Élection et collégialité
Résumés
Malgré son gouvernement oligarchique voire monarchique, l’Église de la fin du Moyen Âge ne méconnaît pas la pratique élective qui donne à ses membres la liberté d’exprimer leur choix. Cela est particulièrement vrai au sein d’une institution ecclésiastique comme un chapitre de chanoines dont le fonctionnement interne repose sur la collégialité de la prise de décisions. Il est possible de la voir s’exercer au quotidien dans les registres capitulaires laissés par le chapitre collégial de Saint-Germain l’Auxerrois à Paris depuis 1382. La pratique ordinaire pour désigner les dignitaires et les officiers de ce petit corps d’Église est l’élection. En grande partie réduite par l’exercice de la centralisation pontificale au XIVe siècle, cette expression manifeste des libertés locales du clergé peut à nouveau s’épanouir dans le contexte de la soustraction d’obéissance au pape à partir de 1398, puis à l’époque des conciles du début du XVe siècle et de la Pragmatique Sanction de Bourges de 1438. Les modalités des élections telles que les sources les détaillent s’en trouvent modifiées à Saint-Germain l’Auxerrois comme ailleurs. Dans la seconde moitié du XVe siècle, quand papes et rois entendent à nouveau contrôler de plus près les nominations des clercs, la pratique élective est directement menacée. Les chanoines de Saint-Germain tentent alors de la défendre mais sans grand succès. À travers cet exemple local à une très modeste échelle, on essaiera donc de cerner la place et la signification de l’élection au sein d’un corps ecclésiastique, à une époque où les règles du fonctionnement institutionnel de l’Église sont brouillées, en débat et en cours de redéfinition.
Texte intégral
- 1 En fait, le collège ne compte que treize chanoines ayant voix en chapitre, le quatorzième n’étant (...)
- 2 Arch. nat., LL 393-396 (1382-1467, mais avec une lacune pour les années 1418-1432) puis LL 398-400 (...)
- 3 Outre l’ouvrage de J. Gaudemet, Les élections dans l’Église latine des origines au XVIe siècle, Pa (...)
1Saint-Germain l’Auxerrois est une église de la rive droite à Paris, située en face du Louvre et actuellement à côté de la mairie du Ier arrondissement. Fondée probablement au VIIe siècle, c’est l’une des plus anciennes églises parisiennes et, à ce titre, le centre d’une immense paroisse. Jusqu’en 1744, date de son union au chapitre cathédral, l’organe dirigeant de l’église est un chapitre composé de quatorze chanoines séculiers1. C’est dans ce microcosme, et davantage du point de vue de la pratique que du discours, que l’on se propose d’examiner les élections au cours du XVe siècle. Le chapitre de Saint-Germain est par définition un collège, une assemblée où toutes les décisions sont prises collectivement. La matérialisation de cette collégialité se trouve dans les registres capitulaires2 où sont consignées depuis 1382 les délibérations des chanoines en chapitre, ce qui permet de cerner au plus près la réalité des débats. Ce microcosme est reflet d’une réalité plus vaste, un révélateur des pratiques électives de l’Église en général. À vrai dire, le mode de désignation des clercs séculiers est encore en partie mal connu pour le dernier siècle du Moyen Âge3. Rappelons-en à grands traits les principaux jalons : la soustraction d’obédience de 1398 retire au pape Benoît XIII toute obéissance au sein du royaume de France dans le contexte du Grand Schisme d’Occident. Elle est réitérée en 1407 puis le concile de Pise en 1409 ajoute à la confusion un troisième pape concurrent des deux précédents. On assiste au retour des prétentions pontificales surtout sous le pontificat de Jean XXIII (1410-1415) puis de Martin V, unique pape élu par le concile de Constance en 1417. Les résistantes contre cette autorité trouvent écho dans le conflit sévère entre Eugène IV et le concile de Bâle, concile dont les canons en matière de retour aux pratiques ordinaires sont reprises dans le texte de la Pragmatique Sanction de Bourges en 1438 sous l’égide de Charles VII. Mais l’abolition de cette ordonnance à deux reprises à partir de 1461 plonge le régime bénéficial de France dans la confusion jusqu’à la conclusion du Concordat de Bologne qui, en 1516, retire l’élection des évêques aux chapitres cathédraux. Dans ce contexte, quelle fut la place donnée à l’élection par le petit corps d’Église que représente le chapitre de Saint-Germain au sein de son fonctionnement institutionnel ? Qu’en fut-il de sa liberté d’élire et quelle fut la réalité de sa pratique élective ? Ces trois points constitueront les étapes de notre réflexion.
- 4 Comme le rappelle J. Gaudemet, Les élections dans l’Église latine, op. cit., p. 8-9.
- 5 On trouvera un tableau des divers bénéfices dont le chapitre est collateur dans A. Massoni, La col (...)
2Dans les affaires quotidiennes, outre le patrimoine à gérer, le chapitre est souvent amené à désigner des personnes pour occuper une fonction ecclésiastique, à procéder donc à un choix, au sens d’electio dans son acception médiévale4. L’ancienneté de l’église Saint-Germain explique que beaucoup de postes soient à la nomination du chapitre5 et que ces affaires d’élection remplissent les registres capitulaires. Ces fonctions s’exercent au sein du chapitre mais aussi du clergé de l’église, bien plus complexe en fait que le seul collège de chanoines mais encore dans d’autres églises parisiennes comme certaines paroisses dont les limites ont été tracées au sein du territoire originel de la paroisse Saint-Germain.
- 6 Voir la claire définition du bénéfice donnée dans Mgr André, Abbé Condis,Dictionnaire de droit can (...)
- 7 Sur le doyen, voir A. Massoni, La collégiale Saint-Germain l’Auxerrois de Paris, op. cit., p. 57-6 (...)
- 8 On lit précisément ces termes dans la présentation faite par le chapitre de Jean Luillier à l’arch (...)
- 9 Comme office, la chantrerie est aussi temporaire. Dans les faits, seul un chantre résigne son offi (...)
- 10 Le chantre perçoit néanmoins double distribution au chœur, voir sur le chantre A. Massoni, La coll (...)
- 11 Cet office existe déjà en 1229 et le procureur est alors élu. Mais en 1272, un tour est instauré e (...)
- 12 Après une querelle, chanoines et clercs de chœur trouvent un accord sur la « constitucion » de ce (...)
3Ces fonctions appartiennent canoniquement à deux catégories : ce sont soit des bénéfices ecclésiastiques composés d’une charge assortie d’un titre et rémunérée par un revenu souvent assis sur des rentes (pour les chanoines, ce sont les canonicats et les prébendes), soit des offices, c’est-à-dire une fonction temporaire, gagée par un salaire, exercée en plus du bénéfice6. Parmi les bénéfices que le chapitre est amené à pourvoir, il faut mentionner en premier lieu le décanat de l’église, soit la charge de doyen du chapitre7. Il en est le seul dignitaire, qui préside l’assemblée capitulaire en qualité de chef. Comme curé primitif de la paroisse, il a encore à la fin du Moyen Âge charge d’âmes pour tout le clergé de chœur. Son bénéfice est très lucratif, d’autant qu’il est double car le doyen doit être chanoine. Comme chanoine, il dispose d’un canonicat et d’une prébende et comme doyen, du décanat et d’une seconde prébende. Le chapitre pourvoit aussi à d’autres canonicats dans certaines collégiales parisiennes et dans la catégorie des bénéfices, il est aussi patron de cures, dont celle de Saint-Germain. Comme patron, il n’est pas le collateur direct de ces cures. Il doit procéder à l’electio du candidat et à sa presentatio à l’archidiacre de Paris qui le présente à son tour à l’évêque, lequel procède à la confirmatio puis à la collatio proprement dite8. Mais, dans les faits, le chapitre est toujours confronté à un choix. Appartient au groupe des offices la chantrerie de l’église9 c’est-à-dire la charge de l’organisation de la liturgie au chœur et de la discipline exercée sur tous les clercs non chanoines qui jurent obéissance au chantre à leur entrée en fonction. Cet office, moins avantageux que le décanat10, est tout de même recherché, ne serait-ce que par l’autorité qu’il confère. Plus subalterne mais tout aussi essentiel est l’office de procureur du chapitre ou intendant et comptable dans la gestion de son patrimoine11. Tel est le cas aussi des offices dont la nomination appartient au chapitre élargi aux dimensions du clergé de chœur, qui récite l’office divin en compagnie des chanoines, appelé la « communauté » à Saint-Germain : le procureur de la communauté, jumeau du précédent pour le patrimoine de l’ensemble des clercs12, le distributeur dont la fonction est cruciale dans la mesure où il pointe les présences et surtout les absences au chœur et qui distribue les jetons de présence valant rémunération.
