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Approche hybride et supervision des mémoires de DiPES et DiPET II : essai d’évaluation des activités de tutorat menant aux productions des écrits par les élèves professeurs

Hybrid approach and supervision of thesis of DiPES II and DiPET II : evaluation of the tutoring activities leading to the production of writings by the student professors
Julia Ndibnu-Messina Ethé

Résumés

Cet article s’intéresse à l’efficacité de la supervision des mémoires des élèves professeurs de langue dans les ENS de Yaoundé et Douala au sein d’un dispositif de formation hybride. Il voudrait résoudre le problème du suivi à distance et en présence des élèves professeurs inscrits au deuxième cycle. C’est pourquoi, l’enquête qui s’est partiellement déroulée en 2012, 2013 et finalisée en 2016 a été menée auprès de 73 participants répartis en présence et à distance. D’une manière générale, les élèves professeurs affirment bénéficier d’une amélioration dans le suivi quand ils sont encadrés avec l’appui des plateformes LMS avec en complément l’usage des réseaux sociaux. La médiation à distance devient une des composantes incontournables des supervisions de qualité et d’encadrement à l’université malgré les difficultés de manipulation des ordinateurs par les participants.

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Texte intégral

Remerciements

Nous tenons à remercier le projet AREN lancé par l’IFIC qui nous a permis de finaliser cet article. Nous remercions également nos formateurs pour toutes les réorientations et théories qu’ils nous ont conseillé d’utiliser dans le cadre de cette recherche.

Introduction

1En matière de présentiel, les amphithéâtres et les salles de cours des universités camerounaises souffrent d’effectifs pléthoriques. Le nombre d’apprenants en salle varie entre 60 et 150 et, dans les amphis, il varie entre 200 et 1000 élèves professeurs pour un seul enseignant. Ce qui génère des difficultés de supervision dans le cadre de la recherche et de la rédaction des mémoires de ces derniers. La supervision des élèves professeurs est à l’image du ratio enseignant/élèves dans les salles de classe et amphithéâtres : un enseignant pour environ 8 à 25 élèves professeurs en moyenne et en fonction des écoles de formation. Ces supervisions peuvent être réparties sur plusieurs universités et écoles assez distantes les unes des autres et dont les infrastructures routières qui les relient laissent à désirer. L’institution impose pourtant le suivi en présentiel de ces élèves professeurs. Celui-ci se déroule sous la forme de séminaires organisés hebdomadairement. La présence ne comporte pas que des limites et est généralement complétée par la distance. Le dispositif d’accompagnement à distance se démarque par l’utilisation des TIC dans l’apprentissage et l’enseignement, les interactions et le soutien pratiquement personnalisés, les discussions interactives et les feedbacks quasiment immédiats. Mais si l’encadrement des étudiants de langues semble se perfectionner, les institutions universitaires voudraient également désengorger les salles de classe tout en maintenant la qualité de suivi des élèves professeurs. L’hypothèse voudrait que le dispositif hybride fasse converger la distance vers le présentiel et vice-versa. Du point de vue de la supervision, l’association encadrement des élèves professeurs et dispositif hybride fait émerger le problème des formes de médiation alliant le présentiel et la distance lors du tutorat pour améliorer les productions finales dans les filières de langue française des apprenants encadrés à distance et en présentiel au niveau des mémoires.

2Pour donc comprendre les effets des dispositifs hybrides sur les performances finales des élèves professeurs, il semble nécessaire d’étudier leurs parcours, leurs attentes et leurs représentations par rapport à l’usage des plateformes et des réseaux sociaux. C’est ce que certains chercheurs comme Platteaux et Dasen (2004) effectuent lorsqu’ils abordent la satisfaction, la perception de l’apprentissage et la perception du dispositif du point de vue des étudiants. Et enfin, Delialioglu (2005) observe des opinions favorables au mode hybride à travers une efficacité d’une alternance communication synchrone/asynchrone pour la construction de la communauté (Peraya, Charlier et Deschryver, 2008). D’autres recherches ont présenté les avantages des dispositifs hybrides sans toutefois s’appesantir sur les contenus, les modèles de supervision, les étapes et périodes d’apprentissage et surtout la quantification en volume horaire du travail personnel de l’étudiant.

3Par ailleurs, des travaux sur les formes de médiation à distance à travers le tutorat sont nombreux. Papi (2014) aborde la question du tutorat des pairs dans l’enseignement supérieur en définissant le tutorat comme « accompagnement individualisé où tutorés et tuteurs apprennent, le tutoré s’identifiant à un tuteur qui n’est pas un professionnel de l’enseignement (Lepage et Romainville, 2009) ». Cette définition concorde avec la présente recherche, car les tuteurs sont généralement les étudiants doctorants chargés d’accompagner les élèves professeurs dans le processus de rédaction des mémoires et des speeches.

  • 1 DiPES : diplôme de professeur de l’enseignement secondaire ; DiPET : diplôme de professeur de l’ens (...)

4Il est donc question d’améliorer ces perspectives et d’observer les étapes de suivi à distance et en présentiel pour évaluer l’impact de l’articulation distance/présence dans la supervision des mémoires de fin d’études des élèves professeurs de 5e année. Néanmoins, Djeumeni (2016) aborde la question de la supervision de la recherche en Afrique en contexte FAD. Elle revient sur le contexte d’enseignement africain dans les salles de classe pléthoriques avec des approches magistrales centrées sur l’enseignant. Finalement, les résultats démontrent que malgré les limites d’accès à Internet, le travail s’est amélioré. Mais certains étudiants ne réussissent pas à gérer de manière optimale la quantité de ressources déposées sur la plateforme. Il serait donc opportun d’optimiser les ressources humaines et la communication. Cet article apporte partiellement des réponses aux questions de recherche relatives aux freins éventuels du tutorat en contexte camerounais, mais n’informe pas assez sur les modalités de médiation hybride dans un contexte institutionnel public telles que les universités étatiques, car elle s’attarde sur un centre équipé à cet effet, mais ayant un impact sur des étudiants camerounais. Ben Salah (2010) observe que la fonction du tutorat est « mal définie et peu institutionnalisée » ce qui laisse peu de place aux formations aux tutorats. Il faut toutefois constater que l’AUF a organisé l’une de ses premières formations au tutorat en 2012 car les besoins de modélisation se font pressants et l’atelier qui y consacré est Transfer 3.4. Ben Salah conclut que le tutorat est un métier qui s’impose et non une activité d’animation comme c’est le cas de cet article. Dans les Écoles normales supérieures, le tuteur le plus apparent est l’enseignant, c’est lui qui fournit les activités et une grande partie des ressources. Les tuteurs sont formés pour assister l’enseignant dans sa tâche d’encadrement et de suivi à distance des participants. Ils s’assurent de l’effectivité de l’exécution des activités hebdomadairement et relancent les élèves professeurs qui ne sont pas à jour. Il s’agit de répondre dans cette recherche à la question : quelles sont les formes que prend la médiation à distance dans un processus de formation hybride pendant le tutorat centrée sur la rédaction des mémoires de DiPES et DiPET II1 ?

