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HomeNumeriN° 37, 1II. Il conflitto ideologico nel N...Moscou, Belgrade et l’anticolonia...

II. Il conflitto ideologico nel Novecento: dimensione locale e internazionale
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Moscou, Belgrade et l’anticolonialisme: dynamiques historiques d’une aide extérieure à l’émancipation de l’Afrique (dé)colonisée (1920-1990)

Ludovic Boris Pountougnigni Njuh

Abstract

Affrontare nella sua complessità il sostegno che il mondo comunista ha offerto ai movimenti nazionalisti nel secolo scorso oscura le dinamiche profonde che hanno accompagnato questo aiuto. Al di là dei meriti dell’anticolonialismo dei paesi comunisti per l’impulso alla decolonizzazione durante la Guerra Fredda, questo studio mostra le differenti sfumature nelle forme di sostegno proposte dalla Iugoslavia e dall’URSS, per far luce su parte della storia della decolonizzazione. Verranno preso in analisi, da un lato il processo di decolonizzazione e i tentativi del blocco orientale di indebolire il dominio occidentale sull’Africa, dall’altro la cristallizzazione di una comunità internazionale di Stati di pari sovranità.

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Testo integrale

“Soviet Tank”Visualizza l'immagine
Credits: by David Stanley on Flickr (CC BY-SA 2.0)

1. Introduction

  • 1 FANON, Frantz, Les damnés de la Terre, Paris, Maspero, 1961, pp. 18-22, 41-44 ; CÉSAIRE, Aimé, Disc (...)
  • 2 LINDSAY, Donald, Europe and the World, 1870 to the Present Day, Oxford, Oxford University Press, 19 (...)
  • 3 C’est pareil pour les États-Unis et les pays du bloc de l’Ouest. C’est pour se débarrasser de la tu (...)

1Le discours historiographique relatif à la décolonisation de l’Afrique pourrait laisser entendre que l’Occident et le monde communiste, en déployant leurs aides, ont agi en symphonie, bien que sans doute indépendamment l’un de l’autre. Sans vouloir méconnaître le rôle joué par Washington et Moscou contre le système de chosification et de déshumanisation de l’homme que fut la colonisation, c'est commettre une triple abstraction1 : d’abord, parce que on risquerait d’ignorer le contexte de rivalité entre ces deux capitales après la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). Ensuite, on ignorerait également l’état de lutte permanente pour l’intérêt national qui caractérise les relations internationales2. Pour finir, on ferait abstraction de la hargne avec laquelle Joseph Staline imposait l’emprise de Moscou sur les gouvernements des « pays satellites »3.

  • 4 La Yougoslavie (pays des Slaves) est un État de l’Europe du Sud-Est qui a correspondu à trois réali (...)

2Cependant, malgré la centralité du rôle de Moscou instaurée par Staline, la « périphérie » était en mesure de nourrir des ambitions émancipatrices. Tel a été le cas de la Yougoslavie4 quoiqu’elle avait été destinée à être soumise à l’influence de Moscou, à l’instar de nombreux pays d’Europe de l’Est après 1945. La littérature ne semble pas encore en mesure de mettre en lumière ce que ce schisme a pu avoir comme conséquence sur la manière dont le monde communiste a structuré et déployé sa contribution à la décolonisation.

  • 5 Ceci est la signification « mineure » de ce concept selon Achille Mbembe, et veut que l’accession à (...)
  • 6 FANON, Frantz, Les damnés de la Terre, cit., pp. 39-40. Signalons-le d’emblée, c’est à ce FLN qu’au (...)
  • 7 MBEMBE, Achille, Sortir de la grande nuit, cit., pp. 9-19, 59. Accent mis par l’auteur de la citati (...)

3Saisir les dynamiques et les mécanismes des gestes de Moscou et de Belgrade nécessite cependant une meilleure connaissance de l’objet profond de notre étude : la décolonisation. Le mot désigne habituellement « le transfert du pouvoir de la métropole aux anciennes possessions coloniales au moment de l’indépendance »5. Frantz Fanon, dont les liens avec le Front de Libération Nationale (FLN) – parti nationaliste d’Algérie – sont connus (et qui a vécu l’époque de la lutte anticoloniale), en précise le sens. D’après son interprétation, la décolonisation est une lutte violente dont l’objectif ultime est la remise en cause de la situation coloniale, ainsi que le changement total du panorama social et de l’ordre du monde. Elle vise à faire « table rase », pour l’édification d’une nouvelle nation, d’un État nouveau, d’une société d’hommes libres, égaux et épanouis6. C’est en cela qu’après F. Fanon, Achille Mbembe voit en la décolonisation un événement dont « la signification politique essentielle résida dans […] la volonté de vie ». À l’inverse du colonialisme, système de violence contre les droits et la dignité, elle était ainsi un « mouvement de repotentialisation », une expérience d’émergence, de soulèvement et de redéfinition par le colonisé de son rapport au temps et au monde7.

  • 8 ENGERMAN, David, The Price of Aid: The Economic Cold War in India, Harvard, Harvard University Pres (...)

4Plusieurs travaux ont abordé l’évolution de l’Union des Républiques Socialistes et Soviétiques (URSS) et de la Yougoslavie pendant la Guerre froide, en soulignant leurs trajectoires respectives et en évoquant leurs attitudes face à l’impérialisme et à la décolonisation. Entre autres, David Engerman, Oscar Sanchez-Sibony et Timothy Nunan ont ainsi analysé les relations entre l’URSS et le monde colonisé, et également la portée de l’aide offerte par Moscou8. Si ces travaux éclairent bien de pans d’histoire, ils ne permettent pas une confrontation des déploiements des deux pays en objet par rapport à la décolonisation. L’objectif de ce travail est de mettre en évidence la portée du schisme yougoslave sur l’articulation de l’aide du monde communiste aux colonisés. Moscou et Belgrade ont exprimé la volonté d’aider les différents nationalistes à battre en brèche la colonisation. Cependant, la rupture entre les deux capitales en 1948, bien qu’elle n’ait pas mis un terme à cette volonté partagée, a eu comme conséquence une déclinaison plurielle du soutien du bloc de l’Est au processus de décolonisation pendant la Guerre froide.

  • 9 L’analyse met en lumière les cadres bilatéraux et multilatéraux (organisations internationales comm (...)
  • 10 Voir DÉRENS, Jean-Arnault, « Le rayonnement d’un pays non aligné : au temps de la Yougoslavie antic (...)

5Dès lors se précise la question centrale : en considérant les outils mobilisés ainsi que les enjeux poursuivis, quels sont, dans les moyens que Moscou et Belgrade emploient contre la colonisation entre 1920 et 1990, les éléments de ressemblance ou de dissemblance ? L’année 1920 est le début de la « croisade » anticolonialiste lancée par la 3ème Internationale socialiste à Bakou (Azerbaïdjan), et 1990 l’accession à l’indépendance de la Namibie, ou la limite temporelle finale de notre analyse. Cette chronologie suit la trajectoire de ces formes d’aide que le monde communiste fait parvenir en particulier à l’Afrique via des canaux divers9. L’accent est ici mis sur l’Afrique en raison d’une plus importante matérialisation du soutien de Moscou et de Belgrade aux mouvements nationalistes, ainsi que aux pays nouvellement indépendants en quête de consolidation de leurs souverainetés10.

