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Notes de lecture

Marc Côte, Signatures sahariennes, terroirs et territoires vus du ciel. Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence, 2012, 307 p.

François Bart
p. 130-132
Référence(s) :

Marc Côte, Signatures sahariennes, terroirs et territoires vus du ciel. Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence, 2012, 307 p.

Texte intégral

1Le livre de Marc Côte a été conçu d’une part à partir de la notion de signature, explicitée dès la présentation liminaire : « Chaque époque, chaque population, a laissé son empreinte sur la vaste toile de fond du désert. » (p. 5). D’autre part, il s’agit de « terroirs et territoires vus du ciel » : « Observer le désert depuis Sirius, pratiquer systématiquement cette démarche multi-scalaire, ce n’est pas seulement se donner une autre vision de la réalité saharienne, c’est s’assurer les moyens de mieux connaître, et de mieux comprendre. » (p. 6). Autant dire qu’images satellites, photographies, croquis, cartes éclairent brillamment le texte et contribuent à rendre particulièrement séduisante la présentation de ce travail qui concerne l’ensemble de l’espace saharien, du Maghreb-Machrek au Sahel méridional. Seules sont exclues quelques grandes vallées de fleuves allogènes, Nil essentiellement, Niger aussi.

2L’ouvrage est composé en cinq parties, consacrées respectivement aux oasis, aux ksour, aux mises en valeur agricoles modernes, aux villes et à d’autres signatures contemporaines sous forme de « traces et balafres » (p. 245). L’ensemble constitue un véritable monument éditorial où un texte riche et très bien écrit explicite d’innombrables images et documents, qui constituent une mine d’informations sur les paysages sahariens contemporains et leur signification géographique. On compte en effet, toutes figures confondues – images satellites (2003-2008), croquis, photographies… – pas moins de 340 documents de grande qualité, qui ne sont pas seulement des illustrations mais qui constituent le socle de la démarche géographique de l’auteur. Comme il le dit lui-même, page 5-6, l’auteur a « eu envie d’appréhender le Sahara dans sa globalité, et de comprendre sa diversité, d’imbriquer le local dans le global ». Le résultat est pour le moins impressionnant.

3La première partie « Signatures des terroirs d’antan : les oasis » (p. 9) est la plus fournie et peut-être la plus spectaculaire. La démarche est rigoureuse : problèmes de définition d’abord, typologie très fouillée ensuite. On visite ainsi, par le texte, l’image et le croquis les oasis de sources, les oasis fluviatiles (vallée du Ziz), de gorges (Sud marocain), de vallées, les oasis artésiennes (à structure rayonnante), à foggaras, à palmeraies-alvéoles, les oasis-forêts… La relative complexité de cette classification est éclairée, pour chaque cas, par un ensemble d’images satellites, de photos au sol, de cartes de localisation et de croquis, qui emportent l’adhésion.

4La deuxième partie traite du ksar, « terme saharien, qui désigne l’agglomération, village ou petite ville, de structure ramassée… » (p. 92). C’est d’un « patrimoine de 1 200 ksour » qu’il s’agit, souvent en mauvais état : on trouve, sous forme de tableau (p. 154) « un essai de dénombrement des ksour sahariens » et une réflexion sur cette architecture guidée par des impératifs bioclimatiques et des préoccupations d’ordre culturel.

5Avec la troisième partie, on bascule davantage vers des signatures contemporaines, celles des mises en valeur de terroirs modernes. Comme le rappelle opportunément l’auteur, « Il n’y a jamais eu autant de production agricole, autant de palmiers au Sahara qu’aujourd’hui (p. 162) : mise en valeur paysanne d’exploitations individuelles (Libye, Algérie…), périmètres d’État (Égypte, Libye, Tunisie…). M. Côte intègre aussi les fameux paysages de l’agriculture irriguée « sous rampes-pivots » (p. 183), avec ses cercles tracés dans le désert d’Égypte, de Libye, et « la révolution hydraulique » (p. 190) des pompages et forages.

6Le développement urbain, abordé en quatrième partie est une autre signature du Sahara d’aujourd’hui, même si le désert porte encore des traces, discrètes, de villes mortes dont l’inventaire est présenté p. 203. Marc Côte mène une analyse très fine des dynamiques spatiales urbaines autour d’innombrables exemples abondamment illustrés, parmi lesquels on peut citer Tozeur, Tombouctou, Agadès, Gao, Tamanrasset, Arlit, Hassi Messaoud, Khartoum, Nouakchott… Il parle de révolution urbaine et affirme : « Les Sahariens ne sont plus des sédentaires ou des nomades, ce sont des citadins » (p. 240).

7La dernière partie « Autres signatures : traces et balafres » (p. 245) est une des plus originales : si elle évoque des aspects classiques (pistes, ensablement, le sel), elle aborde des points beaucoup plus mal connus, tels que les cuvettes de réception des eaux usées, les cicatrices minières, l’impact des frontières, les camps de réfugiés…

8Ces derniers exemples acheminent le lecteur vers une conclusion teintée d’un certain pessimisme : le renforcement du compartimentage du Sahara (15 millions d’habitants hors vallée du Nil), où souvent « les signatures sont devenues cicatrices » (p. 296). Mais aussi « Le Sahara s’ouvre à une nouvelle mondialisation » (p. 297).

9Tous ces aspects font que l’ouvrage de Marc Côte est fondamental et exceptionnel, un modèle d’approche géographique. La lecture en est très agréable et on y trouve des index détaillés. Son prix modique par rapport à la somme de travail et de connaissances qu’il représente, va lui assurer, il faut le souhaiter, une large diffusion.

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Pour citer cet article

Référence papier

François Bart, « Marc Côte, Signatures sahariennes, terroirs et territoires vus du ciel. Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence, 2012, 307 p. »Les Cahiers d’Outre-Mer, 261 | 2013, 130-132.

Référence électronique

François Bart, « Marc Côte, Signatures sahariennes, terroirs et territoires vus du ciel. Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence, 2012, 307 p. »Les Cahiers d’Outre-Mer [En ligne], 261 | Janvier-Mars 2013, mis en ligne le 30 octobre 2013, consulté le 16 mai 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/com/6810 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/com.6810

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Auteur

François Bart

Professeur émérite Université Bordeaux 3

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CC-BY-NC-ND-4.0

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