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Recherches

Musique et cosmopolitisme culturel chez les jeunes

Gilles Pronovost, Marie-Claude Lapointe et Anne-Sophie Prévost

Résumés

Les auteurs mènent présentement un projet de recherche portant sur le cosmopolitisme culturel chez les jeunes. L'un des thèmes retenus dans leur recherche porte sur les habitudes d'écoute de la musique et s’appuie sur un corpus d’entretiens réalisés auprès d’une cinquantaine de jeunes âgés entre 16 et 29 ans. Après avoir décrit les diverses modalités d'écoute de la musique, les préférences, les goûts, les rejets ou non de certains genres musicaux, ils se demandent ce que peuvent bien traduire la diversité de leurs intérêts musicaux et son omniprésence dans leur vie quotidienne.

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Texte intégral

1Les auteurs mènent présentement un projet de recherche portant sur le cosmopolitisme culturel chez les jeunes. L'un des thèmes retenus dans leur recherche porte sur les habitudes d'écoute de la musique et s’appuie sur un corpus d’entretiens réalisés auprès d’une cinquantaine de jeunes âgés entre 16 et 29 ans. Après avoir décrit les diverses modalités d'écoute de la musique, les préférences, les goûts, les rejets ou non de certains genres musicaux, ils se demandent ce que peuvent bien traduire la diversité de leurs intérêts musicaux et son omniprésence dans leur vie quotidienne.

  • 1 Statistique Canada, Enquête sociale générale de 2015, cycle 29 sur l’emploi du temps, fichier de do (...)

2Les études portant sur l’emploi du temps indiquent qu’en 2015, l’écoute de la musique enregistrée représentait à peine quelques minutes par jour à titre d’activité principale, ce qui signifie que l’on écoute rarement de la musique pour elle-même, en étant attentif au contenu. En fait, une fraction négligeable de la population — moins de 0,01 % — mentionne l’écoute de la musique comme l’une de ses activités culturelles de la journée. Par contre, à titre d’activité complémentaire, simultanément à une autre activité, le temps d’écoute dépasse cinq heures par jour ! Il s’agit en fait de la plus importante activité quotidienne pratiquée en conjugaison avec une autre1. Mais qu’est-ce qui est écouté et selon quelles modalités ?

  • 2 La littérature sur le cosmopolitisme est considérable. Nous ne pouvons ici procéder à une revue de (...)

3Nous menons présentement un projet de recherche portant sur le cosmopolitisme culturel chez les jeunes. De façon générale, une orientation cosmopolite dans le champ culturel suppose que l’on est en présence d’un trait plus ou moins fort d’ouverture et de sensibilité à des différences culturelles. Cette orientation suppose aussi, à des degrés divers, une certaine capacité à dépasser sa propre culture, y compris éventuellement un sentiment d’appartenance à une même communauté humaine2. L’un des thèmes retenus dans notre recherche porte précisément sur les habitudes d’écoute de la musique ; il constituera le filon que nous emprunterons pour aborder ces questions. Après avoir décrit les diverses modalités d’écoute de la musique chez les jeunes, les préférences, les goûts, les rejets ou non de certains genres musicaux, nous nous demanderons ce que peuvent bien traduire la diversité de leurs goûts musicaux et son omniprésence de la musique dans leur vie quotidienne, de quelle manière leurs pratiques musicales interposées en font ou non des adeptes d’un « monde cosmopolite » (Cicchelli, 2016).

Aspects méthodologiques

4Dans le cadre de cette recherche portant sur le cosmopolitisme culturel chez les jeunes, nous avons mené entre octobre 2017 et juillet 2018 50 entrevues auprès de jeunes Québécois âgés de 16 à 29 ans, venant d’une quinzaine de villes différentes du Québec. La moyenne d’âge du corpus est de 22 ans, la majorité a moins de 25 ans. Une quinzaine de participants est en emploi ; les deux tiers, qui sont aux études au cégep ou à l’université, alternent études et travail à temps partiel.

5Ceux-ci ont été recrutés de manière classique : nous avons activé nos contacts dans diverses régions et nous avons également recruté des participants sur recommandation de l’un ou l’autre informateur. Les entretiens étaient assez courts, entre 20 et 30 minutes. Les principaux thèmes étaient les habitudes de voyage, les habitudes d’écoute de la musique, de la télévision, des séries télévisées, la lecture ou non de journaux ou de livres en langue étrangère, la présence ou non de contacts sociaux à l’étranger. Nous avons cherché à diversifier nos informateurs de manière à pouvoir donner une image la plus étendue possible des situations que l’on pouvait observer. Comme indiqué, le texte s’en tient uniquement aux habitudes musicales.

Tableau 1. Caractéristiques de l’échantillon

Tableau 1. Caractéristiques de l’échantillon

6Notre objectif était de procéder à une première incursion dans l’univers musical des jeunes. Nous avons dirigé nos efforts vers le recueil de la plus grande diversité possible de situations relatives aux rapports des jeunes à la musique : styles de musique préférés et justifications données, modalités d’écoute, évolution des goûts musicaux, partage de champs d’intérêt, etc. Comme dans le cas de toute démarche qualitative, nous ne prétendons pas à un corpus dit représentatif comme le serait un échantillon important réalisé dans le cadre d’un sondage à l’échelle du Québec par exemple. Notre critère premier était la diversité des situations et des rapports à la musique. Notre démarche est qualitative et non quantitative. On peut cependant penser que certains résultats sont transférables à d’autres groupes dans la mesure où nous pouvons en arriver à décrire des cheminements, des trajectoires et des processus plus généraux sous-jacents : tel est le sens de notre démarche et de la synthèse que nous proposons dans ce texte.

  • 3 Projet de recherche subventionné par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les e (...)

7Précisons que notre corpus aborde de nombreux autres aspects du mode de vie des jeunes dans leurs rapports au cosmopolitisme culturel : voyages et imaginaires du voyage, habitudes de lecture, intérêt pour les séries télévisées, tout particulièrement. L’analyse qui suit s’en tient aux seules pratiques musicales, même si à quelques reprises nous ferons le lien avec ces autres aspects3.

Écouter beaucoup de musique

8Déjà au début du XXe siècle, Igor Stravinsky se plaignait de la diffusion de la musique à la radio, y voyant une forme de dégénérescence culturelle. Il rejetait clairement cette omniprésence de la musique, à la radio, en porte-à-faux avec l’attitude des jeunes d’aujourd’hui :

La radio porte aujourd’hui à toute heure du jour et de la nuit la musique à domicile. Elle dispense l’auditeur de tout autre effort que celui de tourner un bouton. Or le sens musical ne peut s’acquérir ni se développer sans exercice. En musique comme en toute chose l’inactivité mène peu à peu à l’ankylose, à l’atrophie de facultés. Ainsi entendue, la musique devient une sorte de stupéfiant qui loin de stimuler l’esprit le paralyse et l’abrutit. En sorte que la même entreprise qui tend à faire aimer la musique en la diffusant toujours davantage, n’obtient souvent pour résultat que d’en faire perdre l’appétit à ceux-là mêmes dont elle voulait éveiller l’intérêt et développer le goût (cité dans Toudoire-Surlapierre et Lécroart, 2015, p. 24).