- 13 Arch. nat., LL 387 fol. 5r-v.
- 14 Depuis le XIe siècle, date probable de l’érection du groupe de clercs préexistant en chapitre. Le (...)
- 15 Voir notes 11 et 12.
- 16 Arch. nat., LL 387 fol. 21v-22v.
- 17 Le principe du tour avait déjà été retenu pour la désignation du procureur du chapitre dès 1272, v (...)
- 18 Ce sont ces qualificatifs qui sont employés lors de la creatio d’un nouveau distributeur le 17 mar (...)
4Pour désigner ces personnes, le chapitre a longtemps utilisé la nomination commune, en particulier pour le décanat (et la prébende qui lui est annexée) et la chanterie. Ce sont les statuts de l’église, en d’autres termes sa coutume propre, qui règlementent le mode de désignation. Celui sur le chantre date de 120313. Il précise bien que l’office est électif, c’est-à-dire confié à la collation commune et rappelle que le décanat l’est aussi depuis toujours14. En 122915, un autre statut confirme que les offices de procureurs sont électifs. Mais devant le nombre croissant de bénéfices et d’offices à eux dévolus et surtout à cause des querelles incessantes provoquées par ce choix commun, les chanoines éditent un nouveau texte en 129516 qui propose un autre mode de désignation, la collation individuelle. Un chanoine choisit un candidat pour une fonction, au fur et à mesure des vacances. Deux listes sont dressées, qui varieront avec le temps, la première contenant les bénéfices laissés au choix commun, la seconde ceux qui tombent dans le tour, en d’autres termes qui sont conférés par les chanoines classés dans un ordre complexe17. Quelle est la logique présidant à la sélection de certains bénéfices laissés au choix commun ? Premièrement, on met ainsi de côté les postes les plus importants, ceux qui suscitent le plus d’enjeux par le prestige de la fonction et la richesse des revenus. La décision collégiale permet de mettre ses auteurs davantage à l’abri que le choix individuel. La responsabilité personnelle se dissout dans un choix collectif, protection contre d’éventuelles mesures de rétorsion. Ce sont ensuite les charges qui régissent la vie quotidienne du chapitre et des clercs de chœur qui restent à la désignation commune. Cela est vrai surtout des offices, même si du point de vue institutionnel, ils ont un statut inférieur, une moindre dignité. On peut y voir une application scrupuleuse du principe du Quod omnes tangit ab omnibus approbetur. Le choix commun est enfin garantie de cohérence interne au sein du corps. C’est la personne qui a fait ses preuves comme chanoine ou comme clerc et qui est reconnue comme telle par tous, qui mérite d’être choisie. D’où la nécessité statutaire d’être d’abord chanoine avant d’être doyen ou chantre, significativement remplacés pendant leurs absences par le plus ancien chanoine du chapitre. Cela se lit clairement dans les recommandations faites avant de procéder à un choix ou dans les arguments avancés pour justifier l’élection de tel ou tel : est choisi celui qui s’est avéré sufficiens, exercitatus, ydoneus, expertus18.
- 19 Sauf celui de 1399 sur l’élection du procureur de la communauté qui avait justement suscité une qu (...)
- 20 Comme le 27 janvier 1405 pour l’élection du « solliciteur » des causes judiciaires du chapitre : e (...)
- 21 Pour constitutio et creatio, voir notes 12 et 18. On trouve donatio sur le même plan qu’electio da (...)
5Mais les statuts sont très peu explicites sur la procédure de la collation commune19 d’où la nécessité d’avoir recours à la législation canonique par moments, comme on le verra plus loin. Dans les autres sources comme les registres capitulaires, les formulations ne sont pas plus développées. Tel choix est fait de voluntate et consensu omnium canonicorum20, de communi assensu, tel personnage est rite electus. Il semble que pour pourvoir le même poste, les chanoines aient eu la latitude de procéder de manières différentes. La terminologie est de peu de secours puisqu’il n’existe pas de terme spécifique pour désigner le type de procédure utilisé et encore moins l’élection au sens contemporain, soit avec un vote. Elle peut être exprimée par nominatio, deputatio, creatio, constitutio, donatio, provisio21. Quand les documents détaillent la procédure, il s’agit la plupart du temps du choix de personnages éminents au sein desquels on ne retiendra désormais que le doyen, le chantre et le curé de Saint-Germain.
- 22 Arch. segr. vat., Reg. Aven. 157 fol. 203r.
- 23 Une supplique du 4 mai 1366 nous apprend que le doyen, Pierre Robert, n’est toujours pas chanoine (...)
6Ce n’est pas parce que les statuts prévoient l’élection comme pratique ordinaire pour ces charges que toutes ont été pourvues par elle à la fin du Moyen Âge, loin s’en faut. Ce sont les registres capitulaires qui permettent de savoir dans quelle mesure et quand la liberté d’élire a été de mise. On sait qu’au XIVe siècle, le pouvoir pontifical a détourné la collation des bénéfices à son profit et que de facto il a interdit la pratique élective aux chapitres. Cela a conduit à perturber gravement le fonctionnement interne des collèges. À Saint-Germain, Urbain V conféra en 136422 à un candidat, à la fois le décanat et un canonicat, sans choisir un chanoine déjà titulaire. Il n’y avait donc aucune certitude que le personnage fût idoine mais plus gravement, ce dernier eut tant de mal à faire valoir son droit sur le canonicat conféré à plusieurs concurrents par le même pape, qu’il fut reçu au décanat mais dut attendre plusieurs années avant d’être reçu chanoine23. Le chapitre lui ferma donc ses portes pour non respect des statuts : comment donc le gouverner sans y comparaître ?
- 24 Arch. nat., LL 393 fol. 18r-19r.
- 25 Même si statutairement l’évêque n’intervient pas dans la désignation à cet office, à la différence (...)
- 26 Comme, par exemple, retirer certains bénéfices du tour pour les protéger grâce à la collation comm (...)
- 27 Arch. nat., LL 394 fol. 131v, 133v.
- 28 Arch. nat., LL 394 fol. 134r-v.
- 29 N’étant que peu présent en chapitre de manière générale, Nicolas d’Orgemont ne comparaît ensuite q (...)
- 30 En repoussant la prestation d’hommage à laquelle le chantre est tenu vis-à-vis du doyen au 1er oct (...)
- 31 Le 16 août 1418 en même temps qu’une prébende du chapitre à un certain Philippe Meyer qui ne fut j (...)
- 32 À Jean de Mailly.
- 33 Bulle d’union du 7 juillet 1425, Arch. nat., L 649 n° 9B fol. 4v-6r. On ne sait qui détint la cure (...)
- 34 Vu la longueur des procès due aussi en partie à la résistance manifestée en 1428 par les paroissie (...)
- 35 Faute de registres, c’est grâce aux pièces de ce procès, éditées par N. Valois, Histoire de la pra (...)
- 36 Arch. segr. vat., Reg. Suppl. 216 fol. 68r.
7Cela se reproduit au XVe siècle même si, en comparaison, ce siècle fait figure de siècle de l’élection. De 1398 à 1510, il se produit neuf fois une vacance à Saint-Germain pour le décanat, autant pour la chantrerie et autant pour la cure. Les chanoines purent pratiquer dans chaque cas six fois l’élection, même si toutes ne furent pas efficaces. La chronologie des événements se décompose en trois temps faciles à distinguer. Une première période couvre les années 1398 à 1438. Les chanoines ont goûté au retour aux pratiques ordinaires grâce à la soustraction d’obédience votée par l’assemblée du clergé de France le 27 juillet 1398. Dès le mois d’octobre, la chantrerie est vacante par la mort de son titulaire le 17. Cinq jours plus tard24, les chanoines élisent l’un des leurs, Jean d’Omont, et l’évêque de Paris, Pierre d’Orgemont, se déplace personnellement en chapitre en novembre pour confirmer la validité de cette pratique toute neuve25 et marquer la solennité de l’événement. Mais il est manifeste dès ce moment que le roi, les princes surtout et les universitaires ont l’intention de remplacer le pape dans le jeu bénéficial. Le chapitre développe alors des stratégies pour y faire face26. Et dès 1410 et le pontificat de Jean XXIII, l’élection redevient plus difficile. Une première tentative de résistance de la part des chanoines se situe en 1414 quand, à la mort de leur doyen, ils élisent le 11 mai27 Nicolas d’Orgemont, leur confrère depuis 1399, et prolongent même le 18 juin le délai accordé pour qu’il donne ou non son accord. On ne sait s’il le fit car avant même sa réponse, les chanoines reçoivent le 19 juin Jean Charreton, candidat pourvu des deux prébendes par Jean XXIII28 et auquel, par grâce, ils accordent le droit de paraître en chapitre dès le 2629. En 1416, la chantrerie est de même pourvue par le pape à Jean de Héricourt et le chapitre manifeste clairement sa mauvaise volonté à son endroit mais il ne procède à aucune élection du chantre, malgré la convocation faite pour cela30. La cure est conférée par Martin V en 141831 et le décanat de même en 141932 sans mention d’élection. En revanche, en 1425, on distingue clairement une seconde manœuvre de résistance quand le chapitre obtient du même pape l’union de la cure à la mense capitulaire, ce qui vaut extinction de bénéfice (de toute façon redevenu inaccessible aux chanoines) et transformation en office à leur nomination33. Mais en février 1429, à la vacance de la cure, un candidat du pape à ce bénéfice, de facto rétabli, Pierre de Creil, fait valoir sur lui son droit et persévère contre le chapitre jusqu’en 143834, ruinant ainsi le projet capitulaire, malgré l’appel porté par les chanoines devant le concile de Bâle. C’est qu’entre-temps, toujours en 1425, le décanat étant devenu vacant par la promotion de Jean de Mailly à l’évêché de Noyon en juillet, les chanoines élisent en octobre un des leurs, Jean Robert, reçu chanoine en 1401, dit « notable homs, licencié es lois, qui a résidé et qui congnoit l’estat de l’église ». Mais Martin V avait déjà conféré le décanat à un futur cardinal, conseiller du duc de Bourgogne, et il excommunie les chanoines de Saint-Germain pour avoir procédé à l’élection. S’ensuit un long procès au Parlement qui donne raison aux chanoines en 142635, néanmoins le décanat est à nouveau pourvu en 142736 à un candidat pontifical, Jean Vivien, qui est reçu doyen. L’élu, Jean Robert, deviendra chantre (on ne sait comment), peut-être comme lot de consolation.