  • 11 MBEMBE, Achille, SARR, Felwine, Penser pour un nouveau siècle, in MBEMBE, Achille, SARR, Felwine (d (...)
  • 12 MIGNOLO, Walter, « The decolonial option: detachment and opening – a manifest and a case study », i (...)
  • 13 FRANK, Robert, « Penser historiquement les relations internationales », in Annuaire Français des Re (...)
  • 14 JULIEN, Élise, « Le comparatisme en histoire : rappels historiographiques et approches méthodologiq (...)

6Vu d’Afrique, l’intérêt de se pencher sur une telle question pourrait ne pas être évident. Cependant, l’ambition de ce travail est de suggérer une perspective inhabituelle dans les études africaines et pour l’historiographie de la décolonisation de l’Afrique, encore globalement focalisées sur le tandem Occident-Afrique. Or, le concept d’« Afrique-Monde », qui propose un projet de pensée « à l’aise avec les archives de toute l’humanité »11, s’impose de plus en plus. Dans la perspective d’une analyse décentrée suggérée par l’approche décoloniale de Walter Mignolo, finalisée au le renouvellement des savoirs en sciences humaines et sociales12, il s’agit de ne pas penser nécessairement selon une « logique de domination », mais d’introduire des possibilités de coopération et de coexistence pacifique. En s’attardant sur les « forces profondes »13, nous allons vers l’autre afin de comprendre ce qui s’est passé « ailleurs » et mieux saisir ce qui s’est passé « ici ». L’approche comparatiste14 est ainsi privilégiée pour structurer l’analyse. S’appuyant sur la méthodologie historique, elle fait le point sur les socles idéologiques et mémoriels des aides fournis par Moscou et Belgrade dans le cadre de la lutte contre la colonisation, en Afrique en particulier, pendant la Guerre froide en relevant les points de ressemblances puis les aspects divergents de ces soutiens.

2. Similitude de fondements et convergence d’intensions

  • 15 L’anticolonialisme des États-Unis est en partie fondé sur ce passé colonial. De la « découverte » d (...)

7En plus du transfert des pouvoirs politiques, la décolonisation s’accompagne de l’épanouissement socio-économique. Bien que négligé chez les puissances coloniales, cela nécessitait d’une coordination d’action entre les colonisés. La décolonisation avait aussi besoin d’être soutenue et défendue. Ce soutien, est octroyé par les pays anticolonialistes. En tant que doctrine de militantisme et de soutien en faveur de la décolonisation, l’anticolonialisme se manifeste dans le cœur des nations qui ont eu une expérience coloniale, ou du moins une situation de domination s’en rapprochant. C’est dans ce cadre que s’insère en partie l’inclinaison anticolonialiste de nombreux pays au début du XXe siècle15. Tel a été précisément le cas de la Russie et de la Yougoslavie, comme nous expliquerons ci-après. Les contradictions qui surgissent au sein de l’Union soviétique après 1945 suscitent cependant une métamorphose de cette base idéologique. Mais malgré le schisme, celui de la Yougoslavie en l’occurrence, on remarque une constante durant la Guerre froide, à savoir la convergence des intentions de Moscou et de Belgrade pour ce qui est de l’anticolonialisme. Moscou voit en la colonisation une entreprise capitaliste qu’il faut combattre partout dans le monde. Pour Belgrade, c’est une forme d’occupation et de domination étrangère qu’elle a connue et qu’elle exècre.

2.1. Moscou et l’idée de la colonisation comme « stade suprême du capitalisme »

  • 16 KALINOSVKY, Artemy, « Reassessing Soviet Strategies of Modernization », interview with Maria Lipman (...)

8La vocation anticolonialiste de Moscou nait de l’esprit du prolétariat. La révolution de 1917, avait renversé l’ordre tsariste dans lequel la monarchie avait maintenu ses « sujets », dans la terreur et la misère. Une sorte de « colonisation à domicile »16. Depuis, la révolution et l’anticolonialisme des pays communistes qui s’en est suivi sont restés dans les mémoires collectives comme une contribution à la décolonisation au XXème siècle, se posant sur les réflexions menées dès le XIXème siècle par Karl Max, Friedrich Engels, Rosa Luxembourg et Joseph Lénine, principalement.

  • 17 LÉNINE, Joseph, L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, Bruxelles, Tribord, 1917, pp. 2, 31-5 (...)
  • 18 KI-ZERBO, Joseph, Histoire de l’Afrique noire, d’hier à demain, Paris, Hatier, 1978, p. 472.

9Le triomphe des bolcheviques en Russie en octobre 1917 favorise l’émergence du tout premier pays communiste sur la scène internationale. Les vainqueurs éprouvent un sentiment de profonde satisfaction face à la venue tant attendue d’une société juste et égalitaire : « À chacun selon ses besoins », scandait-on. Transportés alors par l’optimisme, Lénine et ses partisans rêvent de propager sur la planète la Révolution prolétarienne. En s’imaginant ainsi devoir porter loin le message et l’action de la lutte des classes, ils visent les régions où le capitalisme sévi. Le monde colonisé figure en bonne place dans ce plan de lutte à grande échelle. Bien avant même la révolution, Lénine considère déjà en effet l’impérialisme comme le stade suprême du capitalisme17. C’est ainsi qu’au Congrès de Bakou en 1920, la 3ème Internationale socialiste (Kominterm) s’engage en faveur de l’émancipation des peuples colonisés. Grigori Zinoviev, son président, déclare en effet à cette occasion « la guerre sainte » à l’impérialisme capitaliste18.

10En voyant le jour en 1922, l’URSS commence à dessiner le projet d’une vaste fédération réunissant des pays liés entre eux par la solidarité contre l’impérialisme et son évolution, la colonisation ; tous deux engendrés par le capitalisme, système d’exploitation de l’homme par l’homme. L’anticolonialisme de l’Union soviétique s’appuie en effet sur l’idéologie marxiste qui stigmatise l’aliénation. La colonisation est perçue alors comme une forme de spoliation du colonisé à la fois de ses biens matériels et de son identité. Cet anticolonialisme se fonde par ailleurs sur les valeurs promues par le socialisme, à savoir : la dignité de l’homme, l’égalité et la justice. Ces valeurs poussent Moscou à prendre le parti des peuples colonisés au moment où s’enclenche le processus de décolonisation en Afrique, mais aussi en Asie dans les années 1940 et 1950, et à leur apporter son aide. Elles sont également le fondement idéologique de la pression que l’Union soviétique exerce contre les puissances coloniales en faveur de la décolonisation.

11Dans l’ensemble, l’opposition au colonialisme par l’anticapitalisme constitue la trame de fond de l’action de Moscou pendant l’époque de la décolonisation. Toutefois, les mutations (géo)politiques qui surviennent au sein de l’Union soviétique cherchant à s’agrandir et à élargir sa sphère d’influence, provoquent – au lendemain de la Seconde Guerre mondiale – l’émergence d’une sous-variante d’anticolonialisme au sein du monde communiste. Il s’agit de celle développée par un pays qui était bien parti pour faire partie intégrante du domaine d’influence de l’URSS après 1945, à savoir la Yougoslavie.

2.2. L’idée titiste de l’émancipation du joug de l’occupation et de la domination étrangère

12Tout en gardant ses fondements marxistes, l’anticolonialisme de la Yougoslavie est axé sur la nécessité d’aider les pays colonisés à se débarrasser de l’occupation et de la domination étrangère. Cette posture lui est inspirée par son histoire lointaine, qui ne l’a pas épargnée des courants d’invasions asiatiques ainsi que de la colonisation par l’Empire ottoman et enfin par l’Autriche-Hongrie. Elle est aussi inspirée par son histoire plus récente, celle de la lutte contre l’occupation nazie. En effet, explique Danilo Milić, un ancien diplomate qui a travaillé avec Tito dès les années 1960 :

  • 19 « Le rayonnement d’un pays non aligné : au temps de la Yougoslavie anticoloniale », cit. Danilo Mil (...)

