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Le modèle dans la science médiévale

Avicenne fut-il un modèle pour les médecins italiens de la fin du Moyen Âge ?

Joël Chandelier
p. 21-38

Résumés

Avicenne a constitué, du XIVe au XVIe siècle, l’une des principales autorités médicales, notamment dans les universités italiennes. Pour autant, a-t-il représenté un modèle pour les médecins ? L’étude envisage d’abord la possibilité que le savant persan ait été pris comme exemple de praticien, pour montrer que ce ne fut presque jamais le cas : le plus souvent, les médecins italiens se contentent de quelques généralités sur sa personnalité, sans s’intéresser réellement à sa vie ni à chercher à la mettre en valeur. En revanche, le Canon de la médecine, son principal ouvrage encyclopédique, servit de véritable modèle d’écriture : de nombreux traités médicaux rédigés aux XIVe et XVe siècles suivent son plan, ou s’efforcent de s’adapter à sa structure. De cette manière, on peut bien dire que le Canon a modelé la pensée médicale de la fin du Moyen Âge et des débuts de l’époque moderne.

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Texte intégral

  • 1 Bassiano Landi, Barbaromastix (éd. Venise, 1533), fol. 10v : Spero ut ex nostra Academia de Avicen (...)

1Dans un dialogue intitulé Barbaromastix paru en 1533, Bassiano Landi, futur professeur ordinaire de médecine théorique à Padoue, déclare : « J’ai l’espoir que, de notre Académie, sortent des volumes complets sur les erreurs d’Avicenne1 ». Exactement à la même époque, quand, dans les années 1540, le célèbre médecin et professeur padouan Giovanni Battista da Monte décrit l’utilité du Canon, la principale encyclopédie du médecin persan, il a un avis tout à fait opposé :

  • 2 Giovanni Battista da Monte, comm. Avicenne, Canon, I, 2, p. 8-9 (cité dans Siraisi, Avicenna in Re (...)

Lorsque le médecin aura appris tout l’art de soigner dans les première, deuxième, troisième et quatrième fen [du Canon], il ne lui manquera rien d’autre que de diriger son étude vers la présentation des choses particulières qu’a faite notre divin Avicenne ; car, après avoir enseigné l’art dans les première, deuxième, troisième et quatrième fen, il entame le troisième livre, où il enseigne comment appliquer aux particuliers cette méthode universelle2.

  • 3 Sur le rôle du Canon dans les universités, et notamment à Bologne, voir D. Jacquart et F. Micheau, (...)

2Le moins que l’on puisse dire est qu’Avicenne constitue, au milieu du XVIe siècle, un modèle contesté : loué par les uns, jeté au feu par les autres, il représente, avec toutes ses ambiguïtés, la médecine arabe dont certains médecins humanistes aimeraient se débarrasser, tant son emprise est forte sur la science du temps. Mais si ces réactions tranchées sont typiques du début de l’époque moderne, qu’en est-il de la vision qu’avaient les hommes du Moyen Âge du médecin philosophe et de son œuvre ? On sait que le Canon d’Avicenne a joué un rôle fondamental dans la médecine occidentale, devenant à partir du XIVe siècle le manuel dans lequel les étudiants apprenaient leur discipline : à Bologne, selon le programme des études de 1405, la médecine pratique était ainsi exclusivement apprise à travers la lecture suivie de l’ensemble du livre III du Canon, qui présentait les maladies de la tête aux pieds3. Toutefois, une domination sur les écoles ne transforme pas, nécessairement, une œuvre et son auteur en modèle pour ses lecteurs. Le manuel peut avoir été utilisé par commodité ou par habitude, et avoir été critiqué durement. Il convient donc de se demander si Avicenne a vraiment représenté, pour les médecins de la fin du Moyen Âge, un modèle. Pour répondre à cette question, on se limitera à l’Italie, où l’influence de l’œuvre d’Avicenne a été la plus nette, en envisageant deux acceptions du terme de modèle : soit le modèle en tant que personne – auquel cas c’est Avicenne, comme savant, qui l’a représenté –, soit le modèle que constitue le Canon, en tant qu’ouvrage médical complet et ordonné. Dans chacun de ces deux cas, il s’agira, autant que possible, non pas seulement de reconstituer le modèle qu’ont suivi les médecins occidentaux des XIVe et XVe siècles, mais surtout de repérer leurs affirmations explicites en ce sens. Ainsi, il sera peut-être possible de donner un sens plus précis à l’expression de « modèle avicennien ».

Avicenne, un modèle de médecin ?

  • 4 M.-T. d’Alverny, « Survivance et renaissance d’Avicenne à Venise et à Padoue », Venezia e l’Orient (...)

3À l’évidence, la première et la plus simple manière de considérer Avicenne comme un modèle est d’en faire un modèle de médecin, ou, plus largement, un modèle de savant. Pour cela, il était bien sûr nécessaire que les auteurs aient une connaissance au moins vague de ce qu’avait été sa vie. Bien qu’aucun des médecins occidentaux n’ait rédigé de biographie du philosophe, beaucoup, au début de leurs commentaires, introduisirent quelques remarques qui nous permettent de savoir quels étaient les principaux faits connus sur son existence. Or, Marie-Thérèse d’Alverny a montré que la connaissance de la vie du philosophe était fort réduite avant la toute fin du XVe siècle et la traduction de quelques sources arabes : celle-ci se limitait alors à un mélange de rares informations fiables et de nombreuses légendes4.

  • 5 Sur les accessus et leur tradition au Moyen Âge, voir E.A. Quain, « The medieval accessus ad aucto (...)
  • 6 Antoine de Parme, comm. Avicenne, Canon, prohemium (ms. Vatican, B.A.V., lat. 4452), fol. 1ra : Ca (...)
  • 7 Jacques de Forlì, comm. Avicenne, Canon, prohemium (éd. Venise, 1497), s. a2r : Sciendum autem ut (...)
  • 8 Sur ce personnage, voir T. Pesenti, « Studio dei farmaci e produzione di commenti nell’Università (...)
  • 9 Jacques de Forlì, comm. Avicenne, Canon, prohemium, s. a2r : Mundinus autem super hoc passu refert (...)
  • 10 Jacques de Forlì, comm. Avicenne, Canon, prohemium, s. a2r : Erit igitur sensus tituli Incipit etc (...)

