Le pouvoir et la foi au Moyen Âge, en Bretagne et dans l’Europe de l’Ouest. Mélanges en mémoire du professeur Hubert Guillotel, dir. Joëlle Quagheheur et Sylvain Soleil
Le pouvoir et la foi au Moyen Âge, en Bretagne et dans l’Europe de l’Ouest. Mélanges en mémoire du professeur Hubert Guillotel, dir. Joëlle Quagheheur et Sylvain Soleil, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2010, 747p.
ISBN 978-2-7535-1090-6
Texte intégral
1« Lorsque la notoriété, le rayonnement, l’âge le justifient (…), il est dans les usages les mieux ancrés de la tribu des universitaires d’offrir un volume de ‘mélanges’ à un collègue qui est parfois devenu un ami ». C’est par ce constat aussi ironique que réaliste que Jacques Revel et Jean-Claude Schmitt commençaient l’ouvrage d’hommage à Jacques Le Goff (L’ogre historien. Autour de Jacques Le Goff, dir. Jacques Revel et Jean-Claude Schmitt, Paris, Gallimard, 1998, p. 9). Ces circonstances joyeuses ne sont pas celles qui ont présidé à la réunion des mélanges en l’honneur d’Hubert Guillotel. Sa mort en 2004 à l’âge de 63 ans l’a saisi dans ses travaux d’érudition et dans ses activités à l’université de Rennes I, où son collègue Sylvain Soleil le décrit comme un « guide » qui a pesé fortement sur les activités d’histoire du droit pendant plus de dix ans (p. 11). Il reste que, comme le soulignaient Jacques Revel et Jean-Claude Schmitt, pour les vivants et les morts, les volumes de mélanges restent une curieuse pratique. De quoi rend-on compte en réunissant une somme d’articles savants au nom d’un professeur ? D’un parcours, de méthodes, d’une sociabilité, d’intuitions, de travaux ? C’est évidemment tout cela à la fois, illustrant un paradoxe du travail universitaire : il vise à une objectivité toujours plus grande et à la mise par écrit de faits établis, mais il correspond toujours aussi à une vie singulière, souvent exemplaire, et parfois intimidante quand il s’agit d’éclairer les conditions de production de ces vérités.
2Comme Olivier Guillot le souligne, la carrière d’Hubert Guillotel s’est toujours tenue à la frontière de l’histoire du droit et de l’histoire médiévale. Cette double appartenance qui aurait pu être problématique pour un jeune universitaire dans la mesure où ces disciplines, bien que proches dans les objets qu’elles considèrent, n’en sont pas moins institutionnellement tout à fait distinctes, est devenue pour lui la source d’une réflexion inédite et continue. Il a développé, depuis sa thèse soutenue en 1973 à l’université de Paris II – Assas sur les actes des ducs de Bretagne de 944 à 1148, une méthode pour l’histoire du droit, s’inscrivant dans la plus radicale critique des sources – critique qui le conduisait comme le rappelle Olivier Guillot (p. 45) à valoriser les paradoxe dans ses analyses documentaires. La richesse de l’œuvre d’Hubert Guillotel ne se nourrit pas seulement de sa capacité à éditer et analyser les sources, mais aussi à comprendre les cadres majeurs qui structuraient les pratiques et l’imaginaire des pouvoirs au Moyen Age. Par ailleurs, ces analyses s’inscrivaient aussi dans une recherche continue sur l’histoire de la Bretagne, en particulier celle du haut Moyen Age, sans exclure cependant d’autres périodes.
3Pour rendre compte de l’œuvre et de l’importance d’Hubert Guillotel, les contributions recueillies dans cet ouvrage sont très nombreuses : pas moins de 44 articles formant un volume de près de 750 pages. L’ouvrage se découpe en deux grands pans (« Le pouvoir sur les âmes » et « Le pouvoir sur les hommes »), eux-mêmes subdivisés en trois parties chacun (« Prier », « Réformer », « Ecrire » d’un côté et « Juger », « Gouverner », « Combattre » de l’autre), cette partition devant rendre compte des grands axes en même temps que de la complexité de toute une vie de recherche.
