Responsabilités publiques et éthique aristocratique
Résumés
Cet article a pour objet de mettre en exergue certaines caractéristiques fondamentales propres à la royauté anglaise de la fin du Moyen Âge, en montrant comment les souverains ont été contraints de concilier différentes attentes. L’exercice de leur pouvoir découlait en effet d’un subtil équilibre entre leur capacité à se conformer à une éthique aristocratique et à apparaître comme la clé de voûte d’une société civique en émergence.
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- 1 D. J. D. Boulton, The Knights of the Crown : The Monarchical Orders of Knighthood in Later Medieva (...)
- 2 W. Ullmann, The Individual and Society in the Middle Ages, Baltimore, Johns Hopkins University Pre (...)
1Il est bien connu que la fin du Moyen Âge a constitué une avancée décisive dans l’affirmation de l’État moderne, cette période, caractérisée par la croissance sans précédent de l’armature administrative, judiciaire et institutionnelle, étant marquée par un exercice nettement plus assuré de l’autorité royale1. Il est également bien connu que la genèse de l’État moderne n’a pas suivi un cheminement uniforme en Occident, puisqu’il existait plusieurs modèles de gouvernement dans lesquels le pouvoir central était plus ou plus moins investi dans une logique de coopération avec ses sujets les plus éminents. Walter Ullmann a en effet défini deux grands modèles de gouvernement médiéval, qu’il définit soit comme « théocratique », soit comme « féodal2 ».
- 3 G. Harriss, Shaping the Nation : England 1360-1461, Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 5-6.
- 4 Voir P. Lewis, « France in the Fifteenth Century : Society and Sovereignty », Europe in the Late M (...)
- 5 A. Demurger, Temps de crises, temps d’espoirs, xive-xve siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1990, p. (...)
- 6 C. Gauvard, “De Grace especial”. Crime, état et société en France à la fin du Moyen Age, Paris, Pu (...)
2Le modèle « théocratique » a souvent été associé à la France3 ; il se réfère à un processus de construction étatique vertical dans lequel le roi cherchait à se dresser au-dessus de ses sujets sans leur rendre de comptes4. Dans ce schéma de gouvernement, la royauté tendait à développer une légitimité supérieure à la société qu’elle gouvernait, en affirmant son caractère sacré à travers la mise en place d’une religion royale, en développant de nouvelles théories du pouvoir fondées sur l’interprétation du droit romain, ou encore en rognant les prérogatives des assemblées représentatives. Certes, cela n’impliquait pas que les rapports entre le roi et l’aristocratie étaient nécessairement conflictuels : la France des xive-xve siècles n’était nullement caractérisée par une lutte entre la monarchie et la noblesse5. Ce constat semble logique dans la mesure où le rapport de force auquel était confronté tout pouvoir central à la fin du Moyen Âge le contraignait, d’une façon ou d’une autre, à composer avec les réalités de la société qu’il gouvernait. Cette dimension fait notamment écho aux analyses de Claude Gauvard dans son célèbre travail consacré aux lettres de rémission, puisqu’elle a bien mis en évidence que les autorités françaises de la période faisaient toujours preuve d’une indéniable mansuétude envers les crimes d’honneur. Pour elle, « l’État s’impose, mais en étant encore pétri de ces valeurs qui assurent la cohésion de la société et au cœur desquelles se trouve l’honneur. Autant que de combattre les excès, sa tâche judiciaire consiste à permettre de le réparer6 ». Néanmoins, ce modèle « théocratique » tendait à dissocier davantage le pouvoir royal d’une logique d’interaction et de dialogue avec ses partenaires aristocratiques, favorisant sans doute l’avènement d’une conception plus centralisatrice du pouvoir à l’époque moderne.
- 7 Harriss, Shaping the Nation, p. 5-6.
- 8 M. A. Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, Londres, Routledge, 2002, p. 26.
3En revanche, le roi « féodal » était pleinement intégré dans les relations personnelles qui structuraient la société, s’appuyant sur celles-ci pour exercer une gouvernance effective, dans une logique de coopération et d’interdépendance avec les membres de la société politique7. Ce mode de fonctionnement impliquait que l’exercice de l’autorité publique était largement diffusé, exercé, approprié à travers la société, puisque le pouvoir central s’appuyait pour gouverner sur les ressources et les réseaux propres aux élites. L’Angleterre des xive-xve siècles correspondait justement en grande partie à ce modèle du roi « féodal » dans la mesure où le gouvernement du royaume reposait sur le consentement et la participation de ses sujets, en particulier les plus grands d’entre eux : les magnats, les lords, la gentry et les oligarchies urbaines8.
- 9 Ph. Contamine, Charles VII : Une vie, une politique, Paris, Perrin, 2017, p. 425.
- 10 P. Lewis, « Reflections on the Role of Royal Clientèles in the Construction of the French Monarchy (...)
- 11 A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif dans le royaume de France d (...)
- 12 N. Grévy-Pons, « Propagande et sentiment national pendant le règne de Charles VI : l’exemple de Je (...)
- 13 A. Bossuat, « La formule “Le roi est empereur en son royaume”. Son emploi au xve siècle devant le (...)
- 14 Ph. Contamine, « Noblesse française, nobility et gentry anglaises à la fin du Moyen Âge. Une compa (...)
4On pourrait certes objecter que cette distinction entre les deux modèles, français et anglais, est quelque peu simpliste et exagérée dans la mesure où la monarchie française devait elle-aussi se conformer nécessairement à une logique de coopération pour gouverner. Comme le souligne avec justesse Philippe Contamine, dans un contexte où les revenus du domaine royal étaient devenus largement insuffisants pour satisfaire les besoins d’un État qui subissait de plein fouet les vicissitudes de la Guerre de Cent Ans, « tout l’art du roi, s’il voulait ne pas se contenter des ressources de son domaine, quelque étendu qu’il soit, était de passer des compromis avec ces princes, ces ducs, ces comtes, ces barons, ces seigneurs, détenteurs de la haute, moyenne et basse justice, pour qu’ils acceptent de lui apporter régulièrement leur concours politique, militaire et fiscal9 ». Le pouvoir royal lui-même prenait appui sur des réseaux clientélistes fonctionnant selon des logiques en grande partie similaires à la « féodalité bâtarde » anglaise, comme l’ont notamment souligné les travaux de Peter Lewis ou de Gareth Prosser10. Les baillis ou les sénéchaux étaient ainsi bien souvent des hommes qui disposaient d’appuis solides dans leurs localités, à même d’étendre l’influence du centre dans les périphéries, tout en étant liés à la cour par des relations informelles imprégnées d’un fort principe de réciprocité11. Cependant, ne serait-ce que d’un point de vue théorique, il est indéniable que la conception du pouvoir qui émerge en France durant la période porte en germe un modèle de gouvernement très différent de son voisin insulaire. En témoigne notamment Jean de Montreuil, célèbre apologiste de la monarchie française, lorsqu’il insiste dans ses écrits sur la célèbre formule « Le roi de France est empereur en son royaume », en lui conférant un nouveau sens dégagé de ses anciens accents féodaux, puisqu’elle faisait de plus en plus référence à la souveraineté royale12. Or, à la différence du lien féodal contractuel ou conditionnel, le propre de cette souveraineté est d’imposer aux sujets une obéissance inconditionnelle, s’appliquant à tous sans égard à leurs rangs13. Comme le résume bien Philippe Contamine : « Au modèle de la royauté aristocratique, d’où devait découler, à terme, la royauté parlementaire, s’oppose ainsi un modèle qu’on pourrait qualifier de royauté monocratique, dont devait découler la monarchie absolutiste et bureaucratique – la monarchie d’offices14 ».
5Or, le modèle anglais de royauté aristocratique suscite nombre d’interrogations quant aux valeurs qui cimentaient la société politique, à commencer par la clef de voûte du système, le roi : quelle place tenaient respectivement les principes du vieux monde chevaleresque et ceux d’un État moderne en émergence dans un contexte où la croissance des institutions étatiques s’insérait dans le respect et la continuité des structures plus anciennes ? Quelles étaient les normes de comportement attendues des souverains ? Existait-il une forme de contradiction entre l’éthique aristocratique traditionnelle et de nouvelles exigences découlant d’une communauté politique en formation ? Voilà précisément le type de questionnement auquel cet article entend répondre. Pour ce faire, au risque de rappeler nombre d’évidences, il convient d’abord de revenir sur la nature du système politique anglais de la fin du Moyen Âge, car l’analyse des valeurs qui l’animaient nécessite d’abord de bien comprendre les structures qui les sous-tendaient.
La nature du système politique anglais
- 15 H. Kim, The Knight Without the Sword : A Social Landscape of Malorian Chivalry, Cambridge, D. S. B (...)
- 16 J.-Ph. Genet, La genèse de l’État moderne : culture et société politique en Angleterre, Paris, Pre (...)
- 17 S. L. Waugh, « England : Kingship and the Political Community, 1272-1377 », A Companion to Britain (...)
- 18 G. Harriss, « Political Society and the Growth of Government in Late Medieval England », Past and (...)
6Comme nous venons de le souligner, le système politique anglais se distinguait par sa nature coopérative et consensuelle. Cette réalité était particulièrement évidente au sein de la justice et de l’administration locale puisque les membres prééminents de la gentry étaient au premier rang de ceux qui assumaient les nombreuses missions imposées par l’administration royale en tant que juges de paix, sheriffs ou escheators15. Dans ces rôles, ils étaient actifs, entreprenants16, et ils étaient au cœur, à partir du xive siècle, d’un compromis solide entre les élites locales et le pouvoir monarchique, satisfaisant tout autant les désirs du roi que les ambitions des élites terriennes17 (notamment en raison du fait que les offices publics jouaient un rôle incontournable dans la défense des droits de propriété18).
- 19 F. Pilbrow, « The Knights of the Bath : Dubbing to Knighthood in Lancastrian and Yorkist England » (...)
- 20 R. A. Griffiths, The Reign of King Henry VI : The Exercise of Royal Authority, 1422-1461, Berkeley (...)
- 21 J. Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 7 (...)
- 22 J.-Ph. Genet, Les îles Britanniques au Moyen Âge, Paris, Hachette, 2005, p. 237.
7À un plus haut niveau, la couronne s’appuyait naturellement sur le service des lords et des magnats, qui bénéficiaient en retour du patronage royal, particulièrement important pour les familles nobles d’extraction récente comme les Beaufort, les Talbot ou les Bourchier. De manière plus générale, le service du roi était extrêmement profitable, sa faveur était même la seule route vraiment sûre pour l’honneur et le succès19. Celui qui bénéficiait de la faveur royale pouvait ainsi consolider rapidement ses positions, à l’instar de Sir William Bonville qui était capable d’user de l’influence conférée par le pouvoir royal pour miner l’autorité du Comte du Devon, Thomas Courtenay, qui était pourtant alors en position de force20. En outre, le roi jouait un rôle clé dans le maintien de la stabilité du système, en veillant à contrôler les tensions compétitives de la société aristocratique à travers son rôle dans les institutions publiques et par une distribution équitable du patronage royal21. Cette dimension était fondamentale du point de vue des élites terriennes qui avaient le plus à perdre lors de troubles majeurs. Comme le souligne Jean-Philippe Genet, il était vital pour les aristocrates que « le roi reste maître du système22 ».
- 23 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 12.
- 24 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 187.
8La logique de coopération avait aussi trouvé une puissante traduction institutionnelle avec le Parlement, instrument nécessaire au consentement de l’impôt, moteur essentiel de la construction de l’État moderne23. Cette institution a concouru à l’émergence d’un degré élevé d’expérience commune chez les Anglais et a solidement placé les processus de représentation et de dialogue au cœur de leur système politique (le Parlement constituait l’incarnation par excellence d’un corps politique dont la tête était le roi24).
- 25 Harriss, « Political Society and the Growth of Government », p. 30-33.
- 26 H. Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster : Public Authority and Private Power, 1 (...)
- 27 B. P. Wolffe, The Royal Demesne in English History, Londres, Allen and Unwin, 1971, p. 34, 38-40, (...)
- 28 E. Powell, « Law and Justice », Fifteenth-Century Attitudes : Perceptions of Society in Late Medie (...)
- 29 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 9.
- 30 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 41.
- 31 A. Gransden, Historical Writing in England : c. 1307 to the Early Sixteenth Century, Londres, Rout (...)