9Car rares sont les jeunes que nous avons interrogés qui ne se disent pas amateurs de musique, telle cette étudiante universitaire de 20 ans dont le téléphone ne contient pas de musique enregistrée et qui déclare : « J’suis pas très musique » (327). Les discours des participants concordent plutôt avec les propos de Ravet, selon qui la musique est notamment « ce refrain qui nous accompagne au quotidien, un air, une chanson, le thème d’une symphonie. Et tout le monde, ou presque, en entend chaque jour, en discute avec d’autres souvent » (2010, p. 272). Ainsi cette étudiante de 23 ans (321) explique-t-elle qu’il y a toujours de la musique qui joue sur sa télévision ou dans sa voiture lors de déplacements, mais que « c’est plus de même dans l’air », sans constituer une activité à elle seule. Si certains reconnaissent des hauts et des bas dans l’intensité de leur écoute, souvent sous l’influence de contraintes scolaires ou de leur travail, parfois de leurs responsabilités parentales, la musique est pratiquement toujours au rendez-vous. Ils sont des auditeurs invétérés. La musique avant toute chose, ce n’est nullement une caractéristique de l’art poétique comme le demandait Paul Verlaine, mais bien un trait de la vie quotidienne de certains de nos participants, découplée, comme on le verra, de son contenu langagier. La « musicalisation de la vie quotidienne » est un trait marquant de la fin du XXe siècle (Donnat, 2009) et ne fait que se renforcer, comme c’est le cas pour la vaste majorité des jeunes rencontrés.

Écouter de tout

10Qu’écoutent-ils ? La réponse qui vient spontanément est celle-ci : « J’écoute de tout ». « J’écoute tout le temps de la musique. Mais pas un genre en particulier », nous dit cette jeune collégienne de 18 ans (102). Ce garçon renchérit : « J’écoute de tout. Vraiment de tout » (107). « Je suis connue pour la fille qui n’a pas de goût musical, qui n’a pas de goût précis », avoue candidement cette autre, incapable, ajoute-t-elle, de « se brancher » (103). D’autres témoignages vont dans le même sens. Chez les jeunes de notre corpus, l’éclectisme est une norme répandue. « C’est impossible d’aimer juste un genre de musique, pour moi en tout cas, impossible » (103). Selon leurs propos, les jeunes paraissent ouverts, parfois peu sélectifs, à l’affût des nouvelles tendances tout en écoutant parfois de la « vieille » musique.

11Comme le rapporte Maisonneuve,

[d]écouvrir de nouvelles musiques, morceaux, musicien-ne-s, performances ou « sons » est une préoccupation, ou du moins une aspiration, constante des amateurs. La recherche insatiable de nouveauté traduit le désir de renouveler les expériences musicales, principal moteur de la dynamique du goût et de l’attachement à la musique (2019, p. 51).

12Une participante mentionne qu’elle a toujours aimé tous les genres musicaux et que puisque ses parents ont des goûts confinés selon elle, cette ouverture ne vient pas d’eux. Elle visite plusieurs plateformes pour découvrir des genres et des chansons. Le cas de cette jeune fille pour qui les découvertes n’ont pas été satisfaisantes en témoigne, elle qui déclare qu’à l’école secondaire, elle écoutait la musique populaire du moment, mais qu’elle est revenue à la musique qu’elle écoutait lorsqu’elle était encore plus jeune, à la musique qui avait un sens pour elle (206).

13Telle est donc une réponse spontanée que l’on retrouve dans notre corpus. Elle n’est pas propre à cette génération d’ailleurs, car on la retrouve également dans le discours que tiennent des artistes eux-mêmes, voire des adultes d’aujourd’hui.

14On remarque aussi que des jeunes rencontrés ajoutent des genres et des artistes à leur répertoire, sans jamais (ou presque) délaisser ceux qui y figurent depuis plus longtemps. On assiste donc à un cumul des goûts, qui peuvent être assez variables. La concurrence des divertissements populaires (Peterson, 2004) n’est peut-être pas étrangère à ce phénomène. En outre, le récent déplacement des pratiques culturelles vers l’audiovisuel et les nouvelles technologies de l’information et des communications contribuent

d’une part, à l’assise d’un nouveau régime de participation culturelle, et, d’autre part, à l’amenuisement de l’indignité culturelle des moins bien dotés en capital culturel ainsi qu’à la décomplexion des classes populaires qui, de fait, partagent un minimum culturel et quelques goûts avec une part de plus en plus importante de la population (Granjon et Bergé, 2005, p. 58).

Écouter de tout, mais…

15Une fois cette première image transmise, quelques restrictions sont néanmoins rapportées dès que plus de précisions sont demandées. Écouter de tout ne signifie pas que l’on écoute vraiment de tout ni dans les mêmes proportions. Des préférences ou des habitudes d’écoute émergent à la suite de la réponse spontanée. Il n’y a pas unanimité pour les genres délaissés, voire rejetés. Pour certains, ce sera la musique qualifiée de « classique ». Si des jeunes expriment leur préférence pour le rap ou le heavy metal et déclarent en écouter régulièrement, d’autres le rejettent explicitement, comme cette collégienne : « Quand la musique est plus du bruit que de la musique, on dirait que ça te frappe dessus, que c’est plus violent, et qu’on ne comprend pas les paroles parce que ça crie trop, ça je n’aime pas ça » (102). Sans que cela soit toujours très explicite, il se forme parfois des « communautés d’intérêts » autour de certains genres musicaux, que l’on s’échange et se communique. D’autres deviennent membres de fan club, comme c’est le cas de ce jeune homme (106) qui retrouve d’autres amis fans de Céline Dion et a déjà voyagé pour assister à ses spectacles.

L’influence des algorithmes

16Une telle attitude se traduit également par le fait que pour des jeunes, les choix du moment ne sont pas vraiment tranchés. Sans que ce soit une règle absolue, car des participants tiennent aussi des propos différents et plus nuancés, des jeunes se laissent guider par les listes de lecture, au gré des suggestions des algorithmes :

Maintenant avec les applications de musique, tu n’as pas vraiment à te forcer pour décider quoi écouter, t’as juste à appuyer sur play et eux autres vont te recommander des trucs (208).

Y’a des playlists pour toute sorte de moods, ajoute cette autre, donc des fois c’est plus simple d’aller là-dessus que de chercher dans ton iPod (109).

