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Lectures

Simon NGONO (dir.) (2022), L’économie des médias et le numérique en Afrique

Saint-Denis, Presses universitaires Indianocéaniques
Khaled Zamoum
Référence(s) :

Simon NGONO (dir.) (2022), L’économie des médias et le numérique en Afrique, Saint-Denis, Presses universitaires Indianocéaniques

Texte intégral

1Cet ouvrage collectif dirigé par Simon Ngono comprend huit chapitres répartis en trois parties, comme suit : reconfigurations des logiques d’organisation, de production et de diffusion des médias classiques à l’ère numérique, stratégies de déploiement en ligne et modèles d’affaires émergents des médias classiques et, enfin, pratiques et économie de survie de l’activité de production et de vente de journaux à l’ère numérique.

2La première partie, « Identification de fait, vérification, collecte des données et des images, production de texte et distribution de contenu » (p. 32), est consacrée à l’impact du numérique sur les modes de production et d’organisation des médias traditionnels, notamment au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire. Il est question, dans ces pays, du journalisme électronique ayant conduit à l’emploi de nouveaux moyens de communication et d’information basés sur les téléphones intelligents et les blocs. De fait, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso, le téléphone intelligent est devenu le moyen principal d’accès à l’information aussi bien pour les journalistes que pour le grand public (p. 33).

3Dans le domaine audiovisuel, un chapitre est consacré à l’impact du numérique sur la télévision publique congolaise Télé-Congo, qui a relativement profité de la numérisation pour combler une partie de son déficit budgétaire dû à des difficultés économiques et au manque de moyens financiers. Grâce à la numérisation et aux réseaux sociaux, le budget de production des programmes de Télé-Congo a été réduit de 70 % et celui de la diffusion des programmes de 47 %, d’autant plus qu’elle s’appuie sur une chaîne numérique YouTube.

De plus, Internet permet à Télé-Congo

de faire la recherche, la vérification et la collecte des informations sur les lieux de travail sans faire le moindre déplacement. De même qu’Internet permet de se connecter sur les réseaux socio-numériques qui à leur tour permettent de faire des directs et de transmettre des vidéos, des images et des sons des lieux de tournage vers la rédaction. Ces opérations permettent de réduire considérablement le nombre d’intervenants dans le processus de collecte de l’information (p. 59).

4La deuxième partie de ce livre est réservée à l’étude des modes organisationnels et informationnels de deux groupes médiatiques, l’un sénégalais (Groupe Future Médias) et l’autre ivoirien (Groupe Olympe). Ceux-ci ont développé une stratégie commerciale et médiatique leur permettant d’assurer leur financement.

5Pour assurer le libre accès aux contenus électroniques (la gratuité des contenus), les deux groupes ont misé sur la publicité, sur la couverture spéciale de l’actualité pour les institutions et les entreprises publiques et privées ainsi que sur un abonnement payant permettant d’accéder à des articles de la presse écrite.

6La troisième partie de cet ouvrage traite de la réalité socioprofessionnelle des journalistes de la presse électronique privée au Cameroun. Il faut noter que la baisse des ventes de la presse écrite et le manque de moyens financiers ont poussé de nombreux journalistes à travailler dans les journaux électroniques, ce qui constitue pour eux une occasion d’améliorer leurs revenus. Grâce à Internet, certains journalistes qui travaillaient auparavant dans des journaux sont devenus propriétaires de pages d’informations électroniques ou de sites Web d’information. Cela constitue un changement majeur d’un point de vue professionnel et socioéconomique. Il faut remarquer que cette transition vers le journalisme électronique exige un grand effort de la part du journaliste pour fournir un contenu d’intérêt pour le public.

