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L’expansion du secteur sucro-énergétique en territoires indigènes dans le sud du Mato Grosso do Sul-Brésil.

A expansão do setor sucroenergético em território indígena no sul de Mato Grosso do Sul-Brasil.
The expansion of the sugar-energy sector in an indigenous territory in southern Mato Grosso do Sul-Brazil.
Marine Dubos-Raoul
Traduction(s) :
A expansão do setor sucroenergético em território indígena no sul de Mato Grosso do Sul-Brasil. [pt]

Résumés

Le Brésil connait depuis le début du XXIème siècle une augmentation significative de la production de canne à sucre sur son territoire. La région sud du Mato Grosso do Sul s’est spécialisée dans la production de canne depuis 2006. La région de Dourados est aussi une région à forte population indigène, qui s’est vu confisquer ses territoires au cours du XXème siècle, à l’origine de conflits constants entre les indigènes et les producteurs agricoles de la région. L’arrivée du secteur sucro-énergétique réactive des tensions anciennes et tend à reformuler les stratégies de luttes des indigènes pour la revendication de son tekoha (Territoire Indigène).

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Index de mots-clés :

Dourados

Index géographique :

Dourados, Mato Grosso do Sul, Brasil
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Texte intégral

1À partir de 2006, les champs de canne à sucre s’étendent dans le territoire brésilien en raison d’une conjoncture favorable aux marchés du sucre et de l’éthanol et d’un agrobusiness en forte expansion dans le pays. Depuis les années 2000, il y a eu une augmentation importante de la production de matières premières agricoles à l’échelle mondiale, dû au fait de la croissance de la population et de la demande alimentaire en conséquence qui fait gonfler les cours des produits agricoles. Cela a eu pour effet une expansion de la frontière agricole de la canne à sucre, notamment dans les États du Mato Grosso do Sul et du Goiás. Dans le Mato Grosso do Sul, c’est la région de Dourados, située au sud, qui s’est spécialisée dans la production de canne à sucre depuis une dizaine d’années. De région peuplée exclusivement par les indigènes Guarani et Kaiowá jusqu’au début du XIXème siècle, elle devient une région de colonisation agricole où se cristallisent des tensions autour de l’appropriation de la terre donnant lieu à des conflits souvent violents. L’arrivée récente du secteur sucro-énergétique dans cette région, déjà sous haute tension, tend à exacerber des conflits préexistants et à réorganiser les stratégies de revendications de la terre des différents acteurs présents dans ce territoire, à savoir, principalement les indigènes et les producteurs/propriétaires agricoles.

  • 1 Cet article est issu des travaux de recherche de doctorat, conclus en 2017, qui ont consisté à anal (...)

2Dans un premier temps, nous nous attèlerons à analyser la frontière agricole de la canne à sucre et la situation des Guarani et Kaiowá dans le Mato Grosso do Sul, afin de dresser un portrait des enjeux dans la région de Dourados1. Dans une deuxième partie, et afin de comprendre la composition de cette région et les différentes revendications territoriales qui se sont construites au fil des années, nous reviendrons sur le processus de colonisation agricole qui marque la conflictualité entre acteurs et le processus d’exclusion des populations indigènes de leur territoire. Enfin, la troisième partie abordera les conflits entre producteurs agricoles et populations indigènes autour de la revendication de la terre et l’influence de la territorialisation du secteur sucro-énergétique dans ces tensions territoriales anciennes.

La dynamique d’expansion de la canne à sucre dans une région à forte population indigène

3Depuis 2006 environ, la production de canne à sucre vient occuper des espaces jusqu’alors exempts de cette culture. Dans le Mato Grosso do Sul, la région de Dourados est une région où est présente une forte communauté indigène, qui, au gré des différentes vagues d’expansion coloniale et agricole, s’est vu confisquée ses territoires tout au long du siècle dernier. L’arrivée du secteur sucro-énergétique représente une nouvelle organisation territoriale venant exercer une pression supplémentaire dans ces territoires déjà sous l’emprise de l’agrobusiness et ainsi bousculer leurs stratégies de luttes et de revendication de la terre.

La frontière d’expansion du secteur sucro-énergétique au Brésil

4La canne à sucre s’est implantée dans un premier temps sur les côtes du nord-est brésilien au cours XVIème siècle, sous l’impulsion de l’implantation coloniale, donnant naissance au modèle agro-exportateur. La production sucrière répondait aux besoins en sucre du Vieux continent. Dans les années 1970, la culture de la canne à sucre est venue se concentrer dans le sud-est du pays, principalement dans l’État de São Paulo, via le programme ProAlcool. Le contre-choc pétrolier à la fin des années 1980 et la baisse des prix du pétrole en conséquence marquent néanmoins un frein à l’engouement pour l’éthanol.

5Au XXIème siècle, la recherche mondiale d’énergies renouvelables et le regain d’intérêts pour les matières premières agricoles expliquent le boom récent du secteur sucro-énergétique. L’État de São Paulo est encore responsable de 60% de la canne produite du pays du fait de sa concentration au siècle précédent. L’expansion sucrière se réalise dans les États voisins, en particulier, ceux du Mato Grosso do Sul et du Goiás. Leurs surfaces plantées en canne ont augmenté respectivement de 292 % et 331 % sur la période 2006-2016.

6Dans l’État du Mato Grosso do Sul cette augmentation s’est concentrée dans la portion sud. En l’espace d’une dizaine d’années, la production de canne à sucre au sein du Mato Grosso do Sul est passée de 12 011 538 tonnes en 2006 à 51 927 246 en 2016, soit une augmentation des volumes produits de plus de 300 %. En termes de surfaces, la canne à sucre est passée de 152 747 hectares en 2006 à 658 282 hectares en 2016, enregistrant ainsi une hausse de 331 %.

7La carte suivante illustre cette expansion-concentration ainsi que la localisation des usines de traitement de la canne à sucre (aussi responsables de la fabrication de sucre, d’éthanol et d’énergie électrique) dans ce que nous avons nommé de région de Dourados.

Carte : volume de canne à sucre (en tonnes) en 2016 dans les communes du Mato Grosso do Sul et localisation des usines

Carte : volume de canne à sucre (en tonnes) en 2016 dans les communes du Mato Grosso do Sul et localisation des usines
  • 2 Elle est d’ailleurs placée deuxième au rang de l’État pour l’influence qu’elle exerce et est consid (...)