9Le caractère consensuel du système politique anglais s’explique d’abord par des questions de pragmatisme et de rapport de force, puisque n’importe quel gouvernement de la fin du Moyen Âge demeurait extrêmement limité par son manque de moyens, les particularismes locaux, la lenteur des communications, la prégnance des loyautés personnelles, familiales et communales25, le caractère embryonnaire de la bureaucratie et l’absence de forces militaires indépendantes des structures de pouvoir locales26. Les moyens de la monarchie anglaise étaient d’autant plus limités que, contrairement à son équivalente française, elle n’avait nullement consolidé son pouvoir à travers un processus d’expansion graduelle du domaine royal27. De ce fait, les monarques demeuraient encore tributaires des lords, magnats et membres de la gentry pour jouer un rôle d’encadrement et de stabilité au niveau des comtés, leurs attributions traditionnelles comme good lords et propriétaires terriens suppléant les capacités d’action réduites du pouvoir central. Il était en effet conçu comme naturel de s’en remettre dans l’exercice des fonctions judiciaires et administratives à des hommes qui disposaient d’un pouvoir et d’une influence propres et qui étaient estimés par leurs pairs28. C’est seulement de la sorte qu’il était possible d’assurer l’exercice d’une force gouvernementale. John Watts a ainsi souligné que les rois exerçaient leur autorité à travers des figures locales prééminentes dont le pouvoir existait indépendamment du soutien royal, si bien qu’elles constituaient la colonne vertébrale du système politique29. Comme l’explique Jean-Philippe Genet à ce propos : « Les Mortimer et les York le long de la frontière galloise, les Beauchamp dans les Midlands, les Percy et les Neville dans le Nord, les Mowbray et les de la Pole en East Anglie, les Courtenay dans le Devon, pour ne citer que les familles les plus importantes, sont investies par la couronne d’une mission de good lordship et de maintien de l’ordre qui soulage d’autant une administration (et des finances) royales insuffisantes30 ». Cette dimension semble trouver un écho avec le chroniqueur anonyme de la Vita Edwardi Secundi pour qui les nobles constituent « un composant essentiel de la monarchie sans lequel le roi ne peut rien entreprendre ou accomplir quelque chose d’importance31 ».
- 32 É. Bournazel, Le gouvernement capétien au xiie siècle (1108-1180). Structures sociales et mutation (...)
- 33 T. K. Keefe, Feudal Assesments and the Political Community under Henry II and his Sons, Berkeley, (...)
- 34 M. Aurell, L’empire des Plantagenêt (1154-1224), Paris, Perrin, 2004, p. 64.
- 35 Même si cette division n’excluait naturellement pas les interactions, elle a probablement constitu (...)
- 36 N. Elias, La dynamique de l’Occident, Paris, Pocket, 2003, p. 20-22.
10De plus, il convient de garder à l’esprit que l’existence d’un véritable dialogue entre le roi et sa noblesse a également été favorisé de longue date par les circonstances historiques propres à l’Angleterre : la conquête normande avait en effet permis au pouvoir royal d’exercer une forte emprise sur la haute aristocratie puisque les barons tenaient à l’origine leurs fiefs directement du roi (des fiefs volontairement distribués de manière dispersée, afin d’éviter la constitution de vastes entités cohérentes), tuant dans l’œuf le développement de grandes principautés territoriales. Les Plantagenêt, à la différence de leurs rivaux Capétiens longtemps en situation de faiblesse vis-à-vis des grands du royaume32, n’avaient dès lors pas hésité à s’entourer de membres de la haute noblesse pour gouverner (T. K. Keefe a bien montré que la haute aristocratie était majoritaire dans l’entourage d’Henri II et de ses fils et qu’elle était la base de leur gouvernement33). Mais, ce faisant, la monarchie avait fini elle-même par devenir dépendante de sa noblesse dans l’exercice de son pouvoir. Ainsi, à l’époque de l’Empire angevin, comme l’explique très bien Martin Aurell, « les Plantagenêt contrôlent les grands tenants en chef, mais ils le sont aussi par eux34 ». L’étroite imbrication entre le centre du gouvernement et la noblesse qui contrastait avec la France, divisée entre le domaine royal et les grandes principautés territoriales35, ne pouvait que favoriser sur le long terme une tendance à la coopération et rendait naturellement les aristocrates extrêmement attentifs à la conduite du roi. Dans de telles conditions, il va de soi que la monarchie avait tout intérêt à ne pas froisser ses interlocuteurs de l’aristocratie. C’était d’autant plus vrai que la taille relativement réduite de l’Angleterre médiévale (environ 130 000 km²) favorisait le cas échéant, selon Norbert Elias, « l’entente des ordres et surtout des guerriers du territoire tout entier, contre le seigneur central36 ».
- 37 C. Given-Wilson, « The King and the Gentry in Fourteenth-Century England », Transactions of the Ro (...)
- 38 R. Horrox, « England : Kingship and the Political Community, 1377-c. 1500 », A Companion to Britai (...)
- 39 Ibid., p. 238-239.
- 40 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 95.
- 41 C. Given-Wilson, The Royal Household and the King’s Affinity : Service, Politics and Finance in En (...)
- 42 J. A. Tuck, Richard II and the English Nobility, Londres, St. Martin’s Press, 1973, p. 180 et 193- (...)
- 43 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 20.
- 44 C. Carpenter, Locality and Polity : A Study of Warwickshire Landed Society, 1401-1499, Cambridge, (...)
11Le roi disposait certes de sa propre affinity (une affinity ou affinité désigne le réseau de relations dépendant d’un lord), dont les membres constituaient des hommes qui lui étaient spécifiquement liés dans leurs comtés respectifs37. Néanmoins, cette affinité ne remettait pas en cause la nécessité d’établir des liens fondés sur un principe de réciprocité avec l’ensemble de la communauté aristocratique : l’affinité royale ne constituait généralement pas un élément dominant au sein des sociétés provinciales sur lequel le monarque pouvait s’appuyer de manière exclusive38. En effet, au-delà des hommes formellement liés au souverain, notamment dans le cadre de la household royale, le roi s’appuyait sur de nombreux individus sans liens particuliers envers lui mais à qui il pouvait, à l’occasion, demander un service particulier en échange de la promesse d’une faveur future39. En outre, même les hommes appartenant à l’affinité du roi, bien que naturellement susceptibles d’éprouver une loyauté particulière envers leur seigneur royal, n’étaient pourtant pas détachés des structures de pouvoir plus immédiates propres à leurs comtés40. En conséquence, l’importance croissante de la household et de la retenue royale durant le xve siècle ne constituait nullement l’expression d’une volonté de court-circuiter les réseaux de l’aristocratie, l’affinité du roi ne pouvant ignorer les structures de pouvoir régionales41. Le fait qu’un souverain comme Richard II s’appuyait excessivement sur son affinité, en particulier dans le Cheshire42, était plutôt un signe de faiblesse, car cela démontrait son échec à établir des liens solides avec le reste de l’aristocratie43. Un monarque pouvait légitimement veiller sur son honneur et ses intérêts en tant que lord protégeant les hommes à son service, mais à la condition de ne pas oublier, parallèlement, ses obligations envers la plus large communauté aristocratique44.
- 45 C. Beaune, « Chapitre vii. Cérémoniaux et politique », Les monarchies, Paris, Presses Universitair (...)
- 46 M. H. Keen, « Chivalry and English Kingship in the Later Middle Ages », War, Government and Aristo (...)
- 47 D. Green, The Hundred Years War : A People’s History, New Haven et Londres, Yale University Press, (...)
- 48 Aurell, L’empire des Plantagenêt, p. 135-136.
- 49 N. M. Fryde, Why Magna Carta ? Angevin England Revisited, Hamborg, 2001, p. 53.
- 50 A. Boureau, Le simple corps du roi. L’impossible sacralité des souverains français, xve-xviiie siè (...)
- 51 A. Boureau, « Un obstacle à la sacralité royale en Occident. Le principe hiérarchique », La royaut (...)
- 52 A. Guéry, « Le roi est Dieu, le roi et Dieu », L’État ou le roi. Les fondations de la modernité mo (...)
12De surcroît, on peut noter que la religion royale n’a jamais été développée au même degré en Angleterre qu’en France45, où une idéologie mystique s’était formée autour de la royauté du fait de sa consécration religieuse et de son rôle dans les guerres « saintes » (tel Saint Louis menant la croisade46). Cette consécration sanctifiant l’histoire des rois de France et les élevant au-dessus de simples dirigeants héroïques dans une posture de saints n’avait que davantage facilité une approche verticale du pouvoir. Il n’en allait pas de même pour les rois d’Angleterre qui n’ont jamais eu des prétentions comparables à la sainteté47, et se sont donc montrés plus enclins à s’inscrire dans une logique de dialogue avec leurs sujets : dès l’époque angevine, la sacralité du roi découlant de l’onction avait été vivement critiquée par l’Église d’Angleterre, à l’image de Thomas Becket ou d’Etienne Langton, tous deux archevêques de Cantorbéry (à ce titre, ils avaient la haute main sur le sacre puisque le roi recevait passivement l’huile et la couronne des mains de l’archevêque48), Langton niant même tout caractère sacramentel à ce rituel49. Il est vrai que les travaux d’Alain Boureau ont quelque peu nuancé la sacralité s’attachant à la monarchie française : le pouvoir que brandissait le roi n’a jamais vraiment acquis un caractère surnaturel50, et la religion royale n’a que partiellement permis à la monarchie de capter le sacré propre à l’Église. Comme l’explique A. Boureau, le roi était coincé entre « une captation partielle et contrôlée du sacral clérical (xiiie) et la construction de l’absolu étatique (fin du Moyen Âge)51 ». Cependant, le roi de France, pour reprendre les propos d’Alain Guéry, n’en restait pas moins un « être à part, qui, s’il n’est pas un dieu et ne peut l’être, agit toujours dans la proximité de Dieu, inspiré par Dieu52 ».
- 53 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 76.
- 54 R. Telliez, Les institutions de la France médiévale : xie-xve siècle, Paris, Armand Colin, 2016, C (...)
- 55 É. Bournazel, « Réflexions sur l’institution du conseil aux premiers temps capétiens (xiie-xiiie s (...)
13Il convient aussi de prendre en compte l’importance de la Common Law, à laquelle les Anglais étaient viscéralement attachés, puisque celle-ci a toujours fait obstacle à l’influence du droit romain. En témoigne cet incident rapporté par Jean-Philippe Genet durant lequel « John Tiptoft, Earl of Worcester, ancien étudiant de Ferrare et de Padoue, emmené le 18 octobre 1470 vers Tower Hill pour y être décapité, faillit être massacré par la foule sous prétexte qu’il voulait introduire le droit romain en Angleterre53 ». Or, le rôle qu’a joué le droit romain dans la consolidation du pouvoir royal français est bien connu : l’influence de ce droit à partir du xiiie siècle avait conduit les théoriciens de la royauté à élaborer tout un discours visant à substituer le principe de souveraineté à celui de la suzeraineté, conférant peu à peu au roi tous les attributs de la puissance impériale romaine. Cette évolution porte notamment l’empreinte des formules d’Ulpien (début du iiie siècle) : principes a legibus solutus est (« le prince n’est pas lié par les lois »), quod principi placuit legis habet vigorem (« ce qui plaît au prince a force de loi54 »). Pour reprendre les propos d’Éric Bournazel : « dès 1256, l’idée s’impose selon laquelle le roi de France est princeps – au sens impérial du terme – en son royaume55 ».
- 56 Contamine, Charles VII, p. 445-446.
- 57 J.-Ph. Genet, « La France est-elle née dans la guerre ? », L’Histoire, 380, 2012, p. 76-80, ici p. (...)
- 58 C. Allmand, La Guerre de Cents Ans, Paris, Points, 2013, p. 175-176.
- 59 J. H. Burns, « Fortescue and the Political Theory of Dominium », Historical Journal, 28, 1985, p. (...)
