Avant-propos
Texte intégral
Danielle Cohen-Levinas (DCL) : Qu’est-ce qui se trouve pour Rosenzweig définitivement achevé après la guerre ? C’est par cette question à bien des égards brutale, que j’aimerais entrer avec vous dans l’œuvre de Franz Rosenzweig, une œuvre complexe, qui déplace les interprétations hégéliennes de l’histoire, mais qui toutefois reste encore confidentielle, confinée à quelques cercles de savants, érudits, ou intellectuels qui ont trouvé chez ce philosophe un « agir » de la philosophie. Que ma première question porte sur la guerre et sur les déplacements opérés par Rosenzweig de l’intérieur même de l’histoire n’est pas fortuit. La Première Guerre mondiale, celle qu’a connue Rosenzweig lorsqu’il était dans les tranchées, a mis fin à des promesses et en a ouvert d’autres. Alors que Rosenzweig lui-même inscrivait sa pensée dans la tradition de Schelling, Hegel, Hölderlin, la guerre va déchirer cette notion de sens de l’histoire confirmé par la guerre elle-même, et la fameuse « marche de Dieu dans le monde » va s’en trouver bouleversée. Elle va se retrouver comme excentrée du monde et de l’histoire, et L’Étoile de la Rédemption, ouvrage magistral, rédigé fiévreusement comme le souligne Levinas, sera un peu comme la réponse à cette excentration On va voir surgir une autre philosophie, ce que Rosenzweig appelle « La pensée nouvelle », dont j’aimerais ici que vous nous présentiez les principaux traits.
Gérard Bensussan (GB) : La Première Guerre mondiale, ses champs de batailles, ses affrontements gigantomachiques de nations à nations, son extrême cruauté furent pour Rosenzweig l’épreuve de vérité de la pensée. De sa pensée d’abord, et par conséquent de celle des grands penseurs « classiques » dont il héritait en les pensant pour son propre compte, de l’exercice même de la pensée également dans ses significations offusquées par la réalité, sa dureté, les blessures qu’elle inflige à la vie. Et cette réalité qui vient barrer quelque chose de la pensée, la heurter, l’empêcher, ce fut bien sûr et pour l’essentiel l’effroyable réalité de la mort en masse des combattants, ce que L’Étoile décrit comme son souffle pestilentiel, son dard mortel et impitoyable. L’angoisse que décrivent les premières lignes de l’oeuvre, je songe en particulier à cette phrase où Rosenzweig écrit que l’homme, pour fuir cette terrible peur qui le prend au ventre, s’enfouit comme un ver dans les plis de la terre nue, qu’il tente d’échapper aux fatales tentacules qui le menacent en se terrant où et comme il peut et en hurlant son refus de cette violence inexorable – cette angoisse est bien celle éprouvée par tous les soldats des tranchées, dans la boue et le sang. J’ajoute que cette expérience fut décisive pour toute cette génération de jeunes hommes européens car elle a emporté de considérables déplacements, ruptures et restructurations dans la vie des sociétés, dans la politique, l’histoire, dans la culture. En bonne partie, l’expressionnisme en Allemagne, le surréalisme en France en sortent. Et je ne dis rien des conditions funestes instaurées par l’après-guerre de part et d’autre du Rhin, d’où devaient en fin de compte sortir le nazisme, le fascisme, des millions et des millions de morts. Une épreuve absolument cruciale, donc. Une épreuve de vérité, comme je disais, une épreuve par où, pour Rosenzweig, la philosophie perd sa vérité. L’Étoile, toujours dans ses premières pages, insiste beaucoup sur le mensonge (ontologico-historial) et les mensonges (existentiels) de la philosophie. Ces passages constituent un acte d’accusation impitoyable, on peut y lire le Misère de la philosophie de Rosenzweig. J’y renvoie le lecteur. Mais pour le dire en deux mots : face à l’angoisse de mort qui est aussi une angoisse du corps souffrant, face à la terreur des mortels, la philosophie oppose son sourire vide et béat. Elle « embrouille » les hommes, si je puis dire, en tissant autour d’eux sa « brume bleue du Tout », comme un opium vaporeux qui ôterait illusoirement, dans une sorte d’hallucination factice, son dard à ce qui nous plonge dans la plus horrible des épouvantes. Bêtise de la philosophie, en quelque sorte, bêtise et enivrement, bêtise et consolation. Déni du cri, déni du corps, déni de la résistance du singulier, comme dit Rosenzweig, sous l’emprise du « concept de l’Un et du Tout » où rien ne meurt, où tout est dans tout et ne laisse rien en reste. La première leçon des tranchées, c’est cela : ne plus s’en laisser conter par l’idéalisme, la métaphysique, l’universel et la totalité parce qu’ils ont montré, par et dans la guerre, leur face hippocratique, désormais inoubliable pour qui l’a un jour entrevue. Il est très instructif de lire les premières pages de Totalité et infini de Levinas, autour de la guerre, expérience pure de l’être pur, comme l’écho, le commentaire, le prolongement de la thèse rosenzweigienne, « trop présente pour être citée », comme on sait. Je ne méconnais pas la subtile différence (entre l’angoisse de mort et l’idée de l’infini) qui clive les deux pensées. C’est une autre question. Elles se tiennent en tout cas l’une et l’autre sur un même socle, un même terrain. Il s’agit de faire pièce à la totalité hégélienne. Dans les deux œuvres, Hegel est le Commandeur qui domine tout le paysage. Comme une figure muette dans Totalité et infini ou comme une immense statue de pierre dans L’Étoile.