8La région de Dourados correspond aux micro-régions administratives de Dourados et d’Iguatemi, englobant largement les communes se situant au sud de l’État. Ce découpage a été choisi aussi dans un souci de collecte de données censitaires dont nous faisons usage ici et également car la commune de Dourados exerce une influence sur toute la portion sud2.

9On observe une spécialisation dans les activités d’agrobusiness, comme la production de grains (soja et maïs ; La région concentre 60 % de la production de soja de l’État), dans une moindre mesure d’élevage bovin et plus récemment de canne à sucre. Dourados intègre alors ces villes de l’agrobusiness (Elias, 2006 ; 2012), dont le développement économique et l’urbanisation sont directement liés à l’agriculture globalisée (Elias et Pequeno, 2007). Dourados a été choisie pour être un des pôles de services du secteur sucro-énergétique. Cette localisation est stratégique, la ville se trouve sur l’un des axes majeurs de transport d’acheminement de produits agricoles depuis les zones de production jusqu’aux ports d’exportations, la route BR-163.

10Cette spécialisation agricole se réalise au détriment d’autres formes d’occupations et d’usage de l’espace, qui ont marqué la région par des mouvements successifs d’occupation et de colonisation. L’expansion du front agropastoral et principalement la colonisation agricole durant le XXème siècle a contribué à l’occupation des territoires indigènes et leur confiscation, au nom de l’expansion agricole et du développement économique du pays.

Les indigènes du Mato Grosso do Sul

  • 3 La Réserve de Dourados s’étend sur approximativement 3600 hectares. La densité de population au sei (...)

11Le Mato Grosso do Sul compte une part importante des indigènes du Brésil. Il est le deuxième État en termes de populations indigènes avec ses 77 025 indigènes, soit 9 % du nombre total (d’après le Recensement de 2010). Sur les 77 025 indigènes présents dans l’État en 2010, 7 216 indigènes se trouvaient au sein de la commune de Dourados et 7 263 dans la commune d’Amambai, située au Sud, première commune de l’État en population indigène. La carte suivante indique les communes où se répartissent les indigènes, une grande majorité de la population indigène réside dans la région de Dourados. Les indigènes présents dans la commune de Dourados se trouvent en grand nombre dans la Réserve Indigène de Dourados3. Créée en 1928, elle est aujourd’hui à cheval sur les communes de Dourados et d’Itaporã et compte 9 331 habitants. Il s’agit des indigènes Guarani et Kaiowá.

Carte  : démographie indigène et le secteur sucro-énergétique dans le Mato Grosso do Sul

Carte  : démographie indigène et le secteur sucro-énergétique dans le Mato Grosso do Sul

12Des conflits opposent les indigènes en lutte pour la reconquête de leurs territoires aux acteurs aux visées et intérêts divergents et se disputant un même espace. L’arrivée de la canne à sucre aggrave ces tensions. Un travail bibliographique a permis de passer en revue le processus de formation socio-spatiale et ainsi d’identifier les groupes d’acteurs présents dans cette région, qui caractérisent les enjeux d’appropriations multiples à l’origine des conflits. La relecture de la construction territoriale par les conflits, venant marquer des étapes clés du processus, met en exergue un haut degré de conflictualité socio-spatial. L’analyse plus spécifique des conflits depuis l’implantation du secteur sucro-énergétique a été faite à partir de relevés de données agricoles et foncières, de rapports spécialisés sur la question indigène ainsi que par l’intermédiaire d’un inventaire de la presse locale et nationale et enfin par l’analyse de discours des acteurs clés du processus (producteurs agricoles, organisations de représentations de l’agrobusiness, spécialiste des questions indigènes) via des entretiens semi-directifs.

Le processus de confiscation des territoires indigènes

13L’arrivée du secteur sucro-énergétique dans la région de Dourados coïncide avec une recrudescence des conflits indigènes. La lutte des indigènes pour leur territoire est cependant antérieure et l’occupation de leurs terres plus ancienne encore.

Les premiers mouvements de migrants non-indigènes

  • 4 Le Mato Grosso est divisé en deux en 1977, créant ainsi le Mato Grosso do Sul, sa partie méridional (...)

14Le peuplement par les non-indigènes de l’actuel État de Mato Grosso do Sul (à l’époque Mato Grosso4), remonte tout juste au XVIIIème siècle, quand les missions d’explorations découvrent de l’or à Cuiabá (actuelle capitale du Mato Grosso). Dans une optique et stratégie militaire, afin de se défendre face aux envahisseurs étrangers, des forts et colonies militaires sont construites. La Colonie Militaire de Dourados est ainsi créée, en 1861 (Oliveira, 1999). La constitution de ces foyers de peuplement en général interagit faiblement avec les indigènes. Peu à peu cependant, des migrants surgissent dans cette région dominée par des plaines, relativement propice à l’élevage extensif de bovins. Les forêts et le long des cours d’eau continuent dans une large mesure à abriter les Kaiowá et ne font pas l’objet d’appropriation par les nouveaux arrivants (Campestrini et Guimarães, 1991, cité dans Brand et al., 2008). Ces mouvements ne cessent d’affluer et donnent lieu à la constitution de grandes propriétés de pâtures. Le gouvernement encourage alors le peuplement « non-indigène » de cette région (Betoni, 2002). La loi sur les Terres, votée en 1850 (Lei da Terra), vient dans cette perspective instaurer la propriété privée, par l’obligation de la détention d’un titre de propriété. Le Mato Grosso commence ainsi à vendre ses terres à des tiers, qui de cette manière viennent se constituer en grands propriétaires fonciers de la région.

15La propriété privée se met en place et se consolide aux mains d’une poignée de propriétaires. C’est ce qu’il faut comprendre lorsque João Edmilson Fabrini (2008) affirme que “la terre est née concentrée” dans le Mato Grosso do Sul. Néanmoins, les éleveurs se concentrent dans les plaines et espaces généralement ouverts, alors que les Kaiowá vivent davantage en bordure des fleuves et dans les forêts aptes aux cultures (Brand et al., 2008). Avant cela, l’occupation des territoires indigènes par les non-indigènes est assez rare et relativement éparse (Pereira, 2007).

La guerre du Paraguay : point de départ de l’intensification de l’occupation des territoires indigènes

16La guerre du Paraguay, qui a confronté le Paraguay au Brésil (auquel s’allia l’Argentine et l’Uruguay) entre 1864 et 1870, a initié une occupation plus systématique des territoires Guarani et Kaiowá. La guerre a opposé le Paraguay à la triple alliance concernant un litige territorial. Le Brésil, sortant gagnant d’un des plus grands conflits entre les nations sud-américaines, obtient un large territoire correspondant à l’actuel sud du Mato Grosso do Sul. Aux termes du conflit, lors des travaux de délimitation de la nouvelle frontière, un des employés de l’entreprise remarque la forte présence d’ervais (champs de maté) et y voit une occasion de développer la production et le commerce dans une région stratégiquement située.