17En toute connaissance de cause, on écoute de tout, souvent au gré des suggestions des algorithmes. L’un d’entre eux avoue même qu’il devient difficile de savoir ce qu’il écoute vraiment, « c’est un peu dur à dire maintenant ce qu’on écoute » (208). Cette autre explique comment les algorithmes lui permettent de faire des découvertes :

Chez nous, je mets une playlist, par exemple « musique d’ambiance ». Ce ne sont pas nécessairement toutes des chansons que j’aime mais si j’en aime une plus particulièrement, je vais l’ajouter, je vais aller m’informer sur le groupe, je vais aller chercher et découvrir que j’aime peut-être une autre chanson, sur Apple Music. Alors ces suggestions peuvent m’influencer. Je peux accrocher sur une toune (316).

Être soi malgré les influences

18Et pourtant, on affirme sa liberté de choix : « J’écoute ce dont j’ai envie, quand j’en ai envie », précise cet étudiant universitaire de 23 ans (322). Bien que les jeunes rencontrés admettent être influencés dans leur choix par leurs parents, leurs amis, leurs conjoints, etc., leur écoute traduit cette volonté de ne rien céder de la liberté de choisir. Dans ces cas, « [l]a question de la fiabilité de l’autre (de la confiance qui lui est attribuable) est cruciale pour réduire l’incertitude de la découverte » (Maisonneuve, 2019, p. 57). Une jeune fille rencontrée déclare d’ailleurs qu’elle et une amie bâtissent des listes de lecture et se les échangent, sur une base mensuelle. Elle dit toujours faire de belles découvertes, elle est certaine d’aimer des pièces, car ces deux amies connaissent leurs goûts respectifs et les partagent. La reconnaissance de ces influences ne garantit cependant pas la prescription, comme le montre l’exemple de ce jeune homme qui a accepté des billets d’un ami pour aller voir le spectacle d’un groupe qu’il ne connaissait pas. Il a dit avoir aimé, mais a ajouté du même souffle qu’il aurait aussi pu en arriver à un jugement contraire, se déclarant maître de ses goûts. Des jeunes rencontrés se montrent ouverts à la découverte et reconnaissent des sources d’influence, mais ils soutiennent se garder le dernier mot.

19Dans ses travaux, Maisonneuve explique l’importance des relations interpersonnelles dans les choix musicaux :

La musique est, aujourd’hui, étroitement associée à des expériences partagées et est une composante importante de la construction identitaire. Elle est donc très fortement attachée à des figures de proches, parents (mère, oncle, grande sœur) puis pairs (amis). Les premiers sont généralement associés à des goûts originels, à des souvenirs et à des musiques à la valeur affective et mémorielle forte, tout comme à un répertoire relativement figé (mais qui peut apporter des découvertes, par contiguïté), tandis que les seconds sont plus associés à l’affirmation de soi, à l’autonomie (relative, car il y a toujours recommandation), au renouvellement (2009, p. 64).

20Les diverses sources d’influence jouent donc des rôles différents et suggèrent un possible cheminement en constante évolution.

21De plus, ce refus de choix définitifs — par-delà, il faut le préciser, leurs préférences du moment en matière de genre musical ou de vedettes — laisse entendre sinon quelque relativisme culturel, certainement des goûts culturels qui mettent l’accent sur l’hybridation, les mélanges de styles, une ouverture réelle à la diversité culturelle, avec l’obligation de ne jamais trahir ses propres choix. Ainsi cette participante de 23 ans, en voyage en Australie au moment de l’entretien, affirme-t-elle « aller chercher elle-même » ce qui lui ressemble (314), tandis qu’une autre dit que la musique « vient à [elle] » (301). Par-delà l’éclectisme ou le pilotage guidé par les listes automatiques, des jeunes s’identifient à leurs choix musicaux. Créer des listes de lecture pour différents passages de sa vie ou selon ses humeurs est « une forme de production d’une image de son propre goût » (Maisonneuve, 2012, p. 85). Écouter de tout, même guidé par les algorithmes, c’est paradoxalement s’affirmer libre dans ses choix, en faire une marque de sa personnalité, puisque l’on affirme garder le contrôle des styles préférés, des émotions recherchées et des conditions d’écoute. Le style du moment est perçu comme traduisant un état et, parfois, un trait de personnalité.

22D’autant plus que les choix musicaux sont présentés par des jeunes comme étant à l’image de « soi-même », que le genre musical refléterait le « moi », dont un trait fort de leur « jeunesse » : « Je vais toujours tenter d’être jeune », déclare un cégépien, « et ça passe par la musique » (208). Se laisser guider par le hasard, partir à l’aventure de découvertes musicales même éphémères, c’est donner de soi une représentation positive, ouverte, jeune, alerte et mobile.

Classer et accorder du sens

23Si la réponse spontanée des jeunes est d’abord qu’ils écoutent de tout, des préférences et des exclusions émergent plus ou moins spontanément. Certains jeunes de notre corpus se démarquent par leur capacité à établir des distinctions plus nettes entre les genres, voire à les classer selon leurs préférences. Par exemple, le hasard n’est pas toujours la règle ; l’écoute issue des algorithmes n’empêche pas la construction de listes de lecture de même qu’une recherche active de chansons ou de genres qui plaisent, souvent partagée avec les pairs. Pour d’autres, classer se révèle plus ardu, voire sans importance.

Genres et sous-genres

24Une difficulté rencontrée par des participants à notre étude consiste à délimiter les genres et les sous-genres musicaux : rap, indie, new wave, country, etc., le vocabulaire est touffu et généralement imprécis. Certains sont même incapables de nommer les artistes qu’ils écoutent et admettent ne pas être en mesure d’identifier les genres musicaux qu’ils aiment ou pas : « Je ne sais pas comment appeler mes genres de musique », déclare celle-ci (301). Force est d’admettre que les catégories sont changeantes et n’ont pas la même signification pour tout le monde. D’autres refusent de catégoriser la musique écoutée.

25Certains manifestent une certaine habileté à étiqueter des sous-genres de manière négative afin de mieux faire ressortir leurs préférences. Ainsi une certaine musique « country » sera-t-elle qualifiée de « quétaine » (démodée, de mauvais goût) au profit du choix assumé de « new country » (304). D’autres procéderont au choix ou à la disqualification en bloc d’un genre, par exemple le rap, alors que d’autres encore distingueront le rap en français du rap en anglais.

26Certains vont plutôt associer leurs goûts et préférences à un ou plusieurs groupes musicaux ou encore à des groupes nationaux. Celui-ci (202) mentionne sa préférence pour des artistes australiens, cet autre (211) découvre des chanteurs de Nouvelle-Zélande même si les deux styles sont parfois confondus. On définira encore un genre par sa langue (ex. : espagnol) ou encore par une vague référence historique ou temporelle (vieux rock, new country).

