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Capitalisme vert: Les populations locales sur les marchés mondiaux

Capitalismo verde: populações locais sobre os mercados mundiais
Green capitalisme: local populations and the mondials markets
Magda dos Santos Ribeiro

Résumés

Cet article vise à décrire et à réfléchir aux récents accords signés entre les peuples amazoniens et les grandes entreprises brésiliennes et transnationales. Pour cela, le texte s'appuie sur deux sources distinctes: a) les descriptions ethnographiques, documents et articles publiés par des chercheurs brésiliens, et b) le travail sur le terrain dans la communauté São Francisco do Iratapuru, située dans l'état d'Amapá, dans l'Amazonie brésilienne, avec ses habitants castanheiros, qui ont depuis plus de 10 ans des accords commerciaux avec la plus grande entreprise de cosmétiques au Brésil, Natura S/A. L'article met l'accent sur le fait qu'une telle relation ne peut pas être comprise par la seule critique de l'avancement du modèle capitaliste d'échange et d'exploitation, mais doit tenir compte d'autres aspects tout aussi importants. L'incorporation de l'altérité amazonienne et l'imaginaire de la durabilité deviennent des éléments essentiels dans la production de valeur pour le soi-disant capitalisme vert.

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Texte intégral

1Cet article propose de présenter et de discuter des accords récents signés par les populations amazoniennes et les entreprises brésiliennes et transnationales. Dans ce but, le texte repose sur deux sources distinctes et complémentaires. D'une part, il utilise des descriptions ethnographiques, bibliographiques et documentaires de chercheurs brésiliens, qui ont étudié les relations entre les différentes entreprises et les populations locales. D'autre part, l'article décrit et analyse les données collectées dans la Communauté São Francisco do Iratapuru, situées à la frontière des États du Pará et d'Amapá, dans l'est de l'Amazonie, pendant les années 2011 et 2014. La population de collecteurs de noix du Brésil (castanheiros) du fleuve Iratapuru ont, depuis plus de 10 ans, des accords commerciaux avec Natura, la plus grande entreprise de cosmétiques au Brésil.

2L'article soutient que les relations entre les entreprises et les populations amazoniennes ne peuvent pas être comprises en considérant seulement l'expansion du modèle capitaliste d'échange et d'exploitation. Dans ces négociations, des aspects divers et différents sont en jeux, parmi lesquels l'incorporation de l'altérité et de la subjectivité amazoniennes apparaît comme un élément central. Dans les réunions et les négociations entre les entreprises et les populations locales on peut voir les différentes positions à partir desquelles elles formulent et mettent en œuvre leurs actions. Si, d'une part, les populations amazoniennes cherchent dans ces accords un moyen de résoudre des questions objectives, telles que l'augmentation de leurs sources de revenus, la résolution de problèmes immédiats ou l'accès à certains biens de consommation, les entreprises cherchent à mobiliser l´imaginaire subjectif qui transforme la nature et l'altérité en rentabilité matérielle par le biais de sa valorisation commerciale. Cette production de valeur s'aligne sur la notion ambiguë de développement durable et permet plus largement ce que nous appelons le capitalisme vert.

3Le déroulement de l'article prend donc comme point de départ une discussion autour de la notion de capitalisme vert, en particulier de l'approche commerciale des peuples autochtones et traditionnels. Le texte examine, aux deuxième et troisième sessions, un ensemble de cas ethnographiques sur les dilemmes et les problèmes qui impliquent des accords commerciaux entre les entreprises et les peuples amazoniens. Au cours de la dernière session, la description se concentre sur une expérience particulière, fruit d'une ethnographie réalisée dans la communauté de São Francisco do Iratapuru entre 2011 et 2014. L'article décrit donc certains aspects pertinents de la rencontre et des dilemmes de négociation entre les castanheiros qui vivent autour de la Réserve de Développement Durable du fleuve Iratapuru et la plus grande entreprise de cosmétiques au Brésil, Natura. Cette entreprise transnationale entretient depuis plus de 10 ans des relations avec cette population locale.

4Si l'on considère d'une part que la vente de l'huile de noix du Brésil est l'objet central de cet accord, nous verrons dans cet article que les relations subjectives qui transforment les peuples amazoniens en marchandises - et pas seulement les matières premières de la biodiversité brésilienne extraites par eux - sont considérées comme un élément central par les entreprises pour mettre en mouvement ce que nous appelons le capitalisme vert. L'objectif principal de ce texte est donc d'offrir une analyse des relations récentes entre les peuples amazoniens et les entreprises mondiales, en insistant sur l'incorporation subjective de l'altérité amazonienne comme un moyen d'attribuer de la valeur à la marchandise.

Le Capitalisme Vert

5Depuis la fin des années 80, nous avons donné plus d'attention à un mode de gouvernance qui a fait ses preuves en tant qu´un des moyens les plus puissants pour l´exercice du pouvoir de notre temps, les entreprises. L'argent, les marchés et le capital jouent un rôle clé dans le monde d'aujourd'hui. Cependant, le manque d'attention à la gouvernance d'entreprise et la manière dont elle façonne le monde dans sa quête de profits, de croissance et de légitimité ont été symptomatiques. Nous proposons dans ce texte d´examiner la question de l´exercice du pouvoir des entreprises et en particulier les réponses apportées par le monde de l'entreprise face aux dommages environnementaux causés par son activité (Kirsh, 2014).

6Les problèmes soulevés par la crise de l'environnement ont reconfiguré des stratégies commerciales de nombreuses entreprises depuis la fin des années 80, quand la préoccupation de proposer des produits plus respectueux de l'environnement s'est imposée de manière catégorique. Dès lors, les entreprises ont commencé à envisager dans le cadre des partenariats avec des populations amazoniennes la possibilité de mettre en place de nouvelles stratégies qui incluent le changement des pratiques commerciales et de création de nouveaux produits, avec l'intention d'offrir des solutions aux problèmes soulevés par l'environnementalisme tout en valorisant leurs biens de consommation.

  • 1

7Dans ce contexte, différents cadres nationaux et internationaux cherchent à déterminer les paramètres de cette rencontre pour établir les bases réglementaires pour les contrats commerciaux entre des entreprises et les peuples de l'Amazonie (Soares, 2010; Coelho de Souza et Lima, 2010). L'une des plus importantes a été la CDB - Convention sur la diversité biologique, signée en 1992. Ayant pour vocation à la fois de réglementer l'accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées, ainsi que le partage des avantages découlant de leur utilisation, la création du CGEN – Conseil de gestion de patrimoine génétique – la principale agence brésilienne d'approbation de ces contrats, constituait une orientation très judicieuse dans le contexte brésilien1.

8Toutefois la vente de produits qui annoncent le respect de la nature et de l'environnement et la logique du Capitalisme vert impliquent un mouvement beaucoup plus large. Le terme caractérise la nouvelle période économique dans laquelle nous serions entrés du fait de la raréfaction des ressources naturelles (Combes, 2010). Kay Milton (1993) propose d'examiner les liens entre l'écologie et l'anthropologie et, surtout, comment la perspective anthropologique peut comprendre l'idée de l'écologie comme un engagement social qui a commencé à faire partie des conventions occidentales depuis les années 60. L'auteur soutient que l'anthropologie doit faire partie des discussions sur l'écologie, soit par le biais de participation directe dans l'établissement de lignes directrices pour les causes environnementales, soit pour fournir une analyse critique qui vise à comprendre ce mouvement comme un phénomène social. De cette façon, la rhétorique de l'environnementaliste se configure non seulement comme un type de communication qui traite de l'environnement et de ses problèmes, mais se présente plutôt comme un processus dont la compréhension de l'environnement est faite.