4De fait, les remarques des médecins sont généralement très brèves. Elles se trouvent souvent intégrées dans l’accessus introduisant le commentaire, accessus qui, selon une méthode répandue dans les milieux scolastiques, divise la présentation de l’ouvrage à expliquer selon les quatre causes aristotéliciennes5. C’est au moment où les commentateurs abordent la cause efficiente de l’ouvrage que l’on trouve parfois quelques informations sur la vie de l’auteur. Beaucoup de médecins s’attardent sur son nom. Ainsi, Antoine de Parme († 1327) affirme qu’en arabe « a » signifie fils, et que « vicenus » désigne le père, ce qui n’est pas si loin de la vérité quand on sait qu’Avicenne est une déformation d’Ibn Sīnā, « le fils de Sina6 ». D’autres vont un peu plus loin dans l’analyse philologique, en s’appuyant notamment sur la rubrique placée, dans les manuscrits, au début du texte et indiquant Liber Canonis primus quem princeps Aboaly Abynceni de medicina composuit. Expliquant ce passage, Jacques de Forlì (v. 1360/1362-1414) signale que, dans la langue arabe, « abyn » et « abon » signifient « fils », et en déduit que Abonaly se traduit par « le fils de Aly », et Abynceni par « le fils de Ceni ». Reconnaissant dans cette dernière forme l’origine du terme latin « Avicenna », il avoue cependant ne pas savoir quel était le vrai nom de l’auteur7. Bien que Jacques de Forlì évoque ici quelques éléments de grammaire, il ne faut pas croire qu’il ait eu une quelconque connaissance de l’arabe. En réalité, il se contente de citer le commentaire d’un autre de ses confrères, « Mundinus », sans doute Mondino da Cividale del Friuli (mort entre 1328 et 1340), auteur notamment d’un glossaire de synonymes8 : ce dernier se serait renseigné auprès d’un « Arabe digne de foi » pour vérifier que « abyn » et « abon » signifiaient tous deux « fils ». Puisque l’on ne trouve pas de mention de ce type dans les Synonyma de Mondino, on doit supposer que l’information se trouvait dans son commentaire perdu à la première fen du Canon – ce que semble du reste indiquer la mention super hoc passu9. Quoi qu’il en soit, Jacques de Forlì peut alors expliquer que la tradition ancienne était que celui qui composait un livre mentionnait le nom de son père et de son grand-père, sans indiquer le sien propre10.

  • 11 Ugo Benzi, comm. Avicenne, Canon, prohemium (éd. Venise, 1498), fol. 2ra : […] de cuius laudibus a (...)

5Les remarques philologiques sur le nom d’Avicenne forment l’essentiel des informations données par Jacques de Forlì sur l’auteur du Canon ; on ne trouve rien, dans sa présentation, sur la vie de l’homme, pas même une quelconque louange à son endroit. Dans les commentaires de Marsile de Sainte Sophie († 1405) et d’Ugo Benzi (1376-1439), à peu près contemporains de celui de Jacques de Forlì, le développement sur le patronyme de l’auteur est repris dans des termes absolument similaires, sans ajout notable : preuve que les informations anthroponymiques évoquées plus haut étaient alors assez répandues – ou bien que les auteurs se contentaient de se recopier sur ce point, qui ne semblait guère les intéresser. Ugo Benzi s’explique à la fin de son exposé sur ce silence : « Quant aux louanges sur [Avicenne], elles sont dites ailleurs par de très nombreux hommes consacrés, et pour cela je passe11 ». Malheureusement, Ugo Benzi ne précise pas de quels viri solemnes il parle. En l’absence d’autres mentions, on peut penser qu’il renvoie à ses prédécesseurs commentateurs du Canon, et, en effet, les premiers commentateurs du prologue du texte s’étaient montrés un peu plus diserts sur le personnage, évoquant certains points de sa biographie. C’est le cas notamment de Taddeo Alderotti († 1295), premier commentateur du texte, et de Gentile da Foligno († 1348).

  • 12 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium (éd. Venise, 1520-1522), fol. 2ra : ex regia (...)

6Tous deux relèvent qu’Avicenne est désigné avec un titre de prince dans le titre de l’œuvre, attestant une origine royale dont la légende perdurera jusqu’au début de l’époque moderne, où le philosophe est souvent représenté coiffé d’une couronne. Cette information erronée provient en fait d’une traduction inexacte du titre de al-Shaykh al-Rays (le maître et le prince) donné à Avicenne, que Gérard de Crémone avait rendu par princeps dans l’incipit du livre I et par senis regis à la fin du livre V. Gentile da Foligno reprend l’information sans broncher, affirmant qu’Avicenne est « de souche royale12 ». Taddeo Alderotti, en revanche, exprime des doutes ; en bon praticien, il estime difficile, voire impossible, pour un roi de vaquer à des occupations médicales :

  • 13 Taddeo Alderotti, comm. Avicenne, Canon, prohemium (ms. Vatican, B.A.V., lat. 2366), fol. 94ra : V (...)

Certains disent qu’Avicenne était roi, ce qui est dans tous les cas possible, mais que je ne crois pas. En effet je ne vois pas que des rois puissent s’occuper des opérations de la médecine et des recherches qui sont nécessaires en médecine – mais peu importe, sia chio re vuole13.

  • 14 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2ra : Avicenna videtur grandis ingenii (...)
  • 15 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, III, 1.1.1., fol. 1rb : Fuit enim de regia stirpe, inte (...)
  • 16 Le texte de cette biographie est transcrit dans A. Birkenmajer, « Avicennas Vorrede zum Liber Suff (...)

7On est cependant loin ici d’un éloge faisant d’Avicenne un modèle à imiter. Le seul à s’attarder sur la biographie du maître est en fait Gentile da Foligno, qui, en deux endroits de son commentaire (au début du livre I et au début du livre III), se livre à un véritable panégyrique. Avicenne y est présenté comme « de grand génie, lumineux par sa maîtrise de toutes les sciences terrestres, de souche royale, généreux par sa noble origine, jouissant de toutes les opérations des vertus morales, joyeux par la clarté de son esprit, comme sa chronique le démontre14 » ; il est « de souche royale, sublime par son intelligence : une intelligence de fait très excellente comme le montre sa Métaphysique […] ; de mœurs charmantes, cet homme était en effet libéral et joyeux, comme sa chronique le narre15 ». Ce tableau fort positif d’Avicenne ne se trouve que chez Gentile da Foligno, qui s’appuie sur la courte biographie, la « chronique » qu’il mentionne à deux reprises, placée dans le prologue du Shifa. Il s’agissait d’une présentation de l’auteur rédigée par son disciple al-Jawzjani, conservée aujourd’hui dans deux témoins manuscrits16 : malgré sa faible diffusion, Gentile da Foligno y a donc visiblement eu accès, même s’il n’en retire, en fin de compte, que peu d’informations. Dans tous les cas, l’insistance sur la personnalité d’Avicenne doit sans doute être interprétée comme l’expression d’une sincère admiration, et, peut-être, d’une volonté d’égaler le maître – de fait, Gentile da Foligno sera surnommé, dès l’époque moderne, l’« anima di Avicenna ».

  • 17 Nous n’avons malheureusement pas pu consulter ce texte, conservé dans le ms. Clm 350 de la Bayeris (...)
  • 18 Matheolus Perusinus, De Avicenna (ms. Munich, B.S.B., Clm 7609), fol. 157vb : Et dicitur causa qui (...)
  • 19 Ibid., fol. 157vb-158ra : Homo fuit colore brunus et iocundus ut narrat Gentilis, quod patet quia (...)
  • 20 Ibid., fol. 158ra : Longinquum enim a veritate videtur quod unus dominus urbis se practice et medi (...)