17La Compagnie Mate Laranjeira s’installe dans la région grâce aux terres que le gouvernement de l’État du Mato Grosso lui alloue en 1874. Quelques années plus tard, au vu des importantes recettes de l’entreprise, le gouvernement lui alloue des terres supplémentaires. La Compagnie exploite alors une vaste portion sur quasiment l’ensemble de la partie sud de l’État (voir carte page 6).

  • 5 Il s’agit d’agriculteurs qui usent et jouissent des fruits de la terre sans posséder de titre de pr (...)

18Au début du XXème, des voix s’élèvent contre le monopole foncier de l’entreprise. Passant de désaccords au sein de la classe politique à des débats plus larges dans l’opinion publique, c’est la présence d’un grand nombre de posseiros5, qui inverse la donne pour la Compagnie. L’épisode connu comme la « question du maté » est amené devant les tribunaux de l’État qui décident la fin de l’allocation de terres au profit de la Matte Laranjeira. Si le conflit remettait en question l’exclusivité foncière de la Compagnie, portant sur des arguments d’accès à la terre pour de petits producteurs, l’épisode coïncidait surtout avec les projets de l’État colonisateur.

19Dans la seconde moitié du XXème siècle, le gouvernement fédéral met en place une stratégie de développement économique basée sur l’industrialisation du pays et le contrôle territorial. Le gouvernement Vargas, dans le cadre de « Estado Novo » (1937-1945) instaure des projets de colonisation visant à donner accès à la propriété à de petits producteurs.

L’implantation de la Colonie Agricole Nationale de Dourados (CAND) en territoire indigène

20Le projet de colonisation et la distribution de terres s’est fait connaître dans le pays et a conduit à une arrivée massive de colons dans la région. Des conflits ont commencé à apparaitre entre ceux-ci et les indigènes. Le gouvernement fédéral, par l’intermédiaire du Service de Protection de l’Indien (SPI), a décidé alors de regrouper les indigènes au sein de réserves, afin de libérer de l’espace pour les colons. Entre 1915 et 1928, huit réserves ont été créées pour y regrouper l’ensemble des indigènes présents sur le territoire. La carte ci-dessous donne une idée du territoire occupé initialement par les indigènes et par la suite les réserves dans lesquels ils ont été regroupés. Cette politique de contention des indigènes dans des réserves a été la « formule magique » que le gouvernement a choisie pour créer des espaces vides (Brand et al., 2008).

Carte  : superposition des projets territoriaux dans la région de Dourados au cours du XXème siècle

Carte  : superposition des projets territoriaux dans la région de Dourados au cours du XXème siècle
  • 6 Le processus colonisateur donne lieu à une intensification des conflits inter-ethniques entre les d (...)

21Ces réserves sont des « zones de confinement des indigènes », du fait qu’ils sont forcés à se regrouper dans des espaces étriqués (Brand et al., 2008). Ce processus a compromis l’économie indigène et affecté leur organisation sociale et leur relation au territoire6. La superficie totale des réserves à la fin des années 1970 est de 181 km², alors que le territoire qu’ils occupaient avant est estimé à 20 000 km² (Brand et al., 2008).

22L’installation de la CAND marque ainsi l’intensification de l’occupation des territoires Guarani et Kaiowá dans la région de Dourados. Elle amorce aussi une série de conflits entre les nouveaux propriétaires de ces terres, installés au sein du projet de la CAND, et les populations indigènes chassées de leurs terres par une occupation plus dense et la politique indigéniste de confinement. Comme l’illustre la carte ci-dessus, la CAND se localise en plein territoire des Guarani Kaiowá (Mota, 2015).

23L’enjeu de la CAND n’a pas tant consisté à l’installation de petits producteurs, mais davantage en une volonté de briser un monopole en place, lequel exerçait un pouvoir sur le territoire, qu’il a été possible de destituer par la mise en place d’une politique fédérale de colonisation. La politique de colonisation et d’occupation de ces grands espaces « vides » a eu pour objectif premier l’occupation des zones stratégiques, pour contrôler au mieux les frontières et de favoriser la diffusion du capital dans l’agriculture brésilienne (Oliveira, 1999).

La construction d’une région d’agrobusiness

24L’émergence de l’agriculture moderne à partir de la seconde moitié du XXème siècle vient à la fois exacerber le processus de confiscation des terres indigènes et marquer une rupture dans l’implantation de petits et moyens producteurs. L’introduction du soja et la diffusion du mode de production agricole à grande échelle marque la fin des aldeias-refúgio (communautés-refuges), au fond des propriétés qui permettaient aux Guarani et Kaiowá de se maintenir (Brand et al., 2008).

25Avant les années 1970, l’élevage dominait la production agricole du Mato Grosso do Sul. Le riz était cultivé à la marge pour l’ouverture de nouveaux espaces pour l’élevage. Le duo soja/blé a modifié le paysage de la région de Dourados et l’élevage a diminué au rythme de l’avancée du soja (Teixeira, 1989). Dourados a été considérée à cette époque comme une région pionnière en termes d’avancée de la frontière de l’agriculture moderne (Le Bourlegat, 2011) pilotée par les grains.

26À la même époque, et pour des raisons qui sont liées à l’alimentation animale par les grains, les complexes agroindustriels s’intensifient, la restructuration de l’aviculture est alors marquée par la dimension industrielle (Mizusaki, 2009) et par l’arrivée et la concentration productive d’entreprises et de groupes leaders agroindustriels du type Sadia, Doux, l’actuel BR-Food. Cela a pour conséquence une intensification de l’occupation de l’espace, faisant se rencontrer des acteurs aux objectifs différents voire contradictoires, se disputant l’usage et l’occupation de mêmes espaces.

Les luttes indigènes de récupération de terres

27Au moment où l’agriculture globalisée se généralise dans la région, les mouvements indigènes prennent de l’importance, voyant que leurs terres sont octroyées à l’agrobusiness et que leurs revendications restent lettre morte. Le mouvement indigène latino-américain a pris une ampleur considérable dans les années 1980. En effet, la législation brésilienne (loi 6001 de 1973) prévoyait que, dans un délai de 5 ans, toutes les terres indigènes devaient être démarquées. Cinq ans plus tard, en 1978, constatant que la loi n’est pas appliquée, et dans ce contexte international favorable, les indigènes entrent en lutte, afin de faire valoir leurs droits.