14Il faut enfin garder à l’esprit l’importance de la tradition politique spécifique à l’Angleterre, liée en particulier à l’héritage de la Magna Carta et de la crise baronniale des années 1264-1267, qui a permis l’émergence progressive du Parlement. Le rôle de cette assemblée représentative a été d’autant plus notable durant la période que la déposition d’Édouard II, en 1327, n’a pu être menée à bien que grâce à la participation et au consentement de cette institution, afin d’assurer que le changement de monarque avait le soutien de l’entière communauté politique. Édouard III est, de ce fait, arrivé au pouvoir dans un contexte où il était assumé que le Parlement constituait le cadre privilégié pour débattre et déterminer des questions d’importance nationale. Le contraste est encore sur ce point flagrant avec la France puisque les rois français, en particulier Charles VII, marqués par le souvenir de la grande crise politique des années 1355-1360 (qui leur a montré que la réunion des états était surtout un frein à leur autorité56), ont su mettre à profit les circonstances de la Guerre de Cent Ans pour imposer à la société un système fiscal beaucoup plus autoritaire et coercitif : « les populations sont si lasses de la guerre qu’à partir de 1436 Charles VII lève annuellement les tailles sans que les états généraux – qu’il réunit de moins en moins – doivent l’y autoriser57 ». L’acceptation de cette pression fiscale s’est révélée d’autant plus profonde et durable que les esprits y avaient été auparavant préparés par les ponctions liées au paiement de la rançon énorme de Jean II le Bon58. Cette différence fondamentale en matière de politique fiscale a bien été illustrée par la célèbre distinction que le jurisconsulte Sir John Fortescue avait dressée entre la France et l’Angleterre, distinguant la monarchie limitée anglaise (dominum politicum et regale) de la royauté française, un pays de droits régaliens (dominum regale)59.
- 60 E. Kendall, Lordship and Literature : John Gower and the Politics of the Great Household, Oxford, (...)
- 61 Green, The Hundred Years War, p. 113.
15En définitive, il est clair que le système politique anglais ne pouvait fonctionner que s’il se conformait à une logique d’échanges réciproques entre le souverain et ses sujets60, car même si le roi était au sommet de la communauté politique, il en était néanmoins partie intégrante et soumis à ses principes contractuels61.
Un roi chevaleresque
- 62 R. W. Kaeuper, Guerre, justice et ordre public : l’Angleterre et la France à la fin du Moyen Âge, (...)
16La logique de coopération et de consensus propre à la société politique anglaise avait pour conséquence que les qualités attendues d’un monarque étaient largement modelées par les représentations mentales du monde aristocratique62 : la nécessité pour la monarchie de s’appuyer sur des individus qui disposaient de leurs propres ressources et soutiens et qui s’inscrivaient en grande partie dans des mécanismes d’autorégulation privée, impliquait que les monarques se devaient de gagner leur confiance en se conformant aux standards de comportement propres aux élites terriennes.
- 63 M. Vale, War and Chivalry : Warfare and Aristocratic Culture in England, France, and Burgundy at t (...)
- 64 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 65.
- 65 Contamine, « Noblesse française, nobility et gentry anglaises à la fin du Moyen Âge », p. 118.
17Cette réalité était d’autant plus prononcée qu’il ne faut pas se tromper sur la nature du service royal dans lequel s’investissait la haute aristocratie : même s’il semble évident, au moins pour la fin du xve siècle, que le service royal a considérablement renforcé le principe d’allégeance à la couronne63, faisant du roi le patron suprême en termes d’honneur et d’autorité, la mentalité du noble serviteur de la couronne n’était pas pour autant celle d’un courtisan servile, quémandant des faveurs à un roi dont il était totalement dépendant. En effet, la faveur royale, aussi profitable qu’elle fût, ne faisait pas tout car les serviteurs de la couronne évoluaient toujours au sein d’un univers dans lequel leurs positions sociales demeuraient d’abord forgées par les multiples relations qu’ils nouaient avec leurs clients, alliés et dépendants64. Ils n’étaient nullement dans un face-à-face exclusif avec le roi, contraints à une obéissance inconditionnelle. Sa faveur était certes extrêmement convoitée, mais elle n’assurait nullement à elle seule le statut d’un homme. Philippe Contamine a d’ailleurs souligné que la noblesse anglaise sollicitait probablement moins la faveur royale que la noblesse française, qui était beaucoup plus dépendante de la redistribution des ressources de la fiscalité65.
- 66 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 17.
18Le service royal reposait donc sur la base d’un engagement volontaire ; il concernait des hommes qui, bien qu’ayant beaucoup à gagner du souverain et à perdre en ne bénéficiant plus de sa faveur, ne pouvaient être contraints de suivre aveuglément les désirs de ce dernier. Il était en conséquence fondé sur la bonne volonté réciproque des parties en présence et non sur un principe d’obéissance inconditionnelle66. Or, cette dimension implique que l’honneur demeurait un ciment essentiel des relations : puisque chacune des parties impliquées avait intérêt à obtenir l’appui de l’autre, mais ne pouvait contraindre la partie opposée à tenir ses engagements, ni être elle-même contrainte, elles ne pouvaient se fier qu’à la réputation, à la propension reconnue de l’autre à respecter ses obligations pour espérer une relation viable. Le roi ne pouvait ainsi se permettre d’accorder ses faveurs qu’aux nobles reconnus comme des hommes loyaux et dévoués, tout comme lui-même se devait de gagner l’appui de ses lords par sa valeur en tant que patron fidèle et équitable. Les nobles n’avaient rien de pions démunis, tout comme les membres de la gentry disposaient de leur marge de manœuvre face aux lords, il en allait de même pour ceux-ci dans les relations qui les unissaient à leur patron royal. Ils attendaient en conséquence du monarque une relation loyale, fondée sur les principes du monde aristocratique, impliquant un fort principe de réciprocité.
- 67 J. R. Lander, Conflict and Stability in Fifteenth-Century England, Londres, Hutchinson, 1969, p. 1 (...)
- 68 K. B. McFarlane, The Nobility of Later Medieval England : the Ford Lectures for 1953 and Related S (...)
- 69 G. Harriss, « The Dimensions of Politics », The McFarlane Legacy : Studies in Late Medieval Politi (...)
- 70 Waugh, « England : Kingship and the Political Community », p. 218.
19Un roi se devait d’être d’autant plus vigilant dans l’accomplissement de ses devoirs de good lord suprême que sa fonction de monarque l’obligeait à faire preuve, dans une certaine mesure, d’équité et de représentativité envers l’ensemble de la communauté nobiliaire. Dans ces conditions, toute faveur jugée excessive ou imméritée pouvait être ressentie comme une véritable humiliation par les lords laissés pour compte67. C’était par exemple le cas pour le Duc d’York, lorsque ce dernier avait perdu la lieutenance de Normandie en 1446 au profit d’un rival68. De même, lorsqu’une faveur royale avait été accordée à son ennemi Sir William Tailboys, Lord Cromwell l’avait ressenti comme une insulte directe faite à son honneur69. Des souverains comme Henri IV, Henri V ou Henri VII s’étaient montrés en conséquence particulièrement précautionneux quant à la distribution de leur patronage70.
- 71 M. H. Keen, English Society in the Later Middle Ages, 1348-1500, Londres, Allen Lane, 1990, p. 192 (...)
- 72 En moyen anglais, la notion de truth constituait un concept qui englobait tout à la fois, en fonct (...)
- 73 « The kynge wasse then wrothe and seide vnto hym, “Thou arte a traytour. Wilt thou that I shulde s (...)
20Les lords, quoique de manière exceptionnelle, pouvaient même parfois se sentir investis d’un droit de résistance légitime lorsque le monarque bafouait ses engagements71. Ainsi, l’English Chronicle explique comment Sir Henri Percy, surnommé Hotspur, aurait évolué d’un service loyal à Henri IV à la révolte, en mentionnant comment Hotspur se serait indigné du fait que le roi n’avait rien tenté pour payer la rançon de son beau-frère détenu par les Gallois. Selon le chroniqueur, le roi était même allé jusqu’à considérer que le versement d’une somme d’argent aux Gallois de la part de Percy constituait une trahison. Confronté à une telle attitude, Percy lui aurait rétorqué qu’il demeurait un « true man72 », exempt de toute trahison, et avait clamé son droit de s’exprimer comme il l’entendait en tant que tel : Hotspur, en tout cas dans la version du chroniqueur, se sentait légitimement indigné par le comportement du roi qui avait bafoué ses obligations à son égard73.
- 74 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 26-27.
21Il faut certes bien spécifier que l’état de révolte était l’exception et non la règle74. Mais, aussi exceptionnel que soit un tel exemple, il sous-tend la forte idée de réciprocité qui imprégnait le lien entre le roi et la noblesse : le roi ne pouvait compter sur le soutien inébranlable de ses sujets les plus éminents que s’il accomplissait sa part du marché. De ce fait, un lord de la fin du Moyen Âge pouvait encore adopter une attitude tout à fait similaire à celle exprimée par le personnage de Fouke dans l’œuvre Fouke le Fitz Waryn datée de la fin du xiiie siècle : lorsque Fouke est lésé par le roi qui accorde ses domaines à un rival, son discours exprime la nature contractuelle de la relation qui l’unit à son souverain, en lui faisant clairement comprendre que son soutien n’est nullement inconditionnel :
- 75 Fouke le Fitz Waryn, éd. E. J. Hathaway, Oxford, Anglo-Norman Text Society, 1975, p. 24.
Sire roy, vous estes mon lige seignour, e a vous su je lïé par fealté tant come je su en vostre service, e tan come je tienke terres de vous ; e vous me dussez meyntenir en resoun, e vous me faylez de resoun e commune ley, e unqe ne fust bon rey qe deneya a ces franke tenauntz ley en sa court ; pur quoi je vous renke vos homages75.
- 76 M. H. Keen, Chivalry, New Haven, Yale Nota Bene, 2005, p. 247.
- 77 Harriss, Shaping the Nation, p. 4.
- 78 Horrox, « England : Kingship and the Political Community », p. 225.
- 79 Keen, « Chivalry and English Kingship in the Later Middle Ages », p. 257-258.
22En conséquence, le roi ne pouvait se permettre de faire affront aux valeurs chevaleresques76. Comme le souligne Gerald Harriss, il se devait toujours de composer avec la vieille éthique féodale selon laquelle fidélité, aide et conseil exigeaient en retour confiance, protection et récompense77. Il apparaissait dès lors largement comme le good lord de tous les good lords78, si bien que les valeurs de la chevalerie et de la royauté tendaient toujours à se chevaucher79.
- 80 Nicholas Upton, The Essential Portions of Nicholas Upton’s De studio militari, before 1446, Oxford (...)
- 81 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 38.
- 82 « Of knythod loodesterr, / Wis and riht manly, pleynly to termyne, / Riht fortunate, prrvid in pes (...)
- 83 A. Mairey, « Qu’est-ce que le peuple ? Quelques réflexions sur la littérature politique à la fin d (...)
- 84 « He medleth nevere but of thynges grete / And hye and virtuous ; he nevere is meeved / With smale (...)
- 85 « Or a kyng swere, it is ful necessarie / Avyse him wel, for whan that it is past, / He may his oo (...)
23Cette dimension est bien illustrée dans la littérature des miroirs aux princes, puisque de telles œuvres insistent fortement sur les vertus personnelles qui étaient attendues du souverain, à l’image de la fortitude, une valeur profondément ancrée dans l’éthique chevaleresque, aux côtés des idéaux de prouesse et de fidélité, que Nicolas Upton (un clerc, fin connaisseur des coutumes de la guerre, secrétaire au service du grand combattant Thomas Montague, Comte de Salisbury, durant les années 1421-1422) assimile d’ailleurs à l’honneur lui-même80. Comme le souligne John Watts, dans l’univers des miroirs aux princes il n’est guère question de Parlement, de loi, de conseil, ou de représentation du royaume, mais avant tout de la dimension aristocratique du pouvoir royal81. En témoigne l’œuvre du poète John Lydgate (auteur, entre autres, du The Fall of Princes (1431-1438), un miroir aux princes commandité par Humphrey, Duc de Gloucester), dans laquelle royauté et chevalerie se complètent mutuellement puisqu’il célèbre notamment Henri V comme un modèle de roi chevaleresque, digne des neuf preux82. Thomas Hoccleve (un clerc ayant fait carrière dans l’office gouvernemental du sceau privé à partir de 1387 et jusqu’en 142683), dans son Regiment of Princes, attendait pareillement du souverain qu’il se comporte comme un « chevalier honorable84 ». Il martelait également la nécessité pour le roi de respecter ses engagements, en plaçant résolument l’accent sur le caractère crucial du serment85. Dans la conception d’Hoccleve, il n’existait pas ainsi de différence fondamentale de nature entre les devoirs incombant aux aristocrates et ceux du monarque, ils partageaient tous un même ensemble de vertus.
- 86 « After the kynges that ich itold/Regned a knight swithe bold : /Edward he het sikerly […]/He was (...)