Si, par la guerre, la philosophie en son entier, « l’idéalisme », s’avère dans son mensonge, c’est-à-dire dans sa fausseté épistémologique et existentielle, Hegel se tient en effet au centre de cette avération. C’est la seconde leçon des tranchées. Elle concerne avant tout la philosophie de l’histoire de Hegel. Laquelle est « nocive », nuisible, comme écrit Rosenzweig dans une lettre, schädlich, occasion de dégâts et de désastres. Précisément parce qu’elle oblige à penser l’histoire comme une totalité « spirituelle » et la guerre comme le secret ontologique de l’histoire. Hegel dit la vérité du mensonge de la philosophie en quelque sorte. Par lui, en effet, quelque chose de très profond s’atteste du lien étroit qui noue en Occident métaphysique et politique. Ce lien, les champs de bataille de 1914-1918 l’auront confirmé : « l’être se révèle comme guerre » dans les mots de Levinas ou, pour le dire comme Rosenzweig, l’histoire des ontologies de l’histoire porte en elle la guerre, comme la nuée l’orage selon le mot de Jaurès à propos du capitalisme. Cette double leçon, sur la métaphysique et sur l’histoire, va porter Rosenzweig, dans la longue méditation de L’Étoile appuyée sur das Jüdische, l’élément juif du penser, à esquisser les contours d’un « nouveau penser ». Il s’agit pour Rosenzweig d’effectuer le bris de la totalité, de la totalisation universelle de toutes les particularités, de retrouver les éclats, les éléments qui sont bien plus vieux que le tout. Ce bris passe donc par la voix revivifiée de cette résistance du singulier dont j’ai déjà parlé, il s’effectue par la sortie hors du mutisme des concepts. Dans sa nouvelle pensée, Rosenzweig tente ainsi de défaire toute la tradition de la philosophie en Occident, « de l’Ionie à Iéna », en la laissant en quelque sorte se déconstruire d’elle-même par l’effet conjoint et continué de ce qui est au cœur de la nouvelle pensée, ce nœud de la parole, de la temporalité et de l’altérité. À l’essentialisation, à la fixité logique des substances produites par l’ontologie traditionnelle, Rosenzweig substitue les figures inventées par L’Étoile sur lesquelles nous reviendrons peut-être. Il en restitue le vivant tracé dans la parole et ses grammaires différentielles, dans l’altérité des autres et l’altérité à soi de l’existence et aussi dans le temps, puisque « le temps, c’est l’autre » et qu’il est le « qui ? » de chaque existence individuelle. Levinas, Heidegger sont par Rosenzweig et à sa façon propre anticipés, comme pouvait l’être Adorno dans sa proposition bien connue selon laquelle « le tout est le non-vrai ». Je dirais que la « philosophie » de Rosenzweig est en bonne part une pensée de la temporalité rompant avec l’interrogation sur l’essence du temps et au contraire attachée à son événementialité pure. C’est cette pensée de la temporalité qui guide également le second point que j’évoquais. La temporalité signifie aussi l’impossibilité pour la totalité historique de se totaliser sans reste. Rosenzweig part d’une analyse du mode d’existence extraterritorial, diasporique, qui marque le rapport du judaïsme à l’histoire telle que la détermine la philosophie spéculative et dialectique de l’histoire. Il y voit une façon foncièrement extra-historique qu’il retourne contre Hegel. Car cette extra-historicité juive s’évase jusqu’à une pensée de l’histoire, de l’État et du politique qui excède le seul « peuple juif ». L’extra-historique détient une efficience historique propre, il témoigne du reste intotalisable face à la totalité de l’histoire dans sa relève continuée de toutes les particularités. L’histoire ne serait pas toute dans l’histoire. La théorie de l’extra-historicité juive ne procède pas d’une opposition abstraite de l’éternité et de la temporalité de l’histoire, de la liturgie et de la politique, de la transcendance et de l’immanence. Il y a au contraire chez Rosenzweig un « matérialisme » de la Révélation – le mot est de lui, il le brandit dans une lettre comme l’emblème de son antiplatonisme. Ces analyses rosenzweigiennes forment en fin de compte une pensée des effets historiques singuliers de l’extra-historicité, repérables dans des configurations particulières du rapport entre histoire et éternité. C’est certainement d’ailleurs l’oubli de ce lien complexe entre extériorité à toute histoire et temporalité des guerres, des États et des révolutions qui est au principe des grands désastres et des grandes catastrophes historiques, comme on dit justement – en tout cas d’un point de vue rosenzweigien.