5Notre recherche a pour ambition d’apporter une autre orientation qui se focalise sur le contexte camerounais pour identifier les moyens, les conditions de déploiement et de suivi des productions finales à partir d’un encadrement à distance/hybride dans des écoles normales supérieures de formations de futurs enseignants de lycées. Dans cette optique, nous nous proposons de commencer par aborder la dichotomie hybride et présentiel en contexte camerounais, la problématique, le cadre théorique, la méthode d’enquête avant de débuter sur une analyse des résultats qui conduit à des conclusions sur l’apport d’une approche hybride pendant la supervision des mémoires.

1. Enseignement hybride versus enseignement en présentiel en contexte camerounais

6Le rôle des enseignants évolue parce que les exigences et les besoins des apprenants se sont diversifiés. Dans ce sillage, de nouvelles réflexions naissent de toutes ces considérations. L’enseignement voit donc naître de nouvelles formes d’accompagnement comme le tutorat et la formation hybride. C’est l’une des raisons pour lesquelles, Rivens Mompean (2012) exploite le tutorat pour améliorer les compétences en anglais des apprenants.

7Toutefois, quoique présentant un démarrage difficile au Cameroun, les formations à distance récoltent un fort degré d’engouement de la part des enseignants et semblent devenir un modèle d’enseignement à suivre. Les plateformes LMS naissent pour améliorer la formation, le suivi et l’encadrement des élèves professeurs en FLE/FLS. La place est ainsi ouverte aux dispositifs d’enseignement en présentiel et à distance.

  • 2 ENSET: École normale supérieure de l’enseignement technique, ENS : École normale supérieure.

8Le dispositif d’enseignement en présentiel respecte les prérogatives institutionnelles camerounaises de l’heure (MINESUP, 2012). L’enseignement des disciplines fondamentales et transversales parachevé par la rédaction et la soutenance publique d’un mémoire au second cycle. Ce présupposé a permis la réalisation d’une enquête préliminaire à travers une observation participante en tant que formatrice à l’usage de Moodle à l’université de Yaoundé I et à la formation en langue de spécialité sous forme hybride à l’ENSET2 de Douala. Cette préenquête diachronique se fonde sur les pratiques institutionnelles en matière d’enseignement à distance et sur les enseignants ayant accepté d’être formés depuis 2012 à l’université, par les organisations comme l’AUF ou par nos soins. La construction de cette grille a orienté les débuts de cette recherche et permis l’obtention des données initiales qui conduisent à une déduction efficace sur le contexte dans lequel l’investigation est menée.

9Les aspects suivants ont été analysés en fonction des deux sites sur lesquels ont porté notre investigation :

Indicateur

Existant

Non existant

Plateformes à disposition

Accessibilité à la plateforme

Institutionnel

Individuel

Formations à l’usage de Moodle depuis 2012

10À partir de la grille, nous constatons qu’à l’université de Yaoundé I, la plateforme Moodle est offerte aux enseignants pour qu’ils puissent y déposer des cours. Toutefois, l’inscription des étudiants dépend fortement de la disponibilité des gestionnaires et surtout du paiement des droits universitaires par ces derniers. Cette centralisation au niveau de l’université de Yaoundé I entraîne généralement la création d’autres plateformes pour pouvoir tutorer les étudiants. Cependant, à l’université de Douala, aucune plateforme d’apprentissage n’est encore à disposition des enseignants. Dans les deux cas, l’usage des plateformes LMS n’est obligatoire que lors des formations à distance offertes par les universités. Ces formations souvent professionnalisantes (c’est le cas de l’école nationale de Polythèque qui a transformé les cours en MOOC) dans les établissements ne sont pas ouvertes à tous les étudiants. Relevant généralement du domaine individuel, l’usage des plateformes est facultatif. Dans le cadre d’une étude exploratoire, seuls les étudiants marquant leur accord peuvent intégrer les groupes de formation et de suivi à distance. Le suivi à distance complétant l’encadrement en présentiel, au-delà de sa généralisation dans les universités camerounaises, est un dispositif encore à ses débuts dans les écoles normales supérieures. Ce contexte institutionnel assez favorable permet de mener une recherche-action sur l’instrumentation des outils numériques, particulièrement sur les formes de dispositifs hybrides appropriées pour des étudiants suivis à la fois en présentiel et à distance. Également, il serait loisible de statuer sur une potentielle généralisation dans les écoles normales d’une complémentarité entre le présentiel et la distance en fonction des résultats à obtenir.

2. Problématique du suivi à distance dans un contexte camerounais

11Au regard d’une observation des emplois de temps, des cahiers de charge et des cahiers de textes, nous constatons que les élèves professeurs en deuxième année du second cycle de l’ENS de l’université de Yaoundé I et de l’ENSET de l’université de Douala font face à un nombre important de matières et doivent non seulement affronter un examen pédagogique après validations des crédits, mais également rédiger un mémoire de fin de formation portant sur des questions vives, originales et d’actualité, relatives à leurs filières.

12Après examen des notes de service et des déclarations de 3 enseignants, nous observons que la première stratégie des enseignants du département de français pour pallier le problème du nombre de matières et d’effectifs est d’assurer un suivi groupé de leurs étudiants en présentiel à travers des séminaires. La plupart des enseignants de ces écoles préfèrent appeler ce système d’encadrement, le « tutorat ». Ces derniers déclarent aborder des aspects méthodologiques pendant ces séminaires. Sans être trop naïfs, ils reconnaissent qu’au fil des ans, le nombre d’encadrés s’intensifie et parallèlement, les technologies éducatives se développent. Mais la primeur repose toujours sur les résultats finaux de la supervision : la rédaction du mémoire et sa soutenance. Dès lors, encadrer un certain nombre d’étudiants dans des universités situées dans des villes et régions éloignées et dont les infrastructures routières qui les relient laissent à désirer, pose le problème de la modélisation du suivi hybride et de l’amélioration des aptitudes rédactionnelles des élèves professeurs pendant leurs soutenances. dupe

13Les questions de recherche qui posent les bases de l’étude s’articulent ainsi : comment se présente l’articulation présence/distance dans le tutorat ? Que pensent les élèves de leurs performances finales lorsqu’ils sont suivis en tandem ? Quelle est la typologie des dispositifs hybride d’encadrement ? Pour répondre à ce questionnement, des théories centrées sur la médiation des savoirs et l’acceptation des technologies servent de fil d’Ariane à la méthodologie d’enquête utilisée.

