Fenêtres sur la littérature yéménite contemporaine
Résumés
Cinq poèmes et trois nouvelles d'auteurs yéménites contemporains sont ici traduits en français. De la première génération (Muhammad al-Sharafî) à la génération montante (Wajdî al-Ahdal), de la satire à l'écriture féminine, se mêlent les thèmes et les formes de cette " jeune " littérature.
Plan
Haut de pageNotes de la rédaction
Les traducteurs
Les textes (sauf " La victime ") sont traduits de l'arabe par l'atelier de l'Ecole normale supérieure (Paris) sous la responsabilité d'Houda Ayoub.
Cet atelier est composé d'Hélène Boisson, Abdulrahman al-Surayhi, Samir Monassar, Julien Dufour, Mathilde Lévêque.
" La victime " est traduit par Mathieu Tillier.
Texte intégral
Tour de rôles1
1Hudâ al-'Attâs
2Dans ce quartier de la ville, la nuit a tôt fait de répandre ses couleurs. Les rues sont presque désertes, on n'entend que le murmure de quelques passants et le bruit sourd des voitures. Il vit son buste qui se balançait comme la voile d'un navire. Il la suivit des yeux, une main sur le volant. Il lui sembla que sa chevelure étreignait la brise, défiait le souffle du vent.
3Il se dit : " Ça fait bien longtemps qu'on n'avait pas vu une belle chevelure de femme affronter le vent avec tant d'audace, depuis que les cheveux sont emmurés dans ces foulards épais. "
4Quand elle arriva à sa hauteur, il lui lança un coup de klaxon plein de tendresse et, d'un geste, il l'invita à le rejoindre. Elle se retourna en souriant et se glissa dans la voiture. En réponse, son visage s'éclaira d'une lueur de joie où brillait aussi de l'avidité. Il lui demanda où elle allait. " Et toi, où vas-tu ? " répliqua-t-elle. D'un geste, il lui montra la route devant lui. Elle lui sourit du coin des lèvres et lui dit : " Alors, je t'emmène ! " Et ils rirent de cette répartie, ensemble.
5Ensemble, ils allèrent dans sa chambre. Il enfourcha une chamelle sauvage qui l'emporta, traversant les déserts arides de son désir réfréné depuis des années. Enfin, il crut avoir dompté la chamelle fougueuse, descendit de sa monture et sombra dans un profond sommeil.
6Au matin, il fut réveillé par la chaleur du soleil, qui filtrait à travers une fente entre les volets clos. Il sentit la chaleur du lit, vestige de la nuit écoulée, et s'étira, levant les bras tel un cavalier au retour d'une conquête qui, pour prix de sa victoire, traîne derrière lui des captives. Il se retourna vers elle, mais elle n'était plus là...
7Il s'étonna de trouver une enveloppe posée à côté de lui et la prit. Ses mains se mirent à trembler lorsque de cette enveloppe il vit dépasser quelques billets.
La victime2
8'Abd Allâh Sâlim Bâ Wazîr
9Le dix septembre dernier au matin, Khâlid partit en voiture pour Taez, par un jour de forte chaleur. Il arriva à Karish à onze heures, et aussitôt les militaires de la ville l'assaillirent de toute part. Un soldat se mit à fouiller ses affaires, tandis qu'un autre examinait sa carte d'identité, qu'un troisième scrutait son visage, et qu'un quatrième, entré dans sa voiture, y demeurait une demi-heure à en inspecter tous les recoins. Enfin débarrassé d'eux, il repartit sous leurs regards insistants, et sept minutes plus tard parvint à al-Shurayja4 pour se retrouver bloqué derrière deux files de voitures ; en tête de chacune se tenait un militaire. Il présenta d'abord ses papiers au soldat de la première file, se dégagea au bout d'une bonne demi-heure, et tendit ses papiers après une demi-heure au soldat de l'autre file. Un dernier soldat finit par arriver, qui se mit à éparpiller de nouveau ses bagages, ses papiers et ses vêtements, avant de le laisser enfin partir.