- 87 « Hii igitur circa regem conuersantes nichil quod deceret tantum militem informare curabant ; non (...)
- 88 Worcester, secrétaire au service de l’illustre combattant Sir John Fastolf, est l’auteur du Boke o (...)
- 89 « […] like as it shewethe welle at this tyme of what worship they have bene by here victorious ded (...)
- 90 « […] and alle ye other noble princes and other puissaunt lordes and nobles of divers astates olde (...)
- 91 R. Radulescu, The Gentry Context for Malory’s Morte Darthur, Woodbridge, DS Brewer, 2003, p. 100-1 (...)
24Les miroirs aux princes sont loin d’être les seules sources à témoigner de cet idéal de comportement. Édouard Ier est ainsi dépeint dans la Anonymous Short Chronicle of England, une compilation du xive siècle, comme un « vaillant chevalier86 ». De façon similaire, lorsque le chroniqueur monastique Thomas Walsingham raille dans sa chronique les chevaliers de la household de Richard II à propos de leur manque évident de virilité, en affirmant qu’ils étaient des chevaliers de Vénus plutôt que de Mars, il ajoute également que « ceux qui passaient leur temps autour du roi ne faisaient aucun effort pour lui inculquer les qualités convenant à un grand chevalier ; je ne parle pas seulement des talents guerriers, mais des qualités qui conviennent spécialement aux nobles rois en temps de paix, telles que la chasse et la fauconnerie, et des talents similaires à ceux-ci à travers lesquels l’honneur d’un roi est consolidé87 ». Cette conception guerrière et aristocratique de la royauté est tout aussi patente chez William Worcester et son argumentaire destiné à persuader Édouard IV de s’engager dans une expédition militaire en France88, puisqu’il l’encourageait à agir en suivant l’exemple prestigieux de ses prédécesseurs qui s’étaient couverts de worship (l’équivalent en moyen anglais du terme honneur) par leur courage et leurs victoires89. D’ailleurs, le discours de Worcester ne s’adressait pas seulement au monarque mais aussi à tous les « autres nobles princes et autres puissants lords et nobles de divers rangs », si bien qu’il plaçait le roi dans un schéma de valeurs comparable à l’ensemble du monde chevaleresque90. Les vertus attendues des souverains faisaient d’ailleurs écho à celles attribuées aux rois mythiques dans les œuvres prisées par les nobles et gentlemen. Dans le Morte Darthur de Sir Thomas Malory, le pouvoir du roi Arthur est ainsi justifié par ses capacités personnelles de chevalier, Arthur s’avérant digne de sa fonction royale tant par ses qualités de combattant que de good lord. Le good lordship avait donc largement tendance à se confondre avec le good kingship91.
- 92 « The sheriff is not so whole as he was [wrote Paston’s servants] for now he will show but a part (...)
- 93 Kaeuper, Guerre, justice et ordre public, p. 195-196.
- 94 Powell, « Law and Justice », p. 37.
25Plus concrètement, le lien étroit entre royauté et éthique aristocratique est corroboré par le fait que, même au xve siècle, des monarques étaient susceptibles d’intercéder au nom de leurs hommes avec les officiels locaux. En témoigne le soutien accordé par Henri VI à Robert Hungerford, Lord Moleyn, dans le cadre de la querelle qui l’opposait aux Paston au sujet de la possession du manoir de Gresham en 1451, le sheriff local ayant été à cette occasion exhorté par le roi à constituer un jury pour acquitter Moleyn92. Édouard II avait agi de façon similaire lorsqu’il avait institué des commissions Oyer et terminer complètement partiales contre l’ennemi juré de son favori Despenser, l’évêque de Coventry93. Il s’agit d’exemples classiques de pressions exercées dans le cadre de la féodalité bâtarde, sauf qu’en l’occurrence le lord qui exerçait de telles pressions était le roi lui-même. Ceci reflète la persistance du caractère personnel du gouvernement et le manque patent de tradition de service public par rapport au concept traditionnel de good lordship qui imprégnait l’autorité du roi94.
- 95 « […] unto hym bounteously and largely the pleintith of his good Lordship […] to th’entent that th (...)
- 96 M. H. Keen, The Laws of War in the Late Middle Ages, Londres, Routledge & K. Paul, 1965, p. 46-47.
- 97 R. F. Green, A Crisis of Truth, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2002, p. 230-232.
26Toujours dans la même perspective, il est significatif de remarquer, dans le contexte de la Guerre des Deux Roses, la manière avec laquelle les records officiels de la couronne faisaient référence à la volonté de réconciliation dont avait fait preuve Édouard IV au début des années 1460 en accordant son pardon au Duc de Somerset. Ils décrivent en effet l’événement en recourant au jargon féodal traditionnel empreint d’une éthique de réciprocité : le roi avait généreusement octroyé son good lordship en attendant, en retour, que le « noble honneur » du bénéficiaire le contraigne à une allégeance sans faille envers son souverain95. Dans un ordre d’idée comparable, il est frappant de noter l’attitude d’Henri V lorsque celui-ci avait fait mettre à mort le Français Jean d’Angennes en 1418, pour avoir négocié contre de l’argent la reddition de la ville de Cherbourg qu’il était chargé de défendre au nom du roi de France, Charles VI. Une fois que son sauf-conduit avait expiré, Angennes avait été capturé par les Anglais et jugé par Henri V qui l’avait condamné pour avoir trahi son souverain, c’est-à-dire son ennemi Charles VI96. Ce geste qui ne répondait à aucune nécessité puisque, selon le droit d’armes, Henri V n’avait nulle obligation de punir un homme pour une trahison commise contre son adversaire, est significatif du fait qu’un roi pouvait se sentir membre à part entière de la communauté de l’honneur chevaleresque : en agissant de la sorte, le souverain Lancastre avait montré son attachement à une éthique où la valeur phare demeurait la loyauté personnelle, avec pour implication qu’il partageait la détestation profonde de l’homme d’honneur envers le traître, le félon, quand bien même ce dernier aurait trahi son ennemi à son profit. De façon plus générale, Richard Firth Green a souligné le caractère atypique des relations unissant les souverains anglais et leurs plus grands sujets, marquées par l’usage courant de serments, alors que de telles pratiques étaient par ailleurs tombées en désuétude97.
- 98 A. King, « War and Peace : A Knight’s Tale. The Ethics of War in Sir Thomas Gray’s Scalacronica », (...)
- 99 « […] qi fe tenoit tout coy en pefe qi rien ne fe entremift de honour ne pruefce ». Scalacronica, (...)
- 100 « […] il fift tout qi tout ly defcounfailloit a cheualery, delitaunt foy en auarice et en delitz d (...)
- 101 « Thow arte a feyre mon, but thow arte falseeste of all men. Thou promised me and ensured me, swer (...)
- 102 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 136.
- 103 Green, A Crisis of Truth, p. 226-227.
- 104 « And there Kynge Henry brake his othe and grement made be twene hym and his trewe lordis, and so (...)
27Dans de telles conditions, puisque le roi était tributaire de ses capacités privées dans l’exercice de ses fonctions publiques, il pouvait très bien se couvrir de honte par sa lâcheté ou sa déloyauté. En témoigne la chronique de Sir Thomas Gray of Heaton (un chevalier du xive siècle, qui a rédigé la Scalacronica, une chronique en prose écrite en anglo-normand entre 1355 à 1359 alors qu’il était gardé prisonnier par les Écossais au château de Norham98), qui dénonçait vigoureusement l’inaptitude à régner d’Édouard II en considérant, à propos d’une trêve conclue par ce dernier, qu’il « n’entreprenait rien en matière d’honneur ou de prouesse99 ». Le chroniqueur affirmait aussi que le roi « faisait tout ce qui le rendait impropre à la chevalerie, se délectant en avarice et plaisirs sensuels », et qu’il bafouait tous ses devoirs de good lord suprême en protégeant éhontément ses favoris et en déshéritant ses opposants100. Le roi pouvait également être dénoncé comme traître à ses engagements. L’un des chroniqueurs de l’English Chronicle se montrait ainsi acerbe envers Richard II en rapportant les paroles attribuées à l’archevêque Thomas Arundel : ce dernier s’indignait quant au fait que le souverain avait trahi sa parole, notamment parce qu’il avait nommé quelqu’un d’autre archevêque de Canterbury alors que la possession de ce titre lui avait été garantie101. De façon similaire, les opposants à Richard II avaient tenté de justifier sa déposition en le présentant comme un traître ayant bafoué ses devoirs envers ses fidèles serviteurs102, comme l’illustrent les articles de sa déposition qui insistent sur le fait que le roi avait perfidement mis à mort le Duc de Gloucester : l’article trente-deux affirme qu’il s’était solennellement engagé, en présence de nombreux témoins et sur le saint sacrement placé sur l’autel de Langley, à pardonner Gloucester pour ses offenses, et qu’il n’avait pourtant pas hésité à se parjurer par la suite en le mettant odieusement à mort103. Un chroniqueur anonyme manifestement pro-yorkiste du xve siècle développe un point de vue similaire à propos d’Henri VI, puisqu’il considérait que le roi, à la suite de la mort de Richard d’York, avait agi comme un traître et un parjure en bafouant la confiance de « trewe lordis » comme Norfolk et Warwick104.
- 105 Horrox, « England : Kingship and the Political Community », p. 232.
- 106 R. R. Davies, B. Smith, Lords and Lordship in the British Isles in the Late Middle Ages, Oxford, O (...)
- 107 Ibid., p. 4.
28De telles condamnations impliquent clairement que le lien qui unissait le roi à ses sujets aristocratiques était soumis à de fortes attentes de service réciproque et reposait donc sur un lien personnel et contractuel. Cette réalité pouvait naturellement fragiliser, le cas échéant, la royauté. Cependant, elle pouvait également la renforcer lorsqu’un dirigeant se montrait à la hauteur des attentes qui pesaient sur lui. En effet, le poids de l’éthique chevaleresque ne constituait pas nécessairement une faiblesse pour le roi car, dès lors que celui-ci remplissait sa part du marché, il bénéficiait alors de la meilleure garantie de service fidèle qui soit, l’honneur105. C’était d’autant plus vrai que la position du roi au centre de la toile de redistribution du patronage avait pour conséquence qu’il canalisait largement à son profit les liens d’allégeance et de fidélité. On peut même dire que le principe de loyauté envers la monarchie constituait un élément de plus en plus structurant des représentations de l’aristocratie tout au long de la période, s’amalgamant peu à peu avec le vieux code d’honneur de l’aristocratie féodale106, à tel point que l’on peut parler d’« une aristocratie centrée sur la royauté107 ».
- 108 Gransden, Historical Writing in England, p. 312.
- 109 John Rous, Pageant of the Birth, Life and Death of Richard Beauchamp, Earl of Warwick, K. G., 1389 (...)
- 110 Ibid., p. 76.
- 111 Ibid. p. 93.
- 112 Ibid., p. 86-88.
- 113 Ibid., p. 73.
- 114 Pilbrow, « The Knights of the Bath », p. 214-215.
- 115 Gransden, Historical Writing in England, p. 312.