4La critique des documents
5Un hommage à la vie et à l’œuvre d’Hubert Guillotel se devait presque de commencer par quelques études sur les sources disponibles pour entreprendre une histoire des institutions. Ainsi, Olivier Guillot propose une série de remarques « A propos de quelques actes de Marmoutier pour Chemillé de la mi-XIe siècle » (p. 45-62), tandis que Bernard Tanguy analyse les « Monasteriola aux IXe et Xe siècles d’après le Cartulaire de Saint-Sauveur de Redon et les Gesta des saints de Redon » (p. 63-80). Dans la lignée des travaux du professeur Guillotel, les auteurs réaffirment la nécessité de commencer toute étude des institutions par la critique des sources, celle-ci servant à mettre en évidence les institutions et leur fonctionnement. K. S. B. Keats-Rohan propose ainsi de lier l’étude des nécrologies du Mont-Saint-Michel pour mettre en évidence non seulement les noms des différents abbés, mais aussi leur rôle dans la vie de l’abbaye : « The identification of Abbots in the Necrologies of Mont-Saint-Michel » (p. 89-108). Daniel Pichot revient quant à lui au cartulaire de Redon, source essentielle de l’histoire ecclésiastique de la Bretagne du haut Moyen Age et qui a tant occupé Hubert Guillotel, en analysant « La notice 294 du cartulaire de Redon : les moines, la réforme et la société » (p. 131-144).
6Enfin, une série de contributions étudie le corpus hagiographique : Bernard Merdignac, « Châtiments et égarement dans quelques Vitae bretonnes » (p. 187-196) ; Philippe Guigon, « La donation d’Enesmur à l’abbaye Saint-Sauveur de Redon » (p. 225-242) ; à cette occasion, Stéphane Morin, dans « Réflexion sur la réécriture de la Vie de saint Brieuc au XIIe siècle : Briomaglus, Primael et Brioccius au temps de la réforme grégorienne », (p. 243-260) et André-Yves Bourgès, en analysant « Propagande ducale, réforme grégorienne et renouveau monastique : la production hagiographique en Bretagne sous les ducs de la maison de Cornouaille » (p. 145-166), soulignent le lien entre analyse des sources et compréhension des mécanismes de légitimation du pouvoir ecclésiastique aussi bien que temporel.
7Les axes pour une étude du pouvoir
8Le pouvoir se trouve au cœur de l’œuvre d’Hubert Guillotel et des contributions présentes dans ce volume d’hommages. Le lien entre institution et pouvoir est à la fois évident et complexe ; c’est ce lien que l’historiographie d’Hubert Guillotel permet d’étudier, non pas en le simplifiant, mais au contraire en rendant compte de toute la complexité de ces relations entre institutions et pouvoir. Au-delà, par la diversité des thématiques rencontrées, c’est la notion même d’institution qui est questionnée. En effet, la multiplicité des cas permet de s’interroger sur ce qui fait institution et sur ce que fait l’institution dans une société donnée.
9Dans toute une série de contributions aux mélanges en l’honneur du professeur Guillotel, nous trouvons ainsi des études sur le fonctionnement de la justice sur une large période allant du haut Moyen Age au Moyen Age central. Soazick Kerneis, dans « Jugement des hommes, jugement de Dieu. Les Irlandais et la vérité judiciaire (Ve-VIIIe siècles)» (p. 341-360) met en évidence, à partir de l’évolution de la notion de vérité judiciaire et de la pratique de l’ordalie comment, pour le cas de l’Irlande, on passe d’un système qu’on peut qualifier de romano-païen à un système chrétien. Il montre à la fois la continuité des pratiques et la lutte continue des autorités ecclésiastiques pour christianiser des pratiques. L’enjeu de ce processus est de maintenir la capacité d’un système judiciaire maintenant chrétien et royal à produire une vérité acceptable et acceptée. Il met en évidence comment le fait de juger au Moyen Age (et au-delà comment toute justice) entretient un lien particulièrement étroit avec toutes les institutions ecclésiastiques. Au cœur de cette relation, on trouve la problématique de l’efficacité – au sens propre du terme – de la justice. Cette relation complexe et fondamentale entre la justice en général, pas seulement canonique, et l’Eglise est approfondie par deux autres études, au travers d’abord d’une étude biographique, celle de Michael Jones (« Master Vacarius, civil lawyer, canon of Southwell and parson of Norwell, Nottinghamshire », p. 389-406) et ensuite par une étude de cas (« Un procès criminel devant la juridiction de l’abbaye de la Vieuville », p. 407-416), par Marie-Yvonne Crépin.