10Khâlid reprit sa route pour Taez, où il arriva à une heure et demi de l'après-midi, alors que les nuages s'amoncelaient déjà au-dessus de la ville. De froides gouttes de cristal se mirent à tomber, et l'air frais ranima Khâlid, apaisant le volcan de colère qui bouillonnait au fond de lui. Il se dirigeait vers Bâb Mûsâ, où habitait un proche chez qui il avait l'habitude de descendre, quand, tout-à-coup, une poule étourdie se précipita en travers de sa route et vint trouver la mort sous la roue droite de sa voiture. Khâlid n'avait pas vu que son propriétaire, un militaire, l'avait posée près de lui tandis qu'il s'asseyait pour marchander avec un vendeur de qat ; la poule s'était élancée si vite que le soldat n'avait pu la rattraper.
11A la vue de sa poule sous les roues de la voiture, le soldat furieux s'écria :
12- Ma poule ! Ma poule !
13Khâlid s'arrêta et fit une brève marche arrière afin de voir sa victime, qui n'était plus que bouillie de chair et de plumes. Le soldat vint vers lui, les yeux flamboyants de colère.
14- Comment peut-on être aveugle à ce point !
15Khâlid ouvrit la portière et descendit pour calmer le soldat furibond :
16- Ne t'en fais pas ! dit-il. C'est ma faute, et je vais te rembourser ta poule.
17La docilité de Khâlid excita la convoitise du militaire, qui s'exclama :
18- Sais-tu à combien s'élève le prix de son sang3 ?
19Khâlid sortit son portefeuille de sa poche et compta trente riyals au soldat :
20- Je sais que chez vous, une poule coûte vingt cinq riyals. En voici trente, et laisse-moi poursuivre ma route, car je suis fatigué et j'aimerais me reposer.
21- Tu vas me donner trois cent riyals ! s'écria le soldat dans un accès de fureur. Sinon je t'emmène au poste !
22Khâlid ne put supporter ce chantage humiliant, et se lança avec le militaire dans une discussion au cours de laquelle ils faillirent en venir aux mains. Mais à la fin Khâlid fut obligé de lui donner, comme moyen terme, deux cent riyals pour sa fameuse poule " soldate ". Il s'apprêtait à remonter en voiture quand un militaire chargé de la circulation lui barra le chemin.
23- Que veux-tu à ton tour ? s'écria Khâlid, perdant patience. Une poule que j'ai écrasée par erreur et dont j'ai payé dix fois le prix au propriétaire ?
24- Tu as commis un crime sur la voie publique, répondit froidement le militaire.
25- Tuer une poule, tu appelles ça un crime ? s'exclama Khâlid au bord des larmes.
26- N'a-t-elle pas une âme comme toi ? dit le militaire avec malice.
27Khâlid voulut répondre quelque chose, mais opta pour la prudence et préféra, dans son état de fatigue, éviter de nouveaux problèmes. Il décida donc de lui parler la langue qu'il comprenait :
28- Et toi, dit-il en sortant son portefeuille, combien veux-tu ?
29- Cinq cent riyals, répondit le soldat dont le visage s'épanouit soudain.
30Khâlid marchanda jusqu'à ce qu'ils s'entendent à nouveau sur deux cent riyals, et les lui tendit en maudissant tous les soldats de la terre.
31Il regagna sa voiture. A peine avait-il touché la clef de contact que le soldat à la poule se mit à nouveau en travers de sa route. Khâlid faillit descendre de voiture pour le frapper, mais il s'arrêta, attendant de voir ce que l'homme lui voulait. Le soldat, cependant, ne s'intéressait pas à lui ; il se pencha, ramassa la poule morte et s'en alla.
32Septembre 1989.
Saleté de nez4
33Wajdî al-Ahdal
34(Un conseil : pour lire cette nouvelle, bouchez-vous le nez)
35Ah ! si vous saviez ce que me fait endurer ce nez envahissant ! Car Dieu a doté de nez normaux toute la création, sauf moi.
36Eh oui ! je suis pourvu d'un nez anormal. Alors que tous les nez ordinaires sentent les odeurs qui parviennent à leurs poils olfactifs internes, le mien est d'une nature étrange : il invente les odeurs sans avoir besoin de les sentir.