Je laisse de côté votre question, troublante en effet, sur la notoriété relativement faible de cette pensée, si considérable pourtant (j’ai mentionné Levinas, Heidegger, Adorno, j’aurais pu allonger la liste), par comparaison, par exemple, avec celle d’un Benjamin. Nous y reviendrons peut-être. Je voulais d’abord faire le bilan de tout ce que nous lui devons.
DCL : Alors, commençons par une pensée à laquelle nous sommes tous les deux attachés, celle de Levinas, qui, sans être l’introducteur de Rosenzweig en France comme il le fut pour Husserl, a néanmoins contribué dans Totalité et Infini à faire entendre sa voix. Lorsque Levinas a lu pour la première fois L’Étoile de la Rédemption, il a été ébloui par ce qui lui paraissait être une pensée radicalement nouvelle. Je pense d’ailleurs que Rosenzweig a exercé sur Levinas les mêmes fascination et admiration que celles exercées par Schelling sur Rosenzweig lorsque ce dernier a lu Les Âges du monde. D’ailleurs, dans les deux cas de figure, dans le cas de Schelling pour Rosenzweig comme dans celui de Rosenzweig pour Levinas, l’enjeu était de provoquer un déplacement critique avec la philosophie de Hegel, de s’écarter d’elle tout en l’auscultant minutieusement, tout en lui faisant face. Et puis, il y a les questions de la relation duelle entre l’éternel et le temporel, entre l’individuel et le collectif, entre le sujet et la communauté. Il y a la question de l’expérience humaine tout entière concentrée dans l’immédiateté du temps vécu. Il y a la question de la Rédemption à travers laquelle se dessine l’horizon du prochain et l’idée que chaque homme vit son rapport au monde à travers la relation à l’autre. Je n’oublie pas la question de la guerre pour autant, celle avec laquelle j’ai souhaité ouvrir notre entretien. Dans le cas de Levinas, elle est évidemment centrale. Il faudrait y ajouter l’expérience irréductible de la mort, l’angoisse de la mort comme réalité originelle par quoi s’ouvre la très belle méditation de Rosenzweig dans les premières pages de L’Étoile de la Rédemption. Levinas reprend cette méditation tout en répondant à Heidegger et en prenant ses distances avec lui, car l’expérience et l’angoisse de la mort sont antérieures à toute philosophie.
GB : Rosenzweig détermine explicitement l’enjeu philosophique de son entreprise et le nerf de sa « pensée nouvelle » à partir de ce qu’il appelle son « refus d’obtempérer » à la tradition idéaliste, à la philosophie dans son histoire, dans sa geste de longue durée. Ce refus d’obtempérer signifie pour Rosenzweig quelque chose qui outrepasse considérablement le projet d’une critique rigoureusement conceptualisée de l’ontologie traditionnelle ou de la métaphysique occidentale – encore que le premier livre de L’Étoile engage une destruction ou une déconstruction de la totalité en ses éléments restants, une détotalisation de tout Tout, si je puis dire. Mais ce premier livre est excédé par les deux suivants. C’est que le travail de déblaiement qu’il effectue est requis pour qu’une pensée de la Révélation, c’est-à-dire de ce que la parole en révèle, et de la Rédemption, c’est-à-dire de ce que le temps en porte, puisse venir à se constituer de façon articulée au-delà même du travail philosophique de la détotalisation. En même temps, cette détotalisation préalable ne se supporte pas ni ne s’autorise d’elle seule, elle est comme une condition de possibilité (de la pensée de la Révélation et de la Rédemption) soutenue par une autre condition de possibilité, elle-même inconditionnelle. Elle est en effet engagée, au sens le plus fort, par l’expérience – de la guerre, en l’occurrence. Elle est commandée par une résistance à l’insupportable des ontologies de l’être historique. Il s’agit bel et bien de résister à la processualité historique objective qui fait de la Raison une totalité, un automouvement de totalisation de soi sans reste, quand bien même il reste toujours des restes, les morts sur le champ de bataille, les morts en général – leur vocation, si je puis dire, étant ultimement d’entrer dans le processus, de ne pas rester dehors, donc de ne pas rester. D’autres ont insisté sur ce rapport entre rester et résister, sur la toute petite différence qui associe et dissocie les deux mots. C’est bien de résistance en tout cas que parle à son tour Levinas au début de Totalité et infini, dans ces pages où s’élabore son concept de séparation – et qui doivent tant à Rosenzweig, on ne le soulignera jamais assez. La résistance, explique Levinas, c’est ce qui pousse le psychisme, comme il dit, à ne pas consentir à sa totalisation, et ceci, pour lui, n’est possible que depuis une séparation radicale, depuis un Dasein créaturiel, selon l’expression de Rosenzweig, depuis un « être » créé a-thée, c’est-à-dire creusant le monde à même son intériorité. Ce que je voudrais surtout relever, c’est que Levinas associe cette résistance à la totalisation, ce refus, à un « secret », c’est-à-dire à la force des intentions intérieures qui viennent interrompre la continuité sans faille du temps historique, soit du temps dialectiquement totalisé que toute résistance serait seulement vouée à nourrir pour