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Le droit et son écriture : la médiatisation du fait judiciaire dans la littérature médiévale

Quand la farce fait scandale

Jelle Koopmans
p. 93-108

Résumés

Des farces scandaleuses appartiennent à l’histoire théâtrale des XVe et XVIe siècles. Pourquoi la farce a été ou a pu être scandaleuse, et ce que le terme recouvre exactement, est une autre question – et c’est justement cette question que cet article entend traiter : qu’est-ce qui est scandaleux, pourquoi et comment ? Trois éléments sont centraux en tout cela : nommer et vilipender des individuels, s’occuper de questions religieuses, et les conséquences inattendues de la représentation.

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Texte intégral

1De la fin du XIVe siècle aux guerres de Religion, les instances de « pièces scandaleuses » sont multiples et la farce paraît bien s’afficher comme l’exemple-type de la « pièce scandaleuse ». Toutefois, ce ne sont guère les textes qu’on a pu conserver qui nous instruisent à ce sujet et leur étude ne nous livre que de minces informations. Quand on se penche, par contre sur les sources administratives et les journaux, tout un monde scandaleux s’ouvre. Loin de n’être qu’anecdotiques, les représentations de telles farces témoignent d’une tension (peut-on dire structurelle ?) entre les différentes autorités et la pratique théâtrale. C’est que la pratique, apparemment, entre en conflit avec un désir croissant de réguler le théâtre ou avec les régulations en place que l’on tente d’appliquer de plus en plus systématiquement – ce qui en même temps n’est vrai que dans une certaine mesure, car le théâtre fait en cela partie d’un grand nombre de pratiques de la parole et de la présentation ou représentation dans l’espace public et n’a donc pas nécessairement la spécificité que l’historien moderne veut bien lui conférer. Scandaleuse, la farce l’est pourtant bien et à de multiples reprises.

  • 1  Je reviendrai longuement sur cette question de la « farce aristocratique ou épiscopale » dans mon (...)

2Cette entrée en matière est aussitôt à nuancer quand on considère le grand nombre d’attestations où les princes, les évêques, les maires et échevins sont commanditaires de farces et où le genre semble plutôt illustrer le pouvoir que de le mettre en question1. Là aussi, les sources historiques fournissent une autre image que les textes conservés.

  • 2  Ils emploient le terme surtout comme qualificatif des mystères, du théâtre religieux, pour montrer (...)
  • 3  Il s’agit bien d’une catégorie différente, car le terme n’est pas pris, ici, comme métaphore.

3Il convient toutefois également de bien distinguer les occurrences où les documents de l’époque utilisent le terme « scandale, scandaleux », les instances où les érudits des XVIIIe, XIXe ou XXe siècle ont appliqué ces termes à des phénomènes historiques (sans penser à mal, se plaît-on à penser2) et où ils créent ainsi une certaine tradition historique, et les cas où le chercheur moderne croit lui-même déceler dans la documentation ce qui – selon lui – constitue une « farce scandaleuse »3. Car, malgré leurs imbrications et le flou qui entoure leurs distinctions, une certaine précision à ce niveau serait souhaitable – surtout quand on voit l’apparente liberté qu’ont cru pouvoir se permettre nos prédécesseurs. Ici, il s’agira de comprendre et d’expliquer, surtout à partir de sources administratives et juridiques, comment et pourquoi, au Moyen Âge finissant et sous la Renaissance, une farce pouvait « faire scandale ». En cela, il s’agira plus de la littérature dans le droit que du droit dans la littérature. Le lecteur verra aussi que les textes conservés seront largement absents, sans doute puisque le matériel incriminé n’a pas survécu et que la conservation des textes constitue déjà un filtre qui devait nécessairement nous cacher une bonne partie de l’histoire des représentations théâtrales. Pour retrouver ce qu’a pu être une « farce scandaleuse », il faut donc se tourner vers les sources historiques et accepter le flou dont elles entourent des désignations comme farces, jeux, moralités... La littérature ne sera donc présente que dans sa fonction et non pour son contenu – et l’acception du terme sera assez large.

  • 4  A. Provost, Domus Diaboli. Un évêque en procès au temps de Philippe le Bel, Paris, Belin, 2010, p. (...)
  • 5  C. du Boulay [Bulaeus], Historia universitatis parisiensis, Paris, Bresche-Laize-de-Bresche, 1670, (...)
  • 6  C. Grosse, « Rationale graphique et discipline ecclésiastique », P. Chareyre et al., La mesure du (...)

4Dans l’étude de la notion de farce scandaleuse et de sa fonction, deux cas sont à distinguer : soit la pièce elle-même est scandaleuse, soit sa représentation fait scandale. Dans le premier cas, s’il faut en croire les documents administratifs, il s’agit avant tout du texte. À côté de cela, il faut également souligner le caractère dynamique du concept de scandale lui-même. À l’origine, scandalum désignait une infraction non spécifiée dans une église, au palais royal ou dans une ville où le roi résidait. Pour saint Thomas, il s’agit d’un fait ou propos qui risque de ruiner spirituellement un prochain4. Associé dès Tertullien aux spectacles, le terme fait son apparition dans un contexte théâtral dès 1315, dans un document du collège de Navarre à Paris, où il est question de « comédies en forme de moralités »5. Tout au long des XVe et XVIe siècles, le lien scandalum-théâtre continue à s’affirmer, mais la notion est floue et le restera dans le discours protestant au XVIe siècle6. Toujours est-il qu’il s’agit bel et bien d’un terme juridique, notamment en droit canon. Toujours est-il également que la notion est des plus dynamiques et qu’on ne peut certes pas l’étudier sans prendre en compte un certain nombre d’évolutions importantes dont, sans doute, les différents conflits religieux, allant du gallicanisme en passant par les premiers mouvements de la Réforme aux guerres de religion, ne sont bien sûr pas des moindres, mais c’est là aussi une hypothèse qui reste à vérifier.

  • 7  C. Magnin, CR de F. Génin, Maistre Pierre Patelin, Journal des Sçavans, janvier 1856, p. 34-48, p. (...)

5Un second point important à noter est bien que la dichotomie fait / propos se retrouve dans les documents sur la farce scandaleuse dans une longue durée. En amont de la représentation, la question qui joue avant tout est celle du texte et de la parole ainsi que de la manière de bien pouvoir la contrôler. En effet, dès 1398, il y a une ordonnance royale obligeant ceux qui veulent jouer des jeux « par manière de farces, de vies de saints ne autrement » de demander la permission royale7. Et tout au long des XVe et XVIe siècles, voire au-delà, de telles ordonnances se répèteront, à des niveaux divers de la législation : le roi, le Parlement, la ville, l’évêque.

  • 8  M. Bouhaïk-Gironès, La Basoche et le théâtre comique : identité sociale, pratiques et culture des (...)

6Une pratique parallèle nous est dévoilée au début du XVe siècle par un document découvert par Marie Bouhaïk-Gironès : il s’agit d’une défense du Parlement de Poitiers du 8 mai 14208. La cour constate qu’il y a eu « aucunes assemblées » et des « farces jouées à Poitiers » par les clercs et serviteurs du personnel du Parlement et par « aucuns particuliers demourans en la ville de Poictiers » et leur défend

qu’ils ne facent aucunes tourbes ne assemblees et ne s’arment de jour ne de nuit ne procedent par voie de faict contre quelque personne que ce soit ne d’injures ou libelles diffamatoires en farce, comedie ne autrement ce que doresnavant ils cessent de toutes farces et comedies.