9Comme le démontre Tim Ingold (1993), le langage contemporain de l'écologisme pense le monde d'une manière totalisante via l'image d'un globe. Cette image est réductrice car elle ne tient pas compte des autres façons de vivre et de penser l'environnement. En d'autres termes, ce que nous appelons mondial (ou la mondialisation) peut nous dire quelque chose d'important sur la conception moderne de l'environnement. Loin de faire des références à l'environnement dans lequel nous habitons, cette conception se rapporte à l'environnement que nous nous représentons. En bref, l'auteur suggère que l'idée de l'environnement mondial, contrairement à la réintégration de l'humanité avec le monde montre l'aboutissement d'un processus de séparation. Ainsi, l'idée de penser le monde comme un globe contraste fortement avec l'idée de penser qu'il s'agit d'un espace de vie.

10Cependant, l'image du monde totalisante et à risque a produit un fort écho dans le contexte des affaires. Richard Smith (2015) a soutenu que, bien que les économistes aient rejeté l'anti-croissance, la perspective de croissance posée par le capitalisme vert est truffée de problèmes. Pour cet auteur, le projet plus vaste de capitalisme durable est en soi insoutenable. Précisément parce qu´assurer le maintien des ressources de la planète tout en visant à maximiser la rentabilité sont des cibles peu compatibles.

11Néanmoins, ce n'est pas une analyse abstraite de cette incompatibilité. Dans ce texte, nous proposons d'examiner en détail certaines de ces circonstances, en montrant concrètement les problèmes que posent les stratégies commerciales consistant à créer des produits écologiquement durables, en particulier en établissant des alliances avec les peuples amazoniens.

12Il convient de mentionner que la notion de capitalisme vert est également liée à l'idée que les ressources naturelles sont économiquement mesurables en termes de valeur. Les racines de ce que nous pourrions appeler l'éco-capitalisme sont dans la tragédie des communes (Garrett Hardin, 1968). L'essai a présenté un argument qui a ensuite été repris par l'intersection entre le capitalisme et l'environnement: l'idée que les problèmes environnementaux seraient techniquement résolus par la prise de conscience du marché néolibéral. Ainsi, l'idée plus large que le capitalisme pourrait être vert, a été constituée pour satisfaire deux demandes: 1) le désir de génération de profit dans les affaires dans une société capitaliste; 2) l'urgence des actions pratiques liées à l'impact environnemental sur les sociétés consommatrices de biens. Dans cette tendance, le monde de l'entreprise devrait s'engager dans la protection de l'environnement (Smith, 2015).

13En termes conceptuels, la notion de capitalisme vert associe deux notions antagonistes. La priorité de la santé environnementale alliée à la préservation de la biodiversité sociale avec la promotion du capitalisme, la croissance économique et l'accumulation. Il arrive cependant que les stratégies commerciales cherchent des alternatives pour faire face à ce modèle antagoniste. Ce texte aborde ces stratégies, notamment à travers la rencontre entre les entreprises privées et les peuples amazoniens.

14Face aux dilemmes environnementaux, les entreprises se sentent obligées d'agir et d'intervenir. Cette perception a guidé des stratégies d'affaires contemporaines s´intéressant à offrir des produits écologiquement durables. Autrement dit, la crise environnementale non seulement lance un nouveau dilemme pour la culture de marché néolibérale, mais surtout offre une vision du monde particulière. C'est précisément sur ce point de vue que les entreprises peuvent penser un monde sans frontières pour l'extension de leurs activités.

15Je présente et discute dans la section suivante quelques dilemmes découlant du rapprochement entre les entreprises et les populations amazoniennes, cherchant à exposer les aspects pertinents de cette rencontre ainsi que les problèmes qui la caractérisent. Ce cours est basé sur la collecte et l'analyse de documents ethnographiques et bibliographiques, qui traitent de la relation de partenariat entre les entreprises mondiales et les populations locales.

Un monde sans frontières

16Au début des années 1990 au Brésil, une entreprise transnationale britannique du secteur des cosmétiques a été responsable du premier partenariat consistant entre une population amazonienne et une entreprise privée, engendrant un grand impact médiatique de sa stratégie. La promotion élaborée par l'entreprise, intitulé Trade, not Aid, expose l'idéologie développementaliste qui a marqué l'activité dans cette époque, en disant: «The Body Shop estime que le commerce plutôt que l'aide, offre une solution positive à la situation économique difficile dans le monde en développement» (Clay, 2002). L'entreprise a proclamé donc un idéal qui estime que les pays sous-développés doivent travailler comme des partenaires d'affaires des pays les plus développés. Autrement dit, les pays considérés comme pauvres ont besoin de subventions pour se développer par eux-mêmes et non de l'aide désintéressée qui les maintiennent dans une position d'infériorité.

  • 2 Les graines de l'Amazonie ont été amenées par les Britanniques en Malaisie, Ceylan et l'Afrique pou (...)

17The Body Shop a commencé sa relation avec une partie de la population indigène Kayapó (Kayapó A'ukre) en 1990 par des accords commerciaux prévoyant l'achat de l'huile de noix du Brésil. Dans ce contexte, la noix du Brésil a attiré l'attention en raison de son authenticité et originalité. Contrairement à d'autres plantes, la noix du Brésil ne peut pas être replantée et cultivée d'une manière contrôlée, il serait difficile de l´implanter en d'autres endroits dans le monde - comme cela s'est produit avec le caoutchouc (seringa)2 - donc, la noix apparaît comme un ingrédient plutôt intéressant pour les entreprises, soit en raison de ses fonctions multiples organoleptiques, soit en raison de sa grande exploitabilité en termes d'image.

18De nombreuses critiques ont été dirigées contre l'accord entre The Body Shop et Kayapó, et même si c'était un cas controversé et largement discuté dans les milieux académiques (Kaplan, 1995 ; Posey, 1990, 1992 ; Morsello, 2006 ; Ribeiro, 2006, 2009; Turner, 1998), il continue à être traité par les entreprises comme un exemple classique de réussite. En conséquence, plusieurs autres entreprises se sont intéressées à la possibilité d'utiliser des matériaux obtenus directement auprès des populations amazoniennes et, plus particulièrement aux avantages de l'exploitation de cette stratégie en termes de marketing.

19En 1993, un autre accord a été formalisé dans l'État brésilien de l'Acre entre l'entreprise nord-américaine Aveda Corporation et la population indigène Yawanawa (Nahoum, 2016). La compagnie a versé plus de cinquante mille dollars pour la plantation du « rocou », plus tard acheté et utilisé comme un colorant naturel dans leur maquillage. L'entreprise Aveda a envisagé d'utiliser l'image de Yawanawa comme retour évident aux investissements réalisé, sans consulter la population indigène sur l'utilisation de ces images. La population, à son tour, a changé ses activités quotidiennes pour prendre soin de la plantation, considérant qu'ils seraient récompensés par cette tâche, en plus de l'investissement initial qu'ils avaient reçu (Waddington, 2002).