mieux mourir ainsi à elle-même, ressaisie malgré elle dans un sens qu’elle s’échine à ne pas accepter. Au contraire, le secret de la résistance intérieure, dans sa puissance inouïe, et dans la première cinquantaine de pages de Totalité et infini auxquelles je songe, on lit cela très explicitement, c’est qu’elle défait par sa seule « existence » le fond ontologique où le temps de l’histoire universelle engloutit les existences particulières, si l’on se tient aux déterminations générales de la grande philosophie hégélienne de l’histoire. Cette impulsion quasi-existentielle, éphémère et très instable d’ailleurs chez Levinas, vient tout droit de Rosenzweig et les éléments de la critique de Hegel, de l’Histoire et de la Totalité qu’on peut y lire retraduisent les constituants de la résistance selon Rosenzweig, résistance à la totalisation, résistance dont seul l’individu séparé et jouissant a le « secret », résistance qui disjoint le temps de l’Un et le temps de l’Autre, résistance du temps du « je » à toute absorption dans un temps commun, partagé, égal. Si cette absorption, cette sursomption dialectique, cette perte du secret dans l’histoire étaient irrémédiables, si l’engloutissement des existences particulières dans la totalité sans extériorité était définitif, alors il n’y aurait pas de vie avant la mort, si je puis dire. Or il y en a une. Levinas associe expressément le motif de la résistance et le motif de la mort en les nouant par la question du temps, de son impossible homogénéité. L’idéalisme, au fond, c’est bien cela, une procédure de pensée qui consiste à produire du même, de la consonance, de la synthèse, de la totalité – quoi qu’on en ait et quoi qu’on fasse. Ce temps homogène ne se laisse constituer que depuis la fiction d’une non-séparation de la métaphysique et du métaphysicien, comme écrit Levinas. Et cette fiction, Rosenzweig le dit très bien lorsqu’il vante les mérites de ce qu’il appelle « une philosophie du point de vue », ne se peut qu’à partir d’une sorte d’im-posture : tout se passe, pour le philosophe idéaliste, comme s’il pouvait s’apercevoir lui-même du dehors, surplomber son propre rapport au monde ou aux autres, totaliser sans se prendre lui-même et se comprendre dans cette totalité. Levinas propose même de commencer par ce qu’il appelle, toujours dans Totalité et infini, une asymétrie métaphysique, soit l’impossibilité foncière de parler du dehors et dans un même sens, dans un flux homogène, de soi et des autres. Il ne s’agit pas là immédiatement de l’asymétrie qui structure la relation éthique, mais d’une sorte d’« éthique » élémentaire du philosophe, lequel devrait consentir à se rendre à l’expérience sociale ou intersubjective que son idiotisme de métier, comme disait Marx, le force à oublier. C’est là que je vois un geste partagé par Rosenzweig et Levinas, soit dans le refus d’obéissance, dans la résistance à la philosophie comme condition préalable du philosopher. Il va de soi que ce point n’engage nulle communauté de pensée achevée, mais je ne veux pas ici entrer dans une discussion plus spécialisée sur les différences philosophiques qui clivent les deux pensées. D’autant plus que ce que je viens d’appeler résistance à la philosophie constitue en tout état de cause un milieu, un élément très vivant, une ambiance propre à Rosenzweig et à Levinas, une « présence » donc, qui ne se laisse jamais réduire à la « citation » en bonne et due forme.
DCL : Il y a refus, résistance, et en même temps Rosenzweig ne perd jamais de vue Hegel, et Levinas non plus – ni Hegel ni Heidegger. Il y va d’une complexité accordée au geste de résistance qui n’est pas une annulation ou une rature. Il y va surtout d’une critique, d’une lutte pour ne pas, comme vous le dites, se laisser réduire à une citation. Elle engage un dialogue implicite avec toute l’histoire de la métaphysique. Je voudrais revenir à votre lecture du Stern. Dans le Stern, la question de la Révélation est une des plus complexes, de par le fait qu’elle se présente d’emblée comme ambivalence. Elle désigne à la fois la relation de Dieu à l’homme, et en même temps, elle désigne un ensemble d’étapes, de mouvements plus exactement, grâce auxquels les trois réalités élémentaires accèdent à une existence effective et phénoménale. Cela signifie aussi que la Révélation ne se situe pas complètement en dehors du système, mais qu’elle représente et constitue un moment de ce système. Un processus est mis en route – Création, Révélation et Rédemption – d’où l’élémentaire se révèle, c’est-à-dire surgit dans le vécu. Tout ça est extrêmement complexe, parce que Rosenzweig refuse de fonder la réalité du monde sur l’effectivité ou l’évidence intuitive du monde, et en même temps, il faut bien admettre que Rosenzweig, dans la deuxième partie du Stern tout au moins, reconnaît que l’expérience que nous faisons et que nous avons du monde repose sur une forme d’inachèvement, pour ne pas dire sur l’inachèvement lui-même. C’est extraordinairement complexe comme élaboration conceptuelle et spéculative. Comment comprenez-vous le lien chez Rosenzweig entre système et inachèvement, formalisation et déformalisation ?
