Une Afrique de l’Ouest en mutation
Texte intégral
1L’Afrique de l’Ouest, comme la plupart des autres parties du continent, est en pleine mutation. Il s’agit ici, contrairement à l’approche la plus commune, d’apprécier ce changement non seulement dans les régions littorales traditionnellement ouvertes à l’innovation mais surtout dans les régions intérieures, souvent qualifiées d’enclavées, mais dont les grands espaces de savanes sont aussi largement concernés par le vent du changement. Partout les mutations démographiques, les changements dans les techniques de culture, l’émergence de nouvelles filières et de nouveaux marchés, la consolidation de nouveaux pôles de développement, les impacts de divers acteurs du développement, etc., nourrissent une nouvelle géographie où se côtoient des marges plus ou moins isolées et des espaces porteurs de progrès, multipliant et renforçant ainsi des gradients de toutes sortes. Ces nouvelles complexités s’expriment tout spécialement dans l’évolution des rapports milieux-sociétés, dans les enjeux de gestion des ressources et dans des constructions territoriales où cohabitent souvent des réseaux issus de périodes et de modèles diversifiés. La crise, avec toute l’ambiguïté que peut receler ce terme, n’est décidément pas la seule grille d’analyse de ces pays, souvent parmi les plus pauvres du monde.
2Ce numéro ne peut aucunement prétendre dresser le moindre bilan de phénomènes aussi importants. Il procède plutôt par quelques touches susceptibles de valoriser un certain nombre d’indicateurs.
3Le texte de Guy Faure aborde la question primordiale de la valorisation agricole des savanes par les prismes successifs des turbulences démographiques (croissance, flux migratoires), de l’intégration croissante au marché et du rôle des divers acteurs. Les soubresauts des filières cotonnières, l’essor du vivrier marchand sont quelques-uns de ces mouvements significatifs qui se déploient dans des espaces divers par leurs densités, leurs ressources, leur situation par rapport à la ville et aux axes de développement. Les mutations sont à apprécier à des échelles micro- (la famille) comme macro- (l’État).
4Sébastien Larrue utilise, à propos du Sénégal oriental, la présence ou l’absence du karité, arbre oléagineux essentiel dans beaucoup de régions soudaniennes, comme un indicateur des mutations sociales beaucoup plus que climatiques de cette région originale. Il situe habilement son questionnement à la rencontre de fondements naturels et de raisons sociales.
5Dans un milieu plus arrosé au contact de la forêt guinéenne, Philippe Kersting analyse le contact forêt-savane dans le Parc National de la Comoé en Côte-d’Ivoire par le biais des dynamiques pédologiques et végétales.
6L’étude de Henri Motcho apporte un éclairage original sur les acteurs des processus d’urbanisation dans un pays encore très peu urbanisé : le Niger.
7Il démonte avec précision les stratégies des chefferies traditionnelles à l’intérieur de la communauté urbaine de Niamey, la capitale. Cet exemple complète utilement les études qui, dans d’autres villes d’Afrique, ont montré le rôle essentiel de certains chefs coutumiers dans la spéculation foncière et immobilière péri-urbaine.
8Enfin Jérôme Lombard, à propos du Sénégal et des suites de la catastrophe du Joola survenue en 2002, évoque le risque transport et ses enjeux de ruptures/continuités territoriales. Dans beaucoup de ces pays le transport peine à construire le territoire même dans un État aussi ouvert et urbanisé que le Sénégal. Dans ce domaine, malgré des progrès très spectaculaires, la mutation est encore largement à venir.
Pour citer cet article
Référence papier
François Bart, « Une Afrique de l’Ouest en mutation », Les Cahiers d’Outre-Mer, 229 | 2005, 3-4.
Référence électronique
François Bart, « Une Afrique de l’Ouest en mutation », Les Cahiers d’Outre-Mer [En ligne], 229 | Janvier-Mars 2005, mis en ligne le 13 février 2008, consulté le 12 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/com/1161 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/com.1161
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