  • 9  Et cela bien avant la première attestation dans une acception théâtrale connue des lexicographes.
  • 10  E. Serrigny, « La représentation d’un Mystère de Saint-Martin à Seurre en 1496 », Mémoires de l’Ac (...)

7D’abord, et c’est ce que Marie Bouhaïk-Gironès a bien souligné, nous avons ici la première mention nette de farces de la Basoche du Parlement. En second lieu, si le terme indique ici des activités dramatiques – la combinaison avec « comedie »9 le montre – il est en même temps clair que les activités dont il est question se dirigent contre des personnes spécifiques et s’accompagnent d’assemblées de personnes armées. De même, que la farce soit assimilée à des injures – ce qui est porteur de sens au niveau du statut juridique de la parole en représentation – et de libelles – ce qui est porteur de sens au sujet du rapport entre le texte et la représentation, fait que ce document est d’une importance extrême. Il dévoile une pratique de la mise en cause de personnes, et il dévoile aussi une pratique du texte. En 1443, à Dijon, un certain Colin Malart est accusé d’avoir bafoué les magistrats et d’avoir joué la Farce du nouveau maire, titre qui en promet (mais le texte est perdu), et il obtient le pardon… du nouveau maire10 !

  • 11  R. Favreau et al., Le diocèse de Poitiers, Paris, Beauchesne, 1988 p. 100.

8À Poitiers encore, un Dominicain annonce vouloir prêcher la Passion et la montrer par personnages en 1469 : l’autorisation lui est refusée « par crainte de scandale »11. Ce qui justifie cette crainte reste obscur. L’autorisation préalable (souvent demandée assez tard, voire en milieu de mystère) et la nécessité de soumettre le texte afin de le faire visiter, marquent la pratique des farces et mystères du XIVe jusqu’au début du XVIIIe siècle. Le statut précis de la permission préalable, la pratique de la visitation des textes et la récurrence de cas où la question de la permission de jouer doit être traitée alors que la préparation, voire même la représentation, du jeu est bel et bien en chemin, mériteraient un autre article : que le problème soit, ici, simplement soulevé.

9En aval de la représentation, il y a avant tout un problème d’ordre public, et parfois tout simplement d’un « dérapage » : là on entre donc dans la catégorie des faits – et c’est un problème qui va augmentant au cours du XVIe siècle. Là donc, ce n’est pas tant le texte ni la représentation qui fassent problème, mais plutôt une certaine peur des conséquences, car finalement les autorités ne peuvent jamais être totalement sûres de ce qui arrive à l’occasion d’une représentation. En d’autres mots, nous parlerons des « scandales contre quelqu’un », des « scandales contre la foi » et de ce qui « engendre scandale ».

Le nom de la personne

10Le premier cas clair et net de ce qui « fait scandale » est bien à trouver dans les pièces où l’on nomme des personnes par leur nom. Le théâtre satirique nomme des personnes réelles, comme l’affirme Jean Bouchet :

  • 12  Labyrinthe de Fortune, fol. F.iiir, cité par P. Galland et T. Cave, Poétiques de la Renaissance, G (...)

Composeurs de satyres
Qui nommeront publicquement les gens12.

11Et n’oublions pas que le même auteur avait assimilé la satire latine à la sottie française, quand il parle au même endroit de la

… folle affection
Nommans aucuns & faisans du scandalle
On dit satyre estre une chose malle
En France elle a de sottie le nom.

  • 13  T. Schuurmans et R. Stuip, Jean Thenaud, Le Triumphe des vertuz, troisième traité : le Triumphe de (...)

12Jean Thenaud, dans son Triumphe des vertuz, explique que ceux qui sont en honneur sont « souvent mauldictz du peuple, jouez par farces et moralitez en carroys et chafaulx, contre lesquelz toutes invectifves et detractions sont adroissees comme s’ilz estoient la source et cause de tous les maux que le peuple endure »13. Essayons donc d’examiner, par une suite d’exemples, de quoi il pourra bien s’agir.

  • 14  O. Beuve, Le théâtre à Troyes aux XVe et XVIe siècles, Paris, Plon, 1913, p. 8.
  • 15  AD Aube G 6G3 registre fol. 65v-66r..

13Et en effet, au mois de février 1424, les chanoines de Saint-Étienne à Troyes jouent des farces qui déshonorent « plusieurs honnêtes gens »14. Le jeudi 2 mars de la même année, nos acteurs récidivent, car « ils juèrent une farce deshonorante et diffamée contre toutes gens d’église de mariaige » – et plusieurs « notables gens sont mal contents » tant et si bien que nos braves acteurs doivent jeûner chaque vendredi (pain et eau) et se vêtir dorénavant d’un habit honnête et promettre de ne plus faire des jeux15. Le problème du statut des clercs par rapport au célibat n’était pas un nouveau problème et n’est pas un ancien problème – mais problème il y a et il y a eu ; l’opposition entre les chanoines et les « honnêtes gens » relève de longues tensions entre les bourgeois et les gens d’église.

  • 16  M. Bouhaïk-Gironès, « Le procès des farceurs de Dijon (1447) », European Medieval Drama, 7, 2003, (...)

14À Dijon, on joue en 1447 le Mistère de saint Eloy, agrémenté d’une farce. Ce qui fait problème ici, ce sont les « reproche, mocquerie ou raffarde contre l’honneur du roi nostre sire » exprimées dans la farce. La représentation mène à un procès – donc, dira avec joie le chercheur moderne – à une documentation. Ce cas a été étudié en détail par Marie Bouhaïk-Gironès16.

  • 17  Manuscrit BnF 5908 fol. 77 (et BnF Dupuy 250 fol. 29v).

15En 1454, une question analogue joue à Paris. Le parlement de Paris ordonne que les clercs et avocats de la cour de Parlement et ceux du Châtelet ne peuvent jouer des jeux menant « au deshonneur, vitupere et prejudice des uns et des autres »17. Ici, en toute apparence, il y a un système concurrentiel qui joue au sens où le scandale a bien l’air d’être réciproque – et l’interdiction s’explique probablement par l’atteinte portée à l’ordre public – remarquons tout de même que c’est bien le Parlement de Paris qui se charge de l’affaire qui touche… les clercs du Parlement de Paris.

  • 18  2 Mi 171 R 5 (ancien G 187), J. Gauthier, Inventaire sommaire des Archives Départementales antérie (...)

16Trente ans plus tard, en 1484, les chanoines à Besançon apprennent qu’une farce a été jouée au Saint-Esprit où plusieurs d’entre eux étaient tournés en dérision : le chapitre ordonne des informations à ce sujet18. Là encore, le problème spécifique est à trouver au niveau des « victimes » que l’on peut identifier, du blâme explicite.

  • 19  Archives Municipales d’Angers, BB 15 fol. 83, cf. C. Port, Inventaire analytique des archives anci (...)

17À Angers, en 1512, il y a interdiction des jeux de la Basoche « esquelz jeuz communement sont scandalisez, diffamez et injuriez plusieurs gens de bien », mais – ajoute le document, c’est surtout à cause de la maladie de la reine et l’émotion des guerres », d’où une suspension jusqu’à la fin du mois19. De telles occurrences sont difficiles à interpréter : tout se passe comme si la maladie de la reine et la situation militaire constituent les véritables raisons de l’interdiction – toute provisoire – et que les scandales, diffames et injures ne fonctionnent que comme argument juridique en tout cela.

  • 20  E. Boutaric, Actes du parlement de Paris : première série de l’an 1254 à l’an 1328, Paris, Plon, 1 (...)
  • 21  M. Félibien, Histoire de la ville de Paris, Paris, Desprez-Desessartz, 1725, t. 4, p. 645.

