Navigation – Plan du site

AccueilNuméros26Le Purgatoire de saint Patrick : ...La justice immanente du Purgatoir...

Le Purgatoire de saint Patrick : entre justice humaine et justice divine

La justice immanente du Purgatoire : les versions imprimées du Purgatoire Saint Patrice entre catéchèse populaire et speculum de chevalerie

Martina Di Febo
p. 229-240

Résumés

Les récits consacrés au Purgatoire de Saint Patrice ont connu un succès durable dans tout le domaine de la Romania médiévale. En France, à Paris, pendant les XVe-XVIe siècles, parurent plusieurs éditions imprimées de la version en prose la plus courante en ancien français. A Lyon, en revanche, fut imprimée une nouvelle traduction du texte latin. Les éditions imprimées confirment la double fonction des récits du Purgatoire, en s’appuyant sur le caractère immanent de ses peines : catéchèse populaire, renforcée par le biais de l’imprimerie ; speculum de chevalerie aboutissant à une dernière tentative d’auto-contrôle et de moralisation

Haut de page

Texte intégral

  • 1 Les Versions en prose en ancien français du Purgatoire de Saint Patrice, éd. M. Di Febo, Paris, Ch (...)
  • 2 Sur la diffusion et l’enracinement de cette pratique dans la religiosité quotidienne des XIVe-XVe (...)
  • 3 Acta Sanctorum, Martii, II, 588-590 ; H. Delehaye, « Le pèlerinage de Laurent de Paszthou au Purga (...)
  • 4 Andrea da Barberino, Il Guerrin Meschino edizione critica secondo l’antica vulgata fiorentina, éd. (...)

1Parmi les versions en ancien français en vers et en prose du Purgatoire de Saint Patrice, la rédaction en prose la plus répandue – classée a dans notre édition1 -composée au début du XIIIe siècle est à la base des éditions imprimées des XVe-XVIe siècles, in-4° et in-8°. L’affirmation de la liturgie et de la ritualité du Purgatoire, avec ses ex-voto2 et ses messes de suffrage, constitue l’arrière-plan de la circulation des textes publiés par des imprimeurs commerciaux parisiens. En outre, la période, de parution des éditions françaises, 1490-1548, coïncide avec la première intervention papale contre le Purgatoire de Saint Patrice : en 1494 un prêtre envoyé par le pape Alexandre VI visite la fosse irlandaise et dénonce la tromperie des chanoines qui y résident3. Ses déclarations conduiront le Pape, en 1497, à faire fermer la fosse du Purgatoire. Pourtant les pèlerins ont continué à visiter l’Île Sainte. Un interdit papal peut difficilement effacer un rite si profondément enraciné dans la religiosité populaire, d’autant plus que ce rite est accompagné, dès sa constitution, par un récit à forte allure mythique et initiatique. C’est pourquoi, dans un roman italien du XIVe siècle, Guerrin Meschino, composé par Andrea di Barberino4, la descente au Purgatoire de Saint Patrice constitue un épisode charnière fondamental pour l’accomplissement du parcours héroïque.

2Dans ce cadre, l’on comprend le succès que les récits du Purgatoire ont connu pendant des siècles. Un succès durable qui relève à la fois de la propagande et d’une urgence eschatologique, de plus en plus pressante en temps d’incertitude et de Danses macabres. Les récits tardifs du Purgatoire reflètent cette situation d’une manière différente, si bien que l’on peut les ranger entre « bréviaires » et « commentaires » : les uns sont des narrations linéaires synthétiques qui décrivent les peines et qui s’avèrent un outil cardinal pour la catéchèse du Purgatoire ; les autres sont des récits marqués d’abord par l’appropriation subjective de l’expérience du voyage dans l’au-delà ; ensuite par l’amplificatio rhétorique et l’accentuation des aspects horrifiques soulignant la précarité de l’homme face à son destin éternel.

  • 5 H. de Saltrey, Tractatus de purgatorio sancti Patricii, éd. K. Warnke, Das Buch vom Espurgatoire S (...)
  • 6 Iacopo da Varrazze, Legenda aurea, éd. G.P. Maggioni, Florence, 1998, chap. L.

3Dès sa première parution (fin XIIe siècle)5, le récit du Purgatoire visait à reconduire sur la Terre la possibilité d’expier les péchés et d’anticiper la justice de l’au-delà. Cependant, il faudra attendre un siècle et demi avant de lire des relations de voyage, composées par d’autres chevaliers-pèlerins. La descente d’Owein, le chevalier irlandais protagoniste du Tractatus, se fixa d’abord dans une narration exemplaire qui empêcha l’appropriation de son aventure. Les premières traductions en ancien français, en vers et en prose, furent à peu près des fidèles transpositions de la visite d’Owein. Le caractère exemplaire du récit façonna la première version en prose qui fut accueillie, et pour cause, dans des légendiers, la descente au Purgatoire partageait la même fonction hagiographique que la Navigation de Saint Brendan. Jacques da Varazze confirmera cette démarche : dans la Legenda aurea6, la vie de Saint Patrice ressort des motifs tirés des anciennes vies latines de Saint Patrice et insérés dans la structure narrative du Tractatus de purgatorio sancti Patricii. Pourtant le frère de Varazze relate la descente d’un autre pèlerin, Nicolaus : la voie vers la subjectivation de l’expérience de l’au-delà était ouverte et, par là, la possibilité de lancer un véritable pèlerinage au Purgatoire. Le texte du frère da Varazze constitue, en fait, la clef de voûte de la double fonction qui marquera les récits du Purgatoire : d’un côté une tentative d’ancrer la justice éternelle dans l’immanence pour que le visiteur, en expiant en vie ses péchés, se tienne pur jusqu’à sa mort ; de l’autre côté, la volonté de fonder pour le grand public une catéchèse du Purgatoire par le biais d’une histoire exemplaire. Les pèlerins qui rejoindront physiquement le Purgatoire se reconnaîtront dans les contes des prédécesseurs, en y retrouvant des modèles de moralité et de courage, les lecteurs ou les auditeurs qui écouteront les récits du Purgatoire de Saint Patrice développeront un sentiment pieux qui les amènera à bien se conduire de leur vivant.