27Quelques participants, affichant un certain goût pour la musique québécoise, précisent aussitôt que cela ne les empêche surtout pas d’écouter de tout, partout (308). Car ceux et celles qui expriment une préférence plus ou moins marquée pour la chanson québécoise tendent à se justifier notamment par la qualité du contenu et s’empressent de mentionner d’autres genres ; ainsi cette collégienne de 20 ans déclare qu’elle écoute surtout des chansons québécoises (bien que certaines chansons françaises y soient assimilées…) en raison de leur contenu. Elle disqualifie les chansons en anglais, mais, paradoxalement, mentionne aussitôt le rap comme l’un de ses choix musicaux tout en préférant les séries américaines sur Netflix (206).

28Il semble aussi ardu de s’entendre sur ce qui se rapporte à un genre ou à un sous-genre. À titre d’exemple, le genre « classique » (à ne pas confondre avec la « musique classique » généralement délaissée, voire dénigrée) renvoie pour certains à des chansons populaires des dernières décennies, c’est-à-dire à Céline Dion, aux Beatles ou aux Cowboys Fringants, « toutes les p’tites affaires que tout le monde connaît même si t’en écoutes pas vraiment, quand la chanson part, tu la chantes » (305).

29Pour de nombreux jeunes rencontrés, les genres et sous-genres n’ont pas tellement d’importance ; c’est plutôt l’effet qu’une chanson a sur eux qui compte, la possibilité de l’associer à un état. Certains classent donc les chansons en fonction des émotions (ex. : chansons tristes ou joyeuses) ou des activités (ex. : détente, exercice). Dans notre corpus, les distinctions établies entre genres et sous-genres, entre préférences musicales et rejets, ne vont pas jusqu’à l’expression d’une hiérarchie explicite dans l’écoute de la musique, laquelle traduirait par exemple un palmarès en fonction des qualités musicales ou du contenu.

Associer la musique à des émotions, à des événements et à des contextes

30L’écoute de la musique est parfois associée à des émotions, à des contextes, à des circonstances ou à des événements. Un lien symbolique peut être établi entre un genre de musique — ou une chanson, ou un interprète — et une signification explicite. Ainsi un événement viendra-t-il perturber la vie d’un participant — préparation d’un voyage, rupture, nouvelle aventure amoureuse, voire décès : il saura trouver la musique qui l’accompagnera. Une jeune participante (304) mentionne qu’un ami lui a fait entendre du country à un moment important de sa vie et que cela l’a marquée — elle en écoute beaucoup maintenant et se souvient même du titre de la chanson entendue à ce moment crucial. Elle ajoute que si elle est triste, elle écoute de la « musique triste » et elle pleure : la musique doit la toucher, elle doit faire écho à ce qu’elle ressent. Cette autre participante écoute différents groupes ou genres, en fonction de ses activités (109) : Pink Floyd quand elle veut réfléchir, U2 ou du rap en anglais quand elle s’entraîne, du country pour donner le goût de danser, de la pop en voiture pour se désennuyer et du rap en français dans les moments plus difficiles.

31Le contexte peut également jouer, car on n’écoute pas nécessairement le même genre de musique, on ne l’écoute pas de la même manière, au travail, en voiture, voire en faisant ses travaux scolaires.

Une partition selon la langue

32À la catégorisation selon les états et les activités s’ajoute très nettement une classification que l’on pourrait qualifier de « globale » entre l’écoute de chansons en anglais, dominante, et l’écoute francophone, restreinte. Une telle capacité de distinction de la musique selon la langue ressort très nettement de nos entretiens. Les distinctions portent sur la qualité du contenu, son intérêt, la facture et le rythme. La plupart des jeunes Québécois de notre corpus vivent majoritairement sur une planète anglophone. Certains interviewés le disent clairement : leur nette préférence et leur consommation musicale dominante vont vers l’anglais. Seuls les quelques étudiants exprimant une préférence pour la musique québécoise ont parfois tendance à dénigrer les chansons anglaises, considérées comme superficielles.

33Comment expliquent-ils ce choix de la musique en anglais ? À peine quelques-uns font allusion aux industries culturelles anglo-saxonnes dont l’emprise domine, sinon écrase toute autre offre. Puisqu’ils écoutent la musique sans vraiment l’écouter, sur le mode de l’accompagnement à leurs activités quotidiennes, comme c’est le cas du plus grand nombre, on ne sera pas surpris d’entendre de la part de jeunes de notre corpus que ce qu’ils y recherchent, c’est un « beat » (104), un rythme, au point que pour certains d’entre eux, les paroles importent peu… « La musique en anglais sonne mieux à l’oreille », affirme un jeune homme (209). Aux yeux d’autres, la musicalité l’emporte sur les paroles (310). Une cégépienne de 24 ans affirme clairement que les paroles ne sont pas sa première raison de s’accrocher à une chanson (306). Une autre avoue qu’elle ne fait pas vraiment attention aux paroles (210), tout comme ce jeune électricien de 20 ans (100). Même si elle ne se reconnaît pas dans les paroles, cette jeune femme de 18 ans va quand même écouter une musique pour son seul rythme (102).

34Comme l’ont fait remarquer Cicchelli et Octobre, « l’exotisme américain [est] un marqueur générationnel » (2017, p. 41). On pourrait généraliser cette remarque en renvoyant plutôt à un univers globalement anglophone. Bien que des participants ne portent pas une grande attention aux paroles des chansons ou ne les comprennent pas lors d’une première écoute, ils apprécient le « son » en anglais. Cicchelli et Octobre distinguent une « appropriation globale » d’une « appropriation savante », faisant justement remarquer que « l’appropriation globale est liée au plaisir du son original […] et n’achoppe pas systématiquement sur les difficultés de compréhension linguistique » (ibid., p. 139). Il n’en va pas de même pour la lecture, par exemple, laquelle exige des compétences linguistiques beaucoup plus poussées, de sorte que la lecture d’ouvrages en anglais demeure très marginale parmi nos participants. Quant au visionnement de séries en anglais, relativement généralisé chez les jeunes de notre corpus, le défilement des images permet sans doute de parvenir à décrypter plus facilement le sens de l’action, lequel peut parfois être conjugué à du sous-titrage, en anglais ou en français. D’où l’interprétation globale que l’on peut avancer quant à la consommation de chansons en anglais peu ou prou décryptées : « […] chaque type de contenus culturels façonne un champ de possibles de la réception mettant en jeu de manière spécifique le lien entre compétence linguistique et appropriation linguistique » (ibid., p. 140).

35On peut également rappeler qu’Alfred Schütz, dans ses Écrits sur la musique, faisait déjà remarquer, dans un tout autre registre d’analyse, que toute expérience musicale se réfère moins à des objets externes qu’à « un flux dans le temps interne » dont l’unité fondamentale est le « thème » (2007). Pendant qu’il écoute, l’auditeur repère des styles, des expériences antérieures, des flux de musique, qu’il utilise comme cadre de référence pour reconnaître et interpréter son expérience musicale et ses genres préférés du moment. C’est à l’oreille que l’on repère ses choix, la trame sonore peut suffire.