3. Cadre théorique :

14Le cadre théorique de cette recherche s’articule autour de trois paramètres : le modèle d’acceptation des technologies, le sentiment d’efficacité personnel et la médiation.

3.1. La Technologie de l’« acceptance model » (TAM)

15Le TAM a été développé par Davis (1989) pour développer un système de reconnaissance des facteurs qui amènent les utilisateurs des nouvelles technologies à les accepter. Dans ce sens, Davis distingue 2 paramètres :

  • l’utilité perçue (PU) qui est « le degré auquel une personne croit que l’utilisation d’un système particulier permettrait d’améliorer son rendement au travail » ;

  • la facilité d’utilisation perçue qui est « le degré auquel une personne croit que l’utilisation d’un système particulier serait exempte d’effort »

16Il s’agit au final d’évaluer les degrés d’utilité et d’utilisation des outils numériques auprès de la population d’enquête car ces facteurs permettent de valider l’hypothèse relative aux éventuels freins au tutorat et à l’usage des plateformes LMS.

3.2. Le sentiment d’efficacité personnelle (SEP)

17D’après Bandura (2003), le « sentiment d’efficacité personnelle désigne les croyances des individus quant à leurs capacités à réaliser des performances particulières » en fonction du comportement, de l’environnement et de la personne. Quatre sources de la SEP permettent de le « construire et de le modifier » :

  • « l’expérience active de maîtrise » semble la plus déterminante. La réussite dans l’achèvement d’une activité au cours de l’expérimentation est factrice de croyance en des capacités personnelles positives.

  • « L’expérience vicariante ou l’expérience indirecte » repose sur « des comparaisons sociales, c’est-à-dire l’observation ». L’observation du rendement des pairs influence positivement ou négativement les croyances en la capacité de réussite.

  • « La persuasion verbale » consiste à améliorer des croyances en fonctions des conseils, des suggestions, des interrogations. La personne ressource ou le tuteur peut influencer la croyance en une efficacité selon « son expertise, la crédibilité et son attrait ».

  • « Les états physiologiques et émotionnels » reposent sur l’état de santé physique et moral du participant marqué par un conditionnement sur le « comportement demandé ».

18Dans cet article, le SEP revient sur les activités de production des écrits en interrogeant les sentiments personnels des étudiants relatifs à l’aboutissement des objectifs de rédaction des mémoires. Éléments catalyseurs décisifs pour l’achèvement de l’enquête et la mise sur pied des modalités du tutorat dans un dispositif hybride.

3.3. La médiation dans un dispositif hybride

19La médiation qui passe par une autonomisation guidée de l’apprentissage est au cœur du processus d’apprentissage. Peraya et al. (2008) synthétisent le processus d’analyse d’une expérimentation d’un dispositif hybride subséquemment :

20« 1. La position du dispositif relativement aux pratiques de l’institution ; 2. L’articulation présence-distance ; 3. L’accompagnement humain ; 4. L’environnement techno-pédagogique ». (Peraya, Charlier et Deschryver, 2008, p. 21)

21C’est pourquoi, le présent article explore la part institutionnelle dans le suivi en présentiel et à distance et les problèmes relatifs au tutorat. Pour retenir les formes de dispositifs hybrides utilisées dans l’encadrement des élèves professeurs au cours de cette recherche, nous nous baserons sur la typologie de Peraya (2014) développée dans le contexte HySup. Il s’agit des types scène, écran, gîte, équipage, métro, et écosystème. C’est la raison pour laquelle les apprenants sont « confrontés à leurs besoins propres » en matière d’orientation rédactionnelle et peuvent ainsi « développer leurs parcours d’apprentissage » à partir d’une forme de dispositif qui s’achèverait par la finalisation de son mémoire.

22Pour définir les perceptions que les élèves professeurs se font du dispositif et du sentiment de réussite que celui-ci pourrait générer, nous avons utilisé un entretien. Les conclusions tirées des analyses permettent de déduire d’une atteinte des objectifs pédagogiques et de recherche tels qu’opérationnalisés ci-dessous.

4. Méthode d’enquête

23La méthode d’enquête est mixte car elle associe le quantitatif et le qualitatif. Elle est également de type recherche-action. Dans l’optique d’évaluer l’impact d’une action sur un échantillon donné, la première partie de l’enquête, qui est quantitative, explore l’aspect utilitaire des outils numériques pour déterminer si les acteurs peuvent participer à l’enquête et quelle est leur représentation de ces outils. La deuxième partie, plus expérimentale, s’appuie sur une observation participante à partir des plateformes. Elle permet de recueillir les éléments de construction des savoirs en termes d’identification des ressources, des activités et des interactions.

4.1. Construction et administration des instruments d’enquête

24Deux instruments ont été construits en fonction de notre objet d’enquête. Le questionnaire et l’interview permettent de recueillir les informations sur l’utilité et l’utilisation des outils numériques et l’impact sur le suivi hybride des étudiants. L’interview quant à elle permet d’apporter des réponses aux questions de SEP et ses modalités. C’est à partir de ces réponses que la typologie sera élaborée.

4.1.1. Le questionnaire

25En référence au cadre théorique de Peraya (2014), nous avons adopté et adapté le questionnaire construit par l’équipe de HySup. Ce questionnaire résume le TAM et le SEP tout en interrogeant les contenus d’un dispositif hybride. Adapté au contexte camerounais de formation hybride, le questionnaire interroge les étudiants sur les usages des technologies, la perception des technologies comme incitants/obstacles pour l’enseignement, le profil du cours à distance et en présentiel, la description du cours sur le principe de l’alternance présentiel. Nous nous sommes limités aux questions relatives aux usages et perceptions de la technologie, à la perception du dispositif par les élèves professeurs et au sentiment de performance de ces derniers.

4.1.2. L’interview

26L’interview est construite pour recueillir les ressentis vis-à-vis du vécu personnel de chaque étudiant qui utilise la plateforme et les autres outils d’aide à l’encadrement à distance. Il fonctionne sur la base des questions semi-dirigées et orientées vers la satisfaction ou l’insatisfaction de ces derniers quant à l’apprentissage de la rédaction des mémoires sous une forme hybride. Il permet de compléter les réponses à la dernière hypothèse qui repose sur le sentiment d’efficacité personnelle véhiculée par l’usage des outils numériques pendant les encadrements à distance des élèves professeurs.