37Personne, peut-être, ne voudra croire que je partage ma vie avec un nez qui a beaucoup d'imagination ! Ainsi, quand je regarde une scène de guerre à la télévision, je sens une odeur de poudre me remplir les narines. Un jour, mon nez perçut une abominable odeur de pet qui s'exhalait de l'écran au moment même où la speakerine brune répétait un mot qu'elle venait d'écorcher plusieurs fois. Une autre fois, j'écoutais à la radio un reportage sur le port d'al-ºudayda quand, soudain, il y eut un silence de plusieurs secondes ; et, dans le monde entier, le seul à savoir que le journaliste avait roté fut mon nez, qui devina qu'il avait mangé du poisson et du radis. Pris de nausées et de fièvre, je finis par en vomir à la fin de la journée.
38Je ne sais comment me débarrasser de cette saleté de nez perfide. Car Monsieur ne sent les odeurs réelles que très rarement. Tenez, je passais l'autre jour à côté d'une vieille fosse septique pleine d'immondices, alors qu'on venait de l'ouvrir et qu'une voiture spéciale en pompait le contenu. Voisins et passants fuyaient tous en se bouchant le nez de dégoût. J'étais le seul à rester là, avec l'éboueur tihâmi5, qui me gratifia d'un sourire reconnaissant, saluant ainsi le courage de mon nez, vainqueur des odeurs les plus exécrables de l'univers.
39Parfois, mon nez sent des odeurs que seul un chien policier bien entraîné pourrait détecter. Il m'est même arrivé de sentir une odeur de sang menstruel, au beau milieu d'un cours magistral ; aussitôt, mon nez se mit sur la piste de la pauvre malheureuse, qu'il finit par identifier parmi les étudiantes. Apercevant soudain la chair de poule sur mon visage et mon nez pointé vers elle tel un doigt accusateur, elle baissa les yeux, toute rouge de honte.
40De retour chez moi, j'ai administré à mon nez une raclée à coups de chaussure, le sommant de mettre un terme à ses pitreries.
41La nuit, il m'arrive de me quereller avec lui pendant des heures, en le traitant de caractériel atteint de schizophrénie nasale ! A quoi il me répond par toute une série d'odeurs fictives qui me donnent la migraine, surtout quand il m'inflige des odeurs nauséabondes comme j'en sens dans mes cauchemars.
42Puis vint une période particulièrement dangereuse : mon nez se mit à pressentir les intentions de mes amis à mon égard... Un jour, l'un d'eux cherchait qui d'entre nous lui prêterait un stylo et, lorsque son regard se posa sur moi, je sentis une odeur infecte d'ordures émaner de sa bouche.
43Une autre fois, alors que je passais dans le couloir de la faculté, au milieu du va-et-vient des étudiants, je sentis derrière moi un parfum de rêve pénétrant. Poursuivi par le parfum entêtant, je continuai mon chemin, descendis l'escalier et, en tournant sur le palier, je m'aperçus qu'une étudiante marchait derrière moi. Mon nez intrépide m'assura que le parfum provenait de sous ses aisselles très exactement. Je m'arrêtai et la dévisageai longuement. Je me souvins alors qu'il s'agissait d'une ancienne camarade du nom de Khayzarân. Je l'avais connue dans un autre département, où j'étudiais avec peine. Elle passa en réprimant un sourire et lorsque je demandai à mon nez pour quelle raison étrange il m'avait plongé dans cette hallucination olfactive, il me répondit qu'elle m'aimait de tout son cœur. Et mes camarades de se demander toute la journée pourquoi diable mon nez était si rouge.
44Ce jour-là, j'aurais aimé prendre un couteau et me trancher ce nez importun qui se mêlait de mes affaires de cœur et qui essayait bêtement de jouer les entremetteurs là où justement les sentiments n'étaient pas partagés.