Tito et le noyau dirigeant de la Ligue des Communistes de Yougoslavie (LCY) voyaient véritablement dans les luttes de libération du tiers-monde une réplique de leur propre combat contre les occupants fascistes de la Seconde Guerre mondiale. Ils vibraient au rythme des avancées ou des reculs du FLN ou du Viêt-Cong […] Nous aussi, nous avons été colonisés, que ce soit par l’Empire ottoman ou par l’Autriche-Hongrie. Cela nous rendait particulièrement sensibles aux situations coloniales19.

  • 20 Staline, à la demande d’assistance, répond que c’est impossible pour l’URSS en se justifiant par le (...)
  • 21 Il s’agit de la « seconde Yougoslavie » dont Tito (1892-1980) est le président jusqu’à sa mort.

13L’anticolonialisme de la Yougoslavie, est aussi nourri par le désir de tenir à bonne distance le spectre de la satellisation tracée par le projet de collaboration sans possibilité de décision dessiné par Staline. Les événements qui marquent ses relations avec Moscou après 1945 cristallisent en effet l’inclinaison de Belgrade pour la lutte contre la domination étrangère. La défaite de l’Axe entraine une redistribution des rapports de force sur la scène internationale. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’URSS aspirent à obtenir plus d’influence. Auréolée de prestige pour être entrée à Berlin la première, l’URSS en demande plus. Dans son aspiration à la domination, Staline mine ainsi les bases pour des rapports reposant sur l’égalité, indispensable à la cohésion interne de l’Union soviétique. Dans un contexte où chacun tient à mettre en avant sa propre contribution à la victoire, l’orgueil de Staline se heurte à la fierté des autres pays de l’Europe orientale, dont la Yougoslavie. Durant la guerre, les Partisans communistes et Josip Broz Tito, viennent à bout des Allemands, essentiellement par leurs propres moyens. Ils ne reçoivent qu’une aide limitée de l’Armée rouge20. En essayant de s’accaparer toutes les victoires, Staline blesse la fierté des Yougoslaves et fait ombrage à la légitimité de Tito, devenu désormais président de la République fédérale populaire de Yougoslavie proclamée en 194521.

  • 22 Des sociétés mixtes soviéto-yougoslaves sont créées et des conseillers techniques de l’URSS envoyés (...)
  • 23 Le trotskysme est développé par Léon Trotsky, compagnon de lutte de Lénine, pour critiquer la burea (...)
  • 24 CARRÈRE D’ENCAUSSE, Hélène, op. cit., pp. 72, 470-471 ; FERREIRA NAVARRO, Marcos, « KULLA, Rina, No (...)

14Les efforts de Staline pour subordonner Belgrade à Moscou22 se heurtent ainsi au refus des Yougoslaves d’abandonner une forme d’occupation pour une autre. Tito n’est en effet pas favorable aux projets de Staline, et il envisagerait une gestion horizontale des rapports politiques. Il souhaiterait d’ailleurs la même chose pour les autres pays slaves, qu’il entend réunir au sein d’une fédération balkanique. À la rigidité de Staline, répond la détermination de Tito, et les manœuvres d’intimidation et de déstabilisation de Moscou ne font que fissurer les rapports avec Belgrade entre 1946 et 1948. Staline assimile l’attitude de Tito à du trotskysme23, et il entreprend de démolir sa légitimité. Dans sa campagne, il se sert de la «Pravda» et du Parti Communiste de l’Union Soviétique (PCUS), qui condamnent les projets de Tito, l’accusent de « dérive nationaliste », le considèrent comme un traitre faisant le jeu des Américains, insinuent que la Yougoslavie doit son salut à l’Armée rouge. Le maître du Kremlin prend également des mesures pour isoler Tito du monde communiste. La rupture entre Moscou et Belgrade est consommée en juin 1948 lors du congrès du Kominform à Bucarest 24.

  • 25 WILSON CENTER, « The Anti-Tito Network in Yugoslavia, 1949 », in Wilson Center Digital Archive, URL (...)
  • 26 LAZIC, Branko, Tito et la révolution yougoslave (1937-1956), Paris, Fasquelle, 1957, pp. 149, 206-2 (...)

15La Yougoslavie est ainsi appelée à faire cavalier seul. Tito quitte définitivement les sentiers battus pour forger sa propre ligne idéologique avec l’aide d’Edvard Kardelj, son compagnon de lutte. Conçue et conceptualisée en 1948, celle-ci prend l’appellation de « titisme ». À partir de ce moment, Staline suscite la subversion d’une partie des militants du PCY contre Tito. Il déclenche une série de purge des opposants dans les pays communistes et met sur pied un « réseau anti-Tito ». En fait, Staline planifie dès 1949 d’assassiner Tito, sans pourtant y arriver25. Entre temps, dans le pays, le titisme s’organise autour d’une politique d’autogestion économique, axée sur la titularisation des producteurs directs dans l’économie, et excluant ainsi la formation d’une classe de bureaucrates comparable à celle des autres régimes communistes. Les entreprises sont gérées par des dirigeants élus par les travailleurs, même si dans les faits cela dépend beaucoup de la cooptation par le parti. Un intérêt tout particulier est accordé à la formation. Les dépenses engagées pour l’éducation représentent en effet en 1948 le 10,25 % du budget national, le 10,65 % en 1949 et le 14,26 % en 1950. Ces réformes font de la Yougoslavie l’un des pays du bloc de l’Est (communistes) les plus prospères26.

  • 27 FREREJEAN, Alain, « Tito Truman ». Le coup d’arrêt à Staline, Paris, La Bisquine, 2014.
  • 28 Il s’agit notamment de la tutelle politique et économique que l’Union soviétique a imposée à tous l (...)

16Sur le plan international, l’isolement de la Yougoslavie au sein du monde communiste pousse Tito à s’orienter vers une politique de neutralité internationale et à améliorer ses rapports avec les pays occidentaux27. Le titisme commence alors la recherche de sa propre voie du socialisme, en utilisant ses propres ressources et en faisant recours à des mesures politiques adaptées à son propre contexte national, sans se conformer à une politique définie par l’extérieur. Dans le contexte de la Guerre froide, le titisme se présente ainsi comme une voie socialiste indépendante, différente de celle préconisée par l’Union soviétique. Les contradictions avec l’anticolonialisme et de l’anti-impérialisme de Moscou28 rendent donc nécessaire une reformulation de la méthode et du contenu de la lutte contre ces deux phénomènes. Tito, qui demeure communiste, s’inscrit sur cette voie.

  • 29 CARRÈRE D’ENCAUSSE, Hélène, Le malheur russe, cit., p. 491; WILSON CENTER, « Letter from Nikita S. (...)
  • 30 WILSON CENTER, « Letter from Tito and the Executive Committee [Politburo] of the CC LCY to Nikita K (...)