8Un dernier texte, exceptionnel dans son contenu et jusqu’à présent passé inaperçu, peut nous servir à illustrer ce que les médecins de la fin du Moyen Âge pensaient et savaient d’Avicenne vers le milieu du XVe siècle. Il s’agit d’une courte discussion sur la vie d’Avicenne, semble-t-il extraite du commentaire au premier livre du Canon rédigé en 1449 par Matheolus Perusinus (Matteolo Mattioli, mort avant 1473)17. Conservée dans le manuscrit Clm 7609 de la Bayerische Staatsbibliothek de Munich, elle est particulièrement intéressante tant elle révèle à la fois l’état des connaissances sur le philosophe avant l’arrivée de nouvelles informations à la fin du XVe siècle, mais aussi l’intérêt que pouvait porter ce médecin italien à l’auteur du Canon. Matheolus commence par y discuter la prétendue origine royale d’Avicenne, évoquant même certaines légendes en faisant le roi de Cordoue, ville dans laquelle il aurait fait construire un hôpital où il allait régulièrement visiter les malades18. Matheolus cite également Gentile da Foligno pour dire qu’Avicenne était un homme à la peau brune, joyeux et mort relativement jeune, puisqu’il n’aurait pas atteint les cinquante ans19. Cependant, Matheolus ne reçoit pas sans critique ces faits. Il évoque l’avis d’autres personnes, qui estiment que si Avicenne était bien prince de Cordoue, il ne fut pas en réalité l’auteur du Canon, qu’il aurait fait rédiger par un médecin à son service en s’en attribuant le mérite ; sont également évoqués d’autres savants – parmi lesquels on peut donc compter Taddeo Alderotti – mettant totalement en doute le titre royal d’Avicenne, avis à l’évidence partagé par l’auteur : « Il paraît en effet peu vraisemblable que le seigneur d’une ville se consacre à la pratique et à la thérapie20 ».

  • 21 Sur cette lettre d’Avicenne à saint Augustin, voir D’Alverny, « Survivance et renaissance », p. 84 (...)

9Matheolus s’interroge ensuite sur la période à laquelle a vécu Avicenne, la qualifiant d’ » incertaine ». Il rejette tout d’abord sans ménagement une légende selon laquelle il aurait correspondu avec saint Augustin, légende fondée sur une lettre apocryphe rédigée dans la première moitié du XVe siècle21. Qualifiant cette idée d’ » absurde », il accumule plusieurs arguments pour la rejeter : il remarque d’abord qu’Avicenne n’est jamais mentionné dans les œuvres d’Augustin ; que le Canon parle des coquilles ramenées de Saint-Jacques-de-Compostelle, un lieu de pèlerinage n’existant pas à l’époque de l’évêque d’Hippone ; enfin, qu’Avicenne connaît bien les rites chrétiens, ce qui lui paraît peu probable à l’époque considérée, où les Chrétiens étaient peu nombreux et pratiquaient leurs offices en privé. Cette assertion écartée, Matheolus dit se ranger à l’avis de la plupart des auteurs, qui estiment qu’Avicenne fut contemporain d’Averroès, ou de peu antérieur ; or, celui-ci ayant vécu au XIIe siècle, il en déduit, à partir des citations que le Canon comporte, qu’il a du vivre peu avant l’auteur du Colliget.

10Matheolus en vient enfin à l’analyse du nom d’Avicenne tel que transcrit dans le Canon. S’il reprend, sur ce point, les informations que nous avons déjà évoquées, il fait preuve d’une plus grande précision. En effet, il signale, comme Jacques de Forlì, qu’Aboali Abinceni signifie « fils d’Ali fils de Ceni », et que les Arabes ont pour habitude de ne pas donner leur nom propre, mais celui de leurs ancêtres ; mais il s’intéresse également à l’évolution ayant amené au nom « Avicenne » puisque, s’appuyant sur les plus anciens textes, il remarque que l’on est passé d’Abinceni à Aviceni, puis à Avicenna. Enfin, il termine par une évocation de l’ensemble de l’œuvre du philosophe, soulignant notamment qu’il a complété les travaux d’Aristote (en particulier par son De mineralibus), traité de l’alchimie et produit deux autres ouvrages médicaux, le Cantique de la médecine et le De viribus cordis. Intéressante est la façon dont il loue les qualités intellectuelles de l’auteur du Canon. En effet, au lieu de se livrer lui-même à l’éloge d’Avicenne, il évoque l’avis de l’humaniste Paolo Veneto (v. 1369-1429) :

  • 22 Matheolus Perusinus, De Avicenna, (ms. Munich, B.S.B., Clm 7609), fol. 158ra : Scripsit tamen ultr (...)

[Avicenne] a en effet écrit, en plus de la médecine, sur chaque genre de discipline, en science naturelle, en mathématique, en morale et en logique, et de façon si merveilleuse que Paolo Veneto, le monarque des philosophes de son temps, qui fut notre maître à Pérouse, m’a dit que son Sextus liber Naturalium lui plaisait plus que le De anima d’Aristote22.

11Le témoignage de Matheolus Perusinus est, pour tout dire, assez exceptionnel : bien qu’il ne comporte pas réellement d’éléments nouveaux par rapport à ceux disponibles en Occident depuis le XIIIe siècle, il se rattache aussi en partie aux futures discussions biographiques du XVIe siècle, ce qui du reste n’est pas étonnant étant donnée son insertion dans les milieux humanistes de son temps. Mais cet exemple montre également, par contraste, combien la personnalité d’Avicenne et son parcours personnel intéressaient en fin de compte assez peu. Lorsque les auteurs médiévaux présentent l’auteur du Canon, ils se contentent le plus souvent de quelques informations utiles au commentaire littéral, comme l’explication de son nom ; mais, à aucun moment, ils ne mettent en avant la vie d’Avicenne comme exemple à suivre. Même pour Matheolus, Avicenne n’est jamais considéré comme un « modèle » en tant que médecin : l’éloge qui est fait de lui porte plutôt sur ses œuvres philosophiques, et l’on ne fait que rarement allusion à sa pratique, à ses experimenta, comme cela peut être le cas pour Galien ou Hippocrate. Si les Latins se réfèrent à un modèle de praticien arabe, c’est plutôt à Rāzī qu’ils pensent.

12La raison de ce relatif désintérêt peut être assez simplement déduite de ce qui précède. En effet, le Canon, œuvre principale d’Avicenne, est une vaste synthèse, moins originale sur le contenu des expériences et des traitements décrits (qu’Avicenne tire souvent d’ailleurs, notamment de Galien) que par l’agencement même de ses parties. En tant que médecin, Avicenne est donc moins un modèle qu’il ne l’est en tant que philosophe. Pour cette raison, les louanges que l’on trouve dans les commentaires sont, le plus souvent, dirigées non vers l’auteur, vers sa pratique concrète, mais plutôt vers le texte lui-même. On l’a vu avec Giovanni Battista da Monte ou Matheolus Perusinus : même si ces deux auteurs font montre d’une admiration manifeste pour l’homme, l’essentiel de leurs louanges est réservé à son œuvre. Il faut se tourner maintenant vers la seconde possibilité évoquée en introduction : le Canon, cette œuvre si excellente, a-t-il été un modèle dominant pour la médecine italienne des XIVe-XVe siècles ?

Le canon et la structuration de la science médicale

  • 23 E. Renan, Averroès et l’averroïsme, Paris, A. Durand, 1852, p. 45.
  • 24 Voir C. Malagola (éd.), Statuti delle Università dei Collegi dello Studio bolognese, Bologne, Zani (...)

