Jean-Philippe DE OLIVEIRA (2020), Organisations & communication. Les enjeux de la com’ en contexte néolibéral
Jean-Philippe DE OLIVEIRA (2020), Organisations & communication. Les enjeux de la com’ en contexte néolibéral, Paris, L’Harmattan, Édition Campus Ouvert
Texte intégral
- 1 Cet ouvrage s’appuie sur un cours donné à des étudiants de Master 1 en 2016-2017 au sein du Départe (...)
1D’entrée de jeu, l’auteur précise que « le terme d’organisation englobe aussi bien les entreprises, que les institutions publiques, politiques et administratives et les organismes du secteur associatif quel qu’en soit l’objet (culturel, cultuel, social ou économique) » (p. 7). L’ouvrage1 qu’il propose sur ce sujet comprend trois parties : la première se concentre sur les entreprises du secteur privé ; la deuxième porte sur les organisations publiques et leur action ; et la troisième aborde la société civile et associative.
2La première partie de l’ouvrage, d’une part, donne un aperçu du développement de l’entreprise dans le contexte capitaliste et, d’autre part, insiste sur le fait que le capitalisme s’appuie sur la communication « pour s’adapter aux tendances sociétales, intégrer les revendications des consommateurs ou les critiques des citoyens » et pour « légitimer et […] pérenniser les normes du capitalisme qui vont dans le sens des intérêts privés des entreprises » (p. 19). L’auteur démontre que l’enjeu de la communication d’entreprise n’est pas uniquement de « vendre », mais aussi de « faire savoir » qu’elle participe au maintien du social et qu’elle s’adapte aux valeurs de la société (p. 45). Elle serait de plus en plus attentive aux besoins « sociaux locaux » et participerait ainsi activement dans l’espace public.
3Dans la deuxième partie de son ouvrage, l’auteur examine d’abord plusieurs notions liant la communication à l’action publique telles que le cadre légitimant de l’action publique, l’opinion publique comme source de légitimation, la communication publique en France et les campagnes dites d’« intérêt général ». Ensuite, il s’intéresse plus particulièrement aux fondements de la légitimité des acteurs politiques qu’il définit comme étant
le caractère de ce qui est accepté par l’ensemble d’individus (ici, les citoyens) en termes de règles mais également en ce qui concerne leur modalité d’application et les agents en charge de les faire respecter […] Dans une société démocratique, la légitimité des acteurs politiques à gouverner relève du vote démocratique selon les principes de la Constitution adoptée dans le pays et des règlements électoraux (p. 48).
4Ce qui implique que l’État doit légitimer, d’une part, ses domaines d’intervention et ses objectifs et, d’autre part, les instruments mobilisés pour atteindre ces objectifs. La légitimité des acteurs politiques et des organisations publiques s’appuie sur l’expertise, l’opinion publique, les spécificités culturelles et sociétales, les valeurs et les normes ainsi qu’une « acceptabilité sociale ».
5Quand une décision fait appel à des expertises mais n’obtient pas l’acceptabilité sociale et devient alors l’objet de controverses, les pouvoirs publics peuvent « sonder » l’opinion publique pour légitimer leur prise de position. C’est le cas, en particulier, des décisions qui font courir des risques liés à des avancées scientifiques et techniques. D’ailleurs, l’un des grands défis « de la com’ publique » dans les prises de décisions « légitimées » est de trouver le juste milieu entre les intérêts publics et les intérêts politiques. C’est dans cette recherche d’équilibre qu’interviennent un ensemble de supports discursifs et visuels qui permettent de valoriser les décisions des acteurs dans la continuité de la communication politique de l’État.
6La troisième et dernière partie de cet ouvrage est consacrée à la société civile représentée par les associations et les organisations non gouvernementales qui, dès les années 1980, se sont approprié les outils de communication pour intervenir dans l’espace public et y jouer un rôle important. La société civile, de plus en plus organisée en marge des acteurs politiques et économiques, participe au débat et à la politisation des questions sociétales en réactualisant les relations entre l’État et les citoyens. Cette réactualisation est susceptible de conduire l’État à adopter des modalités de concertation qui peuvent s’apparenter à un enrôlement des acteurs de la société civile dans des processus de décision visant à affaiblir la portée de leurs actions tout en les asservissant à des logiques et attentes néolibérales.
7Cet ouvrage a trois grands mérites. D’abord, il analyse, d’une manière objective et pédagogique, des enjeux propres à la communication des organisations en prenant appui sur un ensemble de théories, d’exemples, d’illustrations et de documentations. Cependant, certains enjeux sont absents, dont la gestion de la communication de crise en interne et en externe, le rôle de la transparence dans la gestion de la communication des organisations publiques et la communication organisationnelle en interne et en externe. Ensuite, l’ouvrage cible certains types d’organisations — les entreprises privées, les institutions publiques, politiques et administratives et les organismes du secteur associatif —, mais il passe sous silence les entreprises semi-publiques ainsi que les organisations actives dans la sphère virtuelle (électronique). Finalement, ce travail présente d’une manière approfondie, structurée et documentée les campagnes d’intérêt général, même s’il n’aborde pas les campagnes publicitaires qui sont utilisées, surtout par les organisations privées, à des fins commerciales ni les campagnes politiques qui sont employées par des organisations et institutions politiques et publiques.
8Il reste que le développement des nouvelles technologies et des nouvelles formes de gouvernance électronique (e-gouvernance), notamment par le biais des réseaux sociaux et des sites Web d’entreprises, ont bouleversé les stratégies de communication, la gestion de l’information, les campagnes de sensibilisation et la prise de décisions de plusieurs organisations. De cette situation émerge l’importance d’examiner, comme le fait l’auteur, les nouveaux « enjeux de la com’ en contexte néolibéral ».
Notes
1 Cet ouvrage s’appuie sur un cours donné à des étudiants de Master 1 en 2016-2017 au sein du Département d’information et communication de l’Université Grenoble Alpes
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Référence électronique
Khaled Zamoum, « Jean-Philippe DE OLIVEIRA (2020), Organisations & communication. Les enjeux de la com’ en contexte néolibéral », Communication [En ligne], vol. 39/1 | 2022, mis en ligne le 06 juillet 2022, consulté le 19 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/communication/14939 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/communication.14939
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