17À la mort de Staline en 1955, Nikita Khrouchtchev, soucieux de colmater la brèche causée par le schisme yougoslave, tente de normaliser les relations entre Moscou et Belgrade29. Mais cette tentative reste mitigée. En effet, si Tito n’oppose pas un refus à la main tendue de Khrouchtchev, il insiste sur le fait que la normalisation des rapports doit s’effectuer graduellement et prendre désormais en compte les similitudes mais surtout les différences entre les systèmes en vigueur dans les deux pays30. Moscou et Belgrade sont ainsi deux capitales du monde communiste qui partagent la volonté, inspirée par leurs expériences historiques récentes, d’aider les peuples colonisés à se débarrasser de la domination étrangère. Cependant, les nuances imprimées par ces expériences ne sont pas sans incidence sur les formes et les trajectoires de l’anticolonialisme de ces deux capitales, comme cela a été perceptible sur le terrain africain à partir de la seconde moitié de la décennie 1950, quand s’accélère la décolonisation.

3. Divergence d’options et des formes d’appui aux nationalistes

18Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le vent de la décolonisation souffle dans le tiers-monde. Le monde communiste se propose comme un pôle géopolitique à partir duquel les nationalistes peuvent obtenir de l’aide. Toutefois, s’ils sont d’accord sur le principe, les formes d’appui venant de l’URSS et de la Yougoslavie divergent. Porté par la centralisation du pouvoir, le soutien moscovite s’inscrit au fond dans la perspective de satellisation des futures nations indépendantes, tandis qu’il s’agit pour Belgrade de lutter pour l’avènement des nations indépendantes et libres des subordinations idéologiques.

3.1. Moscou et la décolonisation assistée dans la perspective de satellisation

  • 31 Il faut relever que l’anticolonialisme de Washington a le même objectif.

19La décolonisation, pour Moscou, s’apparente à la logique des guerres de libération des territoires que l’Armée rouge a menée dans les territoires occupés par l’armée allemande en Europe de 1939 à 1945. Pour Moscou, la décolonisation s’apparente également à la lutte des classes, dans la mesure où les colonisés se tiennent debout pour reconquérir leur dignité et leur souveraineté. Mais étant donné le contexte de la Guerre froide, son objectif est en effet d’anticiper un éventuel rabattement des territoires en lice pour l’indépendance dans le camp de l’Ouest31. En effet, la plupart des puissances coloniales étaient des pays du bloc de l’Ouest et membres de l’OTAN. Or, les « négociations » en vue de l’indépendance visaient pour la plupart à maintenir un espace de dialogue entre les futurs pays indépendants et les métropoles. Combattre le colonialisme pour Moscou se doublait donc en filigrane de la lutte contre le bloc de l’Ouest.

  • 32 En Asie, Moscou soutient notamment les nationalistes Indochinois par l’entremise de la Chine. Il fa (...)
  • 33 TROUDE, Gilles, « La Russie en Afrique : le grand retour ? », in Géostratégiques, 25, 10/2009, pp. (...)

20Moscou fournit ainsi un soutien politique, technique, logistique et militaire aux nationalistes aussi bien en Asie32 qu’en Afrique. Sur le terrain africain plus précisément, la stratégie moscovite combine des interventions directes et des interventions indirectes. Au cours de la seconde moitié de la décennie 1950, Moscou soutient Gamal Abdel Nasser en finançant la construction du barrage d’Assouan (Égypte) en 1956. Il ouvre une ligne aérienne reliant Moscou à Conakry, après le « non » de la Guinée de Sékou Touré, le 28 septembre 1958, à la Communauté proposée par Charles De Gaulle33. Dans la Corne de l’Afrique, où depuis 1943 il avait des relations avec Addis-Abeba (Éthiopie), Moscou se rapproche en plus, en 1960, de Mogadishu (Somalie), avec qui il conclut un accord technique et d’assistance en 1961 et à qui il envoie de l’armement dans les années suivantes. Toutefois, après des tergiversations entre la Somalie et l’Éthiopie, Moscou finit par soutenir l’Éthiopie dans la lutte pour l’occupation de l’Ogaden en 1978, avec le soutien de Cuba.

  • 34 Dans la sous-région l’intervention de Moscou ne s’inscrit plus dans le cadre de la lutte contre la (...)
  • 35 La déstalinisation et les accords stratégiques signés entre Washington et Moscou concernant la rédu (...)
  • 36 C’était contre le Front National de Libération de l’Angola (FNLA) et l’Union Nationale pour l’Indép (...)
  • 37 TROUDE, Gilles, op. cit. ; les estime à en tout 40.000 qui ont été répartis durant la Guerre froide (...)

21En Afrique centrale34, en Afrique de l’Ouest et en Afrique australe l’intervention de Moscou au cours de la même période s’accentue dans les territoires encore sous domination coloniale. Mais à la différence de Belgrade, Moscou à partir des années 1960 délivre son aide par l’intermédiaire de Cuba35. Tel est le cas du soutien apporté au Parti Africain pour l’Indépendance de la Guinée Bissau et du Cap Vert (PAIGC) et au Mouvement Populaire pour la Libération de l’Angola (MPLA)36. L’appui de Moscou se prolonge jusqu’aux années 1980 en Afrique australe, précisément en Mozambique au Front de Libération de la Mozambique (FRELIMO) et en Namibie (ex-Sud-Ouest Africain) à l’Organisation du Peuple du Sud-Ouest Africain (SWAPO). Ce soutien moscovite et cubain en matériels, armés, soldats et conseillers37 aide ces territoires à se libérer du joug colonial entre 1973 et 1990 : Guinée Bissau (24 septembre 1973), Mozambique (25 juin 1975) Cap-Vert (5 juillet 1975), Sao Tome et Principe (12 juillet 1975), Angola (11 novembre 1975) et Namibie (21 mars 1990).

22L’aide de Moscou aux nationalistes est basé essentiellement sur la participation à la lutte armée. Par ailleurs, son anticolonialisme recèle – comme il est également souligné par les « supers grands » à chaque fois qu’ils souhaitent protéger ou délivrer un territoire de la « barbarie » du camp adverse – un accent messianique. De là, la tentation est forte d’attendre des personnes « délivrées » une certaine reconnaissance, traduite par la subordination idéologique. C’est pourquoi, après les indépendances, les pays où les nationalistes avaient été soutenus par Moscou adoptent l’idéologie marxiste.

23Autre fut la portée de l’option d’assistance défendue par Belgrade.

3.2. La Yougoslavie et l’option de la décolonisation sans subordination idéologique dans le cadre du mouvement non-aligné

  • 38 ARNE WESTAD, Odd, op. cit., pp. 124-125; DÉRENS, Jean-Arnault, op. cit.

24La réconciliation avec Moscou en 1955 ne brise pas l’élan émancipateur de Belgrade. En réalité, Tito mitige la main tendue de Khrouchtchev car il n’est plus à l’aise avec une autre forme de dépendance idéologique. La Yougoslavie, avec ses propres orientations politiques, cherche à se faire entendre sur la scène internationale. Avec le Caire, New Dehli, Pékin et Djakarta, Belgrade est déjà à cette époque en train d’envisager un mouvement qui ne sera inféodé ni à Moscou ni à Washington. Le mouvement verra le jour six années plus tard sous l’appellation du Mouvement des Non-Alignés (MNA). En attendant, la Yougoslavie multiplie des engagements qui défraient la chronique internationale. Quand la guerre d’Algérie éclate en 1954, elle est la première à porter la voix du FLN à l’ONU et à fournir des moyens armés de lutte aux nationalistes ; alors que l’URSS et le Parti Communiste Français (PCF) se méfient de l’initiative du parti nationaliste algérien. Après la conférence de Bandung, la Yougoslavie envoie des soldats en Égypte, en guise de soutien à l’initiative de nationalisation du canal de Suez en 1956 menée par Nasser38.