GB : Il faut peut-être commencer par une indication de lecture du « système » de L’Étoile – j’utilise ce mot de « système » avec précaution et non sans une certaine défiance, même si je sais bien que Rosenzweig en fait lui-même usage dans « La pensée nouvelle », mais il parle de son « système » dans une intention délibérément provocatrice, et sur un ton d’ironie mimétique, pour marquer la différence à ses yeux capitale entre L’Étoile et « un livre juif ». Je vais m’expliquer sur la difficulté qu’il y a à mon sens à tenir jusqu’au bout cette idée d’un « système » du Stern. En lisant L’Étoile, et en particulier sa deuxième partie, il faut constamment avoir en tête le double sens de la Révélation, sa double fonctionnalité. D’une part, elle irradie l’ensemble du livre, le « système » en son entier en quelque sorte, c’est-à-dire les parties I et III, aussi bien la Création que la Rédemption – et cette irradiation, ce n’est rien d’autre à vrai dire que la temporalité elle-même, éclatée dans ses trois stratifications enchevêtrées, l’instance temporalisée de la « trajectoire de la voie » comme dit Rosenzweig, c’est-à-dire l’arrachement des éléments Dieu Monde Homme (je l’écris comme Rosenzweig sans virgules ni tirets) à leur essence simplement élémentale, leur devenir-facticité en quelque sorte. D’autre part, la Révélation revêt un sens étroit si je puis dire, qui est moins que la structure médiane de temporalisation qu’elle signifie et plus que son assignation exclusivement « systématique ». Ce moins et ce plus à la fois, c’est la Révélation comme Ereignis, la rencontre si l’on veut ou, pour parler comme Rosenzweig, la naissance sans cesse renouvelée du Soi retourné en Aimé(e) – c’est d’ailleurs la relation nommée Révélation, en ce sens étroit ou nucléaire, qui sert à Rosenzweig à dire l’amour qu’il porte à Gritli dans la monumentale correspondance qu’il lui adresse. Cette « seconde » Révélation est appelée par la première, comme l’explique Rosenzweig. En effet, la première fait de quelque façon le « tout » des trois modalités de la relation en général : la Révélation révéle la Création, elle révèle la Rédemption et elle s’autorévèle comme « âme aimée » dans l’ipséité tragique du soi. Au sens fort, ou large, seule existe la Révélation d’un passé créationnel et d’un avenir rédimant. Je ne dirais donc pas que la Révélation est un « moment » du « système ». Une Création qui ne se révèlerait pas ne serait qu’un prémonde bis, un paganisme. Une Rédemption qui ne se révèlerait pas comme relation Homme-Monde s’abîmerait en quiétisme et laisserait l’inachèvement du monde à lui-même. L’Étoile dessine une économie générale des flux, complexe mais cristalline, et on pourrait multiplier les descriptions de ces multiplicités ouvertes les unes sur les autres, le « système » si vous voulez. Mais ce « système » est un système des temps, au sens où Schelling le disait des Âges du monde. Et ces deux usages du mot « système » (Hegel et Schelling, donc) sont hétérogènes, ils ne désignent pas du tout les mêmes intentions théoriques ni les mêmes tensions du logique et du temporel. La meilleure façon de répondre à votre question, en particulier sur le fait de savoir si la Révélation est dans le système ou hors du système, consiste à rappeler cette hétérogénéité. D’un mot je dirais (en espérant qu’on ne se méprendra pas) : le Système, c’est la Révélation. Ce que je veux indiquer par là, c’est que la Révélation assure tout au long de L’Étoile, des passages, des passes, des changes, le devenir-événement des éléments, des structures, des concepts. Non pas des transitions conceptuelles qui assureraient la bonne circulation, dialectique ou pas, de l’avant vers l’après, mais des conversions, des révélations, des déformalisations. S’il y a un « système », c’est un système sens dessus dessous. Se révélant dans et pour des réalités humaines vécues, à savoir les Dasein se découvrant ou se révélant à eux-mêmes comme créés, Dieu Monde Homme changent de statut ontologique et existentiel, selon une inversion généralisée, une désystématisation du système par l’existence. La Révélation défait la valise où la philosophie avait soigneusement rangé ses effets et ordonné leur succession, et elle la défait en sens inverse, évidemment ! Dans la Révélation de sa Création, le Dasein créé se découvre comme étant toujours déjà là, avant lui-même si je puis dire, ayant été créé, recréé ou transcréé, dans ce constant renouvellement créaturiel en quoi consiste cette