28Avec la Constitution Fédérale brésilienne de 1988 « Les Amérindiens ont obtenu un usufruit exclusif sur une portion considérable du territoire brésilien » (Le Tourneau, 2017). De cette manière, le Brésil passe d’une politique d’assimilation à la préservation des différences culturelles, qui augure une phase de reconnaissance des territoires indigènes, de « consolidation juridique » (op. cit.) ainsi que de mouvements de revendications territoriales.

29En 1989, l’Organisation Internationale du Travail (OIT) adopte la Convention 169 sur les peuples indigènes et tribaux et reconnait ainsi des sociétés indigènes par les États avec une définition de droits pour celles-ci. Cela passe par l’identification de territoires indigènes en leur garantissant la protection et l’assistance, selon la tradition, la culture et la volonté de chaque peuple. La Convention est ratifiée par le Brésil en 2004. Dans une même ligne, la Convention sur la Diversité Biologique votée en 1992 lors du Sommet de Rio est ratifiée au Brésil comme norme interne par décret, créant des moyens de protection et de reconnaissance des pratiques des populations indigènes et traditionnelles.

Changement de stratégie de lutte des indigènes sous pression sucrière

30Les luttes indigènes ont débuté dans les années 1980, mais l’implantation du secteur sucro-énergétique au début des années 2000 a été un facteur déterminant dans l’adoption d’une nouvelle stratégie de lutte pour la récupération des leurs territoires. La carte 1 présentée à la page 2permet de noter la concentration de la production de canne à sucre dans la région de Dourados. Celle-là même où se concentre la moitié de la population indigène de l’État.

  • 7 En portugais: Compromisso de Ajustamento de Conduta, aussi connu sous le nom: Termo de Ajustamento (...)

31De manière générale, depuis la fin des années 1990, les procédures de démarcation de terres ont stagné. Au début des années 2000, l’annonce de l’installation de plusieurs usines dans la région a fait prendre conscience aux indigènes qu’ils allaient être littéralement encerclés par la canne à sucre dans les espaces qu’ils habitaient et revendiquaient (entretiens, 2015), mais dont le gouvernement ne leur reconnaissait pas de droits officiels. C’est ce qui a incité aussi le Ministère Public Fédéral/Mato Grosso do Sul (MPF/MS) à proposer en 2007 la Terme d’Ajustement de Conduite (CAC7) afin de désamorcer et de résoudre le problème de la démarcation des terres.

32En signant le CAC, la Fondation Nationale de l’Indien (FUNAI) s’est engagée alors à constituer des Groupes Techniques pour l’identification et la délimitation de 39 terres d’occupation traditionnelle indigène et à la transmission de ces rapports au Ministère de la Justice, au plus tard le 19 avril 2010 (Cavalcante, 2016 ; Mota, 2015).

  • 8 Le tek en Guarani est le mode de vie et ha correspond à la spatialité et à la forme de ce mode de v (...)

33Avant le CAC notamment, le travail des anthropologues consistait à délimiter des territoires relativement restreints, sur le modèle des réserves créées par le SPI au début du XXème siècle. Leur taille correspondait à environ 3 600 hectares. Cette vision territoriale coloniale reflète une méconnaissance de la territorialité indigène (Cavalcante, 2016). En effet, le tekoha – territoire en Guarani8, n’est pas une entité cloisonnée. Il est le produit des relations sociales, résultant de l’expression de modes de vie singuliers dans l’espace en connexion avec les autres groupes et territoires (Mota, 2015). Il s’agit d’une organisation territoriale non-circonscrite à des limites rigides.

34Le CAC a encouragé les indigènes à revendiquer leur tekoha guassu, correspond au grand tekoha, plus proche de la réalité des logiques socio-spatiales des indigènes. L’expansion des champs de canne ne permettent plus aux indigènes de circuler d’un tekoha à un autre. En effet, une usine exerce en effet une pression très forte dans un rayon de 40 km environ autour d’elle. La canne à sucre après avoir été coupée doit être rapidement acheminée à l’usine pour être transformée, sous peine de perdre sa teneur en saccharose. Elle ne peut donc être stockée, et le temps de transport doit être limité. Les usines ont alors intérêt à produire autour de l’industrie. Ceci augmente la pression foncière dans un périmètre restreint, caractérisant l’appropriation de l’espace du secteur sucro-énergétique et se différenciant des autres logiques territoriales de l’agrobusiness dans la région. Concrètement, il y a aussi des cas où les usines plantent la canne à sucre en territoire indigène. Il s’agit souvent de zones en litige, qui ont été déclarées terres indigènes mais dont le processus de démarcation est ralenti par des recours judiciaires. La carte 5 illustre cette superposition spatiale d’appropriation d’un même espace par différents acteurs.

Carte  : superposition des territoires indigènes et de la canne à sucre dans la région de Dourados.

Carte  : superposition des territoires indigènes et de la canne à sucre dans la région de Dourados.

L’auto-démarcation et les « retomadas »

  • 9 «Mato Grosso do Sul não será terra de índio, diz André”, 3 août 2008, Dourados News: http://www.dou (...)
  • 10 Les étapes du processus de démarcation des terres indigènes : 1/ Identification de la Terre Indigèn (...)

35Le terme du CAC a entraîné de vives réactions politiques. En faisant référence aux nouvelles résolutions concernant le processus de démarcation des terres indigènes, le gouverneur de l’époque, André Puccinelli, déclarait par exemple que « le Mato Grosso do Sul ne sera pas une terre d’indigènes »9. Les implications politiques et les réactions des fazendeiros ont été, et le sont de nos jours, des éléments qui ont conduit au ralentissement du processus de démarcation. Ce processus est en l’occurrence ralenti au terme de la deuxième étape, juste avant que la terre soit déclarée10. En effet, à ce stade, quiconque peut contester la procédure et amener le dossier devant les tribunaux. C’est le moment où les avocats des propriétaires, contestent la terre indigène, argumentant de l’ancienneté de leurs clients sur ladite terre, suspendant le processus.

  • 11 L’occupation par les Indigènes de la Fazenda Buriti et Lindoia dans la commune de Sidrolândia en ma (...)

