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Publications de 2005

Yvette Veyret (dir.), 2005, Le développement durable : approches plurielles, Paris, Hatier, Collection « Initial », 287 p.

Marc Galochet

Texte intégral

1Depuis quelques années les ouvrages sur la question du développement durable se multiplient dans diverses collections donnant souvent une approche univoque propre à la discipline qui traite du sujet. Il est cependant encore rare d’avoir une approche pluridisciplinaire voire interdisciplinaire d’une notion qui commence à s’imposer dans notre société post-moderne enfin consciente de la vulnérabilité de la nature et de la nécessité de la préserver.

2Les éditions Hatier publient un ouvrage consacré au développement durable dans la récente collection « Initial » Histoire-Géographie, sous la direction d’Yvette Veyret Professeur de Géographie à l’Université Paris-X, qui donne un éclairage pluridisciplinaire au développement durable. L’ouvrage part du constat que cette notion n’est pas appréhendée de façon identique par un géographe, un économiste, un juriste, un politiste ou un spécialiste des sciences de la vie et de la Terre comme l’évoque le titre inscrit sur son frontispice Le développement durable : approches plurielles. C’est là que réside l’intérêt de l’ouvrage qui dresse un bilan des discours et des approches des différentes disciplines mobilisées. Cette approche pluridisciplinaire doit contribuer à établir les fondements d’une réflexion sur le développement durable en favorisant le dialogue et l’échange entre les disciplines. C’est à partir de cette approche que des points de convergence pourront émerger et que les divergences de points de vue pourront être explicitées afin de construire un concept.

3L’objectif de l’ouvrage est de présenter plusieurs lectures voire plusieurs approches destinées à un public souhaitant comprendre cette notion complexe et en particulier ceux qui doivent l’enseigner dans les écoles, les collèges et les lycées. Pour répondre à cet objectif, l’ouvrage est structuré en deux grandes parties. La première partie (chapitres 1 à 6) décline les différentes disciplines scolaires concernées par son enseignement dans le premier et second degré (à l’exception du droit). Cette première partie traite la question du développement durable sous l’angle de la diversité des échelles d’analyse et des acteurs. Ainsi, cette première partie s’achève sur la position des instances internationales, en particulier de l’Organisation des Nations Unies (ONU), en charge de questions cruciales liées aux grands problèmes écologiques contemporains comme le changement climatique et les effets sur l’économie (chapitre 6).

4La seconde partie (chapitres 7 à 11) aborde des exemples variés d’application du développement durable dans le domaine de l’agriculture, de l’urbanisme et de la santé humaine. Deux exemples sont particulièrement développés, l’un en France dans une commune de Picardie et l’autre à Madagascar, qui montrent des gestions différenciées entre les pays du Nord et les pays du Sud.

5Les chapitres de la première partie ne présentent pas seulement la contribution de diverses disciplines au développement durable et ceux de la seconde partie ne donnent pas uniquement des éclairages thématiques, mais s’interrogent de façon pertinente sur les acteurs et les échelles du développement durable. Qui doit promouvoir le développement durable ? A quelle échelle faut-il envisager la mise en application des politiques de développement durable ? Quel cadre territorial d’application privilégier ? Si le développement durable a été érigé au rang de mission planétaire depuis le Sommet de la Terre, en 1992 à Rio de Janeiro, lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement, en revanche sa mise en œuvre par quelque 150 Etats présents doit se faire à l’échelle locale en incitant les collectivités locales à élaborer un programme d’action sous la forme d’un agenda 21. Cette échelle d’application rend plus concrète la notion complexe qu’est le développement durable.