18De même, le 11 janvier 1520 (n. st.), la cour de Parlement, à Paris, enjoint aux lieutenants civil et criminel ( !) de faire information sur « ceulx que on dit qui ont joué des jeux et farces scandaleux où ils ont nommé plusieurs grans personnages par leurs noms et contre ceulx qu’ils trouveront coupables, proceder ainsi qu’il appartient par raison »20. François Ier va jusqu’à défendre que l’on joue des farces dans les collèges universitaires « où soient dictes paroles scandaleuses du roy et des princes ou de ceux qui sont autour de sa personne »21. Nommer, et surtout : nommer les grands, nommer les honnêtes gens, semble faire problème.

  • 22  Isambart, Decrusy, Taillandier, Recueil général d’anciennes lois françaises, depuis l’an 420, Pari (...)
  • 23  Feria tertia post dom. III Quadr., cité par O. Le Roy, Études sur le théâtre français du XIVe et d (...)

19C’est à de tels abus que semble faire encore allusion l’ordonnance de Blois en 1579, quand elle interdit dans l’article 80 aux collèges des « farces, tragedies, comedies, fables, satyres, scenes ou autres jeux en latin ou en françois contenant lascivetez, injures, invectives, convices ni aucun scandale contre aucun »22. Et c’est également à de telles pratiques que s’oppose non sans véhémence le prédicateur Guillaume Pepin (entre 1552 et 1558)23 :

Et quod pejus, si sit aliquis qui fecerit aliquod malum secretum, venient alii et component de eo cantilenas, et eum nominabunt per nomen et cognomen ; vel oportebit componere facetias et eas ludere super theatra, et sic deshonorantur et diffamatur persona.

  • 24  L. Febvre, Notes et documents sur la Réforme et l’Inquisition en Franche-Comté, Paris, Champion, 1 (...)

20Mais à Pesmes (Franche-Comté) cinq ou six jeunes jouent en 1558 une farce contenant de « détestables, scandaleuses et insolentes paroles » contre les autorités. Finalement, après moult procédures (le procès prendra pas moins de seize ans) les acteurs seront acquittés (mais non la farce elle-même, ou le texte de la farce, condamnée à être lacérée en public)24.

21De la manière, on peut donc constater que le premier élément de la notion de scandale, le scandale contre quelqu’un, le scandale du nom de la personne, est bien ancré dans la documentation. Le nom et la réputation, voilà ce à quoi on n’a pas le droit de s’en prendre. Le roi – naturellement, mais aussi les gens d’église voire des bourgeois ne peuvent nullement être gratuitement diffamés et dans ce petit choix d’exemples, la notion de scandale a donc un sens spécifique et porte sur des (groupes de) personnes.

Les choses de la foi – et de l’Église

  • 25  N. Périaux, Histoire sommaire et chronologique de la ville de Rouen, Rouen, Lanctin-Métérie, 1874, (...)

22À côté de ce premier élément de scandale, le fait de nommer des personnes par leur nom, il y a une seconde série de scandales à considérer, et c’est celle qui concerne plus précisément la religion, l’Église et les hommes d’église. Les deux doivent, sur le plan théorique, être séparés : l’anticléricalisme est autre chose que la mise en question de l’Église elle-même, la critique des pratiques des hommes de l’Eglise ne touche pas nécessairement l’institution de l’Église – mais au XVIe siècle, avec le mouvement croissant de la Réforme, les deux vont certes se confondre. On pourrait croire que le sujet n’acquière son plein sens avec les troubles religieux, mais en fait il est, dès le début de la crise gallicane, donc dès le début du XVe siècle, au sommet des préoccupations. Ainsi, dès 1439, un clerc normand est condamné pour avoir joué une de ces farces où la religion n’était pas respectée25.

23Ici, nous espérons montrer, par un échantillon illustratif, en quoi et comment cette question de l’Église « fait scandale ». Toutefois, que ce soit à cause d’une documentation mieux fournie ou à cause d’une augmentation de situations conflictuelles à cause des troubles religieux, le XVIe siècle verra une véritable explosion de ce type de problèmes – ce qui ne veut nullement dire que la question n’était pas au centre de l’intérêt de la régulation théâtrale tout au long des conflits du gallicanisme qui concordent, curieusement, avec la floraison de la farce.

  • 26  H. Prentout, Renovatio ac reformatio in universitate cadomensi, Cadomi, C. Valin, 1901, p. 47-48.

24Ainsi, en 1544 on joue à Caen une farce contre le luthéranisme : le professeur Pierre Barate, procureur, accuse Éloy du Mont d’avoir composé une fabula appelée farce avec mère Hérésie qui corrompt ses deux enfants, Ville et Université, et les pousse à vivre contre les règles de l’Église et les préceptes de Dieu. Du Mont nie, puis confesse : « vidi et composui », mais c’est le doyen de la Faculté de théologie qui est avant tout responsable, car il a formellement approuvé le texte. La pièce est saisie26 – et il y a bien une différence entre la pénalisation de la pièce et celle des acteurs. Tantôt ce sont les acteurs qui sont punis, tantôt c’est la pièce qui est condamnée – voire même publiquement lacérée. Dans ce cas, il y a aussi la question de l’autorité qui joue, car le doyen a bel et bien donné la permission de jouer ou – pour être plus précis – il a approuvé le texte.

  • 27  Il est impossible d’analyser, ici, ce qu’a pu être la bande, les compagnons ou la société des Enfa (...)
  • 28  N. Weiss, La Chambre ardente, Paris, Fischbacher, 1889, p. 337, 342.
  • 29  Jacques Bruneau de Tartifume, Histoire d’Angers contenant ce qui est remarquable en tout ce qui es (...)

25À Noyon, on arrête en 1549 des Enfants-sans-Soucy27. Les arrêts parlent de propos scandaleux et de la possession de livres reprouvés28, donc on voit bien comment un nouveau discours de répression commence à s’instaurer. Les propos théâtraux rentrent dans la même catégorie des livres reprouvés et il semble bien que là encore, c’est le texte qui est mis en question : la parole comme l’imprimé. Un an plus tard, en 1550, on joue à Angers Le Monde Renversé, de Martial Guyet. Selon Bruneau de Tartifume (le nom fait rêver) dans un manuscrit de la Bibliothèque Municipale d’Angers29, on trouve des détails :

En 1550, fleurissoient à Angers Lezin et Martial les Guyets. L’un a fait en vers le Dialogue des Moynes, et l’autre Le Monde Renversé, lesquels ont été représentez publiquement en la place Neufve par le temps et espace trois jours consécutifs… Les traits joyeux, brocards et facéties un peu trop libre ont rendu rares les copies qui ont esté communiquées. Entre autre, ils disoient que tout passoit par un fil de Lyon, pour fidelium.

26Le jeu de mots est illustratif d’une certaine manière de mettre en scène l’actualité. Les auteurs ont été poursuivis et finalement condamnés comme hérétiques six ans plus tard : mais on ne les a brûlés qu’en effigie. Ici, donc, ce sont les auteurs (et non les acteurs !) qui ont été condamnés – et ils sont condamnés comme hérétiques (et non pour avoir joué une farce).

  • 30  Permettons-nous une petite note : le rôle du texte – manuscrit et imprimé – dans toutes ces procéd (...)
  • 31  Ce qui veut dire qu’ici, l’Église et l’autorité royale s’opposent à la ville.