4.2. Collecte des données

27Le premier questionnaire a été administré en 2012 et le deuxième questionnaire a quant à lui été distribué en 2016. Ce dernier a été amélioré sur la base du questionnaire HySup sur les dispositifs hybride. Étant donné que les réponses sur les aspects TAM et SEP étaient insuffisantes dans le premier questionnaire (celui de 2012), nous avons pu les introduire et aborder les éléments concernant les formes de dispositifs hybrides. Les données du questionnaire ont été déposées sur la plateforme Moodle3 pour que les étudiants en prennent connaissance.

28L’interview a été effectuée en 2016 auprès des « représentants » de chaque groupe. Les enseignants disponibles ont pu répondre aux questions sur leur perception du dispositif et leur sentiment d’aboutissement. Quant à l’interview adressée aux élèves professeurs représentant le deuxième groupe, elle s’est déroulée dans les locaux de l’ENSET et ils ont répondu aux questions posées par l’enquêteur pendant une vingtaine de minutes.

4.3. Analyse et interprétation des résultats

29Les questionnaires ont été collectés et les pourcentages calculés en fonction du nombre de participants (62 dont 28 en 2012 et 34 en 2016), des tuteurs au nombre de 3 et des enseignants (7 dont 4 en 2012 et 3 associés en 2016 pour achever l’enquête). Ces données quantitatives ont été croisées avec celles qualitatives issues des entretiens et des questions ouvertes afin de recenser l’utilité, les perceptions du dispositif et des technologies et la performativité des élèves professeurs. Ces catégories ont été analysées séparément et les résultats présentés de la même manière. Les données de l’interview ont été analysées de manière à recenser les citations les plus significatives pour la compréhension des réponses de l’échantillon.

4.4. Terrain et population d’enquête

4.4.1. Terrain d’enquête

30L’enquête s’est déroulée à l’École normale supérieure (ENS) de l’université de Yaoundé I qui focalise sa formation des futurs enseignants de lycée sur l’enseignement général et à l’École normale supérieure d’enseignement technique (ENSET) de l’université de Douala dont les élèves professeurs se forment à l’enseignement technique dans les collèges d’enseignement technique et industriel (CETI) et les lycées techniques. Tous ces élèves sont censés devenir des enseignants au niveau secondaire. Leur formation s’effectue au sein des universités d’État camerounaises et est sanctionnée au premier cycle par un DiPES 1. Au second cycle, ils obtiennent un DiPES de deuxième grade. À l’ENSET, il s’agit d’un diplôme de professeurs de l’enseignement technique (DiPET) premier ou deuxième grade. Pour obtenir un DiPES ou un DiPET 2, les élèves professeurs soutiennent mémoire. Le deuxième grade se particularise par le diplôme d’entrée au moment du recrutement (les candidats doivent avoir obtenu une licence ou d’un niveau équivalent), leur formation tient sur deux ans et s’achève par une soutenance d’un mémoire. Les DiPES et DiPET 2 importent parce qu’à ce niveau sont appliqués tous les principes de la recherche malgré le nombre croissant des élèves par encadreur et la dynamique de celle-ci.

4.4.2. Population d’enquête et échantillon

31La population cible est constituée d’élèves professeurs finissant leur deuxième cycle et potentiels doctorants. Plus précisément, il s’agit des élèves professeurs des écoles normales supérieures des DiPES et DiPET 2. Les collègues qui ont accepté se prêter au jeu ont été sélectionnés sur la base de leur maîtrise de la bureautique et de l’appartenance à un des départements dans lesquels nous enseignions.

32L’échantillonnage non sélectif a consisté à retenir ceux des encadrés qui désiraient être suivis à distance et en présentiel en sachant que 70 % de l’encadrement se déroulerait par le biais d’une plateforme et de Facebook en groupe fermé au cas où un frein se poserait comme un obstacle au suivi sur la plateforme. L’échantillon se présente sous la forme suivante :

Tableau 1 : échantillon abordé

Année

2012

2016

Écoles normales

DiPES ENS de Yaoundé

DiPET ENSET de Douala

DiPES ENS de Yaoundé

DiPET ENSET de Douala

Élèves professeurs

11

17

10

24

Enseignants

2

2

3

4

Tuteurs

2

2

Total

34

43

Total général

77

33La population de l’enquête est évaluée à 77 participants dont 27 élèves professeurs en 2012 pour 34 en 2016 ; 4 enseignants dans les départements de langues en 2012 contre 7 en 2016 et les tuteurs au nombre de 2 par an. De cet échantillon présélectionné, seules 62 personnes ont accepté au final de participer à l’enquête comme le tableau ci-après l’illustre :

Tableau 2 : étudiants encadrés ayant accepté d’être suivis de manière hybride

Année

2012

2016

Écoles normales

DiPES ENS de Yaoundé

DiPET ENSET de Douala

DiPES ENS de Yaoundé

DiPET ENSET de Douala

Élèves professeurs

11

17

10

24

Élèves ayant accepté

67 %

82 %

87 %

63 %

Moyenne

74,5 %

75 %

Nombre total de participants

62

34Aussi, 67 % d’élèves professeurs encadrés en 2012 à l’ENS et 75 % en 2016 de l’université de Yaoundé I ont accepté de recevoir des activités en ligne sur la plateforme https://formationens.moodlecloud.com/​. À l’ENSET de Douala, 82 % ont préféré un encadrement hybride. En 2016 à l’ENSET de Douala, 75 % d’élèves professeurs ont été motivés à suivre un encadrement hybride. Pour ce deuxième groupe, Moodle a été utilisé en complément à Facebook au lieu de Gmail comme en 2012 car ils présentaient des difficultés d’appropriation de la plateforme. Au départ, 2 enseignants du département des sciences de l’éducation et des techniques administratives se sont investis pour superviser leurs élèves d’une manière hybride. Enfin en 2016, 7 ont accepté de suivre les étudiants sur Facebook et partiellement sur Moodle.

4.5. Déroulement des séances d’encadrement : ressources, activités, interactions

35La présente section illustre l’action menée dans le cadre de cette investigation. Action menée dans le but de collecter des informations sur les ressources, les activités et les interactions entre les enseignants et leurs élèves professeurs.

