- 1 Une version approfondie de cette étude est disponible, en langue portugaise, dans le Boletim Geográ (...)
1La présente étude1 a pour base le document RS 2030 : Agenda de Desenvolvimento Territorial [Rio Grande do Sul 2030 : Agenda de développement territorial], développé par le Secrétariat de la Planification du Rio Grande do Sul et la Fondation d’Économie et de Statistiques (FEE) en 2014. Ce travail de planification à long terme a mis l’accent sur certaines questions démographiques importantes dans l’État du Rio Grande do Sul : une chute considérable du rythme de croissance de la population, avec un taux de 0,49 % par an en 2010, inférieur au 1,17 % du pays. Un chiffre qui fait du Rio Grande do Sul l’État brésilien à la plus faible croissance démographique entre 2000 et 2010.
2Deux facteurs sont prépondérants dans ce processus, le plus important étant la diminution du taux de fécondité. En 2010, la moyenne d’enfants par femme était de 1,8, donc inférieure au seuil de renouvellement des générations qui est de 2 enfants. L’autre facteur important est l’augmentation de l’espérance de vie.
3Le vieillissement de la population de l’État est plus élevé dans les régions frontalières avec l’Argentine et l’Uruguay, en conséquence de la migration de la population active vers l’est du Rio Grande do Sul et vers d’autres états brésiliens. C’est en partant des données obtenues par le RS 2030 : Agenda de Desenvolvimento Territorial, et avec le support de la cartographie thématique, que nous avons tenté d’identifier les similarités et les différences démographiques entre, d’un côté, le Rio Grande do Sul et sa région frontalière et, de l’autre, les états voisins.
- 2 Dados do Instituto Brasileiro de Geografia e Estatística (IBGE).
- 3 Dados do Instituto Nacional de Estadística y Censos (INDEC).
- 4 Dados do Instituto Nacional de Estadística (INE).
4Les données des recensements de la population du Brésil (2010)2, d’Argentine (2010)3 et d’Uruguay (2011)4 ont permis d’identifier le type de transition démographique qui se produit dans les unités administratives proches. Pour un travail de comparaison, nous nous sommes valus de la méthodologie utilisée par Rückert, Carne Filho et Uebel (2015) : utiliser la Nomenclature des Unités Territoriales Statistiques (NUTS) de l’Union Européenne afin de définir des zones comparables pour les pays du Mercosur, conformément aux différents niveaux.
- 5 Les Conseils Régionaux de Développement (COREDE) ont été créés par le gouvernement de l’état du Rio (...)
5Dans cette étude ne sont analysées que les unités administratives du Brésil, d’Argentine et d’Argentine pour vérifier la position de l’État du Rio Grande do Sul et de sa région frontalière par rapport aux territoires voisins. Il est important de signaler que pour le Niveau III du territoire brésilien, et en particulier dans le cas du Rio Grande do Sul, nous utilisons l’échelle des COREDE5 parce qu’elle constitue une régionalisation de référence pour la planification gouvernementale de l’État.
6Ainsi, les niveaux d’analyse pour l’Argentine, le Brésil et l’Uruguay ont été : provinces, états et pays pour le Niveau II ; départements ou partis, COREDE et départements pour le Niveau III.
7En ce qui concerne la population en âge de travailler, l’État du Rio Grande do Sul et la région centrale du Brésil présentent les taux les plus élevés. Et la tendance est la même dans les trois pays observés.
8En 2010, l’État du Rio Grande do Sul comptait 69,85 % de population active, en dessous seulement des états de Rio de Janeiro (69,90 %), São Paulo (70,69 %), Santa Catarina (71,26 %) et du District Fédéral (71,36 %). Les moyennes nationales étaient de 68,54 % au Brésil (2010), 64,25 % en Argentine (2010) et 64,10 % en Uruguay (2011). En somme, il est possible d’observer une période de bonus démographique dans l’État du Rio Grande do Sul. La Figure 1 montre le pourcentage de la population en âge de travailler dans le Niveau II :
Figure 1 : Pourcentage de la population de 15 à 64 ans dans les États brésiliens, les provinces argentines et en Uruguay – Zones comparables Niveau II
9L’analyse des données des zones comparables du Niveau III change ces informations et renforce l’idée que le Rio Grande do Sul serait proche de son pic de bonus démographique. Les taux les plus élevés de population entre 15 et 64 ans se situent dans le nord-est de l’État et dans certaines régions industrielles du centre-nord – la population active qui s’y trouve étant originaire des régions frontalières du Rio Grande do Sul. En Argentine et en Uruguay, les taux de population active sont très inférieurs à ceux observés dans l’État du Rio Grande do Sul. La Figure 2 montre le pourcentage de population en âge de travailler du Niveau III sur la base des recensements des trois pays :
10Figure 2 – Pourcentage de la population de 15 à 64 ans dans les COREDE et les départements argentins et uruguayens – Zones comparables Niveau III.
