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AccueilNuméros33Lectures croisées du Livre de l'E...Le Livre de l’Espérance nommé Curial

Lectures croisées du Livre de l'Espérance d’Alain Chartier : enjeux éthiques et esthétiques

Le Livre de l’Espérance nommé Curial

Transmission et réception aux xve et xvie siècles1
Marta Marfany
p. 235-251

Résumés

En 1582, le Livre de l’Espérance et la traduction française de De vita Curiali, le Curial, furent imprimés en un même volume sous le titre de Curial. Ce n’était pas la première fois qu’on rassemblait ces deux ouvrages d’Alain Chartier. L’objectif de cet article est d’analyser la transmission manuscrite et imprimée du Livre de l’Espérance et du Curial pour essayer de découvrir les raisons qui ont amené à associer ces deux textes, à les confondre et même à les unifier en un seul ouvrage.

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Texte intégral

  • 1 Ce travail s’inscrit dans le projet FFI2014-53050-C5-4-P (Universitat Autònoma de Barcelona) finan (...)
  • 2 Dans cet article, on utilise le mot « titre » au sens large du terme : le sens actuel du mot est u (...)
  • 3 La traduction française de De vita curiali est anonyme, bien que la plupart des manuscrits l’attri (...)

1Le Livre de l’Espérance, la dernière œuvre écrite par Alain Chartier – commencée en 1428 –, un dialogue allégorique en forme de prosimètre, s’est transmis sous des titres divers au long de l’histoire2. Parmi ces dénominations, le Livre de l’Espérance est quelque fois intitulé « Curial » et il y a même des manuscrits et imprimés, comme on verra plus loin, dans lesquels le Livre de l’Espérance et le Curial, la traduction française anonyme du De vita curiali d’Alain Chartier (c. 1427)3, sont rassemblés sous le titre de « Curial ». En analysant la transmission manuscrite et imprimée du Livre de l’Espérance, on essayera de découvrir pourquoi il a été associé et confondu avec le Curial et même rassemblé avec ce texte comme un seul ouvrage.

Manuscrits

2Il est bien connu que la transmission manuscrite des œuvres d’Alain Chartier est très complexe à analyser et à interpréter à cause du grand nombre de manuscrits qui sont parvenus jusqu’à nos jours − et ne représentent qu’une petite portion de ceux qui devaient exister à l’époque − et à cause aussi de la contamination entre eux. Cependant, on classifiera les manuscrits par rapport aux incipits et aux explicits qu’ils contiennent et on essayera d’en tirer des hypothèses concernant la transmission du Livre de l’Espérance et du Curial.

3Comme on peut observer dans le tableau ci-dessous, parmi les principaux manuscrits conservés qui le contiennent, le Livre de l’Espérance s’est généralement transmis sans aucune dénomination explicite, c’est-à-dire sans incipit et sans explicit. D’ailleurs, dans les autres manuscrits, l’œuvre a reçu des titres divers, ou bien dans l’incipit ou bien dans l’explicit.

  • 4 Ce tableau et le suivant sont faits à partir de la consultation des manuscrits et, dans les cas où (...)

Fig. 1 – Dénominations du Livre de l’Espérance dans les manuscrits4.

  • i L’incipit « Le Curial » est écrit par une main postérieure : à l’origine, dans ce manuscrit le Liv (...)
  • ii L’incipit (fol. 35r) n’était pas lisible quand Rouy a consulté le manuscrit : « […] les fol. 35 et (...)
  • iii Ce manuscrit a été copié d’après l’édition de 1526 de Galliot du Pré (P. Bourgain-Hemeryck, Les œu (...)
  • iv Manuscrit brûlé en 1904 (il ne peut pas être consulté aujourd’hui). Il a été copié d’après l’éditi (...)
  • v « Fin du Livre de l’Espérance maistre Alain Chartier escript par Nicolas Bloussart » (fol. 46r).
  • vi Dans le manuscrit, le Livre de l’Espérance apparaît sans incipit et sans explicit, mais il est int (...)
  • vii Ce manuscrit a été copié d’après la deuxième édition de Pierre le Caron (c. 1494). Voir A. Piaget, (...)
  • viii Dans ce manuscrit, une main moderne a ajouté l’incipit « L’Espérance ou Consolation des trois vert (...)
  • ix Dans ce manuscrit, le début du Livre de l’Espérance est incomplet : il commence au fol. 1r avec le (...)
  • x Une main postérieure a écrit, dans la marge : « L’Exil de maistre Alain Charretier » (fol. 34r).
  • xii Dans ce manuscrit, à la fin du Curial, qui suit le Livre de l’Espérance, il y a la signature « Her (...)
  • xii L’incipit est rajouté par une autre main et, à l’interligne, une autre main différente a ajouté : (...)
  • xiii « Explicit l’exil autrement l’imparfait de maistre alain chartier » (fol. 116v).
  • xiv « Cy fine la Calamité de France » (fol. 74v).
  • xv « Aultre traictié sur la deploracion de la calamité des francois fait par ledit maistre Alain » (f (...)
  • xvi L’incipit complet est : « Prologue de maistre Alain Chartier sur le livre par luy composé de l’est (...)
  • xvii Le Livre de l’Espérance est appelé « Curial » dans un catalogue (Chartier, Le Livre de l’Espérance (...)
  • xviii Fol. 126v.
  • xix « Ci commence le livre de la destruction du royaume de franche composé par maistre alain chartier  (...)