13« C’est surtout par les titres qu’Aristote a régné sur l’esprit humain : les étiquettes de ses livres sont restées, pendant près de deux mille ans, les divisions de la science elle-même23 ». Cette affirmation de Renan, certes quelque peu péremptoire, invite à s’interroger sur le rôle de modèle qu’a pu jouer, de par son organisation interne, l’encyclopédie médicale d’Avicenne. En effet, il est clair que le Canon, une fois imposé comme fondement de l’éducation médicale en Italie au cours du XIVe siècle, a donné un cadre strict à l’enseignement, comme le montrent les statuts de l’université de Bologne déjà évoqués en introduction. Il n’est pas inutile de revenir en détail sur les parties utilisées pour l’enseignement à partir de 1405 : pour l’apprentissage de la théorie, sont ainsi lus en première année des passages du livre I et du livre IV, ainsi que tout le livre II ; en seconde année, les mêmes passages du livre I, et en quatrième année à nouveau ces parties, ainsi que le livre II et la première fen du livre IV sur les fièvres. Pour l’apprentissage de la pratique, la domination du Canon est encore plus écrasante, puisque l’ouvrage est la seule autorité lue, les quatre années d’étude se répartissant, de façon incomplète toutefois, l’imposante matière de la façon suivante : fen 1-3 en première année, 9-12 en deuxième, 13-16 en troisième et 18-21 en quatrième24.

  • 25 Nous nous permettons de renvoyer à notre doctorat La réception du Canon d’Avicenne. Médecine arabe (...)

14La raison d’une telle domination sur l’enseignement de la médecine, du moins en Italie du Nord, n’a pas à être discutée ici25 ; nous intéresse seulement le fait que, à partir du milieu du XIVe siècle environ, le Canon est explicitement considéré comme la meilleure introduction possible pour apprendre la médecine ; que les futurs médecins apprennent leur discipline en lisant le texte ; que tous les professeurs sont amenés à le commenter. Une citation de Gentile da Foligno peut illustrer cette emprise du texte sur les études médicales italiennes de la fin du Moyen Âge :

  • 26 Il s’agit sans doute de l’Introductio sive medicus, texte pseudo-galénique.
  • 27 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2rb : Nullus ante Avicenna unum librum (...)

Personne avant Avicenne n’a composé un livre aussi parfait sur les principes de la médecine […]. Ce qui rend cette œuvre aussi remarquable, c’est primo sa juste quantité, qui fait que quand l’étudiant l’écoute [dans des cours], il n’en est pas effrayé. Secundo c’est sa louable abondance, qui pousse à son étude. Tertio son ordre facile à mémoriser, qui s’adapte à la disposition de la science. La justesse de sa quantité nous est démontrée par l’obscure brièveté des livres d’introduction à la médecine, comme il apparaît pour les introductions de Rāzī et Johannitius, et par la fastidieuse prolixité de certains autres, comme l’œuvre de Galien ; c’est pourquoi la science des principes se trouve ici plus complète que dans le livre de Galien qui s’appelle Introduction des médecins26 . Sa louable abondance est démontrée par la parfaite présentation de tous les principes de la médecine que l’on y trouve, ce qui n’est pas le cas dans le livre qui s’intitule Tegni […]. Son ordre facile à mémoriser est démontré par l’ordonnancement des parties du livre, grâce auquel il est possible de conserver en mémoire l’ensemble du premier livre du Canon : l’ordre rend en effet la mémorisation facile, comme le dit Aristote dans le De memoria et reminiscentia27.

15Une question peut ici légitimement se poser : est-ce parce que le texte est au programme qu’on le loue, ou bien est-ce l’inverse ? Par ailleurs, le cadre scolastique et pédagogique imposé par le Canon dans l’enseignement est-il devenu, pour autant, un modèle à suivre pour l’ensemble des médecins italiens de la fin du Moyen Âge ?

  • 28 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2va : Hic multi inutiliter prolongant d (...)
  • 29 Antoine de Parme, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol.1rb ; Gentile da Foligno, comm. Avicenne, (...)

16Un premier élément de réponse est fourni par les discussions sur l’ordre du Canon dans son ensemble placées au début de leur exposition par de nombreux commentateurs italiens. En effet, l’ordre choisi par Avicenne pour présenter la science médicale est loin d’être anodin, et certains de ses choix (l’absence d’une division entre pratique et théorie comme c’est le cas dans d’autres encyclopédies, par exemple) sont porteurs d’une importante valeur épistémologique. Le Canon était divisé en cinq livres : le premier portait sur les principes généraux de la physiologie et de la thérapie, le second sur les médicaments simples, le troisième sur les maladies localisées des pieds à la têtes, le quatrième sur les maladies sans localisation précise, comme les fièvres, et le cinquième était un antidotaire réunissant des recettes de médicaments composés. Or, une question régulièrement posée était celle de savoir si cette organisation, assez originale, était pertinente. Dans son commentaire au prologue du Canon, Gentile da Foligno évoque les critiques pouvant être faites contre cette structure : certains estimaient par exemple qu’il n’était pas approprié de parler d’abord des maladies liées à un organe précis, puis de celles touchant tout le corps, le plus logique étant d’aller du général au particulier ; d’autres soulignaient que séparer étude des médecines simples et antidotaire n’était pas cohérent28. Les réponses des différents commentateurs prennent, bien évidemment, la défense d’Avicenne : Antoine de Parme explique que puisque le corps est composé de différents membres, il est logique de les étudier un par un, avec leurs maladies, avant de comprendre le tout, tandis que Gentile da Foligno reconnaît que l’ordre des livres 3 et 4 aurait pu être inversé, mais n’en justifie pas moins le choix de l’auteur29 ; de même, il affirme qu’il est utile de placer en dernier l’antidotaire en expliquant qu’il requiert, pour être utilisé pleinement, toutes les connaissances présentées auparavant.

17Ces discussions sur l’organisation du Canon pourraient sembler oiseuses et n’ont guère attiré l’attention des historiens. Elles ont pourtant un intérêt réel. Elles montrent à quel point la structuration de la matière médicale opérée par Avicenne a influencé la conception de la discipline elle-même chez les auteurs de la fin du Moyen Âge. Pour cette raison, les choix d’Avicenne ont eu une influence allant au-delà de ses simples commentaires, et le Canon a servi de véritable modèle d’écriture en Italie aux XIVe et XVe siècles. Les preuves de cette influence, parfois ouvertement revendiquée, parfois tue voire inconsciente, sont nombreuses : s’attacher à les relever toutes reviendrait à traiter l’ensemble de la production médicale du temps. Cependant, certains ouvrages produits en Italie démontrent une dépendance particulière à l’égard du Canon : ce sont eux dont nous voulons parler maintenant.

  • 30 Sur ce maître, jusqu’ici peu étudié, voir la notice de M. Crespi dans Dizionario biografico degli (...)
  • 31 Niccolò Bertruccio, Collectorium (éd. Lyon, 1509), fol. 1ra.

