Navigation – Plan du site

AccueilNumérosvol. 36/1LecturesBariş ÇOBAN (dir.) (2017), Social...

Lectures

Bariş ÇOBAN (dir.) (2017), Social Media and Social Movements: The Transformation of Communication Patterns

Lanham, Lexington Books
Edmondo Grassi
Référence(s) :

Bariş ÇOBAN (dir.) (2017), Social Media and Social Movements: The Transformation of Communication Patterns, Lanham, Lexington Books

Texte intégral

1Le livre dirigé par Bariş Çoban analyse la nécessité de comprendre l’utilisation et la fonction croissante des médias sociaux dans la vie quotidienne de l’homme et du citoyen ainsi que l’influence qu’ils exercent dans le développement et la propagation des mouvements sociaux, qu’ils soient politiques économiques, culturels ou autres. Par conséquent, cette recherche menée dans diverses université jette un regard critique sur le pouvoir croissant lié aux technologies de l’information et de la communication qui permettent à une majorité de plus en plus large de devenir des acteurs actifs dans la sphère politique.

  • 1 La révolution des médias sociaux […] qui se construit et se fait voir dans la rue (traduction de l’ (...)

2Le concept de révolution appelle un changement radical dans les structures sociales, les institutions qui les régulent et les relations entre les personnes qui les stabilisent dans son réseau dialogique changeant. Ces aspects appartiennent également à la « social media revolution […] which builds and shows itselfs over the streets » (p. VII)1. Cet ouvrage vise à décrire les transformations du présent, ultraccelérées numériquement par rapport au développement et à la compréhension de la personne. Tâche haute et importante, car la mutation sociale qui s’opère est caractérisée par le manque de mots pour la décrire et ceux qui sont utilisés jusqu’à présent sont souvent les filles d’une sémantique passée qui tente de se modeler sur l’avenir avec une difficulté considérable.

  • 2 Dans la résistance et l’insurrection […] les deux puissances ont créé leurs propres médias alternat (...)

3Le texte offre de multiples perspectives critiques qui orientent les recherches sur l’usage des médias sociaux, sur la diffusion de l’information ainsi que sur les pratiques individuelles et collectives qui permettent à la personne d’exprimer, de manière innovante, son appartenance idéologique et son identité sociale. Du mouvement vert en Iran (2009) à la résistance au Gezi Park (2013), les médias sociaux ont montré comment il est possible de créer un réseau alternatif au pouvoir et à la communication institutionnelle, puisque « in the resistance and insurrection […] dual power created their own alternative media and developed new communicative practive » (p. XI)2.

  • 3 Le point central est la théorie de ce qui peut être dit […] par le langage et ce qui ne peut pas (...)

4Ludwig Wittgenstein a déclaré que « il punto centrale è la teoria di che cosa può essere detto mediante […] il linguaggio — e che cosa non può essere detto mediante una proposizione, ma solo mostrato3 » (Bompiani, 2000 : 7), voulant mettre en évidence la distinction entre ce qui peut être dit et ce qui peut être évoqué par le mot, en particulier la syntaxe, cet élément que Charles Baudelaire définit comme sorcellerie évocatrice. Le langage doit être considéré comme la première expression d’une technologie humaine et un instrument de révolution.

  • 4 Le progrès et le bien-être de l’humanité sont non seulement liés à la gestion efficace et efficient (...)

5La révolution naît d’un mouvement de sa propre conscience, de besoins sociaux ou circonstanciels qui, d’une certaine manière, requièrent une fracture permettant de donner une nouvelle vie et un flux différent aux événements communs. Historiquement, elle est souvent mise en avant par des élites hautement idéologiques, mais avec la digitalisation de la société, structure qui dépend de la communication et de l’information, on peut affirmer que « il progresso e il benessere dell’umanità hanno iniziato a essere, non soltanto collegati a, ma soprattutto dipendenti dall’efficace ed efficiente gestione del ciclo di vita dell’informazione4 » (Floridi, 2014 : 14) et, suivant ces perspectives, ce travail tente de démontrer comment les technologies de l’information et de la communication ont aidé l’éveil de la conscience collective.

  • 5 Les noms et les visages du nouvel esprit révolutionnaire dans les rues réelles et virtuelles (tradu (...)