Curial

BnF, fr. 12436 (xve s.)i
Moulins, Bibliothèque municipale, 26 (xve s.)ii
Munich, Bayerische Staatsbibliothek, cod. gall. 10 (xvie s.)iii
Turin, Biblioteca Nazionale Universitaria, L. II. 12 (xve s.)iv

Livre de l’Espérance

BnF, fr. 832 (xve s.)
Copenhague, Bibliothèque Royale, Thott. 57 in f° (xve s.) (explicit)v

sans dénomination

BnF, fr. 126 (xve s.)vi
BnF, fr. 833 (fin xve s.-début xvie s.)vii
BnF, fr. 1123 (xve s.)
BnF, fr. 1124 (c. 1450)viii
BnF, fr. 1125 (xve s.)
BnF, fr. 1128 (fin xve s.)
BnF, fr. 1133 (xve s.)
BnF, fr. 1549 (xve s.)ix
BnF, fr. 2265 (xve s.)
BnF, fr. 24441 (xve s.)x
Berlin, Kupferstichkabinett, 78 C7 (Hamilton 144) (1461-1500)
Bruxelles, Bibliothèque Royale, II 1172 (xve s.)
Heidelberg, cod. pal. germ. 484 (1455-1460)
La Haye, Bibliotheque Royale, 78 E. 68 (xve s.)
Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34 (xve s.)xii
Oxford, Bodleian Library, Bodley 421 (xve s.)

L’Exil

BnF, fr. 1132 (xve s.) (incipit et explicit)xii
BnF, fr. 6535 (xve s.) (explicit)
Valenciennes, Bibliothèque municipale, 652

L’Exil et L’Imparfait

BnF, fr. 1642 (fin xve s.-début xvie s.) (explicit)xiii

Calamité de France

BnF, fr. 24440 (explicit)xiv

Traité sur la déploration de la calamité des français

Vienne, Bibliothèque Nationale, 2619 (c. 1450)xv

Livre […] de l’état de France […]

BnF, fr. 12435 (xvie s.)xvi

Dialogus familiaris amici et sodalis

Berlin, Kupferstichkabinett, 78 C8 (incipit)xvii

Bataille du peuple de Dieu

Berlin, Kupferstichkabinett, 78 C8 (explicit)xviii

Généalogie des roys de France

New York, Pierpont Morgan Library, 438 (xvie s.) (incipit)

Livre de la Destruction du royaume de France

Besançon, Bibliothèque Municipale, 1791 (xve s.)xix

  • 5 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. i.
  • 6 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. i et n. 2.

4Cette transmission sans incipit et sans explicit aurait peut-être encouragé les copistes ou les responsables des manuscrits à écrire des incipits ou des explicits basés sur le contenu de l’œuvre. Ainsi, dans quelques manuscrits, le Livre de l’Espérance est dénommé « L’Espérance » ou « Livre de l’Espérance » (par allusion au personnage allégorique principal de l’œuvre), « L’Exil » (le premier vers de l’œuvre renvoie à l’exil du narrateur : « Au diziesme an de mon dolent exil5 ») ou « L’Imparfait » (selon F. Rouy, « à cause de son caractère inachevé […]. Deux seulement des trois vertus théologales y prennent en effet la parole : Foi et Espérance6 »). Par exemple, dans le manuscrit BnF fr. 6535, l’œuvre, sans incipit, est appelée dans l’explicit « L’Exil », et dans le manuscrit BnF fr. 1642, aussi sans incipit, est nommée dans l’explicit « L’Exil » et « L’Imparfait ». D’ailleurs, le manuscrit BnF fr. 24440 lui donne le sous-titre de « Calamité de France » dans l’explicit, et dans le manuscrit Berlin, Kupferstichkabinett, 78 C8 l’explicit est « Bataille du peuple de Dieu » (le premier touche au contenu politique et historique de l’œuvre et le second au contenu moral et religieux). En outre, dans ce dernier manuscrit, l’incipit annonce erronément « Dialogus familiaris amici et sodalis » pour intituler le Livre de l’Espérance. En effet, si on laisse de côté les dénominations dérivées strictement du contenu de l’œuvre, on constate que les désignations restantes résultent de confusions avec d’autres œuvres. Dans quelques cas, comme pour le « Dialogus familiaris amici et sodalis », qui désigne un ouvrage en latin d’Alain Chartier, ou pour la « Généalogie des roys de France », qui fait allusion à un ouvrage historique, il s’agit d’erreurs évidentes et ce sont des dénominations isolées dans la tradition manuscrite. Néanmoins, la confusion avec le Curial s’avère un cas tout à fait exceptionnel, différent des autres : elle touche un nombre plus grand de manuscrits et, comme on verra après, elle se transmettra aux imprimés.

  • 7 Le Curial français est conservé dans vingt-et-un manuscrits, et la version originale latine, De vi (...)

5Il faut d’abord remarquer qu’il y a des manuscrits qui ne transmettent que le Livre de l’Espérance mais sous le nom de « Curial » – à savoir, les manuscrits BnF fr. 126, BnF fr. 12436 et Moulins, Bibliothèque municipale 26. Pour expliquer ces cas-là, on peut supposer comme source de l’erreur une phase antérieure où les deux textes étaient copiés l’un après l’autre. En conséquence, il faut analyser les manuscrits qui nous ont transmis le Livre de l’Espérance et le Curial français7. Des trente-neuf manuscrits du tableau ci-dessus, en plus des manuscrits cités qui ne transmettent que le Livre de l’Espérance mais sous le nom de « Curial », il y a sept manuscrits qui contiennent le Livre de l’Espérance et le Curial, en général parmi d’autres œuvres d’Alain Chartier. En voici les références :

  • 8 Ce tableau ne comprend que les manuscrits qui ont transmis, parmi d’autres œuvres ou de façon mono (...)

Fig. 2 – Diffusion du Livre de l’Espérance avec le Curial8.

  • xx Entre le Curial et le Livre de l’Espérance il y a la traduction française du Dialogus familiaris a (...)

MANUSCRITS diffusion monographique

Ordre

Incipits

Explicits

BnF fr. 2265 (xve s.)