  • 39 La Chine de Mao dénonce la tutelle idéologique de Moscou, ce que Staline voit d’un mauvais œil. Il (...)
  • 40 ARPI, Claude, « The Panchsheel Agreement », in Indian Defence Review, 5 août 2015, URL:  http://www (...)

25La Yougoslavie était donc, vers 1955, déterminée à être une nation souveraine et à soutenir les autres pays soumis à la domination étrangère sur la scène internationale. Tito amène ainsi une importante contribution à la création du MNA. Plateforme regroupant les pays qui étaient contre la tutelle idéologique de Washington et de Moscou, le mouvement des pays non-alignés trouve ses prémices dans les mutations politiques qui surviennent également en Asie. Ses jalons sont plantés dans l’Orient lointain : en Indonésie en 1945 avec Soekarno, en Inde à partir de 1947 avec Jawaharlal Nehru, puis dans les années 1950-1960 dans le monde arabe avec Nasser et en Chine dans le sillage de la rupture sino-soviétique39. Ces leaders ont en commun l’inclinaison pour l’émancipation des pays des tutelles idéologiques étrangères. Le concept de « non alignement » apparait en effet dans un discours de Nehru en 1954 à Colombo (Sri Lanka). Son contenu est précisé avec le traité de Panchsheel signé le 12 avril 1954 à Beijing, entre l’Ambassadeur de l’Inde, N. Raghavan et le Ministre chinois des Affaires Étrangères, Chang Han-Fu et en présence de Zhu Enlaï. Ce traité contient cinq principes considérés comme les piliers du MNA : le respect mutuel de l’intégrité et de la souveraineté de chaque pays, la non-agression mutuelle, la non-ingérence, l’égalité et la coopération pour le progrès commun et la coexistence pacifique40.

  • 41 ASSIE-LUMUMBA, N’Dri Therese, « Behind and beyond Bandung: historical and forward-looking reflectio (...)
  • 42 ARNE WESTAD, Odd, op. cit., p. 107; MISKOVIC, Natasa, FISCHER-TINÉ, Harald, BOSKOVSKA, Nada (dir.), (...)
  • 43 COLARD, Daniel, Le mouvement des pays non-alignés, Paris, La Documentation Française, 1981, pp. 39- (...)

26Il se dessine ainsi un axe Belgrade-Caire-New Dehli-Pékin-Djakarta qui constitue la matrice des pays dont l’accès à l’indépendance a servi d’exemple et fourni aux nationalistes des raisons d’espérer la victoire sur le joug colonial. Après le traité de Panchsheel, une première rencontre préparatoire à la création du MNA se tient du 18 au 24 avril 1955 à Bandung (Indonésie)41. Elle réunit 29 délégations : 15 d’Asie, 9 du Proche Orient et 6 d’Afrique. Les participants revendiquent l’égale souveraineté des peuples et des nations, le respect des droits de l’homme et de la Charte des Nations unies. Ils revendiquent le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, condamnent le colonialisme et l’apartheid, et soulignent la nécessité d’une coopération économique et culturelle entre les pays du tiers-monde42. Une seconde rencontre entre Tito, Nasser, Soekarno et Nehru a lieu le 19 juillet 1956, à Brioni, en Yougoslavie. La déclaration de Brioni est considérée comme l’acte fondateur du MNA car elle est adoptée par la majorité des pays du tiers-monde lors de la conférence de Belgrade le 1er septembre 1961. La conférence de Belgrade est la première d’une serie dont la 9ème se déroule du 4 au 7 septembre 1989 dans la même ville. La Yougoslavie a pris la tête du MNA car Tito en est le premier Secrétaire Général du mouvement de 1961 à 1964. Même après, Belgrade est demeurée très active. Pour Tito, la Yougoslavie est un pays non aligné43.

  • 44 BERG, Eugène, Non alignement et nouvel ordre mondial, Paris, Presses Universitaires de France, 1982 (...)
  • 45 Le musée africain de Belgrade est créé à partir de la collection privée du diplomate Zdravko Pecar (...)

27Le mouvement ainsi lancé est un espace de lutte pour la justice, l’équité et l’égalité entre les peuples et les États sur la scène internationale. Les conférences des non-alignées servent d’instances de débats et de décisions concernant la décolonisation en Afrique. Principalement, puisqu’en Asie le processus est terminé avant les années 1960. Le MNA s’active auprès de l’ONU afin de protéger les jeunes pays indépendants, tout en se présentant comme un espace de leur accueil. Dès 1964, tous les pays membres de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) et de la Ligue Arabe sont automatiquement admis au sein du MNA44. Le mouvement initie lors de la conférence d’Alger en septembre 1973 un programme intitulé le « Nouvel Ordre économique mondial » (NOEI). Adopté par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 6 décembre 1974, ce programme propose des mesures concernant les matières premières, le financement du développement, l’industrialisation, les transferts de technologie et le contrôle des firmes multinationales. Le 23 mai 1977, témoignant une fois de plus de sa solidarité aux peuples africains, Tito inaugure un musée africain à Belgrade45.

  • 46 UNITED NATIONS GENERAL ASSEMBLY, « 6th Summit Conference of Heads of State or Government of the Non (...)

28Belgrade s’inscrit ainsi, avec les autres pays du MNA, favorablement à la décolonisation et contre les relents néocolonialistes. Le MNA est un cadre dans lequel la Yougoslavie manifeste son soutien ou collabore avec de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, de l’Afrique centrale et australe, engagés dans la lutte pour l’indépendance ou déjà indépendants. À l’ONU, elle milite en faveur de la criminalisation de l’apartheid et du racisme dans le cadre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (adoptée en 1965, entrée en vigueur en 1969) et de la Convention sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid (1973 et 1976). En 1979, face à la permanence des pactes coloniaux et les guerres civiles provoquées de l’extérieur, le MNA publie la déclaration de la Havane. Celle-ci réaffirme : le caractère fondamental de l’indépendance nationale ; la souveraineté ; l’intégrité territoriale et la sécurité des pays non alignés dans leur lutte contre l’impérialisme, le colonialisme, le néocolonialisme, la ségrégation, le racisme, et toute forme d'agression étrangère, d’occupation, de domination, d’interférence ou d’hégémonie de la part de grandes puissances ou de blocs politiques46.

4. Conclusion

29Cette étude a rendu compte des dénominateurs communs et des contradictions qui ont caractérisé l’aide d’une partie du monde communiste dans le cadre de la lutte contre la colonisation en Afrique au siècle dernier. Elle a mis en exergue la portée du schisme yougoslave de 1948 sur la manière dont le monde communiste a fourni son aide aux nationalistes dans leurs luttes pour l’accès à la souveraineté internationale. Le constat qui se dégage est que les formes d’accompagnements, basés sur les fondamentaux du marxisme, ont conflué, en combattant le capitalisme, vers la lutte contre la colonisation et l’impérialisme. Le poids de la mémoire aura été déterminant dans l’offre. Celle qui a eu véritablement à subir la domination étrangère (Yougoslavie) a exercé son soutien avec plus d’entrain. Le MNA fut le cadre dans lequel elle déploya son soutien en Afrique en particulier.

  • 47 ARNOLD, Guy, The A to Z of the Non-Aligned Movement and Third World, Lanham, Scarecrow Press, 2010.
  • 48 DÉRENS, Jean-Arnault, op. cit.