  • 3 Clay (2002) discute les relations entre les entreprises et les communautés, en plus, il travaille c (...)

20Jason Clay (2002)3, entrepreneur en faveur des relations entre les entreprises et les peuples de la forêt, a été l'un des personnages les plus connus du mouvement qui prend en charge ce type d'accord commercial. Son approche, vivement critiquée par Turner (1998), se concentre sur un libéralisme de marché avec des activités pour la défense de l'environnement et la survie des cultures autochtones et des peuples de la forêt. Son principal argument concerne la viabilité des écosystèmes forestiers comme économiquement productive, en favorisant la participation des habitants des forêts à la logique productive. Clay (2002) soutient que c'est le seul moyen réaliste de sauver ces populations d'une économie caractérisée par la destruction, historiquement favorisée par des exploitants forestiers. Ainsi, à son avis, c'est aussi un moyen de faire de l'écosystème une source de revenu qui permettrait à ces populations se libérer de l'aide venue de l’État.

  • 4 Considérant par conséquent, que tout le monde a quelque chose à vendre. Dans le livre, elle fait un (...)

21Le contexte dans lequel ce mouvement est fondé est une image générique d'un monde sans frontières. C'était l'une des principales ambitions de la fondatrice de la société The Body Shop. Selon lequel, les entreprises audacieuses ont besoin «d'aller aux petites villes du Mexique, du Guatemala et du Népal et voir ce qu'ils ont sur le marché»4. L'idée d'un monde sans frontières est exprimée dans l'articulation d'un nouvel ordre économique. Pour les entrepreneurs inspirés par le Body Shop, cela signifie la liberté d'imaginer des connexions d'affaires partout sur la planète, puis la prolifération des zones de libre-échange sans médiateurs en vertu de la prérogative du commerce équitable. Le monde sans frontières est alors un monde complètement accessible aux partenariats d'affaires, un monde où il n'existe qu'une seule rationalité: la rationalité économique. C'est à partir de cette logique de pensée et d'action que les entreprises vont à la recherche de nouveaux partenaires à l'intérieur de la forêt amazonienne.

22C'est pourquoi, les relations entre les entreprises et les peuples de la forêt doivent être comprises comme un arrangement complexe, dont la force est dans la capacité à mettre en évidence différents ordres d'action et de pensée. Les plus fréquents problèmes dans ces accords commerciaux se retrouvent précisément dans la manière dont l'un traite l'autre. Selon Clay « presque toutes les communautés amazoniennes rêvent d'avoir un partenaire international pour les aider à financer un projet ». La déclaration suppose que les communautés amazoniennes vivent, ainsi que les entreprises, dans la perspective de « faire des affaires », ensuite parce qu'il ne pouvait pas être plus explicite en attribuant à l'autre sa propre logique. Les attentes des entreprises pour obtenir de bons partenaires et les attentes des peuples de la forêt à la recherche d'autres sources de revenus ou avantages qui amélioreront leurs conditions de vie apparaissent en décalage.

23Les entreprises se plaignent de « toute sorte de subventions et des annulations de dettes qui ont été apportées à certains indigènes, qui confondent les relations d'affaires avec les relations personnelles et ne voient pas la différence entre l'investissement et les dons. » (Clay, 2002). D'autre part, les populations amazoniennes se sentent généralement très motivées avec la possibilité d'établir des accords commerciaux avec les grandes entreprises, ce qui ne signifie pas que les attentes suscitées sont pleinement satisfaites. Le paradoxe - entre les entreprises et les populations amazoniennes - subsiste dans la recherche d'exotisme attribuée aux populations amazoniennes. Toutefois, les entreprises se plaignent souvent de «manque de professionnalisme» des peuples d'Amazonie. Il serait vraiment intéressant pour les entreprises, si ces populations se comportaient comme de véritables partenaires d'affaires, partageant les mêmes valeurs commerciales de l'entreprise?

Les limites du partenariat

  • 5 Plusieurs autres aspects sont problématisés par l'anthropologue Coelho de Souza, tels que les relat (...)

24En avril 2006, les Kisêdjê (Suyá) ont été invités par la compagnie brésilienne Grendene, fabricant de chaussures, pour participer à une campagne de publicité afin de lancer sa nouvelle gamme de claquettes Ipanema. Les Kisêdjê, à leur tour, devraient fournir les motifs graphiques, peintures et accessoires pour être utilisés par la star brésilienne Giselle Bündchen, protagoniste de la campagne. Le contrat signé entre la population indigène et l'entreprise prévoit la cession des motifs graphiques et la réalisation d'un commercial par la top-model et par les Indiens, devant être filmé dans le village indigène5.

25L'un des grands dilemmes rapportés par l'anthropologue Coelho de Souza (2010), est précisément la difficulté d'établir les paramètres de l'accord entre deux logiques distinctes de pensée qui conduisent à différentes attentes. L'entreprise est venue dans le village avec un scénario déjà préparé qui comprenait l'utilisation d'accessoires indigènes largement connus: bracelets, colliers, et coiffures de plumes (cocar). Toutefois, l'espoir des Indiens était autre: ils ont compris qu'ils recevraient de l'argent pour leur capacité unique à proposer, définir et prêter des accessoires. L'exigence de l'entreprise pose un problème aux Kisêdjê, car ils ne pensent pas qu'il convenait que la star utilise les accessoires masculins, souvent plus beaux que ceux des femmes. Le point le plus critique de cet accord a eu lieu une année après le premier contact. La Grendene a reproduit les motifs indigènes pour des sandales Ipanema sans l'autorisation des Kisêdjê et sans effectuer un nouveau contrat, en réutilisant les motifs graphiques. Cet acte a été considéré comme une rupture de contrat du point de vue des Kisêdjê, qui en ont exigé une « compensation ».

26Cet exemple met en évidence une posture récurrente adoptée par les entreprises : représenter sa propre imagination dans les stratégies de marketing avec les peuples amazoniens. En d'autres termes, quand une entreprise va à la recherche d'une population amazonienne pour leur proposer un accord, elle a déjà une sorte de relation abstraite, elle a pour point de départ un imaginaire qui oriente la manière dont ces accords doivent être menés. Contrairement aux populations amazoniennes, qui formulent leurs attentes dans les termes établis et combinés.

27Les Kisêdjê voulaient utiliser l'argent reçu par la compagnie pour acheter une grande voiture, toutefois, l'entreprise a établi dans le contrat que l'argent devrait être utilisé pour les « projets de développement communautaire avec des garanties de durabilité » (Coelho de Souza, 2010:44), une telle exigence est récurrente de la part des entreprises. Craignant que les ressources transférées par celle-ci soient mal utilisées – comme des boissons alcoolisées, des cigarettes, des biens de consommation, des voitures, des moteurs de bateau, etc., les entreprises finissent par imposer l'utilisation des montants d'argent, qui sont souvent en contradiction avec les besoins réels des groupes.