LE-C

LE sans incipit
C sans incipit

LE sans explicit
C explicit « Le Curial fait par maistre Alain Charretier »

MANUSCRITS diffusion en recueil

Ordre

Incipits

Explicits

BnF fr. 833 (fin xve s.-début xvie s.)
Copié d’après la deuxième édition de Pierre le Caron (c. 1494)

LE-C

LE sans incipit
C incipit « Curial »

LE sans explicit
C sans explicit

BnF fr. 1642 (fin xve s.-début xvie s.)

C-autres ouvrages d’Alain Chartierxx-LE

LE sans incipit
C sans incipit

LE explicit « L’Exil » et « L’Imparfait »
C explicit « Curial »

Munich, Bayerische Staatsbibliothek, cod. gall. 10 (xvie s.)
Copié d’après la deuxième édition de Galliot du Pré (1526)

LE-C

LE sans incipit
C incipit « Le Curial »

LE sans explicit
C sans explicit

Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34 (xve s.)

LE-C

LE sans incipit C sans incipit

LE sans explicit
C explicit « Le Curial »

Oxford, Bodleian Library, Bodley 421 (xve s.)

C-Quadrilogue-LE

C « s’ensuit la vie curiale […] »
LE sans incipit

C sans explicit
LE sans explicit

Turin, Biblioteca Nazionale Universitaria, L.II.12 (xve s.)
Copié d’après l’édition de Galliot du Pré (1526)

LE-C

LE incipit « Le Curial de Maistre Alain Charretier »

6Des sept manuscrits ci-dessus, il y en a cinq qui copient les deux ouvrages suivis, l’un après l’autre (le Livre de l’Espérance suivi du Curial) : BnF fr. 2265 ; BnF fr. 833 ; Munich, Bayerische Staatsbibliothek, cod. gall. 10 ; Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34 ; Turin, Biblioteca Nazionale Universitaria, L.II.12. Cet ordre de copie des deux textes est important parce qu’il pourrait expliquer certaines confusions dans la transmission par rapport aux incipits et aux explicits. D’ailleurs, le tableau de manuscrits ci-dessus nous montre un autre phénomène intéressant : la copie manuscrite faite à partir des imprimés. En effet, des cinq manuscrits cités il y en a trois – le BnF fr. 833, le manuscrit de Munich et celui de Turin – qui sont des copies des éditions. En conséquence, les deux manuscrits qui nous intéressent le plus sont BnF fr. 2265 et Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34 : dans les deux cas, le Livre de l’Espérance y apparaît sans incipit et sans explicit et le Curial sans incipit mais avec explicit. Il semble donc que le titre « Curial » pour le Livre de l’Espérance est une erreur qui pourrait avoir son origine dans des manuscrits comme ceux-ci, qui ont transmis les deux ouvrages ensemble : le premier, le Livre de l’Espérance, sans titre ni explicit, et le deuxième, le Curial, sans titre et avec un explicit, lequel pourrait être interprété comme le titre des deux ouvrages ensemble.

  • 9 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. liii. Il s’agit de la branche que Rouy appelle c.
  • 10 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. lii-cxxiv (analyse) et cxxv-cxxvi (tableaux).
  • 11 Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 143-150.

7Selon le stemma du Livre de l’Espérance proposé par Rouy, ces deux manuscrits, BnF fr. 2265 et Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34, font partie de la même branche de la tradition manuscrite : il s’agit d’un groupe de manuscrits où le texte du Livre de l’Espérance « a été remanié et élagué pour atténuer des critiques contre l’Église, ou pour rectifier de prétendues erreurs dans l’exposé9 ». En plus, ces deux manuscrits forment tout seuls une sous-branche de cette branche principale10. En ce qui concerne le stemma du Curial français proposé par Bourgain-Hemeryck, dans l’analyse concernant donc seulement le texte du Curial, on arrive à des conclusions coïncidentes : les manuscrits BnF fr. 2265 et Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34 forment seuls une sous-branche d’une branche de manuscrits qui ont tous la même lacune11. En ce qui concerne la dénomination et l’ordre des œuvres, les deux manuscrits mentionnés coïncident, comme on verra par la suite, avec une certaine phase de la tradition imprimée.

Imprimés

  • 12 Les fais maistre Alain Chartier, éd. Pierre Le Caron, Paris, Pierre Le Caron, 1489.

8Le Livre de l’Espérance s’est souvent transmis dans les manuscrits, comme on a vu, sans incipit et sans explicit, ce qui pourrait être source de confusion pour les responsables des imprimés qui ont postérieurement consulté ces manuscrits. Ainsi, dans les premières éditions des œuvres d’Alain Chartier, qui portent le titre Les Faiz maistre Alain Chartier, le Livre de l’Espérance s’est transmis sans titre et suivi du Curial. C’était déjà le cas dans la première édition de Pierre le Caron, un incunable de 148912.

  • 13 Voir, à propos de la tradition imprimée des œuvres d’Alain Chartier et son rapport avec la traditi (...)

9Les deux rééditions postérieures de Pierre le Caron et celles des Faiz maistre Alain Chartier imprimées à Paris jusqu’à 1526 reproduisent le même patron en ce qui concerne l’ordre et la dénomination des œuvres : le Livre de l’Espérance sans titre suivi du Curial13. Ce patron va se reproduire jusqu’à l’édition de Galliot du Pré, en 1526.

  • 14 Les faits et dits maistre Alain Chartier, éd. Galliot du Pré, Paris, Galliot du Pré, 1526. Image p (...)

