1« Que se passe-t-il lorsque la fiction et la critique sont combinées et appliquées à des projets et des problèmes architecturaux, à des sites et des situations, à des histoires et des théories » (p. 12) ? La « fiction-critique » (ficto-criticism ou fictocriticism) émerge comme concept et méthode dans les contextes anglophones (notamment australien et canadien). Elle combine à la fois les techniques ethnographiques associées aux études culturelles et à la théorie littéraire, la réception anglophone de la théorie critique, du poststructuralisme et de la théorie féministe française ainsi que l’influence, à partir des années 1980, de philosophes. Oubliée un temps, la fiction-critique réapparaît aujourd’hui comme une approche expérimentale appelée à être appliquée aux questions spatiales et architecturales. Cette résurgence peut d’ailleurs être considérée comme un symptôme, interrogeant les instruments habituels du projet architectural et leur (in-)efficacité face aux nouveaux enjeux sociétaux et culturels. Caractérisés par un mode particulier de critique, les textes réunis dans cet ouvrage prennent la forme spécifique de l’essai nécessairement fragmentaire dont le refus de complétude trace des perspectives ouvertes vers de possibles projets futurs. Les essais réunis sont encadrés par un avant-propos de Jane Rendell dont les travaux ont compté dans le développement de l’écriture comme mode de pratique critique de création en architecture, et par une postface de Stephen Muecke, ethnographe associé à l’émergence de la fiction-critique en Australie. Les 17 essais défendent, par la diversité des sujets, les nombreuses potentialités de la fiction-critique qui mériterait de se diffuser dans les enseignements des écoles d’architecture comme un instrument permettant de « perturber les façons habituelles de voir » (p. 11) tout en travaillant, à travers la construction des mondes, les dimensions de l’imaginaire, et l’ouverture de l’architecture à d’autres disciplines comme les cultural studies, la théorie littéraire ou encore l’ethnographie.