  • 7 Pour une première enquête sur les voyageurs du XIVe siècle et leurs récits, en latin et en langues (...)
  • 8 T. Rymer, Foedera, Conventiones, Literae et cujuscunque generis Acta Publica inter Reges Angliae e (...)

4L’étude de la tradition manuscrite de la version en prose a donne un aperçu des dynamiques de la réécriture et de la réception. La dimension exemplaire du récit est confirmée tout au long du XIVe siècle, lorsque la descente au Purgatoire sort des légendiers pour figurer, en tant que conte autonome, parmi d’autres récits édifiants dans des recueils pieux. Le récit du Purgatoire perd sa valeur hagiographique pour stimuler l’émulation par l’expérience. En même temps, d’autres pèlerins rejoindront l’Irlande pour visiter le Purgatoire7. Leurs voyages nous sont consignés par des relations soit en latin soit en langue vulgaire qui renouvellent en profondeur le Tractatus et qui confirment à la fois le choix subjectif de l’épreuve et son inclination au « commentaire ». À partir du XIVe siècle un pèlerinage chevaleresque s’affirme, tout comme le montrent plusieurs autorisations scellées par la couronne anglaise8 : de nombreux pécheurs ont cherché à anticiper leur jugement supraterrestre.

5Les versions imprimées des XVe-XVIe siècles semblent prolonger la double voie qui caractérise le récit du Purgatoire : d’un côté, l’exemplarité du voyage d’Owein, à la base d’une réflexion personnelle sur l’âpreté des peines de l’au-delà et, par conséquent, sur la nécessité de bien agir pendant sa vie ; de l’autre côté, la possibilité de partir en Irlande pour se confronter, de son vivant, à l’épreuve du Purgatoire.

6On peut donc ranger les éditions parisiennes parmi les récits exemplaires, tandis que l’édition lyonnaise rentre dans le sillon du récit de voyage.

  • 9 Catalogue général des incunables des bibliothèques publiques de France, publ. par M. Pellechet et (...)
  • 10 Catalogues régionaux des incunables des bibliothèques publiques de France, vol. VI, Bibliothèque M (...)
  • 11 W. A. Copinger, Supplement to Hain’s Repertorium Bibliographicum, Londres, H. Sotheran, 1902 [réim (...)
  • 12 Les éditions de Jean Trepperel sont très souvent dépourvues de datation. D’après Reichling cette é (...)

7Les versions imprimées à Paris parurent dans les années 1490-1548. L’incunable du Purgatoire Saint Patrice, datant de 1490 ca. fut imprimé par Pierre Le Rouge9, premier imprimeur du roi Charles VIII. Les éditions successives parues chez Antoine Caillaut (ca.1496)10 et Jean Trepperel11 (ca. 1492-1499)12 sont des copies de la première. Cette rédaction n’est que l’édition de la version en prose la plus ancienne, que nous avons appelée a. Ces trois premières éditions sont toutes in 4° ; les éditions des années 1530-1548, en revanche, sont in 8°.

Les éditions parisiennes

  • 13 J. G. Th. Graesse, Trésor des livres rares..., t. V, p. 511 ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire... (...)
  • 14 Milan, Biblioteca Trivulziana, Mor. M 265.
  • 15 R. Duclos, Dictionnaire bibliographique., t. III, p. 410 ; J. G. Th. Graesse, Trésor des livres ra (...)

8Aux éditions Le Rouge, Caillaut, Trepperel de la fin du XVe siècle, suivirent deux éditions chez Alain Lotrian (1527 et 1530)13 ; une édition anonyme conservée dans la Biblioteca Trivulziana de Milan14, dont les répertoires des livres anciens ne donnent aucune notice ; une dernière édition imprimée par Jeans Bonfons en 154815.

  • 16 La copie conservée dans la Bibliothèque de Sainte Geneviève a été insérée dans un recueil de texte (...)
  • 17 Sur Antoine Caillaut, voir Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens, libraires, fondeurs (...)
  • 18 Sur le premier feuillet recto, on trouve la marque typographique de Jean Trepperel : l’écu de Fran (...)
  • 19 Trois gravures en bois ornaient l’édition de Lotrian 1527 ; malheureusement n’a été conservée que (...)
  • 20 L’enseigne et l’adresse correspondent à la typographie de Jean Trepperel qui avait déménagé en Rue (...)
  • 21 L’appart iconographique de Triv rappelle l’édition Lotrian de 1530, à l’exception de la gravure fi (...)
  • 22 Sur Jean Bonfons voir Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens., p. 42. Les gravures sont (...)

Le Purgatoire Sainct Patrice, par Pierre Le Rouge, in 4°, goth., fol. 16, aii-aiii-bi- biiii, ci-ciii (ca. 1490)16.
Le Purgatoire Sainct Patrice, par Antoine Caillaut17, in 4°, goth., fol. 16, aii-aiii, bi-biiii (ca. 1496).
Le Purgatoire Sainct Patrice, par Jean Trepperel18, in 4°, goth. 99, fol. 14, aii-aiiii, bi-biii (le dernier feuillet manque) (ca. 1492-1499).
Le Purgatoire Sainct Patrice, par Alain Lotrian19, in 8°, goth., fol. 14, aii-aiiii, bi-biiii (dans le deuxième cahier, le dernier feuillet manque) (ca.1527). Après l’explicit du récit du Purgatoire, l’imprimeur-compilateur a inséré l’antienne et oraison de monsieur Sainct Patrice en latin. On la retrouve aussi dans les éditions successives (Lotrian 2, Trivulziana, Bonfons). Le colophon nous renseigne sur le lieu d’impression : Cy fine le livre intitule le Purgatoire Sainct Patrice. Nouvellement imprime a Paris en la rue neufue Nostre Dame a l’einseigne de l’escu de France20.
Le Purgatoire Sainct Patrice, in 8°, goth., B12, fol. 16 (Trivulziana)21, aii-aiiii, bi-biiii. Sans date ni lieu d’impression.
Le Purgatoire Sainct Patrice, par Jean Bonfons22, in 8°, goth., fol. 16, aii- aiiii, ci-ciiii, di-diiii. Colophon : imprimé a Paris par Jehan Bonfons a l’enseigne Saint Nicolas.