10En effet, dans son édition de 1526, Galliot du Pré, en suivant l’ordre des œuvres dans les éditions antérieures, rassembla en plus les deux ouvrages, le Livre de l’Espérance et le Curial, sous le titre de Curial14 :

Fig. 3 – Les faictz et dictz de feu de bonne memoire maistre Alain Chartier,

Fig. 3 – Les faictz et dictz de feu de bonne memoire maistre Alain Chartier,

éd. Galliot du Pré, Paris, Galliot du Pré, 1526

11Sur cette image, on peut voir le début du Livre de l’Espérance, intitulé « Le Curial de maistre Alain Chartier » – en haut de page, à gauche – et précédé du texte : « Comment maistre Alain Charretier regrette les nobles chevaliers du temps passé qui par bonne discipline militaire maintenoient France en liberté depuis par lacheté mise en souffrance et servitude ». En ce qui concerne le titre, cette « confusion » pourrait venir donc d’une mauvaise interprétation des manuscrits et éditions antérieures qui ont transmis le Livre de l’Espérance sans titre suivi du Curial.

  • 15 Le Curial de Maistre Alain Chartier, éd. Daniel Chartier, Paris, Pierre Chevillot, 1582. Daniel Ch (...)

12L’édition de Galliot du Pré fut probablement un des points d’appui de Daniel Chartier, qui, en 1582, publia une édition seulement du Curial15 : l’édition comprenait quand même le Livre de l’Espérance et le Curial proprement dit. L’édition de Daniel Chartier était donc « monographique », ne concernant qu’un seul ouvrage, le Curial, bien qu’en fait il contînt aussi le Livre de l’Espérance. En effet, à la différence des éditions antérieures, qui réunissaient presque toutes les œuvres en français connues de Chartier ou qu’on lui attribuait, cette édition rassemblait ces deux ouvrages de Chartier et ne contenait aucun autre texte. À ce point de la transmission du Livre de l’Espérance et du Curial, on peut affirmer que ce n’était pas une erreur de Daniel Chartier, puisque les éditions antérieures à la sienne, notamment celle de Galliot du Pré, et certains manuscrits du xve siècle lui permettaient de croire que le Livre de l’Espérance et le Curial étaient deux parties d’un même ouvrage intitulé « Curial ». En effet, l’opération réalisée par Galliot du Pré et Daniel Chartier est tout à fait intelligible si on observe non seulement les éditions antérieures mais aussi les manuscrits conservés qui contiennent ces deux œuvres. Dans ce sens, il faut souligner l’importance du manuscrit BnF fr. 2265, qui s’avère comme un précédent de l’édition de Daniel Chartier, puisqu’il ne contient que Le Livre de l’Espérance et le Curial.

  • 16 Voir J. C. Laidlaw, « André Du Chesne’s Edition of Alain Chartier », Modern Language Review, 63, 1 (...)

13L’édition suivante des œuvres d’Alain Chartier est celle d’André Du Chesne, de 1617, la plus appréciée par les spécialistes16. Pour l’élaboration de son édition, Du Chesne consulta les imprimés précédents des œuvres de Chartier :

  • 17 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, Paris, Samuel Thiboust, 1617 (réimpression (...)

Plusieurs impressions en ont esté faites [des œuvres d’Alain Chartier], pendant les regnes des Roys Charles VIII, Louys XII et François I, nommément de l’Esperance, du Curial, du Quadrilogue, & des Poesies, dont j’ay veu six Volumes de differentes formes et caracteres17.

  • 18 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, p. 2 de la préface.

14De plus, Du Chesne consulta aussi des manuscrits – qu’il indique dans la préface –, comme il est précisé dans le sous-titre de son édition : « L’Esperance, le Curial, le Quadrilogue, & autres pieces, toutes nouvellement reveuës, corrigées, & de beaucoup augmentées sur les exemplaires escrits à la main18. » Cette édition est donc un précieux témoin de la transmission manuscrite et imprimée des œuvres d’Alain Chartier, au moins de certains exemplaires qui circulaient encore au début du xviie siècle et que Du Chesne avait consultés.

15En l’occurrence, Du Chesne soulignait l’importance du Livre de l’Espérance parmi les œuvres d’Alain Chartier :

  • 19 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, p. 3 de la préface.

Le plus excellent & le plus docte [ouvrage] qu’il élaboura jamais, c’est celuy de l’esperance, ou consolation des trois vertus […] car ceste Piece […] est particulierement remplie de si grande doctrine, & comblée de tant de riches sentences & mots dorez, que par elle seule il semble avoir merité le tiltre honorable & glorieux de Pere de l’Eloquence Françoise, & d’estre mis en parangon avecques l’ancien Seneque de Rome19.

16Du Chesne remarqua d’une part la confusion, dans la transmission du Livre de l’Espérance, de cette œuvre avec le Curial, et, de l’autre, l’assemblage de ces deux textes :

  • 20 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, p. 3 de la préface.

L’Esperance ou Consolation des Trois Vertus, mal confondu par cydevant avecques le Curial. […] J’ay aussi veu […] une [édition] à part de l’Esperance et du Curial ensemble, souz le nom toutesfois du Curial seul, faite l’an MDLXXXII20.

17Ainsi, en plus de constater la confusion avec le Curial dans certains exemplaires qui ont transmis le texte, Du Chesne avait vu un imprimé qui ne contenait que le Livre de l’Espérance et le Curial et, en outre, les deux ouvrages étaient assemblés sous le titre de « Curial ». Cet exemplaire imprimé que mentionne Du Chesne est l’édition de 1582 de Daniel Chartier, qui, comme on l’a déjà vu, imprima le Livre de l’Espérance et le Curial seuls sous le titre de Curial.

18En conclusion, ce ne sera qu’au début du xviie siècle, avec l’édition de Du Chesne, que la confusion concernant le Livre de l’Espérance et le Curial sera dissipée et chaque ouvrage transmis séparément avec son propre titre.