Révélation de lui-même comme créature, à la différence d’une chose perpétuellement irrévélée. Rosenzweig établit une importante différence entre choséité et Dasein. L’existence, c’est ce qui, dans la créature, excède le simple créé chosal et accède à la Révélation. Ces développements de L’Étoile, publiée sept ans avant Sein und Zeit, suggèrent évidemment un rapprochement avec le premier Heidegger. La facticité heideggerienne, c’est aussi cette découverte par le Dasein, dans ses modes d’être (être-jeté, être-au-monde, historicité), de sa différence avec l’être-là-devant chosal. L’existence, c’est aussi cette « ek-sistence », cette extériorisation de soi (de soi par soi, « avance-sur-soi », pour Heidegger; de soi par un autre, « Révélation », pour Rosenzweig) qui doit sans cesse se reprendre dans « l’ouverture du là ». Dans l’écriture même ou la facture des « concepts », voire le dispositif de la « répétition », je vois plus de semblances entre L’Étoile et Être et temps, où l’articulation de l’analytique existentiale et de l’ontologie fondamentale poserait également des questionnements « systématiques », qu’entre le maître-ouvrage de Rosenzweig et la Grande Logique de Hegel. Pour le Dasein créé en tout cas, la Révélation est ce qui le transit dans l’entièreté de son existence. Elle requiert la reconnaissance par la Créature et de sa propre incomplétude transcréaturielle et de l’inachèvement du monde chosal ou élémentaire, la Rédemption nommant la modalité relationnelle de leur entr’appartenance. Chacun de ces passages, chacune de ces conversions-réversions-inversions signifiant à chaque fois un mode de la temporalité, une déformalisation du temps et du sens uniques.
DCL : Vous avez appelé votre livre consacré à Rosenzweig Dans la forme du monde (Hermann, Paris, 2009), en référence à la citation de Rosenzweig lui-même. Pouvez-vous expliquer ce que Rosenzweig entend par « philosopher dans la forme du monde » ?
GB : Je voudrais commencer par rappeler rapidement le contexte de ce « philosopher dans la forme du monde ». L’expression se trouve dans une lettre du 5 septembre 1916 de la fameuse correspondance avec Rosenstock. Elle entend marquer avec rigueur une différence entre le mode de philosopher que Rosenzweig appelle alors de ses vœux et l’idéalisme, resté « sans antithèse » depuis les Grecs comme il dit, soit le « philosopher dans la forme de l’âme » ou de l’Idée, de la theoria et de la contemplation. Or ce philosopher idéaliste culmine dans une philosophie du Neutre, l’expression est de Rosenzweig, qui le fait entrer en crise. Rosenzweig entend se faire l’analyste placide et le médecin traitant de cette mise en crise ouverte par l’accomplissement hégélien du philosopher dans la forme de l’Idée. Le matérialisme de la Révélation que j’évoquais en commençant emporte une urgence, une requête qui est celle de la pensée elle-même, la nécessité pratique que soit mise en œuvre une nouvelle façon de philosopher. Le « philosopher dans la forme du monde » dit exactement la même chose, et de la même impérieuse façon, que « la nouvelle pensée ». L’exercice de la philosophie ne se peut plus après Hegel comme il se pouvait avant, dans la même « forme », et ceci parce que Hegel en a épuisé la possibilité même, toutes les possibilités. C’est autour de ce point-pivot que se règle d’ailleurs la question du rapport de Rosenzweig à Hegel qui fait parfois l’objet de controverses académiques un peu futiles. Ce rapport est tout simplement réglé et régi selon une infidélité radicale à Hegel obligée par le legs dont il nous a chargé. Quiconque s’imaginerait pouvoir encore constituer un système de connaissances voraussetzungslos, sans aucun présupposé et dégagé de toute contamination empirique ou mondaine, risque fort de routiniser la philosophie, de ne produire ou reproduire que des connaissances faibles et de perdre complètement de vue « la chose même ». Celui-là, Rosenzweig le qualifie dans une lettre de 1923, d’« âne gnoséologique ». Je songe ici à un mot de Benjamin qui entendait également avancer quelque chose d’une nouvelle méthode du philosopher : immer radikal, niemals konsequent. Penser toujours de façon radicale, aller à la racine des choses comme disait Marx, sans s’embarrasser du mode d’enchaînement causal, de reliaison purement logique des conséquences à leur point d’origine. Il me semble qu’on pourrait trouver quelque affinité entre les deux gestes et les deux préceptes. L’âne gnoséologique, ce n’est pas l’idéaliste du