4.5.1. Les ressources

36La première ressource mise en ligne a été la fiche signalétique. Les fiches signalétiques indiquaient le groupe pédagogique en charge de l’encadrement à distance. Il s’agissait généralement d’un tuteur et d’un enseignant. La fiche présente également le type de ressources proposées, les objectifs de l’encadrement, le chronogramme et les proportions horaires. À la fin, les types d’évaluation étaient renseignés. Les enseignants ont buté sur la répartition horaire et l’évaluation. La plupart proposaient un volume de 50 h pour la distance et 40 h pour le présentiel. Mais ces renseignements, trop génériques ne permettaient pas aux participants de se projeter dans le temps. Les objectifs, similaires à ceux du présentiel, insistaient sur les activités à effectuer. Ils étaient plus opérationnels : élaborer une revue de la littérature de 100 auteurs relativement aux termes clés du sujet de recherche, analyser et critiquer les points de vue des auteurs, à partir de leurs limites, élaborer une problématique, etc. L’objectif général demeurait celui d’amener les élèves professeurs à enquêter et rédiger un mémoire sur la langue française, la didactique du FLE/FLS, la sociolinguistique, et les techniques administratives dans un langage clair et précis tout en respectant la méthodologie en vigueur dans les écoles normales supérieures.

37Les premières ressources mises en ligne par les enseignants étaient documentaires. Elles renvoyaient généralement aux documents publiés en ressources libres et ouvertes. Généralement appréciées par les élèves, elles ont évolué à mi-parcours pour s’orienter sur les méthodologies relatives à la sociolinguistique et autres sciences sociales. C’est pourquoi ils étaient renvoyés vers les meilleurs mémoires mis en ligne sur le site de l’ENS, pour consultation.

4.5.2. Les activités des participants

38Les participants avaient pour tâche de déposer les devoirs sur la plateforme de manière hebdomadaire. Ils pouvaient utiliser le chat pour actualiser leurs idées et surtout échanger synchroniquement avec leurs camarades et leur tuteur. Les devoirs se voulaient évolutifs, de la compréhension générale d’un sujet à l’élaboration du plan en passant par la recherche des ressources et de la méthodologie correspondante. Cependant, certains préféraient attendre les devoirs pour manifester leurs performances et prenaient rarement part aux échanges prévus par les tuteurs. Le forum était un lieu où ils préféraient présenter leurs difficultés, les speeches prévus pour la soutenance ou encore débattre des avantages des théories relatives à leurs domaines de recherche.

4.5.3. Les interactions synchrones et asynchrones : la part des tuteurs

39Les tuteurs avaient pour tâche de vérifier le dépôt des documents, répondre aux questions les plus aisées et proposer des orientations. Ils semblaient également aptes à encourager les élèves professeurs à persévérer dans la recherche et surtout à concrétiser le savoir. Les interactions synchrones étaient prévues une fois par mois. Cette mensualité permettait une connexion de la majeure partie des concernés au moment opportun. Les rappels, les échanges d’idées et autres interventions étaient asynchrones. Ce qui permettait aux enseignants de se situer par rapport aux avancées des participants et aux activités des tuteurs.

5. Quels résultats ?

40Dans l’optique de finaliser la recherche, les résultats sont présentés et analysés en fonction des modèles de l’acceptation et du sentiment d’efficacité personnel.

5.1. Perceptions des technologies pour l’encadrement à distance

41Le questionnaire adressé aux élèves a permis de recenser leurs opinions par rapport à la rentabilité de l’usage du numérique en milieu académique. Ces perceptions sont des facteurs déterminants de l’acceptabilité d’un suivi à distance.

Hist.1. Les technologies favorisent l’encadrement des mémoires (données de 2016)

Hist.1. Les technologies favorisent l’encadrement des mémoires (données de 2016)
  • 4 Échelles utilisées : 1 (totalement en désaccord), 2 (plutôt en désaccord), 3 (plutôt en accord), 4 (...)

Échelle de la perception de l’utilité (PU)4

42Tous les élèves professeurs interrogés perçoivent les technologies comme ouvrant des perspectives importantes pour leur avenir professionnel à travers la rédaction d’un mémoire axé sur la didactique. Toutefois, s’ils sont d’accord avec l’item portant sur l’apport du numérique dans l’approfondissement des ressources en matière et de recherche scientifique, le tiers d’entre eux est relativement d’accord et exprime une réserve sur l’apport de ces technologies.
Une minorité est en désaccord avec l’apport du numérique dans le gain de temps en matière de recherche et de rédaction. La majorité, relativement en accord, pourrait trouver leur justification dans les infrastructures souvent insuffisantes. Néanmoins, tous concèdent aux technologies la faculté de permettre à leur esprit, de l’initiative et de la créativité en rapport avec leur recherche et la rédaction de leurs différents mémoires.

5.2. Articulation présence-distance

5.2.1. Mode d’articulation perçu par les élèves professeurs

43Au niveau de l’articulation présence/distance pendant l’encadrement, 66 % des interrogés déclarent que le professeur propose des activités de groupe lors des phases d’enseignement en présence et seuls 33 % déclarent avoir ces mêmes activités à distance. L’alternance distance/présence ne semble pas implémentée de manière égalitaire.

Tableau 4. Activités proposées par les enseignants en présence et à distance

Item

1

2

3

4

Le professeur propose des activités de groupe lors des phases d’enseignement À DISTANCE (en dehors des salles de cours)

33 %

Le professeur propose des activités de groupe lors des phases d’enseignement EN PRÉSENCE (dans la salle de cours)

66 %

44Les activités proposées à distance aux élèves professeurs entraînent des perceptions divergentes des ressources déposées sur les plateformes.

5.2.2. Perception des outils et de la plateforme

45Sur Moodle, le forum et les chats semblaient les outils privilégiés pour les interactions synchrones ou asynchrones. Le partage des fichiers s’est opéré grâce à l’usage des logiciels comme Dropbox ou Google drive, et Facebook, plus accessibles aux élèves professeurs. Cela a permis des échanges et des partages plus fréquents. Toutefois, la perception des activités par ces derniers révèle des points de vue différents. Les pourcentages sont présentés en fonction de chaque item et correspondent chaque fois à l’ensemble des réponses.

Tableau 5. Outils proposés par les enseignants sur la plateforme

Item

1

2

3

4

Le professeur propose aux étudiants un ou plusieurs outils de soutien à l’apprentissage (espaces ou moyens pour travailler, pour réfléchir à leur manière d’apprendre, ou pour construire leur identité numérique)

13 %

9 %

78 %

Le professeur propose un ou plusieurs outils de communication, d’organisation et de collaboration (calendrier, échéancier, forum, etc.)