- 116 N. Saul, For Honour and Fame : Chivalry in England, 1066-1500, Londres, Random House, 2011, p. 279
29En témoigne le Pageant of the Birth, Life and Death of Richard Beauchamp Earl of Warwick, une œuvre composée vers 1485-1490, qui narre la vie de Richard Beauchamp, Comte de Warwick, grand combattant et diplomate de la première moitié du xve siècle, puisqu’elle met en lumière le lien étroit entre honneur chevaleresque et service royal. Dans cette œuvre, qui représente les grands moments de la vie du Comte sous la forme de cinquante-trois dessins agrémentés de brèves légendes108, Warwick est tout à la fois célébré comme un chevalier de grande valeur, réputé pour sa courtoisie et ses prouesses guerrières qui lui ont permis de remporter « greet honour & worship », et comme un grand serviteur de la couronne. Un certain nombre d’illustrations dépeignent ainsi le magnat comme un serviteur dévoué de la monarchie, notamment dans une scène représentant Henri V couronné, assisté de son porteur d’épée et d’un autre seigneur, avec devant lui le Comte Richard accompagné de sa retenue, qui s’agenouille pour recevoir les lettres patentes le désignant comme capitaine de Calais109. Le Pageant met aussi l’accent sur la volonté délibérée de Beauchamp de s’affirmer comme le noble le plus proche du monarque, à l’image du commentaire et de l’illustration consacrés au siège de Rouen, où il est précisé que le Comte avait choisi de placer sa tente aux côtés de celle de son souverain et où Beauchamp est représenté une nouvelle fois agenouillé devant Henri V110. Cette volonté de magnifier la loyauté de Richard Beauchamp envers son seigneur royal est encore plus évidente dans l’illustration et le commentaire réservés au couronnement d’Henri VI à Paris en tant que roi de France : il y est mentionné que le Comte avait été chargé de l’éducation du jeune souverain et qu’une recluse avait eu une révélation divine selon laquelle aucun autre seigneur ne serait plus digne que lui pour remplir cette tâche, une révélation qui faisait d’ailleurs référence à sa loyauté sans pareille envers la couronne111. Il n’est d’ailleurs question dans le Pageant ni du propre mariage de Beauchamp, ni des naissances d’aucun de ses enfants, mais du mariage d’Henri V et de la naissance d’Henri VI. Une illustration entière est même totalement consacrée au mariage entre Henri V et Catherine de France ainsi qu’à la naissance d’Henri VI112. Les célébrations du grand aristocrate en tant que serviteur fidèle de la couronne et comme guerrier d’exception se fondent parfois ensemble. Ainsi, la représentation consacrée au siège de Caen dépeint le magnat dressant sur les murs de la cité assiégée la bannière du roi, dans la mesure où il servait alors sous les ordres du Duc de Clarence, le frère d’Henri V113. Il est donc clair que l’œuvre est imprégnée par l’idée que le service royal était non seulement digne d’être exalté, mais qu’il n’était nullement perçu comme s’opposant à la conquête de l’honneur dans la plus pure tradition chevaleresque. Il était même conçu comme le meilleur moyen pour y accéder114. Le Pageant of the Birth, Life and Death of Richard Beauchamp Earl of Warwick constitue une œuvre d’autant plus significative qu’elle a probablement été composée à l’initiative de la fille de Richard Beauchamp, Anne Neville, Comtesse de Warwick et épouse de Richard Neville115. Elle s’était en effet assignée la tâche, durant les dernières années de sa vie, de chérir et de protéger la mémoire de son père en commissionnant le Pageant116. Par conséquent, cette œuvre exprimait le point de vue d’une famille de la haute noblesse de la fin du xve siècle, avec pour implication évidente que l’importance indéniable accordée aux valeurs aristocratiques traditionnelles se combinait étroitement dans l’esprit des nobles avec le principe fondamental d’allégeance à la couronne.
- 117 J. T. Rosenthal, Nobles and the Noble Life, 1295-1500, Allen and Unwin, 1976, p. 42.
- 118 Kaeuper, Guerre, justice et ordre public, p. 192.
- 119 N. Saul, The Three Richards, Londres, Bloomsbury Academic, 2005, p. 94.
30En conclusion, comme le souligne Joël Rosenthal, le roi était bien un membre de l’aristocratie, partageant un ensemble de valeurs communes avec toute la communauté chevaleresque117, si bien que la pensée politique des souverains pouvait s’apparenter dans une large mesure à « un spectacle grave d’honneur et de vertu… un noble jeu aux règles édifiantes et héroïques118 ». Nigel Saul va même jusqu’à affirmer que, par opposition à une monarchie française qui se définissait d’abord par son caractère sacré, la monarchie anglaise se définissait avant tout par son caractère chevaleresque119.
Devoirs honorables et responsabilités publiques
- 120 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 17.
- 121 C. Fletcher, « De la communauté du royaume au common weal : les requêtes anglaises et leurs straté (...)
- 122 C. Fletcher, « La communauté anglaise face à l’étranger : la loi de marque, le bien commun et la d (...)
- 123 Fletcher, « De la communauté du royaume au common weal », p. 359-372.
- 124 J. Watts, « “Les communes” : le sens changeant d’un mot au cours du xve siècle », La sociedad poli (...)
- 125 P. Withington, Society in Early Modern England, Cambridge, Polity, 2010, p. 140.
- 126 Harriss, « Political Society and the Growth of Government », p. 53-57.
31Le poids indéniable de l’éthique aristocratique ne signifie pas pour autant que le pouvoir du souverain n’avait pas de réelle dimension publique. Au contraire, le caractère public de l’autorité royale tendait indubitablement à émerger puisque l’Angleterre de la fin du Moyen Âge se caractérisait par une idéologie d’État précoce où le roi s’affirmait comme la tête d’une communauté politique fondée sur l’application universelle de la loi et de la justice, avec le droit de demander un soutien militaire et financier de la part de tous ses sujets120. Il faut particulièrement souligner à cet égard le rôle joué par le Parlement. En effet, même si la composition de cette institution n’était nullement représentative de la société, elle était de plus en plus perçue, de fait, comme porteuse d’une véritable exigence de représentation au service du bien commun121. Ce phénomène peut notamment s’expliquer par le fait qu’à partir des années 1340, au plus tard, les communes ont acquis le droit de présenter au cours de chaque Parlement une « requête commune », qui contenait toutes les requêtes ou doléances concernant le bien de tous122 (selon Christopher Fletcher, de telles requêtes impliquaient explicitement toutes les classes sociales, si bien que la formule laconique et récurrente « pour commun profit » dépassait « une manifestation ponctuelle d’intérêt mutuel123 »). De plus, le statut social des membres des communes du Parlement demeurait suffisamment indéfini pour qu’ils puissent apparaître, au moins symboliquement, comme l’incarnation d’une part notable de la société124. En conséquence, puisque des personnes qui relevaient d’un large spectre social se sentaient intégrées à une communauté imaginée légitimant l’action du souverain, la conscience politique ne se limitait pas au seul lien d’allégeance envers la personne royale, mais incluait aussi le sentiment d’appartenance à une communauté politique qui intégrait potentiellement toute la société. Ce phénomène se traduisait par l’usage de plus en plus répandu d’une série de concepts (communauté du royaume, communitas, common et commons, ou encore, de manière plus courante durant notre période, la notion de common weal125) qui exprimaient l’idée d’une communauté politique dépassant le simple agrégat d’intérêts et de groupes composant la société126.
- 127 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 105 ; Fletcher, « La communauté anglaise face à l’étranger (...)
- 128 I. M. W. Harvey, Jack Cade’s Rebellion, Oxford, Clarendon Press, 1991, p. 186-191.
- 129 Keen, English Society in the Later Middle Ages, p. 158-159.
- 130 M. H. Keen, England in the Later Middle Ages : A Political History, Londres, Routledge, 2003, p. 3 (...)
- 131 Watts, « “Les communes” », p. 205.
32Le sentiment d’appartenance à une communauté politique était si fortement enraciné que les rebelles de certaines insurrections populaires, à l’instar de la révolte des paysans de 1381, se présentaient comme agissant au nom du bien commun (les émeutiers s’étaient dépeints comme les « trew communes » ou encore comme les « loyals comunes d’Angleterre127 »). De même, durant la révolte de Jack Cade en 1451, les rebelles du Kent avaient défendu la légitimité de leur marche sur Londres au nom du common weal et en se désignant comme les « trew lege menne » qui agissaient au nom de « alle the comynealte of Ynglond128 ». À un plus haut niveau, le discours propagandiste de certaines factions politiques pouvait délibérément mettre l’accent sur de tels concepts pour séduire les esprits, ce qui suggère que les esprits en question étaient déjà, au préalable, réceptifs aux messages diffusés. La propagande yorkiste a ainsi cherché à exploiter le sentiment de désarroi et de honte provoqué par la défaite en France, à l’exemple du manifeste diffusé par le Duc Richard d’York en 1452, pour défendre sa cause au nom de l’honneur national blessé129. Le Duc d’York était en effet bien conscient de la force politique qu’il pouvait retirer en se présentant comme le défenseur de l’intérêt collectif130. D’ailleurs, selon John Watts, la politique yorkiste durant les années 1450-1470 était presque une politique de bien commun qui se préoccupait de tous les membres de la communitas, les puissants comme les humbles131.
- 132 Hicks, Richard III and His Rivals, p. 47-49.
33Dans le même ordre d’idée, il est frappant de constater que l’exaltation des valeurs chevaleresques chez les nobles et gentlemen était susceptible d’aller de pair avec des appels au bien commun, comme l’illustre la guerre privée qui avait opposé Lord Bonville et le Comte du Devon. Les lettres de défi échangées par les deux hommes mélangeaient le discours chevaleresque traditionnel et ses appels à l’honneur, à la loyauté et à la vaillance, avec l’impératif de défense du common weal. Ainsi Bonville avait recouru dans la lettre de défi qu’il avait adressée à son rival en 1455, non seulement à des provocations invoquant, sans surprise, la lâcheté et la trahison de son adversaire, mais également la nuisance qu’il représentait pour le « commune wele ». Outre le fait d’affirmer sa supériorité en tant que chevalier loyal, Bonville se présentait aussi comme le champion du bien commun s’apprêtant à donner une correction justifiée au Comte du Devon, dépeint comme un fauteur de troubles et un persécuteur des bons sujets du roi. Un tel argumentaire est d’autant plus digne d’intérêt qu’il ne semble pas constituer un simple procédé rhétorique, puisque Bonville usait de tous les arguments possibles pour provoquer son adversaire et le contraindre à accepter son défi, compte tenu du fait que ce dernier était alors en position de force et n’avait donc guère intérêt à se lancer dans cette aventure périlleuse. Devon lui avait d’ailleurs répondu à son tour en utilisant des provocations similaires132.
- 133 Watts, « “Les communes” », p. 209-216.
- 134 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 102.
- 135 B. Tierney, Religion, Law and the Growth of Constitutional Thought, Cambridge, Cambridge Universit (...)
- 136 Harriss, Shaping the Nation, p. 10.
- 137 « This Reume in Thoccian of propur kynde / Withoute wynde hath his commotioun, / The maryner thero (...)
- 138 « Also it is the king’s honour and also his office to make his realm rich », « and it is his disho (...)
- 139 Q. Skinner, The Foundations of Modern Political Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 19 (...)
- 140 Horrox, « England : Kingship and the Political Community », p. 225.
34Dans ces conditions, les conclusions de John Watts qui évoquent une « communauté de masse » en émergence à la fin du Moyen Âge133, ou encore celles de Jean-Philippe Genet qui postule l’existence potentielle d’une « société civique134 », apparaissent tout à fait crédibles. Le royaume dans son entier se ressentait probablement dans une certaine mesure comme une unité politique, avec pour corollaire naturel l’affirmation du caractère public de l’autorité royale135. Le poète John Gower se fait l’écho de cette dimension lorsqu’il insiste sur la nécessité pour tous les membres du corps politique de jouer leurs rôles au nom de l’intérêt commun, tandis qu’il incombe au roi, à l’instar de David, le harpiste suprême, d’harmoniser leurs efforts pour le bien commun136. Dans le même esprit, la traduction remaniée de l’œuvre de Végèce, Knyghthode and bataile, composée dans une perspective pro-Lancastre dans les années 1460, use de la métaphore du timonier conduisant à bon port son navire, y compris dans la tempête, pour l’assimiler au bon souverain dont l’honneur est présenté comme explicitement lié à son service envers le royaume : c’est seulement parce que le dirigeant sait comment protéger son équipage qu’il gagne « grete honour ». D’ailleurs, un vaisseau offre une analogie idéale pour une communauté politique : dans cet espace très resserré, même le plus humble se doit de contribuer au « salus » commun, tandis qu’un tyran égoïste ferait sombrer l’ensemble dans la mer137. Sir John Fortescue faisait pareillement de la capacité du roi à agir au nom de son royaume une condition essentielle de son honneur138. Il ne faut pourtant pas s’y tromper : le roi était clairement la figure centrale et personne ne songeait à remettre en cause ce principe, mais il était néanmoins jugé sur sa capacité à œuvrer au nom de la communauté du royaume. On peut certainement voir dans ce phénomène les prémices de l’émergence d’une « idéologie d’État moderne », c’est-à-dire, comme le souligne Quentin Skinner, d’une forme de pouvoir public abstrait distinct du prince et de ses sujets139. De ce fait, le roi n’était pas seulement le good lord de tous les good lords, mais également l’incarnation d’une communauté politique élargie140, qui trouvait notamment son expression dans le concept abstrait de la couronne (qui symbolisait les attaches étroites liant le roi, le royaume et l’intérêt commun).
- 141 A. J. Slavin, « The Tudor State, Reformation and Understanding Change : Through the Looking Glass (...)