36La démarcation des terres indigènes peut ainsi durer des années, voire plusieurs décennies (Cavalcante, 2016) en raison des phases juridiques qui le régissent. Sa lenteur est justement l’objet d’une recrudescence des conflits dans le sud du Mato Grosso do Sul. À partir de 2008, il y a eu une augmentation des occupations de terres par les mouvements indigènes (Nardoque et Almeida, 2014). Ils s’organisent en mouvements « d’auto-démarcation » pour faire pression sur le processus de démarcation enrayé11. Ils occupent des terres déclarées, venant ainsi se confronter aux occupants actuels, de manière souvent violente. Les mouvements de retomadas sont une réaction face à la lenteur du processus de démarcation combiné à la pression nouvelle que le secteur sucro-énergétique est venu exercer sur les territoires.

37Les indigènes s’organisent au sein des acampamentos de retomada (campements de récupération) en vue de revendiquer leurs territoires traditionnels, par l’installation de campements de fortune le long des routes ou au fond des fermes. Les indigènes se retrouvent en situation de « territorialisation d’exception » pour reprendre l’expression de Marcos Mondardo (2013) du fait qu’ils sont à la fois compris dans une organisation territoriale prévue par l’État (les réserves indigènes) et leur condition de « déterritorialisés » (en campements contingents) et demeurent dans une précarité et vulnérabilité sociale sans conditions minimales pour survivre décemment puisque l’État nie leur droit au territoire.

38Les occupations de retomadas sont aussi une réponse aux problèmes sociaux que rencontrent les indigènes se trouvant dans les réserves, du fait d’une situation de confinement, en particulier celle de Dourados, qui abrite plus de 12% de la population indigène de tout l’État du Mato Grosso do Sul. D’après le Recensement démographique de 2010 la population indigène de la Réserve représente presque 4,4 % de la population de Dourados et occupe 0,8 % du territoire de la commune, dans une zone extrêmement pauvre en infrastructures de tous types (transports, santé, réseau d’eau potable, services publics, etc.).

39De plus, les indigènes sont aussi confrontés à des problèmes internes, en raison des conflits existants entre communautés et groupes ethniques qui ne parviennent pas à cohabiter en situation de confinement. Les Guarani et Kaiowá n’ont jamais été habitués à vivre les uns à côté des autres, avant même l’arrivée des populations non-indigènes (Brand et al., 2008).

Confrontations entre indigènes et producteurs agricoles

  • 12 Il s’agit d’une organisation de représentation des producteurs et locataires développant une activi (...)

40Ces mouvements d’occupation mettent le feu aux poudres dans la région. C’est au sein des syndicats ruraux locaux12 que le problème des « invasions » de terres par les indigènes sont débattus et dont partent les mobilisations de producteurs. Ceux-ci sont aussi très impliqués dans la politique locale et à l’échelle nationale on les retrouve représenté derrière la « bancada ruralista », le lobby des producteurs agricoles au sein du Congrès National. Alors lorsque quelques-uns voient des indigènes occuper « leurs » terres, c’est tout un mouvement qui, en peu de temps, organise la solidarité.

  • 13 «Une autre communauté guarani attaquée et incendiée », 22 septembre 2009, http://www.survivalfrance (...)
  • 14 En mai 2013, la question indigène refaisait la une des journaux avec la mort d’un indigène d’une vi (...)
  • 15 http://www.cimi.org.br/pub/relatorio2015/relatoriodados2015.pdf, consulté le 28 septembre 2016.

41Les mouvements de retomadas marquent l’actualité régionale et nationale voire internationale13. Les conflits sont particulièrement violents et se soldent systématiquement par des atteintes physiques entraînant souvent la mort, dans le camp indigène, que cela soit suite à une intervention policière14 ou suite à une confrontation directe des producteurs agricoles aux indigènes. 50 % des assassinats d’indigènes entre 2003 et 2014 au Brésil ont été commis dans le Mato Grosso do Sul, d’après les données du dernier rapport du Conseil Indigéniste Missionnaire (CIMI)15.

42Un producteur interrogé lors du travail de terrain justifiait cette violence ainsi : « ici, il y a beaucoup d’invasions. Par ici, on en parle beaucoup, parce que c’est une très grande injustice, les producteurs sont forcés de se défendre, c’est de la légitime défense. Même quand ils s’arment, c’est de la légitime défense car aucun producteur n’essaie de voler la terre des indigènes. Au contraire, ce sont les indiens qui veulent prendre la terre du producteur régularisé » (entretiens, 2013). Le producteur interrogé justifie le recours à la violence pour la défense de leurs territoires contre les indigènes qui tentent de reprendre leurs terres.

  • 16 « Produtores rurais e índios entram em confronto em fazenda invadida», Campo Grande News, 25 juin 2 (...)
  • 17 «Foi uma guerra, um massacre», El Pais, 5 septembre 2015, http://brasil.elpais.com/brasil/2015/09/0 (...)
  • 18 «No MS, a questao indigena é uma barril de polvora prestes a explodir” Carta Capital, 9 septembre 2 (...)

43Entre juin et août 2015, plusieurs incidents ont eu lieu entre des groupes indigènes menant des actions d’occupation et des fazendeiros tentant de reprendre le contrôle sur les fermes occupées16. Le climat était tendu au point d’être qualifié de véritable guerre, pour reprendre l’expression du journal El Pais17. Le journal Carta Capital titrait « Dans le Mato Grosso do Sul, la question indigène est un baril de poudre prêt à exploser »18 du fait de la « léthargie judiciaire » et « l’omission de l’exécutif dans la démarcation des Terres Indigènes ».

  • 19 “Ruralistas organizam hoje atos contra demarcação de terras”, 14 juin 2013, Folha de Sao Paulo, htt (...)
  • 20 Projet d’amendement constitutionnel visant à reformuler le système de démarcation des terres, en tr (...)
  • 21 Sénatrice de l’État du Tocantins puis Ministre de l’Agriculture de janvier 2015 à mai 2016.
  • 22 “Onde tem Justiça tem espaço para todos”, Fazendeiros de todo País vêm a MS reforçar protesto em No (...)