Réception du Livre de l’Espérance avec le Curial : un essai d’interprétation

19La confusion qui a conduit à attribuer le titre de « Curial » au Livre de l’Espérance et même à considérer les deux comme étant un seul ouvrage semble avoir son origine dans des manuscrits comme BnF fr. 2265 et Oxford, Bodleian Library, E.D. Clarke 34 ou dans l’édition de Pierre le Caron – et d’autres imprimés postérieurs –, qui présentent les deux textes à la suite l’un de l’autre, sans titre mais avec un explicit à la fin du Curial. À cause de cette confusion, surtout au xvie siècle, on lisait le Livre de l’Espérance et le Curial comme un seul ouvrage, puisque l’« erreur » ne sera corrigée que dans l’édition de Du Chesne (1617). Le manuscrit BnF fr. 2265 et l’édition « monographique » de Daniel Chartier montrent qu’il y avait bien un public qui s’intéressait en particulier à ces deux textes. En ce qui concerne cet imprimé, il faut rappeler que les éditions étaient très chères à l’époque et qu’on ne publiait que les livres qui pouvaient avoir un public nombreux, un bon nombre de lecteurs garanti.

  • 21 Le Curial de Maistre Alain Chartier, éd. D. Chartier.

20Il est donc évident que les responsables des manuscrits cités de la BnF et de la Bodleian Library, Galliot du Pré et Daniel Chartier voyaient certaines ressemblances ou points communs entre Le Livre de l’Espérance et le Curial. Quelle était l’interprétation, le sens qu’ils pouvaient donner à l’union des deux textes ? Le titre de l’édition de Daniel Chartier nous fournit quelques indices : « Le Curial […] où il est amplement traittié de la vie et mœurs des courtisans et des malheurs et calamitez des hommes, qui conviennent fort bien à cest aage21. » À mon avis, ce « nouveau » Curial (Livre de l’Espérance + Curial) était lu comme un regimen principis qui pouvait être utile non seulement aux « courtisans » et aux gouvernants mais aussi à un public plus large, à tous les « hommes » : dans la partie du Curial, concernant « la vie et mœurs des courtisans », on trouvait la décadence générale du royaume expliquée sous forme de conseils pour la cour ; dans la partie du Livre de l’Espérance concernant les « malheurs et calamités des hommes », on trouvait l’histoire de la France et des nobles chevaliers du passé et la décadence survenue plus tard, mais on trouvait aussi comment revenir aux mœurs du passé à travers la quête de la vertu et de l’amour de Dieu.

  • 22 Voir le rassemblement de ces œuvres dans les manuscrits dans le tableau fourni par Rouy (Chartier,(...)

21Dans ce sens, il a déjà été constaté le lien entre certaines œuvres d’Alain Chartier dites d’inspiration politique – œuvres politiques et morales –, à savoir, le Quadrilogue invectif, le Livre de l’Espérance, le Dialogus familiaris amici et sodalis et le Curial22. Plusieurs manuscrits rassemblent le Quadrilogue, le Dialogus et le Livre de l’Espérance, sorte de « trilogie politique » de Chartier. Dans le manuscrit Pd déjà mentionné, par exemple, la version française du Curial est suivie de la version française du Dialogus (avec le titre Dialogue sur les malheurs de France), du Quadrilogue et du Livre de l’Espérance. Les cruels malheurs du royaume de France en pleine Guerre de Cent Ans exposés dans le Quadrilogue sont parallèles aux malheurs que souffre le curial à la cour : dans le premier cas, c’est une vision politique collective, du royaume, tandis que dans le second il s’agit d’une vision particulière, de l’individu, du courtisan. Contre tous ces malheurs, Chartier propose, surtout dans le Dialogus mais aussi dans les autres ouvrages politiques et moraux, la valeur personnelle, la quête de la vertu et notamment l’amour du bien commun. Le Livre de l’Espérance en est la version religieuse, en donnant aux arguments politiques et moraux une dimension spirituelle, au-delà des affaires mondaines. Comme l’affirme Pascale Bourgain-Hemeryck dans son édition des œuvres latines d’Alain Chartier, à propos du Curial :

  • 23 P. Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, Paris, Éditions du CNRS, 1977, p. 69.

[L’]amertume envers la cour […] annonce le découragement du début du Livre de l’Espérance et certains passages sur le sort funeste qui guette les favoris qui ont trop bien réussi rappelle[nt] le Dialogus23.

22Le Livre de l’Espérance offre donc une vision politique et morale collective du royaume et de l’homme au-delà de ce monde, tandis que dans le Curial l’argumentation reste à un niveau individuel et moral. Contre tous les malheurs, tant collectifs qu’individuels, Chartier prône l’amour du bien commun au niveau de la cour et l’amour de Dieu au niveau général. C’est dans le discours contre la vie de cour fait par la personnification allégorique de l’Indignation dans le Livre de l’Espérance qu’on trouve le plus de points communs avec le Curial (et aussi avec le Dialogus).

23Chartier explique au destinataire du Curial que la cour réelle contraste avec l’image théorique (mais naïve) qu’on en a :

Ad ce es tu [se devient] esmeu par la commune erreur des hommes qui les honneurs mondains et pompes des gens curyaux reputent estre chosez bienheurees plus que aultres ; ou […] tu cuidez par adventure que cheus qui vacquent aux offices publicques soyent par virtueuses œuvres reputez plus dignes d’en avoir meritez.

  • 24 Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 347 et 369.

[Or la cour,] c’est ung convent de gens qui soubz faintise du bien commun s’assamblent pour s’entretromper […]. Car entre nous gens de la court sommes marchans affaitiés qui achatent les aultres gens, et aulcunesfois pour leur argent leur vendons nostre humanité precieuse24.

24Emmanuel Buron commente ainsi ce dernier passage :

  • 25 E. Buron, « Servir à la cour et service public chez Alain Chartier et Étienne Jodelle », Camaren, (...)

Une fois écarté[e] […] la faintise du bien commun, la cour apparaît comme un convent de gens, une assemblée de personnes dont la raison d’être est de créer le milieu pour une circulation généralisée d’argent et de biens. Tout se vend à la cour, même l’humanité précieuse des courtisans. Ce commerce des hommes est l’envers noir de la courtoisie25.