10En portant le regard sur les fondements du pouvoir, en Bretagne et au-delà, pendant toute la première moitié du Moyen Age en Occident, les études réunies en hommage au travail d’Hubert Guillotel dessinent un projet d’analyse des structures fondamentales du Moyen Age occidental. Dans une autre tradition institutionnelle, au même moment, quelques rues plus loin dans Paris, on aurait parlé sans hésiter d’une anthropologie historique de l’occident médiéval.
11On aurait cependant tort de croire que l’histoire des institutions qu’Hubert Guillotel a suscité autour de lui est une histoire théorique et désincarnée. Au contraire, plusieurs contributions vont chercher dans le territoire et même dans la terre les traces des pratiques institutionnelles. Ainsi André Chédeville propose de questionner les enjeux d’une fondation castrale (« Figens palum in castellum edificando, ut mos est… A propos de la fondation du château de Josselin », p. 451-458), tandis que Patrick Kernevez, dans le cadre du Finistère (« Mottes et châteaux du département du Finistère », p. 459-474), propose d’étendre l’étude de l’implantation à tout un département.
12Le territoire et son contrôle matériel, militaire et juridique sont les moteurs fondamentaux des rapports de force au Moyen Age, comme le rappellent Patrick Souben et Michel Brand’Honneur dans leur article sur « Les enjeux de pouvoir autour de l’ancien domaine monastique carolingien de Saint-Bern » (p. 475-492), puis Jean-Claude Neuret dans sa contribution intitulée « Au cœur de la marche bretonne, l’ascension et le démantèlement d’une grande châtelainie, La Guerche-Pouancé (milieu du XIe – milieu du XIIIe siècle) » (p. 639-684). Enfin Jean-Yves Le Moing, dans « L’évêché imaginaire du Yaudet » (p. 197-214), rappelle le lien profond entre la construction matérielle et intellectuelle du territoire et la capacité des acteurs à produire un imaginaire collectif qui permet de déployer des institutions et des pratiques sur ce territoire.
13Au même titre que le territoire, le château, le procès ou la preuve, la famille est une institution majeure du Moyen Age. La famille est à la fois une réalité de fait et de droit. Elle s’inscrit dans la durée, et c’est même dans une certaine mesure à sa durée qu’on la reconnaît et qu’on la définit, la cellule familiale du Moyen Age étant pensée dans la perspective de la reproduction et de la continuation de ce qui apparaît comme le lignage. En même temps, ces études permettent de s’interroger sur ce qui constitue justement la nature même d’objets comme les lignages et sur les voies possibles pour leur étude. Ainsi, Nicolas Kermabon, dans « Le douaire des épouses des comtes de Laval, issus de la tige des Montmorency-Laval (XIIIe-XVe siècle) » (p. 507-526), montre comment de grandes familles du duché de Bretagne et, dans ce cas particulier, les comtes de Laval organisent une stratégie familiale et sociale. Le douaire est « une institution fondamentale du droit patrimonial du mariage » (p. 508), et l’auteur explique comment une famille majeure du duché de Bretagne à chaque alliance fait du douaire un instrument de valorisation de l’alliance en même temps que d’elle-même au travers de sa capacité à inclure dans le douaire des seigneuries importantes. A la fin du XIVe siècle, on observe selon lui un renforcement du contrôle des héritiers sur le douaire des veuves. Ce contrôle accru s’inscrit alors dans une logique de plus grande maîtrise par le lignage de sa destinée matérielle. Il pointe au travers de l’analyse des contrats matrimoniaux comment une institution particulière comme le douaire est à la fois source et instrument de stratégie pour les grandes familles seigneuriales de la fin du Moyen Age. Il montre bien l’enchevêtrement entre instruments de droit et rationalités sociales et politiques des familles. A la fin de cette contribution, il est par ailleurs possible de s’interroger sur une très forte reconstitution a posteriori du « lignage » comme instance rationnelle et existante dans le temps. Christophe Amiot montre, de son côté, comment il est possible de voir les traces matérielles que les lignages laissent dans le territoire, dans « Lignage et châteaux de la baillie de Rennes avant la guerre de Succession (XIe siècle – XIVe siècle) » (p. 695- 734)).