44À cette époque, la « bancada ruralista » choisie la ville de Nova Alvorada do Sul19 dans le Mato Grosso do Sul, comme démonstration de force, pour organiser une mobilisation nationale de contestation à la démarcation des terres indigènes et principalement le mode d’indemnisation aux producteurs, et ainsi, soutenir le projet d’amendement à la Constitution (PEC215)20. À l’occasion de l’événement, la Présidente de la Confédération de l’Agriculture et de l’Élevage (CNA) Katia Abreu21, leader de cette lutte contre la démarcation ces dernières années, est venue renforcer le discours en faveur de la production agricole. Des banderoles et T-shirt portaient l’inscription « où il y a une Justice, il y a de l’espace pour tout le monde »22, mot d’ordre lancé par la Fédération de l’Agriculture du Mato Grosso do Sul (FAMASUL), qui pilotait la mobilisation. L’idée est bien ici de construire une légitimité autour de la production agricole.

Figure  : mobilisation Nationale contre la démarcation des terres indigènes, à Nova Alvorada do Sul en 2013

Figure  : mobilisation Nationale contre la démarcation des terres indigènes, à Nova Alvorada do Sul en 2013

Source: http://www.diarioitapora.com.br/​fotos-de-eventos/​fotos-do-evento-onde-tem-justica-tem-espaco-para-todos, consulté le 28 septembre 2016.

Lors d’une mobilisation Nationale contre la démarcation des terres indigènes à Nova Alvorada do Sul, à gauche, des producteurs vêtus de T-shirt où il est inscrit « Où il y a une justice, il y a de l’espace pour tous ». À droite, une banderole où il est écrit « Celui qui produit mérite le respect ».

45L’idée d’une opposition entre des producteurs qui produisent et des indigènes qui ne savent pas travailler la terre se véhicule en défaveur de la démarcation. Dans cette même lignée, le journal Veja publiait un article le 13 juillet 2012 portant le titre : « Devinez quelle est la terre des indigènes ». On voit une photo aérienne avec, d’un côté, une ferme de soja : un champ lisse, continu et verdoyant ; et, de l’autre, la terre indigène Panambizinho, située dans la commune de Dourados. Le message et les données qui accompagnent l’article ont pour objectif de montrer à l’opinion publique que l’agrobusiness produit des matières premières et donc des devises pour le pays, alors que les terres indigènes ne sont pas rentables de ce point de vue et qu’il n’y a pas de nécessité d’augmenter encore la superficie de leurs territoires.

Figure  : article du journal Veja du 13 juillet 2013.

Source : http://www.noticiasagricolas.com.br/​dbarquivos/​veja-2273-indios.pdf, consulté le 28 septembre 2016.

Le magazine Veja titre cette photo aérienne « Devinez quelle est la terre des indigènes » où l’on peut distinguer à droite la terre indigène Panambizinho et à gauche un champ de soja.

46Si des producteurs se positionnent toujours contre la démarcation (certains diront contre la méthode employée pour réaliser la démarcation des terres indigènes), il semblerait néanmoins y avoir un changement dans la stratégie discursive. En 2008, nous avons cité les propos du gouverneur affirmant que « le Mato Grosso do Sul ne sera pas une terre d’indigènes ». Aujourd’hui, le discours est plus « policé » : « il y a de l’espace pour tout le monde ». Derrière ces propos modérés, les entretiens, entre autres, révèlent des enjeux profonds concernant des projets territoriaux bien distincts. Le président de l’Association des Producteurs de Bioénergie du Mato Grosso do Sul (BIOSUL) explique ainsi en parlant de la question indigène :

47“Il y a des gens qui aiment mettre de l’huile sur le feu… Ces gens-là considèrent comme recevables les témoignages oraux. Si un indigène arrive dans une propriété et dit “cet arbre appartenait à mon grand-père”, ça suffit pour exproprier 1000 hectares. C’est une discussion qui remonte à 300 ans ; depuis les gens ont des titres de propriété, ceux qui sont sur ces terres ne sont pas en situation d’illégalité » (président de la Biosul, entretien, 2015).

  • 23 Le Ministre proposait notamment la mise en place de réunions de négociations entre les propriétaire (...)

48Cet extrait indique qu’il y a vraisemblablement des mondes, des systèmes de valeur et de représentation de l’espace et, donc, des référentiels qui, non seulement ne se comprennent pas, mais sont également contradictoires et incompatibles dans l’espace. Il n’y a d’ailleurs pas de débat à proprement dit. Il y a deux groupes qui s’opposent verbalement et physiquement tentant de justifier leur légitimité dans l’espace, l’un, au motif de son antériorité et l’autre, par sa contribution économique et sa fonction productive. Des initiatives politiques ont eu lieu pour tenter de trouver une issue au conflit23.

49La production est une manière, pour les opposants à la démarcation de justifier leur place. Il est difficile d’aller à l’encontre d’arguments comme le respect des peuples indigènes prévu par la Constitution. La contribution de l’agrobusiness à l’économie de marché serait, en ce sens, le régime de justification du monde agricole dans le conflit qui les oppose aux indigènes.

50Les mouvements indigènes ont organisé eux aussi une campagne visant à sensibiliser le public sur les conséquences de l’agrobusiness pour leur peuple. Cette campagne a pris une échelle nationale et internationale, relayée par des associations et organisations non gouvernementales.

  • 24 « Asie : la viande du Mato Grosso do Sul a le sang de leaders indigènes : USA: le biodiesel du Mato (...)

Figure  : affiche de la campagne de boycott des produits de l’agrobusiness brésilien en 201524

Source: http://www.global.org.br/​blog/​por-que-pedimos-o-boicote-ao-agronegocio-do-mato-grosso-do-sul/​.

Les affiches de la campagne lancée à l’échelle internationale en faveur de la démarcation des terres indigènes dans le Mato Grosso do Sul interpelle l’Asie « La viande du Mato Grosso do Sul a le sang de leaders indigènes », les USA « Le biodiesel du Mato Grosso do Sul a le sang de leaders indigènes », l’Europe « Le sucre du Mato Grosso do Sul a le sang d’enfants indigènes » et « Le soja du Mato Grosso do Sul a le sang d’enfants Guarani ».

  • 25 http://www.douradosagora.com.br/brasil-mundo/rural/campanha-esdruxula-causa-desconforto-na-assemble (...)

51Elle a entraîné des réactions en chaîne dans la classe politique sul-matogrossense (du Mato Grosso do Sul), mettant en avant les risques qu’elle faisait courir à l’économie si les pays importateurs prenaient la décision de ne plus acheter les produits de l’agrobusiness25. Préoccupés par les répercussions de cette campagne sur leur image renvoyée aux investisseurs, les producteurs modifient ainsi leurs stratégies de légitimation afin de justifier de demeurer sur leurs terres.