Nous avons classé les éditions parisiennes d’après le tableau suivant :

Ler (Lerouge)
Ca (Caillaut) ;
Tr (Trepperel) ;
Lo 1(Lotrian 1527) ;
Lo 2 (Lotrian 1530) ;
Triv (Trivulziana) ;
Bon (Bonfons).

  • 23 Dans le Tractatus et par conséquent dans la version en prose a, lorsque Jésus Christ montre à Sain (...)

9Par rapport à sa source, l’incunable parisien est très conservateur, il n’efface que le don du baston Jhesu23 et l’épisode du vieux prieur visité par les anges, tandis que l’homélie et le témoignage conclusif de Gilbert, le moine qui avait vécu avec Owein, sont reproduits. Le Rouge commet pourtant des fautes et des lacunes qui seront conservées par les copies successives. Caillaut et Trepperel sont peu soignées en comparaison de Le Rouge : les espaces blancs destinés aux majuscules sont restés vides, tandis que dans l’édition Ler des lettrines rouges marquent le début de chaque paragraphe. L’édition Caillaut découle directement de Le Rouge ; l’édition Trepperel présente des innovations et des fautes.

Et par la douceur des joies [a]
Et par la doulceur des joyes [Ler, aiir ; Ca, aiir]
Et par la douleur des joyes [Tr aiir]
Et luy qui par maintes fois avoit este armé hardi harnois de foy et de la robbe de justice se com [Ler, fol.5r ; Ca aiiiv]
Et luy qui par maintes fois avoit este armé pour plus hardiment combatre a l’encontre des dyables. Ses armeures estoient de foy et la robe de justice. Si se recomanda aus orasions des bonnes gens [Tr, aiiiir]

10La rédaction commune est assurée par la présence de fautes conjonctives. Au niveau de la filiation généalogique, il est sûr que la version Lotrian 1 (Lo 1) dérive de Ler-Ca, nonobstant l’imprimeur Alain Lotrian succéda à Jean Trepperel.

11Parmi les erreurs, il faut classer des innovations qui peut-être découlent d’une incompréhension de la syntaxe et des locutions de l’ancien français, mais qui relèvent aussi des changements au plan anthropologique et culturel.

12La centralité de la subjectivité du chevalier-pèlerin fonde l’expérience de l’au-delà.

Apres ceste noise qi si fu hisdeuse vint l’orible vision des deables [a]
Apres ceste noise que fut si hideuse il vit l’orible vision des diables. [Ler, fol. 6v ; Ca, fol. 6r ; Tr, fol. 5r ; Lo1, fol. 5r]

13La vision des démons est totalement reconduite aux sens du sujet : il voit les démons, alors que dans la version en ancien français, la vision de démons affichant l’objectivité de l’événement extérieur vint.

14Le texte de l’incunable et de ses descendants reflète d’ailleurs les transformations historiques concernant la liturgie et les rituels d’accès à la fosse irlandaise.

15L’irrévérence profanatoire des démons se montre par la parodie de la génuflexion, tout en se substituant aux grimaces injurieuses du texte latin et des versions en ancien français. Lorsque le chevalier rencontre les diables, ceux-ci le raillent, mais la gestualité du texte imprimé se lie par inversion sarcastiques aux gestes liturgiques qui, au tournant des XVe-XVIe siècles, sont en train de changer.

Le saluoient en gabant et en reschignant [a]
Se le saluerent en s’agenouillant et en ce mocquant [Ler, fol. 6v ; Ca, fol. 6r ; Tr, fol. 5r]
Si le saluerent en s’agenouillant, en mocquant [Lo1, fol. 5r]

  • 24 M. Righetti, Storia liturgica, Milan, Ancora, 1959-1964, 4 vol., t. I, p. 389-390.
  • 25 Math., XXVII, 29 : Et genu flexo ante eum, illudebant ei, dicentes : « Ave rex Iudaeorum ».

16C’est au XVIe siècle que la génuflexion devant le tabernacle s’impose en tant que signe de révérence24, tout en se substituant à l’inclination de la tête codifiée pendant le Moyen Âge, puisque la génuflexion rappelait la désacralisation de Jésus25.

  • 26 Dictionnaire du Moyen Français ; DMF (version en ligne : atilf.atilf.fr/dmf), ordonner, article 8, (...)

17Il faut enregistrer, en outre, la substitution du verbe communier, désignant le sacrément de l’eucharistie, avec ordonner pendant les rituels d’admission au Purgatoire. Ordonner renvoie à la liturgie funèbre, étant donné qu’il indique le sacrement de l’eucharistie donné aux mourants26.

S’acomenie et prent l’eve beneoite. [a]
Est ordonne, il prent de l’eave beniste. [Ler, aiiiv ; Ca-Tr, aiiir ; Lo1, aiiv]

  • 27 A. Jenroy-A. Vigneaux, Voyage au Purgatoire de St. Patrice, Toulouse, Privat, 1903, p. 4-53, p. 20 (...)
  • 28 L. L. Hammerich, Visiones Georgii, Copenhagen, Høst, 1931, p. 94 : Item completis XV diebus huiusm (...)
  • 29 En ce qui concerne la vocation populaire des typographies Caillaut et Trepperel, voir H.-J. Martin (...)