18Le premier texte sur lequel nous voulons insister est le Collectorium medicine (ou Collectorium totius practice medicine, selon la plupart des manuscrits) du médecin bolonais Niccolò Bertruccio, un contemporain de Gentile da Foligno mort en 134730. Si l’on ne connaît pas la date de composition de l’ouvrage, il se présente comme la somme de toute la réflexion du maître, ce qui inviterait à le placer plutôt vers la fin de sa vie. Dans tous les cas, le traité connut un succès relativement important, puisqu’un recensement fondé sur les catalogues existants permet d’établir à une quinzaine le nombre de manuscrits subsistants, auxquels on peut ajouter deux éditions parues à Lyon en 1509 et Cologne en 1537. Le texte est précédé d’une longue introduction programmatique, où l’auteur affirme son projet de composer un ouvrage contenant toute la pratique médicale, et traitant donc des maladies tant générales que particulières. Mais l’objectif de Bertruccio dépasse ce seul cadre. Constatant les défauts de la littérature médicale de son temps, à la fois obscure et excessivement abondante, il désire s’adresser aux débutants pour lesquels il rédigera un ouvrage « au style le plus bref possible et dans l’ordre le plus convenable31 ».

  • 32 Ibid. : In collectione autem presentis opusculi, quod Collectorium nuncupare desidero, ordinem Avi (...)
  • 33 Ibid., fol. 1ra-b : Faciam namque ex ipso duos libros generales. In quorum primo loquar de egritud (...)

19Or, la façon dont Bertruccio affirme vouloir procéder est particulièrement intéressante. En effet, après avoir exposé son intention, il déclare vouloir se conformer, pour l’organisation de son livre, à l’ordre du Canon d’Avicenne : « Dans la composition du présent opuscule, que je désire nommer Collectorium, je suivrai l’ordre d’Avicenne dans son Canon32 ». Le texte se divise alors en deux parties : la première traite des maladies particulières, qu’il présente de la tête aux pieds comme dans le troisième livre du Canon, poussant la similitude jusqu’à la structurer en 22 traités correspondant aux 22 fen de l’encyclopédie ; quant à la seconde partie, traitant des maladies universelles, elle reprend explicitement « le style et l’ordre du quatrième livre du Canon ». Les justifications que donne Bertruccio à ce choix nous démontrent, une fois de plus, l’hégémonie intellectuelle et structurelle du Canon dans les écoles bolonaises dès le deuxième quart du XIVe siècle : ce n’est pas tant pour ses qualités propres qu’est choisi ce modèle, mais plutôt « pour que ce qui est dit [dans le Collectorium] soit plus rapidement et facilement comparé à ce que dit Avicenne33 ».

  • 34 Sur ce personnage, voir la notice de M. Muccillo dans le Dizionario biografico degli Italiani, Rom (...)
  • 35 Cette fen porte sur les maladies des extrémités du corps ; le commentaire de Giovanni Matteo Ferra (...)
  • 36 N. Siraisi, « Avicenna and the Teaching of Practical Medicine », Ead., Medicine and the Italian Un (...)

20L’influence du Canon et de sa structure sur la production médicale des Tre et Quattrocento est, comme on vient de le voir, souvent expliquée par les auteurs eux-mêmes en mettant en avant la commodité qu’il y a à suivre l’ordre choisi par l’ouvrage de référence de la discipline. Un autre exemple en est fourni par l’œuvre de Giovanni Matteo Ferrari da Grado, médecin professeur à l’université de Pavie mort en 147234. Celui-ci, qui est l’auteur d’un commentaire à la fen 22 du livre III du Canon, dans lequel il qualifie Avicenne de divinissimus35, est surtout connu pour le recueil de ses consilia, ces cas pratiques décrits et présentés comme exemples publiés peu après sa mort à Pavie. Or, lorsque, dès le début du XVIe siècle, les éditeurs ressentent le besoin de classer ces consilia de façon méthodique, ils le font secundum viam Avicenne (Venise, 1521) : concrètement, cela signifie que les consilia sont organisés d’abord en fonction du lieu de l’affection, de la tête aux pieds, soit l’ordre adopté dans le troisième livre du Canon, puis en suivant les parties du quatrième livre (fièvres, puis lèpre, chirurgie, etc.). Du reste, comme l’a remarqué Nancy Siraisi, l’organisation des consilia selon le plan du Canon n’est pas propre aux éditions de Ferrari da Grado, puisque l’on trouve la même présentation, avec les mêmes justifications de commodité, dès le XVe siècle dans certains manuscrits des consilia d’Antonio Cermisone († 1441) et de Bartolomeo da Montagnana († 1452)36.

  • 37 Sur Cristoforo Barzizza, voir notamment P. Kibre, « Cristoforo Barzizza : Professor of Medicine at (...)
  • 38 Nous avons consulté la version du manuscrit lat. 6993 de la Bibliothèque nationale de France (fol. (...)

21Le respect de l’organisation du Canon était donc devenu extrêmement commun en Italie. Cristoforo Barzizza, médecin de Bergame mort en 1445, en fournit un dernier et emblématique exemple37. Il est l’auteur d’un Isagoge ad curam febrium ex mente Avicenne (1430) conservé aujourd’hui dans plusieurs manuscrits38. Ce texte, qui est une sorte de catalogue ordonné des thérapies adaptées aux différents genres de fièvres, suit, comme son titre l’indique, de très près l’organisation du Canon. En effet, ses chapitres reproduisent parfaitement l’organisation de la fen 1 du livre IV du Canon, portant sur les fièvres, en commençant à partir du chapitre 34 du 2e traité. L’ensemble de l’ouvrage est, en fait, une sorte de résumé et d’explication des passages correspondants du Canon, auxquels il est du reste fréquemment fait référence dans le texte.

  • 39 Cristoforo Barzizza, Introductorium sive ianua ad opus practicum medicine (éd. Pavie, 1494), sig. (...)
  • 40 C’est le titre que l’on trouve dans le manuscrit Paris, BnF, lat. 6993, fol. 258ra : Explicit lect (...)
  • 41 Cette œuvre est indiquée par T. Pesenti, Professori e promotori di medicina nello studio di Padova (...)

22Mais, plus généralement, c’est l’ensemble de la production de Barzizza qui démontre l’influence qu’a eu le Canon sur l’écriture médicale. En effet, bien qu’il n’ait pas lui-même produit de commentaire sur l’encyclopédie, Barzizza est l’auteur d’un ouvrage de pratique médicale intitulé Liber introductorium sive janua ad opus practicum medicine destiné, selon son prologue, aux médecins débutants. Or, dans ce même prologue, l’auteur explique vouloir se conformer à la méthode d’exposition d’Avicenne, en présentant d’abord les règles universelles tirées du Canon puis les thérapies appropriées, et ce afin de permettre aux jeunes médecins de « comprendre les paroles des auteurs et surtout d’Avicenne » : il estime que son ouvrage pourra ainsi servir d’introduction au recueil de consilia de son contemporain Antonio Cermisone, qui a le premier décrit des cas pratiques ex mente Abohali, selon la manière d’Avicenne39. Même lorsqu’il commente le Liber ad Almansorem de Rāzī, Barzizza se réfère, pour la composition de son exposition, au Canon : le titre donné dans certains manuscrits à son œuvre est « Lecture sur le neuvième livre de l’Almansor éditée pour éclairer le troisième [livre du Canon] d’Avicenne, et pour l’instruction des jeunes en vue de l’acte40 ». Si l’on ajoute à cela le fait qu’une autre œuvre de Barzizza est conservée sous le titre d’Explanatio et ordinatio simplicium medicinarum secundum Canonem Avicenne (« Explication et ordination des médecines simples selon le second [livre du] Canon d’Avicenne »)41, on comprendra que le modèle du Canon semble s’imposer, chez cet auteur, sur tous les aspects de la médecine pratique.