27Trois ans plus tard, en septembre 1553, des comédiens représentent à Agen, avec la permission des consuls, des farces dans la maison de la ville. Malgré cette permission de la ville – et on retrouve les questions de l’autorité – l’official fait enquête sur ces farces « pleines d’erreurs, scandale et doctrine reprouvée contre la foy et religion xrestienne ». Le Parlement de Bordeaux, ayant vu l’enquête et des manuscrits des farces (« aucuns brouilhards desd. farces »)30 charge le procureur du roi de mener le procès et interdit aux consuls d’Agen de donner à l’avenir la permission de jouer des farces si elles n’ont pas été visitées par le sénéchal et l’évêque31. Le procès se prolonge – et en 1554 certains détenus sont élargis. Soit dit en passant : tout au long de l’histoire du contrôle du théâtre par les autorités, on trouve une certaine tension entre l’illusion de pouvoir contrôler le théâtre par le texte – donc en amont – et la nécessité de se rapporter à des faits réels – donc en aval.

  • 32  H. Patry, « La Réforme et le théâtre en Guyenne au XVIe siècle », Bulletin de la société de l’Hist (...)
  • 33  C. Mazouer, « Théâtre et société à Bordeaux jusqu’à la fin du XVIe siècle, La vie théâtrale dans l (...)

28À Libourne, en 1555, une prise de corps est décidée par le Parlement de Bordeaux contre les bateleurs « et autres dénommés sans soucy qui jouerent plusieurs farces et jeux scandaleux » – car leurs jeux auraient expliqué et légitimisé les violences iconoclastes32. Même si une défense de jouer des farces ou moralités sur la religion est proclamée, l’issue du procès criminel contre les Enfants sans soucy reste obscure. Toujours est-il que François Savary reçoit en avril 1558 l’autorisation des jurats de Bordeaux de jouer « farces, histoyres et moralités, sans toutefois commettre aulcun escandalle tant contre Dieu, l’Eglise, que aultre chose qui soit »33.

  • 34  J. de Métivier, Chronique du Parlement de Bordeaux, Bordeaux, Gounouilhou, 1887, t. 2, p. 136.
  • 35  Id., p. 138.
  • 36  Comme dans la sottie du Roi des Sots, où Coquibus est porteur de rats (éd. M. Bouhaïk, J. Koopmans (...)

29En 1556, les scandales avaient déjà fait surface à Bordeaux : d’abord il est enjoint, le 4 mars, aux prédicateurs de « ne concerter aucune émotion » ni d’« aucunement user de paroles scandaleuses ne mesdire les uns des autres »34. Là, c’est clairement le contrôle de la parole publique qui est en jeu, même s’il n’est pas explicitement question de théâtre. Le lendemain, toutefois, il s’agit clairement de théâtre, car on aurait joué des « jeux diffamatoires »35, où les acteurs avaient des bâtons avec des rats au bout, qu’ils jetaient par terre en disant « Vous irés jus rats pelés ». Il y a un côté brillant à cette attestation. Car la mise en scène du jeu de mots : jus « rappelé » : le droit qu’on rappelle, jurats pelés : « conseillers démunis », surtout puisque les rats entrent dans un grand nombre de jeux politiques où il est question de rats porteurs, de ceux qui portent des rats et rapportent donc36. Sans oublier la locution pauvre comme un rat d’église. Toutefois, il y aura bien une rémonstrance au principal « dudit collège de ne dire ne permettre estre dit directement ne indirectement aucune parole malseante des jurats ». C’est encore le conflit au sujet de l’autorité.

  • 37  F.C. Van Boheemen et Th. C. J. van der Heyden, Retoricaal Memoriaal, Bronnen voor de geschiedenis (...)

30Vers la même époque, des problèmes analogues se montrent au grand jour aux Pays-Bas. À Gouda on doit constater en 1564 que, même si les rhétoriciens ne se sont pas explicitement disputés contre le Franc Arbitre de Calvin, leurs farces ont toutefois été jouées » avec grand schandalle des bon christiens et blasphemes, mocqueries de religion catholique »37.

  • 38  J. Van Vloten, Nederlands Opstand tegen Spanje, Haarlem, Bohn, 1856, p. 188. Encore une fois le te (...)

31Dans le Nord – ou aux Pays-Bas espagnols, en 1567, à Laventhie, des jeunes jouent une farce où « furent meslez plusieurs propos scandaleux contre la religion Chrestienne », donc le curé en avertit l’évêque d’Arras. Celui-ci explique à leur père qu’il ne faut plus permettre de tels excès, mais l’année qui suit, il y a un jeu analogue et le curé « en vist par quelque moien la copie, et declara les propos scandaleux »38. La précision que le curé a su mettre la main sur une copie (du texte) est intéressante ici. Il y aura bien une suite à cette affaire, car nos farceurs font venir des prêcheurs, on fera – au marché de Laventhie – un sermon scandaleux sur la Vierge et les farceurs vont disséminer des « livres scandaleux », plus particulièrement sur « le saccagement des esglises ». En gros, la combinaison de farces, livres reprouvés et conflits religieux se retrouve et il y aurait certes aussi un mot à dire sur la précision qu’il s’agit de jeunes.

  • 39  Archives du chapitre du Mans, registre B 15, citées dans Bibliothèque Municipale du Mans ms. 257, (...)
  • 40  Voir à ce sujet mon article « L’effectivité de la législation sur le théâtre : le Parlement de Par (...)

32De telles affaires pointent leurs nez un peu partout : on trouve un autre cas intéressant dans les délibérations capitulaires de Saint-Julien au Mans, en 1559. Le 23 février, les chanoines ont député le scolastique, deux autres chanoines ainsi que l’archidiacre de Sablé, pour aller aux magistrats de la ville et pour parler du scandale causé par des comédiens qui se sont permis un abus coupable de l’Ecriture Sainte et pour supplier de faire cesser cette profanation de la parole de Dieu39. Toutefois, cette question des sujets bibliques rentre dans une autre logique, connue surtout par l’arrêt du Parlement de Paris sur les mystères en 154840.

  • 41  A. Ledieu, « Vieilles coutumes amiénoises », Annales de l’Est et du Nord, 1909, p. 215-254, p. 250 (...)
  • 42  Ibid., p. 252.

33Le comédien Jacques Macron, natif de Loches et chef d’une troupe itinérante, demande la permission de jouer des pièces – et notamment l’Apocalypse, à Amiens en 1560. Selon l’un des avis dans le conseil municipal, le texte doit être communiqué aux censeurs puisque, dit-on, la Sainte Écriture défend que « telle maniere de gens jouent publicquement la parolle de Dieu », mais la permission est toutefois accordée, car les pièces ont été imprimées avec un privilège royal. La permission stipule que Macron et sa troupe pourront jouer « l’Apocalypse et autres histoires, moralitez et farces honnestes et non scandaleuses »41. En 1581, la municipalité de la même ville accorde une permission de jouer « à la charge qu’ils ne juront riens d’erroné et scandaleux »42.

  • 43  Le Roux de Lincy, et F. Michel, Recueil de farces, moralités et sermons joyeux, Paris, Techener, 1 (...)

34Dans un tel cadre de controverse religieuse, il est intéressant de constater que nous avons même conservé une pièce où Scandalle est un personnage allégorique à côté de Heresye, Frere Symonye, Force, Procés et Église43. Il s’agit d’une pièce du répertoire normand, difficile à dater, mais en toute probabilité à situer dans les années 1545-1555, où l’auteur explique comment Hérésie et Simonie font l’assaut à l’Église et Scandale Puéril les aide, mais Église met les attaquants à la fuite.