18La descente dans l’au-delà présumait dès lors l’anticipation des rituels funèbres afin de ramener la justice divine dans l’immanence par le biais d’une mort apparente. D’autres récits de voyage au Purgatoire datant du XIVe siècle affichent la même attitude : les obsèques constituent la liturgie préliminaire qui prépare le pèlerin, tout comme en témoignent le Viatgi al Purgatori sainct Patrice de Raimon de Perelhos27 et les Visiones Georgii28 du chevalier hongrois George de Krissaphan. La rédaction diffusée par l’imprimerie prolongeait le caractère exemplaire qui déjà marquait la version a. C’était la forme « bréviaire » qui assurait le succès du récit du Purgatoire : un viaticum pour le fidèle et pour sa conduite terrestre. La marque populaire des éditions parisiennes29 est confirmée par la simplification des tournures syntaxiques et stylistiques des imprimés du XVIe siècle : Lo1-2 ; Triv ; Bon.

19Les éditions de Alain Lotrian découlent de Ler-Ca, étant donné qu’elles ne conservent pas les leçons différentes de Tr.

Et sainct Patrice fist metre en escript tout ce qu’il fasoient [Lo1, aiir)]
Et sainct Patrice fist metre en escript tout ce qu’il fasoient [Ler –Ca, aiiv]
Et sainct Patrice fist metre en escript tout ce qu’il disoient [Tr, aiiv]
Luy qui mainteffoys avoit este armé, combatit aux dyables arme de harnouys de foy et de la robbe de iustice [Lo1 (aiiiir)]
Et luy qui par maintes fois avoit este armé hardiment combattre aux dyables armé du harnois de foy et de la robbe de iustice se commanda aux oraisons de bonnes gens [Ler, fol. 4v-5r ; Ca, aiiiir]
Et luy qui par maintes fois avoit este armé, pour plus hardiment combatre a l’encontre des dyables. Ses armeures estoient de foy et la robe de iustice. [Tr, aiiiir]

  • 30 Dorénavant nous citons le texte de Lo 1, car les autres copies ne varient pas.

20Les éditions successives à Lo1 sont des copies fidèles30.

21La simplification accomplie par Lo 1, amène à la suppression des couples d’adjectifs.

Un fleuve moult long, moult large, fort puant [Ler, fol. 11r ; Ca, biir ; Tr, fol. 8v]
Un fleuve moult puant [Lo1,bir]

L’abaissement stylistique engendre des fautes.

Gaste terre [Ler, bir ; Ca, fol. 6v ; Tr, fol. 6r]
Basse terre [Lo1, fol. 6r].

Les lacunes, en revanche, relèvent de la double exigence de la standardisation linguistique et de l’effacement des éléments rhétoriques.

Les aultres n’y avoient que ung une seulle main ou deux. Toutes ces gens crioient ensemble et plouroient moult angoisseusement [Ler, fol. 10v ; Ca-Tr, fol. 8v]
Les aultres n’y avoient que ung pied et les aultres une main et plourorient moult angoisseusement [Lo1, fol. 8v]

22On passe de l’emphase au degré zéro de la rhétorique : la forme « bréviaire » entraîne une catéchèse de la pénitence qui doit atteindre le plus grand nombre de fidèles. Les éditions du XVIe siècle confirment, donc, la vocation populaire de la légende de saint Patrice.

L’édition lyonnaise

  • 31 J. G. Th Graesse, Trésor des livres rares., t. VII, p. 410 ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire...,(...)
  • 32 Dans le texte des Visiones Georgii, on retrouve la description d’un rituel d’admission au Purgatoi (...)
  • 33 Sur Claude Nourry voir H. Baudrier, Bibliographie lyonnaise. Recherches sur les imprimeurs, librai (...)
  • 34 Harvard University, Cambridge, Massachussets, NP 0139266 ; cf. The National Union Catalogue, Manse (...)
  • 35 J. Ch. Brunet, Manuel du libraire..., t. V, n.° 1378. Nous n’avons pas localisé d’autres exemplair (...)

23Le voyage du puys Sainct Patrix auquel lieu on voit les peines de purgatoire et aussi les ioyes de paradis31, in 4°, goth. fol. 12 ; aii, aiii, bii, biii, cii, ciii. Sur le premier feuillet recto, une lettrine fleurie orne le titre, tandis que sur le verso une gravure en bois représente deux moines accueillant un chevalier-pèlerin qui est en train de s’enlever son manteau ; l’un des moines lui offre une tunique blanche32. Des lettrines fleuries marquent le début de chaque paragraphe, des gravures en bois représentant les peines et les tourments du Purgatoire jalonnent le récit. Le colophon nous renseigne sur le lieu et la date d’édition : Cy finist le voyage du puys Sainct Patrix, imprimé a Lyon sur le Rosne par Claude Nourry, l’an mil cinq cens et six, le xx iour d’octobre33. En 1839, Venant et Giraud réimpriment l’édition de Nourry en tirage limité sur vélin. En 1867, Philomneste Jr. donne une réimpression du même texte34. D’après Brunet35 il y a eu d’autres réimpressions par des imprimeries parisiennes tout au long du XVIe siècle.

  • 36 Les innovations pertinentes de a sont la réduction du nombre des messagers de l’au-delà de quinze (...)
  • 37 Ly décrit des peines absentes dans le Tractatus.

24La sigle Ly désigne l’édition lyonnaise. Ly est une libre adaptation du texte latin du Tractatus : elle ne conserve pas les innovations rédactionnelles de a36. On peut classer Ly parmi les récits « commentaire » : le compilateur transforme la structure rédactionnelle37 et renouvelle en profondeur les données anthropologiques et psychologiques qui régissent le voyage au Purgatoire.

25D’abord, les épisodes relatant la prédication de Saint Patrice et la révélation de la fosse sont effacés : le récit démarre sur le choix d’un chevalier d’Aleimagne de visiter le Purgatoire, au temps du roi Etienne. La recherche d’une justice divine sur la Terre nourrit la motivation subjective par l’errance à travers les pays d’Europe jusqu’en Irlande.