- 37 Le doyen en 1438 et 1451, le chantre en 1443 et 1459 et le curé en 1439 et 1459.
- 38 Jean est reçu chanoine le 8, il est élu doyen le 19, Arch. nat., LL 395 fol. 45v-46r, 47r-48v. Apr (...)
- 39 La chantrerie vaque par la mort de Jean Robert le 7 juin 1443. Mais, le 4, Jean Aguenin, chanoine (...)
- 40 Le candidat est en fait pourvu par le connétable de Richemont, par grâce faite à lui de conférer q (...)
- 41 Guillaume Heuse meurt en avril 1459. Sept candidats sont présentés au chapitre par le roi, le Parl (...)
8Tout change avec l’application de la Pragmatique Sanction à partir du 7 juillet 1438 puisque, de cette année à 1459, le chapitre de Saint-Germain élit avec succès deux fois un doyen, deux fois un chantre, deux fois un curé37. Dès octobre 143838, Jean Chuffart, chanoine depuis quinze jours, est élu doyen, le premier depuis très longtemps et la solennité particulière de l’événement explique qu’il soit très minutieusement rapporté dans les registres. Dans ces années, le chapitre a même la faculté de repousser tout candidat extérieur, faisant fi d’une recommandation de l’évêque pour la chantrerie en 144339 ou d’une provision par le pape pour la cure en 143940 ainsi que de plusieurs recommandations venant de Charles VII lui-même ou de l’université pour le même bénéfice en 145941.
- 42 Première abolition de 1461 à 1464, seconde abolition de 1467 à 1472 puis concordat d’Amboise de 14 (...)
- 43 Il semble que son statut d’office l’ait quelque peu libérée des contraintes pesant sur les bénéfic (...)
- 44 Nicaise Joye meurt le 16 septembre 1467. Dès le 18, Jean Hanny se présente avec une lettre de coll (...)
- 45 Arch. nat., LL 398 fol. 40v.
- 46 Dans la mesure où, en régime d’abolition de la Pragmatique, le roi déclare que la disposition de c (...)
- 47 L’affaire est en fait un peu plus complexe : Jean de Belleville obtient provision pontificale du d (...)
- 48 Jean de Belleville meurt en octobre. Le 14, Pierre de Cerisay permute le décanat avec Guillaume de (...)
- 49 L’élection qui doit avoir lieu dès octobre 1474 ne fait l’objet d’aucun report dans les registres. (...)
- 50 Les chanoines reconnaissent Pierre de Cerisay comme « vrai et indubitable doyen » et cédant except (...)
- 51 Pierre de Cerisay permute son décanat et sa prébende avec Nicolas de Cerisay dans les mains de Jul (...)
- 52 La vacance se produit le 16 juillet 1479 par la mort de Pierre de Braban. Convoqués le 20, les cha (...)
- 53 Permutation entre Jean Luillier et Robert de Masengharbe, licencié en décrets, présenté à l’archid (...)
- 54 Pierre Alusson, ancien chanoine de Saint-Germain, est choisi par le chapitre en 1485 après la mort (...)
- 55 Jean Begeon meurt peu avant le 1er juillet 1508. Ordre est donné de procéder à la présentation d’u (...)
- 56 La chantrerie échoit par élection à Pierre Cochon en 1514 qui est dit « idoine, instruit et expert (...)
9En revanche, avec l’abolition de la Pragmatique en 1461 et les vicissitudes qu’elle connaît ensuite42, et surtout avec le règne de Louis XI, la donne change. La pratique ordinaire est à nouveau très contrariée à Saint-Germain dès la fin des années 1460. On note une évolution très différente de la pratique élective en fonction de la charge à pourvoir. L’élection au décanat redevient à nouveau impossible (si bien que seuls deux doyens seront élus sur l’ensemble du siècle) à cause de l’éminence du bénéfice, tandis qu’elle continue à être pratiquée avec beaucoup plus de liberté pour la chantrerie43 et la cure, sauf dans les premières années du XVIe siècle. En 146744, le chapitre réussit à éviter d’avoir comme chantre un Italien pourvu par un légat pontifical et un protégé de la reine totalement inexpérimenté, mais un des chanoines, Pierre de Braban, doit avoir recours à une provision par le pape Paul II pour obtenir la chantrerie dans la mesure où aucune élection ne put avoir lieu. Les chanoines précisent alors à plusieurs reprises que « le droit du chapitre est sauf », ils vont être amenés à le redire souvent dans ces années, parlant même des « droits, franchises et libertés » de leur église en 146945, quand leur droit d’élection est bafoué par le roi à la mort de leur doyen Jean Cheneteau. Ils reçoivent par deux fois courrier de Louis XI qui, avant même la mort de Jean, les informe qu’il a demandé provision du décanat à Paul II46 pour son cousin Jean de Belleville, qu’il leur interdit d’élire quelqu’un sous peine de représailles ou, tout au moins, qu’il les autorise à élire par égard pour les statuts de l’église mais seulement son cousin. Jean est reçu car la crainte des censures est réelle47. Et en 1474, à la mort de Jean de Belleville48, face à Pierre de Cerisay, lui aussi très soutenu par le roi, ils élisent à nouveau leur chantre Pierre de Braban comme doyen, discrètement et sans efficacité49. À la mort de celui-ci en 1479, ils délibèrent longuement pour savoir quoi faire de ce droit au décanat longtemps arboré par l’élu, mais, par considération pour les qualités de leur doyen actuel, Pierre de Cerisay, et surtout par crainte des ennuis qu’une nouvelle élection provoquerait, ils renoncent à leur droit d’élire, sans préjudice pour l’avenir50. Dans les faits, ils n’éliront plus leur doyen, le suivant en 1507, petit-neveu de Pierre, étant pourvu par le pape51. L’élection à la chantrerie se fait de manière beaucoup plus apaisée à trois reprises en 1479, 1491 et 150152 et le choix du curé, après la permutation du bénéfice en 147153, donne certes lieu à une élection houleuse mais efficace en 1485, puis plus pacifiée en 1486, 149154 et 150855, date à laquelle le bénéfice est à nouveau pourvu par le pape Jules II, ce qui ne s’était plus vu depuis 1429, et date à laquelle il est touché par le même népotisme qui a affecté les deux autres charges au début du XVIe siècle56.
- 57 Malgré ce qu’en pensent les réformateurs des années 1480-1490 qui considèrent l’élection comme gar (...)
- 58 On se fie pour la dresser aux jugements portés par la communauté après la mort de son dirigeant, c (...)
- 59 Ce qui fait que depuis 1403 jusqu’à la promotion de Jean Robert comme chantre à une date inconnue (...)