  • 26 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 67-68.

25Cette amère et cruelle réalité de la cour contraste avec la conception tout-à-fait idéale selon laquelle le service de l’homme de cour devrait être un service public, pour le bien commun ; ou, comme le précise le personnage de Foi dans Le Livre de l’Espérance, la seigneurie signifie « auctorité humaine souz la puissance de Dieu, establie pour garder la loy a l’utilité publique et paix des subgietz » (Prose IX, l. 93-94)26.

  • 27 Buron, « Servir à la cour et service public », p. 118.

26La réalité contraste aussi avec l’image de réussite sociale que les gens ont de la cour. Emmanuel Buron affirme, à propos du discours d’Indignation dans le Livre de l’Espérance, que ce sentiment, l’indignation, trouve son origine dans un échec non mérité, dans un service non récompensé, et c’est le même sentiment qui anime le Curial27. En effet, Indignation constate que ceux qui ont travaillé pour le bien public n’ont pas été récompensés, au contraire :

  • 28 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 10 (prose II, l. 159-164).

Oh infortuné homme, tu qui as passé lez dangereux voyages et les ennuieuses veillees, et tant d’autres qui ont porté sur leurs espaules la douleur de leur exil, et travaillé en povreté avec la chose publique, devez peu priser vostre loyaulté, quant pour la garder vous estes desherités de vostre païz, et pour la soustenir estes foullez, avillés et chetifz28.

27Indignation compare la vie de cour aux femmes qui aiment les derniers venus, les corrompus et les diffamateurs et qui oublient ceux qui les aiment et servent :

  • 29 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 7 (prose II, l. 80-84).

Souviengne toy que vie curial est de la nature des folles et dissolues femmes qui plus cherissent lez derniers venuz, et gettent les bras au col plus ardaument a ceulx qui les pillent et diffament, que a ceulx qui trop les ayment et servent29.

28C’est le même argument qu’on trouve dans le Curial :

  • 30 Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 373.

La court par erreur oublie souvent cheux qui mieux servent et despend follement le sien pour enrichir cheus qui n’ene sont dignes et qui l’ont tres mal desservy30.

29Cependant, le Livre de l’Espérance, à travers la figure allégorique de Foi, donne la solution à cette apparente injustice :

  • 31 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 47 (prose VII, l. 253-255 et 264-267) ; p. 49 (prose VIII (...)

La gloire dez mauvaiz et l’eslevement des indignes est comme le feu dedens l’estoupe, qui peut y dure. […] et comme leur haulte pompe monste soudainement, ainsi trebuche leur estat ; leur nom perist et leur avoir se pert, et leur lignage chiet en desertion en ung moment.
Se nostre beneureté estoit es biens de ce monde, et nostre arrest s’i fichoit sans aultre vie attendre, ou plus hault bien esperer, grant apparence auroit en ton argument ; maiz la droicturiere et finale pugnition dez dampnez, et le louier des bieneureux, n’est pas acquerir lez biens et lez honneurs transitoires de cestui monde31.

30La réponse du Livre de l’Espérance est donc spirituelle : la récompense et la punition ne font partie de ce monde, elles ne sont pas transitoires mais éternelles.

  • 32 F. Bouchet, « “Vox Dei, vox poetæ” : The Bible in the Quadrilogue invectif », Chartier in Europe, (...)

31Le caractère complémentaire des œuvres politiques et morales d’Alain Chartier peut expliquer qu’une erreur ou confusion concernant le titre d’un ouvrage, comme dans le cas que nous venons d’observer, devienne récurrente jusqu’à être assimilée dans une partie de la tradition manuscrite et même dans quelques imprimés. Les mots suivants de Florence Bouchet à propos de la dimension divine de la Nation dans le Quadrilogue invectif peuvent illustrer très bien le lien entre le Curial et le Livre de l’Espérance : « Spiritual salvation and public salvation are one and the same thing32. » En effet, le salut spirituel – individuel, du curial – et le salut public – collectif, de la France mais aussi du peuple de Dieu – sont une seule et même chose. C’était ainsi pour Chartier tout comme pour ses lecteurs, notamment ceux qui lisaient le Livre de l’Espérance et le Curial comme un seul ouvrage.

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Notes

1 Ce travail s’inscrit dans le projet FFI2014-53050-C5-4-P (Universitat Autònoma de Barcelona) financé par le Ministerio de Economía y Competitividad.

2 Dans cet article, on utilise le mot « titre » au sens large du terme : le sens actuel du mot est un concept moderne lié au péritexte des imprimés, dans la Renaissance ; en fait, au Moyen Âge, la notion d’« incipit » désignait généralement les premiers mots, souvent rubriqués, d’une œuvre à l’intérieur d’un manuscrit, une formule de début ou un titre placés avant les premiers mots, pas rédigés par l’auteur lui-même mais par le copiste. Voir, pour la typologie des titres des livres médiévaux : P. Lehmann, « Mittelalterliche Büchertitle », Erforschung des Mittelalters, t. 5, Stuttgart, Anton Hiersemann, 1962, p. 1-93. Bien que je n’aie pas pu le consulter, j’attends avec intérêt la parution d’un travail sous presse sur les péritextes des imprimés : T. Van Hemelryck, « L’enjeu des péritextes pour les imprimés de textes médiévaux au début du xvie siècle. L’exemple du privilège chez Galliot du Pré », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, 78, no 2, p. 16 (sous presse).

3 La traduction française de De vita curiali est anonyme, bien que la plupart des manuscrits l’attribuent à Alain Chartier. Voir, à propos de l’attribution des deux versions de l’œuvre : C. J. H. Walravens, Alain Chartier. Études biographiques, Amsterdam, Meulenhoff-Didier, 1971, p. 74-75.