passé, l’homme pensant de cette histoire de longue durée qui va de l’étonnement au neutre, de l’Ionie à Iéna, c’est l’idéaliste entêté d’aujourd’hui, obstiné dans la répétition d’une forme stérile. « Philosopher dans la forme du monde » oblige à changer de terrain et implique le philosophe dans sa philosophie. Cette « forme du monde », qu’est-ce que c’est ? On peut dire qu’elle consiste pratiquement dans le « quelque chose » sur quoi Rosenzweig revient souvent avec insistance. L’idéalisme – dont la « pensée nouvelle » entend démonter les procédures, les dispositifs et même l’habitus – pourrait être globalement décrit comme une dialectique de l’être et du néant, du tout et du rien. Or, nous dit Rosenzweig, rien de tel ne nous est donné dans le monde. Le monde nous donne (le) quelque chose. Et le philosophe doit philosopher depuis cette donation. Ceci emporte l’introduction d’une certaine quotidienneté dans le connaître lui-même, d’éléments de trivialisation ou de tautologisation dans la philosophie. C’est ce que Rosenzweig a essayé de faire dans son petit Opuscule sur l’entendement sain et malsain dont il n’était d’ailleurs pas du tout satisfait – ce qui indique l’extrême difficulté de l’entreprise. Philosopher dans la forme du monde oblige le « nouveau » philosophe à deux gestes préalables. D’une part, à commencer « prinzip- und systemlos ». Je cite cette expression massive qu’on peut lire dans une lettre de 1922 parce qu’elle éclaire également la question du système que nous nous posions tout à l’heure. Il faut donc commencer « sans principe et sans système » – et c’est bien la même chose que la radicalité in-conséquente promue par Benjamin. Dans la même correspondance, Rosenzweig raille les principes qui ouvrent, autorisent et « commencent » les systèmes : ce sont, écrit-il, « des officiers sans soldats », « des pères sans enfants », soit des axiomes sans monde. Il faut donc désormais « commencer » ailleurs, dans le monde et ce qu’il nous donne, dans le quelque chose qui nous oblige, il faut avoir « le courage de vivre dans le quelque chose » comme écrit aussi Rosenzweig. Le second geste emporté par le « philosopher dans la forme du monde » consiste en un certain regard, une certaine vision quasi-intuitive qui commande ou devrait commander l’exercice de la philosophie. Le philosophe qui philosophe « dans la forme du monde » saisit en même temps, dans un même élan spéculatif, ratio et irratio. La ratio, ce sont les substances logiques à quoi se consacre toute la première partie de L’Étoile, la raison comme « ingrédient » du monde, inéradicable mais à quoi le monde ne se laisse pas réduire en totalité. L’irratio, c’est justement le monde, l’effectivité alogique dont l’harmonie cosmique suscita jadis l’étonnement d’où est sortie la philosophie. Rien d’irrationel ou d’irrationaliste ici, on le comprend sans peine je crois. Cette irratio du monde signifie un primat absolu du pratique – et c’est sans doute le fin mot du « philosopher dans la forme du monde », un « faire avant d’entendre », le naasé venichma du verset biblique, un agir mondain (et la Rédemption, c’est exactement cet entrelacs de l’agir de l’homme et du quelque chose) qui précède de très loin la considération théorétique – « l’instant du faire » selon la belle formule de Rosenzweig. Si l’on voulait lui donner un nom ou une étiquette philosophiques, il faudrait dire de ce « philosopher dans la forme du monde » qu’il est un empirisme, et il faudrait encore lui accoler un qualificatif improbable (empirisme « absolu » propose sans conviction Rosenzweig à la fin de « La pensée nouvelle »). Il s’agit de déplacer l’exigence de la philosophie, de l’Idée vers le monde. On pourrait encore remarquer, pour compléter ou recontextualiser ce que nous disions tout à l’heure, que c’est la Révélation qui est l’opérateur de ce déplacement. La Révélation sauve le monde en quelque sorte. Elle sauve la matière, comme dit Rosenzweig, en l’arrachant à la décomposition et à la fragmentation que lui impose l’idéalisme, et plus exactement ici, l’idéalisme comme perpétuité du paganisme. Elle restitue la matière et la pratique du monde à son mouvement intime, à sa temporalité, et en fin de compte à ce que Rosenzweig appelle sa vie.
DCL : Quelle place la dimension religieuse de la pensée de Rosenzweig occupe-t-elle par rapport aux questions politiques, métaphysiques et historiques ? D’autant que sa conception de la Révélation m’apparaît comme fondamentalement anti-religieuse.