30À une époque où, divisé en deux, le monde était menacé de conflagration avec risque d’annihilation de l’homme lui-même, le MNA a émergé et s’est affirmé comme une institution recherchant activement la coexistence pacifique pour le bien-être de l’humanité. Pour les pays embourbés sous le joug colonial, il fut une organisation de secours non négligeable luttant pour leurs indépendances, pour l’élimination de la pauvreté et pour développer leurs économies47. Au-delà de la perspective de satellisation par Moscou, s’est certes greffé du côté de la Yougoslavie la nécessité, compréhensible pour tout État acculé, d’échapper à la tragédie de l’isolement. Mis au ban des pays communistes en 1948, le soutien aux luttes anticoloniales fut aussi pour elle un moyen de se faire une place au soleil des affaires internationales48.

31Ainsi, le schisme yougoslave, fondateur d’une variante de l’expérience socialiste a suscité une approche plurielle dans la mise en œuvre des stratégies de combat contre ces deux systèmes de domination. Si l’on assiste ainsi à une convergence d’intentions de la part de Moscou et de Belgrade, les moyens déployés et les espaces de combat diffèrent. Théoriquement, leurs ambitions et projets pour le monde colonisé chevauchent mais leurs stratégies s’inscrivent sur des trajectoires divergentes. Le soutien moscovite, militaire la plupart du temps, était orienté en filigrane vers la nécessité de susciter de potentiels alliés contribuant à étendre l’influence de l’Union soviétique dans le contexte de la Guerre froide. Du côté yougoslave, le soutien accentué dans le domaine diplomatique vise l’émancipation et l’aliénation de toute dépendance idéologique par rapport à l’étranger, et s’inspire fortement des principes du MNA, espace de lutte privilégié par Belgrade, qui proposa une alternative à la vision bipolaire du monde.

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Note

1 FANON, Frantz, Les damnés de la Terre, Paris, Maspero, 1961, pp. 18-22, 41-44 ; CÉSAIRE, Aimé, Discours sur le colonialisme, Paris, Présence Africaine, 1994 [éd. or. : Paris, Réclame, 1950], pp. 1-2, 7 ; MBEMBE, Achille, De la postcolonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine, Paris, Karthala, 2000, pp. 8-10, 33.

2 LINDSAY, Donald, Europe and the World, 1870 to the Present Day, Oxford, Oxford University Press, 1979, p. 274; ROCHE, Jean-Jacques, Théorie des relations internationales, Paris, Montchrestien, 2001, p. 20.

3 C’est pareil pour les États-Unis et les pays du bloc de l’Ouest. C’est pour se débarrasser de la tutelle de Washington que la France quitte l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en 1964. Cela pourrait être intéressant de discuter les rapports que Washington et ses satellites, en grande majorité des puissances coloniales, ont entretenu à l’égard et pendant la décolonisation. Certes, le concept de « pays satellite » est souvent perçu comme problématique. Avec une certaine pertinence, car même la posture d’alignement est a priori un choix opéré par un État de se ranger (ou non) dans un bloc ou un autre. Mais ce « choix » n’en était vraiment pas un quand un coup d’État, une guerre par acteur interposé portait au pouvoir un dirigeant avec des obligations envers Washington ou Moscou, ouvertement ou indirectement. Il serait possible de déduire, au regard des schismes qui ont jalonné l’évolution de chaque bloc, que la satellisation n’était pas la géométrie standard des relations entre les pays. Cependant l’ensemble des archives de la guerre froide suggère encore difficilement une polarité plurielle sur la scène internationale en dehors de pôles conduits par Washington et Moscou, au moins entre 1945 (conférence de Postdam) et 1961 (émergence d’une « troisième voie », le mouvement des pays non-alignés). Il y a bien eu deux blocs, aux degrés de stratification et d’hiérarchisation distincts. Pour aller plus loin voir ARNE WESTAD, Odd, The Global Cold War: Third World Interventions and the Making of Our Times, New York, Cambridge University Press, 2007.

4 La Yougoslavie (pays des Slaves) est un État de l’Europe du Sud-Est qui a correspondu à trois réalités historiques et géographiques différentes dès sa création en 1918, suite à la dislocation de l’empire d’Autriche-Hongrie au terme de la Première Guerre mondiale. Celle de 1918 à 1941 dite la « première Yougoslavie » est une monarchie. La « seconde Yougoslavie », proclamée par Tito le 29 novembre 1945, est une République socialiste qui se disloque en 1992. Sur ses cendres s’élève un autre État fédéral la « troisième Yougoslavie », formée par la Serbie et le Monténégro. Celle-ci se disloque en 2006, mettant un terme à l’existence historique de la « Yougoslavie ». GARDE, Paul, Vie et mort de la Yougoslavie, Paris, Fayard, 2000 ; MEIER, Viktor, Yugoslavia : A history of its demise, London - New York, Routledge, 1999, pp. 117-131.

5 Ceci est la signification « mineure » de ce concept selon Achille Mbembe, et veut que l’accession à l’indépendance ait simplement été parachevée sous deux modes : violent ou pacifique. MBEMBE, Achille, Sortir de la grande nuit : essai sur l’Afrique décolonisée, Paris, La Découverte, 2010, p. 55.

6 FANON, Frantz, Les damnés de la Terre, cit., pp. 39-40. Signalons-le d’emblée, c’est à ce FLN qu’aux premières heures de son anticolonialisme, Belgrade témoigne son soutien.

7 MBEMBE, Achille, Sortir de la grande nuit, cit., pp. 9-19, 59. Accent mis par l’auteur de la citation.

8 ENGERMAN, David, The Price of Aid: The Economic Cold War in India, Harvard, Harvard University Press, 2018, 512 pages; SANCHEZ-SIBONY, Oscar, Red Globalization: The Political Economy of the Soviet Cold War from Stalin to Khrushchev, Cambridge, Cambridge University Press, 2014 ; NUNAN, Timothy, Humanitarian Invasion: Global Development in Cold War Afghanistan, New York, Cambridge University Press, 2016.

9 L’analyse met en lumière les cadres bilatéraux et multilatéraux (organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies, ONU, et le mouvement des pays non alignés).

10 Voir DÉRENS, Jean-Arnault, « Le rayonnement d’un pays non aligné : au temps de la Yougoslavie anticoloniale », in Le Monde Diplomatique, août 2018, p. 16, URL :<https://www.monde-diplomatique.fr/2018/08/DERENS/58989> [consulté le 16 février 2019].

11 MBEMBE, Achille, SARR, Felwine, Penser pour un nouveau siècle, in MBEMBE, Achille, SARR, Felwine (dir.), Écrire l’Afrique-Monde, Paris - Dakar, Philippe Rey - Jimsaan, 2017, p p. 7-13, p. 7.

12 MIGNOLO, Walter, « The decolonial option: detachment and opening – a manifest and a case study », in Tabula Rasa,  8, 2008, pp. 243-281.

13 FRANK, Robert, « Penser historiquement les relations internationales », in Annuaire Français des Relations Internationales, IV, 2003, pp. 42-65.

14 JULIEN, Élise, « Le comparatisme en histoire : rappels historiographiques et approches méthodologiques », in Hypothèses, 8, 2005, pp. 191-201.