7Dans le même contexte, l’étude consacrée à l’évolution du modèle économique de la presse écrite en Côte d’Ivoire, intitulée « Quand les méventes record font bouger les lignes. Péripéties économiques des journaux ivoiriens à l’ère d’Internet », démontre

[qu’]en raison de contraintes financières liées au coût de l’impression, des éditeurs optent pour une nouvelle configuration inédite dans le paysage médiatique ivoirien : imprimer la version papier du journal une ou deux fois dans la semaine, et paraissent les autres journées uniquement en version électronique. C’est le cas par exemple de titres comme Le Sursaut, Générations Nouvelles et Aujourd’hui. Cette tactique leur offre l’avantage de réaliser des économies conséquentes sur leurs dépenses d’impression. Toutefois, en adoptant cette nouvelle orientation, la plupart des éditeurs ne songent pas à s’installer définitivement sur le web ni à sonner le glas du journal papier. Selon eux, migrer définitivement sur le web, c’est courir le risque de perdre en visibilité. Ici, le journal papier représente plus que jamais un instrument d’influence et de positionnement vis-à-vis des pouvoirs publics (p. 178-179).

8Dans le dernier chapitre du livre, « Périr ou se (ré) inventer, la presse ivoirienne face au défi économique à l’ère d’Internet et des réseaux socionumériques », l’accent est mis sur la situation de la presse écrite en Côte d’Ivoire, qui a été affectée par l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, le faible coût des ordinateurs et l’utilisation par le public des réseaux sociaux comme source principale d’information, ce qui a contribué, avec d’autres facteurs, à la baisse des ventes de la presse écrite.

9Par conséquent, le secteur de la presse est tenu de chercher des solutions et des moyens pour s’adapter aux changements et au développement numérique, y compris en répondant aux besoins du public par une offre de contenu qui correspond à ses attentes.

Commentaire

10À partir d’une approche pluridisciplinaire et de méthodes empiriques de recherche en sciences de l’information et de la communication, ce livre aborde la problématique de l’usage du numérique dans les médias dans certains pays africains comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Congo et le Burkina Faso.

11Les résultats de cet ouvrage confirment que cette technologie exige un changement profond des structures liées à la production et à la diffusion des informations ainsi que des modes de communication et d’interaction avec le public.

12Malgré l’analyse critique, ce livre n’aborde pas certaines questions liées à l’usage de la technologie numérique telles que les aspects éthiques, législatifs et juridiques qui pourraient influencer l’usage et le développement de cette technologie dans le domaine médiatique. De plus, cet ouvrage ne met pas l’accent sur l’importance et la nécessité de la formation des journalistes sur l’usage du numérique dans leurs activités professionnelles.

13Bien que ce livre tente de décrire et de présenter de manière exhaustive la question de l’usage de la technologie numérique dans le domaine des médias, il néglige l’aspect important de ce sujet, à savoir le rôle des gouvernements et des organismes officiels dans la mise en œuvre des politiques et des stratégies d’usage du numérique, et dans la promulgation de législations appropriées En effet, le succès de l’expérience de la transition vers la numérisation dans les médias africains n’est pas lié uniquement aux efforts des institutions médiatiques publiques ou privées ou des grands groupes de médias locaux, mais nécessite une vision et une stratégie à long terme de la part des États et des gouvernements en collaboration avec la corporation des journalistes.

14De plus, ce livre ne fait pas référence à l’importance et aux rôles des partenariats et de la coopération à l’échelle locale, régionale et internationale dans la numérisation des médias en Afrique. D’autant plus que l’UNESCO a des programmes pour soutenir la transformation numérique dans le domaine des médias en Afrique, comme c’est le cas aussi de l’Union africaine des télécommunications et de l’Organisation internationale de la Francophonie.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Khaled Zamoum, « Simon NGONO (dir.) (2022), L’économie des médias et le numérique en Afrique »Communication [En ligne], Vol. 40/1 | 2023, mis en ligne le 28 août 2023, consulté le 06 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/communication/17593 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/communication.17593

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Auteur

Khaled Zamoum

Khaled Zamoum est professeur associé à la Faculté de communication, University of Sharjah, Émirats arabes unis. Courriel : kzamoum@sharjah.ac.ae

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