28Un autre cas controversé a impliqué trois entreprises brésiliennes du secteur cosmétique et la population indigène Ashaninka. La question plus évidente concerne l'utilisation des savoirs des populations amazoniennes (Pimenta, 2010). Les Ashaninka ont participé dans les années 90 à un projet de recherche impliquant une anthropologue, un chercheur spécialisé sur l'extraction des huiles de plantes et le CPI (Centre de Recherche Indigène).

29La controverse a commencé en 1996, lorsque l'anthropologue et le chercheur se sont réunis pour la fondation d'une société appelée Tawaya. La société a été créée pour la production des savons en utilisant des huiles et des graisses à partir de produits d'extraction de la région, visant à la viabilité commerciale de certains des résultats obtenus au cours des travaux des chercheurs. Ainsi, l'entreprise se présente sur le marché comme « spécialisée dans la fabrication de produits cosmétiques naturels à base de l'extraction des fruits de l'Amazonie et pionnier dans la fabrication de savons murmuru de la forêt » (Clay, 2002 :71). Cependant, le murmuru (Astrocaryum Murumuru) a déjà été examiné par le Ashaninka comme une plante avec des propriétés émollientes, la cicatrisation et de nombreuses autres fonctionnalités qui permettent des utilisations les plus diverses. Le murmuru était également la cible de la recherche et, surtout, de connaissances des chercheurs dans la période où ils habitaient le village Ashaninka.

30Le thème le plus visible autour de cette controverse est le différend relatif à la répartition des avantages découlant du processus de commercialisation de savon murmuru. Même si les Indiens n'ont pas investi le capital financier, les Ashaninka comprennent qu'ils ont investi leurs connaissances, ce qui est essentiel pour permettre la production et la commercialisation de savon murmuru. De ce point de vue, ils considèrent que l'entreprise Tawaya est fruit de tous les chercheurs et le travail Ashaninka et veulent donc être considérés comme des partenaires à part entière, avec la participation aux résultats économiques de la politique de l'entreprise et ils refusent d'être traités comme de simples fournisseurs de matières premières (Clay, 2002 :72).

31Ainsi, contrairement aux populations amazoniennes qui envisagent dans ces accords la possibilité de résoudre des problèmes pratiques concernant leurs demandes quotidiennes, les entreprises voient de nouvelles stratégies de marketing et de création de nouveaux produits pour le marché vert, où les peuples de la forêt sont devenus une source inépuisable d'inspiration et de création symbolique.

32Le cas emblématique de la société The Body Shop a été la source d'inspiration de nombreuses autres entreprises. Les Kayapó se sont à leur tour impliqués dans une scène contemporaine où ils acceptent de jouer à l'intérieur du scénario: écologie, marché vert et peuples de l'Amazonie. Terence Turner (1998) a examiné en détail les impasses de cette relation d'affaires. Sa critique la plus dure, cependant, concerne les problèmes d'utilisation de l'image et des gains réalisés par The Body Shop en raison de la publicité gratuite que sa stratégie a générée. Bien que l'entreprise ait payé une valeur de marché supérieure de l'huile de noix extraite et les bracelets faits par les Kayapó qui ont été revendus dans les magasins du monde entier, The Body Shop n'a pas eu à payer les partenaires amazoniens pour ce qui a été sans aucun doute le plus grand bénéfice de l'entreprise: le retentissement médiatique de sa stratégie innovatrice dans l'Amazonie et toute la retombée symbolique en termes de prestige et d'image que l'entreprise a gagné sur le marché.

33Les exemples ethnographiques présentés visent à informer les différentes logiques à partir desquelles les entreprises interagissent avec les populations amazoniennes. Dans ce sens, on observe que les comportements des entreprises sont conformes à une logique du développement durable. Ainsi, les intentions de participer au marché vert, appuyées par le nouvel ordre économique du capitalisme vert, font que les entreprises cherchent de nouvelles solutions dans lesquelles les relations avec les populations amazoniennes sont une réelle possibilité d'associer leur image à la protection de la nature.

34En d'autres termes, la mise en place d'un accord commercial avec les peuples de l'Amazonie permet aux entreprises leur entrée dans le monde de la durabilité sur le thème de l'environnement. L'exploitation de l'image de ces populations n'est pas seulement nécessaire, mais elle est devenue obligatoire. La connexion de l'entreprise avec l'image de l'écologie, à travers des relations commerciales avec les peuples de la forêt, apparaît comme le principal avantage pour les entreprises. La source d'inspiration symbolique devient alors inépuisable et se déroule à l'intérieur de nouvelles stratégies.

35Dans la section suivante, je propose de soutenir cet argument en le discutant à partir des données recueillies lors de mes visites sur le terrain pendant les années 2011 à 2014. La recherche a été réalisée dans une communauté qui vit de l'extraction de noix au Brésil dans l'État d'Amapá, Amazonie brésilienne. Les castanheiros d'Iratapuru, comme ils s'appellent eux-mêmes, ont des contrats commerciaux avec la plus grande entreprise de cosmétiques au Brésil, Natura S/A. Si dans d'autres publications, je me suis consacré à décrire les différences et les conflits ontologiques entre leur logique de raisonnement et de négociation (Ribeiro, 2016, 2017), dans cet article, je soutiens que la relation entre les entreprises et les populations amazoniennes doit être comprise au-delà de l'expansion du modèle capitaliste. Il doit être compris, avant tout, comme une capacité à amplifier matériellement la production de valeur et de tirer profit de la relation symbolique et subjective avec l'altérité et la nature.

La valeur concrète de la nature symbolisée

36Jusqu'au milieu des années 1970, les populations traditionnelles étaient considérées comme invisibles dans le paysage brésilien de la lutte pour les droits territoriaux. Cependant, l'articulation des mouvements sociaux et agraires, conjuguée à la visibilité internationale de l'Amazonie et aux paradigmes posés par l'environnementalisme, a conduit à une reconfiguration des droits d'accès aux forêts par les peuples locaux. Almeida (2004) a montré comment les facteurs non planifiés, complexes et combinés ont abouti à la reconfiguration des droits de ces peuples et à la création d'aires protégées. Dans son analyse, il a souligné les véritables changements politiques réalisés par les agents locaux via des chemins imprévus, malgré les puissances hégémoniques et leur capacité à contrôler les populations et les territoires (Almeida, 2004: 48).

37Le Village São Francisco do Iratapuru est situé sur la frontière des États de l'Amapá et du Pará, dans l'Amazonie orientale brésilienne, sur les bords extérieurs de la Réserve de développement durable du fleuve Iratapuru (RDS – Iratapuru). La RDS du fleuve Iratapuru, créée en 1997 par le gouvernement de l’État d’Amapá sur plus de 800 000 ha de forêt tropicale, est la première RDS dans l'État d'Amapá. Sa mise en place, à l’initiative du gouverneur João Alberto Capiberibe (1994-2002), s’inscrit parfaitement dans les directives de son plan politique, le « Programme de Développement Durable d’Amapá » (PDSA), qui visait à un développement social et humain centré sur la préservation de la forêt et la valorisation économique de ses ressources par les populations locales (Greissing, 2012 : 156). La carte 1 ci-dessous montre la configuration générale de l’espace de recherche au sud de l'État d'Amapá.