4 Ce tableau et le suivant sont faits à partir de la consultation des manuscrits et, dans les cas où je n’ai pas pu les consulter, à partir des descriptions de François Rouy (A. Chartier, Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, Paris, Champion, 1989, p. xvi-xlv), de James Laidlaw (J. Laidlaw, The Poetical Works of Alain Chartier, Cambridge, Cambridge University Press, 1974, p. 42-144) et des bases de données JONAS et ARLIMA. En ce qui concerne ce premier tableau, les dénominations du Livre de l’Espérance, s’il n’y a aucune indication spécifique, proviennent de l’incipit, et, dans la case « sans dénomination », il y a les manuscrits dans lesquels le Livre de l’Espérance apparaît sans incipit et sans explicit. Finalement, il y a huit manuscrits que je n’ai pas pu consulter et sur les incipits ou les explicits desquels je n’ai pas trouvé d’informations précises (je donne ci-dessous la référence de ces manuscrits avec entre crochets la dénomination fournie par Rouy ou par les catalogues) : Paris, BnF, lat. 18583 (xve s.) [L’Espérance ou Consolation des trois vertus] ; Paris, BnF, lat. 18583 (xve s.) [L’Espérance ou Consolation des trois vertus] ; Paris, BnF, fr. 12437 (1500-1530) [L’Espérance ou Consolation des trois vertus] ; Bruxelles, Bibliothèque IV 1185 (c. 1490) [Le Livre de l’Espérance] ; Harvard College, Houghton Library, Typ 92 (1464-1465) [Traité de l’Espérance] ; Londres, British Library, Cotton Julius E V (1440-1470) [L’Espérance] ; Vatican, BAV, Reg. lat. 1338 [L’Espérance ou Consolation de la Foi et de la Charité] ; Vatican, BAV, lat. 1005 [L’Espérance ou Consolation des trois vertus]. J’ai aussi exclu du tableau le manuscrit Paris, BnF, lat. 2055, du xviie siècle.

5 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. i.

6 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. i et n. 2.

7 Le Curial français est conservé dans vingt-et-un manuscrits, et la version originale latine, De vita curiali, dans onze manuscrits. Il faut souligner que le texte latin n’apparaît jamais copié avec le Livre de l’Espérance.

8 Ce tableau ne comprend que les manuscrits qui ont transmis, parmi d’autres œuvres ou de façon monographique, le Livre de l’Espérance et le Curial. Les sigles LE désignent le Livre de l’Espérance et C le Curial. Pour la composition des manuscrits – notamment les œuvres de Chartier qu’ils contiennent –, voir le tableau de Rouy dans son édition du texte (Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. xliv).

9 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. liii. Il s’agit de la branche que Rouy appelle c.

10 Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. lii-cxxiv (analyse) et cxxv-cxxvi (tableaux).

11 Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 143-150.

12 Les fais maistre Alain Chartier, éd. Pierre Le Caron, Paris, Pierre Le Caron, 1489.

13 Voir, à propos de la tradition imprimée des œuvres d’Alain Chartier et son rapport avec la tradition manuscrite : O. Robinson, « Alain Chartier : The Manuscript and Print Tradition », A Companion to Alain Chartier (c. 1385-1430). Father of French Eloquence, éd. D. Delogu, J. E. McRae et E. Cayley, Leiden-Boston, Brill, 2015, p. 223-252. Les imprimés des œuvres d’Alain Chartier postérieurs à celui de Pierre le Caron et antérieurs à celui de Galliot du Pré sont (je n’indique que les premières éditions) : édition de Michel le Noir, 1514 ; édition Veuve de Jean Trepperel et Jean Jeannot, 1522-1531 ; et édition de Philippe Le Noir, 1523. La base de données USTC (Universal Short Title Catalogue) donne des informations sur la localisation actuelle des exemplaires conservés de chaque édition et sur les deuxièmes éditions (ou rééditions) des imprimés cités ci-dessus. Ainsi, l’édition de Pierre le Caron – comme on l’a mentionné ci-dessus – fut rééditée deux fois, en collaboration avec le libraire Antoine Vérard, et l’édition de Philippe Le Noir fut rééditée en 1540.

14 Les faits et dits maistre Alain Chartier, éd. Galliot du Pré, Paris, Galliot du Pré, 1526. Image provenant de : gallica.bnf.fr.

15 Le Curial de Maistre Alain Chartier, éd. Daniel Chartier, Paris, Pierre Chevillot, 1582. Daniel Chartier était, tel qu’il se présente dans le prologue de son édition, un descendant de la famille Chartier de Bayeux.

16 Voir J. C. Laidlaw, « André Du Chesne’s Edition of Alain Chartier », Modern Language Review, 63, 1968, p. 569-574 ; Walravens, Alain Chartier. Études biographiques, p. 230.

17 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, Paris, Samuel Thiboust, 1617 (réimpression : Genève, Slatkine Reprints, 1975), p. 3 de la préface.

18 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, p. 2 de la préface.

19 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, p. 3 de la préface.

20 Les œuvres de Maistre Alain Chartier, éd. A. Du Chesne, p. 3 de la préface.

21 Le Curial de Maistre Alain Chartier, éd. D. Chartier.

22 Voir le rassemblement de ces œuvres dans les manuscrits dans le tableau fourni par Rouy (Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. xliv) et celui, plus complet, fourni par E. Cayley, Debate and Dialogue. Alain Chartier in His Cultural Context, Oxford, Clarendon Press, 2006, p. 208-210.

23 P. Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, Paris, Éditions du CNRS, 1977, p. 69.

24 Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 347 et 369.

25 E. Buron, « Servir à la cour et service public chez Alain Chartier et Étienne Jodelle », Camaren, 2, 2007, p. 115-131, ici p. 121.

26 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 67-68.

27 Buron, « Servir à la cour et service public », p. 118.

28 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 10 (prose II, l. 159-164).