- 142 Kendall, Lordship and Literature, p. 28-29.
- 143 Genet, Les îles Britanniques au Moyen Âge, p. 243.
- 144 M. T. Clanchy, « Law, Government, and Society in Medieval England », History, 59, 1974, p. 73-78.
- 145 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 45.
35Cependant, même si l’on peut sans doute parler de l’émergence d’une « société civique » résultant d’un dialogue institutionnel, agir au nom de l’intérêt public ne pouvait pas encore avoir le caractère impersonnel propre aux États modernes : il n’était nullement question dans l’Angleterre de la fin du Moyen Âge d’un principe de souveraineté conçu comme un ordre constitutionnel rationnel, légal et impersonnel, dont les agents ou les institutions possédaient le pouvoir incontesté de contrôler un territoire donné141. Pour toutes les raisons que nous avons déjà soulignées, le pouvoir royal devait toujours s’accommoder des réalités d’une société inégalitaire, caractérisée par l’importance fondamentale des relations à caractère personnel, en s’appuyant, directement ou indirectement, sur les ressources privées d’hommes à son service142. Seule une fraction de l’autorité administrative et judiciaire reposait ainsi sur un gouvernement central. Pour l’écrasante majorité de la population, cette autorité était exercée, déléguée, appropriée par des individus ou corporations disposant d’une autorité propre avec lesquels le roi se devait de composer. Comme le souligne Jean Philippe Genet, « la société politique de la fin du Moyen Âge n’est pas une société de citoyens égaux, mais une société dominée par une aristocratie structurée par le bastard feudalism143 ». Cette réalité avait une double conséquence. D’une part, la couronne devait veiller à ne pas s’immiscer trop ouvertement dans les mécanismes régulateurs traditionnels de la société, en laissant les élites locales défendre leurs intérêts selon leurs propres valeurs devant les cours de loi ou dans leurs fonctions d’officiers locaux (d’une certaine façon, la logique de représentation a probablement accru le phénomène : puisque le roi gouvernait au nom de la société, il était normal qu’il en respecte les valeurs). D’autre part, ceci impliquait également qu’un monarque ne pouvait pas faire l’impasse sur ses relations personnelles directes avec les membres des classes terriennes, en particulier de la noblesse, qui constituaient la chair et les os de son propre pouvoir. Michael Clanchy invite en conséquence à ne pas négliger l’importance des « King’s Friends » dans le fonctionnement du système politique144, ce qui explique la place cruciale accordée aux vertus personnelles dans les théories du pouvoir (là encore, le devoir de représentativité du souverain a peut-être aussi favorisé le phénomène, puisque cela impliquait que le roi tirait sa légitimité d’une société politique qui existait indépendamment de sa propre personne : le corps public du roi et son corps privé demeuraient dissociés, si bien que le roi ne pouvait pas prétendre à une obéissance inconditionnelle en tant qu’incarnation du corps politique, et se devait donc de démontrer ses qualités personnelles pour exiger la loyauté de ses sujets145).
- 146 J. Watts, « Usurpation in England. A Paradox of State-Growth », Coups d’État à la fin du Moyen Âge (...)
- 147 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 6 et 17.
- 148 Keen, England in the Later Middle Ages, p. 361.
- 149 F. M. Wright, Henry of Bolingbroke and the Revolution of 1399, Cornell University, 1949, p. 25-30.
36Dans un tel contexte, la poursuite d’une politique publique ne pouvait que passer par des canaux privés, puisque c’était le seul moyen pour les rois d’être aptes à incarner la communitas. De ce fait, le pouvoir royal était fondamentalement un pouvoir de nature privée aux implications publiques, les dispositions privées du roi déterminant sa capacité à représenter la communauté du royaume, sa persona publica découlant largement de sa persona privata. Il n’est dès lors guère surprenant de constater que les écrivains des traités politiques comme ceux des miroirs aux princes s’attachaient tant à exalter les vertus honorables et chevaleresques attendues des souverains, puisque tout l’édifice politique reposait sur la valeur personnelle du monarque146. Pour autant, les exigences honorables qui pesaient sur la personne du roi n’en devaient pas moins être placées en adéquation avec un plus large devoir de représentativité. Dans ces conditions, l’une des difficultés majeures auxquelles faisaient face les rois était de concilier leurs différentes sphères d’action : bien que la force du souverain fût d’abord d’essence privée, en tant que garant de la loi, source de la justice et représentant de la communauté du royaume, il se devait néanmoins d’œuvrer au nom d’un intérêt général qui dépassait largement ses propres attaches personnelles147. Le contrôle de la cour et le patronage royal n’étaient en effet jamais suffisants pour assurer une autorité incontestée148, si bien que les logiques de patronage, de clientèle, de lordship et d’honneur prenaient largement sens pour agir au nom d’une communauté politique élargie. C’est d’ailleurs justement en raison de telles attentes « publiques » pesant sur le souverain que son incapacité à les satisfaire pouvait s’avérer si problématique et dégénérer en de graves crises politiques149. En conséquence, les monarques étaient contraints de se livrer à un délicat jeu d’équilibriste pour répondre aux attentes complexes, parfois contradictoires, pesant sur eux, en veillant tout à la fois sur leurs relations personnelles et immédiates avec leurs serviteurs, ministres et partenaires de l’aristocratie, ainsi que sur leur devoir d’apparaître comme les défenseurs de l’intérêt plus général de la communitas.
- 150 S. Walker, « Richard II’s Views on Kingship », Rulers and Ruled in Late Medieval England : Essays (...)
- 151 Watts, « Usurpation in England. A Paradox of State-Growth », p. 119, 120 et 130.
37Cette double exigence de représentativité et de comportement honorable constituait d’ailleurs la grande fragilité du système politique anglais : puisqu’il existait un lien causal entre les espaces les plus intimes de gouvernement et le fonctionnement de la politique à l’échelle du royaume, toute défaillance personnelle d’un roi était porteuse d’un grave risque de disjonction entre la personne du souverain et l’intérêt public. Un souverain comme Richard II a ainsi fait les frais de cette réalité, car son comportement choquant aux yeux des contemporains, sa manière de procéder, son acharnement à poursuivre ses ennemis personnels, sa propension à bafouer sa parole, ont eu pour conséquence qu’il avait en quelque sorte brisé le pacte implicite qui l’unissait à ses sujets150. Durant les crises politiques, le véritable problème n’était pas en effet celui du pouvoir monarchique en lui-même, que personne n’avait intérêt ni ne songeait à remettre en cause, mais la possible accession au trône d’un monarque au comportement inadéquat (John Watts a d’ailleurs souligné que les nombreuses usurpations de la période soulignaient paradoxalement l’importance croissante de la royauté : la solution qui aurait consisté à diminuer le pouvoir royal aurait été inacceptable, car le système requérait obligatoirement un roi compétent à la capacité d’initiative sans entraves, en mesure de garantir la stabilité de la société politique et d’agir au nom du bien commun, d’où le recours au renversement pour préserver les prérogatives royales tout en résolvant le problème d’un souverain « incapable151 »).
- 152 « Tout enfi eft il dun nacioun qe dun corage mettount la mayn a maintener leftat lour siris qi ne (...)
- 153 McFarlane, The Nobility of Later Medieval England, p. 120-121.
38Il est significatif de constater à ce propos que même un chroniqueur aristocratique du xive siècle comme Sir Thomas Gray, qui ne manquait pourtant pas de dénoncer la faillite d’Édouard II par rapport aux idéaux de comportement chevaleresque, était néanmoins très clair quant au rôle déterminant de la royauté et au devoir d’obéissance des sujets à son égard. En effet, à la suite de la déposition d’Édouard II, s’interrogeant sur la propension des Anglais à la révolte, Thomas Gray soulignait que pour être forte une « nation » doit être guidée par un seul esprit « pour préserver la dignité de ses seigneurs », à l’image de l’eau, l’élément le plus puissant qui soit car tous ses composants convergent dans le même sens. Il considérait dès lors que les désirs individuels se devaient d’être subordonnés au bien-être de la communauté, dont l’intérêt s’exprime dans la dignité et le pouvoir incontesté du monarque. Il affirmait même que les États qui correspondent le plus à un tel principe de fonctionnement sont les moins susceptibles de voir se produire des révolutions ou des usurpations, qui constituent « le plus grand déshonneur pour le peuple152 ». Cette dénonciation de la faillite personnelle du roi, assortie d’un éloge du pouvoir royal, semble symptomatique de la nature du système politique anglais, fondé sur une étroite imbrication de principes « féodaux » et « modernes ». C’est sans doute pour cette raison que tant d’historiens, tel Bruce McFarlane, se sont focalisés sur les qualités personnelles des rois comme facteurs déterminants des crises politiques153, en négligeant les enjeux se cachant derrière les questions de vertu et d’honneur. Pourtant, si le comportement jugé indigne d’un monarque constituait bien souvent le déclencheur des crises politiques, celles-ci étaient d’abord graves parce qu’elles mettaient beaucoup plus en jeu. Il s’agit là de la faiblesse majeure d’un système où les logiques privées et publiques étaient intimement imbriquées. Toutefois, en dépit de cette fragilité intrinsèque propre à l’édifice politique, un roi qui parvenait à veiller sur son good name tout en gouvernant au nom de l’intérêt commun, disposait alors non seulement de lords fidèles prêts à le soutenir, mais aussi de l’appui d’une communitas entière, lui permettant de brandir un formidable pouvoir.
39En fin de compte, le système politique de l’Angleterre de la fin du Moyen Âge ne constituait ni un simple agrégat d’intérêts privés, ni un État public moderne, mais un ensemble complexe, fondé sur une subtile alchimie entre différents éléments dont le pouvoir royal est l’exemple le plus significatif. C’est tout le paradoxe d’un État caractérisé par une structure institutionnellement très développée pour la période, impliquant notamment la participation d’une véritable communauté politique élargie, mais qui n’en était pas moins profondément marqué par des logiques personnelles de clientèle, de patronage, de lordship, de loyauté et d’honneur. Il s’agit du résultat logique du caractère consensuel, participatif et représentatif d’un régime dans lequel l’autorité publique était diffusée à travers la société. Ce phénomène facilitait d’un côté la pénétration des standards étatiques et l’affirmation des structures institutionnelles, parce que ces éléments étaient fondamentalement acceptés et non subis. Mais ce principe de fonctionnement impliquait aussi une nécessaire mise en adéquation des structures politiques avec les réalités sociales de l’époque : dans un système basé sur une coopération vitale entre le roi et les élites de la société, où l’autorité publique n’était pas suffisamment conceptualisée pour garantir l’exercice d’un pouvoir incarné dans des institutions impersonnelles, les acteurs des structures politiques, y compris le roi, devaient obligatoirement composer avec les modes de régulation traditionnels dont ils demeuraient tributaires afin de garantir leurs positions et leurs capacités d’action.
Notes
1 D. J. D. Boulton, The Knights of the Crown : The Monarchical Orders of Knighthood in Later Medieval Europe, 1325-1520, Woodbridge, Boydell Press, 1987, p. 2.
2 W. Ullmann, The Individual and Society in the Middle Ages, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1966, p. 66-67.
3 G. Harriss, Shaping the Nation : England 1360-1461, Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 5-6.
4 Voir P. Lewis, « France in the Fifteenth Century : Society and Sovereignty », Europe in the Late Middle Ages, éd. J. R. Hale, J. R. L. Highfield et B. Smalley, Evanston, Northwestern University Press, 1965, p. 276-300, ici p. 279.
5 A. Demurger, Temps de crises, temps d’espoirs, xive-xve siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1990, p. 155-164.
6 C. Gauvard, “De Grace especial”. Crime, état et société en France à la fin du Moyen Age, Paris, Publications de la Sorbonne, 1991, p. 749, 751-752.
7 Harriss, Shaping the Nation, p. 5-6.
8 M. A. Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, Londres, Routledge, 2002, p. 26.
9 Ph. Contamine, Charles VII : Une vie, une politique, Paris, Perrin, 2017, p. 425.
10 P. Lewis, « Reflections on the Role of Royal Clientèles in the Construction of the French Monarchy (mid- xivth / end-xvth centuries) », L’État ou le roi : les fondations de la modernité monarchique en France ( xive-xviie siècles), éd. N. Bulst, R. Descimon et A. Guerreau, Paris, Maison des sciences de l’homme, 1996, p. 51-67 ; G. Prosser, « “Decayed Feudalism” and “Royal Clienteles” : Royal Office and Magnate Service in the Fifteenth Century », War, Government and Power in Late Medieval France, éd. C. Allmand, Liverpool, Liverpool University Press, 2000, p. 175-189.