45L'état pathologique de mon nez empira au point de devenir insupportable et épuisant. Et j'ai fini par marcher dans la rue avec un nez qui flairait les passants de tous poils... (Un tel puait de la faute qu'il venait de commettre ... Tel autre était moisi : il avait trompé une fille environ six mois auparavant, d'ailleurs l'odeur s'était atténuée... Et celle-ci était une femme répugnante qui avait abandonné ses enfants orphelins pour épouser un homme plus jeune qu'elle... Une autre n'avait pas d'odeur : mon nez
Poussière de lions6
46Muhammad Haytham
47Sept lions étaient mes frères7, buveurs de sang, bûcherons de la mort
48Mes frères, folie et ravages
49Mes frères, rafale foudroyante, tempête et feu
50Mes frères ont emprunté
51Au grondement de l'orgueil leurs chevaux, emprunté
52Aux éclairs du malheur leurs épées, ils ont avancé
53Horde nombreuse qui dessine un tourbillon d'oubli
54Un autre de déluge
55Et de perpétuels tourbillons de morts
56Sept lions étaient mes frères
57Mes frères le virent, à la lisière de leur ombre
58Homme de si peu, et ils se lancèrent
59Mes frères le virent
60Ils l'encerclèrent
61Lui allait son chemin, calme et inquiétant
62Et de colère
63Mes frères firent volte-face
64Sept lions étaient mes frères
65........................
66........................
67Mes frères firent volte-face
68Ils attaquèrent
69Un homme de si peu traversant l'ombre
70Et la bataille s'embrasa
71Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac8
72Mes frères, dispersés, se consultèrent et furent désemparés
73Mes frères, à la tombée du jour, étaient brave retraite
74Entachée de poussière
75Six lions étaient mes frères, buveurs de sang, bûcherons de la mort
76Mes frères, folie...
77Mes frères, rafale foudroyante, tempête et feu
78Mes frères firent volte-face
79Une fois encore
80Vers l'homme en nombre
81Le provoquèrent
82Le défièrent
83Dans un matin nu comme la nuit et ils attaquèrent
84Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac
85Mes frères interrogèrent l'oracle
86De leur terreur, laissant derrière eux leur impuissance
87Psalmodie de poussière étaient mes frères
88Cinq lions étaient mes frères, buveurs de sang, bûcherons de la mort
89Mes frères,...
90Mes frères, rafale foudroyante, tempête et feu
91Mes frères firent volte-face
92Ils invoquèrent
93Leur tristesse, et, de désespoir, réveillèrent leur soif de vengeance
94Ils chargèrent, attaquèrent même
95Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac
96Mes frères implorèrent
97L'écho, le vent, l'homme en nombre
98Ou bien disparurent
99Et quatre étaient mes frères, bûcherons de la mort
100Mes frères....
101Mes frères, rafale foudroyante, tempête et feu
102Mes frères devenus vertige
103Ont-ils attaqués ?
104Tagada clac Tagada clac Tagada clac Tagada clac
105Mes frères devenus fuite
106Tous trois, mes frères étaient des lions, bûcherons de la mort...
107Mes frères...
108Mes frères, rafale foudroyante... feu
109Tagada clac Tagada clac Tagada clac
110Mes frères...
111Mes frères...
112Deux lionceaux mes frères, rafale foudroyante... feu
113Tagada clac Tagada clac clac
114Mes frères...
115Mes frères...
116Mes frères... un seul petit lionceau... feu
117Tagada clac
118Mes frères...
119Mes frères...
120Mes frères...
121Fffffff ffffffff
122Poussière, mes frères
Les larmes des sharâshif9
123Muhammad al-Sharafî
124Pour qui mettre cette robe
125Et pour qui la choisir ?
126Ou pour qui dessiner la raie de mes cheveux,
127Pour qui chercher parmi bijoux et maquillages
128Ma bague aux reflets chatoyants
129Et mon merveilleux rouge à lèvres
130Et mon collier d'or fin ?
131Pour qui corseter mon sein
132Mutin comme un jeune bouton de rose
133Et pour qui porter mes vêtements
134Les plus charmants
135Où s'agite ma jeunesse turbulente,
136Pour qui laisser naître mon charme ?
137Pour qui ? Pour les ténèbres ?
138Pour mon sharshâf obscur et clos ?
139Dedans, je marche et l'on dirait une tente
140De noirceur,
141Prisonnière de l'humiliation qui m'enchaîne,
142Je sens peser sur moi des yeux inquisiteurs,
143Qui, dans le sillage d'une obscurité honteuse,
144Demandent aux roses la couleur de mes joues
145Et au réveil de l'aube la blancheur du trait qui partage mes cheveux.