Il fut au temps du roy Estienne ung noble chevalier, lequel estoit appelle Oben et estoit natif des parties d’Alemaigne. Ung iuor luy estant en contemplation, considerant en soymesmes que en cestuy monde ne sont que toutes miserabletez, se mist en couraige d’aller visiter le puys Sainct Patrix, auquel sont veuez les peines de Purgatoire et aussi les ioyes de Paradis. [Ly, aiir]

  • 38 Owein, le chevalier irlandais, Nicolaus, le protagoniste du conte de Jacopo da Varazze, George Kri (...)
  • 39 Raimon de Perelhos, Voyage au Purgatoire, éd. cit., p. 4.
  • 40 Ly, bv, biir.

26Il ne s’agit plus de s’engager dans un parcours d’expiation de ses propres péchés après la confession, mais d’accomplir un pèlerinage après une réflexion sur les misères humaines. Jusque-là le pèlerin choisissait la pénitence du Purgatoire parce qu’il était repenti et qu’il avait pris conscience de ses crimes38, pour le chevalier d’Aleimagne, en revanche, le voyage dans l’au-delà ressort d’une pulsion cognitive et existentielle qui l’amènera à rejeter tous ses biens pour se cloîtrer avant sa mort. On peut retracer les antécédents de cette pulsion dans la curiosité affichée par le vicomte Raimon de Perelhos, qui était parti en Irlande, poussé par le désir de voir « causas estranhas et meravilhas »39, lui aussi lancé dans une recherche gnoséologique qui débouchera sur l’amendement et l’édification du protagoniste. L’idée centrale est bien sûr celle du voyage entraînant l’action corporelle et physique du protagoniste, si bien que le corps devient la mesure de l’univers supraterrestre. Les diables doivent tenir fermement le chevalier pour que le vent ne le repousse pas40. Pour sauver le corps du pèlerin, les diables offrent leur aide et leur conseil :

Adonc le chevalier creut le conseil des dyables et se mist entremy de eulx, l’ung le prist par une main l’aultre par l’aultre e commencerent a cheminer sur le pont. [Ly, ciir].

  • 41 Tractatus, éd. Warnke, p. 112 : Qui cum eo loquentes primo benedixerunt Deum, qui tanta con stanti (...)

27C’est l’élection du chevalier-pèlerin qui est remise en cause : il lui faut l’aide des démons, alors que dans les versions précédentes Owein montrait sa force et sa fermeté en refusant résolument de se confier aux diables. La précarité du visiteur de l’au-delà sera confirmée par l’accueil des deux archevêques, Enoch et Elie, aux seuils du Paradis : à la différence de la tradition du Tractatus, dans laquelle le chevalier est toujours béni pour sa constance et son courage41, ils s’étonnent de le voir sain et sauf.

Deux archevesques le prindrent par les mains et luy vont monstrer le pays ou il estoit logié en luy demandant comment il avoit peu passer et resister aux temptations des dyables. [Ly, ciiir]

28La fragilité du pèlerin entraîne une accentuation démonstrative de la cruauté des démons qui s’acharnent contre les corps des pécheurs, hommes, femmes, personnes. On annonce par là la fragmentation et les excès des enfers baroques.

  • 42 La peine des serpents rappelle le châtiment réservé dans la Vision de Tondale aux luxurieux : Visi (...)

Les dyables couroient et saultoyent par dessus les pouvres creatures et avoient chaussez gros soulliers de fer, lesquels estoient tous clavelez par dessoubz des grosses et merveilleuses pointes. [...] Aulcuns des dyables tenoyent grans et merveilleuses pointes de fer et les boutoyent par telle fierte parmy la plante des piedz des personnes qu’elles penetroyent iusques au cuer. [Ly, biiiv]
Les ungs avoient grans et merveilleux serpens qui leurs entroyent parmi la bouche et sailloient par les flans et coustes et n’avoient les pouvres creatures nul refuge, mais sans cesser estoient en grans et merveilleux tormens et ne cessoient de plourer, cryer et brayre nuyt et jour. [Ly, biiv]42.

29Dans cet univers terrifiant les bruits sont amplifiés et assourdissants, mais aussi les odeurs suaves du Paradis seront enivrantes.

30La description du Paradis terrestre est très abrégée par rapport à la source latine : le récit « commentaire » vise à terroriser le pèlerin afin qu’il ne s’adonne plus aux plaisirs du monde. Et même si Ly ne conserve pas l’homélie de a mettant en garde contre le « charnel delit », la conclusion confirme l’intention d’empêcher le pénitent de pécher à nouveau. Tout comme Nicolaus, le chevalier d’Aleimagne mourra peu de temps après sa sortie du Purgatoire et son âme montera sûrement aux cieux.

  • 43 Juan Perez de Montalban, Vida y Purgatorio de San Patricio, éd. M. Profeti, Pise, Università di Pi (...)
  • 44 Le récit du Purgatoire dans la trame romanesque du Guerin Meschino accomplit la même fonction : Gu (...)
  • 45 Tirso de Molina, Don Giovanni. Il beffatore di Siviglia, éd. A. D’Agostino, Milan, BUR, 2011.

31Dans ce sillon se développeront les récits baroques du Purgatoire : Juan Perez de Montalban transformera le simple parcours de pénitence du chevalier Owein en narration complexe, dont le protagoniste Ludovico Enio est un pécheur invétéré qui accomplira sa descente dans l’au-delà pour choisir au retour de s’enfermer dans le monastère irlandais de Saint Patrice43. Si le récit « bréviaire » fondait son succès sur l’exemplarité, tout en constituant le modèle d’une réflexion pieuse pour l’édification des couches les plus populaires ; le récit « commentaire » devait amadouer des chevaliers homicides et libertins44, dont la seule voie pour s’assurer la santé éternelle était le couvent. Montalban essayera in extremis de moraliser la chevalerie, avant que Don Juan45, avatar de Ludovico, ne refuse résolument de se repentir. Il ne lui reste que la voie des enfers.

Haut de page

Notes

1 Les Versions en prose en ancien français du Purgatoire de Saint Patrice, éd. M. Di Febo, Paris, Champion (CFMA), sous presse.