Un modèle avicennien ?

  • 42 Danielle Jacquart a proposé plusieurs exemples d’influences ponctuelles dans son article « Lecture (...)

23Évidemment, l’influence d’Avicenne et de son Canon ne s’est pas limitée à la structuration de la discipline et aux modalités d’écriture ; le texte a eu un effet durable et fondamental sur l’ensemble de la pensée médicale de la fin de l’époque médiévale et du début de l’époque moderne. Résumer cette influence nécessiterait un ouvrage entier, mais l’on peut citer un certain nombre de points de doctrine sur lesquels le philosophe de Boukhara a profondément marqué la matière42 : séparation des domaines respectifs de la médecine et de la philosophie, rôle de l’anatomie, importance accordée à la notion de contagion, développement du concept de forme spécifique, encouragement à l’utilisation de l’alchimie ou encore mise à distance de l’astrologie – une telle liste n’étant bien sûr pas exhaustive.

  • 43 Cristoforo Barzizza, Introductorium sive ianua ad opus practicum medicine, sig. a2r : Incipit intr (...)

24Néanmoins, notre but n’était pas ici de retracer et d’identifier l’influence intellectuelle du Canon et de son auteur, mais bien de voir dans quelle mesure ce dernier avait pu servir de modèle aux médecins de la fin du Moyen Âge. Il semble donc possible, après ce rapide parcours, de dégager trois conclusions principales. En premier lieu, il est clair que la personnalité d’Avicenne n’a guère suscité qu’un intérêt limité auprès des praticiens latins. Le médecin ne pouvait sans doute pas constituer un authentique modèle, à la différence d’un Galien ou d’un Hippocrate : son œuvre restait essentiellement philosophique, et sa pratique médicale fut finalement assez peu mise en valeur. Avicenne était, avant tout, considéré comme un penseur de génie, capable de produire une synthèse brillante et parfaitement équilibrée, facile à assimiler pour des étudiants, mais guère comme un praticien – de fait, il mentionnait relativement peu de cas personnels dans son œuvre, à la différence d’autres auteurs comme Rāzī ou Galien. L’intérêt toujours grandissant, au cours des deux derniers siècles du Moyen Âge, pour l’observation concrète et les ouvrages pratiques, n’a sans doute pas joué en faveur de la promotion d’Avicenne comme modèle de médecin. Il n’est donc pas étonnant de constater que, malgré son utilisation presque systématique du Canon, un Cristoforo Barzizza soit, plutôt que « nouvel Avicenne », surnommé « autre Hippocrate » par son éditeur43.

  • 44 Elle est en effet moins complète dans d’autres centre médicaux, notamment à Paris. Voir D. Jacquar (...)
  • 45 T.S. Kuhn, The Structure of Scientific Revolutions, Chicago, University of Chicago Press, 2e éd., (...)

25En revanche, il est tout aussi clair que le Canon a servi de modèle non seulement pour écrire la médecine, mais aussi pour la penser. Dans le cas de l’Italie, où sa domination a été particulièrement forte44, il semble bien correspondre à ce que Thomas Kuhn désigne lorsqu’il évoque le rôle des manuels scientifiques, qui constituent le point d’aboutissement des accomplissements passés en exposant la théorie acceptée par tous. Constatant que de tels manuels sont, pour l’essentiel, apparus au XIXe siècle, il concède qu’ » avant que de tels livres ne deviennent courants […] certains textes scientifiques classiques ont joué un rôle semblable », citant notamment la Physique d’Aristote ou l’Almageste de Ptolémée. « Tous ces livres et bien d’autres ont longtemps servi à définir implicitement les problèmes et les méthodes légitimes d’un domaine de recherche pour des générations successives de chercheurs45 ». Nous pensons que le Canon d’Avicenne a joué un tel rôle pour la médecine italienne de la fin du Moyen Âge, et que c’est de cette manière qu’il est possible de parler de modèle avicennien : un modèle qu’il ne s’agissait pas d’égaler ou d’imiter, mais dont on cherchait, plutôt, à épouser la pensée au plus près.

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Notes

1 Bassiano Landi, Barbaromastix (éd. Venise, 1533), fol. 10v : Spero ut ex nostra Academia de Avicennae erratis iusta volumina prodeant. Sur l’usage du Canon en Italie à l’époque moderne, voir N. Siraisi, Avicenna in Renaissance Italy. The Canon and Medical Teaching in Italian Universities after 1500, Princeton, Princeton University Press, 1987.

2 Giovanni Battista da Monte, comm. Avicenne, Canon, I, 2, p. 8-9 (cité dans Siraisi, Avicenna in Renaissance Italy, p. 100) : Nam ubi medicus didicit totum artificium medendi in prima, secunda, tertia et quarta fen nihil aliud ipsi deest, quam ut dirigat studia sua ad opus in rebus particularibus quod divinus noster Avicenna fecit ; nam ubi artificium in prima, secunda, tertia et quarta fen docuit, aggreditur tertium librum, ubi docet methodum illum universalem applicare particularibus.

3 Sur le rôle du Canon dans les universités, et notamment à Bologne, voir D. Jacquart et F. Micheau, La médecine arabe et l’Occident médiéval, Paris, Maisonneuve & Larose, 1990, p. 167-203.

4 M.-T. d’Alverny, « Survivance et renaissance d’Avicenne à Venise et à Padoue », Venezia e l’Oriente fra tardo Medioevo e Rinascimento, éd. A. Pertusi, Florence, Sansoni, 1966, p. 75-102.

5 Sur les accessus et leur tradition au Moyen Âge, voir E.A. Quain, « The medieval accessus ad auctores », Traditio, 3, 1945, p. 215-264 ; R.W. Hunt, « The Introduction to the “Artes” in the Twelfth Century », Studia mediaevalia in honorem R.M. Martin O.P., Bruges, De Tempel, 1948, p. 85-112 ; et la synthèse d’A.J. Minnis, Medieval Theory of Authorship, Londres, Scholar Press, 1984, 323 p. Pour les accessus aux textes médicaux, voir R.K. French, « A Note on the Anatomical Accessus of the Middle Ages », Medical History, 23, 1979, p. 461-468, et l’article d’A. Cunningham, « The Theory/Practice of Medicine : Two Late-Alexandrian Legacies », History of Traditional Medicine, Proceedings of the 1st and 2nd International Symposia on the Comparative History of Medicine ? East and West, éd. T. Ogawa, Osaka, Division of Medical History-Taniguchi Foundation, 1986, p. 303-324.

6 Antoine de Parme, comm. Avicenne, Canon, prohemium (ms. Vatican, B.A.V., lat. 4452), fol. 1ra : Causa autem efficiens fuit Avicenna et dicitur Avicenus ab a quod est filius et vicenus pater, unde abutentes nomine dicimus Avicenna.