6Le deuxième chapitre « Le développement durable saisi par le droit » est à ce titre fort intéressant dans la mesure où il aborde plus particulièrement les effets juridiques du développement durable sur les politiques urbaines et d’aménagement du territoire. L’auteur rappelle que l’expression « développement durable » n’apparaît dans le vocabulaire législatif français qu’à partir du milieu des années 1990, mais n’est consacré de façon emblématique par le titre de la loi dite « Voynet » de 1999 relative à l’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire. La loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU) du 13 décembre 2000 impose même la prise en compte du développement durable dans les nouveaux documents de planification comme le Schéma de cohérence territoriale (SCOT) et le Plan local d’urbanisme (PLU). Cependant, face au foisonnement du vocable voire à l’omniprésence du terme, le juriste doit aujourd’hui s’interroger sur sa portée pratique dont les significations demeurent très incertaines (p. 43). Si le corpus juridique est vaste et dispersé dans plusieurs codes spécifiques (code de l’urbanisme, de l’environnement, rural, santé publique, construction et habitation…), il manque en revanche souvent de clarté et souffre d’incohérence due à la dispersion dans différents codes. Une codification unique semble nécessaire et donnerait davantage de pertinence et d’efficacité aux objectifs multiples et extensifs du développement durable relevant d’approches globalisantes et transversales. Le premier chapitre nous rappelle que la Géographie est l’une des disciplines les plus aptes à développer une approche globalisante puisque l’un des fondements de l’analyse géographique depuis la fin du XIXe siècle repose sur les rapports nature/société. Par la suite, cette discipline s’est intéressée au cours de la seconde moitié du XXe siècle aux questions de développement et sous-développement dont la réflexion peut contribuer à mieux associer les piliers du développement durable. L’exemple de Madagascar, développé dans le onzième chapitre, prend une signification particulièrement forte en révélant un important décalage entre les deux principales exigences impliquées par le développement durable qui sont la préservation des ressources naturelles sur le long terme et l’amélioration des conditions de vie des hommes. Depuis le début des années 1990, Madagascar s’est engagé dans une politique environnementale ambitieuse et sans équivalent en Afrique en élaborant un Programme national d’action environnementale (PNAE) qui dresse le double constat de la pauvreté croissante et de la dégradation des ressources naturelles. La croissance démographique rapide, associée à la pauvreté, est à l’origine de pratiques extensives et prédatrices détruisant les ressources naturelles de l’île qui ne peuvent se reconstituer dans la mesure où les écosystèmes se trouvent fortement dégradés (augmentation de l’érosion des sols, perte de fertilité des sols…). Pour interrompre l’inéluctabilité de ces enchaînements les politiques publiques ainsi que les ONG de protection de la nature privilégient d’abord la conservation des forêts comme moyen de combattre l’appauvrissement des populations, source essentielle de développement. De nombreux acteurs tant locaux qu’internationaux ont profité des effets de la politique environnementale menée à Madagascar pourtant contrastés selon les objectifs poursuivis et les acteurs impliqués. Cet exemple malgache donne la mesure d’un profond décalage existant entre les pays du Nord et du Sud, rappelant que les inégalités demeurent (p. 266). Le développement durable doit contribuer à renforcer la coopération entre les pays dans le cadre d’une gouvernance mondiale fondée sur un partenariat politique et économique développant les sociétés et conservant leur cadre de vie.

7Les exemples, nombreux et originaux, aident à mieux cerner la notion de développement durable encore complexe et polysémique, malgré la publication de nombreux ouvrages donnant des interprétations multiples et parfois contradictoires : certaines sont éco-centrées, d’autres sont anthropocentrées. L’absence d’une approche interdisciplinaire pour aborder une question comme le développement durable en est certainement la cause. Le lecteur pourra regretter le manque d’un regard croisé, certes bien difficile à établir, entre les différentes disciplines mobilisées plus souvent juxtaposées qu’intégrées, mais il pourra en revanche apprécier le remarquable bilan dressé des différentes approches disciplinaires pour la plupart relevant des sciences humaines, économiques et juridiques.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Marc Galochet, « Yvette Veyret (dir.), 2005, Le développement durable : approches plurielles, Paris, Hatier, Collection « Initial », 287 p. »Développement durable et territoires [En ligne], Lectures (2002-2010), mis en ligne le 11 octobre 2006, consulté le 30 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/developpementdurable/2959 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/developpementdurable.2959

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Auteur

Marc Galochet

Marc Galochet est Maître de Conférences en géographie à l’Université d’Artois (Laboratoire « Dynamique des réseaux et des territoires », EA 2468, Université d’Artois) où il dirige le Master 2 spécialité « Environnement, Développement, Territoires ». Il est également chercheur au laboratoire "Espaces, Nature et Culture" de l’Université Paris-IV (UMR 8185-CNRS) et secrétaire du groupe d’histoire des forêts françaises (IHMC, Ecole normale supérieure de Paris).

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