35À Lisieux encore, pour rester dans le domaine normand, le 24 août 1572, les officiers municipaux interdisent à ceux qui veulent jouer le Mystère de sainte Barbe « de rien dire qui puisse provoquer des discours séditieux ». Rappelons qu’on est à la Saint-Barthélemy ! Le 29 août, on oblige même les acteurs de jouer « tant que dureront les troubles de l’année présente » – et c’est là une décision extrêmement difficile à comprendre. Le lien étroit entre le théâtre scandaleux et les conflits de religion semble se dissoudre…

  • 44  J. Boulenger, Les protestants à Nîmes au temps de l’édit de Nantes, Paris, Fischbacher, 1903, p. 1 (...)
  • 45  A. Puech, « Les Pharmaciens d’autrefois », Mémoires de l’Académie de Nîmes,série 7, t. 2, 1879, p. (...)

36Pourtant, le consistoire de Nîmes a fait une enquête, en 1596 pour crime de « paillardise »44 : deux hommes ont l’habitude de « ribler les rues » pendant la nuit, de se masquer et de jouer des farces. Et en 1608, donc bien tard pour notre champ d’enquête, il y a un problème à Nîmes car un marchand et un apothicaire se sont masqués et ont « dansé certaine farce en deux maisons, à l’escandale de l’église »45. Et là, nous sommes à deux pas de l’assassinat de Henri IV…

37Les farces scandaleuses qui s’en prennent à l’Église et la religion connaissant de la sorte une histoire mouvementée. Ici, la parole théâtrale se retrouve dans un contexte de propagande (gallicane), d’hérésie (de l’auteur), de doctrines reprouvées (et donc aussi de sermons) et de la possession de livres reprouvés. S’y ajoute la question des différentes autorités : l’une donne la permission ou sanctionne le texte, l’autre fait enquête et condamne l’auteur, le texte, la représentation.

Engendrant scandale : le scandale comme conséquence

38Tout au long de la série d’exemples présentés plus haut, on a pu voir comment le scandale est également vu comme une conséquence – que ce soit au niveau du danger pour la moralité de la personne qui assiste à de tels jeux ou tout bêtement sur le plan de l’ordre public menacé par des « propos séditieux » (littéralement donc : invitant à la sédition). Là où ces exemples ont été présentés dans la logique de l’objet du scandale, celui ou ce contre qui ou quoi le scandale se dirige, et concerne donc surtout le texte du jeu, les textes autour du jeu, notre dernière catégorie de pièces scandaleuses est constituée par le scandale de la représentation.

  • 46  A. Renouard, Traité des droits d’auteur, Paris, Renouard, 1838, p. 198.

39Le parlement de Paris s’en prend, en 1525, aux jeux dans les collèges universitaires où l’on pourrait « dire des paroles pouvant mouvoir le peuple à sédition »46. C’est donc bien la conséquence qui est en jeu.

  • 47  Coutumes et ordonnances du pays de Namur, Malines, Vander Elst, 1733, p. 321.

40En 1601 encore, les archiducs s’opposeront, pour Namur, à ce que l’on chante, joue ou récite publiquement (en compagnies ou en secret) des jeux, farces, ballades, chansons, « comédies », « refrains », sonnets ou autres semblables écrits « qui puissent engendrer scandale ou mauvaise édification »47. N’importe le texte : on s’intéresse aux conséquences possibles.

  • 48  E. de Fréville, « Variétés archéologiques au sujet d’une mascarade dont Dieppe fut le théâtre (144 (...)

41Le même phénomène est signalé à Dieppe, où une mascarade bien particulière fut l’objet d’une répression en 1449. L’archevêque de Rouen, Raoul Roussel, se voit contraint d’intervenir : il aurait interdit les farces et les sotties48 – le conditionnel est ici bien à sa place, car en fait il stipule

ne aliquis de cetero in dicta villa se indueret vestibus dyabolicis nec haberet faciès larvatas nec discurreret in illo statu per villam prout ab antiquo ibidem licet male fieri consuetum erat in predicto festo unde provenerant scandala et mala.

42Un élément qui a son importance ici, c’est que le théâtre intervient souvent aussi, justement, pour corriger le scandale public. Farces et sotties dénoncent des travers et si elles s’en prennent à des personnes, c’est souvent bien pour contrer le désordre public. Par un jeu de miroirs exemplaire, le scandale devient farce et la farce n’est pas scandale. Cette dénonciation, où l’acception de la « publication » que peut revêtir le terme scandale se précise, donne une nouvelle aspectation à la notion même de farce scandaleuse.

  • 49  X. Kohler, « La Réforme à Porrentruy », Bulletin de la Société d’Histoire du Protestantisme frança (...)
  • 50  Guillaume Farel, nouvelle biographie, p. 349.

43À Porrentruy, par exemple, lorsque le curé de la ville se voit accusé et que les bourgeois demandent un prêtre « plus craignant Dieu » on joue une moralité, La mère commune, qui satirise le prêtre indigne49. Un autre cas nous vient de Thonon, où Michel de Blonay organise avec les enfants de la ville une farce, en 1536, où une critique acerbe de l’Église est mise dans la bouche de Guillaume Farel – le clergé est choqué au point d’organiser une contre-manifestation où Blonay est brûlé en effigie50. On retrouve le rituel, on retrouve l’hérésie.

  • 51  Archiv für das Studium der neueren Sprachen und Literaruren, 71, 1884, p. 299-302, repris en tradu (...)
  • 52  A. Angot, « Quelques mystères joués au bas-Maine », Revue archéologique du Maine, 26, 1889, p. 113 (...)

44Les punitions peuvent être encore plus sévères : un témoin oculaire allemand, qui a assisté à un « jeu très beau et très bien pensé » à Paris, en 1540, nous fournit une longue description de la pièce fort polémique et ajoute que, à la fin, cinq des acteurs ont été jetés « dans la rivière qu’on appelle la Seine, et furent noyés »51. Le nombre de cas où des représentations mènent à des problèmes sur le plan de l’ordre public est énorme et il y a autant de catégories que de cas concrets, a-t-on parfois l’impression – mais il y a certes aussi un lien à faire avec le type de document qui nous le relate. Des lettres de rémission, on tire une autre logique que celle des délibérations capitulaires ; des journaux et mémoires, d’autres informations que des ordonnances. C’est bien une lettre de rémission qui nous relate comment, en 1551, on a joué à Beaulieu (Maine) un mystère de saint Etienne où de jeunes nobles ivres se moquent des gens du peuple qui l’avaient monté, par des provocations et où le tout se termine par une bagarre et une mise à sac du théâtre52. Dans ces cas, donc l’atteinte à l’ordre public est claire et le scandale est dans les conséquences.

  • 53  AD Nord, Inventaire p. 443, cité par G. Lecocq, Le théâtre à Saint-Quentin, Paris, Simon, 1878, p. (...)
  • 54  Ibid., p. 111-112.

45Dans les ordonnances, par exemple celle du gouverneur de Lille en 1573, il s’agit d’interdire tout jeu ou poème qui puisse « engendrer scandalle ou mauvaise edification au peuple » – et là nous sommes encore dans l’acception du scandale comme conséquence, mais le document ajoute qu’on ne doit pas non plus y mêler des propos « touchant notre religion » ni de dérision de personnes – ce qui reprend nos deux premiers cas53. Au mois d’août de la même année, l’évêque de Tournai fait faire une enquête au sujet de jeux joués pendant les offices : les six témoins insistent sur l’obscénité des pièces, qui parlent de plaisirs défendus, utilisent des paroles « quelque peu malhonnêtes » – à noter que ces jeux mettaient en scène les combats merveilleux des Douze Pairs de France54. Rien n’est donc totalement simple et au moment où l’on croit avoir saisi l’objet d’étude, il se soustrait aussitôt à nos yeux.