10Qualitativement, on ne peut dire que l’élection ait garanti à Saint-Germain l’excellence du choix à tous les coups57. De fait, on trouve dans la catégorie des bons doyens58 Pierre de Cerisay récemment cité, pourvu par le pape en 1474, alors que Nicolas d’Orgemont élu en 1414 n’aurait pas fait un excellent chef, vu son absence quasi systématique du chapitre jusqu’à cette date. Le choix des chanoines fut même désastreux pour Jean d’Omont élu chantre en 1398, qui regagna Avignon où il exerçait des fonctions de curialiste dès la restitution d’obédience en 1403 pour ne plus reparaître jusqu’à sa mort en 141559. Pierre de Braban en revanche, pourvu en 1467, fut un excellent chantre mais il était chanoine depuis 1458. La démonstration vaut aussi pour les curés. Jean Luillier, professeur de théologie, parent de deux chanoines de Saint-Germain, ayant même promis aux paroissiens de faire résidence avant son élection, fut élu en 1459 parmi six autres candidats, mais il se fit remplacer par des vicaires, certes surveillés, jusqu’à permutation de la cure en 1471. Néanmoins, on ne peut nier que pour la chantrerie, pour laquelle ce mode de désignation fut le plus fréquemment pratiqué, l’élection par le chapitre ait permis le discernement de chanoines qui se révélèrent très consciencieux dans l’exécution de leur tâche.
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11Comment a-t-on voté à Saint-Germain au XVe siècle ? Quand une vacance se produit, il y a convocation60. Cette procédure est très fréquente et même systématique pour toute nomination ou réception d’un candidat, et pas seulement pour une élection. Faite par le sergent du chapitre mandé pour cela, elle est toujours adressée à tous les chanoines présents à Paris et qui pourront être commodément trouvés. Elle nécessite néanmoins un soin particulier quand il s’agit d’une élection importante : on repousse la date initialement fixée pour enquêter sur le lieu de résidence de certains chanoines après la vacance du décanat en 1451, des témoins assurant qu’il est inutile de convoquer ceux qu’on ne pourra trouver61 et des lettres de convocation étant affichées sur les portes de Saint-Germain et de la cathédrale portant la date fixée pour l’élection. Le délai qui sépare d’ailleurs la décision de convoquer du jour de la convocation montre si l’on veut se donner ou non la peine de réunir tous les électeurs : d’un jour pour l’élection du curé à plus d’un mois pour celle du doyen62. L’élection peut avoir lieu le matin ou le soir mais on prévoit toujours du temps pour y procéder, voire de prolonger la convocation sur plusieurs jours. La convocation est souvent efficace car beaucoup d’élections sont faites par neuf à onze chanoines, plus nombreux que les autres jours63.
- 64 En 1476, pour le décanat, le sergent précise même que Jean Louet est absent de sa maison parisienn (...)
- 65 Jean Fusée fait cette remarque au sujet de Jean Boucart qui détient une prébende sacerdotale et Gu (...)
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- 68 Arch. nat., LL 399 fol. 53v.
12Le jour prévu, le sergent comparaît au début de la séance en chapitre pour certifier qu’il s’est rendu au domicile de tous les chanoines convoqués64. Si d’autres affaires se présentent ce jour, on peut les traiter d’abord et repousser l’élection plus tard. Pour être électeur, il suffit d’être en conformité avec les règles d’admission en chapitre, par exemple être promu à l’ordre ecclésiastique requis par la prébende détenue. En juillet 147965, un chanoine dénonce un collègue ayant pris part à l’élection du chantre sans être prêtre, mais elle n’est pas pour autant invalidée. Il n’y a pas de notion claire de quorum, en revanche la qualité des électeurs compte. L’élection doit être faite quand le doyen ou le plus ancien chanoine peut être là66. Un absent peut y prendre part par procuration : une cédule de vote rédigée sur papier est lue pendant l’élection du doyen en 143867. Enfin, il arrive que le corps électoral soit élargi exceptionnellement aux clercs de chœur, par exemple pour l’élection du chantre en 149168.
- 69 L’élection de 1485 dure plus de quinze jours et le dix-huitième jour, pression est exercée sur le (...)
- 70 Arch. nat., LL 395 fol. 46r.
- 71 Les chanoines prêtres sont priés de célébrer la messe avant d’y entrer, Arch. nat., LL 395 fol. 19 (...)
- 72 On ne connaît pas la procédure d’élection pour un doyen (Jean Cheneteau en 1451), trois chantres ( (...)
- 73 Quatre chanoines sont commis par le chapitre, dont le doyen, pour élire le chantre puis trois jour (...)
- 74 Arch. nat., LL 394 fol. 131v.
- 75 Voir note 18. Il semble que les précisions données par le concile de Bâle pour le vote par scrutin (...)
- 76 Note 76 : Qui domini [...] habita deliberatione matura inter ipsos procedendo ad hujusmodi electio (...)
13L’élection elle-même doit avoir lieu dans un délai prévu par les statuts, quarante jours pour le chantre sous peine de voir l’office pourvu par l’évêque, une durée inconnue pour le curé69. Ce sont les chanoines qui décident le jour même de la procédure à employer. Il est clairement dit en 143870 qu’on choisit la via scrutini per ordinacionem concilii basiliensis et c’est bien l’élection épiscopale définie par le concile de Bâle qui servira de modèle. Le notaire parle même de « conclave » en 145171 quand il y a convocation pour l’élection du doyen évoquant par là la nécessité de délibérer sous clef, mais renvoyant aussi aux conditions de l’élection pontificale. Souvent néanmoins, la procédure n’est pas connue, on a le seul nom de l’élu dans les registres après la formule : domini elegerunt [...]72. Mais quand cela est connu, il s’avère que les deux voies les moins fréquentes sont celle du compromis employée une fois pour le chantre en 149173, et celle du Saint-Esprit pour l’élection du doyen en 141474. Aucun détail n’est donné dans ce dernier cas, malheureusement. C’est donc la procédure du scrutin qui est de loin la plus employée, même pour l’élection aux offices subalternes où les clercs de chœur sont priés de donner leur voix ou leur voeu75 (votum). Mais la voie du Saint-Esprit reste néanmoins un idéal, tant elle matérialise l’unanimité qui reste dans la mentalité des chanoines le signe de la validité de leur choix car cela signifie qu’il est inspiré. L’élection du chantre en 144376 par scrutin est qualifiée de quasi via spiritus sancti car tous les votes ont été unanimes pour désigner Étienne le Petit.
- 77 Voir notes 38 et 54.
- 78 De manière étonnante, il ne s’agit pas des chanoines les plus notables du chapitre ni de ceux qui (...)
14Le détail de la procédure est très bien connu pour deux élections, celle du doyen en 1438 et celle du curé en 148577. La première se fait donc selon la procédure redéfinie au concile de Bâle : célébration d’une messe du Saint-Esprit, choix d’un notaire et de deux témoins, serment de respecter le secret des délibérations sous peine d’excommunication, choix de trois scrutateurs, serment in fidem sacerdotis dans les mains de l’un d’eux d’élire comme doyen celui qui en sa conscience sera jugé comme le plus utile en rejetant toute fraude, expression par chacun, classé par ordre d’ancienneté en chapitre, du candidat choisi aux scrutateurs retirés à part et qui font noter les votes par le notaire, proclamation de ceux-ci pour constater que la major et sanior pars78 a choisi Jean Chuffart par cinq voix sur dix, soit à la majorité relative. Puis un chanoine élu à l’unanimité est envoyé dans l’église publier le résultat au clergé et au peuple, en disant depuis le pupitre où on lit l’Évangile : « moi, N, ayant invoqué la grâce de l’Esprit Saint, j’élis Jean Chuffart, docteur en décrets, convenable par la science, les mœurs, le mérite, d’âge et de naissance légitimes ». On retrouve ici le mythe de l’unanimité, mythe puisque le scrutin a montré la désunion du corps électoral.
- 79 Les premiers jours, les chanoines écartent d’emblée une provision de Sixte IV créant une pension s (...)
- 80 Un chanoine, Jean Guy, expose que le premier président de la Chambre des Comptes, auquel il doit b (...)
- 81 On peut suivre l’évolution du rapport de force en fonction des arguments déployés : les partisans (...)
15L’élection de 1485 est révélatrice quant à elle des limites de la procédure par scrutin. Elle prit plus de quinze jours, ne serait-ce que par le temps nécessité par la présentation officielle de six candidats79. Le notaire qui la relate ne cache pas les très fortes pressions qui ont pesé sur elle80de la part du roi, de l’université, de l’évêque de Paris, des paroissiens, et qui se retrouvent dans les arguments avancés à charge ou à décharge de l’un des deux candidats finalement retenus par le vote : Pierre Alusson, trop soutenu par sa parentèle, ou au contraire, Jean Rollin, docteur en théologie, soutenu par les paroissiens en vertu de sa formation. Le premier scrutin donne quatre voix à chacun sur huit votants et le chapitre peine longtemps pour trouver une solution qui le sorte de l’impasse. Le doyen propose l’arbitrage par deux notables paroissiens mais les chanoines refusent par peur du précédent. On tente la voie du dédommagement par un candidat, en faveur de celui qui accepterait de se désister mais cela échoue. Les chanoines procèdent à nouveau deux fois au scrutin avec toujours les mêmes résultats, deux camps se forment clairement au sein du chapitre81. La décision finale donne à la prima vox du doyen la responsabilité de trancher. Mais quand Pierre Alusson, le curé élu, est reçu, les chanoines qui n’ont pas voté pour lui le lui font savoir.