15 L’anticolonialisme des États-Unis est en partie fondé sur ce passé colonial. De la « découverte » de l’Amérique à la fin du XVe siècle à la Déclaration d’indépendance le 04 juillet 1776, son histoire a été en effet celle de sa colonisation par l’Europe de l’Ouest. UTLEY, Robert, WASHBURN, Wilcomb, Guerres indiennes: du Mayflower à Woundedknee, Paris, Albin Michel, 1992, pp. 11, 31.

16 KALINOSVKY, Artemy, « Reassessing Soviet Strategies of Modernization », interview with Maria Lipman, in Ponar Eurasia, 8 august 2018, URL : < www.ponarseurasia.org/point-counter/reassessing-soviet-strategies-modernization-development-discussion-artemy-kalinosvky > [consulté le 17 février 2019]. Sous des traits assez ressemblants au tsarisme, la réorientation de l’idéologie communiste par Staline, déviant de la trajectoire élaborée par son prédécesseur Lénine, est en partie une tentative de « recolonisation à domicile » dont la Yougoslavie a tenu à s’en défaire. Il faut attendre l’enclenchement de la politique de déstalinisation pour que cette attitude de Moscou envers ses satellites et ses périphéries d’Asie centrale change.

17 LÉNINE, Joseph, L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, Bruxelles, Tribord, 1917, pp. 2, 31-54.

18 KI-ZERBO, Joseph, Histoire de l’Afrique noire, d’hier à demain, Paris, Hatier, 1978, p. 472.

19 « Le rayonnement d’un pays non aligné : au temps de la Yougoslavie anticoloniale », cit. Danilo Milić a entre autres servi en Guinée, en Sierra Leone, au Gabon, en Guinée-Bissau, en Angola puis en République démocratique du Congo.

20 Staline, à la demande d’assistance, répond que c’est impossible pour l’URSS en se justifiant par le contexte de guerre. Pendant ce temps, les butins arrachés par l’Armée rouge aux nazis sont exportés vers la Russie. Or, le communisme s’implante en Yougoslavie en 1919 avec la création du Parti Communiste de Yougoslavie (PCY). KRULIC, Joseph, Histoire de la Yougoslavie: de 1945 à nos jours, Paris, Complexes, 1993, p. 63 ; WILSON CENTER, « Record of I. V. Stalin’s Conversation with the Head of the Delegation of the National Liberation Committee of Yugoslavia, A. Hebrang, January 09, 1945 », in Wilson Center Digital Archive, URL : < http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/118440 > [consulté le 11 juin 2018].

21 Il s’agit de la « seconde Yougoslavie » dont Tito (1892-1980) est le président jusqu’à sa mort.

22 Des sociétés mixtes soviéto-yougoslaves sont créées et des conseillers techniques de l’URSS envoyés en Yougoslavie. Le but est en filigrane de phagocyter l’économie locale et l’autorité de Tito.

23 Le trotskysme est développé par Léon Trotsky, compagnon de lutte de Lénine, pour critiquer la bureaucratie mise sur pied par Staline et appeler à une « révolution permanente ». Staline le fait assassiner le 20 août 1940 au Mexique. CARRÈRE D’ENCAUSSE, Hélène, Le malheur russe. Essai sur le meurtre politique, Paris, Fayard, 1988, pp. 451-456 ; NIVAT, Georges, Russie-Europe : la fin du schisme. Études littéraires et politiques, Lausanne, Âge de l’Homme, 1993, p. 424.

24 CARRÈRE D’ENCAUSSE, Hélène, op. cit., pp. 72, 470-471 ; FERREIRA NAVARRO, Marcos, « KULLA, Rina, Non-Alignment and Its Origins in Cold War Europe: Yugoslavia, Finland and the Soviet Challenge, Taurus, Londres, 2012, ps. 240 », in Relaciones Internacionales, 28, 2/2015, pp. 226-227 ; WILSON CENTER, « Proposal for Counter-Intelligence Operation “Traitor” Against Yugoslav Agents, February 10, 1949 », in Wilson Center Digital Archive, URL:< http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/110587 > [consulté le 11 juin 2018].

25 WILSON CENTER, « The Anti-Tito Network in Yugoslavia, 1949 », in Wilson Center Digital Archive, URL : < http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/114540 > [consulté le 11 juin 2018] ; WILSON CENTER, « Soviet Plan to Assassinate Tito, January 01, 1953 », in Wilson Center Digital Archive, URL:

< http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/11297 > [consulté le 11 juin 2018].

26 LAZIC, Branko, Tito et la révolution yougoslave (1937-1956), Paris, Fasquelle, 1957, pp. 149, 206-211 ; GARDE, Paul, Vie et mort, cit., pp. 91-93 ; UNITED NATIONS EDUCATIONAL SCIENTIFIC AND CULTURAL ORGANISATION, « Yugoslavia: educational developments in 1949-1950 », in International Yearbook of Education, 131, 1950, pp. 243-250.

27 FREREJEAN, Alain, « Tito Truman ». Le coup d’arrêt à Staline, Paris, La Bisquine, 2014.

28 Il s’agit notamment de la tutelle politique et économique que l’Union soviétique a imposée à tous les pays de l’Europe orientale, et qui s’apparente à une colonisation.

29 CARRÈRE D’ENCAUSSE, Hélène, Le malheur russe, cit., p. 491; WILSON CENTER, « Letter from Nikita S. Khrushchev, First Secretary of the Central Committee of the Communist Party of the Soviet Union, to Josip Broz Tito and the Central Committee of the League of Communists Of Yugoslavia, June 22, 1954 », in Wilson Center Digital Archive, URL:< http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/112968 > [consulté le 11 juin 2018].

30 WILSON CENTER, « Letter from Tito and the Executive Committee [Politburo] of the CC LCY to Nikita Khrushchev and Central Committee of the Communist Party of the Soviet Union, August 11, 1954 », in Wilson Center Digital Archive, URL:< http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/112970 > [consulté le 11 juin 2018].

31 Il faut relever que l’anticolonialisme de Washington a le même objectif.

32 En Asie, Moscou soutient notamment les nationalistes Indochinois par l’entremise de la Chine. Il faut cependant préciser que la plupart de ses interventions sur ce continent après 1948 (Corée du nord, au Vietnam, au Yémen, entre autres) s’inscrivent plus dans le cadre de l’anti-américanisme. Les objectifs sont pareils en Amérique latine, à Cuba dès les années 1950 et au Pérou dans les années 1980.

33 TROUDE, Gilles, « La Russie en Afrique : le grand retour ? », in Géostratégiques, 25, 10/2009, pp. 165-166 ; BOUCHE, Denise, Histoire de la colonisation française. Tome second : flux et reflux (1815-1962), Paris, Fayard, 1991, p. 483.