14Dans un plus petit groupe d’études, puisqu’elles ne sont que trois, la question de la légitimité est abordée. Dans un premier temps, Hervé Oudart analyse le modèle du tyran au temps de Clovis (« ‘Ut omnes te ament et timeant’. Clovis protecteur des faibles et anti-tyran dans la première lettre au roi de l’évêque Rémi », p. 437-450) ; puis Jean-Pierre Brandcourt revient sur l’« Esprit de la légitimité sous le règne de Charles VII » (p. 539-544) ; enfin, Guillaume Bernard éclaire « Le débat sur la légitimité carolingienne à la fin du XVIe siècle » (p. 559-572). On pourrait croire qu’il s’agit d’études en marge ; au contraire, la question de la légitimité permet d’éclairer la question de l’institution. En effet, l’une sans l’autre, il n’y a pas d’exercice possible du pouvoir hors de la violence. En éclairant la question de la légitimité, les auteurs nous permettent alors d’aller au cœur de la mécanique des institutions de pouvoir.
15La Bretagne objet d’histoire
16Hubert Guillotel fut un historien de la Bretagne, et l’un des plus importants d’entre eux dans le dernier quart du XXe siècle, tant parmi les juristes que les historiens. Son œuvre d’historien du droit et son œuvre d’historien de la Bretagne sont indissociables : elles se soutiennent, se complètent, se croisent régulièrement. Son travail de doctorat en 1972 sur les actes des ducs de Bretagne (944-1148) est autant l’exploration d’une pratique diplomatique et juridique qu’une histoire de la formation d’un pouvoir politique dans un territoire. Une grande partie des contributions de ces mélanges ont bien montré comment étudier des institutions revenait à étudier un territoire. Cette recherche permanente d’un ancrage des pratiques et des institutions dans un territoire est sans doute un élément essentiel de l’approche d’Hubert Guillotel pour la Bretagne. Etudiant les pratiques juridiques perceptibles en Bretagne, il a mis en évidence les institutions, et donné vie au territoire.
17Partant de là, l’œuvre d’Hubert Guillotel pose la question du statut d’une histoire régionale en général et d’une histoire de la Bretagne en particulier. Sur quels éléments peut-on s’appuyer pour affirmer la spécificité d’un territoire tant sur le plan des pratiques que des institutions ? Plus encore, que veut dire faire l’histoire d’une région en France à cheval sur le XXe et le XXIe siècle ?
18A ces questions importantes, l’ouvrage de mélanges en l’honneur d’Hubert Guillotel a le mérite d’apporter des réponses par toute une série d’études monographiques qui permettent de mieux comprendre ce que faire de l’histoire régionale veut dire aujourd’hui.
19Trois études permettent par divers moyens intellectuels de s’interroger sur ce qui constitue un territoire. Tout d’abord, Louis Lemoine propose une « Note sur les Hisperica Famina et la Bretagne » (p. 215-224) et donc sur la manière dont les textes anciens définissent un territoire comme la Bretagne. Puis Pierre-Yves Lambert, dans un article intitulé « Vieux-breton aethurec, aethuric, haethurec » (p. 361-374) poursuit la réflexion sur les liens entre matière de Bretagne et construction d’un vocabulaire breton. Christiane Plessix-Buisset revisite pour sa part une notion religieuse et politique comme la « Piété et charité dans la Très ancienne coutume de Bretagne » (p. 527-538). Elle interroge de cette manière une source fondamentale pour l’histoire de la Bretagne en questionnant la manière dont elle produit un modèle de comportement politique en particulier. Enfin, Alain Berbouche, avec son étude sur « La seigneurie ecclésiastique de Saint-Malo à la fin de l’Ancien Régime » (p. 573-578), contribue à la mise en évidence de spécificités juridiques et politiques de l’espace de la Bretagne à la fin de l’Ancien Régime ; il montre ainsi comment dans une province du royaume de France persistent des modalités très anciennes de construction de l’espace politique.