- 82 Ce sont celles de Jean d’Omont en 1398, de Jean Chuffart en 1438, Arch. nat., LL 394 fol. 18v ; LL (...)
- 83 Il est clair dans le texte du serment prononcé par le doyen en chapitre (Arch. nat., LL 387 fol. 1 (...)
- 84 La réponse de l’évêque prend six jours en 1459, quatorze en 1485, neuf en 1486.
- 85 En octobre 1438, juste après son élection, avant même l’accord de l’élu, l’investiture du doyen Je (...)
- 86 Arch. nat., LL 395 fol. 120r.
- 87 Cet hommage est prêté à nouveau quand le doyen change. Ainsi le chantre Pierre de Braban le prête- (...)
16Une fois l’élection faite, elle doit être suivie d’une investiture, à laquelle on procède à nouveau quand la procédure de désignation est invalidée après coup, même s’il s’agit du même impétrant. L’investiture se compose toujours peu ou prou des mêmes éléments et elle n’est que peu différente quand elle suit une provision ou une élection. Dans ce dernier cas seulement, on doit attendre l’accord de l’élu qui, s’il accepte, remercie les électeurs de l’avoir choisi et formule toujours à peu près les mêmes paroles82: il ne veut pas résister à la volonté divine mais plaire à ses conchanoines. Pour le doyen et le curé, il faut ensuite demander confirmation de l’élection à l’évêque pour le premier83 et présenter le second à l’archidiacre84. Une fois confirmation et collation obtenues de la part du supérieur, l’élu, qu’il soit doyen, chantre ou curé, prête serment en chapitre sur les Évangiles, la main sur la poitrine, à genoux, de respecter les devoirs de sa charge. Intervient ensuite la « mise en possession corporelle, réelle et actuelle » par l’installation au chœur, souvent pendant la grand’ messe, dans la première stalle de droite pour le doyen, la première de gauche pour le chantre, à gauche pour le curé. Le doyen prend possession de l’autel majeur85 ainsi que de l’autel paroissial situé dans une des chapelles de la nef, de même que le curé pour le second autel. Les gestes sont généralement le toucher des nappes d’autel, du calice, du missel, des ornements, du tabernacle, des fonts baptismaux et des portes de l’église. De retour en chapitre, doyen et chantre sont installés dans les sièges adéquats et le doyen reçoit les clefs de l’église. Les réjouissances sont complétées par un repas festif en 1443 lors de l’élection du chantre Étienne le Petit86. Le doyen et le curé sont aussi investis de leur maison par l’entrée dedans et la remise des clefs. La cérémonie se termine quelques jours plus tard, quand le doyen prête hommage à l’évêque et que le chantre prête hommage et serment de fidélité dans les mains du doyen, suivi d’un « baiser en signe d’amour »87.
- 88 Ils appartiennent souvent eux-mêmes à un chapitre cathédral, et de plus en plus à celui de Notre-D (...)
17En définitive, les chanoines de Saint-Germain l’Auxerrois au XVe siècle sont rompus au principe et à la pratique de l’élection à laquelle ils se montrent attachés comme leurs confrères des chapitres cathédraux88, même si l’élection rigoureusement pratiquée par scrutin, qui ressemble le plus à la conception que nous en avons, est en fait assez rare. Ils prennent en tout cas encore beaucoup de liberté avec la procédure et semblent préférer souvent les accommodements à l’amiable et les longues délibérations.
Notes
1 En fait, le collège ne compte que treize chanoines ayant voix en chapitre, le quatorzième n’étant qu’un vicaire nommé par l’abbaye Saint-Victor de Paris, à laquelle une prébende du chapitre fut donnée au début du XIIe siècle, voir A. Massoni, La collégiale Saint-Germain l’Auxerrois de Paris (1380-1510), Limoges, Pulim, 2009, p. 80-82.
2 Arch. nat., LL 393-396 (1382-1467, mais avec une lacune pour les années 1418-1432) puis LL 398-400 (1467-1522).
3 Outre l’ouvrage de J. Gaudemet, Les élections dans l’Église latine des origines au XVIe siècle, Paris, F. Lanore, 1979, qui se concentre sur les procédures d’élection, on dispose de quelques éclairages très utiles mais aussi très ciblés dans : G. Mollat, « L’application en France de la soustraction d’obédience à Benoît XIII jusqu’au Concile de Pise », Revue du Moyen Âge latin, I, 1945, p. 149-163 ; J. Salvini, « L’application de la Pragmatique Sanction sous Charles VII et Louis XI au chapitre cathédral de Paris », Revue d’Histoire de l’Église de France, III, 1912, p. 121-148, p. 276-296, p 421-431, p. 550-561. Il faut saluer aussi la récente thèse de Véronique Julerot qui éclaire singulièrement le sujet pour les évêques sous le règne de Charles VIII : V. Julerot, « Y a ung grant désordre ». Élections épiscopales et schismes diocésains en France sous Charles VIII, Paris, Publications de la Sorbonne, 2006.
4 Comme le rappelle J. Gaudemet, Les élections dans l’Église latine, op. cit., p. 8-9.
5 On trouvera un tableau des divers bénéfices dont le chapitre est collateur dans A. Massoni, La collégiale Saint-Germain l’Auxerrois de Paris, op. cit., tableau 4 : La place de Saint-Germain l’Auxerrois dans le système bénéficial parisien à la fin du Moyen Âge, p. 393.
6 Voir la claire définition du bénéfice donnée dans Mgr André, Abbé Condis,Dictionnaire de droit canonique, Paris, H. Walzer, 1901, t. 1, p. 232.
7 Sur le doyen, voir A. Massoni, La collégiale Saint-Germain l’Auxerrois de Paris, op. cit., p. 57-64.
8 On lit précisément ces termes dans la présentation faite par le chapitre de Jean Luillier à l’archidiacre de Paris le 9 mai 1459 pour obtenir la cure de Saint-Germain, vacante par la mort de Guillaume Heuse, Arch. nat., LL 387 fol. 105 bisv.
9 Comme office, la chantrerie est aussi temporaire. Dans les faits, seul un chantre résigne son office tout en restant chanoine, il s’agit de Pierre Cochon, élu chantre le 24 avril 1514, qui prête serment au doyen Guillaume Hector le 25 et qui résigne sa chantrerie le 15 février 1516, Arch. nat., LL 400 fol. 170v, 197r et Arch. nat., LL 389 fol. 38v. Les autres meurent en charge ou résignent en même temps leur bénéfice de chanoine et leur office de chantre.
10 Le chantre perçoit néanmoins double distribution au chœur, voir sur le chantre A. Massoni, La collégiale Saint-Germain l’Auxerrois de Paris, op. cit., p. 86-90.
11 Cet office existe déjà en 1229 et le procureur est alors élu. Mais en 1272, un tour est instauré entre chanoines pour que l’office soit exercé par chacun pendant un an, en commençant par le plus ancien dans sa prébende, mais il s’avère que ce système est difficilement applicable et l’on s’aperçoit que ce sont souvent les mêmes chanoines qui assument cette fonction, et pour plusieurs années si bien que l’élection est à nouveau de mise, Arch. nat., LL 387 fol. 11r et LL 554A n° 43.
12 Après une querelle, chanoines et clercs de chœur trouvent un accord sur la « constitucion » de ce procureur en juillet 1399 : à l’heure du chapitre, les chanoines devront convoquer les clercs, et le doyen leur demandera que « en leurs consciences eulz et chascun d’eulz advisent une bonne personne, soit de la dicte communaulté ou autre, prouffitable à exercer le dit office [...] Et la cause de la souffisance et les dictes oppinions et nominacions dictes et oyes, lesdiz beneficiez se retrairont hors du dit chappitre ». Les chanoines délibéreront et « esliront et constitueront l’un des nommés ou un autre », Arch. nat., LL 388 fol. 85r-87v.
13 Arch. nat., LL 387 fol. 5r-v.
14 Depuis le XIe siècle, date probable de l’érection du groupe de clercs préexistant en chapitre. Le doyen remplace l’abbé de la communauté précédente qui, à l’instar d’une communauté monastique, devait lui aussi être élu par ses confrères.