7 Jacques de Forlì, comm. Avicenne, Canon, prohemium (éd. Venise, 1497), s. a2r : Sciendum autem ut quidam dicunt quod penes Arabes hec nomina synonima reperiuntur scilicet abyn et abon filium importantia, unde abonaly idest filius alyabon nominativi, abyn vero genitivi casus est, unde sic sonat titulus Incipit liber primus etc. quem princeps Abonaly idest princeps filius Aly corrupte vero dicimus Aboaly. Deinde sequitur Abynceni idest filius Ceni corrupte vero dicimus Avicenna cum tamen hoc non fuerit nomen auctoris sed quod fuerit ignoro.

8 Sur ce personnage, voir T. Pesenti, « Studio dei farmaci e produzione di commenti nell’Università di arti e medicina di Padova nel primo ventennio del Trecento », Annali di Storia delle università italiane, 3, 1999, p. 61-78.

9 Jacques de Forlì, comm. Avicenne, Canon, prohemium, s. a2r : Mundinus autem super hoc passu refert se habuisse a quodam Arabe fide digno quod ista nomina abyn abon ambo sunt synonima indeclinabilia idem quod filius importantia. Mondino a effectivement commenté le premier livre du Canon dans son entier, mais le seul manuscrit qui nous est parvenu de son œuvre est incomplet et ne comporte pas son exposition à la première fen de l’ouvrage. Voir Pesenti, « Studio dei farmaci », p. 63-64.

10 Jacques de Forlì, comm. Avicenne, Canon, prohemium, s. a2r : Erit igitur sensus tituli Incipit etc. quem princeps Abolay idest filius Aly Abinceny idest filii Ceny. Mos enim antiquitus fuit ut quicunque librum componeret patris et avi nomen in titulo scriberet proprio nomine auctoris relicto.

11 Ugo Benzi, comm. Avicenne, Canon, prohemium (éd. Venise, 1498), fol. 2ra : […] de cuius laudibus alio loco dicitur a quammultis solemnibus viris, ideo pretereo.

12 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium (éd. Venise, 1520-1522), fol. 2ra : ex regia stirpe.

13 Taddeo Alderotti, comm. Avicenne, Canon, prohemium (ms. Vatican, B.A.V., lat. 2366), fol. 94ra : Videte rubricam Liber canonis primus etc. princeps Aboali Abicenni. Dixerunt quidam Avicennam fuisse regem quod utique possibile est set non credo. Non enim video reges posse vacare operibus medicine et in investigationibus que neccessaria est in medicina, sed non refert sia chio re vuole.

14 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2ra : Avicenna videtur grandis ingenii omnium mundanarum scientiarum habitu luminosus, ex regia stirpe nobilitate originis generosus, virtutum moralium omnibus operationibus gratiosus, ac suorum claritatis spirituum gaudiosus, ut sua chronica manifestat.

15 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, III, 1.1.1., fol. 1rb : Fuit enim de regia stirpe, intellectus sublimitate ; fuit enim excellentissimi intellectus ut Metaphysica sua monstrat […]. Morum composita venustate, fuit enim vir largus et ylaris ut cronica sua narrat.

16 Le texte de cette biographie est transcrit dans A. Birkenmajer, « Avicennas Vorrede zum Liber Sufficienciae und Roger Bacon », Revue néo-scolastique de philosophie, 36, 1934, p. 308320, ici p. 314-320.

17 Nous n’avons malheureusement pas pu consulter ce texte, conservé dans le ms. Clm 350 de la Bayerische Staatsbibliothek de Munich. Néanmoins, plusieurs mentions confirment que la présentation de la vie d’Avicenne conservée dans le Clm 7609 est bien de Matheolus Perusinus. En premier lieu, ce texte semble clairement tiré d’un commentaire au Canon, puisqu’il y est fait mention explicite du texte, et qu’un lemme, tiré du prologue, apparaît. Ensuite, l’auteur y cite Paolo Veneto, qu’il dit avoir rencontré à Pérouse (Paulus Venetus sua etate monarca philosophorum doctor noster Perusii mihi dixerit []) ; or, Paolo Veneto fut effectivement présent à Venise de 1424 à 1428, quand Matheolus Perusinus y enseignait la médecine. Enfin, le nom de Matheolus apparaît pour introduire un morceau de commentaire au Canon juste après la vie d’Avicenne : Non est autem bonum. Dicit Mathiolus : Audeo ergo de hoc libro primo Canonis ita dividere quod in […].

18 Matheolus Perusinus, De Avicenna (ms. Munich, B.S.B., Clm 7609), fol. 157vb : Et dicitur causa quia ut fertur ipse fuit dominus Cordube et princeps urbis eius. Dedit tamen magnam operam exercitio medicine faciendo, ut a pluribus intellexi, in sua urbe construi hospitale, habitaculum ubi innumeri ponebantur infirmi quos ipse visitabat.

19 Ibid., fol. 157vb-158ra : Homo fuit colore brunus et iocundus ut narrat Gentilis, quod patet quia pulsando et cantando librum fecit canticorum. Et ut fertur satis iuvenis mortuus est. Non enim attigit quinquagesimum annum.

20 Ibid., fol. 158ra : Longinquum enim a veritate videtur quod unus dominus urbis se practice et medicationi dederit.

21 Sur cette lettre d’Avicenne à saint Augustin, voir D’Alverny, « Survivance et renaissance », p. 84-85. Le texte y est édité, et l’origine de cette légende discutée.

22 Matheolus Perusinus, De Avicenna, (ms. Munich, B.S.B., Clm 7609), fol. 158ra : Scripsit tamen ultra medicinam in omni genere discipline et in naturalibus et mathematicis et moralibus et dialeticis. Et ita mirabiliter ut Paulus Venetus sua etate monarca philosophorum doctor noster Perusii mihi dixerit quod sextus naturalium sibi magis placebat quam liber de anima Aristotelis.

23 E. Renan, Averroès et l’averroïsme, Paris, A. Durand, 1852, p. 45.

24 Voir C. Malagola (éd.), Statuti delle Università dei Collegi dello Studio bolognese, Bologne, Zanichelli, 1888, p. 276-277.

25 Nous nous permettons de renvoyer à notre doctorat La réception du Canon d’Avicenne. Médecine arabe et milieu universitaire en Italie avant la Peste noire, Paris, École Pratique des Hautes Études, 2007.