  • 55  Rappelons que Tartuffe, en habit religieux en 1664 deviendra Panulphe, en habit laïc, dans la repr (...)
  • 56  Archives Départementales de la Seine-Maritime G 2159 (1544-1545) ; transcrit e.a. ms. BNF n.a.fr. (...)

46Un dernier objet de scandale a à voir avec les costumes, le déguisement. Nul besoin d’attendre le Tartuffe de Molière55 pour que le clergé se scandalise de la mise en scène du religieux, en habits religieux. Ainsi, devant l’Officialité de Rouen, le 16 février 1545, il y a plainte contre les Conards, les « trajediatores conardisie » qui « au scandale de la ville, du chapitre et de l’église » avaient revêtu l’un de leurs acteurs de surplis et d’aumusse, lui avaient supposé des crimes, l’avaient condamné à mort et livré au bourreau. Le 15 mars 1545, le Parlement ordonne une enquête56. Les documents sur la suite de l’affaire, encore une fois, manquent.

  • 57  Voir A.-L. Van Bruaene, Om beters wille. Rederijkerskamers en de stedelijke cultuur in de Zuidelij (...)
  • 58  Sur ces déguisements des gueux, voir H. F. K. van Nierop, « A Beggar’s Banquet. The Compromise of (...)

47Un dossier extrêmement instructif – et bien riche – a été conservé sur les « jeux scandaleux » à Bruxelles, en 155957. Non seulement des dépositions de témoins et une partie de l’enquête ont été conservées, mais encore des fragments de rôles et de textes. La première pièce avait même été couronnée par le magistrat et ce au grand mécontentement des Cordeliers. Ce qui paraît notamment avoir fait problème, c’est l’emploi d’un habit de Cordelier réel sur scène. En fait, il doit y avoir eu représentation de trois pièces scandaleuses, mais les informations sont toutefois partielles : on a l’impression que les acteurs, de leur part, veulent souligner que les pièces sont déjà anciennes (et ne peuvent donc porter sur l’actualité) ; les témoins, de leur part, paraissent avant tout vouloir éviter d’être mêlés à l’affaire et restent passablement vagues. Dans les années qui vont suivre, d’ailleurs, le déguisement en « robe grise » va fonctionner comme un défi lancé par les gueux contre le pouvoir ; à ce qu’il paraît, le seigneur de Brederode fit son apparition, tantôt en costume de cardinal, tantôt en costume de Franciscain58. Ce qui montre également que là où la documentation est bien riche, les conclusions à en tirer ne sont pas évidentes.

48Une belle mention, qui paraît bien changer quelque peu la perspective, nous viens de la ville de Reims. Le Journalier du charpentier Jean Pussot relate que :

  • 59  Il s’agit de Renée de Lorraine, abbesse.
  • 60  S. Simiz et J. Buridant, Jounalier de Jean Pussot, maître-charpentier à Reims (1568-1626), Villene (...)

Aux jours gras de ladicte année 1599 fut joué sur eschaffault a Sainct Pierre aux nonnains, présent Madame59 et publicquement devant tous ceulx qui vouloient entrer, par les dames religieuses dudit Sainct Pierre, plusieurs jeulx, tragédies et farces ordynaires, resvestues, desguisées comme est de coustume à farceurs, baladins, amantz, gestueuses selon l’ordre des joueurs au grand regret de plusieurs gens de bien qui trouvoient ce faict scandalleu et maudict pour dames de telle qualité60.

49La question du statut du costume et de son caractère possiblement scandaleux avait déjà été traitée par Jean Thenaud dans son Triumphe des vertus. Celui-ci constate que bien des gens « se trouvent scandalisés de voir les vêtements sacerdotaux et royaux portés par les basochiens et autres joueurs de farces », mais il déclare qu’il faut bien de tels costumes qui font « la saulce du jeu » et détiennent le peuple au spectacle.

  • 61  H. Abord, Histoire de la réforme et de la ligue dans la ville d’Autun, Autun, Dumoulin, 1855, p. 2 (...)

50À Autun aussi, le costume ecclésiastique fait problème61 :

On fera plainte sur ce que patemment, en cimetière et lieu saint au devant de l’église, se fait jeu d’escrime et prix public, contre les ordonnances et intentions des edits du roi.

51Mais le plus intéressant, c’est bien l’ordonnance invoquée : celle d’Orléans, du 23 juillet 1566, article XXIV, où il est stipulé :

Défendons à tous joueurs de farces, bateleurs et autres, jouer es jours de dimanches et fêtes, aux heures du service divin, se vêtir d’habits ecclésiastiques, jouer choses dissolues et de mauvais exemple, à peine de prison et de punition corporelle, et à tous juges leur bailer permission de jouer durant lesdites heures.

  • 62  Sous peu (2012/2013), Simon Gabay compte soutenir une thèse à l’Université d’Amsterdam sur les rap (...)

52Un autre point à considérer en tout cela est bien que parfois, le scandale touche tout simplement la question de la dignité des clercs. Sans pouvoir entrer ici dans le détail de cette question importante et essentielle62 – qui a à voir avec les vêtements et même, dans un cas bien précis d’une dispense aux clercs de pouvoir faire pousser leur barbe pour jouer des apôtres (les apôtres avaient bien des barbes, les clercs ne peuvent pas en avoir), le rapport du clergé au théâtre reste extrêmement problématique. Ce que cette troisième catégorie, les pièces engendrant scandale, montre pourtant bien, c’est qu’il n’est nullement établi a priori où les problèmes pourront surgir, que les différentes autorités ont de différentes visions à ce sujet, que la réalité de la représentation est parfois rebelle par rapport au texte, au jeu.

Conclusion

53L’idée de la farce scandaleuse a été analysée ici à partir de documents d’archives. Si une chose est bien claire, c’est bien à quel point il est urgent de relier l’histoire du droit, l’histoire du théâtre à des sources administratives qui donnent nécessairement un point de vue différent de ce que l’on croyait connaître à partir du matériel textuel conservé. Une exception anecdotique (et inédite) à part, nul texte théâtral n’a jamais pu montrer la curieuse réalité de la farce scandaleuse. Bien sûr, on n’est plus à la recherche de l’histoire « so wie es gewesen ist », mais on se flatte pourtant de trouver une entrée, de se munir d’une clé afin de dépasser le simple niveau des textes conservés pour en arriver à une véritable histoire du théâtre dans sa théâtralité. En d’autres mots : qu’est-ce qui dit l’histoire du théâtre ? Le lecteur aura compris que les textes conservés ne la disent pas. Il aura également compris que les documents d’archives en disent quelque chose, mais ne la disent pas non plus.

54La nature des documents, en quelque sorte, détermine la vue qu’ils pourront secréter. Une seconde constatation qui s’impose, c’est bien que, dès le XVe siècle, il existe une tension entre le niveau du texte et le niveau de la représentation effective. Le contrôle du théâtre, le scandale qu’il pourra faire, se situe de prime abord sur le plan du texte et de là un contrôle croissant – mais manifeste dès le début du XVe siècle – des textes préalable à la représentation. En même temps, force nous est de constater que ce contrôle n’a pu être que peu effectif, car les stipulations se répètent, car les régulations se resserrent, car les problèmes s’accumulent.