15 Voir notes 11 et 12.
16 Arch. nat., LL 387 fol. 21v-22v.
17 Le principe du tour avait déjà été retenu pour la désignation du procureur du chapitre dès 1272, voir note 11.
18 Ce sont ces qualificatifs qui sont employés lors de la creatio d’un nouveau distributeur le 17 mars 1398 : en chapitre, le doyen interroge chaque clerc de chœur de quo sibi videbatur quis esset ydoneus ad dictum officium exercendum [...] et auditis oponionibus et votibus singulorum, les chanoines concluent que Gervais Lostelier est magis expertus ad exercendum dictum officium quam alius qui esset residens in ecclesia de presenti, Arch. nat., LL 393 fol. 12v-13r. De même, le formulaire de présentation d’un chanoine pour occuper le vicariat que détient le chapitre à Notre-Dame de Paris prévoit de choisir concanonicum nostrum prebendatum in servicio ecclesie a longo tempore exercitatum et alias ad hoc sufficientem et ydoneum ad hoc per nos rite electum, Arch. nat., LL 387 fol. 105v.
19 Sauf celui de 1399 sur l’élection du procureur de la communauté qui avait justement suscité une querelle entre chanoines et clercs de chœur, nécessitant des éclaircissements et qui décrit précisément une procédure par scrutin, voir note 12.
20 Comme le 27 janvier 1405 pour l’élection du « solliciteur » des causes judiciaires du chapitre : ex nunc elegerunt in solicitationem Guillermum de Banacio clericum ipsius domini decani et, ut istud fiat de voluntate et consensu omnium canonicorum qui interesse voluerunt, ordinatum fuit quod fiat convocacio omnium canonicorum ecclesie predicte Parisius degencium qui reperiri potuerunt ad habendum eorum opinionem et consensum (« Ils élurent à partir de maintenant comme solliciteur Guillaume de Banacio, clerc de messire le doyen, et pour que cela soit fait de la volonté et du consentement de tous les chanoines qui voulaient y participer, il fut ordonné que soit faite convocation de tous les chanoines de la dite église, résidents à Paris et qui ont pu être trouvés, pour avoir leur opinion et leur consentement. »), Arch. nat., LL 394 fol. 42r.
21 Pour constitutio et creatio, voir notes 12 et 18. On trouve donatio sur le même plan qu’electio dans le statut de 1203 concernant le chantre, voir note 13. Provisio est également employé à propos de la chantrerie en janvier 1416 et nominatio en juin 1491, Arch. nat., LL 394 fol. 154v, LL 399 f°53r. Quant à deputatio, le terme est employé comme synonyme d’electio en 1411 pour la désignation du clerc qui doit pointer les présences et les absences au chœur, Arch. nat., LL 394 fol. 107r.
22 Arch. segr. vat., Reg. Aven. 157 fol. 203r.
23 Une supplique du 4 mai 1366 nous apprend que le doyen, Pierre Robert, n’est toujours pas chanoine car il est en procès contre ses concurrents, Arch. segr. vat., Reg. Suppl. 45 fol. 158r.
24 Arch. nat., LL 393 fol. 18r-19r.
25 Même si statutairement l’évêque n’intervient pas dans la désignation à cet office, à la différence du décanat dont la collation doit être confirmée par le prélat.
26 Comme, par exemple, retirer certains bénéfices du tour pour les protéger grâce à la collation commune.
27 Arch. nat., LL 394 fol. 131v, 133v.
28 Arch. nat., LL 394 fol. 134r-v.
29 N’étant que peu présent en chapitre de manière générale, Nicolas d’Orgemont ne comparaît ensuite qu’en avril 1415 et comme simple chanoine, Arch. nat., LL 394 fol. 143r.
30 En repoussant la prestation d’hommage à laquelle le chantre est tenu vis-à-vis du doyen au 1er octobre 1416, alors que Jean est reçu à la (seule) chantrerie le 31 janvier. La convocation pour l’élection du chantre fut faite le 8 février malgré l’interdiction mentionnée dans la provision faite à Jean de procéder à toute collation de la chantrerie à un autre que lui. Jean ne sera jamais chantre car il ne reparaît plus en chapitre, Arch. nat., LL 394 fol. 153v-155v.
31 Le 16 août 1418 en même temps qu’une prébende du chapitre à un certain Philippe Meyer qui ne fut jamais reçu en chapitre, Arch. segr. vat., Reg. Suppl. 115 fol. 288v-289r. Depuis 1393, la cure avait été unie à une prébende, au profit du chanoine Gérard de Versigny, décédé en 1418.
32 À Jean de Mailly.
33 Bulle d’union du 7 juillet 1425, Arch. nat., L 649 n° 9B fol. 4v-6r. On ne sait qui détint la cure à partir de 1418 (les registres capitulaires sont lacunaires entre 1418 et 1432), peut-être un chanoine de Saint-Germain qui la libéra en 1429. On ne connaît pas plus l’auteur de la collation : le pape ou l’évêque de Paris, après présentation par les chanoines ?
34 Vu la longueur des procès due aussi en partie à la résistance manifestée en 1428 par les paroissiens face à l’extinction du bénéfice curial, il semble que la cure ne soit jamais devenue réellement un office, d’où une certaine légitimité de Pierre de Creil dans ses prétentions, outre la collation de la cure par le pape qui ne craint pas de se contredire entre 1425 et 1429. Mais entre-temps, les chanoines ont été excommuniés par le même pape à cause de l’élection au décanat. Le différend est enfin réglé le 15 avril 1438 par un accord bancal dans lequel Pierre accepte de renoncer à ce que la cure soit bénéfice car unie à la mense capitulaire, à condition d’obtenir une prébende du chapitre, Arch. nat., L 554B n° 81. Sa mort quelques mois plus tard scelle un retour à la situation d’avant 1393. De toute façon, l’entrée en vigueur de la Pragmatique en juillet 1438 redonne au chapitre le patronage de la cure.
35 Faute de registres, c’est grâce aux pièces de ce procès, éditées par N. Valois, Histoire de la pragmatique sanction de Bourges, Paris, Picard, 1906, p. 18-32, que cet événement est connu.
36 Arch. segr. vat., Reg. Suppl. 216 fol. 68r.
37 Le doyen en 1438 et 1451, le chantre en 1443 et 1459 et le curé en 1439 et 1459.
38 Jean est reçu chanoine le 8, il est élu doyen le 19, Arch. nat., LL 395 fol. 45v-46r, 47r-48v. Après sa mort en mai 1451, le chapitre élit comme doyen début septembre Jean Cheneteau, chanoine depuis 1446, malgré les difficultés que leur fait l’évêque qui prétend percevoir les revenus du décanat vacant, comme si le chapitre n’en était que le patron et non le collateur de plein droit, Arch. nat., LL 395 fol. 189r.
39 La chantrerie vaque par la mort de Jean Robert le 7 juin 1443. Mais, le 4, Jean Aguenin, chanoine de Saint-Germain depuis 1442, demande à être nommé à la chantrerie en vertu d’une résignation faite par le chantre dans les mains de l’évêque trois jours plus tôt. On ne saura jamais si cela était vrai. Le 1er juillet, les chanoines élisent non pas Jean Aguenin mais Étienne le Petit, chanoine depuis environ 1431, Arch. nat., LL 395 fol. 117v-120r. Étienne résigne la chantrerie dans les mains du chapitre (et permute son canonicat dans celles de l’évêque, procédure normale puisque les canonicats de Saint-Germain sont à la collation épiscopale) vers le mois de mars 1459 et le chapitre élit comme chantre Nicaise Joye, chanoine depuis les années 1420, entre le 1er et le 5 juin, Arch. nat., LL 396 fol. 92r-v.
40 Le candidat est en fait pourvu par le connétable de Richemont, par grâce faite à lui de conférer quelques bénéfices. Guillaume Heuse, docteur en théologie, présenté par le chapitre, est reçu comme curé le 13 janvier 1439 et gagne le procès qui l’oppose au candidat du connétable, Arch. nat., LL 395 fol. 63r, 83v.
41 Guillaume Heuse meurt en avril 1459. Sept candidats sont présentés au chapitre par le roi, le Parlement, l’université. C’est Jean Luillier, docteur en théologie, qui finit par être présenté par le chapitre à l’archidiacre le 9 mai, Arch. nat., LL 396 fol. 89v-91v. Voir note 8.
42 Première abolition de 1461 à 1464, seconde abolition de 1467 à 1472 puis concordat d’Amboise de 1472 à 1478.
43 Il semble que son statut d’office l’ait quelque peu libérée des contraintes pesant sur les bénéfices, à l’instar des autres offices à la nomination du chapitre ou de la communauté, ainsi protégés contre les incursions extérieures.