146Mes bras
147Sont un matin de chants
148Et mes seins des lys en boutons
149Et ma poitrine, qui chante les étreintes les plus exquises,
150Palpite
151Des amours les plus fraîches et les plus infinies,
152Mais qui donc
153Nourrira pour moi passion ou simple inclination
154Et m'envahira de sa flamme impérieuse,
155Et comment me verrait-il sous ce sharshâf
156Pour ne se griser que de chastes promesses ?
157Je suis un ruisseau
158De jeunesse meurtrie
159Qui s'est tari sur un sentier étroit,
160Je suis une barque sur l'océan de la vie,
161Qui, égarée, cherche une autre barque.
162Je suis une femme, une question coule dans mes veines,
163Assourdissante : à quand l'espoir d'une rencontre?
164La figure de l'aimé obsède mon esprit
165Folie d'un amour fougueux qui épuise mes forces
166Tous mes sens
167En émoi
168S'écrient : toi qui me vois, aime-moi
169Et toi qui cherche la beauté des fleurs
170En voici le paradis
171Pour t'y plonger
172Mais je ne suis qu'un
173Sharshâf où s'engouffrent
174Les malédictions de l'obscurité menaçante
175Nul ne célèbre ma beauté
176Ni jamais d'elle n'aura pitié.
177Sanaa, novembre 1965.
Bougie10
178Ibtisâm al-Mutawakkil
179Cette bougie est un commencement qui se consume
180Et dans mon sang s'éteint
181Car je suis le seigneur de l'obscurité
182Je suis le premier
183Je ne connais pas de limites
184En moi est l'ultime destinée de la bougie
185Et moi – sans prendre fin –
186J'adviens
187Inévitablement
Le vide11
188Ibtisâm al-Mutawakkil
189Dans la rue qui ne débouche
190que...
191sur elle-même
192Dans un instant où s'est rompu ce qu'il y avait
193entre moi
194et
195moi
196Dans la voûte de la rue
197Dans la clôture de l'instant
198me voilà...
199Au flanc du trottoir j'inculque
200l'art du sanglot
201Dans la poussière je répands un goût qui en afflige tous les grains
202et...
203je sanglote d'amour
204En attendant
205que poussent mes douleurs
206et que pleinement je m'envole
207- avec ses ailes -
208et là
209- sans aucun doute - je me serais
210déjà retirée de moi
211et j'aurais à tout ce qui est mon contraire abandonné
212ce vide
213que dans le vide j'étais
Les églises sont endormies12
214Nabîla Al-Zubayr
215Notre main couvre les cloches de Rome
216La ville va bientôt s'éveiller
217et demander qui peut bien sonner les cloches
218je me cache en toi et je fuis le son des mots dangereux
219Je ne pouvais me taire
220Je suis une femme poète qui traîne, sur les charrettes des mots,
221ses moissons
222et ses années de vaches maigres
223Qui fait pleuvoir des mots sur le gardien de la mort
224pour qu'il ouvre un jour nouveau
225Femme poète, mon seul bien, ce sont les mots
226Je traverse la mer en marchant sur les lèvres
227Et je navigue dans les sables
228afin qu'un jour verdoie
229dans l'océan de la journée
230Je m'abrite sous la tendresse des mots
231et me nourris de leur pain
232Je bois leur angoisse
233Les églises sont endormies
234Mais les nonnes..., les cloches, me dévisagent
235Cache ma main dans la tienne, ô mon compagnon, toi qui ne sais pas
Notes
Pour citer cet article
Référence électronique
Muhammad Husayn Haytham, Houda Ayoub, Hélène Boisson, Abdurahman al-Surayhi, Samir Monassar, Julien Dufour, Mathilde Lévêque et 'Abd Allâh Sâlim Bâ Wazîr, « Fenêtres sur la littérature yéménite contemporaine », Chroniques Yéménites [En ligne], 9 | 2001, mis en ligne le 07 septembre 2007, consulté le 18 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cy/112 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cy.112
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