2 Sur la diffusion et l’enracinement de cette pratique dans la religiosité quotidienne des XIVe-XVe siècles, voir M. Vovelle, La Mort en occident de 1300 à nos jours, Paris, Gallimard, 1983.

3 Acta Sanctorum, Martii, II, 588-590 ; H. Delehaye, « Le pèlerinage de Laurent de Paszthou au Purgatoire S. Patrice », Analecta bollandiana, 27, 1908, p. 35-60 ; J. Le Goff, La Naissance du Purgatoire, Paris, Gallimard, 1981, p. 223 ; S. Leslie, St Patrick’s Purgatory : A record from History and Literature, Londres, Burns Oates & Washbourne, 1932 ; V. & E. Turner, Image and Pilgrimage in Christian Culture. Anthropological Perspective, New York, Columbia University Press, 1978 (sur Saint Patrice, p. 104-139) ; M. Haren, « The Close of the Medieval Pilgrimage : the Papal Suppression and its Aftermath », The Medieval Pilgrimage to St. Patrick’s Purgatory Lough Derg and the European Traditions, éd. M. Haren-Y. de Pontfarcy, Clogher Historical Society, Enniskillen, 1988, p. 190-201.

4 Andrea da Barberino, Il Guerrin Meschino edizione critica secondo l’antica vulgata fiorentina, éd. M. Cursietti, Rome-Padoue, Antenore, 2005.

5 H. de Saltrey, Tractatus de purgatorio sancti Patricii, éd. K. Warnke, Das Buch vom Espurgatoire S. Patrice de Marie de France und seine Quelle, Halle/Saale, Niemeyer Verlag, 1938.

6 Iacopo da Varrazze, Legenda aurea, éd. G.P. Maggioni, Florence, 1998, chap. L.

7 Pour une première enquête sur les voyageurs du XIVe siècle et leurs récits, en latin et en langues romanes, voir H. Delehaye, « Le pèlerinage de Laurent de Paszthou... » ; L. Frati, « Tradizioni storiche del Purgatorio di S. Patrizio », Giornale storico della letteratura italiana, 17, 1891, p. 46-79. L’article de S. M. Barillari est une mise à jour des dernières recherches et tourne autour de la réalité historique des pèlerinages : S. M. Barillari, « Passaggio in Irlanda. Itinerari terreni e viaggi oltremondani », Itineraria, 3-4, 2004-2005, p. 73-107.

8 T. Rymer, Foedera, Conventiones, Literae et cujuscunque generis Acta Publica inter Reges Angliae et alios quosvis imperatores, reges, pontifices, principes vel communitates (London, 1709), éd. A. Clarke & F. Holbrooke, 4 vol., Londres, 1816-1869.

9 Catalogue général des incunables des bibliothèques publiques de France, publ. par M. Pellechet et L. Polain, Nendeln, Kraus-Thomson, 1970, vol. XVI, n° 9001 (8854) ; L.-M. Michon, Inventaire des incunables de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, Paris, Daupeley-Gouverneur, 1943, p. 40, 124. Sur Pierre Le Rouge, voir A. Claudin, Histoire de l’imprimerie en France au XVe et au XVIe siècle, Paris, Imprimerie nationale, 1901-1914, 4 vol., t. II, p. 464, 465, 468 ; Bibliothèque de Sainte-Geneviève, OEXV 353 Res.

10 Catalogues régionaux des incunables des bibliothèques publiques de France, vol. VI, Bibliothèque Mazarine, par D. Hillard, Paris, 1989, n. 1707 : Mazarine Rés. 16747, p. 1.

11 W. A. Copinger, Supplement to Hain’s Repertorium Bibliographicum, Londres, H. Sotheran, 1902 [réimpr. Milan, Gorlich, 1950], 3 vol., t. III, n. 4997 ; D. Reichling, Appendices ad Hainii-Copingeri Repertorium Bibliographicum : additiones et emendationes, Munchen, Rosentahl, 1905-1910 [réimpr. Milan, Gorlich, 1953], 2 vol., fasc. VI, p. 133 ; J. G. Th. Graesse, Trésor des livres rares et précieux, Dresde, Rudolf Kuntze, 1859-1869 [réimpr. Milan, 1993], 7 vol., t. V, p. 511 ; R. Duclos, Dictionnaire bibliographique, historique et critique des livres rares, Paris, Caillau et Fils, 1790, 4 vol., t. III, p. 10 ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire et de l’amateur de livres, 6 vol., Paris, Firmin Didot, 1860-1865 [réimpr. Genève, Slatkine Reprints, 1990], t. IV, n° 979 (1) ; Indice Generale degli Incunaboli delle biblioteche d’Italia, Rome, La libreria dello Stato, 1943-1981, 4 vol., t. IV, n. 8233 : Florence, B.N.C., Inc. L. 5.4.

12 Les éditions de Jean Trepperel sont très souvent dépourvues de datation. D’après Reichling cette édition remonte à 1495, tandis que sur le feuillet de garde du volume accueillant le texte du Purgatoire sainct Patrice conservé à la Biblioteca Nazionale Centrale de Florence, le sommaire du XIXe siècle donne la date de 1492. D’après Claudin [A. Claudin, Histoire de l’imprimerie en France au XVe et au XVIe siècle, t. II, p. 151-162] il est impossible d’établir une datation précise, car Jean Trepperel n’indiquait que très rarement la date d’édition.

13 J. G. Th. Graesse, Trésor des livres rares..., t. V, p. 511 ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire..., t. IV, n°979 (2) ; B. Moreau, Inventaire chronologique des éditions parisiennes du XVIe siècle d’après les notes manuscrites de Philippe Renouard, Paris, Imprimerie municipale, 1972-1992, 4 vol. ; t. 1, éd. 1527 : Moreau, n. 1313, BnF Rés. P – Y2 49 ; éd. 1530 : Moreau, n. 2261 : BnF Fond Rothschild, V.4.97 ; cf. Catalogue des livres de J. de Rothschild, Paris, 1887, n. 2061.