26 Il s’agit sans doute de l’Introductio sive medicus, texte pseudo-galénique.

27 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2rb : Nullus ante Avicenna unum librum principiorum medicine sic perfectum composuit, sicut et liber primus Canonis Avicenne, ut apparet per auctores preteritos discurrenti sicut discurrit Halyabbas primo Theorice dispositionis regalis. Galenus enim de quo magis creditur librum unum non fecit sic complete medicine principia singula comprehendentem, sed perfectam principiorum scientiam per multa sparsit volumina, ita ut idem frequenter cogatur replicare. Mirabile autem tantum opus ostendit, primo quantitas commendabilis qua scholaris audita non terretur. Secundo copiositas laudabilis que ad eius studium adducitur. Tertio ordinabilitas memorialis qua ad scientie habitum adaptatur. Eius quantitatem commendabilem ostendit quorumdam libellorum introductoriorum in medicina obscura brevitas, ut apparet de introductoriis Rasis et Iohannitii, aliorum etiam tediosa prolixitas sicut apparet in libro Galeni ; ex quibus scientia principiorum completa accipitur magis quam ex libro Galeni qui dicitur Introductorius medicorum. Eius copiositate laudabilem ostendit principiorum omnium medicine in hac perfecta traditio, quod in libro qui Thegni dicitur non ponitur, ut apparet his qui horum verborum scientias inspexerunt vel librorum scientias. Eius vero ordinem memorialem ostendit partium libri debita ordinatio, ex qua quis potest totum primum Canonem memorie commendare. Ordo autem causa est facilis memorationis ut Aristotelis in libro De memoria et reminiscentia.

28 Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2va : Hic multi inutiliter prolongant dicentes : videtur quod scientia quarti libri precedat scientia tertii libri, quia liber quartus est de communibus egritudinibus et non appropriatis uni membro, sed scientia de egritudinibus communibus precedit scientiam de egritudinibus propriis. […] Considerandum quod liber Antidotarii potuisset locari post secundum librum, sicut in hoc modo processit Averrois 5 Colliget et Mesue.

29 Antoine de Parme, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol.1rb ; Gentile da Foligno, comm. Avicenne, Canon, prohemium, fol. 2va.

30 Sur ce maître, jusqu’ici peu étudié, voir la notice de M. Crespi dans Dizionario biografico degli Italiani, Rome, Istituto della Enciclopedia Italiana, 1967, vol. 9, p. 651-652.

31 Niccolò Bertruccio, Collectorium (éd. Lyon, 1509), fol. 1ra.

32 Ibid. : In collectione autem presentis opusculi, quod Collectorium nuncupare desidero, ordinem Avicenne in suo libro Canonis observavo.

33 Ibid., fol. 1ra-b : Faciam namque ex ipso duos libros generales. In quorum primo loquar de egritudinibus particularibus que sunt a vertice capitis usque ad plantam pedis, ipsum in tractatus XXII dividens more tertii Canonis eiusdem, ita ut post tractatus istius prime fen illius et secundus secunde, et sic deinceps plurimum correspondeant, ut hic dicta promptius et facilius dictis Avicenne comprobentur. In secundo libro loquar de egritudinibus universalibus stilo et ordine quarti Canonis observatis […].

34 Sur ce personnage, voir la notice de M. Muccillo dans le Dizionario biografico degli Italiani, Rome, Istituto della Enciclopedia Italiana, 1996, vol. 46, p. 672-675, ainsi que H.M. Ferrari, Une chaire de médecine au XVe siècle. Un professeur à luniversité de Pavie de 1432 à 1472, Paris, F. Alcan, 1899.

35 Cette fen porte sur les maladies des extrémités du corps ; le commentaire de Giovanni Matteo Ferrari da Grado est dédicacé à Francesco Sforza, duc de Milan. Nous utilisons l’édition parue à Milan en 1494.

36 N. Siraisi, « Avicenna and the Teaching of Practical Medicine », Ead., Medicine and the Italian Universities 1250-1600, Leyde-Boston-Cologne, Brill, p. 63-78, ici p. 72-77. Sur l’organisation des recueils de consilia selon le modèle du Canon d’Avicenne, voir les remarques éclairantes de J. Agrimi et C. Crisciani, Les consilia médicaux, Turnhout, Brepols (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 69), 1994, p. 69-74.

37 Sur Cristoforo Barzizza, voir notamment P. Kibre, « Cristoforo Barzizza : Professor of Medicine at Padua », Bulletin of the History of Medicine, 11/4, 1942, p. 389-399.

38 Nous avons consulté la version du manuscrit lat. 6993 de la Bibliothèque nationale de France (fol. 260ra-269ra, inc. : In colerica interpolata pura sunt intentiones. Prima est administratio […]).

39 Cristoforo Barzizza, Introductorium sive ianua ad opus practicum medicine (éd. Pavie, 1494), sig. a2r : Antonius Cermesonus nostro tempore primus ex mente Abohali aperuit casum in terminis sicut enim ipse more iuris consultorum appellat designare. Cuius vestigia imitamur […]. Quibus postea annexi canones universales in illis intentionibus observandos pluribus locis ab Abohali collectos cum textus assignatione prout quelibet illarum intentionum sibi appropriat et exigit. Subiunxi deinde canones usui instrumentorum medicinalium immediatos cum quibusdam regulis dosim medicinarum simplicium inter se equilibrandi. Hec omnia quasi ianuam quandam ad medicine opus practicum pro iunioribus ex auctorum mentibus collegi que puto non parvam utilitatem collatura. Si enim bene intellecta fuerint et diu animo et cogitatione versata magnum additum prestabunt ad intelligendos sermones auctorum et presertim Avicenne.

40 C’est le titre que l’on trouve dans le manuscrit Paris, BnF, lat. 6993, fol. 258ra : Explicit lectura super nono Almansoris per Christophorum Barzizium edita ad dilucidationem 3ii Avicenne et instructionem iuvenum ad opus practicum etc. L’œuvre occupe les fol. 32ra-258ra.

41 Cette œuvre est indiquée par T. Pesenti, Professori e promotori di medicina nello studio di Padova dal 1405 al 1509. Repertorio bio-bibliografico, Padoue, Lint, 1984, p. 47-48. Elle est datée de 1442 et est conservée dans le manuscrit de la Bayerische Staatsbibliothek de Munich Clm 205, fol. 167r-171v (Inc. : Abethel, abortanum). Il s’agit, selon l’explicit du texte, d’un glossaire de noms des simples suivant l’ordre d’Avicenne et intégrant les informations issues des Synonyma de Simon de Gênes.

42 Danielle Jacquart a proposé plusieurs exemples d’influences ponctuelles dans son article « Lectures universitaires du Canon d’Avicenne », Avicenna and His Heritage, éd. J. Janssens et D. De Smet, Louvain, 2002, p. 313-324.

43 Cristoforo Barzizza, Introductorium sive ianua ad opus practicum medicine, sig. a2r : Incipit introductorium sive ianua ad opus praticum medicine compillatum per eximium artium et medicine monarcham magistrum Christoforum de Barziziis de Pergamo alterum Ipocratum.

44 Elle est en effet moins complète dans d’autres centre médicaux, notamment à Paris. Voir D. Jacquart, La médecine médiévale dans le cadre parisien, Paris, Fayard, 1998.

45 T.S. Kuhn, The Structure of Scientific Revolutions, Chicago, University of Chicago Press, 2e éd., 1970 (trad. fr. Paris, Flammarion, 1983, p. 29).

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Pour citer cet article

Référence papier

Joël Chandelier, « Avicenne fut-il un modèle pour les médecins italiens de la fin du Moyen Âge ? »Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 27 | 2014, 21-38.

Référence électronique

Joël Chandelier, « Avicenne fut-il un modèle pour les médecins italiens de la fin du Moyen Âge ? »Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 27 | 2014, mis en ligne le 30 décembre 2017, consulté le 13 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/13430 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.13430

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Auteur

Joël Chandelier

Université Paris 8

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