20Dans son article de « Réflexions sur les aspects juridiques de la succession à la couronne de Bretagne » (p. 375-388), Franck Bouscau interroge l’existence d’une règle de succession dans le duché de Bretagne, spécialement à partir de la guerre de Succession de Bretagne en 1341. En montrant qu’il existe à partir de cette date une volonté claire, en particulier chez les partisans de Jean de Montfort, d’exclure les femmes de la succession et en constatant que par la suite, tout au long du XVe siècle, à l’exception de la duchesse Anne, aucune n’a régné sur le duché, cet article permet de s’interroger directement sur la manière dont on constitue l’existence d’une « loi » de ce type. Alors même que dans un essai sur la loi salique Ralph Geasay (Le rôle méconnu de la loi salique, Paris, Les Belles Lettres, 2007 pour l’édition française) a bien montré comment cette dernière, qui sert pourtant de modèle aux tenants d’une « loi salique de Bretagne », n’est pas du tout un objet juridique évident et constitué tout au long du Moyen Age, il convient de remarquer que la règle de succession de Bretagne que l’on cherche à voir dans les différents cas de succession, en particulier en 1341, 1365 et 1381, n’est jamais que l’expression précise des rapports de forces du moment. Aussi, dans quelle mesure peut-on affirmer qu’il existe une règle positive réglementant la succession de Bretagne ? C’est un pas difficile à franchir selon nous. Tout au plus pourra-t-on remarquer que dans l’historiographie française la loi de succession à la couronne de France est considérée comme un marqueur de l’existence d’une identité politique nationale et que c’est peut-être l’enjeu fondamental de la mise en évidence dans le duché de Bretagne d’une telle règle. Il faut ainsi s’interroger sur la capacité de l’histoire des institutions à faire exister les institutions qu’elle étudie, à leur donner un surplus de réalité, au-delà des sources dans lesquelles les différentes pratiques ont laissé des traces.
21On trouve par la suite deux contributions, celle de Sylvain Soleil (« La Bretagne nationalisée. Droit et idéologie dans le débat parlementaire des 8-11 janvier 1790 » (p. 579-599) et celle de Claire Bouglé, « L’hermine et la pourpre. La cour souveraine de Rennes et la cour de cassation au XIXe siècle » (p. 407-416). Cette dernière, en analysant les réactions des membres de la cour de Rennes face la construction de la prééminence de la cour de cassation dans la première moitié du XIXe siècle, interroge les mécanismes de production d’une identité à la fois institutionnelle et locale. Elle montre comment se rencontre un « esprit des lieux » qui n’est pas nécessairement la défense d’une identité bretonne, mais avant tout celle d’une pratique judiciaire, de l’identité d’un groupe. Elle montre comment, dans la lutte pour le maintien d’une autonomie institutionnelle, les logiques de groupes peuvent rencontrer des discours plus généraux sur la Bretagne. Dans cette étude de l’esprit du lieu et du temps d’une part, et de l’autre de pratiques et de techniques propres à une institution, Claire Bouglé nous permet ainsi d’approfondir ce qui constitue à la fois l’objectif et la méthode de l’histoire des institutions.
22Pour finir, Jean-Christophe Cassard, dans sa contribution sur « Les Bretons et la Pucelle » (p. 685-694), permet de souligner l’importance, autant pour les acteurs du temps que pour les historiens d’une région, de pouvoir réinscrire cette région dans l’enchaînement des grands événements d’une histoire nationale. Ainsi, il montre comment Bouchart dans ses Chroniques de Bretagne replace fidèlement la rencontre entre le duc Jean V et Jeanne d’Arc en l’intégrant à la narration de l’histoire de Bretagne sans pour autant en faire un élément majeur de cette histoire. Il permet au final de réinterroger à partir de l’histoire régionale ce qui fait le propre d’une histoire nationale.
Pour citer cet article
Référence électronique
David Dominé-Cohn, « Le pouvoir et la foi au Moyen Âge, en Bretagne et dans l’Europe de l’Ouest. Mélanges en mémoire du professeur Hubert Guillotel, dir. Joëlle Quagheheur et Sylvain Soleil », Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], Recensions par année de publication, mis en ligne le 17 novembre 2011, consulté le 13 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/12379 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.12379
Haut de pageDroits d’auteur
Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Haut de page