33 %

66 %

Les ressources numériques mises à disposition par le professeur intègrent des images, photos, schémas, cartes, vidéos, etc.

13 %

87 %

Dans leurs travaux, les étudiants intègrent des images, photos, schémas, cartes, vidéos, etc. Vous utilisez des outils de communication et de collaboration SYNCHRONES (chat, visioconférence, partage de documents et d’écran, etc.)

66 %

33 %

Les étudiants peuvent commenter/modifier les ressources/documents mis à leur disposition et/ou les travaux de leurs pairs

33 %

66 %

46Les élèves professeurs sont d’accord pour affirmer qu’ils peuvent collaborer en ligne en commentant les ressources ou les documents mis à leur disposition par l’enseignant ou leurs pairs. Ils sont majoritairement d’accord avec la qualité des ressources numériques mises à disposition et qui intègrent des images, des photos, des schémas, des cartes, des vidéos. Toutefois, ils sont en désaccord avec les activités proposées en synchrone et supposées intégrer des outils de communication numériques. Cependant, ils admettent en majorité que c’est l’enseignant qui propose « un ou plusieurs outils de communication, d’organisation et de collaboration (calendrier, échéancier, forum, etc.) ». 33 % ne sont pas d’accord avec cette dernière assertion provoquant ainsi la question de l’accompagnement proposé par les enseignants intégrés dans le dispositif.

5.2.3. Accompagnement proposé

47D’après les sondés, l’accompagnement proposé offre des activités axées sur la recherche documentaire et la synthèse des idées collectées relatives au mémoire, la rédaction scientifique, et l’élaboration du plan de rédaction et des parties du mémoire. D’autres relèvent « la discussion sur le thème de recherche, le constat, la reformulation de la question de recherche et des hypothèses, la méthodologie de recherche en particulier la sélection des instruments de recherche. » (Étudiant E). Certains précisent que les interactions permettent un échange, voire un approfondissement des explications à travers le jeu de questions-réponses et les conseils à but d’orientation fournis par l’encadreur.

Tableau 6. Formes de collaboration prescrites par les enseignants pendant les encadrements

Item

1

2

3

4

L’entraide et le soutien des étudiants entre eux sont stimulés par l’enseignant (répondre aux questions des autres, fournir des ressources d’apprentissage aux autres...)

100 %

L’enseignant sollicite une réflexion des étudiants sur leur savoir et leur processus d’apprentissage

33 %

66 %

Les étudiants fournissent des ressources à leurs pairs et/ou répondent aux questions de leurs pairs

30 %

63 %

7 %

48Tous les sondés sont d’avis que la collaboration et la coconstruction des savoirs est stimulée par l’enseignant à travers les multiples activités mises à disposition et outils numériques comme l’usage des mails et des réseaux sociaux. Toutefois, ils ne sont pas d’avis que les étudiants « fournissent des ressources à leurs pairs et/ou répondent aux questions de leurs pairs », car, l’encadrement respecte parfois le modèle des cours magistraux.

5.3. Nature du cours telle que perçue par les élèves professeurs : quelle typologie ?

49À partir des questions posées aux élèves professeurs, nous avons essayé d’élaborer une typologie du dispositif qu’ils avaient vécu. Le tableau suivant identifie le pourcentage des opinions des sondés sur la base des activités et des ressources utilisées et surtout la manière dont elles sont proposées.

Tableau 7. Typologie du dispositif tel que vécue par les élèves professeurs

Enseignement

Apprentissage

Scène

Écran

Cockpit

Équipage

Espace public

L’écosystème

40 %

20 %

5 %

25 %

5 %

5 %

50En sachant que Peraya et al. (2014) distinguent 6 dispositifs de formation hybrides dont sont prioritaires en enseignement la « scène » et « l’écran » et, en apprentissage, « l’équipage » et « l’espace public » (voir cadre théorique), il ressort que c’est le type enseignement qui semble le plus perçu par les élèves professeurs et en particulier le type scène. Les activités sont moins centrées sur l’apprentissage même si l’équipage apparaît en deuxième position dans la typologie telle que perçue par les élèves professeurs.

5.4. Impact des plateformes sur l’élaboration des méthodes et outils d’enquête

51Au moment d’identifier les opinions sur l’efficacité de l’encadrement à distance en termes de méthodologie de l’enquête, de dépouillement des données et de catégorisation des résultats de terrain, les réponses se sont scindées en 2 grands groupes :

521) Près de 75 % des étudiants déclarent très bien comprendre les théories sociolinguistiques et didactiques. Parmi eux, la majorité a déclaré avoir révisé leurs questionnaires d’enquête de terrain en le liant aux objectifs de recherche. Par contre, si tous réussissent à utiliser SPSS pour l’analyse, seule la moitié d’entre eux réussissent à dépouiller de manière claire leurs résultats. Ils se déclarent « satisfaits » (Étudiant C), certains affirment qu’ils ont l’impression que leurs mémoires appartiendront à la gamme des plus méritants à l’exemple de l’étudiant B qui affirme : « mon mémoire sera le meilleur et qu’il pourra être exploité par les autres étudiants qui souhaiteront travailler sur le même sujet. » Certains sont reconnaissants envers leurs encadreurs et n’omettent pas de préciser l’apport de leur recherche dans le domaine scientifique. C’est ainsi qu’ils déclarent avoir amélioré le titre de leur mémoire en vue de l’obtention d’une excellente note, redéfini des hypothèses, la méthodologie, la problématique et la mise en forme du mémoire

532) 25 % des participants présentent une opinion assez insatisfaite car ils estiment comme l’étudiant E qu’« après cet encadrement est né en moi un sentiment d’insatisfaction dans la rédaction de mon mémoire. Mon objectif n’est pas atteint. » Il affirme qu’il était difficile de cerner et surtout d’appliquer les points méthodologiques lui permettant de rédiger un meilleur mémoire. D’autres reviennent sur le temps mis pour l’encadrement « le produit de l’encadrement aurait pu être meilleur si l’encadreur et l’encadré avaient disposés de plus de temps de travail » (Étudiant I). La distance, dans ce cas, ne résout pas le problème de temps de recherche et de rédaction des mémoires.

6. Médiation hybride du suivi à distance : propositions discursives

54À partir des actions menées pour la mise en place du dispositif de suivi à distance et en présence des élèves professeurs, il ressort que le temps accordé à la distance et à la présence sont sensiblement identiques. Au niveau des ressources, elles étaient documentaires et interpellaient généralement les aspects méthodologiques et les activités étaient plus centrées sur le devoir que sur les interactions synchrones. Ces interactions s’effectuaient mensuellement et sur d’autres plateformes que Moodle. Il s’agissait de WhattsApp et Facebook. Les interactions asynchrones ne se manifestaient que lorsqu’il fallait commenter les devoirs, rappeler les échéances et évaluer les mémoires.