34 Dans la sous-région l’intervention de Moscou ne s’inscrit plus dans le cadre de la lutte contre la colonisation, car tous les pays ont eu leurs indépendances en 1960, à l’exception de la Guinée-Équatoriale (1968). L’intervention de l’Union soviétique relève ainsi de la lutte contre l’avancée du bloc de l’Ouest dans la sous-région. Au Congo-Kinshasa, les Belges, satellites des USA, assassinent le 17 janvier 1961 Patrice Lumumba, le premier ministre de cet État nouvellement indépendant. Lumumba était étiqueté de « communiste ». Pour contrer cette avancée, Moscou prend pied au Congo-Brazzaville grâce au coup d’État d’Alphonse Massamba-Débat en 1963. La présence américaine dans l’autre Congo est renforcée par la collaboration entre Mobutu Séssé Séko et la Central Intelligence Agency (CIA), qui fournit des moyens logistiques surveiller le régime marxiste du Congo Brazzaville, où par ailleurs une partie des combattants de l’Union des Populations du Cameroun (UPC) poursuit la lutte malgré la proclamation de l’indépendance du Cameroun français le 1er janvier 1960. L’UPC fut qualifiée de communiste. N’DIMINA-MOUGALA, Antoine-Denis, « Les manifestations de la guerre froide en Afrique centrale (1961-1989) », in Guerres Mondiales et Conflits Contemporains, 233, 2009, pp. 58-62 ; FOUTSOP, Clovis Rodrigue, Les activités politiques et militaires de la rébellion camerounaise au Congo Brazzaville et leur incidence sur les relations entre le Cameroun et le Congo Brazzaville, in NORODOM KIARI, Jean-Bédel (dir.), De l’intégration régionale en Afrique centrale (1960-2010) : une analyse de cinquante années de pratique, Paris, L’Harmattan, 2015, pp. 57-68.

35 La déstalinisation et les accords stratégiques signés entre Washington et Moscou concernant la réduction de l’armement engagent « la détente ». À partir de ce moment, les interventions de Moscou se veulent plus prudentes ou détournées. C’est pourquoi c’est par l’intermédiaire de Cuba, son fidèle allié et ennemi de Washington qu’elle intervient en Afrique à partir des années 1960.

36 C’était contre le Front National de Libération de l’Angola (FNLA) et l’Union Nationale pour l’Indépendance Totale de l’Angola (UNITA) soutenus par Washington. KI-ZERBO, Joseph, Histoire de l’Afrique, cit., pp. 565-566 ; FERRO, Marc, Histoire des colonisations : des conquêtes aux indépendances XIIIème-XXème siècle, Paris, Seuil, 1994, p. 430 ; SCHMIDT, Elizabeth, Foreign Intervention in Africa. From the Cold War to the War on Terror, New York, Cambridge University Press, 2013, pp. 90-91.

37 TROUDE, Gilles, op. cit. ; les estime à en tout 40.000 qui ont été répartis durant la Guerre froide dans plus de 40 pays.

38 ARNE WESTAD, Odd, op. cit., pp. 124-125; DÉRENS, Jean-Arnault, op. cit.

39 La Chine de Mao dénonce la tutelle idéologique de Moscou, ce que Staline voit d’un mauvais œil. Il convient de rappeler cependant que Mao Zedong avait désavoué aussi Tito et ses lieutenants et les considéra comme des trotskystes. FRIEDMAN, Jeremy, Shadow Cold War: The Sino-Soviet Competition for the Third World, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 2015 ; WILSON CENTER, « From the journal of Ambassador Pavel Yudin: record of conversation with Mao Zedong on 8 March 1955, March 12, 1955 », in Wilson Center Digital Archive, URL : < http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/111370 > [consulté le 11 juin 2018].

40 ARPI, Claude, « The Panchsheel Agreement », in Indian Defence Review, 5 août 2015, URL: < http://www.indiandefencereview.com/spotlights/the-panchsheel-agreement/> [consulté le 12 février 2019].

41 ASSIE-LUMUMBA, N’Dri Therese, « Behind and beyond Bandung: historical and forward-looking reflections on south-south cooperation », in Bandung: Journal of the Global South, 2, 1/2015, pp. 1-10.

42 ARNE WESTAD, Odd, op. cit., p. 107; MISKOVIC, Natasa, FISCHER-TINÉ, Harald, BOSKOVSKA, Nada (dir.), The Non-Aligned Movement and the Cold War: Delhi – Bandung - Belgrade, London, Routledge, 2014.

43 COLARD, Daniel, Le mouvement des pays non-alignés, Paris, La Documentation Française, 1981, pp. 39-120 ; ASSIE-LUMUMBA, N’Dri Therese, op. cit., p. 7 ; PIRJEVEC, Joze, Tito, une vie, Paris, CNRS Éditions, 2017 ; WILSON CENTER, « Minutes of conversation between Yugoslav president Josip Broz Tito and UAR president Gamal Abdel Nasser in Brijuni, Croatia, July 11, 1968 », in Wilson Center Digital Archive, URL: < http://digitalarchive.wilsoncenter.org/document/111167 > [consulté le 8 juin 2018]. L’Afrique abrite le 3ème sommet tenu à Lusaka en septembre 1970. Le mouvement a survécu à la Guerre froide et continue de tenir ses congrès.

44 BERG, Eugène, Non alignement et nouvel ordre mondial, Paris, Presses Universitaires de France, 1982, p. 80.

45 Le musée africain de Belgrade est créé à partir de la collection privée du diplomate Zdravko Pecar léguée à la ville de Belgrade en 1974. Les objets viennent du Cameroun, Ghana, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Sénégal, Mali, Bénin, Nigeria, Guinée, Togo et Congo. En 2006, il compte 1700 pièces. En 2017, lors de la célébration des 40 ans, deux expositions ont été organisées afin de souligner la dimension historique des relations entre la Yougoslavie et l’Afrique. La Serbie qui abrite Belgrade est membre observateur de l’Union Africaine (UA). DÉRENS, Jean-Arnault, RICO, Simon, « Quand la Yougoslavie se souvient de son passé africain », in Radio France Internationale, 29 septembre 2017, URL :<http://www.rfi.fr/emission/20170929-yougoslavie-serbie-musee-africain-arts-belgrage-1977&hl=fr-CM> [consulté le 8 avril 2018].

46 UNITED NATIONS GENERAL ASSEMBLY, « 6th Summit Conference of Heads of State or Government of the Non-Aligned Movement Havana, Cuba, 3–9 September 1979 », pp. 10-14, URL: < http://cns.miis.edu/nam/documents/Official_Document/6th_Summit_FD_Havana_Declaration_1979_Whole.pdf >, [consulté le 12 février 2019].

47 ARNOLD, Guy, The A to Z of the Non-Aligned Movement and Third World, Lanham, Scarecrow Press, 2010.

48 DÉRENS, Jean-Arnault, op. cit.

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Ludovic Boris Pountougnigni Njuh, «Moscou, Belgrade et l’anticolonialisme: dynamiques historiques d’une aide extérieure à l’émancipation de l’Afrique (dé)colonisée (1920-1990)»Diacronie [Online], N° 37, 1 | 2019, documento 7, online dal 29 mars 2019, consultato il 13 décembre 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/diacronie/11053; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/diacronie.11053

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Ludovic Boris Pountougnigni Njuh

Ludovic Boris Pountougnigni Njuh est doctorant et chercheur en Histoire des Relations Internationales (HRI) –UFR DSASS– à l’Université de Dschang (Cameroun). Il s’intéresse aux échanges entre l’Afrique et les autres continents, l’intégration régionale, l’action des organisations internationales et les enjeux contemporains de souveraineté et de coexistence pacifique. Membre de la Société Camerounaise d’Histoire (SCH), il est l’auteur des travaux sur l’histoire du Cameroun et de l’Afrique publiés dans des ouvrages collectifs et dans le «Bulletin de l’Institut Pierre-Renouvin» (Université de Paris I – Panthéon Sorbonne). Il est l’auteur de À l’aube du jour nouveau (Saint-Denis, Edilivre, 2015), À l’ombre du silence : latitudes, frontières et horizons (Saint-Ouen, Les éditions du net, 2015) et L’encre de Mimche (Saint-Ouen, Les éditions du net, 2016).
URL: < http://www.studistorici.com/progett/autori/#Pountougnigni >

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