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Avant-propos

Jean-Christophe Bardout et Vincent Jullien
p. 7-8

Texte intégral

1Si la question des mondes possibles intéresse les historiens de la métaphysique et de la physique moderne (époque à laquelle apparaît le syntagme qui en consigne la pertinence), cette question se trouve aujourd’hui investie, à nouveaux frais sans doute, tant par la philosophie analytique que par certains aspects essentiels de la cosmologie contemporaine. Le présent volume, en partie issu d’un colloque tenu à l’Université de Brest les 16, 17, et 18 octobre 2003, se propose d’interroger à la fois l’unicité et la cohérence interne de la notion de mondes possibles au fil de ses usages modernes et contemporains.

2Apparue expressément à l’aube de l’époque moderne dans le contexte de la remise en cause de la cosmologie aristotélicienne des sphères et des spéculations sur la toute-puissance divine, la notion de mondes possibles trouve son plein épanouissement au cours de l’âge classique lorsque la réflexion philosophique et scientifique accueille l’idée d’un Dieu omniscient et tout-puissant, auteur des lois contingentes de la nature, et libre créateur d’un monde qui pourrait, de ce fait, être tout différent du nôtre. La notion qui nous intéresse n’est cependant pas univoque, et décèle, dès ses premiers usages, plusieurs ambiguïtés notables, liées au croisement des problématiques qui l’ont vu naître. Délaissant la question des mondes possibles telle qu’elle peut s’élaborer dans les fictions littéraires ou les utopies politiques, le présent volume en considère plus particulièrement les enjeux métaphysiques, cosmologiques et épistémologiques.

3En premier lieu, sur la base de la mise en question de la représentation antique et médiévale d’un monde clos et unique, les mondes possibles désignent des systèmes distincts de celui que nous connaissons, gouvernés par des lois physiques spécifiques, éventuellement peuplés de créatures inconnues de nous, mondes qui peuvent néanmoins parfaitement coexister avec le nôtre. La question des mondes possibles croise alors celle de la pluralité des mondes réels, produits par un Dieu dont rien ne saurait borner la toute-puissance. Cette éventuelle multiplicité de systèmes cosmologiques coexistants s’intègre alors dans cette totalité plus compréhensive qu’est l’univers.

4Rien cependant n’implique a priori que notre monde soit le seul possible, et que les choses qui le constituent, avec leur histoire et leurs propriétés, ne puissent exister autrement, ou se trouver autrement agencées. On s’achemine alors vers une conception plus spécifiquement modale et épistémologique des mondes possibles. Une fois déliée la relation de ceux-ci à l’éventualité d’un entendement divin qui les pense et en supporte la possibilité, la notion conserve néanmoins une consistance et une opérativité pour évaluer certains des énoncés relatifs à notre monde actuel.

5À quelle époque et dans quelles conditions précises le syntagme et le concept de mondes possibles ont-ils pu émerger ? Dans quelle mesure pouvons-nous véritablement penser jusqu’au bout la pluralité effective de mondes possibles, y compris dans la perspective leibnizienne qui en supporte historiquement le développement ? En quel sens le concept de possibilité se trouve-t-il enrichi ou modifié du fait qu’il se trouve appliqué à un monde et non simplement à des individus au sein d’un système existant ? Dans quelle mesure enfin la supposition de mondes possibles est-elle opératoire pour évaluer les assertions modales relatives à notre monde ?

6Telles sont quelques unes des questions qu’entendent soulever les textes ici réunis.

7Il reste au lecteur à décider si la pérennité lexicale des notions recouvre, des spéculations médiévales sur la pluralité des mondes aux interrogations contemporaines de l’astrophysique ou de la logique modale, des questions pour le moins commensurables.

8Nous adressons nos vifs remerciements à Vincent Carraud et Stéphane Chauvier, responsables des Cahiers de philosophie de l’Université de Caen pour l’hospitalité qu’ils nous ont généreusement offerte en acceptant de publier ce volume dont la méthode, à certains égards, rappellera au lecteur celle qui fut naguère éprouvée avec succès par le colloque sur Le réalisme des universaux.

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Pour citer cet article

Référence papier

Jean-Christophe Bardout et Vincent Jullien, « Avant-propos »Cahiers de philosophie de l’université de Caen, 42 | 2005, 7-8.

Référence électronique

Jean-Christophe Bardout et Vincent Jullien, « Avant-propos »Cahiers de philosophie de l’université de Caen [En ligne], 42 | 2005, mis en ligne le 07 mars 2023, consulté le 07 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cpuc/2055 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cpuc.2055

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Auteurs

Jean-Christophe Bardout

Université de Brest

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CC-BY-NC-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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