55Les données de la recherche présentent un usage et une utilisation des outils numériques progressifs chez les enseignants et les élèves professeurs. De 2012 à 2016, près de 5 % d’entre eux ont accentué leurs usages pour des raisons aussi bien individuelles que collectives. S’ils trouvent que les outils numériques sont nécessaires pour leurs recherches, les élèves professeurs estiment que l’environnement numérique des écoles normales n’est pas suffisamment outillé pour le suivi en ligne et que le tutorat en ligne n’est pas encore une réalité permanente. Alors que les activités proposées sont généralement en présence, les élèves professeurs sont pratiquement d’accord avec le fait que certains enseignants bénéficiaient d’un calendrier et d’un forum pour l’expression mais pas d’espace synchrone sur la plateforme. L’accompagnement à distance leur faisait bénéficier de soutien d’aide extérieure, une réflexion plus approfondie et un partage de connaissance. Ainsi, c’est le type « scène » qui était le plus utilisé selon les apprenants malgré le sentiment positif que le suivi à distance provoquait en eux. Toutefois, certains ont tenu à faire remarquer que les objectifs n’étaient pas atteints pour des raisons infrastructurelles, temporelles et méthodologiques.

56Au regard des différents résultats présentés précédemment, plusieurs orientations interviennent pour implanter un dispositif d’encadrement hybride. Comme premières recommandations, les compétences à atteindre sont à mettre en exergue. Au niveau des compétences visées pendant l’encadrement, les enseignants/tuteurs qui souhaitent rompre avec les pratiques anciennes pourraient s’inspirer des modèles de dispositifs hybrides déjà explorés et les adapter à leurs contextes d’enseignement en sachant les difficultés infrastructurelles à affronter. Au départ, après avoir répertorié les différents thèmes de leurs élèves, les enseignants mettent en place un dispositif d’encadrement à distance et en présentiel. Le premier contact en présentiel servirait à la collecte des adresses e-mails des étudiants associés à leurs noms et thèmes pour pouvoir les inscrire sur Moodle. Cette séance assurerait également la synthèse des besoins des encadrés et exposerait les objectifs d’encadrement pour les uns et les autres. Les acteurs seraient conscients que la supervision des mémoires aboutira à la production d’un document écrit scientifiquement après une recherche et une analyse des données complètes. Le speech de soutenance couronne la finalisation de la supervision. En sus, les compétences visées incluraient l’usage des plateformes et la pratique des activités à distance relativement au suivi. À titre d’exemple :

  • collecter et présenter une bibliographie relative au thème de recherche ;

  • décrire un cadre théorique et souligner les apports de celui-ci dans la recherche ;

  • sur le forum, débattre des théories linguistiques connues ;

  • restituer en petits groupes de 3 ou 4, les conclusions orientées sur la didactique des langues, les TICE et les langues, la littérature, la sociolinguistique.

57Chaque compétence rédactionnelle sera développée hebdomadairement ou mensuellement à travers les réactions des élèves professeurs sur les chats, les forums, les devoirs et recadrée sur les forums tutorés.

58Les suggestions secondaires se focalisent sur les rôles de chaque actant en présentiel et à distance. Les rôles de chacun seront déterminés en présentiel : l’enseignant guide les élèves à partir de leur production hebdomadaire et des objectifs d’encadrement. Les élèves lisent, regardent et analysent les ressources. Ils produisent des données évaluées hebdomadairement et s’expriment. Ils apprennent à collaborer pour mieux coconstruire leurs savoirs. L’enseignant en tant que tuteur et guide, apprend également à écouter et lire ses élèves sans être le maître du savoir comme en présentiel, mais un médiateur vers de nouvelles connaissances.

59Comme autres suggestions, la méthode de scénarisation des séquences. Elle débute par une fiche signalétique qui prévoit un quota horaire général. Ce dernier est séquencé hebdomadairement. Ensuite, vient la scénarisation du cours proprement dite. La scénarisation de chaque séquence d’enseignement est une équation que l’enseignant résout dès qu’il connaît les besoins, les difficultés méthodologiques et les objectifs d’encadrement. Généralement, la première étape consistera à proposer des ressources théoriques sur la définition, la délimitation et la structuration d’un thème de recherche sur la base des sujets enregistrés. Les activités devraient être également définies à l’avance comme la lecture du document et la restructuration du thème par rapport aux théories collectées après les recommandations relatives aux activités prescrites par l’enseignant. La deuxième consiste à proposer des ressources sur l’élaboration d’un projet de mémoire. Cette étape est entrecoupée par des activités et ressources relatives à la définition des contenus du projet avec exemple à l’appui. L’aspect méthodologique constitue une séquence à part entière, car les activités devraient permettre d’éclairer les étudiants sur les méthodes de recherche en rapport avec des domaines, sur les étapes de collecte des données sur le terrain et d’élaboration des corpus et surtout les outils d’enquête, sur le dépouillement et sur l’analyse. Le but étant que chaque sous-section permette à l’encadré de déposer une production par rapport à sa compréhension et à sa thématique. L’enseignant ne transposera pas son cours en présentiel sur la plateforme pour le rendre distanciel. Il respectera l’IMAIP même s’il ne se sert pas de Moodle. Lebrun et Batier résument l’IMAIP ainsi qu’il suit :

« – les informations : il s’agit de tous types de ressources, informations, voire même de personnes qui peuvent être sollicitées ; – les actions : que demande-t-on aux apprenants de faire, avec les ressources qui sont mises à leur disposition ou qu’ils doivent trouver ? – les productions : ce qui va sortir de concret des actions et ici Lebrun fait référence au “chef d’œuvre”, la production dont on est fier, et qui résulte d’un apprentissage ; – les moteurs entre ces éléments sont la motivation et les interactions que la formation produit. » (Lebrun et Batier, 2014)

60Enfin, comme dernière recommandation dans un dispositif hybride, la médiation à distance qui fait défaut aux tuteurs. La médiation, étape la plus importante dans le dispositif, consiste à prévoir les animations pédagogiques, les thèmes des débats sur ces animations, les activités de tutorat, la production des résultats d’évaluation et surtout le temps consacré aux interactions synchrones et asynchrones. Les interactions devraient mettre un point d’honneur à relever les points d’ombre empêchant le développement de meilleures productions en matière de mémoire chez certains élèves professeurs. Les enseignants devraient s’arranger à intégrer dans leurs médiations, les difficultés infrastructurelles susceptibles de diminuer les possibilités de bonnes interactions. Ils pourraient :

  • éviter de se limiter aux interactions synchrones sur Facebook, mais s’étendre sur Google hangout ou sur Skype ;

  • intégrer l’écrit et l’oral dans les discussions tutorées ;

  • former des tuteurs et interpeller leurs pairs dans le suivi des encadrés pour que le phénomène d’un suivi survolé comme en présentiel soit contourné.