11 A. Demurger, « Guerre civile et changements du personnel administratif dans le royaume de France de 1400 à 1418 : l’exemple des baillis et des sénéchaux », Francia, 6, 1978, p. 151-225, ici p. 202.
12 N. Grévy-Pons, « Propagande et sentiment national pendant le règne de Charles VI : l’exemple de Jean de Montreuil », Francia - Forschungen zur westeuropäischen Geschichte, vol. 8, 1980, p. 127-146, ici p. 134.
13 A. Bossuat, « La formule “Le roi est empereur en son royaume”. Son emploi au xve siècle devant le Parlement de Paris », Revue historique de droit français et étranger, série 4, 39, 1961, p. 371-381, ici p. 380 ; S. M. Babbitt, Oresme’s Livre de Politiques and the France of Charles V, American Philosophical Society, 1985, p. 40-41.
14 Ph. Contamine, « Noblesse française, nobility et gentry anglaises à la fin du Moyen Âge. Une comparaison », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes, 13, 2006, p. 105-131, ici p. 128.
15 H. Kim, The Knight Without the Sword : A Social Landscape of Malorian Chivalry, Cambridge, D. S. Brewer, 2000, p. 8.
16 J.-Ph. Genet, La genèse de l’État moderne : culture et société politique en Angleterre, Paris, Presses universitaires de France, 2003, p. 3.
17 S. L. Waugh, « England : Kingship and the Political Community, 1272-1377 », A Companion to Britain in the Later Middle Ages, éd. S. H. Rigby, Oxford, Blackwell, 2003, p. 208-223, ici p. 208.
18 G. Harriss, « Political Society and the Growth of Government in Late Medieval England », Past and Present, 138, 1993, p. 28-57, ici p. 47-51.
19 F. Pilbrow, « The Knights of the Bath : Dubbing to Knighthood in Lancastrian and Yorkist England », Heraldry, Pageantry and Social Display in Medieval England, éd. P. R. Coss et M. H. Keen, Woodbridge, Boydell Press, 2002, p. 195-218, ici p. 215.
20 R. A. Griffiths, The Reign of King Henry VI : The Exercise of Royal Authority, 1422-1461, Berkeley et Los Angeles, University of California Press, 1981, p. 574-575 ; J. A. Wagner, Encyclopedia of the Wars of the Roses, Oxford, ABC CLIO, 2001, p. 69.
21 J. Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 79 et 99.
22 J.-Ph. Genet, Les îles Britanniques au Moyen Âge, Paris, Hachette, 2005, p. 237.
23 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 12.
24 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 187.
25 Harriss, « Political Society and the Growth of Government », p. 30-33.
26 H. Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster : Public Authority and Private Power, 1399-1461, Oxford, Oxford University Press, 2000, p. 5.
27 B. P. Wolffe, The Royal Demesne in English History, Londres, Allen and Unwin, 1971, p. 34, 38-40, 52-58, 65, 72-73 ; G. Harriss, King, Parliament, and Public Finance, Oxford, Clarendon Press, 1975, p. 149-150, 156-159 ; J. R. Studd, « The Lord Edward and King Henry III », Bulletin of the Institute of Historical Research, 60, 1977, p. 4-19, ici p. 4-5.
28 E. Powell, « Law and Justice », Fifteenth-Century Attitudes : Perceptions of Society in Late Medieval England, éd. R. Horrox, Cambridge, CUP Archive, 1997, p. 29-41, ici p. 36 ; P. Maddern, « Gentility », Gentry Culture in Late Medieval England, éd. R. Radulescu, A. Truelove, Manchester, Manchester University Press, 2005, p. 18-34, ici p. 31.
29 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 9.
30 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 41.
31 A. Gransden, Historical Writing in England : c. 1307 to the Early Sixteenth Century, Londres, Routledge, 1998, p. 36.
32 É. Bournazel, Le gouvernement capétien au xiie siècle (1108-1180). Structures sociales et mutations institutionnelles, Paris, PUF, 1975, p. 74 et 91.
33 T. K. Keefe, Feudal Assesments and the Political Community under Henry II and his Sons, Berkeley, 1983, p. 93-96, 110-112.
34 M. Aurell, L’empire des Plantagenêt (1154-1224), Paris, Perrin, 2004, p. 64.
35 Même si cette division n’excluait naturellement pas les interactions, elle a probablement constitué une entrave à la coopération jusqu’à la fin du Moyen Âge, les grands princes territoriaux étant plus désireux de s’émanciper du pouvoir royal que de peser sur le centre du gouvernement. Voir Contamine, « Noblesse française, nobility et gentry anglaises à la fin du Moyen Âge », p. 127.
36 N. Elias, La dynamique de l’Occident, Paris, Pocket, 2003, p. 20-22.
37 C. Given-Wilson, « The King and the Gentry in Fourteenth-Century England », Transactions of the Royal Historical Society, 5th series, 37, 1987, p. 87-102, ici p. 99.
38 R. Horrox, « England : Kingship and the Political Community, 1377-c. 1500 », A Companion to Britain in the Later Middle Ages, éd. S. H. Rigby, Oxford, Blackwell, 2003, p. 224-241, ici p. 225.
39 Ibid., p. 238-239.
40 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 95.
41 C. Given-Wilson, The Royal Household and the King’s Affinity : Service, Politics and Finance in England 1360-1413, Londres, Yale University Press, 1986, p. 264-265 ; D. Starkey, « The Age of the Household : Politics, Society and the Arts », The Context of English Literature : The Later Middle Ages, éd. S. Medcalf, New-York, Holmes and Meier, 1981, p. 225-290, ici p. 268-271 et 273-274.
42 J. A. Tuck, Richard II and the English Nobility, Londres, St. Martin’s Press, 1973, p. 180 et 193-194 ; N. Saul, Richard II, Londres, Yale University Press, 1997, p. 265-268 et 444-445 ; P. Fleming, « Politics », Gentry Culture in Late Medieval England, p. 50-62, ici p. 56.
43 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 20.
44 C. Carpenter, Locality and Polity : A Study of Warwickshire Landed Society, 1401-1499, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, p. 393 et 628.
45 C. Beaune, « Chapitre vii. Cérémoniaux et politique », Les monarchies, Paris, Presses Universitaires de France, 1997, p. 205-223, ici p. 206.
46 M. H. Keen, « Chivalry and English Kingship in the Later Middle Ages », War, Government and Aristocracy in the British Isles, c. 1150-1500 : Essays in Honour of Michael Prestwich, éd. C. Given-Wilson, A. J. Kettle et L. Scales, Woodbridge, Boydell Press, 2008, p. 250-266, ici p. 260-261.
47 D. Green, The Hundred Years War : A People’s History, New Haven et Londres, Yale University Press, 2014, p. 112.
48 Aurell, L’empire des Plantagenêt, p. 135-136.
49 N. M. Fryde, Why Magna Carta ? Angevin England Revisited, Hamborg, 2001, p. 53.
50 A. Boureau, Le simple corps du roi. L’impossible sacralité des souverains français, xve-xviiie siècle, Paris, éd. De Paris, 1988, p. 24-42.
51 A. Boureau, « Un obstacle à la sacralité royale en Occident. Le principe hiérarchique », La royauté sacrée dans le monde chrétien, éd. A. Boureau et C. S. Ingerflom, Paris, Éditions de l’EHESS, 1992, p. 29-37.
52 A. Guéry, « Le roi est Dieu, le roi et Dieu », L’État ou le roi. Les fondations de la modernité monarchique ( xive-xviie siècles), p. 27-47, ici p. 28.
53 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 76.
54 R. Telliez, Les institutions de la France médiévale : xie-xve siècle, Paris, Armand Colin, 2016, Chap. 2.2 « Du suzerain au souverain ».
55 É. Bournazel, « Réflexions sur l’institution du conseil aux premiers temps capétiens (xiie-xiiie siècles), Cahiers de recherches médiévales, 7, 2000, consultable sur le site des CRMH.
56 Contamine, Charles VII, p. 445-446.
57 J.-Ph. Genet, « La France est-elle née dans la guerre ? », L’Histoire, 380, 2012, p. 76-80, ici p. 80.
58 C. Allmand, La Guerre de Cents Ans, Paris, Points, 2013, p. 175-176.
59 J. H. Burns, « Fortescue and the Political Theory of Dominium », Historical Journal, 28, 1985, p. 777-797.
60 E. Kendall, Lordship and Literature : John Gower and the Politics of the Great Household, Oxford, Clarendon Press, 2008, p. 29.
61 Green, The Hundred Years War, p. 113.
62 R. W. Kaeuper, Guerre, justice et ordre public : l’Angleterre et la France à la fin du Moyen Âge, Paris, Aubier, 1994, p. 192.
63 M. Vale, War and Chivalry : Warfare and Aristocratic Culture in England, France, and Burgundy at the End of the Middle Ages, Londres, Duckworth, 1981, p. 170.
64 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 65.
65 Contamine, « Noblesse française, nobility et gentry anglaises à la fin du Moyen Âge », p. 118.
66 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 17.
67 J. R. Lander, Conflict and Stability in Fifteenth-Century England, Londres, Hutchinson, 1969, p. 183.
68 K. B. McFarlane, The Nobility of Later Medieval England : the Ford Lectures for 1953 and Related Studies, Oxford, Clarendon Press, 1980, p. 120-121.
69 G. Harriss, « The Dimensions of Politics », The McFarlane Legacy : Studies in Late Medieval Politics and Society, éd. R. H. Britnell et A. J. Pollard, Stroud, Alan Sutton Publishing, 1995, p. 1-20, ici p. 5.
70 Waugh, « England : Kingship and the Political Community », p. 218.
71 M. H. Keen, English Society in the Later Middle Ages, 1348-1500, Londres, Allen Lane, 1990, p. 192-193.
72 En moyen anglais, la notion de truth constituait un concept qui englobait tout à la fois, en fonction des circonstances, les valeurs d’honnêteté, de loyauté, de droiture, de fidélité, d’intégrité, de confiance et de franchise, l’élément fondamental du caractère honorable d’un homme. Voir D. G. Neal, The Masculine Self in Late Medieval England, Chicago, University of Chicago Press, 2008, p. 42.
73 « The kynge wasse then wrothe and seide vnto hym, “Thou arte a traytour. Wilt thou that I shulde socour my enemyes and enemyes off the reame ?”. Sir Henry Percye seide, “Traytour am I non, but a true man and as a true mon I speke”. The kynge drue to hym his dagger ; and then he seid to the kynge, “Not here but in the fielde”. And so he wente his way. » An English Chronicle, 1377-1461 : Edited from Aberystwyth, National Library of Wales MS 21068 and Oxford, Bodleian Library MS Lyell 34, éd. W. C. Marx, Woodbridge, Boydell Press, 2003, p. 33.
74 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 26-27.
75 Fouke le Fitz Waryn, éd. E. J. Hathaway, Oxford, Anglo-Norman Text Society, 1975, p. 24.
76 M. H. Keen, Chivalry, New Haven, Yale Nota Bene, 2005, p. 247.
77 Harriss, Shaping the Nation, p. 4.
78 Horrox, « England : Kingship and the Political Community », p. 225.
79 Keen, « Chivalry and English Kingship in the Later Middle Ages », p. 257-258.
80 Nicholas Upton, The Essential Portions of Nicholas Upton’s De studio militari, before 1446, Oxford, Clarendon Press, 1931, p. 16.
81 Watts, Henry VI and the Politics of Kingship, p. 38.
82 « Of knythod loodesterr, / Wis and riht manly, pleynly to termyne, / Riht fortunate, prrvid in pes and werr, / Gretly expert in marcial discipline, / Able to stoned among the Worthi Nyne. » John Lydgate, The Minor Poems, Londres, Early English Text Society, vol. II, 1934, p. 716.
83 A. Mairey, « Qu’est-ce que le peuple ? Quelques réflexions sur la littérature politique à la fin du Moyen Âge », Médiévales, 57, 2009, p. 54-74, ici p. 56-57.
84 « He medleth nevere but of thynges grete / And hye and virtuous ; he nevere is meeved / With smale thynges, as the bookes trete ; / And swich a drede hath for to be reprieved / That, unto thyng that may be knowe or preeved / For villenous or foul or repreevable, / He nevere obeyeth, this knyght honurable. » Thomas Hoccleve, The Regiment of Princes, Kalamazoo, Medieval Institute Publications, 1999, v. 3935-3948.