11Pour les zones comparables du Niveau II, la population de plus de 65 ans est en plus grand nombre à Buenos Aires [ou Ciudad Autónoma de Buenos Aires, nom officiel], avec 16,40 %, suivie par l’Uruguay avec 14,10 %. À noter également des taux élevés dans les provinces argentines de Santa Fé (11,80 %), Córdoba (11,20 %) et La Pampa (11,2 %), ainsi que dans la région centre-est de l’Argentine – cf. Figure 3 :
12Figure 3 – Pourcentage de la population de plus de 65 ans dans les États brésiliens, les provinces argentines et en Uruguay – Zones comparables Niveau II.
13Avec un taux de 9,30 % de personnes de plus de 65 ans, l’État du Rio Grande do Sul était situé au-delà de la moyenne brésilienne (7,38 %) et de tous les autres états du pays, mais en-dessous des moyennes argentine et uruguayenne. Néanmoins, l’actuel taux élevé de population active indique que l’État présente des moyennes chaque fois plus similaires à ces deux pays, avec un processus de vieillissement de la population plus intense que dans les autres états brésiliens.
14La Figure 4 indique la concentration de la population de plus de 65 ans pour les zones comparables de Niveau III. S’y distinguent les départements du sud de l’Uruguay, en particulier Lavalleja (16,70 %) et Colonia (16 %). Dans l’État du Rio Grande do Sul, les COREDE ayant le taux le plus élevé de plus de 65 ans ont connu des pertes récentes de population active ; c’est notamment le cas de Jacui Centro (12,20 %), Vale do Jaguari (11,83 %) et Fronteira Noroeste (11,62 %), à la frontière brésilienne.
15On observe globalement une tendance au vieillissement de la population dans la zone frontalière analysée, avec des indices plus élevés en Uruguay où le processus de transition démographique est déjà solidement installé. La majorité des départements argentins et des Conseils Régionaux de Développement tendent à suivre le même chemin.
16Figure 4 – Pourcentage de la population de plus de 65 ans dans les COREDE et les départements argentins et uruguayens – Zones comparables niveau III.
17Sur la population totale, la population de moins de 15 ans est la plus élevée au Nord du Brésil et de l’Argentine. Au Brésil, les états sont l’Acre (33,70 %), Amazonas (33,18 %), Amapá (33,14 %) et Roraima (33,05 %). En Argentine, les taux les plus élevés proviennent des provinces de Misiones (32,50 %) et Santiago Del Estero (31,60 %). Comme le montre la Figure 5, c’est la ville de Buenos Aires qui a présenté le taux le plus faible de population de 0 à 14 ans, avec 16,30 % :
Figure 5 – Pourcentage de la population de 0 à 14 ans dans les états brésiliens, les provinces argentines et en Uruguay – Zones comparables Niveau II
18Les données du recensement de 2010 ont montré que le Rio Grande do Sul comptait seulement 20,85 % de moins de 15 ans dans sa population, un taux inférieur aux moyennes brésilienne, argentine et uruguayenne. Ce faible pourcentage indique que l’État du Rio Grande do Sul connaîtra de grandes difficultés pour remplacer sa population active actuelle.