36Nous sommes ici loin de la seule écoute de musique d’origine anglo-saxonne, mais les propos de Schütz permettent sans doute de mieux appréhender cet attrait distinctif pour le thème musical ou le rythme, qui constitue l’une des caractéristiques majeures de l’écoute contemporaine de la musique. Comme l’écrit Ravet :

Comme l’ont montré philosophes, musicologues et psychologues, la musique entretient un rapport privilégié au temps. Toute musique crée un temps spécifique, une durée, à la fois dans et en dehors du temps commun, permettant de suspendre le fil du temps chronométrique, de renouer avec d’autres temporalités, de se « syntoniser » avec d’autres (compositeurs ou auditeurs), de partager ensemble des émotions intenses. Maîtrise temporaire et symbolique du temps, la musique tisse un lien entre les individus, ouvre une fenêtre partagée (ibid., p. 274-275).

37Un participant explique d’ailleurs que, selon lui, la musique est un langage universel, qui transcende « n’importe quelle langue » (322). Selon Ravet, ce langage revêt toutefois certaines particularités :

Même avec paroles ou bien « descriptives », empreinte de « conventions » musicales qui font sens pour un groupe social, une pièce de musique n’offre pas de signification directe et n’est jamais univoque. […] Disons rapidement qu’il n’y a pas en musique de dispositif signifiant / signifié semblable à une langue, malgré l’existence de « langages » musicaux à la formalisation plus ou moins complexe faisant l’objet de « grammaires ». En ce sens, la communication est essentiellement d’ordre symbolique. Ce qui mène tout droit à interroger les représentations, la construction d’un sens (non pas littéral mais multiforme et sans traduction immédiate possible) pour un groupe, d’une signification accordée par un / des individus et en partie partagée, et les émotions qui y sont associées (ibid., p. 274).

38À l’opposé, quelques participants soutiennent que les textes en anglais « ont une façon de dire les choses qui est plus belle » (203), voire que « les paroles sont plus recherchées en anglais » (209). D’ailleurs, des jeunes distinguent le rap qu’ils qualifient de vulgaire de celui qu’ils trouvent poétique. D’autres encore justifient l’écoute en anglais par l’apprentissage de la langue… Ce même motif sera davantage appuyé quand il s’agira de justifier ses choix de séries en anglais généralement sur Netflix, mais il sera absent des choix de lecture, épars et majoritairement en français.

39Des jeunes reconnaissent à la chanson en français une qualité de contenu, une meilleure attention portée au texte et à la parole. Les participants plus attirés par la chanson francophone ou québécoise s’attardent plus longuement sur cet aspect. L’une (301) croit d’ailleurs qu’en anglais « ça passe mieux » si les paroles sont moins bonnes, ce qu’elle associe au fait que les francophones accordent plus d’importance aux paroles par souci de préservation de la culture. Elle accorde beaucoup d’importance aux paroles, peu importe la langue : « quand c’est con, ça ne m’intéresse pas. » Mais pour d’autres, cela n’est pas toujours suffisant pour justifier un déplacement de leurs choix hors l’anglais.

Un certain cheminement au sein de l’univers musical

40Pour les jeunes rencontrés, l’écoute de la musique peut ainsi varier au gré du hasard, des situations, des explorations musicales, des suggestions des proches parents et amis, des partitions du moment selon la langue, les genres ou les sous-genres. Elle peut explicitement s’engager dans la recherche active de chansons qui plaisent — récentes ou pas —, de la découverte d’artistes émergents ou de nouveautés musicales. Parfois même, elle prend la forme d’un retour sur des goûts musicaux passés, l’écoute intensive, pour un temps, des premières passions musicales. « On a tous eu une passe techno au secondaire pis quand ça passe c’est des souvenirs », explique une participante qui a recommencé à en écouter un peu (328). Elle est très souvent faite de va-et-vient entre divers genres musicaux, comme l’explique la même participante, qui déclare : « La même année ou dans la même semaine j’peux avoir des rages de trucs différents ».

De l’amateur à l’expert

41Dans certains cas pourtant, l’amateur devient expert d’un genre, maîtrise suffisamment ses goûts pour rapidement décoder ce qu’il préfère ou rejette. Ils sont peu nombreux dans notre corpus et il s’agit surtout de jeunes adultes masculins. Tel est le cas de ce jeune homme qui comprend maintenant pourquoi la musique qu’écoute sa mère est bonne, mais préfère celle qu’écoute son père (208) ; l’entretien a permis de voir qu’il fait preuve d’une connaissance relativement élargie des genres musicaux, qu’il en a écouté plusieurs, mais aussi qu’il est en mesure d’affirmer ses propres goûts. Comme Bellavance, Vallex et Ratté l’ont fait remarquer,

il importe de distinguer le répertoire, sur le plan descriptif, de l’usage de ce répertoire, sur le plan normatif ou symbolique. Sur le premier plan, empirique ou descriptif, l’éclectisme […] se mesure à la diversité du répertoire en ce qui a trait aux disciplines et aux genres consommés. Sur le second, évaluatif, il se mesure plutôt à leur faculté à apprécier des genres conventionnellement éloignés. Il y a en quelque sorte un éclectisme au sens faible (mesuré en ce qui a trait à la diversité de la consommation), et un éclectisme au sens fort (2004 , p. 40).

42Un autre jeune a appris à se constituer des listes qu’il associe à ses émotions du moment ou à ses diverses occupations. Il saura vite repérer la liste qui lui convient le mieux dans une situation ou un contexte en particulier. Celui-là devient prescripteur, d’une certaine manière, en faisant des suggestions à ses amis, il est reconnu comme la personne à consulter pour démarquer les genres musicaux, repérer les nouveautés, dénicher les artistes émergents. Une autre participante mentionnera que pour elle, la musique s’écoute à partir d’un disque, ce qui n’est plus la norme de la majorité de nos informateurs, parce que l’ordre des chansons est important, que le disque constitue une œuvre :

Je connais les CD par cœur. Je sais quelle toune commence exactement, ce qui vient après. Ça fait une relation avec le CD. Des fois, je le réécoute trois ans plus tard et je me rappelle encore l’ordre des chansons, ce qui va jouer ensuite. C’est pour ça que j’achète les CD mais sur mon cellulaire. Je vois le CD comme une œuvre d’art à part entière. Il a des choix : les artistes ne mettent pas n’importe quelle chanson après n’importe quelle autre. C’est comme les toiles, même abstraites, tu ne les places pas n’importe comment. Il y a des notions à respecter (406).