6Le texte démontre comment la structure hybride d’Internet, des réseaux sociaux et de la communication numérique est devenue l’image miroir et la continuation des routes concrètes qui traversent nos villes et sur lesquelles se déroulent les marches pour les droits, qui se répandent dans les rues virtuelles du monde entier, alors que les activistes qui expérimentent la communication numérique sont « the names and the faces of the new revolutionary spirit in both real and virtual streets » (p. XIV)5.

7Les 14 auteurs abordent les médias sociaux comme un point de rupture crucial dans l’étude du concept de révolution. Sa nature dichotomique, c’est-à-dire réelle et virtuelle, n’aboutit pas à un choc des idées, mais à la complémentarité des différences, à la revigoration des marches et au soutien de la personne, ce qui influence le réel du virtuel grâce à un retournement nécessaire. Les six premiers auteurs ont refusé la révolution numérique par l’intermédiaire d’une approche de la science politique, de l’analyse de la structure du Web comme une « nouvelle commune » pour montrer comment les médias sociaux ont été actifs en matière de protestations/mouvements de résistance ; les autres mènent une discussion sur l’utilisation des nouveaux médias par les citoyens à partir d’une analyse plus sociologique touchant tous les aspects de la vie quotidienne.

  • 6 Un événement existentiel, une action à réaliser maintenant (traduction de l’auteur).

8La possibilité d’appliquer le concept de partenariat, exposé par Mikhaïl Bakounine, à des groupes d’hacktivistes Telecomix et Anonymous au Moyen-Orient (Chiara Livia Bernardi) pendant le printemps arabe souligne aussi la « renaissance » d’une vision anarchiste de la société et des relations interpersonnelles. La vision bakounienne de la révision institutionnelle de l’ordre et de la destruction devient applicable à la structure globale contemporaine et à la vision de la nature particulière des groupes hacktivistes, qui souhaitent défendre une certaine forme de liberté socialiste contre le capitalisme. De leur côté, Tommaso Gravante et Alice Poma conduisent une étude sur le mouvement des Indignés, choisissant le cas du camp de Séville. Leur intention est de montrer comment la manifestation, soutenue par les médias sociaux, peut augmenter de façon exponentielle le pouvoir des Indignés et leur capacité à éduquer les masses, en les transformant en sujets politiques actifs, grâce à l’union de la capacité individuelle et aux nouvelles technologies, où convergent dans les compétences collectives. Kudus Oluwatoyin Adebayo analyse pour sa part le mouvement Occupy Nigeria lors des affrontements de janvier 2012 en raison de la lutte pour les subventions pétrolières. L’article présente deux perspectives : d’un côté, l’organisation du groupe Occupy Nigeria Movement en mesure de stimuler une population locale fatiguée et incapable de se battre pour ses droits et, de l’autre, la capacité du groupe syndicaliste à provoquer involontairement le soulèvement social le plus important de l’histoire contemporaine du Nigeria. Abderrahim Chalfaouat, lui, étudie le printemps arabe au Maroc, décrivant l’expérience marocaine de 2011 qui a impliqué en particulier les plus jeunes dans la volonté d’exiger un changement politique construit à travers les plateformes, les sites, les canaux de communication et les espaces virtuels. La recherche montre qu’Internet a donné une large marge de liberté aux jeunes, mais a également souligné la nécessité d’intégrer et de renforcer l’utilisation de la technologie contre les institutions despotiques. Bariş Çoban, de son côté, étudie la réalité de la résistance au Gezi Park, qui montre comment ce nouveau mouvement social, grâce à l’utilisation des médias sociaux, a réussi à éveiller les jeunes passifs, en les transformant en un groupe politique capable de se mobiliser. Il ressort de l’étude que les valeurs du communisme n’ont pas disparu avec la fin de l’histoire, mais qu’elles sont encore une utopie active, « an event with existence, an action to be realized now » (p. 90)6. Enfin, Dana Florentina Nicolae, dans son étude de cas, établit une corrélation entre l’activisme social de rue dans le cas du massacre de chevaux sauvages dans le delta du Danube et sa propagation et sa diffusion à travers la page Facebook qui lui est dédiée.