61Comme Bourdet et Teutsch (2012) le précisent, il faudrait se servir des réseaux sociaux pour enseigner, sinon renforcer le processus d’apprentissage à distance pour laisser libre court à l’expression des participants. Toutefois, le respect des fonctions et rôles des tuteurs risque être difficilement applicable en contexte camerounais au vu des difficultés infrastructurelles. Les recommandations contenues dans cette section visaient la mise en place d’un dispositif hybride du point de vue des acteurs énoncés tout au long de l’article : les élèves professeurs, les enseignants et les tuteurs. Les dispositifs d’encadrement des enseignants de langues privilégient les productions individuelles pour faire émerger une activité méta-réflexive claire chez les élèves professeurs. Les aspects langagiers, orthographiques et syntaxiques seront mieux appréhendés et le soutien personnel plus efficace.

Conclusion

62Le présent article investiguait l’opportunité de l’usage de la distance pendant l’encadrement des élèves professeurs de l’ENSET de Douala et de l’ENS de Yaoundé. Sur la base d’une étude ancrée sur les perceptions des outils numériques par les principaux acteurs, nous avons sondé par interview les apprenants afin de définir les principes d’accompagnement et leur sentiment d’efficacité personnelle. S’ils ne sont pas toujours d’accord sur l’utilité des outils numériques en fonction des activités et des ressources prescrites par leurs encadreurs, ils sont majoritairement satisfaits de leurs résultats surtout en matière de rédaction des mémoires. Toutefois, si les meilleures performances du groupe hybride (ceux qui ont allié la distance et la présence) pouvaient se justifier de plusieurs manières comme les échanges sur les forums qui auraient permis aux participants du système hybride d’être plus éloquents que ceux restés en présentiel, l’insatisfaction de quelques-uns trouve sa justification dans le temps et le non-accès aux outils numériques en dehors du campus universitaire. Toutefois, il est à remarquer que ceux qui suivaient la formation à distance ne communiquaient pas les résultats de leurs recherches et échanges sur la plateforme avec ceux en présentiel. Ces participants avaient créé leur communauté et le comportement de la majorité semblait marquer un degré de supériorité. Alors nous nous sommes posé la question de savoir s’il ne fallait pas imposer un encadrement des étudiants de manière hybride plutôt que de le proposer comme un choix, comme c’est encore le cas.

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Bibliographie

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Brudermann, C. (2013). Tutorat en ligne et rétroactions correctives à distance – Vers un modèle de médiation pour la production en langue étrangère. Apprentissage des langues et systèmes d’information et de communication (Alsic), 16, doi : 10.4000/alsic.2633

Demaiziere, F. et Narcy-Combes, J.-P. (2005). Méthodologie de la recherche didactique : nativisation, tâches et TIC. In Apprentissage des langues et systèmes d’information et de communication (Alsic), 8(1), doi : 10.4000/alsic.326

Djeumeni Tchamabe, M. (2016). Supervision de la recherche en Afrique dans le contexte d’une formation à distance : médiations, accompagnement, approche interculturelle. Distances et médiations des savoirs, 13. doi : 10.4000/dms.1289

Karsenti, T. et Ngamo, S.T (2007). Qualité de l’éducation en Afrique et rôle potentiel des TIC. International review of education, 53, 655-686.

Moeschler, J. (1999). Linguistique et pragmatique cognitive. L’exemple de la référence temporelle. Repéré à http://www.unige.ch/lettres/moeschler/publication_pdf/linguistique.pdf.

Lebrun et Batier, C. (2014). Le Modèle IMAIP. Repéré à https://didac2b.wordpress.com/2014/12/06/imaip/

Peraya, D. (2014). Distances, absence, proximités et présences : des concepts en déplacement. Distances et médiations des savoirs, 8. doi : 10.4000/dms.865

Peraya, Charlier et Deschryver (2008). Rapport et bilan du projet : Résultats du volet 1 : Dispositifs hybrides.

Rivens Mompean, A. (2012). Tutorat en ligne – Analyse des pratiques d’interaction et de feedback dans un blogue pour l’apprentissage de l’anglais. Apprentissage des langues et systèmes d’information et de communication (Alsic), 15(2). doi : 10.4000/alsic.2493

Sansot P. (1985). Interactivité et interaction. In Le Bulletin de ÏIDATE. Interactivité(s), 20, 87-94.

Sperber, D. et Wilson, D. (1995). Relevance: Communication and Cognition (2nd edition with postface). Oxford : Blackwell.

Viens, J. et Peraya, D. (2004). Résultats et perspectives d’application d’un modèle de recherche-action-formation pour soutenir l’innovation pédagogique de cours eLearning. Revue suisse des sciences de l’éducation, 26(2), 229-248.

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Notes

1 DiPES : diplôme de professeur de l’enseignement secondaire ; DiPET : diplôme de professeur de l’enseignement technique.

2 ENSET: École normale supérieure de l’enseignement technique, ENS : École normale supérieure.

3 https://formationens.moodlecloud.com/login/index.php

4 Échelles utilisées : 1 (totalement en désaccord), 2 (plutôt en désaccord), 3 (plutôt en accord), 4 (totalement en accord)

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Table des illustrations

Titre Hist.1. Les technologies favorisent l’encadrement des mémoires (données de 2016)
Légende Échelle de la perception de l’utilité (PU)4
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/dms/docannexe/image/2060/img-1.png
Fichier image/png, 35k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Julia Ndibnu-Messina Ethé, « Approche hybride et supervision des mémoires de DiPES et DiPET II : essai d’évaluation des activités de tutorat menant aux productions des écrits par les élèves professeurs »Distances et médiations des savoirs [En ligne], 20 | 2017, mis en ligne le 21 décembre 2017, consulté le 15 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/dms/2060 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/dms.2060

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Auteur

Julia Ndibnu-Messina Ethé

ENS, université de Yaoundé I, Cameroun

jundibnu@gmail.com

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Droits d’auteur

CC-BY-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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