Conclusion

52La canne à sucre est venue exercer une pression sur les terres et une reformulation des stratégies de luttes indigènes, en revendiquant des territoires plus amples, le tekoha guasu, en raison de la perspective de l’arrivée des usines. Les conflits entre indigènes et producteurs sont anciens mais l’arrivée des usines dans ces mêmes espaces engendre une pression supplémentaire et ainsi la mise en place de nouvelles stratégies de revendications territoriales par les différents groupes afin de légitimer leurs positions. L’arrivée de la canne serait en ce sens un facteur de complexification des relations socio-spatiales.

53Ces luttes de légitimité territoriale donnent lieu à des conflits particulièrement violents et qui se soldent rarement par une solution pérenne en termes de partage de l’espace. Une résolution semble difficilement envisageable et la violence à laquelle ces acteurs se livrent démontre chaque fois plus leur détermination et intransigeance quant à leurs revendications. L’État, qui serait l’acteur à même de proposer une résolution, est pris en étau entre, d’une part, une Constitution qui reconnaît des droits aux indigènes et, d’autre part, ses aspirations économiques, dont la conséquence principale est la mise en culture de nouvelles terres sur les territoires des populations traditionnelles.

54Les conflits révèlent des enjeux en termes de pérennité d’un modèle de production qui a tendance à aliéner le territoire (Santos, 2000b) aux objectifs de marché. L’agriculture brésilienne est en ce sens renommée pour sa capacité à se transformer et se renouveler au rythme des possibilités de marché, mais pas toujours au profit des territoires locaux et de ses populations traditionnelles.

55Institutions commanditaires : Université Paris VIII Vincennes-Saint-Denis; Ecole Doctorale Sciences Sociales (ED401); Laboratoire Dynamiques Sociales et Recomposition des Espaces (LADYSS)

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Notes

1 Cet article est issu des travaux de recherche de doctorat, conclus en 2017, qui ont consisté à analyser l’expansion de la production de canne à sucre à la lumière des différents conflits déclenchés dans les territoires de frontière récente du secteur sucro-énergétique, et plus particulièrement dans la région de Dourados située au sud du Mato Grosso do Sul.

2 Elle est d’ailleurs placée deuxième au rang de l’État pour l’influence qu’elle exerce et est considérée capitale régionale par une étude réalisée par l’Institut Brésilien de Géographie et Statistiques, publiée en 2007, consacrée à la hiérarchisation des centres urbains et à leurs aires d’influences.

3 La Réserve de Dourados s’étend sur approximativement 3600 hectares. La densité de population au sein de la Réserve s’élève à 207 habitants/km2, 40 hab/km dans la commune de Dourados et à 95 hab/km2 à Campo Grande (capitale de l’État de Mato Grosso do Sul). On remarque une concentration particulièrement importante de la population indigène dans la Réserve de Dourados.

4 Le Mato Grosso est divisé en deux en 1977, créant ainsi le Mato Grosso do Sul, sa partie méridionale.

5 Il s’agit d’agriculteurs qui usent et jouissent des fruits de la terre sans posséder de titre de propriété, sans situation « légale » du point de vue de la législation foncière. Dans ce cas précis, ils travaillent pour le compte de la Matte Laranjeira, en échange celle-ci les autorisent à habiter un lopin de terre qu’ils cultivent à des fins vivrières.

6 Le processus colonisateur donne lieu à une intensification des conflits inter-ethniques entre les différents peuples indigènes présents dans cette même région. Les relations sociales, qui définissent une certaine organisation territoriale, sont basées sur des jeux d’alliances et de conflits entre les différents groupes et au sein d’une même famille. Le tekoha guasu, territoire ample, est d’ailleurs marqué par des relations tendues avec les autres peuples indigènes Guaicuru, Terena, etc. (autres grandes ethnies indigènes). De la même manière entre les Guarani et Kaiowá, les relations - et donc le tekoha - s’établissent par la constante négociation, oscillant entre hostilité et alliance (Mota, 2015).

7 En portugais: Compromisso de Ajustamento de Conduta, aussi connu sous le nom: Termo de Ajustamento de Conduta.

8 Le tek en Guarani est le mode de vie et ha correspond à la spatialité et à la forme de ce mode de vie.

9 «Mato Grosso do Sul não será terra de índio, diz André”, 3 août 2008, Dourados News: http://www.douradosagora.com.br/noticias/dourados/mato-grosso-do-sul-nao-sera-terra-de-indio-diz-andre , consulté le 28 septembre 2016.

10 Les étapes du processus de démarcation des terres indigènes : 1/ Identification de la Terre Indigène, à partir d’un rapport réalisé par un Groupe de Travail constitué d’universitaires et, souvent, d’anthropologues. 2/ Délimitation de la Terre, responsabilité du Ministère de la Justice. 3/ Déclaration de la Terre Indigène et donc reconnue comme territoire traditionnel, à usage exclusivement indigène. Une fois la Terre Indigène déclarée, le titre de propriété est considéré nul, l’ancien propriétaire perd ainsi ses droits sur la terre et peut en contrepartie de percevoir une indemnité. 4/ Homologation par décret de la Présidence de la République. La régularisation par enregistrement au cadastre est la dernière étape du processus de démarcation. Source : FUNAI, consulté le 27 mai 2016 : http://www.funai.gov.br/index.php/2014-02-07-13-24-53.

11 L’occupation par les Indigènes de la Fazenda Buriti et Lindoia dans la commune de Sidrolândia en mai 2013 marque le début de mouvement d’auto-démarcation organisé par les indigènes. En 2001, la terre est identifiée. En 2004, le Ministère de la Justice attribue la terre aux producteurs ruraux. Après plusieurs recours contestant la décision, la terre est finalement attribuée aux indigènes. Des recours ont lieu au cours des autres étapes. Presque 10 ans plus tard, l’identification de la Terre Indigène, en 2013, les indigènes décident d’occuper la fazenda. L’occupation tourne en confrontation et un indigène est tué. La situation demeure irrésolue.

12 Il s’agit d’une organisation de représentation des producteurs et locataires développant une activité agricole sur une surface inférieure ou égale à deux módulos rurais. Ces módulos rurais sont une mesure en hectares qui correspond à la surface minimum mise en valeur directement par une famille permettant à celle-ci de vivre convenablement de la production sur la propriété et d’assurer le développement économique et social. Cette mesure varie en fonction des États et au sein de chaque commune, en fonction, entre autres, de sa localisation géographique, de la qualité de ses terres, etc. Dans la région de Dourados, un módulo rural équivaut à environ 30 hectares. Les producteurs associés au syndicat rural exploitent des terres supérieures ou égales à 60 hectares en moyenne. Source : http://www.incra.gov.br, consulté le 26 octobre 2016. Le syndicat rural représente de manière générale l’aile conservatrice des producteurs agricoles.

