes les contributions qui lui donneront une portée nouvelle, sous forme de propositions d’articles, de participation à la rubrique débat-discussion, elle-même appelée à se renouveler dans sa forme d’ici peu, de lectures critiques sur des ouvrages relevant de notre champ, ou de simple courrier des lecteurs. À vos claviers !

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Pour citer cet article

Référence électronique

Monique Grandbastien, Pierre Mœglin et Daniel Peraya, « Éditorial »Distances et médiations des savoirs [En ligne], 41 | 2023, mis en ligne le 20 mars 2023, consulté le 11 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/dms/8660 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/dms.8660

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