14 Milan, Biblioteca Trivulziana, Mor. M 265.

15 R. Duclos, Dictionnaire bibliographique., t. III, p. 410 ; J. G. Th. Graesse, Trésor des livres rares., t. V, p. 511 ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire., t. V, n. 979 (3), BnF. Rés. P. H- 26.

16 La copie conservée dans la Bibliothèque de Sainte Geneviève a été insérée dans un recueil de textes pieux et elle est dépourvue de gravures.

17 Sur Antoine Caillaut, voir Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens, libraires, fondeurs et correcteurs d’imprimerie depuis l’introduction de l’imprimerie à Paris (1470) jusqu’à la fin du XVIe siècle. Avertissement, table des enseignes et adresses, liste chronologique par Jeanne Veyrin Forre et Brigitte Moreau, Paris, Minard, 1965, p. 65 ; A. Claudin, Histoire de l’imprimerie en France au XVe et au XVIe siècle, t. I, p. 295-334. Sur le premier feuillet recto on trouve la marque typographique de l’imprimerie Caillaut : Saint Antoine et le monogramme AC ; sur le verso a été gravée la planche de la mort (cf. A. Claudin, op. cit., t. I, p. 322).

18 Sur le premier feuillet recto, on trouve la marque typographique de Jean Trepperel : l’écu de France porté par deux anges surmontés par deux lions ; au centre le monogramme, IT. Sur le verso, en revanche, il y a une gravure représentant le docteur enseignant (A. Claudin, Histoire de l’imprimerie en France au XVe et au XVIe siècle, t. I, p. 324). Tout comme le remarque Claudin, la présence d’une image ornementale, qui ne se lie pas au texte, revient aux habitudes de Jean Trepperel, imprimeur commercial, qui se soucie peu de la correspondance texte-image ; cf. A. Claudin, op. cit., t. II, p. 151-162. Toujours sur la production de Jean Trepperel, voir Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens., p. 413-414 ; H. J. Martin, « La révolution de l’imprimé », Histoire de l’édition française, dir. H. Martin et R. Chartier, 4 vol., Paris, Promodis, 1983-1991 ; t. I, Le livre conquérant. Du Moyen Âge au milieu du XVIIe siècle, p. 145-161 ; D. Coq, « Les incunables : textes anciens, textes nouveaux », Histoire de l’édition..., t. I, p. 177-195.

19 Trois gravures en bois ornaient l’édition de Lotrian 1527 ; malheureusement n’a été conservée que l’image initiale : au verso du premier feuillet, une gravure représentant la tentation du Christ par un démon zoomorphe ; d’après Brunet sur le dernier feuillet avaient été gravées la marque typographique (l’écu de France) et l’adoration des Mages ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire., t. VI, n°979 (2). Le dernier feuillet a été arraché. L’impression de 1530, en revanche, conserve la même gravure (tentation de Christ) sur le premier feuillet verso ; sur le dernier feuillet, au recto on trouve Seth au Paradis terrestre ; au verso, la Résurrection.

20 L’enseigne et l’adresse correspondent à la typographie de Jean Trepperel qui avait déménagé en Rue Neuve Notre Dame pendant les dernières années de son activité. À sa mort, héritèrent l’imprimerie son fils Jean Trepperel II, en tant que libraire, et Alain Lotrian en tant qu’imprimeur. Voir Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens…, p. 285 (A. Lotrian) ; p. 414 (Jean Trepperel II).

21 L’appart iconographique de Triv rappelle l’édition Lotrian de 1530, à l’exception de la gravure finale : premier feuillet verso : la tentation du Christ ; dernier feuillet, recto : Seth au Paradis terrestre ; verso : Jugement dernier. L’édition conservée à la Bibliothèque Trivulziana est probablement sortie de l’imprimerie Lotrian entre les années 1530-1548.

22 Sur Jean Bonfons voir Ph. Renouard, Répertoire des imprimeurs parisiens., p. 42. Les gravures sont différentes par rapport aux éditions Lotrian : au premier feuillet recto, on trouve Christ aux enfers ; la même gravure est sur le dernier feuillet recto ; sur le dernier feuillet verso est gravée la marque typographique : colombes à guirlandes ; cf. M.L.C. Silvestre, Marques typographiques ou recueil des monogrammes, chiffres, enseignes... des libraires et imprimeurs qui ont exercé en France, depuis l’introduction de l’imprimerie, en 1470, jusqu’à la fin du seizième siècle, Bruxelles, Culture et civilisation (Fac-sim. de l’éd. de Paris, 1853), 2 vol., n° 909.

23 Dans le Tractatus et par conséquent dans la version en prose a, lorsque Jésus Christ montre à Saint Patrice la fosse du Purgatoire, il lui donne aussi un bâton qui deviendra la crosse épiscopale de l’archevêque d’Irlande.

24 M. Righetti, Storia liturgica, Milan, Ancora, 1959-1964, 4 vol., t. I, p. 389-390.

25 Math., XXVII, 29 : Et genu flexo ante eum, illudebant ei, dicentes : « Ave rex Iudaeorum ».

26 Dictionnaire du Moyen Français ; DMF (version en ligne : atilf.atilf.fr/dmf), ordonner, article 8, A.2.

27 A. Jenroy-A. Vigneaux, Voyage au Purgatoire de St. Patrice, Toulouse, Privat, 1903, p. 4-53, p. 20 : « Canto gran mati lor messa de requiem en aquel que intra dedins ».

28 L. L. Hammerich, Visiones Georgii, Copenhagen, Høst, 1931, p. 94 : Item completis XV diebus huiusmodi ieiunij dicitur per V dies mane et vespere pro illo officium mortuorum, ac si esset mortuus.

29 En ce qui concerne la vocation populaire des typographies Caillaut et Trepperel, voir H.-J. Martin, « La révolution de l’imprimé » ; D. Coq, « Les incunables : textes anciens, textes nouveaux ».