85 « Or a kyng swere, it is ful necessarie / Avyse him wel, for whan that it is past, / He may his ooth in no wyse contrarie / If he of shame or repreef be agast. / A kyng owith of word be stidefast ; / Nothyng byheete but he it parfourme / If he wole him to his estat confourme. » Ibid., v. 2332-2338 ; « Sweryng hath thise thre condicions / Folwyng, as trouthe, doom, and rightwisnesse. / Ooth axith trouthe and no decepcions, / But swere in his entente soothfastnesse / Doom moot discreetly, lest al hastynesse, / Swere, and nat needles ; and justice also, / Leeffully swere, and justly everemo. » Ibid., v. 2353-2359.
86 « After the kynges that ich itold/Regned a knight swithe bold : /Edward he het sikerly […]/He was a wel douty knight. » Anonymous Short English Chronicle, éd. E. Zettle, Londres, 1935, p. 11.
87 « Hii igitur circa regem conuersantes nichil quod deceret tantum militem informare curabant ; non dico tantum armorum usum, set nec ea que maxime reges generosos decent in pace, uidelicet, ueneracionem uel aucupacionem, aut hiis similia, quibus regius honor crescit. » Thomas Walsingham, The St Albans Chronicle, Oxford, Oxford University Press, 2003, p. 814.
88 Worcester, secrétaire au service de l’illustre combattant Sir John Fastolf, est l’auteur du Boke of Noblesse, un traité composé durant la seconde moitié du xve siècle dans le dessein de stimuler la reprise de la guerre en France.
89 « […] like as it shewethe welle at this tyme of what worship they have bene by here victorious dedis, for they in difference of other nacions have ever ewred and shewed the renomme and excellence of youre highe and mighty antecessours’corages, aswelle in straunge regions as among the Sarrazyns in the region of Sirie and Turkie, as in the said neere regions of Fraunce, Spayne, Lumpbardie, Spruce, and other countrees. » William Worcester, The Boke of Noblesse : Addressed to King Edward the Fourth on His Invasion of France in 1475, Londres, Roxburghe Club, 1860, p. 43.
90 « […] and alle ye other noble princes and other puissaunt lordes and nobles of divers astates olde or yong, of so auncien a stok and of so worthy a lineage ». Ibid., p. 43.
91 R. Radulescu, The Gentry Context for Malory’s Morte Darthur, Woodbridge, DS Brewer, 2003, p. 100-104.
92 « The sheriff is not so whole as he was [wrote Paston’s servants] for now he will show but a part of his friendship […] also the sheriff informed us that he hath writing from the king that he shall make such a panel to acquit the Lord Moleyns. And he told us, and as far as we can conceive and feel, the sheriff will panel gentlemen to acquit the lord, and jurors to acquit his men ; and we suppose that this is by the motion and means of the other party. » N. David (éd.), Paston Letters and Papers of the Fifteenth Century, Oxford, Clarendon, 1971-1976, vol. II, p. 477-479.
93 Kaeuper, Guerre, justice et ordre public, p. 195-196.
94 Powell, « Law and Justice », p. 37.
95 « […] unto hym bounteously and largely the pleintith of his good Lordship […] to th’entent that therby, of verray gentilnes and the noble honour that oweth to be grounded in every Gentilman, he shuld have been stablisshed in ferme feith and trouth unto his Highnes, according to his seid duete of Ligeaunce […] » Cité dans M. A. Hicks, Richard III and His Rivals : Magnates and Their Motives in the Wars of the Roses, Londres, Continuum International Publishing Group, 1991, p. 157.
96 M. H. Keen, The Laws of War in the Late Middle Ages, Londres, Routledge & K. Paul, 1965, p. 46-47.
97 R. F. Green, A Crisis of Truth, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2002, p. 230-232.
98 A. King, « War and Peace : A Knight’s Tale. The Ethics of War in Sir Thomas Gray’s Scalacronica », éd. C. Given-Wilson, A. J. Kettle et L. Scales, War, Government and Aristocracy in the British Isles, c. 1150-1500 : Essays in Honour of Michael Prestwich, Woodbridge, Boydell Press, 2008, p. 148-162, ici p. 148-149 ; A. King, « Scaling the Ladder : the Rise and Rise of the Grays of Heaton, c. 1296-c. 1415 », North-East England in the Later Middle Ages, éd. C. D. Liddy et R. H. Britnell, Woodbridge, 2005, p. 57-73, ici p. 65.
99 « […] qi fe tenoit tout coy en pefe qi rien ne fe entremift de honour ne pruefce ». Scalacronica, p. 150.
100 « […] il fift tout qi tout ly defcounfailloit a cheualery, delitaunt foy en auarice et en delitz du corps, defheritaunt fez gentz qe auoint rebellez encountre ly, et a deuenir meifmes riches dez grantz poffeffiouns de terres. » Ibid., p. 150.
101 « Thow arte a feyre mon, but thow arte falseeste of all men. Thou promised me and ensured me, swerynge be Goddes body, that thow woldeste do my brother no harme. And when I hadde broght hym to the into thi presence, I myghte neuer see hym after. Thou promised me also to calle me in haste agayne fro my exile and that ther shulde be non other archbisshoppe off Caunturbury but I while lived, and nowe thou haste made another archbisshoppe and also procured my dethe. » An English Chronicle, 1377-1461, p. 23.
102 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 136.
103 Green, A Crisis of Truth, p. 226-227.
104 « And there Kynge Henry brake his othe and grement made be twene hym and his trewe lordis, and so wyckedly for sworne went to the contrary parte of the northe, and disseyved his trewe lordis that stode in grete jopardy for his sake, Northeffolke, Warwyke, with other moo, whiche were full fayne to scape with her lyves ». J. Gairdner (éd.), Three Fifteenth-Century Chronicles, with Historical Memoranda by John Stowe, the Antiquary, and Contemporary Notes of Occurrences Written by Him in the Reign of Queen Elizabeth, Westminster, Camden Society, 1880, p. 76.
105 Horrox, « England : Kingship and the Political Community », p. 232.
106 R. R. Davies, B. Smith, Lords and Lordship in the British Isles in the Late Middle Ages, Oxford, Oxford University Press, 2009, p. 2.
107 Ibid., p. 4.
108 Gransden, Historical Writing in England, p. 312.
109 John Rous, Pageant of the Birth, Life and Death of Richard Beauchamp, Earl of Warwick, K. G., 1389-1439, Londres, Longmans Green, 1914, p. 49.
110 Ibid., p. 76.
111 Ibid. p. 93.
112 Ibid., p. 86-88.
113 Ibid., p. 73.
114 Pilbrow, « The Knights of the Bath », p. 214-215.
115 Gransden, Historical Writing in England, p. 312.
116 N. Saul, For Honour and Fame : Chivalry in England, 1066-1500, Londres, Random House, 2011, p. 279.
117 J. T. Rosenthal, Nobles and the Noble Life, 1295-1500, Allen and Unwin, 1976, p. 42.
118 Kaeuper, Guerre, justice et ordre public, p. 192.
119 N. Saul, The Three Richards, Londres, Bloomsbury Academic, 2005, p. 94.
120 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 17.
121 C. Fletcher, « De la communauté du royaume au common weal : les requêtes anglaises et leurs stratégies au xive siècle », Revue française d’histoire des idées politiques, 32, 2010, p. 359-372.
122 C. Fletcher, « La communauté anglaise face à l’étranger : la loi de marque, le bien commun et la dot de Lucia Visconti († 1422) », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes, 19, 2010, p. 105-122, ici p. 116.
123 Fletcher, « De la communauté du royaume au common weal », p. 359-372.
124 J. Watts, « “Les communes” : le sens changeant d’un mot au cours du xve siècle », La sociedad politica a fines del siglo xv en los reinos ibéricos y en Europa, éd. V. Challet, Valladolid, Université de Valladolid, Publications de la Sorbonne, 2007, p. 197-216.
125 P. Withington, Society in Early Modern England, Cambridge, Polity, 2010, p. 140.
126 Harriss, « Political Society and the Growth of Government », p. 53-57.
127 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 105 ; Fletcher, « La communauté anglaise face à l’étranger », p. 107 ; Watts, « “Les communes” », p. 203.
128 I. M. W. Harvey, Jack Cade’s Rebellion, Oxford, Clarendon Press, 1991, p. 186-191.
129 Keen, English Society in the Later Middle Ages, p. 158-159.
130 M. H. Keen, England in the Later Middle Ages : A Political History, Londres, Routledge, 2003, p. 362.
131 Watts, « “Les communes” », p. 205.
132 Hicks, Richard III and His Rivals, p. 47-49.
133 Watts, « “Les communes” », p. 209-216.
134 Genet, La genèse de l’État moderne, p. 102.
135 B. Tierney, Religion, Law and the Growth of Constitutional Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 1983, p. 21, 23, 24-25, 70, 75.
136 Harriss, Shaping the Nation, p. 10.
137 « This Reume in Thoccian of propur kynde / Withoute wynde hath his commotioun, / The maryner therof may not be blinde, / But whenne and where in euery region / It regneth, he moste haue inspectioun ; […] The Maister Marynere, the gouernour, / He knoweth euery cooste in his viage / And port saluz ; and forthi grete honour / He hath, as worthi is, and therto wage. » Cité dans D. Wakelin, Humanism, Reading, and English literature, 1430-1530, Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 89-90.
138 « Also it is the king’s honour and also his office to make his realm rich », « and it is his dishonour when that he hath but a poor realm, of which men will say that he reigneth but upon beggars, yet it were much greater dishonour if he found his realm rich and then made it poor ». Sir John Fortescue, The Governance of England otherwise called the difference between an absolute and a limited monarchy, Oxford, Clarendon Press, 1885, p. 139-140.
139 Q. Skinner, The Foundations of Modern Political Thought, Cambridge, Cambridge University Press, 1978, vol. II, p. 353-355.
140 Horrox, « England : Kingship and the Political Community », p. 225.
141 A. J. Slavin, « The Tudor State, Reformation and Understanding Change : Through the Looking Glass », Political Thought and the Tudor Commonwealth : Deep Structure, Discourse, and Disguise, éd. P. A. Fideler et T. F. Mayer, Londres et New-York, Routledge, 1992, p. 229-260, ici p. 230.
142 Kendall, Lordship and Literature, p. 28-29.
143 Genet, Les îles Britanniques au Moyen Âge, p. 243.
144 M. T. Clanchy, « Law, Government, and Society in Medieval England », History, 59, 1974, p. 73-78.
145 Hicks, English Political Culture in the Fifteenth Century, p. 45.
146 J. Watts, « Usurpation in England. A Paradox of State-Growth », Coups d’État à la fin du Moyen Âge ? Aux fondements du pouvoir politique en Europe occidentale, éd. F. Foronda, J.-Ph. Genet et J. M. Nieto Soria, Madrid, Casa de Velázquez, 2005, p. 115-130, ici p. 121.
147 Castor, The King, the Crown, and the Duchy of Lancaster, p. 6 et 17.
148 Keen, England in the Later Middle Ages, p. 361.
149 F. M. Wright, Henry of Bolingbroke and the Revolution of 1399, Cornell University, 1949, p. 25-30.
150 S. Walker, « Richard II’s Views on Kingship », Rulers and Ruled in Late Medieval England : Essays Presented to Gerald Harriss, éd. R. E. Archer, G. L. Harriss et S. Walker, Londres, Continuum International Publishing Group, 1995, p. 49-64, ici p. 63.
151 Watts, « Usurpation in England. A Paradox of State-Growth », p. 119, 120 et 130.
152 « Tout enfi eft il dun nacioun qe dun corage mettount la mayn a maintener leftat lour siris qi ne defirent fors le bien eftre du comune, ne ne tirent autre acorde fingulerement. Entre tiel gent eft moult rerement vieu chaungement du fiecle, au mainz muement de leftat lour firis le greindre defhonour a le poeple. » Scalacronica, p. 153.
153 McFarlane, The Nobility of Later Medieval England, p. 120-121.
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Référence papier
Raoul Fievet, « Responsabilités publiques et éthique aristocratique », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 36 | 2018, 415-446.
Référence électronique
Raoul Fievet, « Responsabilités publiques et éthique aristocratique », Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 36 | 2018, mis en ligne le 01 décembre 2021, consulté le 21 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/16277 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.16277
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