43C’est donc dire que l’écoute de la musique n’est pas nécessairement banale, même si elle se fait généralement en simultanéité avec une autre activité. Comme le mentionne Maisonneuve,

si l’écoute musicale semble aujourd’hui plus transparente et plus « passive », c’est parce que beaucoup de ces pratiques sont naturalisées. Cependant, la réflexivité régit la plupart des pratiques d’écoute. Plusieurs enquêtes réalisées à la fin des années 1990 ont montré combien l’amateur développe une expertise autour de l’écoute musicale, sachant ajuster situations d’écoute, type de musique écouté, type de médium (par exemple, radio ou disque compact) et de format (programme choisi ou laissé au hasard, zapping ou écoute intégrale d’un album, écoute en boucle d’un même morceau), humeurs et émotions visées. […] La « numérimorphose » de l’écoute musicale ne fait qu’en amplifier les caractéristiques : la multiplication des lieux d’écoute possibles grâce à la diversification et à la miniaturisation des équipements débouche sur l’invention de nouveaux ajustements entre moments, lieux d’écoute, formats musicaux et dispositions de l’auditeur. De même, la multiplication des fonctions techniques (playlists, favoris, fonction random, possibilités de modifier le format musical sur certains équipements — timbre, mixage) rend encore plus poreuse la frontière entre « création » et « réception » : la créativité se loge dans les mille interstices ouverts par la technologie telle que les différents agents du monde de la musique enregistrée l’y intègrent (2012, p. 86-87).

Divers degrés d’engagement dans l’écoute

44« Écouter de tout » au gré des algorithmes ne traduit d’ailleurs pas la diversité des modes d’écoute de la musique chez les jeunes. S’ajoutent parfois divers degrés d’engagement. Le choix de certaines chaînes musicales ou le zapping, la sélection ou la constitution de listes de lectures, se rendre à la médiathèque, aller voir des spectacles, par exemple, manifestent une certaine volonté de dépasser le simple statut d’auditeur impersonnel et renseignent, d’une certaine manière, sur le temps et l’effort que l’auditeur est prêt à fournir pour entendre ou découvrir de la musique qui lui plaît. Selon Maisonneuve,

même l’écoute « passive » du programme en flux d’une station de radio est un choix, celui de « se laisser prendre » : la station de radio n’est généralement pas choisie au hasard, et sa programmation, familière à l’auditeur, fait partie de son univers de goût : il l’a intégrée à sa construction progressive de repères, d’ajustements entre productions sonores, émotions, attentes vis-à-vis des « effets » de la musique et de ses fonctions dans un univers quotidien (2012, p. 86).

45On peut ainsi osciller entre le plaisir de l’écoute et la recherche explicite de genres traduisant des préférences personnelles, comme cette jeune fille (326) qui se rend à la médiathèque pour choisir des CD qu’elle ne connaît pas et faire des découvertes qui lui plaisent. Le degré d’engagement dans la construction des genres préférés est très variable.

46Nous avons interrogé les jeunes sur leur pratique quotidienne de la musique. Il ne s’agit que d’un versant d’un continuum d’action ; à l’échappée, certains nous ont fait part de leur fréquentation de spectacles musicaux. Grande amatrice de musique country, celle-ci a exprimé le souhait de se rendre à Nashville aux États-Unis pour y assouvir sa passion de ce genre de musique, ce qui suppose un investissement important en temps et en argent, et qui suppose également qu’il est possible que dans le passé elle ait été témoin de certains spectacles de l’endroit, ne serait-ce que par le visionnement d’une ou plusieurs captations, ou même par l’une de ses séries télévisées favorites nommée Nashville (304). Celui-là veut absolument se rendre en Belgique pour assister aux spectacles des « meilleurs DJ du monde » qui se réunissent dans le cadre d’un festival (100). Celle-ci a déjà assisté à un festival de musique électronique (319) ; ce jeune de 21 ans est allé souvent au Centre Bell à Montréal. Quelques-uns déclarent profiter d’un voyage pour assister à des spectacles musicaux, trouvant qu’écouter les artistes locaux permet de mieux découvrir d’autres cultures (314). D’autres voyagent presque exclusivement pour assister à des spectacles de musique (106).

47« Écouter de la musique » constitue une action sociale comme une autre, pouvant aller d’une infinité de modalités, de l’écoute comme activité secondaire à l’écoute attentive, au visionnement de vidéos ou de vidéoclips et à l’assistance à un spectacle musical. Dans le cas de la musique comme pratiquement dans le cas de la plupart des activités culturelles, l’investissement s’inscrit dans un continuum qui peut aller d’un faible niveau d’exigence à un fort engouement. Il en est ainsi des pratiques musicales en amateur (par exemple composer de la musique ou des chansons, s’exprimer comme auteur ou interprète, thèmes que nous n’avons pas exploités dans notre corpus) pouvant exiger un fort investissement en temps et en argent ou n’être qu’une activité passagère.

48On ne s’étonnera pas des observations que nous avons rapportées, car elles sont presque exclusivement centrées sur le versant quotidien et éphémère d’une activité culturelle spécifique pratiquée par presque tous les jeunes. Mais elles nous en disent long sur les rapports à la musique, à l’image de soi, aux valeurs.

49Il ne s’agit pas du seul versant, bien entendu, d’autres auditeurs pouvant se situer à d’autres endroits du continuum. Par exemple, certains informateurs font de leur écoute un moyen d’expression de leur identité, comme on l’a vu, ou plus spécifiquement comme moyen d’expression de leurs émotions et de leurs sentiments (304). Par procuration, des jeunes se servent de la musique pour exprimer ce qu’ils ressentent, elle médiatise des affects. L’activité peut être prolongée, à quelques occasions, d’investissements personnels intenses.

Discussion

Un trait culturel qui oscille entre éclectisme, omnivorisme et cosmopolitisme

50Quel sens donner à une telle pratique musicale que nous avons décrite à grands traits ? Par leurs choix musicaux très ouverts et diversifiés, des jeunes que nous avons rencontrés peuvent être dits omnivores. Pour Peterson, l’omnivorisme est la caractéristique d’une personne qui s’intéresse à des genres variés de musique. Les goûts des personnes omnivores sont perméables aux « frontières des nations, mais aussi [à] celles des classes sociales, des sexes, des ethnies, des relations, des âges ou d’autres frontières similaires » (2004, p. 159). Certains côtoient quotidiennement un univers musical sans frontières, se complaisent dans un tel univers. D’autres écoutent de la musique et se délectent de chansons en provenance d’une multitude de contrées, allant de l’Australie à l’Angleterre et à l’Amérique latine. Quelques-uns se sont découvert un engouement pour les chansons en espagnol, d’autres préfèrent la musique « indie ». En pratique, l’omnivorisme ne signifie pas qu’il faille avoir du goût pour tout, mais une ouverture à tout apprécier (Peterson, 2004). Plusieurs façons de mesurer l’omnivorisme ont été utilisées. Celles qui l’ont été le plus sont les goûts (les préférences) et les conduites (les actions), mais les connaissances constituent également un indicateur important de l’omnivorité (id.). 