55Ce problème du statut du texte opère surtout au sujet de deux questions : d’une part que l’on nomme des personnes et d’autre part que l’on s’en prend à la religion. Que le fait de nommer des personnes par leur nom constitue aussi une manière de dénoncer des scandales et que le fait de s’en prendre à la religion implique également une mise en question des scandales perpétrés au sein de l’église-mère, ajoute du sel à cet aspect du scandale farcesque.

56Le texte, toutefois, n’est pas la représentation et les autorités s’en sont vite rendu compte. Il se passe des choses, des choses peuvent se passer lors de la représentation qui ne sont qu’insuffisamment couvertes par le texte : de là l’idée de tout ce qui pourra « engendrer scandale ». Et là encore, il existe un problème en amont de la représentation, c’est-à-dire tout ce qui pourra faire scandale, et un problème en aval de la représentation, c’est-à-dire tout ce qui a effectivement fait scandale. L’opérabilité de telles distinctions ne se limite d’ailleurs nullement au théâtre du Moyen Âge finissant ou de l’époque prémoderne : ce sont des questions qui jouent pour le théâtre d’un Molière, d’un Voltaire.

57Il faut également souligner que ce type de problèmes dans la régulation de la parole publique ne se limitent nullement au seul théâtre : les sermons, les ballades, les dictiers, le chant de Psaumes (de préférence dans la traduction de Marot), les libelles : enfin, un ensemble impressionnant de types de textes « publics » sont soumis à des régulations analogues. Ce qui implique aussi qu’un jour, on devra bien mettre en question ce qu’on étudie quand on prétend étudier le théâtre. Là, il y aura toutefois ample matériel pour un autre article.

58La farce a été scandaleuse, et ce pour différentes raisons. La farce a été scandaleuse aussi puisque, d’une certaine manière, la notion de scandale était bien inscrite dans le genre – mais l’étude du genre à partir des textes conservés (et il faut se demander encore ce que cette documentation textuelle représente, mais passons) n’a pas permis de le voir. Si le présent article a bien pu montrer une chose, c’est bien l’urgence d’une rétrodocumentation des cas, de l’approche de l’histoire du théâtre par tous les documents qui sont à notre disposition et non pas par les seuls textes. Les reflets partiels de représentations, de titres et de textes perdus, de l’implication de personnes dans des représentations de farces, montrent une histoire de la farce qui n’a rien à voir avec l’histoire de la farce. Et ce pour le bien commun : la compréhension de ce qui a été controversé, de ce qui a pu faire l’objet d’une législation ou d’une juridiction.

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Notes

1  Je reviendrai longuement sur cette question de la « farce aristocratique ou épiscopale » dans mon Histoire de la farce, à paraître aux éditions Classiques Garnier.

2  Ils emploient le terme surtout comme qualificatif des mystères, du théâtre religieux, pour montrer leur opposition à l’existence de telles représentations : la métaphore « farces scandaleuses » pour désigner ces pièces religieuses est des plus fréquentes dans ce type de discours.

3  Il s’agit bien d’une catégorie différente, car le terme n’est pas pris, ici, comme métaphore.

4  A. Provost, Domus Diaboli. Un évêque en procès au temps de Philippe le Bel, Paris, Belin, 2010, p. 12.

5  C. du Boulay [Bulaeus], Historia universitatis parisiensis, Paris, Bresche-Laize-de-Bresche, 1670, IV, p. 93.

6  C. Grosse, « Rationale graphique et discipline ecclésiastique », P. Chareyre et al., La mesure du fait religieux (BSHPF 2007), p. 543-559, ici p. 551.

7  C. Magnin, CR de F. Génin, Maistre Pierre Patelin, Journal des Sçavans, janvier 1856, p. 34-48, p. 36 – d’ailleurs, suite à cette proclamation « furent aucuns qui jouerent personnages de la Passion Nostre Seigneur ».

8  M. Bouhaïk-Gironès, La Basoche et le théâtre comique : identité sociale, pratiques et culture des clercs de justice (Paris, vers 1400-1550), thèse, Paris VII, 2004, p. 129 ; transcription p. 344-345 (édition commerciale : Les clercs de la Basoche et le théâtre comique, Paris, Champion, 2007).

9  Et cela bien avant la première attestation dans une acception théâtrale connue des lexicographes.

10  E. Serrigny, « La représentation d’un Mystère de Saint-Martin à Seurre en 1496 », Mémoires de l’Académie des sciences, arts et belles lettres de Dijon, série 3, 10, 1888, p. 275-477, ici p. 277.

11  R. Favreau et al., Le diocèse de Poitiers, Paris, Beauchesne, 1988 p. 100.

12  Labyrinthe de Fortune, fol. F.iiir, cité par P. Galland et T. Cave, Poétiques de la Renaissance, Genève, Droz, 2001, p. 345.

13  T. Schuurmans et R. Stuip, Jean Thenaud, Le Triumphe des vertuz, troisième traité : le Triumphe de Justice, Genève, Droz, 2007, p. 230.

14  O. Beuve, Le théâtre à Troyes aux XVe et XVIe siècles, Paris, Plon, 1913, p. 8.

15  AD Aube G 6G3 registre fol. 65v-66r..

16  M. Bouhaïk-Gironès, « Le procès des farceurs de Dijon (1447) », European Medieval Drama, 7, 2003, p. 117-134.

17  Manuscrit BnF 5908 fol. 77 (et BnF Dupuy 250 fol. 29v).

18  2 Mi 171 R 5 (ancien G 187), J. Gauthier, Inventaire sommaire des Archives Départementales antérieures à 1790. Archives ecclésiastiques – série G, Besançon, Jacquin, 1900, p. 109.

19  Archives Municipales d’Angers, BB 15 fol. 83, cf. C. Port, Inventaire analytique des archives anciennes de la mairie d’Angers, Paris-Angers, Dumoulin-Cosnier et Lachèse, 1861, p. 18.

20  E. Boutaric, Actes du parlement de Paris : première série de l’an 1254 à l’an 1328, Paris, Plon, 1863, p. LXIII (AN X1A 1522 fol. 44v).

21  M. Félibien, Histoire de la ville de Paris, Paris, Desprez-Desessartz, 1725, t. 4, p. 645.

22  Isambart, Decrusy, Taillandier, Recueil général d’anciennes lois françaises, depuis l’an 420, Paris, Belin-Leprieur/Verdière, 1829, vol. 14, p. 402.

23  Feria tertia post dom. III Quadr., cité par O. Le Roy, Études sur le théâtre français du XIVe et du XVe siècle. La comédie sans titre et les miracles de Notre Dame, Paris, E. Souiller, 1902, p. 303.

24  L. Febvre, Notes et documents sur la Réforme et l’Inquisition en Franche-Comté, Paris, Champion, 1912, p. 108.

25  N. Périaux, Histoire sommaire et chronologique de la ville de Rouen, Rouen, Lanctin-Métérie, 1874, p. 189.

26  H. Prentout, Renovatio ac reformatio in universitate cadomensi, Cadomi, C. Valin, 1901, p. 47-48.

27  Il est impossible d’analyser, ici, ce qu’a pu être la bande, les compagnons ou la société des Enfants-sans-Soucy. Pour l’instant, la devise semble bien être : ne rien croire, tout mettre en question, attendre la monographie Histoire de la farce par J. Koopmans (Paris, Classiques Garnier).

28  N. Weiss, La Chambre ardente, Paris, Fischbacher, 1889, p. 337, 342.

29  Jacques Bruneau de Tartifume, Histoire d’Angers contenant ce qui est remarquable en tout ce qui estoit anciennement dict la ville d’Angers, Angers, BM ms. 995. Voir E. Picot, « Les moralités polémiques ou la controverse religieuse dans l’ancien théâtre français », Bulletin historique et littéraire de la Société de l’histoire du protestantisme français, 41, 1892, p. 617-633, ici p. 625.