44 Nicaise Joye meurt le 16 septembre 1467. Dès le 18, Jean Hanny se présente avec une lettre de collation de la semi-prébende de Nicaise par l’évêque et une autre de recommandation par la reine pour la chantrerie. Il est reçu chanoine mais non chantre, deux chanoines ayant été mandatés auprès de la reine pour expliquer ce que l’office suppose comme qualification. Convocation est faite dès ce jour pour élire le chantre puis repoussée au 21 puis encore ajournée. Dès le 2 octobre, Pierre de Aliprandis se présente pour recevoir la chantrerie et un canonicat sans prébende de la part du légat de Paul II. Le chapitre hésitant le reçoit par crainte des censures ecclésiastiques. Pierre de Braban, chanoine depuis 1458, se fait pourvoir de la chantrerie par le même pape le 26 octobre, est reçu chantre par ses collègues le 6 juin 1468 mais, sorti vainqueur d’un procès contre Aliprandis, ne prête hommage au doyen qu’en janvier 1469, Arch. nat., LL 398 fol. 9r-11r, fol. 24r-v, fol. 35v.
45 Arch. nat., LL 398 fol. 40v.
46 Dans la mesure où, en régime d’abolition de la Pragmatique, le roi déclare que la disposition de ce bénéfice électif appartient au pape, par obéissance du roi.
47 L’affaire est en fait un peu plus complexe : Jean de Belleville obtient provision pontificale du décanat (sans le canonicat, ce qui fait qu’il sera doyen sans être jamais chanoine) le 21 janvier 1469 par demande du roi du 9 janvier. Mais Paul II confère aussi le décanat le 28 janvier à Guillaume de Cambray, que le chapitre reçoit comme doyen le 20 février par obéissance aux mandats apostoliques et malgré la lettre de Louis XI, reçue dès le 13 janvier et qui les informait de la collation à Jean de Belleville. Le 8 mars, les chanoines sont sommés par lettre du roi du 23 février de recevoir Jean de Belleville, en présence du premier président du Parlement. Ils obtempèrent in contemplationem domini regis nostri et autorisent Jean à paraître en chapitre malgré les statuts, dès le 11, Arch. nat., LL 398 fol. 36v-43r. Et pourtant, il semble bien que les chanoines aient tout de même élu un doyen, en l’espèce leur chantre Pierre de Braban, mais qui, subreptice, n’est pas reportée dans les registres et qui passe à l’époque inaperçue car Pierre ne fait pas valoir son droit. Par la suite, par obéissance au roi, les chanoines refusent de recevoir Simon Hennequin pourvu par l’archevêque de Sens en 1470, mais ils intentent un procès contre Guillaume de Cambray qui permute son droit au décanat avec Simon en 1473 sans leur permission, considérant que la permutation aurait dû être faite dans leurs mains, défendant ainsi leur droit ordinaire, Arch. nat., LL 398 fol. 129v.
48 Jean de Belleville meurt en octobre. Le 14, Pierre de Cerisay permute le décanat avec Guillaume de Cambray, dans les mains de l’évêque, malgré le procès intenté par les chanoines contre Guillaume en 1473, et il se présente à Saint-Germain ce jour, les chanoines précisant à nouveau que la permutation ne peut se faire qu’en leur chapitre. Cerisay les prie de donner leur accord à la permutation, ce qui est accordé. Néanmoins, c’est le vicaire de l’évêque qui reçoit le doyen, les chanoines faisant savoir qu’ils n’entendent pas renoncer à leur droit d’élection (jus electionis) par cette réception. La collation du décanat (qui en droit ne revient en aucun cas à l’évêque de Paris) est confirmée le 16 octobre 1474 par le pape Sixte IV à la demande de Cerisay, reçu une seconde fois à ce titre le 3 mars 1475. Il ne sera chanoine qu’en août 1479, mais il préside le chapitre par grâce dès décembre 1474, Arch. nat., LL 398 fol. 169v-171v, 174v, 179r-v, 263r.
49 L’élection qui doit avoir lieu dès octobre 1474 ne fait l’objet d’aucun report dans les registres. On en a seulement mention à la mort de Pierre de Braban en juillet 1479, qualifiée alors de ulteriorum non solita effectus (« n’ayant pas produit d’effet ultérieur »), ce qui explique pourquoi, en 1478, il déclare en chapitre refuser de reconnaître Cerisay comme doyen, d’autant qu’en 1475, Braban a même réussi à obtenir provision par le pape du décanat, déclaré vacant par la mort de Cheneteau, Arch. nat., LL 398 fol. 240r ; Arch. segr. vat., Reg. Vat. 578 fol. 88r-89v.
50 Les chanoines reconnaissent Pierre de Cerisay comme « vrai et indubitable doyen » et cédant exceptionnellement leur jus eligendi decanum à l’évêque, ils lui demandent de conférer à Cerisay le droit prétendu par feu Pierre de Braban. Cerisay est reçu doyen une troisième fois le 20 juillet 1479, Arch. nat., LL 398 fol. 258v-263v.
51 Pierre de Cerisay permute son décanat et sa prébende avec Nicolas de Cerisay dans les mains de Jules II le 10 octobre 1507. Les chanoines reçoivent Nicolas le 25. Le décanat est encore dit « éligible » en 1509 alors que Nicolas défend son droit au Parlement contre un concurrent. Il sera à nouveau permuté par lui dans les mains de Léon X en 1514 au profit de Guillaume Hector, Arch. nat., LL 400 fol. 79r, 98r, 166v.
52 La vacance se produit le 16 juillet 1479 par la mort de Pierre de Braban. Convoqués le 20, les chanoines élisent Jean le Varre comme chantre le 21, Jean étant un chanoine très investi dans la vie du chapitre depuis 1474. À sa mort en mai 1491, les chanoines décident à nouveau d’élire un chantre, Robert de Bellefaye, enfant de la paroisse, chanoine depuis 1470, élu le 14 juin. Sa mort le 28 juillet 1501 est suivie par l’élection comme chantre le 3 août de Jacques Croix, chanoine depuis 1482 et lui aussi originaire de la paroisse, Arch. nat., LL 398 fol. 259v-261r ; LL 399 fol. 54r, 188v.
53 Permutation entre Jean Luillier et Robert de Masengharbe, licencié en décrets, présenté à l’archidiacre de Paris le 8 janvier 1471, Arch. nat., LL 398 fol. 89v-90v.
54 Pierre Alusson, ancien chanoine de Saint-Germain, est choisi par le chapitre en 1485 après la mort de Robert de Masengharbe le 11 octobre. Il résigne sa cure en 1486 et Bertrand Charbonneau est présenté à l’archidiacre le 8 décembre de cette année. La cure est permutée par Bertrand en 1491 et Jean Begeon est reçu par le chapitre le 8 juillet, Arch. nat., LL 398 fol. 327v-333v ; LL 399 fol. 10r, 56r.
55 Jean Begeon meurt peu avant le 1er juillet 1508. Ordre est donné de procéder à la présentation d’un successeur dès les premiers jours de juillet mais Jules II pourvoit de la cure Pierre Begeon, licencié en décrets, dès le 11. Il est reçu le 30 mars 1512 par le chapitre après un long procès, non sur le mode de sa désignation mais sur le titre de « curé » que ses lettres lui donnaient, alors qu’il n’avait droit qu’à celui de vicaire perpétuel, le doyen du chapitre, curé originel de la paroisse, ayant seul droit à ce titre, Arch. nat., LL 400 fol. 87r, 139r.
56 La chantrerie échoit par élection à Pierre Cochon en 1514 qui est dit « idoine, instruit et expert dans le service de l’église » mais qui la résigne (tout en conservant son canonicat jusqu’en 1554 !) dès 1516, voir note 9. Elle va alors, par élection toujours, à son parent Claude le Grand puis encore à un autre parent, Jean Guy, Arch. nat., LL 389 fol. 39r ; LL 400 fol. 113v-114v.
57 Malgré ce qu’en pensent les réformateurs des années 1480-1490 qui considèrent l’élection comme garante d’un meilleur choix, voir V. Julerot, « Y a ung grant désordre », op. cit., p. 60-61.
58 On se fie pour la dresser aux jugements portés par la communauté après la mort de son dirigeant, comme en témoigne l’éloge prononcé par les chanoines à la mort de Pierre de Cerisay en 1507, Arch. nat., LL 400 fol. 79r.
59 Ce qui fait que depuis 1403 jusqu’à la promotion de Jean Robert comme chantre à une date inconnue entre 1425 et 1432, le chapitre n’eut de facto pas de chantre.
60 Si elle a lieu par décès, la mise en terre du défunt est souvent mentionnée dans la relation de la convocation, surtout quand elle a eu lieu à Saint-Gemain. C’est le cas le 11 mai 1451 quand convocation est faite pour élire un nouveau doyen après la mort de Jean Chuffart, le 7, dont il est dit qu’il a été inhumé dans l’église, Arch. nat., LL 395 fol. 188v.