30 Dorénavant nous citons le texte de Lo 1, car les autres copies ne varient pas.

31 J. G. Th Graesse, Trésor des livres rares., t. VII, p. 410 ; J. Ch. Brunet, Manuel du libraire..., t. V, n. 1378 ; BnF, Rés. Y2 679.

32 Dans le texte des Visiones Georgii, on retrouve la description d’un rituel d’admission au Purgatoire qui affiche des similitudes avec la scène représentée par la gravure : Visiones Georgii, éd. cit., p. 97 : Qui quidam Georgius modo ordinatus indutus tribus tunicis albis sine zona et capucio, discalciatus et capite discoopertus ac eciam dezonatus [...] ostium Purgatorij intravit.

33 Sur Claude Nourry voir H. Baudrier, Bibliographie lyonnaise. Recherches sur les imprimeurs, libraires, relieurs et fondeurs de lettres à Lyon au XVIe siècle, publiées et continuées par J. Baudrier, Lyon-Paris, 1895-1921 (réimpr.. Paris, 1964), p. 72-149.

34 Harvard University, Cambridge, Massachussets, NP 0139266 ; cf. The National Union Catalogue, Mansel, 1976, t. 444.

35 J. Ch. Brunet, Manuel du libraire..., t. V, n.° 1378. Nous n’avons pas localisé d’autres exemplaires, mais nous avons trouvé des indications dans l’introduction de l’édition Venant et Giraud de 1839 : « On trouve sous le n° 952 d’un catalogue de livres vendus à Londres en novembre 1830, l’article suivant : Voiage du chevalier Oben qui voulaoit accomplir le voiage de Saint Patrix pour visiter purgatoire, in folio, gothique ». Dans le supplément de W. A. Copinger, op. cit., au n° 4996 correspond un Purgatorium divi Patrici, gallice, ca. 1480, in-folio, goth. L’implicit rappelle celui de l’édition lyonnaise : « Au tempz du roy Estienne estoit ung chevalier des parties d’Allemaigne de langues appelle Oben qui voulsist acuplir le voiage de Saint Patrix pour visiter purgatoire ainsi comme plusieurs aultre ont fait ». Il est sûr, en revanche, que l’édition lyonnaise fut traduite en italien et imprimée à Milan, par Ramellati (sec. XVII) : Viaggio del Pozzo di S. Patrizio, nel qual luogo si vede le pene del Purgatorio et altres le gioie del Paradiso. In Milano, per il Ramellati, in 8 ; cf. F. Argelati, T. A. Villa, Biblioteca degli volgarizzatori o sia notizia dall’opere volgarizzate d’autori che scrissero in lingue morte prima del secolo XV, Milan, Agnelli, 1767, 4 vol. ; t. 2, p. 12.

36 Les innovations pertinentes de a sont la réduction du nombre des messagers de l’au-delà de quinze à douze et le déplacement des dragons du second champ de la source latine au premier ; cf. « Introduction », Les version en prose du Purgatoire de Saint Patrice.

37 Ly décrit des peines absentes dans le Tractatus.

38 Owein, le chevalier irlandais, Nicolaus, le protagoniste du conte de Jacopo da Varazze, George Krissaphan, chevalier hongrois, tous décident d’accomplir leur voyage supraterrestre parce qu’il leur faut la plus dure pénitence pour racheter leurs graves péchés.

39 Raimon de Perelhos, Voyage au Purgatoire, éd. cit., p. 4.

40 Ly, bv, biir.

41 Tractatus, éd. Warnke, p. 112 : Qui cum eo loquentes primo benedixerunt Deum, qui tanta con stantia in tormentis animum eius confirmavit ; a : « Et tot avant q’il parlassent a lui, loerent et beneirent Deu qi si li avoit son corage aferme en vraie foi, par qoi il avoit veincuz les deables et eschapez tant de torment ».

42 La peine des serpents rappelle le châtiment réservé dans la Vision de Tondale aux luxurieux : Visio Tngudali, éd. A. Wagner, Erlangen, A. Deichert, 1882, p. 28.

43 Juan Perez de Montalban, Vida y Purgatorio de San Patricio, éd. M. Profeti, Pise, Università di Pisa, 1972. L’œuvre de Montalban sera traduite en français par le père François Bouillon (Histoire de la vie, des miracles et du Purgatoire de S. Patrice, archevèsque et primat d’Hybernie. Mise en françhois par le R.P.F.B. de l’ordre de S. François, bachelier en théologie, Paris, 1643) ce qui garantira à l’histoire de Ludovicus Enius un large succès ; voir G. Dottin, « Louis Eunius ou le Purgatoire de Saint Patrice », Annales de Bretagne, 26, 1910-1911, p. 781-790.

44 Le récit du Purgatoire dans la trame romanesque du Guerin Meschino accomplit la même fonction : Guerin est envoyé au Purgatoire par le Pape parce qu’il doit expier son séjour au pays de la fée. Voilà les mots de l’archevêque irlandais : « Tu sei il maggior peccatore che io abbia mai confessato. Non pensi a come sei andato cercando gli idoli, appresso agli incantamenti del demonio e, come se non bastasse, sei andato cercando la vanità della fata, sei stato un anno scomunicato con la Sibilla ed eri perduto anima e corpo » ; Andrea da Barberino, Il Guerrin Meschino, l. VI, chap. V.

45 Tirso de Molina, Don Giovanni. Il beffatore di Siviglia, éd. A. D’Agostino, Milan, BUR, 2011.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Martina Di Febo, « La justice immanente du Purgatoire : les versions imprimées du Purgatoire Saint Patrice entre catéchèse populaire et speculum de chevalerie »Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 26 | 2013, 229-240.

Référence électronique

Martina Di Febo, « La justice immanente du Purgatoire : les versions imprimées du Purgatoire Saint Patrice entre catéchèse populaire et speculum de chevalerie »Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 26 | 2013, mis en ligne le 30 décembre 2016, consulté le 19 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/13410 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.13410

Haut de page

Auteur

Martina Di Febo

Université de Macerata

Haut de page

Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search