GB : Sur ce dernier point d’abord. Je ne sais pas si on peut dire que la Révélation, pour Rosenzweig, est anti-religieuse. Mais je songe à un passage de sa correspondance où il se tient au plus près de votre intuition et j’en suis frappé. Dans cette lettre de 1919, il explique à son cousin Ehrenberg que le judaïsme n’est en aucun cas une « culture » et il signale au contraire l’exception remarquable qu’il représente sous cet aspect. Toutes les grandes civilisations, l’Asie, l’Égypte, la Chine etc. ont produit des « merveilles culturelles », des œuvres considérables, des édifices, des traditions, des arts, autant d’attestations de l’Esprit. Et Rosenzweig, comme Hegel, inscrit les « religions » au premier rang de ces grandes œuvres universelles, religions qui sont comme la poésie des cieux, de la terre et de l’eau. Or la Révélation, telle que consignée dans le texte biblique, s’oppose frontalement et radicalement aux religions ou à la religion ainsi entendues en un sens historial et spirituel, en un sens sacré. Pour Rosenzweig, il ne peut y avoir de « religion » que païenne. La religion comme interprétation de présages naturels et assignation de leur sens à une autorité supérieure (c’est la double étymologie du terme selon Cicéron et selon Lactance, lire et lier) emporterait à la fois une connaissance et une vénération, explique Rosenzweig à son cousin. En tant qu’elle est païenne, la religion constitue une forme de connaissance qui vénère. Or la Révélation, écrit-il dans la même lettre, restaurerait dans les objets ainsi connus-vénérés, leur contenu « unreligiös » en les arrachant à leur statut naturel exhaussé dans leur adoration en esprit. Il ne dit pas « anti-religieux » comme vous le suggériez mais unreligiös n’en est pas loin. Il y a donc à coup sûr pour Rosenzweig une efficience de la Révélation qui n’est pas du tout de l’ordre du religieux, lequel signifie un paganisme des institutions, des services, de la liturgie et des offices. On connaît sa boutade : le bon Dieu a créé le monde et l’homme, il n’a pas créé la religion. On ne peut certainement pas s’en contenter mais elle dit bien ce qu’elle veut dire. Je ne reviens pas sur la Révélation en tant que telle et dans toute l’amplitude de ses contenus. Elle est toujours le maître-mot des réponses que je vous ai faites et c’est extrêmement significatif. Ce qu’elle défait des religions – et l’Europe en sort de quelque façon – c’est d’une part la reliaison qui s’y noue intimement entre connaissance et vénération et d’autre part l’assignation du dieu ou de Dieu à un connaître se doublant d’un vénérer. Dieu ne relève pas d’un connaître et la connaissance s’applique à des objets radicalement non-divins et non-vénérables. L’effet de la Révélation, dans la ligne de Rosenzweig, c’est une sorte de sécularisation extraordinairement efficace. Si l’on « connaît » Dieu, ce n’est pas Dieu. Si l’on vénère ce que l’on connaît, on est dans l’idolâtrie. La Révélation disjoint ce que les Religions avaient confondu, la connaissance et la vénération, la foi et le savoir, l’Église et l’État. Elle autorise par conséquent l’examen du « fait religieux » auquel elle échappe dès lors qu’on la tient dans son flux « non-religieux ». J’ajouterai un point décisif. Cet effet de la Révélation ne tient pas dans un résultat historique définitivement joué et acquis une fois pour toutes. Tout est affaire de temps, de temporalités différentielles. Le paganisme, ce que Rosenzweig nomme ainsi et qui n’est pas une simple période ou un moment de l’histoire, constitue un mode de la durée du temps historique, une perpétuité transhistorique. Le paganisme est toujours là comme une sorte de compagnon silencieux de la Révélation, sous des formes extraordinairement contrastées et multiples, et son actualité est interminable. L’idéalisme dont nous parlions tout à l’heure en est d’ailleurs la figure éminente. À bien des égards, les grandes ontologies de l’Histoire sont des « religions » de l’Histoire, des paganismes en ce sens très particulier accordé à ce terme par Rosenzweig. Et leur mise en crise a pour enjeu la substitution de la « religion » comme Révélation, ce que Rosenzweig appelle la religion au sens du xxe siècle à la Religion comme histoire, au sens du xixe siècle, comme il dit encore. Sous ces clarifications préalables, et en particulier sous la condition de juste entente de ce que Rosenzweig appelle « religion » ou « paganisme », les rapports entre ce complexe de questions qui se lèvent autour de la « religion » et l’histoire ou la politique apparaissent évidents et tumultueux. De nombreux textes dans l’œuvre de Rosenzweig témoignent de son attention et de son intérêt continus pour ces problèmes dans leur ensemble.
Pour citer cet article
Référence papier
Gérard Bensussan et Danielle Cohen-Levinas, « Avant-propos », Les Cahiers philosophiques de Strasbourg, 29 | 2011, 11-25.
Référence électronique
Gérard Bensussan et Danielle Cohen-Levinas, « Avant-propos », Les Cahiers philosophiques de Strasbourg [En ligne], 29 | 2011, mis en ligne le 15 mai 2019, consulté le 13 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cps/2550 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cps.2550
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