9Le deuxième groupe d’articles se concentre sur les aspects sociologiques de nature générale. Ilona Biernacka-Ligieza s’appuie sur le concept de participation, en tant qu’élément central du processus de démocratisation, qui trouve dans les technologies de l’information et de la communication une aide considérable pour sa diffusion. Pour sa part, Alan Steinberg compare l’adhésion politique classique à l’adhésion virtuelle, en analysant les facteurs socioéconomiques et la curiosité politique à travers trois directions différentes de la participation : traditionnelle, en ligne et cybernétique. De son côté, Simona Stano présente une discussion sur l’étude des blogues, conçus comme l’une des innovations technologiques les plus importantes capables non seulement de changer l’univers numérique, mais aussi de faciliter la recherche et la disséminationdes informations journalistiques. Dans sa contribution, Ana Viñals Blanco veut comprendre, à partir de l’étude des technologies de l’information et de la communication, les répercussions et les changements qui ont touché le secteur des loisirs. Shahriar Kabir, lui, part de deux catégories socioéconomiques, celle du capitalisme et celle du voyeurisme, pour analyser l’influence de Facebook sur la formation et la « présentation » de son identité à travers le réseau social. Anna Rita Popoli, pour sa part, analyse en profondeur les responsabilités légales, selon la perspective de la juridiction italienne, applicables aux dirigeants de Google à cause des vidéos mises en ligne sur la plateforme YouTube. Les deux derniers articles (Magda Pischetola ainsi que Carolina Duek et Gastón Tourn) observent d’un point de vue sociologique les répercussions des nouvelles technologies sur les pratiques éducatives, créatives et exemplaires auprès des jeunes.

10En conclusion, l’ouvrage est un excellent moyen pour comprendre le pouvoir des médias sociaux en tant qu’outil de propagande politique, dynamisant l’implication des masses et des jeunes, comme un pont pour surmonter le vide des régimes despotiques ou autoritaires. D’autre part, il a l’intention d’illustrer les changements qu’ils ont apportés dans la vie quotidienne du citoyen et de la personne d’un point de vue social, économique, juridique et éducatif. La collection chorale offre différentes perspectives culturelles, grâce à la polyvalence des études et des outils, mais aussi en raison des origines diverses des auteurs. L’ouvrage est accessible aux plus jeunes (lycéens) qui ont une bonne connaissance de la société et de ses aspects changeants, mais plus particulièrement aux étudiants universitaires et aux chercheurs qui veulent approfondir ces aspects.

Haut de page

Bibliographie

BOBBIO, Norberto (1955), Politica e cultura, Torino, Einaudi.

CASTELLS, Manuel (2001), The Internet Galaxy, Reflections on the Internet, Business and Society, Oxford, Oxford University Press.

ÇOBAN, Bariş (2016), Social Media and Social Movements, Lanham, Lexington Books.

FLORIDI, Luciano (2014), The Fourth Revolution: How the Infosphere is Reshaping Human Reality, Oxford, Oxford University Press.

FUKUYAMA, Francis (1992), La fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Flammarion.

HAN, Byung-Chul (2015), Nello sciame. Visioni del digitale, Roma, Nottetempo.

MANNHEIM, Karl (1957), Ideologia e utopia, Bologna, Il Mulino.

MONK, Ray (2000), Wittgenstein. Il dovere del genio, Milano, Bompiani.

SIMONE, Raffaele (2012), Presi nella rete, Milano, Garzanti.

Haut de page

Notes

1 La révolution des médias sociaux […] qui se construit et se fait voir dans la rue (traduction de l’auteur).

2 Dans la résistance et l’insurrection […] les deux puissances ont créé leurs propres médias alternatifs et développé de nouvelles pratiques communicatives (traduction de l’auteur).

3 Le point central est la théorie de ce qui peut être dit […] par le langage et ce qui ne peut pas être dit par une proposition, mais seulement montré (traduction de l’auteur).

4 Le progrès et le bien-être de l’humanité sont non seulement liés à la gestion efficace et efficiente du cycle de vie de l’information, mais surtout ils en sont dépendants (traduction de l’auteur).

5 Les noms et les visages du nouvel esprit révolutionnaire dans les rues réelles et virtuelles (traduction de l’auteur).

6 Un événement existentiel, une action à réaliser maintenant (traduction de l’auteur).

Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Edmondo Grassi, « Bariş ÇOBAN (dir.) (2017), Social Media and Social Movements: The Transformation of Communication Patterns »Communication [En ligne], vol. 36/1 | 2019, mis en ligne le 16 avril 2019, consulté le 19 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/communication/9613 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/communication.9613

Haut de page

Auteur

Edmondo Grassi

Edmondo Grassi est doctorant en théorie et recherche sociale au Département des sciences de la formation à l’Université Roma Tre. Courriel : edmondo.grassi@uniroma3.it

Articles du même auteur

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search