30  Permettons-nous une petite note : le rôle du texte – manuscrit et imprimé – dans toutes ces procédures est des plus intéressantes au sens où il nous éclaire sur ce qu’est, ce qu’a bien pu être un texte, mais aussi sur la question de savoir à quel point l’on réduit la représentation au texte représenté, mais également au sujet de la présence de textes et de leur nature (brouillon, manuscrit, imprimé) dans la préparation d’une représentation.

31  Ce qui veut dire qu’ici, l’Église et l’autorité royale s’opposent à la ville.

32  H. Patry, « La Réforme et le théâtre en Guyenne au XVIe siècle », Bulletin de la société de l’Histoire du Protestantisme français, 50, 1901, p. 523-528 ; du même « Idem (2e article) », Bulletin de la société de l’Histoire du Protestantisme français, 51, 1902, p. 141-151. Les « autres dénommés sans soucy », bien naturellement, doivent avoir leur place dans une nouvelle histoire du mythe des Enfants sans Soucy – certes pas une troupe parisienne, mais plutôt un nom générique de bandes de jeunes (contestataires ?).

33  C. Mazouer, « Théâtre et société à Bordeaux jusqu’à la fin du XVIe siècle, La vie théâtrale dans les provinces du Midi, », éd. Y. Giraud, Tubingue, Gunter Narr, 1980, p. 73-88, p. 82.

34  J. de Métivier, Chronique du Parlement de Bordeaux, Bordeaux, Gounouilhou, 1887, t. 2, p. 136.

35  Id., p. 138.

36  Comme dans la sottie du Roi des Sots, où Coquibus est porteur de rats (éd. M. Bouhaïk, J. Koopmans et K. Lavéant, Recueil de sotties, Paris, Classiques Garnier, t. 1 – sous presse) ; cf. M. Jones, The Secret Middle Ages, Discovering the Real Medieval World, Westport-Londres, Prager, 2003, p. 46-47.

37  F.C. Van Boheemen et Th. C. J. van der Heyden, Retoricaal Memoriaal, Bronnen voor de geschiedenis van de Hollandse rederijkerskamers van de middeleeuwen tot het begin van de achttiende eeuw, Delft, Eburon, 1999, p. 204.

38  J. Van Vloten, Nederlands Opstand tegen Spanje, Haarlem, Bohn, 1856, p. 188. Encore une fois le texte est impliqué.

39  Archives du chapitre du Mans, registre B 15, citées dans Bibliothèque Municipale du Mans ms. 257, d’après Dom P. Piolin, Recherches sur les mystères qui ont été représentés dans le Maine, Le Mans, Cosnier-Lachèse, 1857, p. 42.

40  Voir à ce sujet mon article « L’effectivité de la législation sur le théâtre : le Parlement de Paris a-t-il interdit les mystères (en 1548) ? », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes, 23, 2012, p. 141-150.

41  A. Ledieu, « Vieilles coutumes amiénoises », Annales de l’Est et du Nord, 1909, p. 215-254, p. 250. Sur le théâtre amiénois, l’on se reportera à cet article plutôt qu’à d’autres publications – même plus récentes – car le dépouillement des sources et leur transcription y sont nettement meilleurs.

42  Ibid., p. 252.

43  Le Roux de Lincy, et F. Michel, Recueil de farces, moralités et sermons joyeux, Paris, Techener, 1842, t. III, pièce 16.

44  J. Boulenger, Les protestants à Nîmes au temps de l’édit de Nantes, Paris, Fischbacher, 1903, p. 197-200.

45  A. Puech, « Les Pharmaciens d’autrefois », Mémoires de l’Académie de Nîmes,série 7, t. 2, 1879, p. 255-428, ici p. 411.

46  A. Renouard, Traité des droits d’auteur, Paris, Renouard, 1838, p. 198.

47  Coutumes et ordonnances du pays de Namur, Malines, Vander Elst, 1733, p. 321.

48  E. de Fréville, « Variétés archéologiques au sujet d’une mascarade dont Dieppe fut le théâtre (1449-1451) », Précis analytique des travaux de l’Académie de Rouen, 1851, p. 262-266.

49  X. Kohler, « La Réforme à Porrentruy », Bulletin de la Société d’Histoire du Protestantisme français, 12, 1863, p. 22-24.

50  Guillaume Farel, nouvelle biographie, p. 349.

51  Archiv für das Studium der neueren Sprachen und Literaruren, 71, 1884, p. 299-302, repris en traduction dans E. Picot, « Les moralités polémiques », p. 620-625.

52  A. Angot, « Quelques mystères joués au bas-Maine », Revue archéologique du Maine, 26, 1889, p. 113-121, p. 116.

53  AD Nord, Inventaire p. 443, cité par G. Lecocq, Le théâtre à Saint-Quentin, Paris, Simon, 1878, p. 111.

54  Ibid., p. 111-112.

55  Rappelons que Tartuffe, en habit religieux en 1664 deviendra Panulphe, en habit laïc, dans la représentation de 1667.

56  Archives Départementales de la Seine-Maritime G 2159 (1544-1545) ; transcrit e.a. ms. BNF n.a.fr. 20923 fol. 363 (papiers Bonnin sur l’histoire du théâtre normand).

57  Voir A.-L. Van Bruaene, Om beters wille. Rederijkerskamers en de stedelijke cultuur in de Zuidelijke Nederlanden (1400-1600), Amsterdam, Amsterdam University Press, 2008, p. 115-117 ; édition des jeux : W. Van Eeghem, Drie schandaleuse spelen, Anvers, De Sikkel, 1937.

58  Sur ces déguisements des gueux, voir H. F. K. van Nierop, « A Beggar’s Banquet. The Compromise of the Nobility and the Politics of Inversion », European History Quarterly, 21, 1991, p. 419-443. Ce qui ajoute du sel à cette histoire, c’est bien sûr le passage du Quart Livre de Rabelais, où Villon aurait voulu organiser une Passion, où on lui refuse le prêt d’habits sacerdotaux (ce serait défendu) et où Villon rétorque que cela ne s’entend que de jeux profanes, comme il en a vu pratiquer à Bruxelles : nous sommes en 1552 ! Voir mon article » Maistre François Villon, sus ces vieulx jours, se retira à Sainct Maixent en Poictou », N. Dauvois et J. Vignes, En relisant le Quart Livre de Rabelais, Cahiers Textuels, 35, 2012, p. 59-69.

59  Il s’agit de Renée de Lorraine, abbesse.

60  S. Simiz et J. Buridant, Jounalier de Jean Pussot, maître-charpentier à Reims (1568-1626), Villeneuve-d’Ascq, Septentrion, 2008.

61  H. Abord, Histoire de la réforme et de la ligue dans la ville d’Autun, Autun, Dumoulin, 1855, p. 272.

62  Sous peu (2012/2013), Simon Gabay compte soutenir une thèse à l’Université d’Amsterdam sur les rapports entre l’Église et le théâtre.

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Pour citer cet article

Référence papier

Jelle Koopmans, « Quand la farce fait scandale »Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 25 | 2013, 93-108.

Référence électronique

Jelle Koopmans, « Quand la farce fait scandale »Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 25 | 2013, mis en ligne le 30 juin 2016, consulté le 13 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/13078 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.13078

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Auteur

Jelle Koopmans

Université d’Amsterdam

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