1Aux dimensions de carte postale, il ne fait nul doute que l’ouvrage que nous tenons dans les mains est dédié à l’image. De Grandville à Topor, le fantastique des dessinauteurs, essai écrit par Laurent Baridon (professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université Lyon 2), se consacre à un sujet bien précis de l’histoire de l’illustration, tout en l’inscrivant dans une analyse transversale. Inscrivant les bornes chronologiques de cette étude par le biais de deux illustrateurs, Grandville (1803-1847) et Roland Topor (1938-1997), l’auteur tente de comprendre le statut professionnel de ces derniers. L’essai s’amorce par une grande plongée dans la carrière et l’œuvre de Grandville, le décrivant comme un « illustrateur paradoxal » (p. 6) dans son rapport entre le texte et l’image, et autonome. L’ouvrage puise dans l’humour noir que Grandville et Topor ont en commun, dans leur attitude irrévérencieuse aussi bien dans les images que hors de celles-ci. L’interrogation de Laurent Baridon sur la postérité et l’héritage de Grandville fait émerger un exemple qui cristallise le lien entre les deux illustrateurs, à savoir lorsque Topor reçoit le prix de l’humour noir Grandville en 1961 (p. 40). Outre les liens historiques entre deux figures de l’illustration, cet essai défend une définition, un mot évocateur dès le titre : dessinauteur. Ce terme qualifierait des dessinateurs-écrivains et des écrivains-dessinateurs, le tout dans une « veine fantastique et sombre » (p. 33), les différenciant de ceux dont la production est destinée aux enfants comme Leonard Leslie Brooke ou Beatrix Potter. Il amène une fois de plus la question de l’autonomie des illustrateurs et de leurs œuvres dans le contexte artistique des XIX^e et XX^e siècles, à l’heure où l’histoire de l’illustration est encore nouvelle dans les champs de recherche en histoire de l’art.