[Carte 1] Contexte général de la zone de recherche.

[Carte 1] Contexte général de la zone de recherche.

Source : Fourni par François-Michel Le Tourneau.

38Environ quarante-deux familles habitent la communauté de São Francisco do Iratapuru, située à la frontière extérieure de la Réserve de développement durable du fleuve Iratapuru, bien qu'elle soit le seul groupe de familles qui peuvent profiter des ressources de la Réserve. La région de Jarí (voir la carte 2) est l´espace de circulation de cette population de castanheiros et porte en elle les adversités d'une zone considérée comme d'accès difficile, principalement en raison de sa conformation géographique et fluviale, caractérisée par de nombreuses chutes d'eau, gorges d'eau, qui rendent le système de navigation très risqué et dangereux.

[Carte 2] RDS São Francisco do Iratapuru.

[Carte 2] RDS São Francisco do Iratapuru.

Source : Fourni par SEMA – Secretaria do Meio Ambiente do Amapá

  • 6 Il est à noter qu'une centrale hydroélectrique a été construite près du village Iratapuru. Cette ce (...)
  • 7 L'huile fournie par le gouvernement de l'Etat est également utilisée pour assurer le bon fonctionne (...)

39La petite communauté, en raison de l'isolement et des conditions géographiques, n´ont pas encore obtenu l'installation de câblage électrique qu’ils demandent depuis des années6. Pour l'instant, le gouvernement de l'État et de la municipalité se limite à fournir à la communauté une quantité limitée d´huile, qui permet l'accès à l'électricité au moyen du fonctionnement d'un générateur pendant quelques heures le soir7. En ces heures, les résidents peuvent conserver le poisson, la viande et les boissons réfrigérées. C'est aussi pendant cette période que les habitants se rassemblent pour regarder la télévision.

  • 8 Selon la propagande commerciale de l'entreprise Natura pour la divulgation des produits cosmétique (...)

40En regardant la publicité à la télévision, les collecteurs de noix du brésil observent leurs propres images et non celles de lieux éloignés ou des habituels biens de consommation. Ils sont particulièrement attentifs à la publicité de l'entreprise Natura et s'expriment dans une humeur euphorique et facétieuse à son sujet. Sur l'écran de télévision la lumière et la fumée blanches jaillissent de l'intérieur vert foncé de la forêt. Au loin, on entend les tambours tonitruants, les bruits et les grognements d'animaux qui se cachent. L'arbre de la noix du Brésil s'impose dans le paysage, le feuillage est dense, on observe du haut du ciel son majestueux tronc. La terra preta d'Amazonie, bordée de noix et ouriços, abrite également les castanheiros - les résidents de la communauté São Francisco do Iratapuru - se transforment durant quelques secondes en «star de la télévision» comme ils se définissent eux-mêmes. Dans la scène suivante, les mains des femmes râpent les noix du Brésil, ce qui forme un lait blanc crémeux et somptueux et le narrateur annonce: «La forêt détient ses secrets. Les secrets que la Natura Ekos apporte pour les cheveux avec la valeur nutritive des noix, pour créer une nouvelle gamme de produits pour le corps qui apporte des avantages précieux (...)»8 . Les figures suivantes montrent la gamme de produits développée par la société Natura sur la base de produits extraits par les habitants de la communauté de San Francisco d'Iratapuru.

41La société de cosmétiques Natura est la plus grande industrie des cosmétiques du Brésil. Elle a commencé ses activités en 1969 avec un petit magasin dans le centre-ville de São Paulo. Au milieu des années 2000, l'entreprise a réalisé un grand changement dans sa stratégie commerciale. Une de ses principales actions a concerné la mise en place d'accords commerciaux avec les peuples amazoniens afin d'obtenir directement de ces populations les matières premières de la biodiversité brésilienne pour la création de ses nouveaux produits de beauté.

42Déterminée à offrir des produits sous l'étiquette de durabilité, la société Natura fait des propositions d'affaires à diverses populations amazoniennes. De son point de vue, ces contrats profitent aux populations amazoniennes car ils offriraient la possibilité d'augmenter leurs revenus et de leur donner une visibilité mondiale. L'entreprise s'appuie également sur le fait qu'il s'agit d'un moyen de contribuer à la préservation de l'environnement en aidant à maintenir les pratiques traditionnelles des peuples de la forêt tout en utilisant la biodiversité brésilienne pour créer des cosmétiques de qualité et sans affecter l'environnement naturel. C'est aussi une façon d'enrichir l'entreprise en associant leurs produits avec les valeurs de l'écologie et de se différencier vis-à-vis de ses concurrents. En s'engageant dans cette voie, la Natura met l'accent sur ses capacités créatives et novatrices pour promouvoir des réseaux de relations où, selon les mots de l'entreprise, «tout le monde gagne». Donc, l'idée la plus véhiculée dans cette perspective est que cette stratégie offre des avantages importants à toutes les communautés participantes, en plus de contribuer à la préservation de l'environnement.

  • 9 Posséder une castanhal c'est avoir le droit d'exploiter une zone spécifique définie par les castanh (...)

43Néanmoins, tous les castanheiros ne font pas partie de ces accords et de ces images, qui font référence à un ensemble romantique de la vie dans la forêt et au travail de collecte de la noix. Si dans certains endroits, les castanheiros «célèbres» se sentent fiers de voir leur image à l'écran, diffusée partout au Brésil, chez d'autres ces images sont soumises à l'inconfort et à l'embarras. Une des familles qui vit dans la communauté depuis plusieurs années, évoque le fait que la réalité à Iratapuru est nettement différente de ce qui apparaît à la télévision. Trois de leurs enfants sont malades et sa famille dépend des programmes d'aides du gouvernement fédéral et ils ne peuvent pas vivre avec le revenu insuffisant de la collecte des noix9.

44Avec la mise en place, en 1992, d’une coopérative (la Coopérative Mixte des Producteurs et Extractivistes du fleuve Iratapuru - COMARU) au sein de la Vila de São Francisco, à l’initiative de plusieurs familles qui se sont rassemblées sur ce site quelques années auparavant, la communauté a peu à peu gagné en visibilité auprès des institutions nationales et internationales soucieuses de la recherche d’alternatives de développement pour les peuples de la forêt amazonienne. Du fait de ses efforts pour s’organiser et réussir à améliorer les conditions de vie de ses habitants, mais également à cause du soutien massif reçu des autorités locales et fédérales. Aujourd’hui, l’entreprise de cosmétique Natura est le partenaire le plus important de la communauté (Le Tourneau, Greissing, Kohler, 2008b)

  • 10 La période de collecte est maintenue dans la forêt amazonienne dans des espaces appelés colocações (...)

45La relation entre l'entreprise Natura et les castanheiros d'Iratapuru, maintenue au cours des 10 dernières années, a connu plusieurs transformations et changements. Les résidents sont conscients de la relation avec l'entreprise au-delà de la formalité institutionnelle. Bien que tous ne fassent pas partie de la coopérative COMARU, la plupart des familles sont impliquées dans la fourniture de l'huile pour l´entreprise de cosmétiques. Les résidents de la communauté ont garanti le droit de demeurer sur le territoire de la réserve en 1997. Depuis, ils ont la possibilité de maintenir leur mode de vie dans les milieux forestiers10, la préservation de leurs pratiques de collecte et de commercialisation de la noix du Brésil.