29 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 7 (prose II, l. 80-84).

30 Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 373.

31 Le Livre de l’Espérance, éd. F. Rouy, p. 47 (prose VII, l. 253-255 et 264-267) ; p. 49 (prose VIII, l. 20-25).

32 F. Bouchet, « “Vox Dei, vox poetæ” : The Bible in the Quadrilogue invectif », Chartier in Europe, éd. E. Cayley et A. Kinch, Cambridge, D. S. Brewer, 2008, p. 31-44, ici p. 44.

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Note de fin

i L’incipit « Le Curial » est écrit par une main postérieure : à l’origine, dans ce manuscrit le Livre de l’Espérance n’avait pas d’incipit.

ii L’incipit (fol. 35r) n’était pas lisible quand Rouy a consulté le manuscrit : « […] les fol. 35 et 41 sont en partie coupés ; certains fragments ont été recollés » (Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. xxxiii). On a coupé l’incipit – peut-être parce qu’il était incorrect –, mais il n’a pas été recollé.

iii Ce manuscrit a été copié d’après l’édition de 1526 de Galliot du Pré (P. Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, Paris, CNRS, 1977, p. 144, et Laidlaw, The Poetical Works of Alain Chartier, p. 95, n. 3).

iv Manuscrit brûlé en 1904 (il ne peut pas être consulté aujourd’hui). Il a été copié d’après l’édition de 1526 de Galliot du Pré (A. Piaget, « La Belle Dame sans merci et ses imitations », Romania, 30, 1901, p. 23-48, ici p. 45-46, n. 2). Le manuscrit commence avec « Le Curial de Maistre Alain Charretier » suivi du Quadrilogue invectif. Sous le titre de Curial il y avait le Livre de l’Espérance et le Curial ensemble (Bourgain-Hemeryck, Les œuvres latines d’Alain Chartier, p. 41, et Laidlaw, The Poetical Works of Alain Chartier, p. 133, n. 3).

v « Fin du Livre de l’Espérance maistre Alain Chartier escript par Nicolas Bloussart » (fol. 46r).

vi Dans le manuscrit, le Livre de l’Espérance apparaît sans incipit et sans explicit, mais il est intitulé « Le Curial » dans quelques catalogues anciens (et même dans Gallica. bnf. fr), raison pour laquelle Rouy affirmait que dans ce manuscrit « l’Espérance est intitulée “Le Curial” » (Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. xvi). Les titres de l’œuvre dans les catalogues anciens mériteraient certainement une étude exhaustive qu’on ne peut pas développer ici (voir n. xvii).

vii Ce manuscrit a été copié d’après la deuxième édition de Pierre le Caron (c. 1494). Voir A. Piaget, « Remarques sur Villon », Romania, 21, 1892, p. 427-433, ici p. 429.

viii Dans ce manuscrit, une main moderne a ajouté l’incipit « L’Espérance ou Consolation des trois vertus : Foy, Espérance, Charité » (Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. xx).

ix Dans ce manuscrit, le début du Livre de l’Espérance est incomplet : il commence au fol. 1r avec le vers « Et par amour charitable » (IV, v. 11).

x Une main postérieure a écrit, dans la marge : « L’Exil de maistre Alain Charretier » (fol. 34r).

xii Dans ce manuscrit, à la fin du Curial, qui suit le Livre de l’Espérance, il y a la signature « Herlin ». Ce scribe est peut-être Robert du Herlin. Voir T. Van Hemelryck, « Autour de Robert du Herlin. Précisions littéraires et codicologiques », Reinardus : Yearbook of the International Reynard Society, 18/1, 2005, p. 153-165.

xii L’incipit est rajouté par une autre main et, à l’interligne, une autre main différente a ajouté : « Le vray tiltre de ce livre est l’Esperance ou Consolation des troys vertus » (fol. 1r). L’explicit est écrit par la même main qui copie le texte : « Cy fine l’exil Maistre Alain » (fol. 111r).

xiii « Explicit l’exil autrement l’imparfait de maistre alain chartier » (fol. 116v).

xiv « Cy fine la Calamité de France » (fol. 74v).

xv « Aultre traictié sur la deploracion de la calamité des francois fait par ledit maistre Alain » (fol. 24a).

xvi L’incipit complet est : « Prologue de maistre Alain Chartier sur le livre par luy composé de l’estat de France durant son exil environ l’an mil quatre cent vingt regnant le roy Charles sixième » (fol. 1r).

xvii Le Livre de l’Espérance est appelé « Curial » dans un catalogue (Chartier, Le Livre de l’Espérance, p. xxiv).

xviii Fol. 126v.

xix « Ci commence le livre de la destruction du royaume de franche composé par maistre alain chartier » (fol. 70r). Rouy ne connaissait pas ce manuscrit lors de son édition du Livre de l’Espérance, mais il l’a postérieurement décrit : F. Rouy, « Un manuscrit bisontin contenant l’Espérance d’Alain Chartier », Annales de la Faculté des lettres et sciences humaines de Nice, 29, 1977, p. 111-117.

xx Entre le Curial et le Livre de l’Espérance il y a la traduction française du Dialogus familiaris amici et sodalis et le Quadrilogue invectif d’Alain Chartier.

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Table des illustrations

Titre Fig. 3 – Les faictz et dictz de feu de bonne memoire maistre Alain Chartier,
Légende éd. Galliot du Pré, Paris, Galliot du Pré, 1526
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/docannexe/image/14767/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 377k
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Pour citer cet article

Référence papier

Marta Marfany, « Le Livre de l’Espérance nommé Curial »Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 33 | 2017, 235-251.

Référence électronique

Marta Marfany, « Le Livre de l’Espérance nommé Curial »Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 33 | 2017, mis en ligne le 16 août 2020, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/14767 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.14767

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Auteur

Marta Marfany

Université Pompeu Fabra – Barcelone

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Droits d’auteur

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