61 Ce que les chanoines concluent le 18 mai 1451 après avoir enquêté sur leur confrère Pierre Leclerc qui réside en cour de Rome et sur Jean Durand dont le père atteste qu’il est aux études, hors de la province de Sens, Arch. nat., LL 395 fol. 189r.
62 Le lendemain de la mort de Robert Masengharbe pour l’élection du curé en 1485 (même si la désignation de Pierre Alusson prendra en fait plus de quinze jours, du 12 au 29 octobre. voir note 54) ; décidée le 9 septembre 1438 pour le 10 octobre pour celle du doyen, Arch. nat., LL 395 fol. 45r. Pour l’élection d’officiers comme le distributeur ou le procureur, les chapelains ne sont convoqués par le chapitre qu’au moment d’y procéder, d’où leur protestation en 1434 pour que les chanoines prennent la peine de la faire savoir même aux absents, Arch. nat., LL 395 fol. 15r.
63 Huit chanoines pour l’élection du curé en 1485 et 1486 (voir note 54), neuf pour celle du doyen en 1414 (voir note 27), dix pour celles du doyen en 1438 (voir note 38) et du chantre en 1491 et 1501, onze pour celle du chantre en 1479 (voir note 52).
64 En 1476, pour le décanat, le sergent précise même que Jean Louet est absent de sa maison parisienne depuis longtemps et qu’il se trouve hors de la province de Sens, Arch. nat., LL 398 fol. 258v.
65 Jean Fusée fait cette remarque au sujet de Jean Boucart qui détient une prébende sacerdotale et Guillaume Compains ajoute même que le doyen Pierre de Cerisay a pris part à l’élection alors qu’il n’est pas encore chanoine de l’église (voir note 48), Arch. nat., LL 398 fol. 261r.
66 On attend le doyen Pierre de Cerisay pour élire le curé en 1485 et le plus ancien chanoine, Guillaume Cotin, pour élire le chantre en 1443, Arch. nat., LL 398 fol. 327v ; LL 395 fol. 117v. Ou même un chanoine empêché comme Nicolas Fraillon pour l’élection du doyen en 1438, Arch. nat., LL 395 fol. 46v.
67 Celle d’Hugues Leclerc retenu à Nevers qui dit ne pouvoir venir à Paris sans danger, Arch. nat., LL 395 fol. 47r-48v.
68 Arch. nat., LL 399 fol. 53v.
69 L’élection de 1485 dure plus de quinze jours et le dix-huitième jour, pression est exercée sur le chapitre par un candidat pourvu de la cure par l’évêque qui refuse d’attendre plus longtemps que le chapitre lui présente quelqu’un, Arch. nat., LL 398 fol. 333r.
70 Arch. nat., LL 395 fol. 46r.
71 Les chanoines prêtres sont priés de célébrer la messe avant d’y entrer, Arch. nat., LL 395 fol. 190r.
72 On ne connaît pas la procédure d’élection pour un doyen (Jean Cheneteau en 1451), trois chantres (Nicaise Joye en 1459, Jean le Varre en 1479, Jacques Croix en 1501) et un curé (Jean Luillier en 1459).
73 Quatre chanoines sont commis par le chapitre, dont le doyen, pour élire le chantre puis trois jours plus tard, trois d’entre eux le sont par les chapelains (voir note 68).
74 Arch. nat., LL 394 fol. 131v.
75 Voir note 18. Il semble que les précisions données par le concile de Bâle pour le vote par scrutin aient été utiles dans la mesure où les chanoines semblent tâtonner dans les élections des années précédentes. En 1398, ils font état d’une difficile recherche d’unanimité tout en ayant eu recours au scrutin pour désigner le chantre Jean d’Omont, Arch. nat., LL 393 fol. 18r.
76 Note 76 : Qui domini [...] habita deliberatione matura inter ipsos procedendo ad hujusmodi electionem dicti officii cantorie, quasi via spiritus sancti, vota eorum dominorum decani et canonicorum sic capitulancium unanimiter dirigentes, concorditer prefatum dominum Stephanum Parvi, dicte ecclesie Sancti Germani Autiossiodorensis parisiensis canonicum prebendatum, habilem et ydoneum in cantorem ejusdem ecclesie eorumdem confratrem et concanonicum concorditer et unanimiter elegerunt et nominaverunt. (« Les dits messires, ayant mûrement délibéré entre eux pour procéder à l'élection au dit office de chantrerie, quasiment par la voie du Saint-Esprit, dirigèrent dans un accord unanime leurs vœux , à savoir ceux du doyen et des chanoines tenant ainsi chapitre, sur le dit Étienne le Petit, chanoine prébendé de la dite église Saint-Germain l'Auxerrois de Paris, compétent et idoine, et ils élurent et nommèrent leur confrère et conchanoine, unanimement et en accord, comme chantre de la dite église. »), Arch. nat., LL 395 fol. 119v.
77 Voir notes 38 et 54.
78 De manière étonnante, il ne s’agit pas des chanoines les plus notables du chapitre ni de ceux qui sont là depuis le plus longtemps. Peut-être ont-ils préféré donner leur voix à un personnage très récemment arrivé et encore indemne, plutôt qu’à un chanoine fortement implanté comme Jean Robert, chanoine depuis 1401, qui recueille trois voix seulement, dont celle de Jean Chuffart qui a eu l’élégance de ne pas voter pour lui.
79 Les premiers jours, les chanoines écartent d’emblée une provision de Sixte IV créant une pension sur la cure au profit d’un certain Jean Noyel et refusent de prendre en compte les lettres de collation par l’évêque présentées par Arthur Dannoy, soutenu par le roi et le duc d’Orléans, mais déjà chanoine de Saint-Germain, Arch. nat., LL 398 fol. 328r.
80 Un chanoine, Jean Guy, expose que le premier président de la Chambre des Comptes, auquel il doit beaucoup, lui a très clairement indiqué la personne pour laquelle Jean devait voter (Jean Rollin). Les chanoines apprennent ensuite qu’il y a eu des fuites de leurs délibérations. Ils prêtent une seconde fois le serment du secret et prennent des mesures pour n’être pas entendus, Arch. nat., LL 398 fol. 329r, 330v.
81 On peut suivre l’évolution du rapport de force en fonction des arguments déployés : les partisans de Jean Rollin qui sentent que leur candidat, qui fait des difficultés pour trouver un compromis, est mis en situation de faiblesse, menacent de ne plus paraître en chapitre les jours suivants. Les partisans de Pierre Alusson reprennent quant à eux, à l’unisson derrière le doyen, l’argument qui semble faire basculer la décision : Pierre est un candidat présenté par l’université comme docteur en médécine, Arch. nat., LL 398 fol. 332r-333r.
82 Ce sont celles de Jean d’Omont en 1398, de Jean Chuffart en 1438, Arch. nat., LL 394 fol. 18v ; LL 395 fol. 49v.
83 Il est clair dans le texte du serment prononcé par le doyen en chapitre (Arch. nat., LL 387 fol. 106r.) que l’exercice de sa charge commence le jour de la confirmation de l’élection par l’évêque. Le doyen Jean Chuffart est élu le 19 octobre 1438, il accepte l’élection le 24, est confirmé le 6 novembre, est à nouveau investi le 7, Arch. nat., LL 395 fol. 47r-48v, 49v, 50r.
84 La réponse de l’évêque prend six jours en 1459, quatorze en 1485, neuf en 1486.
85 En octobre 1438, juste après son élection, avant même l’accord de l’élu, l’investiture du doyen Jean Chuffart revêt un aspect particulièrement solennel : il est revêtu de l’habit canonial, conduit par la main depuis le chapitre jusqu’à l’église, élevé sur l’autel majeur qu’il embrasse au chant du Te Deum et pendant la sonnerie des cloches, puis installé en chœur.
86 Arch. nat., LL 395 fol. 120r.
87 Cet hommage est prêté à nouveau quand le doyen change. Ainsi le chantre Pierre de Braban le prête-t-il en janvier 1469 au doyen Jean Cheneteau quand il est reçu chantre, puis le 10 mars de la même année, après la réception du nouveau doyen Jean de Belleville le 8, Arch. nat., LL 398 fol. 36r, fol. 43r.
88 Ils appartiennent souvent eux-mêmes à un chapitre cathédral, et de plus en plus à celui de Notre-Dame de Paris à la fin du siècle. Les chanoines de Notre-Dame sont encore très déterminés à élire l’évêque en 1492, voir V. Julerot, « Y a ung grant désordre », op. cit., p. 63.
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Référence papier
Anne Massoni, « Élection et collégialité », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 20 | 2010, 163-179.
Référence électronique
Anne Massoni, « Élection et collégialité », Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 20 | 2010, mis en ligne le 30 décembre 2013, consulté le 15 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/crmh/12218 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/crm.12218
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