51Par ailleurs, il faut aussi compter sur des jeunes qui, au contraire, valorisent un genre de musique ou des genres restreints. C’est par exemple le cas de cette jeune fille qui n’écoute que du country. Cela correspond davantage à un profil univore. Les préférences de l’univore se concentrent sur un genre ou, au mieux, sur quelques-uns (Peterson, 1992). Il y a également les jeunes qui n’écoutent que de la musique québécoise, au point parfois de faire de la musique anglophone un repoussoir de leurs goûts, ce qui contribue à définir leur identité et à s’affirmer. D’ailleurs, en se concentrant uniquement sur la fonction du goût, Bryson (1997) a montré que les dégoûts musicaux sont mis en avant pour construire des frontières entre les groupes en se fondant sur les identités raciale, ethnique, religieuse et régionale, et que cela se remarque davantage chez les groupes ayant un niveau d’éducation peu élevé.

52Des jeunes que nous avons rencontrés semblent se situer dans une phase d’exploration. Comme le mentionne Maisonneuve (2019), pour développer son attachement à la musique, il faut en écouter : cela permet également de forger ses goûts, qui peuvent se trouver dans la même lignée que ceux des parents — ou pas. Peterson (2004) signale que les jeunes générations sont généralement plus ouvertes que les autres, et que chaque génération l’est davantage que celle qui la précède. À cet égard, des jeunes d’aujourd’hui peuvent profiter d’un contexte favorable aux découvertes tous azimuts (genres, provenance, etc.). En effet, à la différence des générations qui les précèdent, les jeunes des années 1960 et 1970 ont vu dans leurs pratiques variées une alternative à la culture élitiste établie, et non pas une étape normale de leur maturation (id.). Ce serait à eux que l’on doit en large partie le mouvement d’intensification et de diversification des pratiques culturelles, lequel se serait poursuivi au fil des ans. Aujourd’hui, s’y ajoute le contexte technologique, et les jeunes ont donc le beau jeu pour faire des découvertes musicales variées, s’ils le souhaitent. En effet, Maisonneuve rapporte que

la généralisation de l’Internet et de la numérisation de la musique a accentué ce phénomène : elle a encore gonflé la taille de ce répertoire [répertoire éclectique, caractère omnivore], accru son accessibilité et sa portabilité, diversifié les modes de son appropriation et de sa recomposition par chacun et, surtout, élargi et densifié les formes d’échanges autour de cet objet de consommation et de construction de soi qu’est devenue la musique (2012, p. 88).

53Les jeunes baignent dans un univers technologique sans précédent. Toutefois, bien qu’ils soient généralement assez à l’aise avec les technologies, il ne faut pas penser que tous les maîtrisent. Les degrés de conversion au numérique sont assez variables. Dans une étude, Octobre (2010) rapporte également que même chez les jeunes, le rapport au numérique varie, et qu’il varie aussi selon les classes sociales. En outre, Maisonneuve observe que « même les digital natives issus des classes moyennes et supérieures ne sont pas toujours à l’aise pour s’orienter à partir des seules ressources en ligne, ou ne considèrent pas ces ressources comme privilégiées ou efficaces » (2019, p. 70). Cela dit, parmi les « amis » de jeunes rencontrés, il faut bien compter les médias sociaux, YouTube et compagnie. Ils sont ouverts aux « suggestions » liées aux technologies : « Vous avez aimé ceci, vous aimerez sans doute aussi cela ».

  • 4 Nous ne pouvons ici traiter en profondeur de ce débat sur l’omnivorisme, que Richard Peterson a con (...)

54Chez les jeunes rencontrés, l’écoute de la musique consiste en un trait culturel associant souvent une écoute et une autre activité, axée sur l’immédiateté de la consommation, ancrée dans le temps présent. La diversité de leurs choix, la voracité parfois éphémère, l’instantanéité de l’émotion recherchée font des jeunes de notre corpus des adeptes de la consommation musicale à la mode ou liée à une émotion, à un affect, à une activité. Coulangeon parle encore d’une « différenciation des attitudes culturelles fondée sur la variété des goûts » (2011, p. 117-118), voire d’une certaine voracité typique. Nous ne disposons pas des données pour le départager, mais il semble que leur attitude oscille entre omnivorisme, éclectisme et cosmopolitisme4. Certains des jeunes que nous avons rencontrés nous paraissent clairement être des omnivores par volume, c’est-à-dire qu’ils écoutent beaucoup de musique ; d’autres semblent être omnivores par composition, c’est-à-dire qu’ils écoutent de la musique de genres différents, caractérisés par des différences importantes du point de vue de la légitimité culturelle (Warde et Gayo-Cal, 2009), comme c’est le cas pour les jeunes qui écoutent de presque tout, du rap au classique.

55Cette ouverture musicale se traduit parfois en un intérêt réel pour l’autre et pour sa culture, comme c’est le cas de découvertes musicales faites par exemple en voyage ou dans le cadre de la préparation au départ : la musique et les paroles de chansons de même que les interprètes sont perçus comme une manière d’entrer en contact avec la culture de l’autre, de la découvrir et, éventuellement, de l’apprécier. En cela, ils peuvent parfois être dits « cosmopolites ».

Cosmopolitisme politique, cosmopolitisme culturel

56Pour revenir à notre question de départ, on peut se demander : les pratiques musicales des jeunes de notre corpus en font-elles pour autant des « citoyens du monde », des individus cosmopolites ? Certes, il est indéniable qu’ils vivent pratiquement dans un monde sans frontières, ils ne semblent pas se soucier de quelque barrière géographique que ce soit, la plupart ont déjà beaucoup voyagé. Comme on l’a vu, des jeunes ont accès en tout temps à tous les genres musicaux du moment, vivent dans une planète à consonance anglo-saxonne et connaissent très bien l’univers technologique qui abolit les distances et le temps.

57Mais il faut distinguer plusieurs formes de cosmopolitisme. Ainsi Thériault (2019) insiste-t-il sur la distinction entre un cosmopolitisme proprement politique, lié notamment à une conscience citoyenne mondiale et à diverses expériences d’organisation politique sur les plans national et international, et un cosmopolitisme culturel qu’il associe aux parcours identitaires à l’horizon d’un monde commun.