19La limite avec l’Argentine représente une rupture importante dans la structure démographique, car les départements de San Pedro (40,10 %), General Manuel Belgrano (38,5 %) et Guarani (37,6 %), dans la province de Misiones, ont des taux élevés de population de moins de 15 ans. Il en est de même dans toute la province de Corrientes – cf. Figure 6 :
Figure 6 – Pourcentage de population de 0 à 14 ans dans les COREDE et les départements argentins et uruguayens – Zones comparables Niveau III
20Pour l’analyse des taux moyens annuels de croissance démographique, différents espaces de temps ont été considérés pour les trois pays en raison des limitations imposées par la période des recensements. Pour le Brésil, les données proviennent de l’Institut Brésilien de Géographie et Statistique (IBGE) pour la période 2000-2010. Pour l’Argentine, de l’Institut National de Statistique et Recensements (INDEC) pour la période 2001-2010. Et pour l’Uruguay, de l’Institut National de Statistique (INE) pour la période 2004-2011. Les résultats sont présentés dans la Figure 7 :
Figure 7 – Taux moyen annuel de croissance démographique dans les états brésiliens, les provinces argentines et en Uruguay – Zones comparables Niveau II
21L’analyse du Niveau II montre que l’État du Rio Grande do Sul, l’Uruguay et Buenos Aires constituent un noyau de faible croissance démographique au centre de la zone considérée. D’un autre côté, les taux les plus élevés de croissance démographique se situent dans les régions périphériques pour les trois pays, dans la région Nord du Brésil et au sud de l’Argentine.
22Par rapport aux zones étudiées, il existe une croissance démographique de 0,20 % par an en Uruguay, 0,49 % par an dans le Rio Grande do Sul, 0,71 % par an dans la province argentine de Corrientes, 0,72 % par an dans celle d’Entre Rios et 1,47 % par an dans celle de Misiones. Le Rio Grande do Sul est l’État brésilien qui a présenté le plus faible taux de croissance économique pendant la période étudiée. Il est plus élevé qu’en Uruguay mais plus bas que dans les provinces argentines. L’analyse du Niveau III apparaît dans la Figure 8 :
Figure 8 – Taux moyen annuel de croissance démographique dans les COREDE et les départements argentins et uruguayens – Zones comparables Niveau III
23La Figure 8 identifie plus en détail ce noyau de faible croissance démographique entre le nord du Rio Grande do Sul et l’intérieur des terres en Uruguay, avec des valeurs négatives de croissance dans les périodes considérées. En Uruguay, seuls six départements ont enregistré un taux moyen annuel positif pendant la période 2004-2011 : Maldonado (2,19 % par an), Canelones (0,96 % par an), San José (0,68 % par an), Colonia (0,68 % par an), Rio Negro (0,20 % par an) et Salto (0,20 % par an). À l’exception des deux derniers, tous se situent à proximité de la capitale Montevideo, la région qui concentre plus de la moitié de la population uruguayenne. Les treize autres départements ont vu le nombre de population absolue baisser, avec des taux variant de -0,01 % par an à Paysandu à - 0,85 % par an à Artigas.
24Si l’on fait abstraction des spécificités de chaque processus, l’analyse des données montre que les dynamiques démographiques qui définissent le côté brésilien présentent des similitudes avec celles observées des côtés argentin et uruguayen. Certes, il existe des différences de structure économique entre les côtés de la frontière. Mais tous enregistrent une faible densité démographique et un manque de dynamisme économique. Ces caractéristiques – en particulier aux frontières brésilienne et uruguayenne – sont renforcées par la combinaison d’éléments tels que le vieillissement de la population, une forte émigration et une faible fécondité.
25Du côté argentin, la province de Misiones ne rentre pas dans cette catégorie. Dans les départements comme San Pedro et Manoel Belgrano, la croissance est historiquement associée à la migration de Brésiliens en quête de nouvelles frontières agricoles. Mais au sud de cette province, la croissance est liée à la politique démographique instaurée par le gouvernement argentin à partir des années 1980.
26En Uruguay, un mouvement populationnel peut être observé dans le nord-sud, en direction des départements proches de Montevideo. Ce mouvement semble issu de facteurs similaires à ceux observés à la frontière sud du Rio Grande do Sul, à savoir la prédominance économique de l’agriculture et de l’élevage de propriétés agricoles moyennes et grandes, une lente incorporation de la technologie et un faible développement industriel. Cependant, des études plus approfondies sur les similitudes entre les structures économique de la région frontalière entre le Brésil et l’Uruguay sont encore nécessaires.
27Dans l’État du Rio Grande do Sul, la principale migration de la population se situe dans le sens ouest-est, au départ de la région de la frontière. Au sud, la structure économique supra citée contribue à ces migrations de la population. À la frontière avec l’Argentine, et en particulier au nord-ouest, la structure agricole et d’élevage qui prédomine est celle des petites et moyennes propriétés agricoles – un scénario qui ne semble pas davantage inciter la population à se fixer. Ce nonobstant, la région de Santa Rosa présente une industrie de machines et équipements agricoles très dynamique.