  • 11 La Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED) également connu com (...)
  • 12 Selon le directeur de Natura, responsable des relations avec les communautés traditionnelles, dans (...)

46Pendant les années 90, Natura visait à améliorer sa stratégie d’affaire et son expansion au Brésil grâce à une profonde restructuration, dont l'objectif principal était de développer des formules qui contiennent des ingrédients naturels. L'ECO 9211 a été essentiel dont la préoccupation avec la nature être établis plus intensément dans les stratégies de l'entreprise: «Ce point de vue a imprégné Natura, Il existait en tant que principe, comme la croyance, mais ce n'est que cette fois que ces questions ont commencé à se matérialiser en termes de développement durable»12.

  • 13 Plusieurs études montrent combien obscure, ambiguë et contradictoire est la notion de «développemen (...)

47À partir de ces nouvelles lignes directrices, Natura s'efforce de créer des nouveaux produits et de fournir aux consommateurs des cosmétiques naturels obtenus selon des principes écologiques et responsables. Avec cet objectif, elle a lancé en 2000 une nouvelle ligne de cosmétiques appelée Ekos, sur la base de ce que l'entreprise appelle la technologie verte. La ligne de produits Ekos représente un changement important pour Natura. Son principe de base est l'utilisation de matières premières naturelles provenant des forêts brésiliennes, achetées dans le cadre de «développement durable», un concept qui offre de nombreuses ambiguïtés et a été largement discuté (Smyth, 2001; Redclift, 1998; Le Tourneau, et Greissing, 2010; Le Tourneau, et Kohler, 2011; Kattel, 2005)13.

48Le lancement de Ekos permet la première rencontre de Natura avec une population amazonienne – les castanheiros d'Iratapuru. Actuellement, l'entreprise a conclu des accords avec 25 autres communautés dans différentes régions du Brésil, en vertu de l'argument selon lequel « Natura Ekos soutient le développement social, le renforcement de l'économie, l'inclusion sociale et la durabilité environnementale de toutes les communautés concernées, la construction d'un réseau dans lequel tout le monde gagne »14. L'organisation actuelle de la coopérative COMARU15, qui aujourd'hui, ne vend que par l'entreprise Natura, ne soutient pas toutes les familles de la communauté, et beaucoup d'entre elles préfèrent encore vendre leurs noix à des intermédiaires (acheteurs occasionnels), en partie grâce à un meilleure prix de vente16, et aussi en raison de désaccords ou de conflits entre les membres de la communauté.

49Les castanheiros reçoivent leurs payements de différentes manières en fonction des accords commerciaux qu'ils ont avec Natura: a) en raison de l'achat de l'huile de noix du Brésil dans le cadre du contrat avec la coopérative COMARU, b) sous la forme de la restitution pour l'utilisation / accès aux connaissances traditionnelles de cueillette de noix et c) en raison de la cession des droits sur leurs images. Chacun de ces accords contient sa propre complexité et le paiement est négocié et effectué différemment. Dans cette rubrique, je propose une réflexion sur le mode par rapport à l'utilisation, la propriété et les paiements effectués au titre de droits d'utilisation de l'image de certains membres de la communauté. Je soutiendrai que le plus important pour Natura est, avant tout, le droit à la représentation des castanheiros à partir du paiement de droits individuels pour l'utilisation de leurs images.

50Cette déclaration peut paraître d'abord paradoxale, car sans la matière première (huile de la noix du Brésil), l'entreprise ne pourra pas reformuler ses produits. Cependant, le bénéfice des accords commerciaux qu'ils possèdent avec les castanheiros réside particulièrement dans la capacité de l'entreprise à utiliser et à exploiter cette approche grâce à l'image subjective des habitants des forêts elles-mêmes. C'est parce que l'achat de matières premières peut avoir lieu d'une autre manière, par exemple par d'autres entreprises ou de petits médiateurs commerciaux. Toutefois, c'est précisément en créant un lien subjectif avec la nature et avec les castanheiros que la rentabilité concrète de la société Natura est établie. En outre, il est possible de penser les gains provenant de l'utilisation de ces images par l'entreprise en termes d'augmentation concrète de sa valeur sur le marché des cosmétiques.

51Il est bon de noter que les termes de ces accords, bien que négociés entre les deux parties, sont formulés à partir de la logique occidentale de contrats et de droits. Autrement dit, les contrats sont rédigés par des avocats de l'entreprise, les paiements sont effectués à partir des éléments de l'organisation en termes d'entités juridiques (institutions, coopératives, associations) et le fonctionnement de tous les accords repose sur la rubrique du modèle occidental de la propriété. Ces accords nous font voir ce qui pourrait être considéré comme les plus grandes asymétries de ce genre de relation. La rationalité de ces accords est nécessairement la rationalité des affaires économiques.

  • 17 Publié en 1723, la Fable des abeilles de Bernard Mandeville, argumente que les intérêts individuels (...)

52Dans la célèbre fable de Mandeville17, ce sont les intérêts individuels qui agissent de manière non intentionnelle pour la promotion du bien-être collectif ou l'intérêt public. Dans la relation entre l'entreprise Natura et la population d'Iratapuru, c'est exactement le contraire qu'il se produit. L'attribution des contrats d'utilisation de l'image et le paiement attribué à la personne qui offre son portrait peuvent être considérés comme l'une des grandes asymétries d'accords impliquant l'utilisation par les entreprises d'images des populations d'Amazonie. Le paiement se fait par l'attribution individuelle de droits, versés directement à celui qui donne son image à l'entreprise. La difficulté est liée précisément au fait que ce type de représentation fait référence à la collectivité et jamais à l'individu. En d'autres termes, il paie pour l'utilisation individuelle de l'image d'un castanheiro, mais l'entreprise se sert de la représentation collective. C'est-à-dire de tout un ensemble de familles vivant dans la même région et qui est également engagé dans la collecte de noix du Brésil.

53Bien que cette action puisse être comprise comme un moyen intéressant de générer des revenus pour les collecteurs, et aider à la diffusion de l'entreprise des cosmétiques, à l'échelle microscopique, même si les deux parties semblent satisfaites des accords relatifs à l'utilisation de l'image, toutefois, en élargissant l´échelle, nous pouvons nous demander quels sont les effets et les conséquences de l'utilisation et de l'appropriation en termes de gains, à la fois pour l'entreprise et pour certains membres de la communauté. Les castanheiros élus représentent finalement l'ensemble du groupe et de l'activité collective dans le territoire qu'ils habitent. Les « élus » se montrent au lieu d'autres. Ils représentent la totalité d'une pratique toujours collective et d'un espace partagé collectivement.

  • 18 Évaluation annuelle par l'entreprise Interbrand et publiée dans www.rankingmarcas.com.br. Natura a (...)