58Quoi qu’il en soit, la conclusion que l’on peut en tirer pour notre propos est que chacune des formes de cosmopolitisme que l’on peut éventuellement distinguer implique nécessairement une diversité d’engagements politiques et de pratiques culturelles. Ainsi le cosmopolitisme politique implique-t-il à des degrés divers une certaine « conscience » politique, une perspective internationale, une sensibilité à l’idée de citoyenneté mondiale. Il peut se traduire par des aspects spécifiques de cosmopolitisme culturel. Mais il n’en va pas de même pour le cosmopolitisme culturel, qui ne se prolonge pas nécessairement en un cosmopolitisme politique, d’autant plus que les activités culturelles sont fortement teintées de significations autour de l’image de soi et de l’individualisation des pratiques, d’un certain parcours identitaire, d’une « conscience internationale » plus ou moins confuse. Mais dans certains cas, le cosmopolitisme culturel peut être lié à certaines formes de cosmopolitisme politique ou du moins au sentiment d’appartenance à un même monde, comme nous avons pu en retracer quelques cas dans notre corpus.

59D’autant plus que l’on n’est pas « cosmopolite » de la même manière selon l’activité dans laquelle on s’engage : écouter de la musique au hasard de la journée, s’intéresser aux nouvelles internationales, préparer un voyage, effectuer des choix de lecture, assister à un spectacle musical, tout cela n’implique pas nécessairement le même degré d’intensité dans une certaine « conscience du monde ». Dans leur étude portant spécifiquement sur le cosmopolitisme culturel, Vinzenzo Cicchelli et Sylvie Octobre (ibid.) démarquent à peine 17 % des 1 665 jeunes Français âgés de 18 à 29 ans qu’ils ont interrogés comme relevant du « cosmopolitisme principiel », le tiers entre dans la catégorie de « cosmopolitisme involontaire » et autant dans la catégorie de « cosmopolitisme sectoriel ». On n’est pas nécessairement un cosmopolite par ses pratiques culturelles même si celles-ci peuvent parfois y mener.

Conclusion

60Grands amateurs de musique, baignant quotidiennement dans un univers sonore, laissant libre cours à leurs choix du moment, les jeunes de notre corpus n’en affirment pas moins leur liberté et se représentent leur écoute de la musique comme un reflet, en partie du moins, de leur personnalité. On peut dire que de nombreux traits que nous avons décrits relèvent de modes d’appropriation de la culture qu’ils partagent avec une majorité de la population : individualisation des pratiques, pratiques identitaires, affirmation de soi, valeurs d’autonomie, un certain éclectisme comme norme de bon goût.

61Il faut y voir sans doute le trait culturel d’un certain éclectisme fortement enraciné dans la génération des jeunes de notre corpus. Dans la mesure où ce que nous avons observé relève d’un cosmopolitisme proprement culturel, parfois superficiel, l’engagement proprement cosmopolite peut ne pas être au rendez-vous, même si nous avons retracé quelques cas de jeunes manifestant une véritable « conscience internationale ». Il n’est pas dit cependant qu’au regard de pratiques culturelles plus engageantes (certaines formes de mobilité internationale, des choix de lecture bien affirmés) on ne retrouverait pas chez certains une liaison plus étroite entre plusieurs formes de cosmopolitisme, parfois même un réel ancrage de cosmopolitisme culturel dans un cosmopolitisme proprement politique. À ce stade de notre recherche, notre corpus ne nous permet pas de distinguer vraiment ce qui relève de la mobilité superficielle au sein des genres musicaux d’attitudes relevant d’un certain capital culturel.

62Pour ce faire, il nous faudra scruter plus attentivement d’autres aspects : imaginaires du voyage, certaines pratiques de consommation témoignant d’une grande conscience écologique, pratiques de lecture associées à la recherche d’informations internationales, etc. De plus, il nous faudra analyser les trajectoires d’entrée, de retrait, parfois de sortie, de l’engagement cosmopolite. Le rapport à l’espace, local, « global », national, international, reste à explorer. Comme mentionné, « l’identité jeune » transparaît nettement au travers des pratiques culturelles des jeunes de notre corpus. Et enfin nous avons délibérément laissé en sourdine la question des sources d’influence souvent à l’origine des choix musicaux, de voyage, de visionnement de lecture.

63Rappelons enfin que les processus plus généraux de rapports à la musique que nous avons décrits demanderaient à être plus nuancés en fonction des variables sociologiques classiques : âge, genre, statut, etc. Car il est sans doute probable que les jeunes travailleurs ont un rapport différent de celui des collégiens. La trajectoire sociofamiliale et professionnelle influence assurément certains choix musicaux. Le niveau d’éducation atteint peut s’avérer décisif ou non. Notre corpus ne nous permet pas de nous aventurer sur ce terrain, que seul permettrait un échantillon représentatif sous forme d’une enquête quantitative auprès d’un panel de jeunes.

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Bibliographie

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Notes

1 Statistique Canada, Enquête sociale générale de 2015, cycle 29 sur l’emploi du temps, fichier de données à grande diffusion 89M0034X.

2 La littérature sur le cosmopolitisme est considérable. Nous ne pouvons ici procéder à une revue de littérature extensive, laquelle déborderait le cadre du présent article. Précisons cependant que pour notre propos, nous nous inspirons surtout de Vincenzo Cicchelli (2016) ; Vincenzo Cicchelli et Sylvie Octobre (2017) ; Louis Lourme (2012) ; Joseph Yvon Thériault (2019). C’est bien Ulrich Beck (2006) qui a contribué à populariser ce phénomène et à engager de nombreux travaux d’analyse et de réflexion.

3 Projet de recherche subventionné par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les entrevues ont été réalisées par les membres de l’équipe ; les citations sont suivies du numéro de l’entrevue d’où elles sont tirées.

4 Nous ne pouvons ici traiter en profondeur de ce débat sur l’omnivorisme, que Richard Peterson a contribué à populariser, à partir de l’étude des genres musicaux, faut-il le noter, ni celui sur la notion d’éclectisme, tel que Olivier Donnat (1994) en a traité. L’ouvrage cité de Cicchelli et Octobre y consacre un chapitre complet (chap. IV, p. 109-131). Dans son ouvrage de 2014, Sylvie Octobre fait remarquer que l’omnivorisme des goûts musicaux est un trait de jeunes dans la vingtaine, ce que nous retrouvons également dans notre corpus.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Gilles Pronovost, Marie-Claude Lapointe et Anne-Sophie Prévost, « Musique et cosmopolitisme culturel chez les jeunes »Communication [En ligne], Vol. 38/1 | 2021, mis en ligne le 15 juin 2021, consulté le 25 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/communication/13680 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/communication.13680

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Auteurs

Gilles Pronovost

Gilles Pronovost est professeur émérite au Département d’études en loisir, culture et tourisme de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Courriel : Gilles.pronovost@uqtr.ca

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Marie-Claude Lapointe

Marie-Claude Lapointe est professeure agrégée au Département d’études en loisir, culture et tourisme de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Courriel : Marie-claude.lapointe@uqtr.ca

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Anne-Sophie Prévost

Anne-Sophie Prévost est assistante de recherche au Département d’études en loisir, culture et tourisme de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Courriel : Anne-sophie.prevost@uqtr.ca

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