13 «Une autre communauté guarani attaquée et incendiée », 22 septembre 2009, http://www.survivalfrance.org/actu/4961, consulté le 28 septembre 2016 ; « Brésil : l’expulsion et le démantèlement d’une communauté guarani soulève l’indignation », 8 Juillet 2016, http://www.survivalfrance.org/actu/11358, consulté le 28 septembre 2016.

14 En mai 2013, la question indigène refaisait la une des journaux avec la mort d’un indigène d’une vingtaine d’années suite à une intervention policière87 dans une ferme occupée. Les indigènes occupaient la ferme Buriti, propriété d’un ex-député de l’État et grand éleveur bovin de la région, dans la commune de Sidrolândia, à environ 70 kilomètres de Campo Grande. La terre revendiquée avait été reconnue Terre Indigène depuis 2001 et déclarée [Terre indigène] par la Justice en 2010. Les recours à la décision de la part des fazendeiros ont enrayé le processus et, le 15 mai 2013, les indigènes ont pris l’initiative de réoccuper leur territoire. Le même jour, la justice ordonnait la désoccupation et l’intervention des forces de police afin de garantir l’exécution de la décision. Le 30 mai, au cours de l’intervention policière, un indigène d’une vingtaine d’années est décédé. La nouvelle est relayée par plusieurs journaux88 et a contribué à activer le débat sur la démarcation des terres indigènes à l’échelle nationale.

15 http://www.cimi.org.br/pub/relatorio2015/relatoriodados2015.pdf, consulté le 28 septembre 2016.

16 « Produtores rurais e índios entram em confronto em fazenda invadida», Campo Grande News, 25 juin 2015, http://www.campograndenews.com.br/cidades/interior/produtores-rurais-e-indios-entram-em-confronto-em-fazenda-invadida, consulté le 28 septembre 2016.

17 «Foi uma guerra, um massacre», El Pais, 5 septembre 2015, http://brasil.elpais.com/brasil/2015/09/05/politica/1441467261_989526.html, consulté le 28 septembre 2016.

18 «No MS, a questao indigena é uma barril de polvora prestes a explodir” Carta Capital, 9 septembre 2015, http://www.cartacapital.com.br/sociedade/questao-indigena-um-barril-de-polvora-no-mato-grosso-do-sul-479.html, consulté le 28 septembre 2016.

19 “Ruralistas organizam hoje atos contra demarcação de terras”, 14 juin 2013, Folha de Sao Paulo, http://www1.folha.uol.com.br/poder/2013/06/1294823-ruralistas-organizam-hoje-atos-contra-demarcacao-de-terras.shtml, consulté le 28 septembre 2016.

20 Projet d’amendement constitutionnel visant à reformuler le système de démarcation des terres, en transférant ce pouvoir au Congrès National (où le lobby des producteurs est majoritaire) au détriment du système actuel où la décision finale revient à la Présidence de la République.

21 Sénatrice de l’État du Tocantins puis Ministre de l’Agriculture de janvier 2015 à mai 2016.

22 “Onde tem Justiça tem espaço para todos”, Fazendeiros de todo País vêm a MS reforçar protesto em Nova Alvorada, Campo Grande News, 14 juin 2013, http://www.campograndenews.com.br/cidades/interior/fazendeiros-de-todo-pais-vem-a-ms-reforcar-protesto-em-nova-alvorada, consulté le 28 septembre 2016.

23 Le Ministre proposait notamment la mise en place de réunions de négociations entre les propriétaires agricoles des terres occupées et les populations indigènes occupantes, la réalisation de réunions d’urgences concernant les propriétés sous intervention policière pour la réintégration des producteurs, ainsi que l’organisation de réunions pour entendre les revendications des communautés indigènes. Les participants ont jugé que ces propositions ne venaient pas présenter de solutions pour les uns et les autres.

24 « Asie : la viande du Mato Grosso do Sul a le sang de leaders indigènes : USA: le biodiesel du Mato Grosso do Sul a le sang des leaders indigènes; Europe: la canne à sucre du Mato Grosso do Sul a le sang des enfants indigènes; Ne pas acheter ! Ne pas manger ! »

25 http://www.douradosagora.com.br/brasil-mundo/rural/campanha-esdruxula-causa-desconforto-na-assembleia, consulté le 28 septembre 2016.

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Table des illustrations

Titre Carte : volume de canne à sucre (en tonnes) en 2016 dans les communes du Mato Grosso do Sul et localisation des usines
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 256k
Titre Carte  : démographie indigène et le secteur sucro-énergétique dans le Mato Grosso do Sul
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 316k
Titre Carte  : superposition des projets territoriaux dans la région de Dourados au cours du XXème siècle
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 184k
Titre Carte  : superposition des territoires indigènes et de la canne à sucre dans la région de Dourados.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 356k
Titre Figure  : mobilisation Nationale contre la démarcation des terres indigènes, à Nova Alvorada do Sul en 2013
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-5.png
Fichier image/png, 169k
Crédits Source: http://www.diarioitapora.com.br/​fotos-de-eventos/​fotos-do-evento-onde-tem-justica-tem-espaco-para-todos, consulté le 28 septembre 2016.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-6.png
Fichier image/png, 161k
Crédits Source : http://www.noticiasagricolas.com.br/​dbarquivos/​veja-2273-indios.pdf, consulté le 28 septembre 2016.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-8.png
Fichier image/png, 378k
Crédits Source: http://www.global.org.br/​blog/​por-que-pedimos-o-boicote-ao-agronegocio-do-mato-grosso-do-sul/​.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/22192/img-10.png
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Pour citer cet article

Référence électronique

Marine Dubos-Raoul, « L’expansion du secteur sucro-énergétique en territoires indigènes dans le sud du Mato Grosso do Sul-Brésil. »Confins [En ligne], 41 | 2019, mis en ligne le 26 septembre 2019, consulté le 01 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/22192 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/confins.22192

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Auteur

Marine Dubos-Raoul

Pos-doctorante depuis juillet 2018 au sein du Programa de Pós-graduação em Geografia da Universidade Federal de Mato Grosso do Sul – Campus Três Lagoas (PPGGEO/UFMS/CPTL).marine.raoul@gmail.com

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Droits d’auteur

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