54La circulation des images peut être considérée comme le plus important attrait commercial et de marketing pour les entreprises. Dans les images qui circulent, ils vendent la nature sous forme de produits de beauté, où l'image des peuples de la forêt, ainsi que les matières premières qu'ils offrent, sont devenues indispensable. Bien que leurs revenus soient comptabilisés en termes d'augmentation des ventes, nous devons attirer l'attention sur la grand avantage pour les entreprises: leur marque et leur image sur le marché. La marque Natura, évaluée à plus de 7 millions de dollars en 201118, a construit son prestige, sa stabilité et sa reconnaissance nationale et internationale grâce à cet ensemble complexe de stratégies de démarrage. Pour qu'elle soit aussi distinguée la relation avec les populations amazoniennes apparaît comme un élément essentiel.

55Cette discussion ne dévoile qu'une infime partie d'un problème plus complexe. L'entreprise vend et gagne un idéal subjectif qu'elle construit et dans lequel la représentation imaginaire des populations vivant dans la région de la forêt amazonienne apparaît comme fondamentale. Cela nous amène à un problème déjà connu: l'exploitation de l'image et le droit de représentation des peuples autochtones. Affligés par les contradictions ou radicalement représentés comme plus faibles dans un passé pas si lointain, maintenant ces peuples sont présentés comme les «gardiens de la forêt» au service d'une économie de marché axée sur la logique environnementale. La primauté de l'un, face à l'autre, est identique, en dépit de nombreux efforts pour garantir les droits et la dignité de ces personnes, leur marchandisation matérielle et symbolique continue de recevoir de nouvelles formules.

56Alcida Rita Ramos (2006) est sévère en analysant les peuples d'Amazonie et les intérêts des marchés axés sur la logique de la durabilité de l'environnement. Comme nous l'avons vu, la marchandisation de leur art, leur image et de la biodiversité, finit par servir un large éventail d'intérêts de différentes institutions. Ainsi, ces populations continuent d'être traitées comme des marchandises et elles doivent se confronter à l'emprise élaborée par des entrepreneurs, des scientifiques, des ingénieurs, des environnementalistes. Les populations amazoniennes, contraintes de justifier la défense de leurs territoires répondent malgré elles par des manœuvres en marketing qui révèlent encore une fois la fragilité de leur statut.

57Natura, comme toute les entreprises guidées par la rationalité économique, est imperméable à l'altérité des autres modes de pensée, contrôlant ainsi tous les aspects de la relation, en particulier, l'utilisation des ressources financières allouées aux peuples amazoniens. Ce fait explique l'embarras des entreprises à traiter avec d'autres formes de vies et de pensées. Paradoxalement, les entreprises se plaignent de difficultés techniques et pratiques pour traiter commercialement avec les peuples de la forêt. Les différences, comprises et soulignées telles que les différences culturelles, sont essentielles dans les stratégies de diffusion des innovations par les entreprises. Le paradoxe réside dans la difficulté qu'ils ont de traiter l'exotisme qu'ils recherchent depuis le départ, avec le professionnalisme exigé de leur statut d'entreprise.

58Nous sommes confrontés aux autres dilemmes lorsque nous réfléchissons sur les moyens d'utiliser les images et le droit de représentation de ces populations. Les formes occidentales d'organisation juridiques, peu préparées à faire face à des relations qui impliquent les populations d'Amazonie, accentuent les asymétries de ces accords pour permettre à Natura de payer individuellement l'image des personnes, mais, en retour, obtiennent l'ensemble du groupe qui est représenté. Par conséquent, bien que nous puissions tenir compte des gains de l'entreprise en termes de ventes de produits, il est difficile de compter leur gains en termes de valeur de marque, prestige et réputation sur le marché, des aspects très appréciés pour la comptabilité du monde des affaires.

59D'une part, les populations d’Iratapuru envisagent avec des accords par rapport Natura, un moyen d'améliorer leur vie et d'augmenter les ressources limitées dont ils disposent. De l'autre, Natura recherche avec ces populations la possibilité de créer de nouvelles formes d'activités et d'assurer sa participation dans les marchés où elle opère, grâce à ce type de stratégie elle peut réussir à produire une image de l'entreprise socialement et écologiquement responsable. En surface, on voit des acteurs distincts qui se rencontrent et s'entendent sur la mise en place de ces partenariats commerciaux, mais au fond de ces relations il demeure un grand nombre de difficultés, des malentendus et des frustrations. Si nous ne pouvons pas nier que les deux parties gagnent quelque chose en signant ces accords, nous ne pouvons ignorer l'inégalité des gains obtenus pour les uns et les autres.

60Ces discussions font partie d'un débat beaucoup plus épineux et qui est loin d'apparaître comme un consensus dans la littérature. Il s'agit des problématiques concernant le droit à la propriété intellectuelle et à la commercialisation de «produits culturels». Selon Santos (2003), nous procédons à un désassemblage de tous les référentiels traditionnels et modernes, tout en créant une société dont la dimension est, paradoxalement et en même temps, locale et mondiale. Toute transformation locale, en ce sens, peut être destinée ou répertoriée dans un réseau de valorisation planétaire.

61Nous percevons comment les technologies des populations amazoniennes, lorsqu'elles sont appropriées par des entreprises, par exemple, se transforment en une expression considérable. L'existence de ces populations, ainsi que leurs pratiques culturelles, est retravaillée et inscrite dans une dynamique qui n'a plus rien à voir avec la dynamique naturelle. La biodiversité génétique brésilienne, dans le cadre de l'exploitation et de son utilisation par des entreprises privées, a combiné l'exposition imaginaire et symbolique des personnes qui habitent la forêt avec la vente des marchandises lucratives. Ce fait pourrait être configuré, de manière radicale et critique, comme le souligne Santos (2003), sous les traits d´une nouvelle forme de colonisation. Si les territoires habités ne sont plus en question, nous trouvons maintenant un type de nouvelle colonisation de la biodiversité génétique et de la sociodiversité culturelle des peuples amazoniens.

Conclusion

62Cet article a soutenu que l'avancement de l'expansion du modèle capitaliste d'échange et d'exploitation ne tient pas compte de la compréhension de la complexité des relations entre les populations amazoniennes et les entreprises mondiales. D'abord, parce que les logiques d'action et de négociation entre elles reposent sur des hypothèses distinctes, ainsi que sur les attentes qui émergent de ces rencontres. Deuxièmement, les accords et les échanges entre les entreprises et les populations amazoniennes ne reposent pas sur l'aspect concret des éléments en jeu, à savoir l'achat d'huile de noix du Brésil, l'achat de murumuru ou d'autres éléments extraits de la biodiversité brésilienne et transformés en marchandises. L'incorporation de l'altérité et de la subjectivité amazoniennes liées aux peuples des forêts et à la nature apparaît plus largement comme un élément essentiel de la création et de la valorisation des produits de base.

63Les différents exemples présentés dans cet article, visaient à donner un aperçu actuel des relations entre les entreprises et les populations autochtones et traditionnelles, ils ont montré comment les problèmes qui caractérisent ces accords se développent à partir des caractéristiques spécifiques de chaque groupe et pourraient difficilement être généralisées. Nous notons également qu'il est non seulement la commercialisation de la biodiversité brésilienne, mais surtout, l'altérité et la subjectivité visibles dans les dessins et graphiques indigènes, dans leurs objets et artefacts et dans la reproduction encore exotique que font les entreprises de l'image des populations forestières. Une telle reproduction, cependant, est précisément ce qui donne de la valeur aux produits, en les impliquant dans ce que nous appelons le capitalisme vert, c'est une forme du monde des affaires raccommodage précairement les dégâts qu'ils ont eux-mêmes causés. Dans ce contexte, les peuples amazoniens sont invités à participer à ce processus de réparation, cependant, les pertes sont exprimées dans de nouvelles formulations.

64La description des accords entre Natura et castanheiros d'Iratapuru soutient et renforce cet argument. L'huile de noix du Brésil n'est pas exactement l'élément fondamental de cette relation. C'est précisément l'appropriation d'un imaginaire qui implique la nature et les populations forestières qui intéressent Natura. Si, d'une part, les images des castanheiros d'Iratapuru extrapolent les frontières de leurs territoires, d'autre part, leurs luttes quotidiennes sont les mêmes, marquées par un mode d'existence unique et très dépendantes des politiques et des actions gouvernementales.

65Dans le conte de Chamisso ([1822] 2010), Peter Schlemihl vend son ombre au diable, qui l'enveloppe et l'emmène. Manuela Carneiro da Cunha (1990) a déclaré que, comme le protagoniste de ce conte, nous sommes de plus en plus disposés à vendre les choses les plus étranges: le sang, les tissus, les œufs, ainsi que les formes, les images et les voix. Si dans d'autres moments et dans d´autres lieux les gens ont vendu leurs propres âmes, Carneiro da Cunha nous demande: vendons-nous encore nos âmes, en permettant aux populations indigènes et traditionnelles de devenir des marchandises?

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Notes

1

Pour une description ethnographique de CGEN, voir: Soares (2010) et Coelho de Souza et Lima (2010).

2 Les graines de l'Amazonie ont été amenées par les Britanniques en Malaisie, Ceylan et l'Afrique pour la production de caoutchouc avec une plus grande efficacité et productivité par rapport à son exploitation en Amazonie.

3 Clay (2002) discute les relations entre les entreprises et les communautés, en plus, il travaille comme consultant en affaires pour ce type de stratégies et est vice-président du marketing chez WWF – World Wildlife Fund.

4 Considérant par conséquent, que tout le monde a quelque chose à vendre. Dans le livre, elle fait une sorte d'autobiographie en insistant sur son comportement innovateur et audacieux dans le monde des affaires. Le volume est devenu un classique pour les entreprises: Roddick, Anita, Meu jeito de fazer negócios, (2002) p.134.

5 Plusieurs autres aspects sont problématisés par l'anthropologue Coelho de Souza, tels que les relations entre Kisêdjê et leurs voisins du Xingú, ainsi que la notion de propriété des dessins, cependant, je ne discute que certains aspects de cette relation, pour savoir plus, voir: Coelho de Souza (2010).

6 Il est à noter qu'une centrale hydroélectrique a été construite près du village Iratapuru. Cette centrale hydroélectrique de Santo Antônio do Jarí, cependant, n'est pas destinée à fournir de l'électricité aux résidents, ce qui devient objet d'indignation de la part de la communauté.

7 L'huile fournie par le gouvernement de l'Etat est également utilisée pour assurer le bon fonctionnement de la coopérative (COMARU), dont l'activité principale est l'extraction de l'huile de noix pour la vendre à Natura.

8 Selon la propagande commerciale de l'entreprise Natura pour la divulgation des produits cosmétique Ekos.

9 Posséder une castanhal c'est avoir le droit d'exploiter une zone spécifique définie par les castanheiros. Bien que ce soit une règle «informelle», elle est rigoureusement suivie par les familles.

10 La période de collecte est maintenue dans la forêt amazonienne dans des espaces appelés colocações florestais.

11 La Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED) également connu comme ECO-92. Cette conférence a été en grande partie responsable de la mise en place de la notion de développement durable.

12 Selon le directeur de Natura, responsable des relations avec les communautés traditionnelles, dans une conférence tenue le 4 Septembre 2011, à Porto Alegre, Brésil.

13 Plusieurs études montrent combien obscure, ambiguë et contradictoire est la notion de «développement durable», un concept qui est apparu fortement en 1987 lors d'une réunion de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement (CMED), également connu sous le nom de Commission Brundtland, est la définition proposée qui guide plusieurs entreprises y compris Natura.

14 Voir: http://www.naturaekos.com.br/rede-ekos/conheca-nossas-comunidades-fornecedoras/

15 Pour une approche géographique et anthropologique sur la création de la Réserve et de la Coopérative (COMARU) voir: Greissing (2011) et aussi Le Tourneau, Greissing, Kohler, Picanço (2008a).

16 En 2011, par exemple, la Coopérative a payé par hectolitre de noix du Brésil (environ 45 kilos) la valeur de 75,00 reais, alors qu´auprès des intermédiaires ou sur le marché de Laranjal do Jari, un castanheiro pourrait atteindre jusqu'à 160,00 reais pour la même quantité.

17 Publié en 1723, la Fable des abeilles de Bernard Mandeville, argumente que les intérêts individuels peuvent spontanément générer des bénéfices publics. Cette idée a été très influente dans la naissance de l'économie. Adam Smith, a trouvé comme un élément explicatif de l'idée qu'une «main invisible» donnerait un ordre naturel des relations impersonnelles du marché. Cette formulation peut être considérée comme fortement influencée par les propositions précédentes de Mandeville.

18 Évaluation annuelle par l'entreprise Interbrand et publiée dans www.rankingmarcas.com.br. Natura a été considérée comme la sixième marque la plus importante au Brésil.

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Table des illustrations

Titre [Carte 1] Contexte général de la zone de recherche.
Crédits Source : Fourni par François-Michel Le Tourneau.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/13058/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 712k
Titre [Carte 2] RDS São Francisco do Iratapuru.
Crédits Source : Fourni par SEMA – Secretaria do Meio Ambiente do Amapá
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/13058/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 172k
Titre [Figure 1] Natura Ekos Castanha.
Crédits Source : http://ne.dedalus.com.br/​rede-ekos/​a-tradicao-do-leite-de-castanha/​
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/13058/img-3.png
Fichier image/png, 679k
Titre [Figure 2] Publicité Natura.
Crédits Source : http://www.natura.com.br/​relatorio-anual/​2015/​nossos-processos/​valorizacao-da-amazonia
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/13058/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 296k
Titre [Figura 3] Cueilleurs de noix du Brésil par Natura.
Crédits Source : http://ne.dedalus.com.br/​valores-da-marca/​o-elo-com-as-comunidades/​
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/docannexe/image/13058/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 423k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Magda dos Santos Ribeiro, « Capitalisme vert: Les populations locales sur les marchés mondiaux »Confins [En ligne], 35 | 2018, mis en ligne le 19 avril 2018, consulté le 12 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/confins/13058 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/confins.13058

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Auteur

Magda dos Santos Ribeiro

Département d'anthropologie (PPGAS), Université de São Paulo (USP, magdasribeiro@gmail.com

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-SA-4.0

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